Les membres de la section canadienne du
Groupe interparlementaire Canada-États-Unis ont participé à la 64e
réunion annuelle de la Midwestern Legislative Conference du Council of State
Governments. Une vaste gamme de sujets ont fait l’objet de discussions,
dont les questions relatives à la frontière, l’énergie et la politique
« Acheter américain ».
La frontière
La Conférence portait en grande partie
sur les questions relatives à la frontière canado-américaine, notamment :
·le point sur la frontière;
·la frontière commune de l’avenir;
·la politique « Acheter américain ».
Le point sur la frontière
Les délégués à cette séance ont eu
droit à un aperçu des opérations frontalières et de la situation actuelle de la
circulation des biens et des personnes à la frontière canado-américaine. Comme
le savent bien les délégués du Groupe interparlementaire Canada-États-Unis,
notre pays est le plus important marché d’exportation de nos voisins du Sud et
vice-versa. Les économies de nos deux pays sont hautement intégrées et toute
inefficience qui constitue une entrave à cette intégration réduit notre
compétitivité sur la scène internationale. En cette période de crise
économique, il est important de renouveler nos efforts pour réduire les
facteurs d’inefficience à la frontière.
Au cours d’un survol de la situation,
les délégués ont appris que depuis huit ans :
·le passage des camions à la frontière stagne ou
diminue;
·le nombre de touristes à la frontière recule;
·l’attente augmente (plus longue pour les
camionneurs qu’en 2002);
·l’industrie du camionnage sous-utilise le
système Free and Secure Trade (FAST);
·bien qu’il y ait 117 points d’entrée à la
frontière canado-américaine, 85 % des passages se font dans cinq de ces
points.
De plus, parce que la population a
l’impression que la frontière est de plus en plus « épaisse », elle a
moins tendance à la franchir à des fins personnelles. Le régime d’inspection
idéal à la frontière est celui qui renforce la sécurité, mais n’impose que peu
ou pas d’entraves supplémentaires sous forme d’attentes ou de coûts. Selon les
présentateurs de la conférence, les régimes de sécurité mis en place après les
évènements du 11 septembre sont encore loin de cet idéal, et leurs effets
négatifs sur l’économie des deux pays continuent de se faire sentir.
Les délégués ont appris que nous devons
« repenser » la façon dont nous gérerons la frontière à l’avenir. Les
présentateurs ont proposé trois solutions pour nous permettre d’y
parvenir :
·percevoir la frontière comme un problème
« commun » et la gérer selon une approche binationale;
·faire davantage appel aux capacités et aux
organismes régionaux afin de régler les problèmes à la frontière;
·adopter une approche stratégique axée sur la
notion de périmètre pour assurer la sécurité à la frontière.
On a aussi souligné que la situation à
la frontière canado-américaine était très différente de celle à la frontière
entre les États-Unis et le Mexique et que les politiques conçues pour la
frontière sud ne fonctionnent pas pour celle du nord.
La frontière commune de l’avenir
Les participants ont pris note du fait
que le Canada et les États-Unis jouissent d’une relation privilégiée misant sur
des valeurs communes issues d’une longue tradition de coopération et de liens
familiaux et d’amitié. En plus de cette profonde relation, nos installations
communes à la frontière facilitent le plus important commerce bilatéral au
monde, puisque les échanges bilatéraux se chiffrent à 1,6 milliard de
dollars et que 300 000 voyageurs franchissent la frontière par jour. Le Canada
est le principal marché d’exportation de 37 des 50 États américains.
De nombreux avantages en découlent, dont 7,1 millions d’emplois
aux États-Unis et 3 millions au Canada. Cette collaboration sans précédent
peut remettre nos économies sur la bonne voie.
Cependant, on a aussi signalé un recul
des échanges entre les deux pays et quelques tensions. Des deux côtés de la
frontière, la communauté d’affaires s’inquiète de plus en plus de ce que l’on
appelle l’ « épaississement de la frontière », source
d’incertitude due aux longues attentes et attribuable à l’instauration de
nouvelles inspections et de nouveaux frais, au relèvement de ces derniers, à la
multitude de règlements provenant des différents ministères et des écueils en
matière d’infrastructure. Cette situation entraîne des coûts élevés. Alors que
l’Europe progresse vers la mise en place d’un environnement frontalier intégré,
nous faisons le contraire – l’avantage concurrentiel découlant de
l'Accord de libre-échange nord-américain (ALENA) s’érode. Il règne une certaine
frustration au sein de la communauté d’affaires canadienne et américaine, car
les nombreuses mesures pratiques collaboration plus étroite entre les
organismes transfrontaliers des deux pays, par exemple, susceptibles de réduire
les coûts ne sont pas encore prises.
Les délégués ont appris que les
Chambres de commerce du Canada et des États-Unis ont formulé des
recommandations pratiques à court terme à l’intention des de leurs
gouvernements respectifs afin de réduire les coûts liés à la frontière et
d’accroître la compétitivité des deux économies. Elles ont entre autres
recommandé que :
·les gouvernements canadien et américain
intensifient leurs efforts de commercialisation du programme NEXUS pour
atteindre un million de participants;
·les gouvernements canadien et américain
continuent d’élargir les programmes de dédouanement à la frontière canadienne
et étendent ces programmes aux postes terrestres et aux ports;
·le nombre d’employés et les heures de services
aux postes frontaliers soient augmentés et que l’on donne davantage de
formation;
·l’on fasse davantage appel aux moyens
technologiques pour diminuer les attentes à la frontière et pour la sécuriser.
Compte tenu de la situation économique
actuelle, il est encore plus urgent d’agir, et les Chambres estiment que leurs
recommandations constituent un moyen pratique d’améliorer la circulation des
biens et des personnes à la frontière.
Politique d’achat aux États-Unis
À la réunion, les membres de la section
canadienne du GIP ont poursuivi leurs efforts dans le dossier des dispositions
concernant l’achat aux États-Unis et ils ont expliqué aux législateurs des
États du Midwest, comme ils l’ont fait à d’autres réunions des législateurs et
des gouverneurs, quels sont les effets préjudiciables de ces dispositions, que
contient l’American Recovery and Reinvestment Act (ARRA), sur les deux
pays. Le but de ces dispositions est certes de veiller à ce que les activités
d’approvisionnement fédéral des États-Unis s’harmonisent aux obligations du
pays en matière de commerce international, mais les administrations d’État et
municipales des États-Unis ne sont pas liées par les accords de commerce
international conclus au niveau fédéral et peuvent donc dépenser les fonds
prévus par l’ARRA d’une manière qui restreint les activités des exportateurs
canadiens en tant que fournisseurs. Certains groupes au Canada, dont la
Fédération canadienne des municipalités, adoptent des résolutions en faveur
d’une politique d’approvisionnement au Canada et de mesures semblables, mais
des entreprises – et des emplois – dans les deux pays risquent de subir le
contrecoup de telles mesures protectionnistes, ce qui pourrait porter préjudice
à la relation commerciale mutuellement profitable qu’entretiennent le Canada et
les États-Unis; cette relation bilatérale se traduit par des échanges d’une
valeur annuelle approximative de 694 milliards de dollars. À titre d’exemple de
mesures prises par des groupes canadiens, voici une résolution qu’a adoptée la
Fédération canadienne des municipalités en juin 2009 :
« Il est en outre résolu
que la FCM soutienne les municipalités
qui décident d’adopter des politiques d’approvisionnement favorisant des
échanges libres et équitables, en veillant à ce que les projets
d’infrastructures municipaux [...] soient réalisés à l’aide de biens et de
matériaux fournis uniquement par des entreprises dont le pays d’origine
n’impose pas de restrictions commerciales à l’encontre des biens et matériaux
manufacturés au Canada; »
À l’occasion de réunions avec les
législateurs fédéraux et d’État et avec les gouverneurs, les membres de la
section canadienne du GIP continueront de faire pression en faveur d’échanges
commerciaux libres et équitables entre les deux pays.
Les délégués américains ont compris le
message du Canada et ont convenu qu’une guerre commerciale était la dernière
chose dont les deux pays avaient besoin. Ils s’entendaient aussi pour dire que
les législateurs fédéraux devaient être mieux renseignés afin de mieux
comprendre les répercussions possibles de la politique « Acheter
américain ». La Midwestern Legislative Conference a même poussé
l’idée plus loin en indiquant qu’il est important que le Canada et les
États-Unis respectent l’engagement qu’ils ont pris de maintenir leurs marchés
respectifs accessibles aux producteurs canadiens et américains de biens et de
services, permettant ainsi d’atteindre les objectifs nord-américains en matière
de concurrence et de renforcer la structure économique canado-américaine. Pour
ce faire, les délégués ont adopté les résolutions suivantes :
·que la Midwestern Legislative Conference (MLC)
encourage les gouvernements locaux, étatiques et provinciaux à adopter des
politiques d’achats ouvertes dans nos régions et entre nos deux pays;
·que la MLC déploie des efforts concertés pour
mieux faire connaître et apprécier au niveau régional les avantages découlant
de la relation commerciale ouverte entre le Canada et les États-Unis;
·que cette résolution soit présentée aux
gouvernements fédéraux, étatiques et provinciaux appropriés.
Les délégués canadiens du Groupe
interparlementaire Canada-États-Unis appuient fortement ces résolutions.
Énergie
La discussion sur l’énergie portait sur
le commerce binational de l’énergie et sur ses répercussions sur les États du Midwest
américain. Voici comment on a résumé les échanges de produits énergétiques
entre le Canada et les États-Unis :
·le commerce bilatéral de produits énergétiques
s’est chiffré à 100 millions de dollars en 2007;
·les investissements transfrontaliers directs
dans le secteur de l’énergie se chiffrent à environ 90 milliards de
dollars;
·le Canada est le principal fournisseur des États-Unis,
vers lesquels il exporte 1,8 million de barils de pétrole par jour;
·le Canada fournit 82 % des importations de
gaz naturel des États-Unis.
En outre, plus de la moitié des
exportations canadiennes de pétrole brut aux États-Unis est destinée au marché
du midwest, favorisant ainsi la croissance économique de la région grâce
aux nouveaux investissements dans les raffineries de pétrole et le prolongement
des réseaux de pipelines, et créant des emplois pour la population locale.
Voici comment on a résumé les répercussions sur l’économie de la région :
·l’augmentation des exportations canadiennes de
pétrole brut permet à la région du nord du midwest d’être au début de la
chaîne d’approvisionnement plutôt qu’à la fin de celle du Golfe du Mexique;
·le pétrole brut du Canada constitue une source
d’approvisionnement nord-américain sécuritaire et stable pour les raffineries
du midwest;
·le prolongement du réseau de gazoducs et
l’augmentation du nombre d’installations de stockage de gaz naturel du midwest
offrent la souplesse nécessaire pour que les besoins en approvisionnement
soient satisfaits des deux côtés de la frontière en période de pointe;
·des emplois sont créés au Canada grâce au
développement énergétique et ses activités connexes; des emplois sont créés aux
États-Unis grâce aux investissements dans les raffineries et les pipelines et
aux fabricants régionaux d’équipement lourd utilisé par l’industrie canadienne
des sables bitumineux;
·pour chaque dollar investi directement dans les
activités liées à la construction, un autre dollar est dépensé indirectement
dans l’économie locale.
Malgré son impact économique, au dire
des présentateurs, le développement du commerce de l’énergie présentait des
défis. En voici quelques-uns :
·le manque d’uniformité de la réglementation
fédérale, étatique et provinciale, souvent conflictuelle;
·des processus organisationnels d’obtention de
permis complexes, longs et redondants;
·les défis du marché comme les contraintes
financières et le faible niveau et la volatilité des cours des produits de
base;
·les défis environnementaux et l’opposition des
parties prenantes à la production d’énergie d’origine fossile en Amérique du
Nord.
Les participants ont proposé certaines
solutions à ces défis :
·encourager la coopération transfrontalière et la
rationalisation de la réglementation;
·élaborer des régimes réglementaires
d’approbation des projets plus prévisibles et rapides;
·accroître la mobilité transfrontalière des
travailleurs;
·encourager la communication entre les organismes
de réglementation américains et canadiens afin qu’ils se communiquent leurs
pratiques exemplaires et qu’ils élaborent des stratégies cohérentes;
·mettre les intervenants à contribution le plus
tôt possible au cours du processus afin de cerner et de résoudre les problèmes
au premier stade du projet.
Conclusion
Les membres canadiens du Groupe
interparlementaire Canada-États-Unis ont jugé instructives ces discussions qui
leur ont donné l’occasion d’exprimer leurs opinions sur la relation commerciale
canado-américaine et, plus particulièrement, sur les échanges de produits
énergétiques. Ils ont souligné l’importance de ces derniers pour les deux pays
et celle d’une collaboration canado-américaine visant à réduire les obstacles à
la croissance. Ils étaient tout particulièrement satisfaits de l’appui de la Midwestern
Legislative Conference à la préservation de l’ouverture et de
l’accessibilité des marchés canadiens et américains, et des résolutions
adoptées en ce sens.
Respectueusement soumis,
L’hon. Jerahmiel Grafstein, c.r.,
sénateur
coprésident
Groupe interparlementaire
Canada-États-Unis
Gord Brown,
député
coprésident
Groupe interparlementaire
Canada-États-Unis