Logo Section canadienne du ParlAmericas (ParlAmericas)

Rapport

Introduction

Une délégation de cinq parlementaires représentant la section canadienne de ParlAmericas s’est rendue à la ville de Guatemala, au Guatemala, du 19 au 23 janvier 2013, puis à San Salvador, au Salvador, du 23 au 26 janvier 2013. Dirigée par M. Earl Dreeshen, député, la délégation était formée du sénateur Jim Munson et des députés François Pilon, Scott Simms et Bernard Trottier. Les parlementaires étaient accompagnés de Mme Guyanne Desforges, Secrétaire d’association, et de M. Andre Barnes, analyste de la Bibliothèque du Parlement.

Cette visite bilatérale s’inscrivait dans l’objectif de renforcer les liens parlementaires entre le Canada et le Guatemala et le Salvador; de promouvoir ParlAmericas en tant qu’organe de liaison entre les parlements des Amériques, et de favoriser le dialogue dans l’hémisphère sur des questions d’intérêt mutuel, comme les débouchés commerciaux et les possibilités d’investissement, les droits humains, et les conditions socioéconomiques.

Le Guatemala, plus grand pays d’Amérique centrale et économie la plus importante de la région, est un partenaire clé du Canada et constitue le point de mire de l’engagement canadien à l’égard de la sécurité en Amérique centrale. Le Canada entretient avec le Guatemala des liens diplomatiques et commerciaux solides, en plus de jouer un rôle actif dans une foule de dossiers : protection des droits humains; commerce et investissement; responsabilité des entreprises; renforcement de la sécurité et de la justice. Au cours des dernières années, des visites de haut niveau, dont celles du gouverneur général en 2009 et en 2012, et de la ministre d’État aux Affaires étrangères (Amériques), à quatre reprises depuis 2009, ont permis de rapprocher davantage les deux pays.

Le Salvador est, lui aussi, un important partenaire du Canada en Amérique centrale et un pays clé pour l’engagement du Canada dans les Amériques. L’année 2011 a marqué le 50e anniversaire des liens diplomatiques entre le Canada et le Salvador. Les deux pays jouissent de relations commerciales en pleine croissance, l’échange de marchandises entre eux ayant totalisé 165,6 millions de dollars en 2011 (hausse de 34,3 % par rapport à 2010). En 2010, le Canada a conclu avec le Salvador un accord de type « ciel ouvert » sur le transport aérien. Les deux pays travaillent actuellement à faire signer et ratifier cet accord dans les meilleurs délais.

ParlAmericas joue un rôle important dans l’hémisphère en ce qu’elle vise à encourager la mise en commun d’expériences et de pratiques exemplaires entre ses membres. Elle cherche à renforcer le rôle des parlements dans le développement de la démocratie; à promouvoir l’harmonisation de la législation; et à renforcer l’intégration hémisphérique et le développement durable et harmonieux dans la région. Cette visite bilatérale a fourni aux délégués canadiens une précieuse occasion de cultiver de bonnes relations entre les parlementaires canadiens, guatémaltèques et salvadoriens. Elle a aussi permis aux délégués canadiens d’entamer une discussion franche et ciblée avec des décideurs de la région, de se faire une meilleure idée de l’état des intérêts canadiens, de promouvoir les valeurs et les intérêts du Canada, et de se familiariser globalement avec les défis que doivent surmonter les sociétés guatémaltèque et salvadorienne.

VISITE BILATÉRALE AU GUATEMALA

A.   Rencontre avec l’ambassadeur du Canada au Guatemala

Le 21 janvier, les délégués canadiens ont rencontré Hugues R. Rousseau, ambassadeur du Canada au Guatemala, son directeur des programmes politiques, et le directeur de la sécurité de l’ambassade, à l’ambassade du Canada à la ville de Guatemala. Ils ont obtenu un compte rendu exhaustif des relations entre le Canada et le Guatemala, ainsi qu’un aperçu des dossiers chauds.

On a souligné que le Canada et le Guatemala ont célébré en 2011 le 50e anniversaire de leurs relations diplomatiques officielles. Le rôle de l’ambassade est de raffermir ces relations. L’ambassade délivre plus de 5 000 permis de travail chaque année, ce qui permet à des travailleurs temporaires d’entrer au Canada. La série de visites effectuées récemment par l’honorable Diane Ablonczy, ministre d’État aux Affaires étrangères, et la visite prévue du major-général R.D. Foster témoignent de l’importance du Guatemala comme partenaire régional.

Les échanges commerciaux bilatéraux entre le Canada et le Guatemala ont totalisé 512 millions de dollars en 2012 (110 millions de dollars en exportation du Canada). On a souligné l’intérêt du Canada à finaliser l’accord de libre-échange avec le Guatemala afin de stimuler le commerce entre les deux pays. L’investissement canadien direct au Guatemala a atteint près de 1 milliard de dollars en 2012. On a présenté à la délégation les grandes lignes du projet minier Marlin de Goldcorp Inc., un grand projet d’exploitation bien établi au Guatemala.

On a mentionné que le Guatemala reçoit chaque année près de 5 millions de dollars de l’Agence canadienne de développement international (ACDI) pour des programmes axés principalement sur la sécurité alimentaire et la justice. Depuis 2009, le gouvernement fédéral a consenti, par le biais du Groupe de travail sur la stabilisation et la reconstruction (GTSR), un total de 9,8 millions de dollars pour aider à raffermir les institutions de justice et contribuer à la justice transitionnelle. Le gouvernement du Canada étudie des moyens d’accentuer les relations dans le domaine de la défense ainsi que la coopération en matière de formation en ce qui a trait à la sécurité. Le Programme d’aide au renforcement des capacités de lutte contre la criminalité (PARCLC) finance également des initiatives de réforme du secteur de la sécurité; la Commission internationale contre l’impunité, un organe international chargé de renforcer la capacité des institutions d’État à traiter les cas d’impunité, à laquelle l’ACDI a versé 11,5 millions de dollars en six ans; et les programmes de développement rural et de sécurité alimentaire, qui ont reçu jusqu’ici 22 millions de dollars de l’ACDI.

L’économie du Guatemala se classe toujours au premier rang des économies de l’Amérique centrale. Mais la pauvreté, la corruption et les inégalités de revenu règnent en force, à quoi s’ajoutent une importante économie informelle, le plus faible taux d’imposition en Amérique et un filet de sécurité sociale insuffisant. On a souligné que les envois de fonds jouent un rôle important dans l’économie, totalisant de 4 à 5 milliards de dollars par année.

La violence et les conflits armés affligent le Guatemala. Le pays étant situé sur l’axe principal du trafic de la drogue en Amérique du Nord, le crime organisé et la violence y sont endémiques. En plus du trafic de la drogue, la contrebande d’armes à feu et le trafic d’êtres humains, le blanchiment d’argent, les kidnappings, les gangs et l’extorsion constituent des problèmes de taille. Les conflits sociaux opposant travailleurs et propriétaires fonciers sont une autre source de désordre civil. La violence envers les femmes et les enfants est aussi répandue.

On a mentionné que le Guatemala est aux prises avec certains problèmes sociaux, dont le manque d’instruction, à l’origine des taux élevés d’analphabétisme et qui est attribuable, en partie, à la formation inadéquate des enseignants. Le Guatemala affiche par ailleurs les taux de malnutrition les plus élevés de la région; à ce chapitre, il se classe parmi les trois ou quatre pays du monde où la malnutrition frappe le plus. On a mentionné au passage que les carences nutritionnelles ont une incidence sur le développement cognitif.

Enfin, le président du Guatemala, Otto Perez Molina, a indiqué que son administration mettrait l’accent sur l’économie (la perception des impôts), la sécurité (renforcer le système de justice) et les enjeux sociaux (hausser les normes d’enseignement et réduire les taux de malnutrition).

B.   Rencontre avec des représentants de la Chambre de commerce Canada-Guatemala

Le 21 janvier, les délégués ont rencontré des membres de la Chambre de commerce Canada‑Guatemala à l’ambassade du Canada, à la ville de Guatemala.

Fondée il y a cinq ans, la Chambre de commerce est passée de 9 à 55 membres au cours des deux dernières années. Elle se donne pour objectif de promouvoir des rapports fructueux et productifs entre le Canada et le Guatemala, et d’agir comme partenaire pour le développement de l’activité commerciale bilatérale entre les deux pays. Les membres de la Chambre de commerce sont issus de secteurs variés : mines, approvisionnement, hydroélectricité et autres. Certains ont souligné qu’à l’heure actuelle, il existe un déséquilibre commercial disproportionné entre le Guatemala et le Canada, les exportations du Guatemala vers le Canada dépassant de loin les importations. Ils ont mentionné que les relations commerciales entre les deux pays sont sur la bonne voie.

Les délégués et les représentants de la Chambre de commerce ont discuté d’un projet d’accord de libre‑échange entre le Canada et le Guatemala. Les représentants de la Chambre de commerce ont souligné qu’il s’agissait d’une priorité pour eux, car cela permettrait de garantir les investissements canadiens. Certains ont souligné qu’un accès libre aux marchés aiderait grandement les entreprises canadiennes, notamment les producteurs de porc et de bœuf, qui doivent payer une redevance supplémentaire de 15 % pour accéder au marché guatémaltèque. D’autres solutions ont été soulevées, dont une entente de protection des investissements étrangers pour mieux garantir l’investissement canadien, ou un accord d’échange de renseignements fiscaux pour faciliter le transfert du capital d’investissement entre les deux pays.

Les délégués se sont enquis des projets miniers au Guatemala. Des représentants du secteur minier ont expliqué la nature de leurs activités et donné des précisions sur les investissements dans l’infrastructure et les services quotidiens aux localités où se trouvent les mines, ainsi que des détails sur certains programmes à long terme qui ont été mis en œuvre pour ces communautés. Par exemple, une société minière a financé un programme dans le cadre duquel les résidents à proximité de la mine pouvaient recevoir une formation en joaillerie. À la fermeture de la mine, la région pourrait devenir une destination touristique réputée pour l’argent. On a mentionné par ailleurs que les sociétés minières du Guatemala travaillent avec des associations agricoles pour améliorer les techniques et la production des agriculteurs locaux.

Les délégués canadiens ont soulevé des questions à propos du secteur hydroélectrique du Guatemala. Les membres de la Chambre de commerce ont indiqué que le potentiel du Guatemala est immense pour les petites et moyennes centrales hydroélectriques à faible impact dans le pays. À leur avis, il n’est pas nécessaire de subventionner ces projets, qui peuvent tirer parti de la demande de mégawatts, qui croît chaque année. L’énergie au Guatemala est généralement coûteuse et dérive principalement du pétrole.

La discussion a ensuite porté sur la sécurité individuelle au Guatemala, ce que les représentants de la Chambre de commerce ont qualifié de dossier important. Les lacunes générales en matière de sécurité personnelle au pays contribuent à dissuader les candidats qualifiés, notamment ceux qui viennent de l’extérieur du pays, ce qui complique le recrutement.

Certains membres ont mentionné que les possibilités d’investissement à long terme pour les entreprises canadiennes sont nombreuses au Guatemala. Il reste encore beaucoup à faire au chapitre de l’éducation et du capital humain, mais le climat d’investissement continue de s’améliorer. M. Dreeshen a conclu la rencontre en remerciant les représentants de la Chambre de commerce d’avoir partagé leurs points de vue.

C.   Déjeuner de travail avec des membres du Congrès guatémaltèque

Le 21 janvier, les délégués ont rencontré des membres du Congrès de la République du Guatemala à l’occasion d’un déjeuner de travail à l’hôtel Panamerican, à la ville de Guatemala. Étaient présents : Christian Boussinot, second vice-président du Congrès, Felipe Alejos, président de la Commission des migrants, et Manuel Villacorta, président de la Commission des affaires étrangères.

M. Boussinot a commencé la rencontre en souhaitant la bienvenue aux délégués canadiens, au nom du président du Congrès. Il a mentionné que ces rencontres constituent d’excellentes occasions pour échanger des idées et trouver des façons de collaborer. À son tour, M. Alejos a souhaité la bienvenue aux délégués, se disant intéressés à en apprendre davantage sur le système parlementaire canadien. M. Dreeshen a indiqué que les délégués étaient très heureux d’avoir la possibilité de rencontrer les membres du Congrès et exprimé l’intérêt des délégués à discuter ouvertement de sujets d’intérêt commun.

La question du roulement de personnel dans la fonction publique à chaque changement de gouvernement a été soulevée. Les membres du Congrès ont expliqué que le système actuel a été instauré à l’issue des accords de paix de 1996. En vertu de la loi actuelle, lorsque survient un changement de gouvernement (tous les quatre ans), la plupart des hauts fonctionnaires perdent leur poste et sont remplacés. M. Boussinot a précisé que le Guatemala est une nouvelle démocratie et qu’il existe un précédent selon lequel les postes aux échelons supérieurs de la fonction publique sont souvent utilisés pour des nominations partisanes qui servent à rembourser des dettes politiques. Il a toutefois ajouté que le Congrès étudie un projet de loi visant à améliorer la sécurité d’emploi et à assurer la continuité dans la fonction publique.

La discussion a ensuite porté sur le système d’éducation. Les membres du Congrès ont indiqué que des changements s’imposent, notamment au chapitre de la formation des enseignants. En tant que pays pauvre, le Guatemala doit composer avec le fait que le Guatémaltèque moyen est davantage préoccupé par la recherche d’un emploi qui lui permettra de satisfaire ses besoins essentiels que de poursuivre sa scolarité à des niveaux supérieurs.

Les délégués ont soulevé la question des droits humains au Guatemala. Les membres du Congrès ont indiqué que la situation s’améliore. En 1996, le pays s’est sorti d’un conflit civil qui régnait depuis plus de 30 ans et au cours duquel les droits humains s’étaient détériorés à tel point qu’ils étaient pratiquement devenus inexistants. Actuellement, les institutions d’État favorisent la participation de la société civile et le pays cherche à inculquer les principes de l’ouverture et de la transparence à ses institutions. On a prévenu toutefois que le processus suit son cours et qu’il faudra du temps pour gagner la confiance du public.

Au sujet de l’intégration des groupes indigènes aux processus décisionnels, les membres du Congrès ont indiqué que 18 des 158 membres du Congrès sont d’origine indigène. Ils ont souligné que le Congrès veut promouvoir l’égalité au chapitre de la participation sociale des groupes ethniques, ainsi que de la représentation des femmes dans la vie politique.

Pour sa part, M. Villacorta a mentionné que le programme des travailleurs temporaires au Canada avait connu un vif succès et a tenu à exprimer sa reconnaissance aux délégués. M. Dreeshen a conclu la rencontre en remerciant les membres du Congrès d’avoir pris le temps de rencontrer les délégués et les faire bénéficier de leurs points de vue.

D.   Rencontre avec des ONG (sécurité des citoyens)

Le 21 janvier, en après-midi, la délégation canadienne a rencontré des représentants d’organisations non gouvernementales (ONG) qui, en collaboration avec des institutions d’État, travaillent à renforcer la sécurité des citoyens au Guatemala. La rencontre a eu lieu à l’ambassade du Canada, à la ville de Guatemala. M. Dreeshen a commencé la rencontre en remerciant les participants de permettre aux délégués d’en savoir un peu plus sur leur organisation et le travail qu’ils accomplissent pour la population guatémaltèque.

La discussion a porté sur les possibilités pour les jeunes du Guatemala. L’État fournit une aide limitée en matière d’éducation et d’autres programmes pour les jeunes. Des participants ont déclaré qu’il est plus facile pour un jeune de se procurer un AK-47 que d’obtenir un diplôme d’études secondaires. Ils ont mentionné que le taux de décrochage au secondaire avoisine 80 %. Dans ces conditions, nombre de jeunes envisagent comme porte de sortie d’immigrer ou de se joindre à un gang pour obtenir un revenu. Les envois de fonds constituent la forme de revenu la plus importante pour les familles guatémaltèques, mais cette situation, par définition, cause la désintégration de l’unité familiale et crée des lacunes en matière d’orientation parentale. Les jeunes deviennent donc vulnérables aux gangs. Par ailleurs, l’État n’offre aucun programme pour tenir les jeunes à risque occupés après l’école, ce qui les amène à se joindre à des gangs. Enfin, on a souligné que le sentiment de citoyenneté chez les jeunes n’est pas très développé.

La discussion a ensuite porté sur l’industrie minière au Guatemala. Le pays continue d’appliquer une loi laxiste et désuète sur les mines, adoptée à l’origine dans le but d’attirer les investisseurs étrangers; elle est donc disproportionnément avantageuse pour les sociétés minières. Apparemment, le ministère de l’Économie travaillerait à modifier la loi sur les mines. Les intervenants ont soulevé le fait que l’appui populaire accordé à l’exploitation minière est faible. Les sociétés minières doivent mieux faire connaître les avantages de l’exploitation minière, par exemple en consultant et en prenant contact avec les localités avant d’ouvrir leurs chantiers. De même, il est important que les localités puissent conserver une partie des profits générés par les sociétés minières. À cet égard, les participants ont indiqué qu’il ne faut pas confondre les ONG qui rejettent le développement quel qu’il soit et le droit d’une communauté de s’opposer à un projet économique. Encore une fois, on a souligné que les régions rurales s’attendent à ce que les sociétés minières jouent un rôle qui revient habituellement à l’État.

Parmi les autres sujets de discussion, les participants ont parlé de la nécessité pour le Guatemala de se doter d’un plan de développement national. Certains ont souligné les retombées positives des fonds canadiens fédéraux visant à donner accès au crédit aux propriétaires de petites et moyennes entreprises et aux femmes entrepreneures. Ce dernier point est particulièrement important, puisque la participation des femmes à la vie active peut changer l’équilibre des pouvoirs au sein des ménages.

E.   Souper à la résidence officielle de l’ambassadeur du Canada

Le 21 janvier en soirée, les délégués étaient invités à un souper à la résidence officielle de l’ambassadeur du Canada au Guatemala, à la ville de Guatemala. Avant le repas, un invité a prononcé quelques mots sur la question des droits humains au Guatemala, notamment en ce qui concerne les peuples indigènes. Il a parlé de la Commission sur la transparence, expliquant le rôle qu’elle joue dans l’élaboration d’une politique d’État en matière de lutte contre la corruption; de l’accès à l’information et aux activités de l’État afin de permettre les vérifications publiques; de l’accentuation de la transparence des processus décisionnels pour réduire les décisions arbitraires; de la modernisation de l’État par la mise en œuvre d’initiatives de « gouvernement en direct »; et de la création de lois dans les secteurs stratégiques que sont les mines, la construction, les biens volés, la santé et les transports. L’ambassadeur Rousseau et M. Dreeshen ont remercié les intervenants pour leurs propos éclairants et mentionné que ces questions revêtent un très grand intérêt pour les délégués.

F.    Rencontre avec des représentants d’ambassades étrangères aux vues similaires

Le 22 janvier, en avant-midi, les délégués ont rencontré des représentants d’ambassades étrangères aux vues similaires pour discuter de la situation en matière de sécurité dans la région.

On a présenté à la délégation un aperçu du trafic de stupéfiants dans la région. On a expliqué que le Guatemala occupe une position stratégique dans l’axe qui relie la Colombie et les États‑Unis, 90 % de la drogue destinée au marché américain transitant par le Guatemala.

Les délégués ont appris que le trafiquant guatémaltèque Walther Overdick avait été extradé récemment aux États‑Unis, la première déportation de ce genre en une décennie. On espère que les risques d’extradition pousseront les Guatémaltèques accusés de trafic de drogue à collaborer.

La priorité numéro un des Guatémaltèques demeure la sécurité citoyenne. Renforcer les capacités de la police est une tâche importante à laquelle le Canada prête son assistance.

Au chapitre de la lutte contre le trafic de drogue au Guatemala, il y a une lueur d’espoir depuis que le président et le procureur général ont indiqué que leur priorité est de créer une société unie et sécuritaire, et qu’ils prennent des mesures pour atteindre ce but.

G.   Déjeuner de travail avec des représentants d’ONG

Le 22 janvier, la délégation a participé à un déjeuner de travail avec des représentants d’ONG qui travaillent à accentuer la transparence et la responsabilité au Guatemala. M. Dreeshen a commencé par remercier les participants pour leur présence et a mentionné que les délégués avaient hâte de connaître les questions d’importance dans leurs domaines stratégiques respectifs.

On a fait le point sur la faiblesse de la démocratie au Guatemala. On a expliqué que la fiscalité est un problème chronique et que les recettes fiscales comptent pour seulement 10,8 % du PIB. Sur la question des problèmes sociaux, on a souligné qu’environ 50 % des enfants de moins de cinq ans souffrent de malnutrition. C’est au Guatemala que les inégalités de la richesse sont les plus marquées dans la région; les riches ne paient pas suffisamment d’impôt et ne se sentent pas tenus de changer la situation, en raison de la corruption du gouvernement, qui est très répandue. Par ailleurs, on a mentionné que la tendance consiste à se porter candidat aux élections par intérêt personnel et pour les avantages que cela procure. On a aussi expliqué que la vieille élite du monde des affaires utilise un modèle d’exploitation pour s’enrichir, accordant de maigres salaires et des conditions de vie misérables et exploitant principalement la vaste population indigène du pays. Des participants ont mentionné que la corruption est très répandue dans toute l’Amérique centrale. Au Guatemala, elle touche la police, l’appareil judiciaire, les partis politiques, l’État et les administrations municipales.

La discussion a ensuite porté sur l’industrie minière du Guatemala. Des participants ont mentionné que l’exploitation minière est une activité économique légitime et nécessaire. Toutefois, ils ont précisé qu’au Guatemala, cette industrie manque de transparence, n’est pas assez réglementée et est assujettie à des redevances minimes par rapport à d’autres pays et à un taux d’imposition négligeable. Les taux d’imposition et de redevance sont si faibles que les sociétés minières paient volontairement des redevances et des impôts sur le revenu, gage de leur bonne volonté. Ils ont indiqué que l’étude de la nouvelle loi sur les mines par le Congrès a été interrompue. Pour expliquer la perception défavorable de l’activité minière par la population, on a avancé que la législation déficiente et les obligations fiscales et redevances insignifiantes sont en partie à blâmer. Des participants ont admis qu’un accord de libre-échange avec le Canada permettrait d’améliorer les jalons et les normes, mais qu’il fallait aussi améliorer la stabilité du pays et accentuer la primauté du droit.

Certains participants ont indiqué que les progrès accomplis au chapitre de la transparence de l’État avaient stagné, voire régressé récemment. Tous les quatre ans, ont-ils expliqué, un nouveau gouvernement est élu et réduit à néant les travaux accomplis par l’administration précédente, même les progrès accomplis en matière d’accès à l’information. Pour eux, l’instabilité de la fonction publique est très problématique.

H.   Réunion avec une ONG

Dans l’après-midi du 22 janvier 2013, la délégation a rencontré une ONG dont le travail se concentre sur des questions de responsabilité sociale d’entreprise. Des participants ont donné à la délégation un aperçu du rôle et de la vision de leur organisation, qui œuvre à la promotion de la responsabilité sociale d’entreprise (RSE) au sein des entreprises dans la région de l’Amérique centrale, cherche à instaurer chez elles une culture du respect de la primauté du droit et les aide à mettre en application les meilleures pratiques industrielles. Elle a aussi élaboré à l’intention des entreprises locales des indicateurs d’évaluation de la RSE axés sur les réalités de l’Amérique centrale.

L’organisation essaie de dresser une liste positive et négative des chefs d’entreprise pour l’ensemble du pays, afin de savoir qui fait de l’argent et connaît la réussite, et quels sont les modèles à suivre et les exemples à éviter. On a signalé que les jeunes générations doivent, dans l’intérêt de l’économie, s’intéresser activement au bien-être de leur pays pour qu’il puisse y avoir un renouvellement des vieilles institutions et des changements positifs. C’est pourquoi, à long terme, le renforcement des institutions et les politiques de lutte contre la corruption sont prioritaires. En guise de conclusion, M. Dreeshen a remercié les participants, au nom de la délégation, pour leur analyse franche de la situation au Guatemala.

VISITE BILATÉRALE AU SALVADOR

A.       Réunion avec le président de l’Assemblée du Salvador

Dans la soirée du 23 janvier 2013, la délégation a pris part à un dîner de travail offert par l’ambassadeur du Canada au Salvador, M. Pierre Giroux, au restaurant Ciao Bella à San Salvador, El Salvador. L’invité d’honneur était M. Sigfrido Reyes, président de l’Assemblée législative du Salvador. Étaient également présents Mme Blanca Noemi Coto Estrada, députée; Mme Margarita Escobar, députée; M. Guillermo Gallegos, député; Mme Silvia Estela Ostorga, députée; Mme Mariella Pena Pinto, députée; et M. Mario Antonio Ponce Lopez, député. Le dîner a offert à M. Reyes l’occasion de saluer la délégation et permis aux parlementaires de tenir des discussions informelles sur des sujets d’intérêt.

Le matin du 24 janvier 2013, la délégation, accompagnée de l’ambassadeur Giroux, a rencontré M. Reyes à l’Assemblée législative à San Salvador, El Salvador. Dans son discours d’ouverture, M. Reyes leur a souhaité la bienvenue à l’Assemblée, une institution qui a été créée après que le Salvador eut obtenu son indépendance en 1821. M. Dreeshen a remercié M. Reyes d’avoir pris le temps de rencontrer la délégation et lui a indiqué qu’elle souhaitait en apprendre davantage sur le système de gouvernement, la société et les priorités de son pays.

M. Reyes a donné à la délégation un aperçu du système politique du Salvador. Il lui a indiqué que l’Assemblée se compose de 84 députés provenant de six partis politiques. Les questions qui intéressent la législature incluent le changement climatique et la condition féminine (environ 25 % des députés sont des femmes). M. Reyes a souligné que deux femmes avaient déjà occupé le poste de président de l’Assemblée.

M. Reyes a signalé que le Salvador est sorti en 1992 d’une guerre civile qui a duré 12 ans et coûté la vie à 70 000 civils. Les Accords de paix de 1992 ont marqué le début d’une nouvelle ère de réforme démocratique, le renforcement des droits de la personne et des institutions nationales, la modernisation du système électoral et une augmentation du pluralisme. M. Reyes a souligné l’octroi du droit de vote aux Salvadoriens vivant à l’étranger (près de 150 000 à 160 000 d’entre eux vivent au Canada et aux États-Unis; un Salvadorien sur trois vit à l’étranger). Il a aussi exposé les défis auxquels le Salvador est confronté, dont de faibles niveaux d’investissement, un chômage élevé, la pauvreté, un manque de logements, un manque d’accès aux services de santé et à l’éducation, ainsi que la violence et l’insécurité en partie attribuables aux cartels de la drogue.

Il s’en est suivi une discussion avec la délégation au sujet notamment des droits des femmes au Salvador. Le président de l’Assemblée a indiqué que c’est une question importante pour cette dernière et que des mesures sont prises pour moderniser les mentalités des gens. La question des risques que pose le droit de vote des citoyens à l’étranger a été soulevée. Selon M. Reyes, le taux de participation des citoyens vivant à l’étranger est faible, mais, en envoyant de l’argent dans leur pays, les Salvadoriens qui vivent à l’étranger apportent une contribution vitale à l’économie nationale. Il a aussi été question de l’investissement étranger direct. Le président a indiqué que le Congrès avait été saisi d’un projet de loi visant à réduire les obstacles à l’investissement et à offrir des incitatifs aux investisseurs, ainsi qu’à renforcer la sécurité juridique et physique des investissements. Un autre projet de loi présenté au Congrès prévoit des partenariats entre sociétés nationales et étrangères dans des secteurs stratégiques de l’économie. M. Reyes a également parlé à la délégation du cas d’un Salvadorien expatrié en Colombie-Britannique menacé de déportation, et dit souhaiter que le programme des travailleurs temporaires soit élargi et qu’il soit plus facile d’obtenir un visa pour le Canada. Il a conclu en soulignant le potentiel de son pays, y compris son climat, ses ressources abondantes et son bassin de main-d’œuvre qualifiée. Au nom de la délégation, M. Dreeshen a remercié M. Reyes d’avoir pris le temps de la rencontrer et de partager ses idées sur les moyens de renforcer les liens entre le Canada et le Salvador.

B.       Réunion avec des universitaires et des experts

Le 24 janvier 2013, la délégation a rencontré des universitaires et des experts en sécurité et en démocratie pour discuter de l’état des institutions démocratiques, de la violence armée et de la violence faite aux femmes et aux enfants.

Un universitaire a lancé la table ronde en donnant aux délégués un aperçu de l’état de la démocratie au Salvador. Il a indiqué que le pays avait opéré une série de transformations pour moderniser son système politique. Il a énuméré quatre grandes réalisations à cet égard :

1.    Établissement du principe que l’action politique légitime est le seul moyen d’accéder au pouvoir d’État;

2.    Identification des acteurs politiques légitimes (à savoir les partis politiques);

3.    Établissement de la légitimité du processus de transition d’un gouvernement à son successeur sans perturbations ni renversement; et

4.    Création d’institutions qui laissent une moins grande place à l’incertitude et à l’arbitraire dans la prise de décisions.

Cependant, il reste quatre défis à relever. Ceux-ci sont :

1.    La polarisation partisane;

2.    La nécessité d’un espace institutionnalisé pour le dialogue;

3.    La nécessité de lancer une nouvelle génération de réformes politiques (p. ex. bilan social, responsabilité financière, etc.); et

4.    La nécessité d’établir un nouveau pacte socio-économique pour le pays.

Une experte des droits humains a présenté à la délégation un résumé des questions des droits de la personne au Salvador. À l’heure actuelle, a-t-elle dit, les citoyens se sentent plus libres d’avoir des discussions sérieuses sur l’État alors qu’auparavant ils auraient craint la persécution. Le pays a été témoin d’une diversification des vues, et d’une plus grande démocratisation dans l’ensemble. On reconnaît que les forces armées se sont vu confier un rôle constitutionnel, ce qui freine leur propension historique à rivaliser pour le pouvoir. Le Salvador s’est aussi doté d’une nouvelle police professionnelle civile. Pourtant, le pays demeure confronté à une situation de violence sociale complexe qui peut être en grande partie attribuée au crime organisé. Elle a signalé que le nombre d’armes à feu atteint aujourd’hui les mêmes niveaux que durant la guerre civile. Elle a affirmé qu’un plus grand investissement social s’impose pour venir en aide aux jeunes à risque. Il faut aussi investir dans la lutte contre l’impunité et renforcer les institutions pour que cesse l’infiltration par le crime organisé.

Une courte discussion a suivi pendant laquelle les intervenants ont fourni des informations supplémentaires sur les sujets suivants : les jeunes à risque et la violence envers les femmes (le pays a grandement besoin de meilleurs politiques et programmes sociaux pour ces groupes vulnérables); les droits des gais et lesbiennes (des obstacles culturels continuent à nuire à la sensibilisation, à la tolérance et à la reconnaissance); les droits des personnes âgées (il y a un manque total de politiques et programmes sociaux; les personnes âgées ne reçoivent pas de prestations de l’État); et la croissance de l’industrie de la sécurité au Salvador (la violence et les mesures de sécurité prises pour la contrer sont devenues une entreprise importante).

Un chercheur dans le domaine de la sécurité a ensuite présenté à la délégation un exposé sur les actes de violence commis avec des armes à feu au Salvador et en Amérique centrale. Il a indiqué qu’il y aurait entre 2,5 et 3 millions d’armes à feu en Amérique centrale, dont deux sur trois sont illégales (c’est-à-dire non enregistrées). Il a déclaré aussi que 85 % des victimes d’actes de violence commis avec des armes à feu sont des jeunes de 14 à 20 ans. Une récente étude de la Sistema de la Integración Centroamericana (SICA) a révélé qu’il est plus facile pour un jeune au Salvador de se procurer une arme à feu que de se trouver du travail. Il a également fait observer que la possession d’armes à feu avait un caractère sexiste en ce sens que ce sont les hommes qui ont tendance à en posséder et à commettre des crimes violents. Le problème s’explique en partie par la faiblesse des contrôles aux frontières, des armes à feu étant introduites en contrebande le long du même corridor que les stupéfiants et les êtres humains. En ce qui concerne les munitions importées illégalement dans la région, il a indiqué que les niveaux étaient équivalents à ceux enregistrés en temps de guerre. Le débat se poursuit au Salvador sur le désarmement et la façon d’y parvenir.

Une experte en gouvernance a renseigné la délégation sur le climat de violence qui règne au Salvador. Elle a signalé qu’il a été l’un des pays les plus violents du monde au cours de la dernière décennie, surtout en ce qui concerne les jeunes. Les taux de vol, d’extorsion et de « disparition » de citoyens sont élevés. La violence au Salvador frappe disproportionnellement les femmes et les enfants. Elle a aussi mentionné le récent cessez-le-feu déclaré entre gangs au Salvador, qui a été suivi d’une diminution des homicides d’environ 60 %. L’amélioration de la situation représente un défi constant; des ressources doivent être allouées aux institutions pour qu’elles puissent concerter leurs efforts en vue de prévenir la violence.

Un expert de la jeunesse a renseigné la délégation sur les jeunes à risque au Salvador. Il a fait observer que 40 % de la population du pays est âgée de 0 à 15 ans et que 50 % des pauvres sont des enfants tandis que 50 % des enfants vivent dans la pauvreté. Les enfants pauvres ont tendance à avoir des taux de mortalité plus élevés, à moins fréquenter l’école et à souffrir de malnutrition. Pour ce qui est de la famille, 913 000 enfants vivent dans un ménage dont la mère ou le père est absent; 400 000 enfants font partie d’une famille dont la mère ou le père a émigré; 7 enfants sur 10 ont signalé avoir été victimes de violence physique et morale; et 73 % des filles de 0 à 18 ans ont été victimes de violence sexuelle fondée sur le sexe. Quant aux décès, l’UNICEF estime qu’environ six jeunes (de 0 à 18 ans) ont été tués par semaine en 2011. Il a fait part à la délégation des recommandations de l’UNICEF à ce sujet, lesquelles consisteraient notamment : à fournir des locaux à l’école pour les enfants et à élaborer des programmes pour les y garder; à renforcer la prévention communautaire et la détection de la violence chez les jeunes; et à mettre l’accent sur le développement de la petite enfance comme stratégie de prévention de la violence. Il a fait remarquer qu’il y a déjà des lois en place pour protéger les enfants, mais trop peu de volonté et de ressources pour qu’elles soient appliquées comme il se doit.

Une spécialiste de l’égalité des sexes a donné à la délégation de l’information sur la condition féminine au Salvador. Elle a indiqué que le pays a les taux les plus élevés de violence au foyer en Amérique centrale. On constate en général une tolérance culturelle troublante face à la violence à l’endroit des femmes et au fémicide. En fait, la population est très peu sensibilisée à cette question. Les femmes ne participent pas à la prise de décisions au foyer et sont généralement confinées dans des rôles traditionnels comme celui de ménagères. Elle a fait observer que des progrès ont été réalisés sur le plan législatif comme en témoigne une loi proposée en 1996 pour réprimer la violence familiale, mais qu’il reste encore beaucoup à faire.

Au cours de la discussion qui a suivi entre les délégués et les présentateurs, les questions suivantes, ont été soulevées : le manque de soutien de l’État ou de programmes pour les enfants handicapés au Salvador; le taux élevé de malnutrition dans le pays comme cause directe de capacités cognitives déficientes au sein de la population; et le taux élevé de décrochage à tous les niveaux du système d’éducation.

C.       Visite dans la paroisse de Sierra Morena, Soyapango

Le 24 janvier 2013, la délégation a visité les installations d’un projet de la paroisse de Sierra Morena à Soyapango (une ville ouvrière densément peuplée en banlieue de San Salvador). Les coordonnateurs du projet, qui se servent de l’église paroissiale Notre-Dame de la Guadeloupe comme lieu de rencontre communautaire, reçoivent depuis quatre ans des fonds du gouvernement du Canada par l’intermédiaire du Fonds canadien d’initiatives locales (FCIL). Ce projet de prévention de la violence dirigé par des bénévoles offre des programmes aux femmes, qui sont pour la plupart chefs de famille monoparentale à faible revenu (leurs conjoints les ayant laissées ou ayant émigré), ainsi qu’aux jeunes à risque (de huit à 18 ans). Il a été mentionné que le projet destiné aux femmes a pris l’allure d’une entreprise financièrement autonome qui leur assure un travail productif.

Les programmes de formation offerts aux femmes incluent l’esthétique (actuellement quatre participantes); la boulangerie et la confiserie (actuellement six participantes); la sérigraphie, le graphisme et la couture (actuellement trois participantes); et la fabrication de produits à base de miel (actuellement quatre participantes). L’équipement utilisé pour ces programmes a été acheté à l’aide de fonds fédéraux canadiens. Il a en outre été mentionné que ces femmes reçoivent une formation linguistique en anglais tout en participant aux programmes et qu’elles enseignent aussi ce qu’elles ont appris à leurs enfants.

Le programme à l’intention des jeunes à risque consiste à enseigner aux enfants qui habitent à une distance de cinq à dix minutes de l’église un sport en dehors des heures de classe. Le but du programme est d’offrir aux jeunes d’un quartier pauvre le sport comme option pour contrer l’attrait que les gangs et la criminalité pourraient exercer sur eux. Au moment de la visite, 63 enfants du quartier apprenaient à jouer au ping-pong. On a fait observer que le ping-pong avait été choisi comme sport par opposition, par exemple, au soccer qui peut être associé aux gangs dont les membres sont souvent à traîner durant les matchs de soccer.

D.       Réunion avec une ONG

Dans la soirée du 24 janvier 2013, la délégation a rencontré des porte-paroles d’une ONG dont le travail se concentre sur la sécurité et les systèmes de justice.

Ils ont présenté à la délégation un exposé sur l’historique et la raison d’être de l’organisation, et de l’information sur les systèmes de justice en général, en Amérique centrale. En 1999, l’organisation a commencé à travailler en Amérique centrale où elle a mis à profit les compétences acquises dans le contexte du système de justice canadien. Au Guatemala, le système de justice était confronté à plusieurs défis de taille. Le système de justice en place avant les Accords de paix de 1996 était considéré comme ayant servi principalement d’outil de répression. Après les Accords de paix, le Guatemala a créé un système de justice complexe, difficile à administrer du fait que les institutions ne se faisaient pas mutuellement confiance. De plus, le pays était aux prises avec environ trente-cinq fois plus de crimes que le Canada alors qu’il disposait de moins de ressources. Résultat, le système de justice était dysfonctionnel. On a fait remarquer que, jusqu’à tout récemment, le taux de condamnation pour meurtre au Guatemala était d’à peu près 2 % dans les cas où l’accusé était pris en flagrant délit. Dans les cas nécessitant une enquête, le taux de condamnation était à peu près nul. Les chiffres se sont améliorés, mais il reste de nombreux défis à relever.

Le rôle de l’organisation en Amérique centrale a consisté à former de 5 000 à 6 000 personnes associées au système de justice. La première phase de son programme comporte l’acquisition de nouvelles compétences comme la collecte d’éléments de preuve et les techniques de scène de crime. Les participants ont affirmé que des preuves solides sont essentielles en cas de poursuites, car les témoins doivent avoir l’assurance qu’il y aura vraisemblablement déclaration de culpabilité s’ils prennent le risque de témoigner. L’organisation a entrepris une deuxième phase de formation qui bénéficie d’un appui financier de 5 millions de dollars de l’ACDI sur une période de quatre ans. Cette deuxième phase englobe la gestion des affaires importantes et la formation des juges. Elle envisageait d’étendre ses opérations à la formation d’unités spéciales (p. ex. l’écoute électronique), à l’analyse vidéo judiciaire et à la surveillance. Le financement de l’ACDI est à l’étude et l’organisation espère qu’il sera renouvelé, de sorte qu’elle puisse poursuivre son important travail.

Des participants ont aussi indiqué que de nombreux problèmes continuent à se poser dans la région, dont : la criminalité dans les prisons, les lynchages, l’absence de négociation de plaidoyers et les annulations constantes de procès. Ils ont fait observer qu’en règle générale le manque de sécurité en Amérique centrale est mauvais pour les affaires et crée un climat d’instabilité qui décourage l’investissement.

E.       Réunion avec des organisations du secteur privé

Dans la matinée du 25 janvier 2013, la délégation a rencontré des représentants d’organisations du secteur privé, dont la Chambre de commerce Canada-El Salvador, pour un petit déjeuner de travail à l’hôtel Sheraton Presidente à San Salvador, El Salvador. Étaient présents à cette réunion l’ambassadeur Giroux, des membres de la Chambre de commerce du Canada et des représentants de l’Association nationale des entreprises privées (ANEP), de la Chambre de commerce agricole et agroindustrielle (CAMAGRO) du Salvador, de l’Association salvadorienne de l’industrie (ASI), de la Chambre salvadorienne de l’industrie de la construction (CASALCO), de la Chambre de l’industrie textile et de la confection et des zones franches (CAMTEX), de la Fondation nationale pour le développement (FUNDE), de l’Association sucrière du Salvador et du Centre pour une production plus propre.

La question du climat des affaires a été soulevée. Il a été mentionné que les principaux défis auxquels l’économie est confrontée actuellement concernent des problèmes politiques ou idéologiques qui sont le legs des dernières décennies. Des participants ont indiqué que la guerre qui a pris fin dans les rues du Salvador en 1992 s’est transportée et s’est poursuivie dans l’arène politique. À cet égard, on estime que les politiciens font passer les intérêts partisans avant les intérêts nationaux supérieurs. La faiblesse des institutions démocratiques du pays est une source d’inquiétude, car il existe un lien étroit entre la démocratie et la croissance. Des commentaires ont aussi été émis à propos de la faible croissance de l’économie au cours des cinq dernières années, des investissements insuffisants et des taux élevés de criminalité et de violence, qui ont provoqué l’instabilité et l’incertitude. En ce qui concerne le taux de criminalité dans le pays, on a dit craindre aussi que le crime organisé ait infiltré la sphère politique sur laquelle il exercerait une influence.

Il a été question d’un éventuel accord de libre-échange entre le Canada et le Salvador, et les membres de la Chambre de commerce ont indiqué qu’un tel accord entraînerait la création de plus d’emplois dans le pays et favoriserait des investissements bien nécessaires. Certains ont exprimé leur frustration à l’égard de l’administration actuelle qui s’était engagée à promouvoir l’investissement. On a indiqué que le Salvador souhaitait devenir le carrefour régional des affaires et jouer un rôle semblable à celui du Costa Rica actuellement.

Des membres de la Chambre de commerce ont exprimé des préoccupations quant au partenariat transpacifique pour ce qui est des demandes de règles d’origine souples de certains pays, et du laxisme des règles environnementales et du travail. Ils ont fait remarquer que l’agrément de ces demandes causerait beaucoup de tort à l’industrie textile salvadorienne.

Par ailleurs, des membres de la Chambre de commerce ont fait état de la difficulté à obtenir un visa et demandé que ce processus soit rationalisé. D’autres ont indiqué qu’une aide au renforcement des institutions serait utile pour le pays. Des participants ont observé qu’il serait souhaitable de multiplier les échanges au niveau universitaire entre les deux pays. En général, les membres de la Chambre de commerce ont indiqué qu’ils demeuraient optimistes quant à l’état de l’économie du pays et souligné que les Salvadoriens sont des gens vaillants et industrieux qui se sont un honneur de fabriquer de bons produits.

En terminant, l’ambassadeur Giroux et M. Dreeshen ont remercié les membres de la Chambre de commerce de leur avoir exposé leurs vues et leurs préoccupations et offert une vision plus équilibrée qu’ils pourraient partager avec leurs collègues parlementaires à leur retour au Canada.

Visite du projet Ciudad Mujeres et de San Juan Opico

Le 25 janvier 2013, la délégation a visité les installations du Ciudad Mujer, à Santa Ana. Elle y a été accueillie par Mme Vanda Pignato, première dame et secrétaire de l’Inclusion sociale et de la Citoyenneté. Le Ciudad Mujer est un centre qui offre un large éventail de services de santé, d’éducation et de bien-être en un même endroit aux femmes de milieux défavorisés qui ont été victimes de violence fondée sur le sexe. La Banque interaméricaine de développement estime qu’au Salvador environ la moitié des femmes sont victimes de violence, physique ou psychologique, mais qu’environ le tiers seulement d’entre elles demandent de l’aide. Ciudad Mujer veut dire « ville des femmes » et les hommes n’y sont généralement pas admis. À l’heure actuelle, il y a quatre centres de ce genre au Salvador et l’objectif est d’en ouvrir deux autres. Chaque centre est situé dans un lieu où les besoins sont criants et offre des services de santé complets (l’accent étant mis sur la santé en matière de sexualité et de procréation); des services de formation et d’acquisition de compétences économiques; une éducation de groupe; l’accès aux services policiers et juridiques; des services de garde d’enfants; et des services communautaires. Ces centres offrent des services aux femmes et aux filles vivant dans des municipalités qui ne pourraient pas autrement faire face adéquatement aux défis liés à la violence contre les femmes et les filles.

Le projet Ciudad Mujer reçoit des fonds du gouvernement du Canada par l’entremise du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international dans le cadre d’un projet plus vaste au Salvador et au Guatemala pour promouvoir la prévention de la violence contre les femmes. Ce projet a bénéficié d’une aide financière de 1,2 million de dollars du 31 mai 2012 au 31 mai 2013, et profité directement à environ 1 800 femmes.

Dans l’après-midi du 25 janvier 2013, la délégation a visité plusieurs sites dans la municipalité de San Juan Opico, dont deux centres communautaires de formation qui reçoivent une aide financière du gouvernement du Canada et offrent des ateliers visant à éduquer et à autonomiser les femmes. La délégation a aussi visité le bureau des plaintes au poste de police municipal, utilisé principalement par les femmes qui ont vécu des situations de violence. Le bureau a été complètement rénové et remeublé (peinture, aromathérapie, climatisation, ajout d’une aire de jeu pour les enfants) avec l’aide du gouvernement du Canada. Ce sont là d’importantes améliorations destinées à procurer un sentiment de confort à des femmes aux prises avec des situations extrêmement difficiles. C’est dans le bureau des plaintes que la police reçoit en privé les signalements des victimes de crimes de violence fondée sur le sexe. Il a été mentionné que 16 femmes ont été assassinées à San Juan Opico en 2011 alors qu’aucune ne l’a été en 2012. Il a en outre été mentionné que des fonds du gouvernement du Canada avaient servi à la promotion de l’égalité des sexes dans le cadre de la formation du personnel policier.

 

Respectueusement soumis,

 

M. Earl Dreeshen, député

Chef de délégation

Section canadienne de ParlAmericas

 

Haut de page