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Rapport

 

Les 16 et 17 septembre 2010, une délégation de l'Assemblée parlementaire de l'OTAN (APOTAN) représentant la Commission sur la dimension civile de la sécurité a participé, en qualité d'observateur, à l'exercice ARMENIA 2010 de réaction en cas de catastrophe organisé par l'OTAN dans la banlieue d'Erevan (Arménie).  Le Canada a été représenté par Mme Cheryl Gallant, députée.

Le scénario de l'exercice prévoyait un séisme d'une magnitude de 7,2 sur l'échelle de Richter provoquant des dégâts à l'infrastructure locale ainsi que divers incidents, notamment l'effondrement de bâtiments, des glissements de terrain, le déversement de produits chimiques et un accident de voiture impliquant des substances radiologiques.  

L'exercice ARMENIA 2010, organisé conjointement par le Centre euro-atlantique de coordination des réactions en cas de catastrophe (EADRCC) de l’OTAN et par l'Office arménien des opérations de sauvetage, a rassemblé 17 équipes venues de 13 des pays membres de l'OTAN et des pays partenaires, ainsi que des représentants du Bureau de la coordination des affaires humanitaires des Nations unies (BCAH), de la Fédération internationale des Sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge et d'ONG. Quinze autres pays ont également envoyé du personnel et des experts pour l'exercice.

ARMENIA 2010 était le dixième exercice international mené sur le terrain par l'EADRCC en vue d'évaluer les mécanismes OTAN de réaction en cas de catastrophe et de promouvoir une plus grande interopérabilité entre les services d'intervention d'urgence des pays alliés et des pays partenaires. C'était la deuxième fois que l'AP-OTAN envoyait une délégation d'observation à un exercice de l'EADRCC ; elle avait précédemment participé à l'exercice IDASSA mené en Croatie en mai 2007. 

La délégation de l'AP-OTAN a pu observer des opérations de sauvetage sur différents sites de l'exercice et assister en direct à la coopération sur le terrain entre les équipes d'intervention des pays membres et des pays partenaires de l'OTAN.

La Commission sur la dimension civile de la sécurité mène régulièrement des débats sur les défis posés par le terrorisme international et les catastrophes naturelles et sur le rôle joué par  l'Alliance pour renforcer les capacités de réaction nationales et les réponses à l'échelle internationale face à de tels événements. Au cours des dernières années, la Commission a adopté plusieurs rapports sur des questions telles que le rôle de l'OTAN en matière de protection civile, de protection des infrastructures critiques et de détection des risques chimiques, biologiques, radiologiques et nucléaires (CBRN). La participation aux exercices de l'EADRCC s'inscrit dans la continuité de ces travaux.

Les membres de la délégation ont salué l'EADRCC pour l'organisation de ces exercices, soulignant l'avantage qu'il y a à rassembler des équipes de différents pays pour qu'elles s'exercent ensemble dans un environnement étranger et inconnu. Apprendre à mener des opérations sous la direction des autorités d'un pays hôte est un autre objectif important de tels exercices, et les membres de la délégation ont appris qu'à cet égard la performance des équipes participantes pouvait être considérée comme très positive. Les membres de la délégation ont également noté que ces exercices aident à l'élaboration de pratiques et de procédures et à la création de liens interpersonnels qui constitueront sans doute des atouts précieux en cas de véritable catastrophe.

Les exercices comportent également un mécanisme d'évaluation permettant de tirer des enseignements. La délégation a appris que certains des enseignements tirés des exercices précédents ont déjà été mis en application. Ils concernent entre autres les besoins suivants :

·         ménager une plus grande part à l'analyse et à la prise de décision en matière de gestion des ressources ;

·         établir les sites de telle sorte que les équipes participantes éprouvent plus de difficultés à œuvrer à l'unisson ;

·         faire une meilleure utilisation des directives et des normes internationales existantes ;

·         renforcer les interactions avec le pays hôte et faire participer l'ensemble du système national de réaction à l'exercice.

Outre les pays membres de l'OTAN, les exercices de l'EADRCC sont aussi ouverts aux 22 pays partenaires du Conseil de partenariat euro-atlantique (CPEA), au sept pays partenaires du Dialogue méditerranéen et aux quatre pays partenaires de l'Initiative de coopération d'Istanbul, soit en tout 61 pays. Beaucoup d'entre eux, comme l'Arménie, sont situés dans des zones ayant subi d'importantes catastrophes naturelles par le passé, ou sont régulièrement confrontés à des urgences de grande ampleur.

Les partenaires suivants ont envoyé des équipes à l'exercice ARMENIA 2010 : l'Arménie, l'Autriche, le Belarus, la Géorgie, le Kazakhstan, Israël, la République de Moldova, le Tadjikistan et l'Ukraine. Les membres de la délégation ont également salué l’envoi de personnel russe pour les besoins de l'exercice, perçu comme un exemple positif de coopération concrète entre l'OTAN et la Russie. A cet égard, il convient de souligner que l'EADRCC a été créé à l'initiative de la Russie.

Pour les membres de la délégation, une telle diversité de participants et de pays hôtes potentiels est une autre caractéristique unique, particulièrement digne d'intérêt, des exercices de l'OTAN. Ils ont également apprécié le fait que ces exercices donnent à des pays, par ailleurs politiquement en désaccord, l'occasion de laisser leurs différends de côté et de se concentrer sur une coopération concrète.

Les membres de la délégation ont également souligné que s'entraîner à apporter ainsi qu'à recevoir l'aide internationale et perfectionner les procédures et les capacités de réaction nationales sont des objectifs essentiels tant pour les pays membres que pour les pays partenaires. Ils ont donc formulé des encouragements pour que le plus grand nombre possible de pays de l'OTAN envoie des équipes – plutôt que d'envoyer juste des experts – aux futurs exercices, dans la mesure du possible compte tenu, notamment, des contraintes logistiques et financières qui pourraient rendre leur participation difficile.  

En prévision du prochain sommet des chefs d'Etat et de gouvernement à Lisbonne et de l'adoption prévue du nouveau Concept stratégique, les membres ont émis l'espoir de voir la contribution de l'OTAN clairement reconnue dans le domaine des plans civils d'urgence et de la capacité de réaction en cas de catastrophe. Ils ont mis l'accent sur le fait que, dans la contribution qu'elle a soumise au secrétaire général de l'OTAN le 13 avril 2010, l'AP-OTAN recommandait que l'on donne une plus grande visibilité à l'EADRCC et à son rôle en matière de réaction en cas de catastrophe. Cela donnerait un exemple positif des « multiples raisons pour lesquelles [l'Alliance] présente une importance directe pour la sécurité de ses citoyens. »

Dans son document, l'Assemblée a également souligné que l'Alliance joue un « rôle particulier dans l'amélioration des moyens destinés à atténuer les effets de l'emploi d'armes de destruction massive (ADM) » et a indiqué que « l'Alliance devrait utiliser les moyens dont elle dispose en matière de plans civils d'urgence pour former les premiers intervenants à des situations d'urgence impliquant des ADM et renforcer les unités de réaction rapide qui pourraient, à la demande d'une autorité nationale, aider sur place ces premiers intervenants. » 

A cet égard, les membres de la délégation se sont réjouis de voir que désormais les scénarios des exercices comportent systématiquement un élément CBRN et ont été impressionnés par la performance des équipes CBRN venues d'Arménie, du Belarus, de la République de Moldova, de Pologne et d'Ukraine. Ils espèrent que la capacité de réaction aux incidents CBRN occupera une place encore plus importante dans les exercices futurs, notamment avec des scénarios prévoyant des incidents provoqués par l'homme.

Un des objectifs clé de tels exercices est aussi de renforcer la coordination de l'assistance internationale en cas de catastrophe. Sur ce point, les membres de la délégation ont loué la présence et de la participation active, à l'exercice ARMENIA 2010, de représentants du BCAH, qui est l'agence principale des Nations unies dans le domaine de la coordination des opérations en cas de catastrophes. Ils ont toutefois déploré que la participation de l'OTAN aux exercices de l'UE, et vice-versa, ne se soit toujours pas concrétisée.

La coordination de la réception de l'aide internationale était le thème principal du séminaire organisé par le Groupe Protection civile (CPG) de l'OTAN dans le cadre du programme destiné aux observateurs de l'exercice ARMENIA 2010. Per Anders Berthlin, consultant auprès du BCAH des Nations unies a rappelé aux participants que les actuels mécanismes internationaux de coordination de la réaction en cas de catastrophe sont nés de l'expérience vécue lors du séisme qui a touché l'Arménie en 1988. Avec cette catastrophe majeure, les organes des Nations unies et les autres acteurs internationaux ont brutalement pris conscience du fait que des mécanismes de coordination faisaient cruellement défaut.

Le Colonel Gamlet Matevosyan, recteur de l'Académie d'Etat de gestion des crises, Office arménien des opérations de sauvetage, a rappelé l'ampleur des dégâts subis lors du séisme de 1988 : 25 000 morts, 514 000 sans-abri, les villes de Spitak, Gyumri et Vanazdor détruites respectivement à 100, 75 et 25 %, et des dégâts matériels estimés à au moins 9 à 10 milliards de dollars américains. Il a expliqué que l'Arménie avait été prise totalement au dépourvu face à cette catastrophe : sept heures se sont écoulées avant que la première réaction d'ampleur face au séisme soit décidée et le public n'a pour ainsi dire reçu aucune information. L'Arménie n'avait ni force de secours, ni organe d'Etat chargé de la coordination de l'aide nationale et internationale, ni les capacités pour diriger le travail des équipes de secours envoyées à l'Arménie par 17 pays.

Les enseignements tirés du séisme de Spitak ont ainsi conduit l'Arménie à repenser entièrement ses structures de gestion des urgences avec la création d'une force d'Etat des opérations de sauvetage, d'une agence puis, plus tard, d'un ministère des situations d'urgence, et de l'académie de gestion des crises qui aujourd'hui aide à former le personnel d'encadrement arménien des intervenants d'urgence.

Comme l'a souligné M. Berthlin, la création en 1992 du département des Affaires humanitaires par les Nations unies et celle du BCAH en 1997, découlent aussi directement de l'expérience de Spitak. Grâce à sa démarche de regroupement, le BCAH fournit à ce jour une plateforme globale permettant à tous les acteurs gouvernementaux et non gouvernementaux présents sur le terrain de coordonner leurs interventions dans chaque domaine spécifique, comme la santé, l'eau et l'assainissement, etc. 

Toutefois, M. Berthlin a souligné que de nombreux défis demeurent. Certains sont liés au nouvel environnement dans lequel les catastrophes se produisent de nos jours :

·         un nombre croissant de catastrophes de grande ampleur touchant de plus grands groupes de population ;

·         la difficulté qu'il y a à traiter un flux d'information plus rapide et toujours plus dense ;

·         un nombre croissant d'intervenants – Etats, ONG et nouveaux acteurs du secteur privé ; l'accent a cependant été mis sur le fait que la bonne volonté de ces acteurs privés – tels que les sociétés de téléphonie mobile ou les compagnies de navigation – à soutenir les efforts humanitaires internationaux génère également beaucoup de nouvelles possibilités ;

·         les préoccupations concernant la sécurité des intervenants sur certains théâtres ;

·         les interventions dans les pays disposant de faibles capacités nationales, comme Haïti.

Ragnar Boe, président du CPG de l'OTAN, a également signalé les défis distincts qui accompagnent la demande, la réception et l'apport d'aide. En ce qui concerne ceux relatifs à la demande d'assistance, il a cité les points suivants :

·         l'importance de procéder à une évaluation détaillée des besoins ;

·         la nécessité de bien connaître et comprendre le profil des différents intervenants potentiels au niveau national et international ;

·         l'importance d'avoir des accords pré-établis, par exemple sur les questions de transport ou de transit transfrontière ;

·         les législations nationales.

L'OTAN, tenant compte de ces difficultés, a élaboré un ensemble de directives non obligatoires pour les demandes d'aide, l'objectif étant de faciliter et de normaliser le processus de demande d'aide internationale.

Les défis à relever dans le domaine de la réception d'une aide sont les suivants :

·         l'interopérabilité, étant donné qu'il y a peu de normes internationales en ce qui concerne les équipements, les procédures, etc. ;

·         les langues / la communication ;

·         la nécessité d'établir des procédures et des normes propres à accélérer les processus de réception de l'aide.

Enfin, ceux qui fournissent l'aide sont également confrontés à un certain nombre de choix à faire et de questions juridiques à résoudre :

·         choisir de quelle façon leur aide sera livrée -par des moyens bilatéraux ou multilatéraux ;

·         décider si l'aide sera sous forme de dons ou devra être remboursée ;

·         clarifier le statut juridique des premiers intervenants et de leurs activités, M. Boe a informé les délégués que l'OTAN travaille actuellement sur un projet visant à résoudre cette question ;

·         renoncer à réclamer des compensations en cas de dégâts à des biens.

M. Boe a souligné que l'OTAN peut offrir son aide par l'intermédiaire de l'EADRCC et de son mécanisme de demande et de fourniture d'aide basé sur le volontariat, au moyen de son vivier de 338 experts civils, de ses outils et procédures – notamment avec les exercices d'évaluation de la capacité de réaction, les équipes consultatives de soutien et les équipes de réaction rapide -, ainsi que grâce au cadre qu'elle a établi pour l'utilisation des biens et des capacités militaires à l'appui des opérations humanitaires et de secours. 

John Seong, de l'Agence des Etats-Unis pour le développement international (USAID),  principal organisme des Etats-Unis dans le domaine de l'assistance à l'étranger en cas de catastrophe, a décrit le rôle joué par son agence pour aider les pays sinistrés. Il a expliqué  que l'aide des Etats-Unis peut être livrée au moyen de 4 filières, avec le soutien d'une équipe de gestion des réactions située à Washington, DC, disponible 24 heures sur 24, 7 jours sur 7 :

·         débours immédiat d'argent liquide à l'ambassade ou à la mission sur place ;

·         déploiement d'équipes d'évaluation de la catastrophe, puis d'équipes de réaction aux catastrophes ;

·          subventions aux agences d'aide des Nations unies, de l'Union européenne et aux agences locales ;

·         expédition de produits de base, notamment depuis les trois points de réserves constituées à l'avance à Miami, Pise et Dubai.

M. Seong a indiqué que l'armée américaine est également déployée de temps à autre en réponse à des catastrophes dans d'autres pays – parfois à la demande de l'USAID -, mais c'est l'USAID qui conserve le rôle principal, l'armée américaine jouant un rôle de soutien. M. Seong a insisté sur le fait que la coordination des efforts entre civils et militaires s'améliore.

Soumis respectueusement,

 

L’honorable Sénatrice Jane Cordy

Association parlementaire canadienne de l’OTAN (AP OTAN)

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