Du 6 au
9 juin 2014, la sénatrice Janis Johnson et le député
Gord Brown, coprésidents de la Section canadienne du Groupe
interparlementaire Canada–États‑Unis, ont été les hôtes de la 54e Réunion
annuelle du Groupe interparlementaire à Ottawa, Ontario. Assistaient également
à la rencontre six sénateurs canadiens, sept députés de la Chambre
des communes, cinq sénateurs américains et quatre membres de la
Chambre des représentants des États‑Unis (voir l’annexe). Les ministres
Peter MacKay, Kerry‑Lynne Findlay et Lisa Raitt, de même
que l’honorable Bruce Heyman, ambassadeur des États‑Unis d’Amérique
au Canada, se sont joints aux délégués dans le cadre de certaines activités. La
délégation américaine était dirigée par les sénateurs Amy Klobuchar et
Mike Crapo, et le représentant Bill Huizenga.
La délégation canadienne était appuyée par Mmes Angela Crandall,
secrétaire, et June Dewetering, conseillère principale, ainsi que
MM. Jim Lee et Jed Chong, tous deux conseillers.
LA RÉUNION ANNUELLE ET LES OBJECTIFS DE LA DÉLÉGATION
Mis sur pied en
1959, le Groupe interparlementaire Canada–États‑Unis vise à trouver les
points de convergence entre les politiques nationales des deux pays, à lancer
un dialogue sur les points de divergence, à encourager l’échange de
renseignements et à favoriser une meilleure compréhension des préoccupations
communes de la part des législateurs.
Les réunions
annuelles représentent l’un des principaux moyens que prend le Groupe
interparlementaire pour atteindre ses objectifs. Elles ont lieu tour à tour au
Canada et aux États‑Unis et y participent les délégués du Parlement du
Canada et du Congrès des États‑Unis. Durant ces réunions, les délégués
cherchent à dégager les valeurs et les objectifs d’intérêt commun et à trouver
des pistes de solutions aux diverses questions bilatérales et multilatérales
qui les préoccupent.
LES TRAVAUX DE LA RÉUNION ANNUELLE
Lors de la 54e réunion annuelle du Groupe
interparlementaire, les délégués ont participé aux séances plénières
d’ouverture et de clôture ainsi que de discussions sur les sujets
suivants :
·eau
et énergie,
·sécurité
internationale,
·commerce,
·partenariats
public‑privé.
La délégation a également assisté à une réception donnée par
l’ambassadeur des États‑Unis au Canada, l’honorable Bruce Heyman.
LA SÉANCE PLÉNIÈRE D’OUVERTURE
À la séance plénière d’ouverture, les délégués se présentaient tour
à tour et indiquent leur État ou province, leurs principaux intérêts et les
comités auxquels ils siègent.
SUJETS DE DISCUSSION DES SÉANCES PLÉNIÈRES
A.EAU ET ÉNERGIE
1.Réglementation
sur l’eau de ballast
Pour amorcer la discussion sur le règlement américain sur l’eau de
ballast, un délégué canadien souligne la nécessité d’élaborer une
réglementation qui convienne à la fois au Canada et aux États‑Unis. Il
parle ensuite du règlement sur les permis de navires pris par l’Agence de
protection de l’environnement des États‑Unis en 2013, qui vise les
navires exploités dans les Grands Lacs et qui énonce la dérogation pour l’île
d’Anticosti et les navires construits avant 2009. Le délégué signale qu’aucun
des navires américains exploités dans les Grands Lacs n’a été construit après
2009. Selon le délégué,du
point de vue canadien, la technologie nécessaire à se conformer aux règlements
n’a toujours pas été mise au point, et les navires canadiens ne disposent pas
de système de traitement des eaux de ballast, dont le coût s’élève à
5 millions de dollars par navire canadien. Or, comme les exploitants
américains ne sont pas tenus d’engager ces dépenses, leurs homologues canadiens
devenus moins concurrentiels seraient forcés d’augmenter le prix de leurs
marchandises pour absorber les coûts associés. Un collègue fait d’ailleurs
observer que les espèces envahissantes constituent un sérieux problème, que le
Canada n’a pas connu depuis quelques années.
Un délégué des États‑Unis appelle l’attention sur une lettre
bipartisane envoyée à l’Agence de protection de l’environnement pour réclamer
l’établissement d’une réglementation harmonisée et réalisable sur le plan tant
pratique que technologique. Il indique que d’aucuns considèrent la
réglementation comme un moteur qui stimulera la mise au point de technologies
qui n’existent pas encore. Selon un collègue, la réglementation vise à remédier
au problème des espèces envahissantes, problème majeur potentiellement nuisible
à l’économie. Un autre délégué des États‑Unis est d’avis que son pays et
le Canada gagneraient tous deux à maintenir l’absence des espèces
envahissantes, mais qu’ils devront mesurer leurs attentes quant à l’utilisation
d’une technologie inexistante.
2.Énergie
Lors de la discussion sur l’énergie,
un délégué du Canada a déclaré en premier lieu que les États‑Unis et le
Canada possèdent le plus grand marché intégré de l’énergie du monde et diverses
sources d’énergie. Notant que le Canada est le fournisseur le plus stable,
sécuritaire et fiable de ressources énergétiques des États‑Unis, le
délégué indique qu’il en importe aussi de ce pays. Un autre collègue mentionne
qu’un approvisionnement fiable et peu coûteux en énergie est indispensable à la
croissance économique et à la compétitivité des deux pays. Un autre
délégué canadien fait cependant remarquer que le Canada doit avoir des marchés
d’exportation pour son pétrole et qu’il exportera ailleurs qu’aux États‑Unis
s’il le faut.
Selon un délégué des États‑Unis, ce pays est fier de ses
relations en matière énergétique avec le Canada, et que les deux pays se
préoccupent du transport sécuritaire du pétrole par train. Un collègue répond
que « les États‑Unis doivent évidemment acheter du pétrole du
Canada, son meilleur fournisseur, et que le Canada devrait bien sûr vendre son
pétrole aux États‑Unis, son meilleur client ». Les Américains
doivent comprendre le choix qui s’impose à leur voisin du Nord : si le
Canada n’exporte pas son pétrole aux États‑Unis, il se tournera vers la
Chine ou d’autres marchés étrangers. Un collègue des États‑Unis évoque la
réduction de la dépendance aux combustibles fossiles, alors qu’un autre fait
ressortir la nécessité de prendre des mesures plus fermes pour protéger
l’environnement.
Les délégués du Canada expriment leur mécontentement devant
l’approbation maintes fois retardée du projet de pipeline Keystone XL.
Selon eux, les sables bitumineux sont importants tant pour le Canada que les
États‑Unis et leur exploitation se poursuivra que le projet soit approuvé
ou non. Ils font aussi remarquer qu’un réseau de pipelines franchit déjà la
frontière commune et que le transport de pétrole par pipeline se révèle moins
dangereux que celui par train. Ils décrivent le projet de pipeline
Keystone XL de « ballon » politique.
Les délégués des États‑Unis ont des opinions divergentes sur
le projet de pipeline Keystone XL. L’un d’entre eux exprime son
mécontentement devant les retards injustifiés et réclame la délivrance de
permis et l’exploitation immédiate du pipeline. Par opposition, un autre
collègue américain déclare que les protestations sont sans fondement et qu’un
réseau de pipelines traverse déjà la frontière canado‑américaine. Par
contre, un autre délégué des États‑Unis estime qu’il faut permettre au
processus fédéral de suivre son cours et que le contourner créerait un mauvais
précédent. Les délégués soulignent que les membres du Congrès n’accordent pas
tous le même soutien au projet, même si tous s’entendent pour dire qu’une
décision doit être prise.
Un délégué du Canada déclare que le financement américain consenti
aux groupes environnementaux canadiens entrave l’adoption d’une approche
réglementaire équilibrée, tandis qu’un collègue fait observer la baisse des
émissions des gaz à effet de serre causée par les sables bitumineux. Un autre
délégué du Canada fait état des exigences de la province de l’Alberta quant à
la remise en état des terres dont on a extrait le pétrole.
Puisque les changements climatiques
représentent un enjeu planétaire non défini par les frontières, un délégué du
Canada presse une coopération canado‑américaine en la matière. Toutefois,
un délégué des États‑Unis dit qu’il est impératif d’examiner les données
scientifiques sur les changements climatiques.
3.Autres
questions sur l’eau
L’eau étant la plus importante des ressources, un délégué du Canada
évoque les divers modes de collaboration entre le Canada et les États‑Unis
dans ce secteur, en particulier la Commission mixte internationale et les
nombreuses ententes sur la qualité de l’eau. Le délégué se prononce aussi sur
les répercussions de la fracturation hydraulique sur les nappes phréatiques
ainsi que celles des phénomènes météorologiques extrêmes et les changements
climatiques sur la qualité de l’eau.
Un délégué des États‑Unis aborde la question des phénomènes
météorologiques extrêmes, soulignant la baisse considérable d’ouragans, mais la
hausse de sécheresses dans les régions sensibles à celles‑ci. Il laisse aussi
entendre que la température de la Terre n’augmente plus et que les émissions de
dioxyde de carbone ne constituent pas le seul facteur à prendre en
considération. Un collègue mentionne la création d’un bureau du climat au
département d’Agriculture des États‑Unis ainsi que la gravité,
l’intensité et l’irrégularité des phénomènes météorologiques extrêmes.
Un délégué du Canada se prononce sur la concentration de plus en
plus forte de médicaments dans l’eau, notamment des antibiotiques. Il indique
que l’Europe a adopté une position ferme sur l’administration d’antibiotiques
aux animaux et ses conséquences sur les sources d’eau. Il mentionne aussi des
programmes de récupération des médicaments et un collègue américain poursuit en
disant que 50 tonnes de médicaments ont été récupérées en un seul jour
lors d’une initiative de ce genre.
B.SÉCURITÉ INTERNATIONALE
1.Arctique
Un délégué du Canada engage la
discussion sur l’Arctique et relève l’importance de la région pour le Canada en
général et plus particulièrement pour ceux qui y habitent. Il fait des
observations sur la présidence du Canada au Conseil de l’Arctique et relève les
préoccupations en matière de sécurité et de souveraineté du Nord du Canada.
Les États‑Unis succédant au Canada à la présidence du Conseil de
l’Arctique, un délégué des États‑Unis prévoit une transition sans heurt,
car les deux pays ont bien des objectifs en commun. Le délégué évoque aussi le
développement du passage du Nord‑Ouest, découlant des changements
climatiques, qui est propice à la réduction des coûts de transport et
l’augmentation des capacités d’exportation.
2.Organisation
du traité de l’Atlantique nord et l’Ukraine
Un délégué des États‑Unis entame
la discussion sur l’Organisation du traité de l’Atlantique nord (l’OTAN) et
l’Ukraine et qualifie l’invasion de la Crimée par la Russie d’inacceptable et
de déstabilisante. Il avance l’idée d’une collaboration entre les pays
développés pour résoudre ce type de conflit. Selon lui, les États‑Unis ne
devraient pas s’attendre à agir seuls. Au contraire, il faut agir de manière
réaliste et sensée et mobiliser les autres pays. Saluant son appui à l’Ukraine
et à l’Afghanistan, le délégué presse le Canada d’augmenter ses dépenses en
défense : en proportion à son PIB, il maintient, voire diminue ses dépenses
en défense depuis les années 1990. Dans la même veine, un collègue fait
des observations favorables sur le rôle du Canada dans les conflits de
l’Afghanistan et ailleurs dans le monde. En outre, un délégué des États‑Unis
indique que l’Allemagne est un pays puissant qui devrait agir comme tel et que
l’OTAN est plus importante que jamais.
Selon un délégué du Canada, la Russie s’est mise à dépenser
davantage en défense, et il faut lui présenter un front commun tant sur le plan
collaboratif que financier. On doit faire comprendre au président de la Russie,
M. Poutine, que ses actions tirent à conséquence. Un collègue laisse
entendre que l’invasion de la Crimée par la Russie n’est qu’une première étape,
qui cadre bien avec le comportement de la Russie à l’égard des autres pays, car
elle s’en tire encore à bon compte. Si la Russie juge que les pays réagissent
comme des moutons, elle réagira comme un lion. Un autre délégué du Canada fait
savoir que le monde a changé depuis le 11 septembre et que les ennemis des
États‑Unis sont aussi des ennemis du Canada. Ces deux pays étant alliés,
leur relation devrait en témoigner à leur frontière commune, et cette dernière
ne devrait pas constituer une barrière.
3.Cybersécurité
La discussion sur la cybersécurité est amorcée par un délégué du
Canada. Celui-ci déclare que nous vivons désormais dans une société numérique
et qu’aucun pays n’est à l’abri d’atteintes à la protection des données. Il
faut donc parer aux risques d’une telle société, dont ceux causés par le manque
d’encadrement d’Internet et la présence de multiples intervenants. Le délégué
déclare que, même si le Canada et les États‑Unis sont passés maîtres dans
la collecte de données, ils ne le sont pas particulièrement dans leur
protection et doivent accroître leur vigilance. Ses collègues du Canada
soulignent le droit à la vie privée qui existe dans leur pays, notamment les
libertés de réunion et d’association garanties par la Charte canadienne des
droits et libertés. Il remet en question le besoin du gouvernement de
savoir l’identité d’une personne et le moment auquel il participe à une réunion
ou à une association. Selon lui, la « vraie guerre » d’aujourd’hui
est le vol de propriété intellectuelle et il faut aussi trouver comment
concilier la protection du droit à la vie privée avec la sécurité nationale
lorsqu’il faut remédier aux vulnérabilités.
Selon un délégué des États‑Unis,
la plus grande des vulnérabilités réside dans le cyberespace. Les
infrastructures essentielles des États‑Unis ne sont, pour le moment, pas du
tout sécurisées. Un collègue insiste sur les vulnérabilités et les
« cyberattaques » qui se produisent constamment, tandis qu’un autre
délégué des États‑Unis soutient que ces attaques proviennent de
particuliers, d’organisations et d’autres pays et que les mégadonnées
représentent un « mégaproblème ». Alors qu’une quantité phénoménale
de données sur nous sont collectées tous les jours, il faut considérer les
questions relatives à la vie privée et il est légitime de se demander si les
individus sont protégés quand au moins une entité semble tout savoir sur eux.
Un autre délégué, quant à lui, presse pour un partenariat étroit entre les
États‑Unis et le Canada pour ce qui est des cyberattaques potentielles et
souligne lui aussi l’existence de grandes vulnérabilités. Il relève en
particulier la nécessité de protéger les services publics à mesure que les
systèmes de transmission sont de plus en plus numérisés.
C.QUESTIONS COMMERCIALES
1.Accords
commerciaux
Pour lancer la discussion sur les accords commerciaux, un délégué du
Canada relève que les États‑Unis est le principal partenaire commercial
du Canada tant pour le chiffre que le volume d’affaires. Il mentionne aussi les
accords que le Canada a conclus dernièrement ou est en train de négocier avec
l’Union européenne, la Corée du Sud, le Japon, l’Inde et les pays membres du
Partenariat transpacifique. Quant aux derniers, les États‑Unis pourraient
aider à faire avancer les négociations. Selon le délégué, la portée de l’accord
conclu entre le Canada et l’Union européenne est beaucoup plus vaste que celle
de l’Accord de libre‑échange nord‑américain (ALENA), même si ce
dernier accord a permis la création d’emplois, l’établissement de chaînes
d’approvisionnement nord‑américaines et l’augmentation du commerce entre
le Canada, les États‑Unis et le Mexique. De même, le délégué se prononce
sur le Plan d’action sur les marchés mondiaux, nouvelle politique de commerce
international du gouvernement fédéral, de même que sur les objectifs et les
pays qui y sont précisés.
Un collègue du Canada fait des observations sur l’importance d’une
perspective continentale : les trois pays membres de l’ALENA font
concurrence, ensemble, avec le reste du monde. Ils doivent donc exercer un
libre‑échange équitable puisqu’ils forment à eux un « acteur
économique » sur le marché mondial. Le délégué fait remarquer que des
voitures fabriquées en Amérique du Nord traversent des frontières communes de
nombreuses fois, ce qui cause certains frais à chaque passage, alors que les
automobiles fabriquées à l’étranger traversent moins de frontières nord‑américaines,
voire une seule fois à leur entrée sur le sol nord‑américain, donc à
moindres frais.
Selon un délégué des États‑Unis, son pays tient les relations
commerciales avec le Canada en haute considération, et il est encore possible
de les élargir ainsi que celles avec le Mexique. Cela dit, il existe au sein
des deux partis politiques aux États‑Unis une opposition aux accords
commerciaux. Un collègue poursuit en disant que certains Américains estiment
que l’ALENA a poussé certaines entreprises à quitter les États‑Unis pour
le Mexique. Par ailleurs, un autre délégué des États‑Unis note que les
questions relatives au commerce se complexifient et se polarisent aux États‑Unis,
à qui il importe de véhiculer leur identité par le commerce, de mettre l’accent
sur la règle de droit et de trouver des solutions favorables à tous. Un
collègue fait observer que les pertes d’emplois aux États‑Unis ne
découlent pas des accords commerciaux, mais bien de la manipulation des devises.
Dans la même veine, d’autres délégués américains se prononcent sur les effets
néfastes de la manipulation des devises, notamment par la Chine.
Les délégués discutent ensuite des négociations du Partenariat
transpacifique. Un délégué des États‑Unis les qualifie de capitales pour
les pays développés et indique que la quête pour obtenir l’autorisation de
négocier des accords commerciaux du président, expirée en 2008 et qui sert à
fournir des assurances aux partenaires commerciaux du pays, a perduré trop longtemps.
Les négociations relatives au PTP et au TPA sont des priorités et elles auront
de fortes répercussions sur ce à quoi ressemblera le monde dans une décennie.
Les négociations du Partenariat transpacifique et l’Autorisation du président
ne seront pas susceptibles de se produire avant les élections de mi‑mandat
de novembre 2014. D’autre part, un autre délégué affirme que
l’autorisation sert à court‑circuiter l’approbation d’accords commerciaux
puis passe au traitement des questions de main‑d’œuvre, d’environnement
et de devise dans les accords commerciaux. Il termine en disant qu’une lettre
bipartisane a été envoyée au président sur les questions de devises dans le
contexte des négociations du Partenariat transpacifique. Un autre délégué des
États‑Unis exprime la méfiance du Congrès américain à se saisir d’un
accord commercial non modifiable et conduit à penser que l’accord du
Partenariat transpacifique ne serait probablement pas adopté sans
l’autorisation du président. Un délégué du Canada fait part de certaines
réserves du Canada au sujet des négociations du Partenariat transpacifique,
notamment en ce qui concerne le secteur de la fabrication.
Selon un délégué des États‑Unis, les Américains sont
conscients que le Canada est le plus grand partenaire commercial des États‑Unis
sur le plan théorique, mais qu’ils ne constatent pas les effets sur le plan de
la pratique. Un collègue note que le libre‑échange ne fait pas le poids
s’il n’est pas équitable et presse la tenue d’une discussion beaucoup plus
ouverte sur les répercussions de négociations commerciales, notamment sur leur
incidence probable sur l'excédent ou déficit commercial des États‑Unis.
2.Les
exigences en matière d'étiquetage du pays d’origine aux États‑Unis
Un délégué du Canada enclenche la discussion sur l’étiquetage
obligatoire du pays d’origine aux États‑Unis en le qualifiant de parfait
exemple de ce qu’il ne faut pas faire, car il est nuisible au Canada et aux
États‑Unis et le secteur du bétail était auparavant le plus intégré en
Amérique du Nord. Quoiqu’une guerre commerciale ne profite à personne, le
Canada a dressé une liste de mesures de représailles à appliquer s’il le faut.
Le délégué note que le litige sur l’étiquetage obligatoire du pays d’origine
n’est qu’un parmi tant d’autres, tout comme les dispositions législatives
privilégiant l’achat de biens américains, les droits à la propriété
intellectuelle et, parfois le bois d’œuvre. Il ajoute que le litige sur
l’étiquetage obligatoire pourrait être résolu par le remplacement d’une étiquette
« Produit en Amérique du Nord », qui pourrait être ajoutée après la
transformation du produit. Un collègue soutient que ce litige est sérieux et
qu’il pourrait mener à des pertes d’emplois dans les deux pays. Au lieu d’être
en désaccord, le Canada et les États‑Unis doivent unir leurs forces pour
faire concurrence sur les marchés étrangers.
Un délégué des États‑Unis fait remarquer que l’Organisation
mondiale du commerce (OMC) a tranché à maintes reprises en défaveur des États‑Unis
pour ce qui est de l’étiquetage obligatoire du pays d’origine. Selon lui,
l’abrogation de l’étiquetage obligatoire du pays d’origine aux États‑Unis
est à la fois compliquée que problématique, et l’instauration d’une étiquette
« Produit d’Amérique du Nord », complexe. Il est question de savoir à
quel moment un produit de viande devient nord‑américain. Un collègue
répond qu’une étiquette devrait indiquer le lieu de provenance de l’animal,
alors que l’autre déclare qu’il faut régler la situation rapidement.
Les délégués se sont également entretenus du secteur laitier. Un
délégué américain indique que le Canada impose des quotas sévères et que le
secteur laitier n’est pas visé par l’ALENA. Il poursuit en disant que certains
Américains voudraient faire plus de commerce de produits laitiers, des œufs et
des produits de la volaille avec le Canada. Le délégué fait valoir que les
États‑Unis ont apporté des changements à son programme laitier pour le
rendre plus axé sur le marché. Un délégué du Canada affirme que le système de
gestion au pays sert à contrôler l’offre et ne garantit pas de profits aux
agriculteurs. En outre, les États‑Unis consentent toujours de fortes
subventions à leurs producteurs laitiers.
3.Initiatives
Par‑delà la frontière et Conseil de coopération en matière de réglementation
Un délégué des États‑Unis engage
la discussion sur les deux initiatives Par‑delà la frontière et le
Conseil de coopération en matière de réglementation. Il les déclare nécessaires
pour rendre la frontière canado‑américaine plus fluide pour le transport
de marchandises et de personnes. Le Conseil de coopération voit ses dossiers
avancer plus lentement, tandis que nombre de projets pilotes amorcés dans le
cadre de l’initiative Par‑delà la frontière sont en cours. Le délégué
déclare qu’il faut financer les deux initiatives de manière appropriée, et un
collègue indique que les États‑Unis et le Canada doivent faire front
commun pour gagner en efficacité dans la mesure où leurs intérêts concordent
les uns avec les autres sur l’échiquier mondial. Un autre délégué des États‑Unis
presse les deux pays de collaborer avec le Mexique dans le cadre de relations
trilatérales.
Selon un délégué du Canada, les initiatives Par‑delà la
frontière et le Conseil de coopération en matière de réglementation découlent
des attaques du 11‑Septembre, qui ont par ailleurs mené à l’instauration
du Plan d’action pour une frontière intelligente en décembre 2001 par le
Canada et les États‑Unis. Dans un certain sens, ce plan est le
prédécesseur de l’initiative Par‑delà la frontière et du Conseil de
coopération en matière de réglementation annoncés en février 2011. Le
délégué affirme que les approches bilatérales entre le Canada et les États‑Unis
ainsi que celles entre les États‑Unis et le Mexique doivent devenir
trilatérales, en vue d’instaurer une zone de commerce en Amérique du Nord. De
même, il note que le Canada finance l’esplanade des douanes américaines au
nouveau passage de la frontière entre Détroit, au Michigan, et Windsor, en
Ontario. Un collègue déclare que la libre circulation des personnes et des
biens de part et d’autre de la frontière contribue de manière importante au PIB
des deux pays. Un autre délégué du Canada affirme que l’amincissement de la
frontière commune et la simplification des chaînes d’approvisionnement apporteraient
des bénéfices considérables et contribueraient à la productivité des pays, ce
qui améliorerait leur compétitivité. Un collègue ajoute que moins il y a de
barrières entre les deux pays, plus ils en tireront des avantages.
Un délégué des États‑Unis note qu’il revient à son pays de
contribuer au financement du nouveau passage entre Détroit et Windsor et à ses
complexes douaniers. Il remercie le Canada d’avoir voulu financer ce nouveau
passage, puisque le pont Ambassador est le plus emprunté en Amérique du Nord.
Un collègue soulève qu’un partenariat public privé a été créé à titre de projet
pilote à la frontière américano‑mexicaine. Cette approche devrait être
également reproduite à la frontière canado‑américaine. Le collègue
souligne aussi l’importance de protéger les droits de propriété intellectuelle
et de lutter contre le vol de propriété intellectuelle et les contrefaçons. Il
note que le Canada figure toujours sur la liste de surveillance
spéciale 301 du United States Trade Representative.
D.PARTENARIATS PUBLIC‑PRIVÉ
Un délégué du Canada ouvre la
discussion sur les partenariats public‑privé en faisant remarquer que ce
type de projet a été mis sur pied au Canada dans le secteur ferroviaire avant
d’être repris dans les autres secteurs et pour d’autres types de projets, en
particulier les infrastructures municipales. Un collègue indique que pour
réussir un projet en partenariat public-privé, il faut le structurer de manière
à ce que les intérêts et les mesures incitatives concordent et à ce que le
secteur privé puisse décider des mesures à prendre pour réaliser les objectifs
fixés par le secteur public. Un autre délégué du Canada prévient que les
obligations contractuelles doivent être bien claires avant d’entreprendre un
projet en partenariat public-privé.
Selon un délégué des États‑Unis, le Canada administre mieux
les projets en partenariat public-privé que son voisin. Ce type de projet fait
partie des nouveaux modes de financement des infrastructures et des transports
aux États‑Unis. Dans la même veine, un collègue explique les barrières au
financement du transport aux États‑Unis et ajoute qu’il est difficile
d’augmenter les droits de péage sur le plan politique. Un autre délégué des
États‑Unis ajoute que les péages ralentissent la circulation et font
augmenter la consommation d’essence.
LA SÉANCE PLÉNIÈRE DE CLÔTURE
Lors de la séance plénière de clôture,
on a résumé les principaux points abordés lors de la réunion annuelle. Des
mesures de suivi ont également été établies.
A.Eau
et énergie
Pour ce qui est des eaux de ballast,
les délégués conviennent de la prise nécessaire de règlements harmonisés sur
l’eau de ballast réalisables sur le plan pratique et technologique, et ils
prennent acte que les espèces envahissantes peuvent être un problème important
et coûteux.
Concernant la question de l’énergie, les délégués conviennent de
l’importance de la sécurité énergétique en Amérique du Nord et la contribution
du projet de pipeline Keystone XL et du transport sécuritaire des
hydrocarbures à celle-ci. Il est noté que le Canada continue d’être le
principal fournisseur fiable et sûr de diverses sources d’énergie des États‑Unis,
et à titre de pays exportateur d’énergie, ses exportations devraient être
destinées principalement aux États‑Unis au lieu de marchés étrangers. De même,
les délégués soulignent qu’il y a déjà de nombreux pipelines qui franchissent
la frontière canado‑américaine. Ils ajoutent qu’une décision relative au
projet Keystone XL devrait être rendue dans les plus brefs délais étant
donné qu’un processus de réglementation est en place.
Les délégués observent que le Canada
et les États‑Unis ont conclu de nombreuses ententes bilatérales sur
l’eau, la plus importante des ressources. Cette dernière est touchée par des
phénomènes météorologiques extrêmes et d’autres phénomènes liés au climat.
Selon les délégués, il faut se pencher sur la qualité de l’eau en lien et la
forte concentration dans celle-ci de produits pharmaceutiques, qui contiennent
des modulateurs endocriniens.
B.Sécurité
internationale
Notant que l’Arctique est essentiel pour les deux pays, les délégués
prévoient une passation de la présidence du Conseil de l’Arctique du Canada aux
États‑Unis sans heurt. De même, ils décrivent le passage du Nord‑Ouest
comme une route maritime d’évolution positive due aux changements de
l’environnement dans l’Arctique.
Pour ce qui est de l’OTAN et de l’Ukraine, les délégués déclarent
que les interventions de la Russie en Crimée sont inacceptables et
déstabilisantes et que la communauté internationale doit tenir tête à la
Russie. De même, ils disent qu’il faut saluer le Canada pour son appui à
l’Ukraine et à l’Afghanistan.
Au sujet de la cybersécurité, les délégués font valoir que les pays
doivent prendre des mesures en matière de sécurité numérique pour parer aux
risques, notamment ceux causés par le manque d’encadrement d’Internet et la
présence de multiples intervenants. Ils proposent que nos pays travaillent en
collaboration afin de régler les questions liées à la protection des données,
car notre plus grande vulnérabilité réside dans le cyberespace.
C.Questions
commerciales
D’après les délégués, il existe au
sein des deux partis politiques des États‑Unis, des membres qui
s’opposition aux accords commerciaux, mais si commerce il y a, il doit prendre
la forme d’un libre‑échange équitable. L’intégration des chaînes
d’approvisionnement en Amérique du Nord fait ressortir la nécessité pour les
partenaires de l’ALENA de travailler ensemble. Qui plus est, les négociations
relatives au Partenariat transpacifique revêtent de l’importance, tout comme
l’Autorisation de négocier des accords commerciaux, du moins pour certains
législateurs américains.
En commentant les litiges commerciaux, qui ne profitent à personne,
les délégués affirment que le Canada et les États‑Unis doivent déterminer
comment aller de l’avant – et non reculer – ensemble, notamment pour
l’étiquetage obligatoire du pays d’origine aux États‑Unis, le bois
d’œuvre, les dispositions législatives privilégiant l’achat de biens américains
et à la protection des droits de propriété intellectuelle. Ils concluent qu’un
étiquetage « Produit en Amérique du Nord » pourrait remédier à bien
des problèmes.
Les délégués expliquent que les
initiatives Par‑delà la frontière et le Conseil de coopération en matière
de réglementation de mesures cherchent à accroître la compétitivité et la
prospérité. Selon eux, il faut en assurer le financement, en plus de celui du
complexe douanier américain du passage frontalier Détroit‑Windsor. Ils
ont également déclaré souhaiter la libre circulation sécuritaire des personnes
et des biens de part et d’autre de la frontière. Ils souhaitent que les
initiatives bilatérales deviennent trilatérales, c’est‑à‑dire que
tous les partenaires de l’ALENA en deviennent parties prenantes.
D.Partenariats
public‑privé
Les délégués font remarquer que le Canada a recours aux partenariats
public-privé dans divers secteurs, notamment ceux du transport et d’autres
infrastructures municipales, et qu’il en a tiré une gamme d’avantages. Par
exemple, le savoir‑faire du secteur privé est mis à contribution pour
servir l’intérêt public. Selon les délégués, les États‑Unis doivent
prendre de nouvelles mesures créatives pour répondre à leurs besoins en matière
de transport et d’autres infrastructures et ils pourraient tirer des leçons de
l’expérience du Canada dans le domaine. Toujours selon eux, il faut laisser le
secteur public déterminer l’objectif, et le secteur privé, les mesures à
prendre pour l’atteindre.
E.Dossiers
à suivre
Voici les dossiers qui feront l’objet d’un suivi :
1)Eau de
ballast : Les délégués des États‑Unis examineront le projet de loi
du sénateur Begich.
2)Projet de
pipeline Keystone XL : Les délégués du Canada fourniront de
l’information sur la remise en état des terres dont on extrait les sables
bitumineux, de même que des statistiques en matière d’environnement.
3)Normes et
manipulation des devises : Les délégués des États‑Unis fourniront de
l’information sur la manipulation des devises dans un contexte de négociations
de libre‑échange.
4)Étiquetage
obligatoire du pays d’origine aux États‑Unis : Les délégués des
États‑Unis considéreront l’établissement d’une étiquette « Produit
en Amérique du Nord » si l’OMC ne tranche pas en faveur de leur pays.
5)Droits de
propriété intellectuelle : Les délégués du Canada communiqueront de
l’information à propos des dispositions sur les marques de commerce dans le
dernier projet de loi d’exécution du budget ainsi que sur l’évolution du projet
de loi C‑8 tout au long de son processus législatif.
6)Frontière
canado‑américaine : Les délégués des États‑Unis compareront
les projets pilotes entrepris à la frontière canado‑américaine à ceux
entrepris à la frontière commune aux États‑Unis et au Mexique.
7)Partenariats
public-privé : Les délégués des États‑Unis donneront suite à la
proposition d’organiser pour les membres du Congrès une séance d’information,
soit à l’ambassade du Canada ou au Capitole, sur les expériences du Canada en
matière de partenariats public-privé.
Respectueusement soumis,
Hon. Janis G. Johnson,
sénatrice, coprésidente
Groupe interparlementaire
Canada–États‑Unis
Gord Brown, député,
coprésident
Groupe interparlementaire
Canada–États‑Unis