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Rapport

INTRODUCTION

L’Association parlementaire canadienne de l’OTAN a l’honneur de présenter son rapport concernant sa participation au séminaire du Groupe spécial Méditerranée et Moyen Orient (GSM) de l’Assemblée parlementaire de l’OTAN (AP-OTAN) qui s’est tenu à Rome, les 27 et 28 juin 2010.  La Sénatrice Raynell Andreychuk a représenté le Canada.

Les principaux sujets abordés lors du séminaire du ont été les suivants : la sécurité maritime et la piraterie, l’immigration et la sécurité, et l’interdépendance énergétique dans la région méditerranéenne. Dans le discours liminaire qu’elle a présenté, Elizabeth Dibble, chef adjointe de mission à l’ambassade des États-Unis auprès de la République italienne, a fait part du programme que l’administration américaine entend mettre en œuvre dans le cadre du processus de paix au Moyen-Orient. Son attention s’est portée sur l’importance accordée à la poursuite des négociations israélo-palestiniennes, l’oratrice faisant valoir que la résolution de ce conflit constituait l’une des clefs de voûte de l’administration Obama en matière de politique étrangère.

UN APERÇU DU GOLFE : LES ÉFFETS DE LA DÉMOCRATISATION ET DE LA CONSOLIDATION DE L’ÉTAT IRAKIEN SUR LES FUTURS SCÉNARIOS DANS LE GOLFE

Reidar Visser, maître de recherche auprès de l’Institut norvégien des Affaires internationales (NUPI), et Faleh Abdul‑Jabar, de l’Institut irakien d’Etudes stratégiques (IIST), ont tous deux évoqué la dimension intérieure que revêtent les efforts poursuivis en matière de consolidation de l’État irakien, ainsi que le rôle joué par les acteurs régionaux en matière de sécurité et de stabilité dans le pays.

M. Visser a fourni un aperçu des scénarios, au nombre de deux, envisagés en Irak. Si le premier prend en compte un Irak centralisé, le second prévoit un État faible et décentralisé en proie à des forces extérieures et au fanatisme religieux. L’orateur a fait valoir que l’option de l’État centralisé était la seule valable et réalisable, mais qu’elle ne pourrait voir le jour que si les représentants des principaux partis en présence parvenaient à s’entendre sur la question. Il a précisé que l'ancien Premier ministre Iyad Allawi et le Premier ministre sortant Nouri al-Maliki étaient d’accord sur de nombreux points et qu’ils devraient être en mesure de s’entendre sur des questions telles que la centralisation de l’autorité de l’État ou l’indépendance du pays vis-à-vis de l’Iran.

Le second scénario envisagé pour l’Irak concerne un État faible et décentralisé, dominé par les pays avoisinants. M. Visser a fait observer que bien qu’ils ne constituent qu’une minorité au sein du Parlement irakien, les partisans d’un État décentralisé n’en sont pas moins influents. L’orateur a mis les délégués en garde contre la tentation des hommes politiques irakiens de former un gouvernement d’unité nationale qui rassemblerait, au prix de son efficacité même, toutes les tendances.

M. Abdul-Jabar a pour sa part souligné cinq problèmes majeurs, auxquels la région du Golfe est confrontée : la démocratisation, le fédéralisme, le mouvement islamique chiite radical, la présence militaire américaine dans la région et ce qu’il a décrit comme le “syndrome de l’État défaillant”, problèmes dont l’orateur a brièvement décrit les effets sur les principaux acteurs régionaux. Il a précisé que les objectifs de l’Iran en Irak avaient en grande partie échoué, en particulier pour ce qui était de l’instauration d’un régime irakien de même obédience et du contrôle des séminaires religieux dispensés dans le pays. Il a insisté sur le fait que les États du Golfe étaient préoccupés par la puissance des groupes chiites dans la région, ainsi que par l’essor politique de la majorité chiite en Irak, majorité qu’ils perçoivent comme un danger potentiel si celle-ci venait à radicaliser la population chiite présente dans le Golfe. En conclusion, M. Abdul‑Jabar a indiqué que l’Irak constituait un modèle pour certains intellectuels dans la région, lesquels se demandent si le pluralisme politique, s’il y fonctionne, ne pourrait pas également fonctionner ailleurs dans le monde arabe.  

Lors de la discussion, les délégués ont orienté leurs questions sur le développement de la société civile en Irak et le fait de savoir si le retrait des troupes américaines du pays constituerait une brèche dans laquelle l’Iran pourrait s’introduire. Les orateurs ont fait valoir que l’on surestimait l’influence de ce dernier en Irak, et que la formation d’une classe moyenne irakienne, indépendante de l’État, participait du développement d’une société civile à part entière et du fondement même d’une société démocratique.

LA SÉCURITÉ MARITIME ET LA PIRATERIE

Le vice-amiral Maurizio Gemignani, commandant du Commandement allié de composante maritime (COM MC) à Naples, et Massimo Marotti, coordinateur de sécurité internationale au ministère italien des Affaires étrangères, se sont concentrés sur les efforts internationaux en matière de lutte contre la piraterie en mer. Ils ont fait valoir que la piraterie qui sévit dans le golfe d’Aden et au large de la Corne de l’Afrique a d’importantes répercussions sur la libre circulation des biens et l’acheminement sans entrave de l’aide humanitaire. Ce faisant, elle a des incidences sur la sécurité et les intérêts économiques des États membres de l’Alliance.

L’Opération maritime Allied Provider a constitué le premier engagement militaire multinational mené par l’OTAN contre la piraterie au large de la Corne de l’Afrique. Cette opération a été relayée par l’Opération Atalanta de l’Union européenne (UE) ; à l’heure actuelle, l’OTAN conduit l’Opération Ocean Shield en coordination avec l’Opération Atalanta, la Task Force 151 de l’armée américaine, et les contributions nationales de la Russie, de la Chine, de l’Inde, du Pakistan, du Japon et d’autres pays.

Le vice-amiral Gemignani a insisté sur la nécessité d’établir un cadre juridique plus précis pour la conduite des opérations de lutte contre la piraterie. Les questions relatives à la traduction en justice des pirates arrêtés (doivent-ils être poursuivis et où doivent-ils l’être ?) sont controversées, d’autant qu’en la matière, il n’existe aucune structure de coordination entre les nations qui participent aux opérations de lutte contre la piraterie. Nombre de pirates arraisonnés ont été relâchés par manque de preuves ou manque d’accords bilatéraux, qui auraient permis de les traduire en justice dans l’un des pays de la région. L’orateur a plaidé avec force pour la formulation de règles d’engagement internationalement reconnues, qui préciseraient les modalités de traduction en justice des pirates présumés.

M. Marotti a fait observer pour sa part que les larges dépenses que nécessitent les opérations militaires rendent difficile le maintien de missions de lutte contre la piraterie en période de crise économique mondiale. Il a en outre fait valoir que le paiement de rançons aux pirates pourrait contribuer au financement d’organisations terroristes dans la région et qu’il était dès lors important de procéder à l’amélioration des moyens de contrôle des actifs financiers.

Les questions des délégués ont porté sur les aspects pratiques liés à la traque des pirates jusque dans leurs bases terrestres de repli et sur la présence de forces armées à bord des bâtiments civils. Les orateurs ont fait remarquer qu’il y aurait danger d’escalade, si le combat était porté jusque dans les bases terrestres des pirates, et qu’il pourrait y avoir des victimes, sur les bâtiments, parmi les otages et les civils.

INTERDÉPENDENCE ÉNERGETIQUE DANS LA RÉGION MEDITERRANÉENNE : APPLICATION CIVILE DE L’ÉNERGIE NUCLÉAIRE

Lorenzo Trombetta, expert en questions syriennes et libanaises et correspondant pour le Moyen-Orient pour l’agence italienne ANSA à Beyrouth, a abordé la question de l’application civile de l’énergie nucléaire au Moyen-Orient et plus particulièrement dans les États du Golfe.

Depuis 2006, on assiste à une course au développement de l’énergie nucléaire dans les pays du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord (MENA). Si nombre de ces pays disposent d’abondantes ressources énergétiques, ils affirment néanmoins que l’augmentation de leurs besoins en la matière est dû à l’accroissement de leur population. L’Égypte a été le premier État de la région à faire part, récemment, de son intention de développer l’énergie ; plusieurs autres pays, parmi lesquels la Syrie et la Libye, ont également fait part de leur intention de procéder de même.

Lors de la discussion qui a suivi, plusieurs délégués ont fait état des coûts engendrés par les programmes de développement de l’énergie nucléaire, parmi lesquels ceux liés au stockage des déchets, et ont demandé à l’orateur quels pouvaient être les effets du programme nucléaire iranien sur les prises de décisions des États de la région.

IMMIGRATION ET SÉCURITE : COOPÉRATION ENTRE LES PAYS  MÉDITERRANÉENS

Ivan Ureta, de l’université de Lugano, en Suisse, et du King’s College de Londres, a examiné les rapports entre migration/mobilité et sécurité dans la région méditerranéenne. Si les immigrés ne constituent qu’un faible pourcentage de la population totale de l’Union européenne, l’orateur a fait valoir que leur taux d’accroissement était important. En Italie, le pourcentage d’immigrés par rapport à la population totale est passé de 2 % en 1990 à 8 % à l’heure actuelle. En Espagne, ce pourcentage est passé de 4 à 14 % durant la même période. Les sources de cette immigration constituent un facteur qu’il faut également prendre en considération. Nombre des immigrés en Espagne proviennent d’Amérique latine, et bénéficient d’une langue et d’une culture similaires qui leur permettent de s’intégrer plus facilement dans la société espagnole que ne le font les immigrants en Italie, lesquels proviennent d’Afrique ou du Moyen-Orient. Soulignant la question des valeurs, M. Ureta a fait observer que les valeurs culturelles traditionnelles véhiculées par les immigrés pouvaient se heurter aux valeurs d’ouverture et de tolérance plus prononcées qui prévalent en Europe. S’il a relevé les inquiétudes éprouvées quant aux liens entre immigrés et terrorisme, l’orateur a prévenu qu’une “criminalisation” excessive de ces derniers serait contre-productive.

Robert Maroni, ministre italien de l’Intérieur, a pour sa part indiqué que son pays jouait un rôle stratégique pour le reste de l’Union européenne. L’Italie, en tant que l’un des États du pourtour méditerranéen, constitue un pôle d’attraction en matière d’immigration. L’orateur a déclaré que le rôle de l’UE dans la région méditerranéenne n’était pas satisfaisant, que les réseaux de trafic de stupéfiants et d’immigration illégale étaient souvent liés et qu’ils constituaient un problème de dimension européenne, qui nécessitait d’être réglé au niveau européen.

M. Maroni a souligné l’importance des initiatives mises en place avec les pays-sources de l’immigration. L’Italie a signé plus de 30 accords bilatéraux avec des pays africains, qui visent à contenir le flux d’immigrants illégaux et à assurer le retour sans encombre de ces derniers vers leur pays d’origine. Parmi les initiatives invoquées figurent la fourniture d’équipements, le partage du renseignement et les programmes de formation dispensés aux forces armées de ces pays. M. Maroni a insisté sur le fait que ces mesures contribuaient aussi à la sécurité de l’ensemble des pays européens, et pas uniquement à celle de l’Italie. Toutefois, les organisations criminelles et les trafiquants d’êtres humains savent quelles sont les limites de ces accords bilatéraux et choisissent leurs itinéraires en conséquence. Un accord européen contribuerait à lutter contre ce genre de problèmes.

Respectueusement soumis,

L’honorable Sénatrice Raynell Andreychuk
Association parlementaire canadienne de l’OTAN (AP OTAN)

 

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