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Rapport

 

L’Association parlementaire canadienne de l’OTAN a l’honneur de présenter son rapport concernant la Visite en Lituanie de la Sous‑commission sur la sécurité énergétique et environnementale de la Commission des sciences et des technologies, du 27 au 30 avril 2009. La délégation, avec à sa tête le président de la Commission Lothar Ibruegger (Allemagne) et le vice‑président Pierre‑Claude Nolin (Canada), a rencontré plusieurs ambassadeurs, des hauts fonctionnaires des Nations Unies et d’autres organismes internationaux et des représentants de la communauté scientifique.

UE – Trois ambassadeurs

Le programme à Vienne a commencé par la rencontre avec les ambassadeurs de l'Allemagne, de la France et du Royaume‑Uni à l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA). Les ambassadeurs ont discuté du dossier de l’Iran et de son programme nucléaire. L’ambassadeur de la France François-Xavier Deniau a rappelé brièvement l’histoire des efforts internationaux pour assurer que l’Iran se conforme à ses obligations en vertu du Traité sur la non‑prolifération des armes nucléaires (TNP) et de l’Accord relatif aux garanties entre l’Iran et l’AIEA.

L’ambassadeur Simon Smith du Royaume‑Uni a indiqué que la façon dont le dossier de l’Iran avait été traité par le Conseil des gouverneurs de l’AIEA était boiteuse : au lieu d’assurer la mise en oeuvre des engagements de l’Iran, le Conseil des gouverneurs a entrepris des négociations de facto avec l’Iran. L’ambassadeur Smith a également souligné que le dossier de la conformité et de la coopération de l'Iran avec l’AIEA est de plus en plus insatisfaisant.

L’ambassadeur Rüdiger Lüdeking de l’Allemagne a dit que l’Iran respecte seulement la lettre et non l’esprit de son Accord relatif aux garanties. L’AIEA n’est pas en mesure de vérifier la mise en oeuvre réelle des engagements de l’Iran à cause du refus iranien de se conformer au Protocole additionnel. La promesse du président Obama de s’entretenir directement avec Téhéran ouvre de nouvelles possibilités mais, a mis en garde l’ambassadeur, ces possibilités ne dureront pas toujours.

L’ambassadeur Lüdeking a également discuté des façons de renforcer le TNP, particulièrement à la lumière du fait que la Conférence au Traité sur la non-prolifération des armes nucléaires chargée d'examiner le Traité en 2010 aura lieu bientôt. Il a souligné que l’Accord relatif aux garanties ne suffit pas dans sa forme actuelle pour assurer la conformité. Il est essentiel d’universaliser le Protocole additionnel. Tout pays qui envisage de ne pas se conformer doit savoir qu’il s’exposera à des conséquences sévères. L’ambassadeur a également souligné l’importance des projets de coopération nucléaire multinationaux.

Rencontre avec les représentants de l’AIEA

Mr. Tariq Rauf, Chef, Politiques de vérification et de sécurité, bureau des relations extérieures et de la coordination des politiques de l’AIEA, a présenté l’Agence dans les grandes lignes. L’AIEA a pour principal objectif d’assurer que l’énergie nucléaire est utilisée pacifiquement et de promouvoir la coopération scientifique et technique dans ce domaine.

Il y a actuellement 436 centrales nucléaires qui fonctionnent dans le monde, et 44 autres sont en construction. L’expansion nucléaire est concentrée en Extrême‑Orient et en Asie du Sud. L’énergie nucléaire est un outil efficace pour répondre aux préoccupations en matière de sécurité énergétique et de changement climatique. D’autre part, la diffusion de l’énergie nucléaire a des incidences en matière de sécurité nationale. M. Rauf a dit que si un pays cherche à développer un programme nucléaire pour devenir une puissance nucléaire, la partie la plus difficile est d’accumuler assez d'uranium très enrichi et de plutonium militaire. Pour éviter que cela se produise, le directeur général de l’AIEA a proposé de multilatéraliser la production de combustible nucléaire. L’établissement de mécanismes d’approvisionnement de combustible nucléaire multilatéraux sous l’égide de l’AIEA faciliterait l’utilisation accrue de l'énergie nucléaire à des fins pacifiques, ce serait bénéfique pour la rentabilité et les économies d'échelles permises par l'utilisation des technologies nucléaires et cela fournirait une garantie additionnelle à la communauté internationale que les aspects sensibles du cycle de combustible nucléaire civil sont moins vulnérables au mauvais usage à des fins non pacifiques.

L’exposé de Mme Jill Cooley, directrice, Concepts et planification, Département des mesures de protection de l’AIEA, portait précisément sur les activités de vérification de l’AIEA.  Elle a expliqué les méthodes utilisées par les inspecteurs de l’AIEA dans leur travail. L’Agence vérifie l’exactitude des rapports nationaux sur le matériel nucléaire déclaré. Elle utilise des caméras spéciales et des sceaux pour surveiller les installations nucléaires. Les inspecteurs de l’AIEA visitent aussi personnellement les installations et prélèvent si nécessaire des échantillons de mesure et dans l’environnement. Les analyses de ces échantillons peuvent détecter même des particules individuelles d'uranium enrichi. Elle a souligné que les inspecteurs de l’Agence ont des capacités techniques de pointe à leur disposition et qu’elles sont adéquates.

La découverte du programme nucléaire clandestin de l’Irak au début des années 1990 a lancé un signal d’alarme. Cela a entraîné l’introduction du Protocole additionnel. Celui-ci donne aux inspecteurs l'accès à une gamme beaucoup plus large d'installations, par exemple les installations d’assemblage des centrifugeuses ou les établissements de recherche et de développement. L’application du Protocole additionnel assure que tout le matériel nucléaire est conforme aux normes de sécurité et justifié, tandis que l’Accord relatif aux garanties assure simplement la sécurité du matériel déclaré.

M. Marco Marzo, directeur, Division des opérations A, Département des garanties, a parlé des activités de vérification en Corée du Nord. L’AIEA a surveillé le réacteur expérimental 5 MW, l’installation de fabrication de combustible et une installation de retraitement. Il a noté que le démantèlement du programme nucléaire de la Corée du Nord n’était pas lié à la mise en oeuvre d’un Accord relatif aux garanties et était plutôt le fruit des Pourparlers à six. M. Marzo a souligné que le démantèlement des dispositifs nucléaires était seulement partiel et entièrement réversible à court préavis. Les inspecteurs de l’AIEA ont été priés de quitter le pays au début d'avril 2009.

M. Herman Nackaerts, directeur, Division des opérations B, Département des garanties, a discuté de la coopération pratique entre l’Agence et l’Iran. Il a souligné que la découverte du programme nucléaire iranien en 2002 et de la collaboration de Téhéran avec le réseau illicite d’A.Q. Kahn est un cas évident de non-conformité. Les années suivantes, quand l’Iran respectait le Protocole additionnel, l’Agence a pu assurer que l’Iran ne participait pas à des activités qui pourraient donner lieu au développement d'armes nucléaires. L’Agence n’est pas en mesure actuellement de fournir de telles garanties.

M. Miroslav Gregoric, chef de la section de la prévention, a discuté de la question du terrorisme nucléaire. Les deux grands risques sont l’explosion d’une arme nucléaire et la dispersion des substances radioactives.  Pour être efficace, le système de sécurité nucléaire doit être exhaustif et inclure divers éléments clés, comme une structure juridique internationale, des structures légales et de réglementation, une capacité  d'évaluation fiable de la menace, une protection physique de pointe, la reddition de comptes, le contrôle efficace de la frontière, le développement des ressources humaines et la culture de la sécurité nucléaire.

Organisation du Traité d'interdiction complète des essais nucléaires (CTBTO)

La délégation de l’AP OTAN a visité le quartier général de la CTBTO à Vienne et rencontré l’ambassadeur Tibor Tóth, secrétaire général de la Commission préparatoire de la CTBTO. L’ambassadeur a décrit le réseau mondial des stations de la CTBTO qui est capable de détecter des explosions d’une puissance de plus en plus faible. Par exemple, quand la Corée du Nord a testé sa première arme nucléaire en 2006, les stations de la CTBTO ont immédiatement détecté la détonation et déterminé qu’il s’agissait d’une explosion d'une puissance de 0,5 kilotonne. Dans l’ensemble, le système de la CTBTO comprend environ 250 stations, par rapport à 180 in 2006, quand la délégation de l’AP OTAN a visité cette organisation pour la dernière fois.

L’ambassadeur Tóth a rappelé que la principale entrave au fonctionnement efficace du système est le fait que le Traité n'est pas encore en vigueur. Il n’a pas encore été ratifié par neuf pays clés. L’ambassadeur a dit espérer que la détermination de la nouvelle administration américaine de voir ce Traité ratifié par le Congrès américain entraînera les autres pays à faire de même. Quand le Traité entrera en vigueur, la CTBTO sera en mesure de signaler les cas de non‑conformité au Conseil de sécurité des Nations Unies. Les inspecteurs de la CTBTO auraient également le pouvoir de faire des inspections sur les lieux, ce qui améliorera considérablement la capacité de surveillance de l’organisation. L’ambassadeur a souligné que lorsque le système du Traité d'interdiction complète des essais nucléaires (TICEN) sera en activité, il pourrait devenir un outil important pour assurer le progrès des autres initiatives de contrôle des armes, comme la réduction des arsenaux d’armes nucléaires, l'élimination des charges militaires substratégiques, l'interdiction de la production de matière fissile et l'établissement de mécanismes de cycle du combustible multinationaux.

L’ambassadeur a également souligné que les essais par explosion devraient demeurer de loin la principale méthode pour assurer l’efficacité des nouvelles armes nucléaires. Même les nations les plus technologiquement avancées ne peuvent dépendre uniquement de systèmes automatisés pour tester les nouvelles générations de leurs armes nucléaires. Les membres de l’AP OTAN ont pu visiter le nouveau centre des opérations de la CTBTO.

OPEP

La délégation de la Commission a visité le quartier général de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP). L’hôte de la rencontre était M. Hasan M. Qabazard, directeur de la Division de la recherche de l’OPEP. Sa collègue Mme Siham Alawami du département des relations publiques et de l’information a présenté un exposé traçant les grandes lignes de l'organisation, de son histoire, de sa mission et de sa structure. L’OPEP veut assurer un rendement raisonnable des investissements pour l’industrie pétrolière de ses États membres. L’OPEP est un organisme intergouvernemental. Son principal organe décisionnel est la conférence des 12 ministres représentant chacun des pays de l’OPEP, qui a lieu deux ou trois fois par année. Le secrétariat élabore des analyses et fournit des recommandations aux ministres.

M. Nimat B. Abu Al-Soof, analyste principal de l’industrie pétrolière en amont, a discuté des défis de l’industrie pétrolière en général et de l’OPEP en particulier. Les défis clés ont trait à l’incertitude en ce qui a trait à la capacité de production qui sera nécessaire dans l'avenir pour satisfaire la demande de pétrole, tout en assurant la disponibilité de niveaux suffisants de capacité de réserve. L’incertitude entourant la demande émane principalement des politiques imprévisibles des grands pays consommateurs. Ces politiques sont souvent discriminatoires à l’égard du pétrole par l’entremise de mesures d’imposition, de subsides pour des combustibles concurrentiels et d’autres mesures. Pour les producteurs, il y a une possibilité réelle de gaspiller des ressources précieuses pour assurer une capacité qui ne serait pas nécessaire. De plus, l’émergence de niveaux importants de capacité inutilisée entraînerait des pressions en baisse sur les prix du pétrole avec l’effet aggravé de diminuer sévèrement les recettes d’exportation du pétrole.

Cela pourrait rendre l'OPEP moins enclin à investir, provoquant un sous‑investissement et intensifiant les préoccupations quant à l’éventuelle suffisance de la capacité, entravant ainsi la poursuite de la stabilité à long terme du marché pétrolier. L’élément central à cet égard consiste à assurer la stabilité du prix du pétrole.

Un autre défi a trait au progrès technologique et à l’innovation. Grâce à l’application avec succès d’une gamme remarquable de technologies, comme la technique de forage horizontal et de sismique 3D, le champ de l'industrie s’est élargi, la récupération du pétrole et la croissance des réserves ont été améliorées et l'empreinte écologique de l'industrie a été réduite. Mais à la suite de l'effondrement du prix du pétrole à la fin des années 1990, les dépenses en matière de recherche et de développement de l'industrie pétrolière ont été réduites considérablement. Cette tendance doit être renversée.

Rencontre avec l’ambassadeur d’Iran

L’ambassadeur Ali Asghar Soltanieh, représentant permanent de la République Islamique d’Iran auprès des Nations Unies et d’autres organismes internationaux à Vienne, a organisé un déjeuner de travail pour les membres de la Commission afin de présenter la perspective de son pays à l’égard de sa décision de développer sa capacité d’énergie nucléaire.

Le sénateur Nolin (Canada) a demandé si Téhéran s’attend à un dégel des relations avec l’Ouest avec l'arrivée de la nouvelle administration à Washington. L’ambassador Soltanieh a salué les déclarations du président Obama et exprimé son espoir que les mots seraient transformés en actions. L’Iran est prêt à s’asseoir à la table de négociation avec les Américains pour discuter sur un pied d’égalité et sans préconditions.

Organisation des Nations Unies pour le développement industriel (ONUDI)

Les parlementaires de l’OTAN ont eu l’occasion de visiter le quartier général de l’ONUDI et de rencontrer son directeur général, M. Kandeh Yumkella et ses collègues. M. Yumkella a présenté brièvement son organisation, qui cherche principalement à promouvoir le développement industriel dans les pays en développement de façon durable sur le plan de l’environnement. L’organisation axe ses efforts sur trois priorités thématiques interreliées : 1) la réduction de la pauvreté par l'entremise d'activités productives; 2) le renforcement des capacités en matière de commerce; 3) l'énergie et l'environnement. L’ONUDI offre un soutien personnalisé spécial en matière de développement de programme. Elle cherche à créer la richesse principalement en soutenant les petites et moyennes entreprises qui sont concurrentielles à l’échelle mondiale.

Le directeur général a souligné que l’accès à l’énergie est une précondition clé de la réduction de la pauvreté et de la création de la richesse. La corrélation entre la croissance du revenu et un meilleur accès à l’énergie est évidente. Mais, devant le taux d'accès courant (1,6 milliard de personnes sans accès l’énergie) et le paradigme existant du combustible fossile, de grands défis se posent : 1) investissements et accès insuffisants; 2)  fluctuation des coûts de l’énergie qui amoindrit la croissance économique; 3) changement climatique. L'efficacité énergétique et les technologies d’énergies renouvelables et nouvelles sont nécessaires pour améliorer la sécurité énergétique.

Le problème du changement climatique devient de plus en plus urgent. À la Conférence des Nations Unies à Copenhague en décembre 2009, les nations doivent convenir de hausser les cibles de réduction des émissions, possiblement de 25 à 40 % d’ici 2020. Il faut développer une économie pratiquement sans carbone au cours du prochain demi-siècle. Pour atteindre cet objectif, nous avons besoin d’une révolution énergétique, qui doit être inclusive. Il est essentiel d'avoir des mécanismes de transfert de la technologie efficaces. Sans promotion concertée des nouvelles technologies, nous continuerons de consommer de façon non  soutenable. M. Yumkella a souligné que l’ONUDI ne se limite pas à promouvoir l’énergie renouvelable en particulier, elle le fait seulement d'une façon qui aide à créer de la richesse.

M. Yumkella a également souligné le lien entre l’énergie, l’environnement et la sécurité mondiale. S’il n’y a pas de développement durable dans les régions les plus pauvres, le risque de conflits augmentera dans ces régions. Une attention particulière doit être portée à la région du Golfe de Guinée.

Les agents de l’ONUDI M. Dmitri Piskounov, M. Pradeep Monga et M. Dolf Gielen ont présenté des exposés plus détaillés sur les projets de l’ONUDI dans le domaine de la sécurité énergétique et environnementale. Ils ont souligné le potentiel énorme des projets d’efficacité énergétique. Les projets d’installations de mini‑production hydraulique (moins de 3 MW) mis de l’avant par l’ONUDI ont également été très bénéfiques pour les communautés locales, en attirant d’autres investissements et en stimulant le développement économique des régions de façon écologique. Les experts de l’ONUDI ont également discuté des promesses des autres technologies d'énergies renouvelables, y compris l'énergie solaire, l'énergie éolienne, l'énergie des courants marins et celle de la biomasse.

Centre de politique de sécurité de Genève (CPSG)

La visite de la Commission à Genève a commencé avec des séances d'information au CPSG, organisées par  M. Peter Foot, directeur des études du Centre. Il a présenté le premier conférencier au programme, l'ambassadeur Patrick Villemur, conseiller spécial du directeur du CPSG, qui a discuté de la question de la prolifération nucléaire. Il a présenté brièvement les trois éléments clés du régime de non‑prolifération mondial : 1) les traités multilatéraux, comme le TNP et le TICEN; 2) les mécanismes de vérification – AIEA et ses Accords relatifs aux garanties; 3) les mécanismes de contrôle des exportations (organismes fournisseurs d’énergie nucléaire). 

Le régime est loin d’être parfait : 1) le TNP et le TICEN ne sont pas universels; trop de parties sont à l’extérieur du Protocole additionnel; 2) l’absence de politique unifiée pour les non‑membres (voir l’Accord États‑Unis‑Inde); 3) l’augmentation de la popularité de l’énergie nucléaire suscite des préoccupations relatives à la prolifération des technologies nucléaires à double usage; 4) la sécurité des piles de stockage de matière fissile n'est pas toujours adéquate, même dans certains pays riches; 5) il apparaît que des acteurs non étatiques sont de plus en plus intéressés à acquérir du matériel et de la technologie nucléaires.

L’ambassadeur Villemur a souligné que le régime doit être renforcé pour empêcher des pays comme l’Iran de développer de se doter de l'arme nucléaire. Ce serait un dangereux précédent dont pourraient s’inspirer d’autres nations comme l’Égypte et la Syrie pour lancer des programmes semblables. L’ambassadeur a proposé d’améliorer la capacité de vérification et de rendre le retrait du TNP plus difficile. L'approche « de la carotte et du bâton » semble avoir fonctionné avec la Corée du Nord, mais non dans le cas de l'Iran. Dans les discussions avec l’Iran, la plupart des options sont épuisées et l’occasion de faire quelque chose est en train de disparaître. Il reste à voir si la nouvelle politique des États‑Unis envers l’Iran fonctionnera. Autrement, on ne peut malheureusement pas exclure la possibilité d’un conflit militaire dans la région.

Le deuxième conférencier de la séance, M. Khalid Koser, directeur de cours du CPSG, a discuté de la question du changement climatique et de la migration. Le conférencier a dit que le rapport entre le changement climatique et la migration est très complexe et qu'il est difficile de déterminer un lien causal direct entre les deux phénomènes. Diverses estimations varient grandement en ce qui a trait au nombre de réfugiés du climat dans le monde entier. Néanmoins, il est évident que ce nombre est très important et devrait augmenter dans l’avenir.

Les réfugiés du climat viennent des deltas des grands fleuves, des petites îles et des régions soumises à des stress hydriques. Mais un grand nombre de ces régions sont également affligées par la pauvreté, la mauvaise gouvernance et les conflits. Par conséquent, le changement climatique pourrait être seulement un des motifs de la migration. La plupart des migrants se déplacent à l’intérieur des frontières de leur État ou de leur continent.

La migration climatique a des conséquences sévères sur les structures juridiques internationales existantes. Selon la définition existante d’un réfugié, les migrants climatiques ne seraient pas considérés comme des réfugiés. Le traitement à accorder à ces personnes n’est pas clair. La migration climatique aura également des répercussions sur la sécurité puisque les conflits pour les ressources limitées vont s’intensifier. 

Comité international de la Croix‑Rouge (CICR)

M. Dominique Loye, chef adjoint de l’unité Armes de la Division juridique du CICR a décrit brièvement le CICR et le droit international humanitaire (DIH). Il a souligné que le droit international humanitaire essaie d’empêcher et de diminuer la souffrance des personnes touchées par des conflits militaires. Le droit international humanitaire ne prétend pas éradiquer les armes en tant que tel, mais ses principes fondamentaux affirment qu'une arme ne doit pas causer de la souffrance inutile et des dommages superflus. L’objectif des forces armées doit être de sortir l’ennemi du champ de bataille, et non de tuer le plus d’adversaires possible. Les armes qui frappent sans distinction ne devraient pas être utilisées.

Conformément à ces principes, diverses conventions internationales ont banni les types d’armes suivants : les balles explosives, les armes chimiques et biologiques, les lasers aveuglants et les bombes à sous‑munitions (BASM). 

Le sénateur Nolin (Canada) a demandé si la ratification de la convention pourrait avoir des répercussions sur les opérations hors zone de l’OTAN. 

M. Loye a dit que c’était effectivement un défi pour l’OTAN, parce que les Alliés qui ont ratifié la convention (par exemple la Norvège) s'engagent à ne pas participer à des opérations interarmées avec des nations qui utilisent des BASM (par exemple les États‑Unis).Un autre expert de la CICR, M. Mark Steinbeck, conseiller médical sur les effets des bombes, a discuté de deux autres types d’armes – les armes robotisées et les lasers verts. Les armes robotisées représentent la prochaine étape de l'évolution de la technologie des systèmes télécommandés, comme les véhicules aériens sans pilote. La tendance est à l'autonomie accrue des systèmes d'arme, jusqu'au point où l'intelligence artificielle commence à prendre des décisions d'utiliser ou non une arme. Cette tendance suscite des préoccupations en matière de droit humanitaire international parce que de tels systèmes violeraient les principes de la distinction et de la proportionnalité étant donné qu’ils n’ont pas de sens commun. M. Steinbeck croyait qu’il ne faut pas légaliser les systèmes d’arme entièrement autonomes.

Les « lasers verts » sont utilisés par les forces armées pour éloigner les civils des zones de conflit. Mais il a été rapporté qu’ils provoquent aussi des incidents de tirs amis et qu’ils ont causé la cécité permanente dans au moins un cas. Certains lasers aveuglants sont universellement bannis; l’utilisation des « lasers verts » devrait également être interdite.

Institut des Nations Unies pour la recherche sur le désarmement (UNIDIR)

La délégation de l’AP OTAN a visité l’UNIDIR et rencontré plusieurs experts éminents. Mme Theresa Hitchens, directrice de l’UNIDIR, a présenté l’institut. Elle a discuté de la question de la sécurité dans l’espace extra‑atmosphérique. Mme Hitchens a noté que l’espace devient de plus en plus important dans nos vies quotidiennes et il faudrait éviter qu’il ne devienne un lieu de conflits et de course à l’armement.

La nouvelle ébauche d’un traité international interdisant la présence d’armes dans l’espace a été présentée en 2006 et appuyée par la Russie et la Chine. Toutefois, les négociations relativement à cette ébauche ont peu avancé en raison des différences d’opinions entre les grandes puissances.

Lorsqu’on lui a demandé quels devraient être les principaux éléments du nouveau traité, Mme Hitchens a déclaré qu’il serait irréaliste de s’attendre à ce que les satellites de guidage et de reconnaissance militaire soient bannis. a technologie spatiale est à double usage, et nous n’avons pas d’autre choix que de l’accepter. Ce qui devrait être banni est l’utilisation de biens spatiaux comme armes offensives, et non le déploiement d’objets à double usage en soi. Il serait également utile d’imposer une interdiction universelle sur les armes anti‑satellites.

Un autre expert de l’UNIDIR, le M. Yuri Yudin a traité de la question du cycle du combustible nucléaire. Le cœur du problème, a‑t‑il déclaré, est qu’il est impossible de faire une distinction entre les « atomes pour la paix » et les « atomes pour la guerre ». Les technologies pour l’enrichissement de l’uranium et la séparation du plutonium sont à double usage.

M. Giacomo Persi Paoli a discuté de la question du contrôle des armes légères, traitant plus particulièrement du marquage des armes importées. La clé pour lutter contre la prolifération des armes légères est d’en repérer la source et de l’éradiquer. Le repérage exige un marquage adéquat et un enregistrement de toutes les armes légères, ainsi qu’une collaboration internationale afin de permettre aux autorités pertinentes de repérer les sources, d’approvisionner les voies et des points de diversion des armes. À l’heure actuelle, chacun de ces secteurs présente des problèmes considérables, qui doivent être réglés de manière systématique et efficace. Les marques de fabrication ne peuvent être falsifiées. Elles doivent normalisées à l’échelle mondiale.

Programme des Nations Unies pour l’environnement (PNUE)

La délégation de la Commission a visité le Bureau européen du PNUE et rencontré son directeur et représentant régional M. Christophe Bouvier et ses collègues.

M. Bouvier et M. Jaco Tavenier, agent de programme du PNUE, ont discuté de la façon dont le PNUE contribue aux efforts mondiaux pour relever le défi du changement climatique. Ils ont dit que le changement climatique est généralement reconnu comme le principal problème environnemental du globe. Les preuves de son impact sont de plus en plus nombreuses : la fonte de la calotte glaciaire dans les régions polaires et l'accroissement de la variabilité de la température, de la pluviosité et des tempêtes dans à peu près toutes les régions. Le changement climatique, comme le secrétaire général des Nations Unies Ban-Ki Moon et le directeur exécutif du PNUE Achim Steiner en conviennent, est « le défi marquant de notre génération » [traduction]. Le quatrième rapport d’évaluation du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC) déclare sans équivoque qu’il n’est plus pertinent de se demander si le climat est en train de changer et qu'il faut plutôt se demander à quel changement sommes‑nous prêts et à quelle vitesse va‑t‑il se produire.

Mme Sonja Koeppel, une experte de la Commission économique des Nations Unies pour l'Europe (CEE‑ONU), a parlé de la coopération relative aux eaux transfrontières dans la région de la CEE‑ONU (de l’Amérique du Nord à la Russie), en s’attardant principalement sur la Convention sur l’eau de la CEE‑ONU. Elle a souligné que l’utilisation raisonnable et équitable des eaux transfrontières est un grand défi dans toute la région et que la distribution interétatique de l'eau est un défi particulier dans les pays de l’Europe orientale, du Caucase et de l’Asie centrale et de l’Europe du Sud‑Est dont les climats sont arides ou semi arides. Dans toutes les régions de ENVSEC, les eaux transfrontières jouent un rôle crucial pour le développement et la sécurité humaine. La majorité des ressources hydriques sont en fait de nature transfrontière.

L’une des menaces pour les eaux transfrontières est la pollution industrielle. Les pays de la région de ENVSEC ont été aux prises avec l’héritage de l’ancienne Union soviétique et de l’ancienne Yougoslavie, et en particulier avec l’héritage environnemental de l’industrie lourde, surtout l'industrie minière.

Dans toutes les régions d’ENVSEC, où la sécurité énergétique est un défi très important, des plans sont en cours pour accroître la capacité hydroélectrique et élaborer de nouveaux projets, surtout sur les rivières transfrontières. Mal planifiées ou mal exploitées, les installations hydroélectriques peuvent causer des problèmes transfrontaliers.

Pour faire face à ces menaces, les pays doivent développer de judicieux accords de coopération et de solides pratiques de gestion. Toutefois, malgré les efforts des pays depuis leur indépendance, les lacunes sont encore nombreuses et les défis multiples sur le plan de la coopération transfrontière. Premièrement, il se produit souvent que la structure juridique n’est pas en place. Un autre problème est que les institutions mixtes comme les commissions fluviales sont soit absentes ou ont un mandat étroit. Un autre point faible est la base d’information : la surveillance et la collecte des données sont souvent insuffisantes; elles sont fondées sur des projets plutôt que sur la surveillance régulière continue. La faiblesse de l’information publique et le peu de participation publique sont d’autres obstacles, déjà au niveau national et encore plus au niveau transfrontalier.

La Convention sur la protection et l’utilisation des cours d’eau transfrontières et des lacs internationaux de la CEE‑ONU est entrée en vigueur en 1996. Elle a pour objet de protéger les eaux transfrontières en empêchant, en contrôlant et en réduisant les incidences transfrontières. Un aspect positif est que la plupart des pays d'ENVSEC ont ratifié la Convention qui compte à ce jour 36 Parties. Afin de favoriser la ratification et en particulier la mise en oeuvre, un guide de mise en oeuvre pratique est en cours de développement.

Mme Koeppel a noté que le partage de l'eau entre des pays des mêmes bassins est souvent un grand problème de volume d'eau et que cela continue de causer des conflits en amont et en aval. Toutefois, la mise en oeuvre de la Convention contribue aussi à améliorer la situation de la sécurité dans diverses régions. Par exemple, l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) et la CEE‑ONU ont entrepris un projet conjoint conçu pour renforcer la coopération transfrontière en matière d'eau entre l'Azerbaïdjan et la Georgie. Les relations en matière d'eau en Asie centrale ont fait un grand pas en avant le 26 juillet 2006 quand la commission mixte Kazakhstan‑Kirghizistan sur les fleuves Chu et Talas a été inaugurée. La commission Chu-Talas offre au Kazakhstan et au Kirghizistan une façon bénéfique pour les deux pays de partager la responsabilité de l’infrastructure hydraulique utilisée par les deux pays. Cela constitue une percée dans les relations en matière d’eau en Asie centrale, où le partage des ressources hydrauliques entre les pays en amont et en aval a souvent été caractérisé par la tension et l’insécurité.

M. David Jensen a présenté un exposé sur le programme Désastres et Conflits du PNUE. Le problème des désastres et conflits est l'une des priorités pour le PNUE parce que le dommage environnemental provoqué par les conflits et les désastres cause des risques pour la santé, les moyens de subsistance et la sécurité. D’autre part, la coopération environnementale peut être une plateforme propice au dialogue, à l'instauration de la confiance et à la réconciliation.

Le PNUE participe actuellement à 10 projets d'évaluation post-conflits dans des endroits comme l'Afghanistan, la République démocratique du Congo et Gaza/Cisjordanie. Il a également fait des évaluations post-désastres dans un certain nombre de pays, y compris après le tremblement de terre en Chine en 2008 et le cyclone au Myanmar en 2008. Dans ces projets, les experts du PNUE évaluent les incidences environnementales des conflits et des désastres, ils déterminent les risques pour la santé, les moyens de subsistance et la sécurité et ils intègrent les besoins environnementaux dans les plans de rétablissement.

M. Jensen a souligné qu’il est essentiel que la gestion des ressources naturelles soit une priorité pour assurer la réussite des entreprises de consolidation de la paix des Nations Unies, parce que le défaut de gérer les ressources naturelles peut engendrer de nouvelles tensions et des sources de conflit. De plus, les ressources naturelles ouvrent de nouvelles possibilités de consolidation de la paix fondées sur le dialogue, la coopération et l'instauration de la confiance. M. Jensen a souligné que 40 % de tous les conflits interétatiques depuis 1960 ont un lien avec les ressources naturelles. Depuis 1990, 18 conflits ont été nourris par la question des ressources naturelles. Les conflits intraétatiques liés aux ressources naturelles sont deux fois plus susceptibles de redevenir des  conflits dans les cinq ans. M. Jensen a également déploré le fait que moins du quart des accords de paix relatifs aux conflits en lien avec les ressources naturelles traitent les questions de la gestion et de la gouvernance des ressources naturelles.

M. Jensen a conclu son exposé en soulignant que la croissance de la population et de la consommation vont faire en sorte que la demande de ressources naturelles continuera d’augmenter. La dégradation environnementale se poursuivant, l’offre de ressources naturelles continuera de diminuer. Le changement climatique agira probablement comme un facteur de multiplication de la menace. En même temps, la gouvernance générale des ressources naturelles demeure faible dans de nombreux pays. Il existe donc une possibilité importante que les conflits basés sur les ressources vont augmenter.

Respectueusement soumis,

 

M. Anthony Rota, député
Association parlementaire canadienne de l’OTAN (AP OTAN)

 

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