Les 1er et 2 décembre 2014, M. Gord
Brown, député, coprésident de la Section canadienne du Groupe
interparlementaire Canada‑États‑Unis (GIP), a dirigé une délégation
à la première réunion trilatérale des législateurs fédéraux du Canada, des
États‑Unis et du Mexique. Faisaient aussi partie de la délégation trois
des vice‑présidents de la Section canadienne – l’honorable
Wayne Easter, C.P., député, le sénateur Michael L. MacDonald et
le sénateur Wilfred Moore, c.r. – et M. Phil McColeman, député.
La délégation était accompagnée de Mmes Miriam Burke et
June Dewetering, respectivement secrétaire exécutive et conseillère
principale de la Section canadienne.
L’ÉVÉNEMENT
C’était la première fois que les législateurs fédéraux des trois
pays nord‑américains – le Canada, les États‑Unis et le
Mexique – se réunissaient pour discuter d’enjeux d’intérêt commun. La
rencontre s’est tenue après la 52e réunion duGroupe interparlementaire États‑Unis‑Mexique,
qui a eu lieu le 1er décembre à Washington, D.C. Mais c’était
aussi, dans un certain sens, le prolongement de la réunion annuelle du Groupe
interparlementaire Canada‑États‑Unis, tenue en juin 2014, et
de la XXe réunion du Groupe interparlementaire Canada‑Mexique,
qui s’est déroulée en novembre 2014; ces deux réunions ont eu lieu à
Ottawa, Canada.
ACTIVITÉS ET OBJECTIFS DE LA DÉLÉGATION LORS DE L’ÉVÉNEMENT
Les délégués ont abordé trois sujets : l’infrastructure et
le commerce frontaliers et la compétitivité nord‑américaine; la sécurité;
et le secteur énergétique nord‑américain. À la fin de la réunion
trilatérale, la délégation canadienne a rencontré l’ambassadeur du Canada aux
États‑Unis, Gary Doer.
Lors des rencontres tenues avec leurs homologues fédéraux d’autres
pays, les membres de la Section canadienne ont l’occasion de partager des
informations sur des enjeux critiques et d’obtenir des appuis à cet égard. De
manière plus générale, ils croient que ces rencontres sont d’excellentes
occasions de faire connaître les points de vue canadiens sur les enjeux
d’intérêt commun, et ils comptent bien en tirer parti à l’avenir, lorsque le
besoin se fera sentir.
Comme les réunions de la Section canadienne avec les homologues des
autres pays se déroulent dans un cadre « non officiel »,
l’information donnée ci‑dessous est simplement un résumé de la nature
générale des questions soulevées par les législateurs canadiens, américains et
mexicains.
infrastructure
et commerce frontaliers et compétitivité nord‑américaine
Commentaires des délégués canadiens
·Cette
année marque le 20e anniversaire de l’Accord de libre‑échange
nord‑américain (ALÉNA), qui a stimulé la croissance économique et
l’investissement dans les trois pays signataires.
·L’ALÉNA
visait à accroître la compétitivité, et cet objectif a été atteint; cela dit,
les attentats terroristes du 11 septembre 2001 ont limité les
bienfaits de l’ALÉNA, car la sécurité a revêtu une importance suprême à partir
de ce moment.
·Les
économies des pays membres de l’ALÉNA sont de plus en plus intégrées, et les
entreprises des trois pays fabriquent ensemble des produits qui sont
exportés dans le monde entier; il est important de compter sur des chaînes
d’approvisionnement intégrées, une infrastructure adéquate et des passages
frontaliers modernes qui facilitent le commerce.
·Les
pays membres de l’ALÉNA forment un bloc commercial qui doit faire concurrence
avec les autres pays dans un contexte commercial mondialisé; l’Amérique du Nord
s’est positionnée pour être l’espace économique partagé le plus concurrentiel
du monde.
·Les
recommandations contenues dans le rapport intitulé North America: Time for a
New Focus méritent qu’on y porte attention. Elles pourraient tracer un
chemin avantageux pour l’Amérique du Nord, et représenter une nouvelle vision
stratégique pour la région.
·Les
sommets des leaders nord‑américains et les diplomates que chacun des pays
membres de l’ALÉNA maintient en poste chez ses deux partenaires sont des
éléments importants des relations trilatérales et ils aident à réaliser des
progrès à l’égard des objectifs communs.
·Si
l’objectif consiste vraiment à accroître la compétitivité nord‑américaine,
la loi américaine ne devrait plus dire « Buy American », mais
« Buy North American ».
·Dans
la foulée des attentats terroristes du 11 septembre 2001, le Canada
et les États‑Unis ont conjointement mis en œuvre le Plan d’action pour
une frontière intelligente, qui porte sur des enjeux frontaliers et divers; les
deux pays collaborent maintenant dans le cadre du plan d’action Par‑delà
la frontière et du Conseil de coopération en matière de réglementation.
·La
première réunion des législateurs fédéraux des pays membres de l’ALÉNA, une
réunion historique, est un excellent moyen de faire fructifier à long terme les
relations trilatérales.
·Les
législateurs des pays de l’ALÉNA doivent former des relations entre eux afin de
défendre les intérêts de leurs populations et leurs intérêts nationaux; de
plus, les groupes interparlementaires offrent une tribune importante pour
discuter de diverses questions.
Commentaires des délégués
américains
·Il
doit y avoir une unification trilatérale, et les trois pays d’Amérique du
Nord – les États‑Unis, le Canada et le Mexique – doivent
travailler en équipe pour demeurer concurrentiels sur la scène internationale
et défendre les intérêts de leur population, qui totalise 470 millions de
personnes.
·Si
les pays nord‑américains travaillent ensemble, tout est possible.
·Pour
redynamiser l’économie de l’Amérique du Nord et assurer sa compétitivité comme
bloc commercial, il faut simplifier les passages frontaliers, uniformiser la
réglementation, faire les investissements qui s’imposent, créer et maintenir
les relations entre législateurs, et optimiser les liens entre les
trois pays, notamment sur les plans économique et culturel.
·Sous
certains aspects, les pays d’Amérique du Nord font face aux mêmes problèmes,
mais leurs approches diffèrent.
·La
frontière que les États‑Unis partagent avec le Mexique est longue et sa
surveillance coûte cher.
Commentaires des délégués mexicains
·Les
relations entre le Mexique, les États‑Unis et le Canada, qui ont
notamment des dimensions économiques, sociales et culturelles, sont plus fortes
et plus fructueuses qu’avant la signature de l’ALÉNA, il y a 20 ans.
·Les
pays nord‑américains partagent les mêmes valeurs et des liens économiques
et géographiques; ensemble, ils peuvent faire de grandes choses.
·Les
trois pays doivent bâtir l’Amérique du Nord qu’ils veulent, en plus ils
doivent être prêts – collectivement – à faire face au reste
du monde, en y compris à la Chine, qui est en train de devenir une puissance
mondiale.
·Les
pays membres de l’ALÉNA doivent cerner les facteurs qui limitent les bienfaits
de l’accord, apporter les correctifs nécessaires pour renforcer son succès et
déterminer les mesures qui peuvent être prises de manière trilatérale.
·Cette
première réunion entre législateurs fédéraux des pays nord‑américains,
notamment entre membres des trois groupes interparlementaires, est historique;
les initiatives diplomatiques de parlementaires, comme celle-ci, sont
importantes, pour trouver des façons d’améliorer les relations entre les pays,
les mesures à prendre, etc.
SÉCURITÉ
Commentaires des délégués canadiens
·Les
questions de sécurité devraient être réglées avant le passage frontalier.
·Les
Canadiens estiment que leur frontière avec les États‑Unis est très bien
protégée.
·La
frontière des États‑Unis avec le voisin du Nord est différente de celle
avec le voisin du Sud; si la première est surtout axée sur la circulation des
marchandises, la deuxième fait principalement intervenir des questions
relatives à la circulation des personnes.
·Le
Canada est un endroit où il fait bon vivre, et – compte tenu du grand
nombre de gens qui veulent y immigrer – les temps d’attente sont
longs pour les candidats à l’immigration. Le pays apporte néanmoins des
changements à ses politiques d’immigration; par exemple, il crée de nouvelles
catégories afin de répondre aux besoins économiques et aux pénuries de main‑d’œuvre.
·Le
Canada se préoccupe de l’État islamique en Iraq et du Sham (EIIS) et contribue
aux frappes aériennes menées contre le groupe terroriste.
·Comme
d’autres pays, le Canada assiste à la radicalisation de certains membres de sa
population.
·Le
Parlement fédéral du Canada envisage d’adopter et/ou a déjà adopté des lois sur
la lutte contre le terrorisme, sur l’attribution de pouvoirs au Service
canadien du renseignement de sécurité et au Centre de la sécurité des
télécommunications, etc.; il est aussi possible de saisir des passeports dans
certaines circonstances.
·Les
pays doivent se protéger l’un et l’autre contre le terrorisme; dans ce
contexte, ils peuvent mener des évaluations conjointes, mettre en commun leurs
connaissances sur les menaces existantes et les nouvelles menaces, et
collaborer à la mise en œuvre d’initiatives telles que les équipes intégrées de
la police des frontières.
Commentaires des délégués américains
·Aux
États‑Unis, des craintes sont exprimées concernant les gens qui sortent
du pays pour servir de combattants étrangers, et qui reviennent ensuite au
pays.
·L’EIIL
ne cesse de perfectionner ses méthodes de radicalisation.
·On
observe un phénomène de radicalisation au Canada, ce qui éveille des craintes
aux États‑Unis.
·Le
Canada devrait se pencher sur ses lois en matière de protection des
renseignements personnels en vue de faciliter le partage de l’information, car
les États‑Unis pourraient l’appuyer à cet égard.
·Puisqu’on
estime qu’il est possible d’éviter 90 % des problèmes en partageant les
renseignements, les pays doivent communiquer l’information entre eux et prendre
ensuite les mesures qui s’imposent; les pays sont capables de mieux faire, et
on peut déjà constater qu’ils font mieux lorsqu’ils coopèrent.
·Il
importe d’écarter les menaces du continent nord‑américain; pour ce faire,
les pays doivent savoir qui se trouve chez eux.
·Des
Américains se préoccupent au sujet des menaces qui, selon eux, proviennent du
Canada et du Mexique; dans le deuxième cas, les menaces ont peut‑être un
lien avec les cartels de drogue.
·En
2000, 1,6 million de personnes ont été appréhendées à la frontière entre
les États‑Unis et le Mexique; en 2014, ce nombre est passé à
480 000.
·Des
sommes considérables sont consacrées à la surveillance de la frontière entre
les États‑Unis et le Mexique.
·Les
trois pays nord‑américains doivent travailler ensemble pour protéger
leurs citoyens, car la collaboration rendra leurs efforts plus efficaces.
·Les
États‑Unis devraient aider les autres pays à protéger leurs enfants et
les garder en sécurité, et il faudrait s’efforcer de réunir les enfants avec
leur famille.
·Le
Congrès américain doit se pencher sur une réforme de l’immigration; dès qu’il
est question d’amnistie, le nombre de gens qui traversent la frontière
E.-U./Mexique augmente.
·Les
cybermenaces sont réelles; elles proviennent de pays tels que la Chine, l’Iran
et la Russie.
Commentaires des délégués mexicains
·Des
gens entrent au Mexique illégalement.
·Pour
le Mexique, l’immigration est un droit de la personne, et les efforts devraient
être axés sur la décriminalisation de l’immigration des sans‑papiers.
·Être
sans papier devrait être considéré comme une infraction d’ordre civil, et non
comme un crime; décriminalisation n’équivaut pas à légalité – mais
une infraction ne devrait pas entraîner des accusations au criminel.
·Il
faut aborder la question de l’immigration du point de vue humain en gardant la
réunification des familles au centre de la réflexion; les gens cherchent à se
donner une vie meilleure, et ils devraient donc être traités comme des êtres
humains, et non comme des criminels à jeter en prison.
·Le
Mexique déporte plus – et accepte plus – de Centraméricains sans
papiers que les États‑Unis.
·Le
nombre de Mexicains qui vivent aux États‑Unis est égal à la population du
Canada, et beaucoup d’entre eux ont des papiers en règle.
·Le
Mexique est l’un des pays qui imposent les exigences les plus strictes aux
demandeurs de visa, et la protection de son voisin du Nord est dans son intérêt
à lui, d’où le besoin d’empêcher tout attentat terroriste sur le territoire des
États‑Unis ou à proximité.
·Les
défis relatifs à la sécurité varient beaucoup entre les partenaires de l’ALÉNA;
le Canada applique des politiques d’immigration libérales, les États‑Unis
comptent de nombreux ennemis à l’échelle internationale, et le Mexique a des
problèmes de gouvernance.
·Les
pays membres de l’ALÉNA devraient harmoniser leurs programmes de voyageurs
fiables.
SECTEUR ÉNERGÉTIQUE NORD‑AMÉRICAIN
Commentaires des délégués canadiens
·L’Amérique
du Nord peut compter sur une myriade de sources d’énergie, et l’indépendance énergétique
vis‑à‑vis le Moyen‑Orient est un objectif important.
·Les
coûts de l’énergie nuisent à la compétitivité, et de nouvelles technologies en
matière d’énergie doivent être développées.
·Il
est nécessaire de tenir compte des impacts environnementaux du développement
énergétique; le Canada fait des progrès à cet égard, mais il faut reconnaître
que certains environnementalistes s’opposent à toute forme d’énergie non
renouvelable.
·Il
faut adopter un bouquet énergétique qui fasse place à la fois aux énergies
renouvelables et aux énergies non renouvelables.
·De
nombreux pipelines traversent aujourd’hui la frontière canado‑américaine;
dans ce contexte, le projet de pipeline Keystone XL est une cause célèbre.
Commentaires des délégués américains
·Les
marchés énergétiques des trois pays membres de l’ALÉNA devraient être intégrés;
il convient aussi de créer, à l’échelle nord‑américaine, une alliance
énergétique et une politique sur la sécurité énergétique qui permettraient de
parvenir à l’indépendance énergétique vis‑à‑vis le Moyen‑Orient – rappelons‑nous
que les pays du Moyen-Orient n’ont pas toujours les intérêts supérieurs des
États‑Unis à cœur.
·L’Organisation
des pays exportateurs de pétrole (OPEP) devrait être remplacée par
l’organisation des pays nord‑américains exportateurs de pétrole.
·Le
Canada est le premier et le meilleur partenaire commercial des États‑Unis,
et les États‑Unis peuvent faire confiance au Canada et au Mexique, où
l’on trouve certaines ressources naturelles en abondance; le Canada est par
ailleurs la source principale des importations américaines d’énergie.
·Il
faut que cinq « piliers » soient en place en matière d’énergie :
une infrastructure moderne, l’utilisation de toutes les ressources
énergétiques, la réduction des lourdeurs administratives, l’efficience ainsi
que le renforcement de la sécurité et de la diplomatie sur les enjeux
énergétiques.
·Des
pipelines modernes sont le moyen le plus sûr et le plus simple de transporter
le pétrole, et le projet de pipeline Keystone XL présente une occasion
unique; le véritable choix se fait donc entre « du pétrole au profit de
l’Amérique du Nord » et « du pétrole au profit de l’Asie », et
l’exportation de pétrole canadien aux États‑Unis crée des emplois aux
États‑Unis.
·Les
réformes opérées récemment par le Mexique dans le domaine de l’énergie feront
augmenter l’investissement étranger.
·Aux
États‑Unis, les environnementalistes jouent un rôle dans la prise de
décisions en matière d’énergie.
Commentaires des délégués mexicains
·La
coopération entre pays membres de l’ALÉNA est essentielle dans le secteur de
l’énergie. Comme l’indique le rapport North America: Time for a New Focus,
un cadre de travail énergétique trilatéral s’impose; il manque actuellement
d’institutions trilatérales dans le domaine énergétique, et le Mexique peut
tirer des enseignements des expériences canadiennes et américaines.
·La
coopération en matière d’énergie et l’intégration nord‑américaine seront
bénéfiques sur les plans économique, géopolitique et environnemental, et ce,
pour les trois pays concernés.
·Les
règlements relatifs à l’énergie devraient être normalisés et simplifiés à
l’échelle nord‑américaine; il faut aussi mettre en place une
infrastructure et des réseaux de transport énergétiques efficaces.
·Le
Mexique a procédé à des réformes structurelles, notamment dans le secteur de
l’énergie, afin d’accélérer sa croissance économique; parmi les réformes
effectuées, le pays a créé de nouvelles institutions et adopté de nouveaux
règlements propices à une plus grande efficacité, et il permettra la
participation des entreprises privées au secteur mexicain de l’énergie.
·Les
Canadiens investissent massivement dans le secteur mexicain de l’énergie.
·Les
revenus pétroliers correspondent au tiers des dépenses gouvernementales au
Mexique.
Respectueusement soumis,
L’hon. Janis G.
Johnson,
sénatrice, coprésidente
Groupe interparlementaire Canada‑États‑Unis
Gord Brown, député,
coprésident Groupe interparlementaire Canada‑États‑Unis