La délégation parlementaire de la
Section canadienne de l’Assemblée parlementaire de la Francophonie (APF) qui a
participé au séminaire du Réseau des femmes parlementaires de l’APF sur
« Le rôle des femmes parlementaires dans la résolution des conflits dans
l’espace francophone » et sur la mise en œuvre de la Convention des
Nations-Unies sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à
l’égard des femmes (CÉDEF), tenu à Kinshasa (République démocratique du Congo)
les 30 et 31 mars 2009, a l'honneur de présenter son rapport.
Composée de l’honorable Rose-Marie
Losier-Cool, sénatrice et présidente du Réseau des femmes parlementaires de
l’APF, la délégation était accompagnée de madame Christine Lafrance, secrétaire
administrative intérimaire de la Section.
Depuis 2004, le Réseau des femmes
parlementaires de l’APF met en œuvre un programme de coopération autonome, en
partenariat avec l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF), et
organise des séminaires d’information et de sensibilisation portant sur la
CÉDEF, au bénéfice des femmes parlementaires de l’espace francophone.
À ce jour, le Réseau a déjà organisé
six séminaires sur la CÉDEF :
·au Mali, pour les femmes parlementaires de
l’Afrique de l’Ouest,
·à Madagascar, pour celles de l’Océan Indien,
·au Gabon, pour celles d’Afrique centrale,
·en Tunisie pour celles d’Afrique du Nord et du
Proche-Orient,
·à Haïti,
·et en Mauritanie.
Rappelons que la CÉDEF a été adoptée
par l’Assemblée générale des Nations Unies en 1979 et qu’elle vise à instaurer
l’égalité des droits pour les femmes du monde entier. Elle est, à ce titre,
l’instrument normatif international le plus important à ce jour portant sur
l’égalité des femmes.
L’organisation de ce séminaire en RDC
tombait à point. En effet, le 7 mars dernier, la Fédération internationale des
ligues des droits de l’Homme (FIDH) a lancé une vaste campagne de deux ans
ayant pour objectif de faire connaître l’instrument qui a 30 ans cette année.
Dans son communiqué, la FIDH soulignait l’importance de la CÉDEF en ces termes
: « Jamais un texte aussi méconnu n’a eu autant d’implications au
niveau local, en particulier sur le continent. Des centaines d’organisations
s’appuient quotidiennement sur la CÉDEF pour dénoncer les carcans législatifs
et sociétaux qui pèsent sur les femmes ».
La FIDH entend avoir recours à tous les
moyens à sa disposition en vue de faire connaitre la CÉDEF : « marches,
défilés, conférences de presse, caravanes, sensibilisation de lycéens et de
collégiens, ateliers, pétitions et même propositions de loi pour des quotas de
femmes dans les assemblées législatives. Une quarantaine de pays africains
s’apprêtent désormais à vivre au rythme d’une mobilisation renforcée ».
Dans son communiqué, la FIDH ajoute que
« si la plupart des pays africains ont ratifié la CÉDEF, il s’agissait
(…) de faire bonne figure, notamment auprès de certains bailleurs
internationaux » et rappelle que la discrimination envers les femmes
demeure un problème aigu, en ces termes : « Outre les atteintes
intolérables à leur intégrité physique – traditionnelles comme les mutilations
génitales ou plus récentes comme les viols systématiques utilisés comme arme de
guerre -, les inégalités devant la loi sont encore le lot quotidien de millions
de femmes et de jeunes filles africaines ».
Dans la même veine, le 8 mars dernier,
à Kinshasa, était adoptée la Déclaration de la femme congolaise contre les
violences sexuelles comme arme de guerre, avec laquelle était lancée la
campagne « Je dénonce », un « cri de détresse des
atrocités des violences sexuelles utilisées comme arme de guerre »
précise la Déclaration. Incidemment, lors du passage de la délégation en RDC,
nous avons été à même de constater que le pagne « Je dénonce »
obtient un succès certain, porté non seulement par les femmes congolaises, mais
également par les femmes des corps diplomatiques étrangers en mission en RDC.
Plus de 120 personnes ont participé au
séminaire organisé par le Réseau à Kinshasa : outre les 52 femmes
parlementaires de la RDC, autant d’hommes parlementaires de la RDC ont
contribué aux travaux, de même que des femmes parlementaires de pays
limitrophes (Burundi et Centrafrique). Cette forte participation est en partie
redevable au fait que le dossier des sévices sexuels contre les femmes en RDC
et dans les pays limitrophes est un sujet fort débattu dans la région, et
documenté par maints organismes internationaux, dont la Mission des Nations
Unies en République démocratique du Congo (MONUC).
Les participants ont entendu des exposés
de parlementaires d’Afrique, d’Amérique et d’Europe, d’une parlementaire suisse
représentant le Conseil de l’Europe, ainsi que d’experts internationaux de
l’Union européenne, de l’Union africaine, de la Francophonie, du Comité CÉDEF
et de la Mission des Nations Unies en RDC.
La séance solennelle d’ouverture a été
présidée par le président de l’Assemblée nationale, M. Vital Kamerhe. S’y sont
exprimés Mme Brigitte Kalaba, députée, questeure adjointe de l’Assemblée
nationale, la sénatrice Rose-Marie Losier-Cool, M. Louis Michel, commissaire
européen au Développement et à l’aide humanitaire ainsi que le président Vital
Kamerhe. Un message du secrétaire général de la Francophonie, M. Abdou Diouf,
a été lu par son représentant, M. Valentin Loemba-Bayonne.
Les travaux du premier jour ont été
consacrés au thème « Le rôle des femmes parlementaires dans la
résolution des conflits dans l’espace francophone ». Le point de vue
de l’Union africaine y a été donné par l’ambassadeur Émile Ognimba, directeur
des Affaires politiques de la Commission de l’Union africaine, le point de vue
de la Francophonie par M. Valentin Loemba-Bayonne, responsable de projets de
coopération à l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF), le point
de vue de l’Union européenne par Mme Teresa Polara, représentant la Délégation
de la Commission européenne, le point de vue de la MONUC par Mme Elsie
Effange-Mbelle, conseiller principal en Genre et celui du Conseil de l’Europe
par Mme Francine John-Calame, conseillère nationale suisse, membre de la
Commission sur l’égalité des chances pour les femmes et les hommes.
De nombreux échanges ont suivi ces cinq
interventions, animés tant par les hommes parlementaires de la RDC que par
leurs collègues femmes. Les experts internationaux ont répondu aux questions
qui leur étaient posées.
Les débats du 31 mars ont été consacrés au
thème « La Convention sur l’élimination de toutes les formes de
discrimination à l’égard des femmes (CÉDEF) ». L’ancienne experte du
Comité CÉDEF de l’ONU, Mme Huguette Bokpe Gnacadja (Bénin), a présenté la
Convention et son protocole additionnel, la procédure de soumission des
rapports et les mesures de suivi, ainsi que le rôle des parlementaires dans
l’application de la Convention.
Une première table ronde a examiné
l’application de la CÉDEF au Tchad et en Italie. La situation au Tchad a été
présentée par Mme Elise Loum Ndoadoumngue Neloumseï, vice-présidente de
l’Assemblée nationale du Tchad et du Parlement panafricain, et celle de
l’Italie par la parlementaire de la Vallée d’Aoste, Mme Patrizia Morelli.
Une seconde table ronde a été consacrée à
la situation et aux propositions de la République démocratique du Congo. Le
point de vue parlementaire a été donné d’une part par la députée Mme Adèle
Kayinda Mahina, présidente du réseau parlementaire Genre et parité, et d’autre
part par la sénatrice Bernadette Nkoy Mafuta, vice-présidente de ce réseau.
Une représentante de la ministre du Genre, famille et enfant a donné le point
de vue du gouvernement et Mme Rose Mutombo Kiese, présidente nationale du Cadre
permanent de concertation de la femme congolaise (CAFCO), a donné celui de la
société civile.
Après une séance de débats riches et
fructueux, une Déclaration lue par l’Hon. Octavie Mulaya (RDC) et des motions
de remerciement lues par la députée burundaise Gloriose Beharino ont été
adoptées par l’assemblée.
Enfin, une séance solennelle a clôturé les
travaux. S’y sont exprimées la sénatrice Rose-Marie Losier-Cool, ainsi que la
sénatrice de la RDC, Mme Eve Bazaïba Masudi, présidente de commission,
représentant le Président du Sénat.
Voici le texte de la Déclaration adoptée
par le séminaire :
Nous, femmes et hommes parlementaires
de la RDC, du Burundi, du Canada, de la Centrafrique, de la Suisse, du Tchad et
de la Vallée d’Aoste, participants au séminaire du Réseau des femmes
parlementaires de l’Assemblée parlementaire de la Francophonie sur la
Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard
des femmes et le rôle des femmes parlementaires dans la résolution des conflits
dans l’espace francophone ces 30 et 31 mars 2009 à Kinshasa,
·reconnaissons le rôle des femmes parlementaires
dans la recherche des solutions justes aux défis imposés par les conflits dans
le monde en général et en Afrique en particulier;
·constatons que l’accroissement du rôle des
femmes dans la résolution des conflits passe par leur présence plus grande dans
les instances de décision, ainsi qu’il résulte des dispositions de la CÉDEF;
·déplorons la lenteur observée dans la mise en
œuvre de la CÉDEF aggravée par la non-ratification par certains États du
Protocole facultatif à la CÉDEF, qui en permet une application plus effective;
·soulignons que les situations de conflits ne
dispensent pas nos États parties de leurs obligations liées à la CÉDEF;
·exhortons nos États à traduire davantage leur
volonté politique dans les budgets alloués aux programmes, stratégies, et
politiques visant à la mise en œuvre des droits de la femme couverts par la
CÉDEF;
·nous engageons à jouer pleinement notre rôle
parlementaire en mettant en place des mécanismes de plaidoyer et de
vulgarisation pour le suivi de la mise en œuvre de la CÉDEF ;
·invitons l’OIF et nos autres partenaires au
développement à nous appuyer dans le déploiement de dynamiques sous-régionales
pour une mise en œuvre et un suivi efficaces et durables de la CÉDEF.
Respectueusement soumis,
Rose-Marie Losier-Cool, sénatrice
Membre de la Section canadienne de
l’Assemblée parlementaire de la Francophonie (APF)