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Rapport

 

L’Association parlementaire canadienne de l’OTAN a le plaisir de présenter son rapport concernant sa participation à la Visite de la Sous-commission sur la coopération et la convergence économiques est-ouest, qui a eu lieu à Prague, République Tchèque du 29 septembre au 1er octobre 2010.  Le Canada a été représenté par M. Leon Benoit, député et M. Anthony Rota, député. 

L'ECONOMIE

L'économie tchèque est de petite taille et dépend fortement du commerce extérieur. Sa transition vers une économie de marché a été rapide et réussie. A ce jour, le PNB par habitant s'élève à 80 % de la moyenne de l'UE. Bien que son secteur des services soit le plus important, le pays dispose également d'un secteur industriel vigoureux qui représente 30 % du PIB, ce qui est au-dessus des normes européennes. Dans l'ensemble, le pays bénéficie d'un important excédent commercial, même si la balance des paiements est très légèrement déficitaire suite au rapatriement des bénéfices par les investisseurs étrangers. L'économie est également étroitement liée à l'économie allemande qui est à la fois une source clé de financement et un marché essentiel pour les produits tchèques.

Toutefois, des difficultés structurelles persistent qui posent un réel défi aux responsables politiques du pays. Par-dessus tout, les déficits publics sont élevés et le niveau d'endettement augmente. Actuellement, son endettement est relativement bas à 35 % du PIB, mais les économistes s'inquiètent de la dynamique de cet endettement et le gouvernement semble maintenant résolu à traiter le problème. La récession mondiale a manifestement aggravé ces difficultés. La première vague de chocs financiers qui a secoué l'économie mondiale n'a pas eu d'incidences sur le système financier du pays, toutefois les effets secondaires de la crise se sont fait ressentir sur le plan commercial. En 2009, l'économie tchèque a régressé de 4 % et ce n'est qu'au troisième trimestre qu'elle a renoué avec la croissance. Celle-ci s'est accélérée depuis lors pour atteindre un taux annuel de 2,4 % au cours du second trimestre. Le taux de chômage s'est accru au cours des deux dernières années mais reste en-deçà de la moyenne européenne. Malgré le retour de la croissance, les entreprises se montrent plutôt réticentes à recommencer à embaucher ce qui fait que le marché de l'emploi n'a pas connu la reprise escomptée.

Les Pays-Bas sont le premier investisseur en République tchèque. Ceci résulte en partie d'une politique fiscale favorable aux entreprises étrangères qui investissent et établissent des filiales de sociétés-mères basées chez eux. L'Allemagne vient en seconde place, suivie de l'Autriche et de la France.

La forte dépendance de la République tchèque en matière d’exportations de produits finis est de plus en plus perçue comme une vulnérabilité potentielle. A cet égard, l'industrie automobile est particulièrement importante, mais les autorités tchèques craignent que cela ne les rendent plus vulnérables à des récessions spécifiques à ce secteur. L'économie tchèque a reçu un sérieux coup de pouce grâce aux primes à la casse accordées en 2009 par le gouvernement allemand aux personnes qui remplaçaient leur ancien véhicule, ce qui a contribué à tirer le pays de la récession. Le secteur de production d'ordinateurs est également important et il semblerait que ce secteur est quelque peu plus diversifié et solide.

Le secteur de l'économie sous contrôle de sociétés étrangères s'est montré le plus dynamique et a enregistré les bénéfices les plus élevés. Comparativement, le secteur public est moins important et ses entreprises enregistrent des niveaux de profit moins élevés. Toutefois, les sociétés étrangères ont plus souffert des effets de la récession mondiale en raison de leur orientation marquée vers les marchés de l'exportation. En 2009, les exportations ont reculé de 15 % et les importations de 18 %. L'Europe est le plus gros partenaire commercial de la République tchèque, l'Asie venant en seconde place. Les importations de produits venus d'Asie augmentent et la part de l'Asie, tant sur le plan des importations que sur celui des exportations, est en hausse. Les Tchèques jouissent d'un excédent commercial avec l'Europe mais souffrent d'un important déficit commercial avec l'Asie. La Chine représente plus de la moitié de leurs échanges avec l'Asie, mais le Japon et la Corée sont également des partenaires commerciaux importants. Les équipements et l'électronique pour l'industrie manufacturière représentent une proportion importante des importations asiatiques, même si le public est plus conscient des importations d'appareils ménagers. Un grand nombre de produits importés d'Asie se retrouvent ensuite inclus dans des produits finis tchèques destinés à l'exportation. Toutefois la plupart de ces exportations sont destinées au marché européen plutôt qu'aux marchés asiatiques. Ceci dit, la République tchèque exporte de plus en plus vers l'Asie et les entreprises tchèques sont persuadées qu'à l'avenir l’Asie deviendra un marché de plus en plus important. Le gouvernement est convaincu que les exportations vers la Chine, l'Inde et le Vietnam sont essentielles pour une croissance future.

L'Asie pose aussi un problème de compétitivité à l’économie de la République tchèque et les responsables du gouvernement pensent que ce n'est qu'en poussant la capacité d'innovation de l'économie nationale que les Tchèques seront en position de rester commercialement concurrentiels. L'économie tchèque est actuellement au 27e rang du classement mondial de la compétitivité et se place à peu près au milieu de classement des pays européens. L'objectif est de créer des conditions favorables qui aideront à faire des entreprises tchèques des leaders en matière d'innovation. Toutefois il faut trouver de nouveaux moyens de financer la recherche et le développement et d'orienter les jeunes vers les sciences et l'ingénierie. Une réforme majeure des universités et des lycées est en cours d'élaboration et vise à renforcer le capital humain du pays. Bien que le gouvernement tende à réduire les dépenses de façon significative, l'objectif est de faire en sorte que les programmes de recherche et de développement ne pâtissent pas de ces coupes.

Les défis auxquels l'industrie tchèque est confrontée ont également été mis en évidence lors d'une visite de la délégation à une fabrique de verre de Bohême qui continue à prospérer mais est confrontée à des conditions de marché très difficiles. Cette entreprise a survécu à des décennies de contrôle étatique pendant la période communiste et a récemment été rachetée par deux investisseurs, lui évitant ainsi de déposer le bilan. A l'échelle mondiale, l'industrie verrière a elle‑même été confrontée à d'importants bouleversements et les fabricants asiatiques font désormais concurrence aux producteurs traditionnels. De nombreuses sociétés ont fait faillite, notamment le groupe Waterford en Irlande.

Les travailleurs tchèques ont manifestement bénéficié d’un niveau de chômage relativement bas et certains ouvriers d'Europe de l'Est, notamment d'Ukraine, ont émigré pour travailler dans le pays. Nombre de ces travailleurs ne bénéficient pas de l'ensemble des prestations sociales et ont été les premiers à perdre leur emploi lorsque l'économie s'est ralentie. Certains sont recrutés par l'intermédiaire d'agences de travail et se retrouvent sur le marché du travail 'noir' ou 'gris'. Les travailleurs tchèques sont de moins en moins syndiqués et les organisations syndicales s'inquiètent du fait qu'avec les politiques gouvernementales il sera de plus en plus difficile de se syndiquer. A l'heure actuelle, seuls 16 % des travailleurs tchèques sont syndiqués et ce taux est en baisse. L'année dernière, les syndicats ont organisé d'importantes manifestations à Prague et ailleurs dans le pays afin de rappeler au gouvernement que ses efforts de résolution de la crise économique et financière ne devaient pas occulter les droits et les préoccupations des travailleurs.  

Le gouvernement tchèque ambitionne toujours d'adopter l'euro et l'économie est en bonne position pour y parvenir. L'économie est très ouverte et est profondément liée à la zone euro. Toutefois, à l'inverse de l'Estonie, elle n'a pas arrimé sa devise à l'euro par l'intermédiaire d'un fonds de stabilisation monétaire et la couronne tchèque a flotté par rapport à l'euro, ce qui lui a donné un peu de marge de manœuvre pendant la crise et a aidé le pays à conserver un taux de change concurrentiel dans une période difficile.

Si l'adoption de l'euro est un objectif largement partagé par la société tchèque, la crise récente en Grèce et ailleurs a soulevé des questions sur le moment le plus opportun pour le faire. De toute évidence, pour un pays comme la Grèce le fait de ne pas pouvoir faire jouer le taux de change pour s'adapter à la crise interne qui la secouait a exacerbé la récession. La débâcle économique qui a suivi a mis en lumière certaines défaillances dans les règles régissant l'euro, et les dirigeants tchèques observent avec attention les changements en cours d'adoption de manière à mieux calculer leur stratégie de passage à l'euro.

L'économie continue de converger avec celle des autres pays de la zone euro avec toutefois quelques différences. En 2009 et en 2010, le processus de convergence s'est ralenti et l'évolution au sein de l'économie mondiale a exacerbé la situation budgétaire en République tchèque. Des différences persistent également sur le plan de la structure industrielle ; en effet, par rapport à la plupart des pays de la zone euro, la République tchèque a une base industrielle relativement importante. Problème rendu d'autant plus compliqué par le fait que les salaires ne sont pas très flexibles même si cela, aussi, est en train d'évoluer.

Une série de tests de résistance effectuée récemment sur des banques tchèques a montré que celles-ci restent saines. Le système bancaire tchèque n'a pas adopté les processus complexes et sophistiqués utilisés par nombre de pays occidentaux ce qui a d'ailleurs eu pour effet d'isoler le système financier des pires conséquences de la crise. Le taux de dette privée n'est pas un problème important en République tchèque et les ménages n'ont pas souscrit autant de dettes libellées en devises étrangères qu'en Hongrie, par exemple. Le véritable problème financier réside plutôt dans le domaine des finances publiques et du remboursement de la dette où les Tchèques sont confrontés à des problèmes structurels. Les systèmes de pension et de santé doivent être réformés pour que ces problèmes soient traités de manière adéquate. Pour le moment, le pays ne répond pas aux critères de Maastricht sur les déficits budgétaires et à lui seul ce problème rend l'adoption de l'euro dans l'immédiat extrêmement improbable. Le gouvernement n'a pas encore amorcé le processus pour rejoindre le mécanisme de change européen (MCE II) et n'a pas défini quand il compte le faire. En d'autres termes, la convergence du taux de change avec la zone euro n'a pas encore commencé. Les incertitudes provoquées au sein de la zone euro par la crise grecque n'ont pu que pousser les Tchèques à faire preuve de prudence dans ce domaine.

Les Tchèques n'arrêteront pas de date tant que leur propre budget ne sera pas entièrement sous contrôle et que la zone euro n'aura pas résolu les carences de sa politique fiscale. Le gouvernement est conscient que, dans le cadre du processus d'adhésion à l'euro il devra gérer une inflation différenciée par rapport à la zone euro ; en d'autres termes, les prix vont nécessairement augmenter en République tchèque, résultat d'un ajustement nominal du taux de change. Gérer cela ne sera pas une tâche aisée. A l'heure actuelle, le sentiment est qu'un taux de change flottant est préférable à l'inflation. Une plus grande convergence sur le plan des structures industrielles est également souhaitable. Il est important de noter que l'adhésion à l'euro demandera un ajustement plus important aux Tchèques que cela ne sera le cas pour les Estoniens. Il y a longtemps que l'Estonie utilise un fonds de stabilisation monétaire, ce qui signifie que globalement le pays fonctionne comme s'il avait déjà adopté l'euro. La banque centrale de la République tchèque, tout comme celles de la Hongrie et de la Pologne, suit une politique de ciblage de l'inflation et de flexibilité du taux de change. A long terme, les Tchèques devront augmenter la productivité de manière à éliminer ce différentiel naturel de l'inflation.

POLITIQUES NATIONALES EN REPUBLIQUE TCHEQUE

Le paysage politique tchèque a subi d'importants changements ces dernières années. Pour la première fois depuis longtemps, le gouvernement jouit d'une considérable majorité au Parlement et est donc en bonne position pour agir de manière décisive. Cette situation peut être source de possibilités mais aussi de risques car l'absence de décision sur plusieurs séries de mesures clés risque de décevoir les électeurs.

La République tchèque est fermement ancrée à l’ouest et ses institutions. C'est un acteur fiable et digne de respect sur la scène internationale. Apparemment confrontée à peu de problèmes extérieurs, elle doit cependant apprendre à mieux définir ses propres intérêts et objectifs dans le système international et au sein de diverses institutions internationales. Pendant des années, des gouvernements faibles sur le plan national étaient mal placés pour y parvenir. Les politiques intérieures rendaient difficiles tout débat sérieux sur les objectifs nationaux et nombre de décisions-clés étaient en fait laissées aux mains des bureaucrates. Les discussions sur la défense antimissile et le Kosovo étaient plus liés à des questions intérieures qu'à de réels objectifs de politique étrangère.

La politique étrangère de la République tchèque se caractérise principalement par sa continuité et un degré raisonnable de consensus. La perspective d'un « retour à l’Europe» a uni le pays et lui a donné comme mission cruciale de politique étrangère l'adhésion à l'OTAN et à l'UE. Une fois ce but atteint, la question qui s'est posée immédiatement a été « et maintenant ? », question qui s'est révélée plus délicate que d'aucuns ne l'avaient prévu.

Il semblerait qu'après six ans d'appartenance à l'UE et 11 ans d'appartenance à l'OTAN, les pays d'Europe centrale doivent en faire plus pour faire avancer leur propre vision et intérêts au sein de ces organismes. Jusqu'à présent, l'Europe centrale a été un utilisateur relativement passif des avantages qu'offre l’appartenance à l’OTAN et à l’UE mais elle n’a pas vraiment réussi à définir des buts et des objectifs dans ces organisations. Aujourd'hui on reconnaît de plus en plus que ces pays doivent défendre leurs propres intérêts au sein de ces institutions. Le problème est que le pays est passé d'une hostilité totale vis-à-vis de l'Europe à une adhésion pleine et entière. Il est désormais essentiel d'adopter une vision plus subtile et critique.

On s’accorde sur le fait qu'un cadre multilatéral est nécessaire aux relations internationales, ce qui aide à structurer les débats. Il faut toutefois expliquer en détail tout ce que cela signifie et des points de désaccord existent. Des divisions sont apparues, par exemple, quant au degré d’intégration au sein de l'UE  – question débattue en République tchèque lors des discussions sur le Traité de Lisbonne. Il y a également de sérieux désaccords entre les tenants de la vision libérale du marché et ceux d'une vision sociale du marché de l’économie, et trouver une position commune semble difficile. Enfin, il y a des conflits plus subtils opposant un élan universaliste et une vision plus parcellaire de la communauté. Cette opposition se manifeste plus clairement dans les débats sur la nécessité d'exporter des valeurs démocratiques vers des pays non démocratiques. Les Tchèques doivent explorer plus avant ce que faire partie d'une société libérale signifie et fonder leurs politiques à partir de cette introspection. Quant au Parlement, il doit s'engager davantage dans des débats sur la politique étrangère du pays. Il accorde plus souvent attention aux questions nationales qu’aux relations internationales. Les débats publics sur la politique étrangère ont plus tendance à être axés sur ce qu'il faut pour être un bon citoyen international que sur la nature des intérêts nationaux tchèques. Ceci apparaissait clairement dans les débats sur l'Irak, l'Afghanistan et le Traité de Lisbonne.

Le groupe de Visegràd pourrait être pour les Etats d'Europe centrale un moyen important d'élaborer leurs propres points de vue sur ce type de questions. Ces pays partagent une vision particulière de l'Europe et du monde et il leur serait utile de mettre leurs positions en phase sur la base de cette vision commune. Certains signaux indiquent que cela commence à se produire. Les pays du groupe de Visegràd sont actuellement plus désireux de poursuivre leurs propres intérêts sur la scène internationale et donc de faire office de groupe de pression.

Il est également important de souligner que les points de vue des partis tchèques sur le système international ne sont pas précisément uniformes. Par exemple, l'OTAN et les opérations de l'OTAN suscitent plus de scepticisme à gauche qu'à droite. Certaines personnalités social‑démocrates considèrent que la conception même de la mission de l'OTAN en Afghanistan est imparfaite, et l'extrême gauche reste opposée à l'idée même de l'adhésion à l'OTAN. Dans le même temps, c'est un gouvernement social-démocrate qui, en 1999, a conduit le pays à adhérer à l'OTAN et a accepté de déployer des forces au Kosovo. Une grande partie des débats reste très politisé et les opinions des partis sur des missions particulières sont souvent fonction de ce qu'ils sont au pouvoir ou dans l'opposition. A mesure que la démocratie tchèque acquiert de la maturité, cette tendance devrait s'estomper.

Le gouvernement tchèque va bientôt redéfinir sa stratégie de sécurité nationale et va préparer un livre blanc sur la défense. Si ce document s'inscrit en grande partie dans la continuité des politiques récentes, des changements sont également fort probables. La République tchèque a la grande chance d'être entourée de pays démocratiques stables dont un seul – l'Autriche – n'est pas membre de l'OTAN et qui sont tous membres de l'UE. Elle entretient d'excellentes relations avec ces pays. Cet état de fait pourrait renforcer un certain sentiment de satisfaction alors que les risques qui pèsent sur la sécurité de la République tchèque sont bien réels, même s'ils sont bien au-delà de ses frontières. Préparer la société tchèque à faire face à ce genre de problème exige des dirigeants forts et déterminés pour que le public comprenne mieux la nature de ces défis de sécurité et l'intérêt de la stabilité mondiale pour les Tchèques.

Ce défi devient d'autant plus difficile à relever dans la mesure où le gouvernement tchèque doit rédiger une stratégie nationale en période de contraintes financières évidentes. Les budgets de la Défense vont être soumis à des restrictions, ce qui exige du gouvernement et de la société tchèque dans son ensemble qu'ils établissent un ensemble précis de priorités nationales et qu'ils recensent les éléments qui à leurs yeux sont essentiels, par exemple le nouveau Concept stratégique de l'OTAN.

La sécurité énergétique est un autre défi important pour les Tchèques, même s’il semble que l'OTAN ne peut avoir d'utilité qu'en matière de défense des couloirs maritimes de communication. Pour l'heure, les Tchèques ne sont pas en position d'exploiter les technologies renouvelables et auront donc besoin d'énergie venant à la fois de sources traditionnelles et du nucléaire. Ceci pose certains problèmes avec l'Autriche, farouchement opposée à la construction de nouvelles centrales nucléaires en Europe centrale. A ce sujet, l'opinion de la République tchèque a plus tendance à rejoindre celle de la France. Le pays a également investi dans de nouveaux gazoducs de manière à s'assurer qu'il ne dépend pas entièrement de la Russie. La sécurité énergétique du pays s'en est trouvée considérablement renforcée. En fait, l'objectif est de séparer l'élément sécuritaire de la question de l'énergie et de laisser au marché le soin de régler ces problèmes.

Les Tchèques admettent aussi qu'ils sont peut-être trop dépendants du marché automobile et souhaitent réellement diversifier le profil industriel du pays de manière à rendre celui-ci moins dépendant d'industries énergivores. Développer une base solide dans les technologies de pointe est une des façons d'y parvenir.

Il n'y a pas d'avis uniforme sur la Russie en République tchèque et il n'y a aucun a priori à son encontre. Il existe un certain fardeau historique lié au rôle de la Russie dans l'occupation du pays pendant la période soviétique, mais il y a aussi une volonté de dépasser cela. La ville de Karlovy Vary est devenue un point d'attraction majeur pour les Russes et des milliers de Russes aisés habitent maintenant dans cette zone. Les analystes tchèques disent parfois que cela vaut toujours la peine d'y réfléchir à deux fois avant de prendre des décisions intransigeantes au sujet de la Russie. L'attitude des Tchèques est influencée non seulement par les événements de 1968 mais aussi par le rôle qu’a joué la Russie pour libérer le pays de l'Allemagne nazie. En d'autres termes, c'est un héritage complexe et il est toujours possible de développer des liens plus étroits. Ce potentiel a été mis en évidence après l'accident d'avion à Smolensk qui pourrait marquer la genèse d'un rapprochement entre la Russie et la Pologne. Les pays comme la Pologne et la République tchèque ont une longue expérience avec la Russie et ils pourraient aider l'Occident à tisser des liens plus étroits avec la Russie.

Il convient de ne pas négliger les liens avec l'Ukraine. Les perspectives de ce pays sont plutôt négatives dans l'immédiat, particulièrement à la lumière des décisions prises concernant l'établissement de bases navales russes en Crimée et de l'attitude résolument anti-OTAN du gouvernement. Les gouvernements occidentaux devraient aussi tendre la main au peuple ukrainien. Les responsables tchèques considèrent qu'on pourrait en faire plus pour ce grand et important pays doté d'un fort potentiel.

La Chine joue un rôle de plus en plus prépondérant dans l'économie tchèque. Ses investisseurs sont à l'affût de nouvelles opportunités en Europe centrale et il est probable qu'ils en trouveront. Ils ont beaucoup à offrir mais posent aussi un problème de compétitivité aux pays de la région, problème qui augmentera exponentiellement lorsque la Chine aura développé sa capacité à innover. Pour le moment, elle s'appuie sur les innovations des pays occidentaux mais lorsque cela aura changé la Chine émergera comme une puissance économique dominante. Ce point représente déjà un défi sérieux pour les pays occidentaux et devrait retenir l’attention de nos dirigeants.

LE SECTEUR DE LA DEFENSE

La crise financière a aussi d'énormes conséquences sur le secteur de la défense en République tchèque. La baisse de la production industrielle en 2009 a provoqué la chute du PIB et la hausse du chômage. Ces éléments ont contribué à l'augmentation du déficit budgétaire et de la dette publique, problèmes exacerbés par les mesures anti-crise du gouvernement. La croissance économique demeure l'outil essentiel pour résoudre le problème de la dette publique.

Lorsque la République tchèque est devenue membre de l'OTAN, le budget attribué normalement à la défense était censé représenter 2 % du PIB. L'aggravation du climat économique a forcé un certain nombre de pays de l'OTAN à réduire leurs dépenses de défense ; tel est le cas de la République tchèque.

L'objectif des autorités tchèques est d'attribuer environ 50 % des dépenses de défense du pays aux dépenses de personnel, 30 % aux opérations et 20 % aux investissements dans les technologies militaires. Les responsables tchèques se sont engagés à respecter les engagements d'Istanbul et ils œuvrent pour faire en sorte que 50 % des forces du pays puissent être déployés sur des opérations à l'étranger et que 10 % puissent être déployés sur des missions à long terme. Actuellement, 9,4 % des forces tchèques sont déployées sur ce type de missions. Investir devient particulièrement difficile en période de récession économique et la crise économique mondiale freine les efforts de modernisation. Le but poursuivi est de s'engager dans des programmes importants de modernisation concernant des blindés de transport de troupes, des véhicules légers multi rôle et un programme de soldat du XXIe siècle. Les Tchèques envisagent également l'achat d'un véhicule stratégique de transport aérien. Le développement d'un mécanisme de défense aérienne viable après 2015 constitue un autre défi important pour l'armée tchèque. Les forces aériennes tchèques ont passé un contrat de leasing de dix ans portant sur une unité d'avions de combat en attendant de prendre une décision d'achat définitive. Ces appareils servent aussi bien à protéger l'espace aérien tchèque qu'à participer à des missions de défense aérienne dans la Baltique. La façon dont la défense aérienne tchèque sera assurée après la fin de ce contrat de leasing en 2015 est actuellement source d'importantes préoccupations.

Les autorités tchèques sont persuadées que la gestion de la défense nationale en période d'austérité économique repose sur la coopération internationale. Si elle est gérée correctement, la coopération peut se traduire par des économies budgétaires et une intégration plus poussée des Alliés. Les Tchèques souhaitent approfondir la coopération dans le domaine de la surveillance au sol, des systèmes de commandement et de contrôle arien et du système OTAN aéroporté d'alerte précoce. Ils accueillent également le Centre d'excellence conjoint pour la défense CBRN, à Vyskov, et un centre de coordination logistique multinational à Prague. Ces efforts renforcent la coopération interalliée et fournissent un important moyen de partager les coûts. Les Tchèques souhaiteraient également que la coopération et la communication entre l'OTAN et l'UE soient renforcées et ils sont convaincus que les gouvernements européens ne peuvent pas se permettre les doubles emplois résultant de l'appartenance aux deux organisations.

Les Tchèques ressentent toujours le poids de l'héritage soviétique, qui a légué au pays une infrastructure militaire bien plus importante que ce dont ils ont l'utilité ou le besoin. La nouvelle démocratie a également hérité d'une armée de 250 000 soldats, une force énorme qui surpasse de loin les besoins du pays ou sa capacité à la soutenir. Une grande partie de l'ancienne infrastructure a été privatisée mais le processus doit être mené à son terme. Dans le même temps, l'armée a été professionnalisée et est actuellement une nouvelle fois en pleine phase de restructuration et de réduction des effectifs. Quelque 3 090 personnes, dont 2 100 civils, ont récemment été licenciées. Cette année, 700 autres civils quitteront le ministère de la Défense.

La FIAS est considérée comme la plus importante mission en cours et les Tchèques y participent depuis 2002. La République tchèque à 500 hommes actuellement engagés en Afghanistan et il y a une PRT tchèque dans l'est du pays. En 2011, l'effectif passera à 700. Les forces tchèques concentrent leurs efforts sur la reconstruction et la stabilisation et sur le développement des forces de sécurité afghanes. La République tchèque aide les Afghans à établir des forces spéciales, a déployé trois hélicoptères de transport dans le pays et dispose d'une équipe de chirurgie à l'aéroport international de Kaboul.

Des forces tchèques ont également été déployées au Kosovo mais les unités tchèques ont maintenant été rappelées du Kosovo. Ce retrait n'a pas été bien perçu au sein de l'Alliance, mais les responsables tchèques maintiennent que la situation au Kosovo est telle que leur pays peut contribuer plus utilement à établir la paix et la sécurité par l'intermédiaire d'une présence non militaire. Les véritables défis en matière de sécurité sont les problèmes de corruption et de chômage, et les autorités tchèques étaient d'avis que c'est en Afghanistan qu'il valait mieux augmenter le contingent militaire. Les forces tchèques participent également aux missions de lutte contre la piraterie et à d'autres opérations des forces multinationales. L'objectif est de mettre sur pied une force militaire nationale restreinte et plus spécialisée, capable d'œuvrer de façon harmonieuse avec ses alliés et d'apporter des contributions essentielles dans des domaines spécialisés comme les hôpitaux de campagne et les unités chimiques. Le but visé est d'être en mesure de rendre ce type de forces déployable dans un délai de deux jours.

Un élément qui restera prioritaire pour le gouvernement sera de défendre l'attribution de 4 % de l'ensemble du budget du ministère de la Défense aux opérations malgré les coupes budgétaires auxquelles le ministère doit faire face. Celui-ci tentera de trouver des économies tout en réduisant au maximum leurs incidences sur les forces. Cette tâche s'annonce difficile.  Il y a eu plusieurs scandales liés à la corruption qui ont soulevé des questions sur la transparence du processus d’acquisition. Le gouvernement a annoncé qu'il entendait améliorer considérablement la transparence et la rentabilité du processus. 

Nombreux sont ceux qui, au sein de l'élite tchèque, considèrent que dans son ensemble le débat en République tchèque sur le système antimissile a été mal mené. La question avait été présentée comme étant liée à l'OTAN, alors qu'en fait c'était une question bilatérale entre la République tchèque et les Etats-Unis. Le grand public n'a jamais pris une part active dans le débat et pour certains, celui-ci concernait une mesure anti-Russe qui ne se justifiait pas, alors qu’elle était conçue pour contrer une attaque de missiles iraniens et non des missiles russes. L’administration Obama a finalement mis la proposition de côté.

Respectueusement soumis,

 

L’honorable Sénatrice Jane Cordy

Association parlementaire canadienne de l’OTAN (AP OTAN)

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