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Rapport

 

M. David Tilson, député, M. Scott Simms, député, et Mme Francine Lalonde, députée, se sont rendus à Strasbourg afin de participer à la deuxième partie de la session de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe (APCE), à laquelle le Canada jouit d’un statut d’observateur, tout comme Israël et le Mexique.  Ils étaient accompagnés du secrétaire de l’Association, M. Philippe Méla, et de M. Sebastian Spano, conseiller.  De plus, les ont rejoints à Strasbourg Son Excellence M. Louis de Lorimier, ambassadeur du Canada auprès du Royaume de Belgique et du Grand Duché du Luxembourg et observateur permanent auprès du Conseil de l’Europe, et son adjointe, Mme Sirine Hijal.

 

Aperçu

Le calendrier de la session de printemps était bien rempli[1], quantité de sujets étant débattus dans les commissions, dans les groupes politiques et à l’Assemblée.  L’Assemblée s’est penchée sur les sujets suivants :

·        Le lobbying dans une société démocratique (Code européen de bonne conduite en matière de lobbying)

·        Associer les femmes à la prévention et au règlement des conflits non résolus en Europe

·        Discussion sur les conséquences de la crise économique :

-           Les répercussions sociales de la crise économique

-           L'impact de la crise économique mondiale sur les migrations en Europe

-           Les femmes et la crise économique et financière

-           Investir dans la cohésion familiale en tant que facteur de développement en temps de crise

·        Richesses, bien public et bien-être : comment les concilier dans une Europe en mutation?

·        Débat d'actualité : Les conséquences de la guerre entre la Géorgie et la Russie

·        Discussion :

-           La piraterie – un crime qui défie les démocraties

-           La nécessité de prendre des mesures juridiques internationales supplémentaires pour lutter contre la piraterie maritime

·        La commémoration des victimes de la grande famine (Holodomor) en ex-URSS

·        Respect des obligations et des engagements du Monténégro

·        Débat selon la procédure d'urgence : Le besoin urgent d'une réforme constitutionnelle en Bosnie-Herzégovine

·        Débat selon la procédure d'urgence : La situation au Bélarus : développements récents

·        Mise en œuvre effective de la Convention européenne des droits de l'homme

·        Discrimination sur la base de l'orientation sexuelle et de l'identité de genre

·        La protection des « donneurs d’alerte »

·        Dialogue post-suivi avec la Bulgarie

·        Migrants et réfugiés : un défi permanent pour le Conseil de l'Europe

·        Biodiversité et changement climatique

·        Euro-Méditerranée : pour une stratégie du Conseil de l’Europe

 

L’Assemblée a également entendu les intervenants suivants :

·        Mme Micheline Calmy-Rey, Cheffe du Département fédéral des affaires étrangères de la Suisse, Présidente du Comité des Ministres

·        M. Victor Ianoukovitch, Président de l'Ukraine

·        Mme l'Ambassadeur Heidi Tagliavini, ancien chef de la mission d'information internationale sur le conflit en Géorgie

·        M. Thomas Hammarberg, Commissaire aux droits de l'homme du Conseil de l'Europe

·        M. Sergueï Lavrov, ministre des Affaires étrangères de la Fédération de Russie

·        Mme Eveline Widmer-Schlumpf, Cheffe du Département fédéral de la justice et de la police de la Suisse

 

Activités canadiennes pendant la Session

1.    Aperçu

Les membres de la délégation ont participé activement aux débats à l’Assemblée et dans plusieurs réunions de commission, en particulier, la Commission des questions politiques, la Commission des questions économiques et du développement, la Commission des questions juridiques et des droits de l’homme, et la Commission des migrations, des réfugiés et de la population.  Les délégués canadiens ont également assisté à des réunions des différents groupes politiques de l’APCE.

Plusieurs réunions spéciales ont aussi été organisées afin d’aider les délégués à mieux apprécier le travail de l’APCE, y compris des réunions avec le Bureau des traités du Conseil de l’Europe, le Bureau du Commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe et le Secrétaire général de l’APCE.

 

2.    Séance d’information de l’observateur permanent du Canada auprès du Conseil de l’Europe

L’observateur permanent du Canada auprès du Conseil de l’Europe, Son Excellence M. Louis de Lorimier, a fait le point pour la délégation des récents développements au Conseil de l’Europe et de la participation du Canada.  Son Excellence a également informé la délégation de la situation politique en Belgique et de l’évolution des relations entre l’Union européenne et le Canada.  Enfin, il y a eu une discussion sur la mission d’observation permanente du Canada auprès du Conseil de l’Europe et sur l’assistance qu’elle fournit aux délégations canadiennes à l’APCE. 

 

a.    Situation politique en Belgique

Son Excellence a fait le point de ce que l’on peut qualifier de crise constitutionnelle en Belgique et qui découle d’interprétations contradictoires de ce que la législation électorale  belge prévoit dans la circonscription électorale de Bruxelles-Hale-Vilvoorde, ou BHV.  Dans cette circonscription, la seule qui soit bilingue en Belgique, les francophones ont le droit de voter pour des partis politiques francophones.  En 2003, la Cour constitutionnelle belge a statué que la circonscription de BHV allait devoir être redécoupée, autrement dit, que ses limites devaient être redéfinies.  Les partis qui composent le gouvernement de coalition ont été incapables de s’entendre sur les modalités de redécoupage et sur la question essentielle des droits des francophones, en particulier sur la possibilité pour les francophones résidant dans la circonscription de conserver leur droit de vote actuel.  Faute de pouvoir appliquer la décision de la Cour constitutionnelle, le gouvernement a démissionné.  Or, cette démission ne pouvait  pas plus mal tomber, car la Belgique doit assumer le 1er juillet la présidence tournante du Conseil de l’Union européenne, et cela amène à s’interroger sur sa capacité de remplir cette fonction.

 

b.    Relations entre le Canada et la Belgique

L’ambassadeur de Lorimier a fait remarquer que les relations entre le Canada et la Belgique sont solides et que les échanges bilatéraux, qui portent dans une large mesure sur des investissements, avoisinent les 3 milliards de dollars. 

 

c.    Relations entre le Canada et l’Union européenne

Les négociations en vue d’un Accord économique et commercial global entre le Canada et l’Union européenne progressent.  L’ambassadeur de Lorimier a souligné que l’UE tient à conclure un accord commercial avec le Canada, car cela l’aiderait indirectement à accéder au marché américain.  Depuis l’échec des négociations commerciales multilatérales de Doha, l’UE souhaite vivement renforcer les relations commerciales bilatérales.  L’ambassadeur de Lorimier a expliqué que les obstacles non tarifaires au commerce, y compris les politiques dites de « régulation de l’offre » et les règles régissant les marchés publics, en particulier au niveau municipal et provincial, préoccupent particulièrement les Européens.  Il a cité le cas d’un contrat important attribué, sans demande de propositions, par la ville de Montréal à Bombardier pour la construction de voitures de métro. Alstom, constructeur français de véhicules de chemin de fer, a porté plainte et engagé des poursuites en justice.  [Pour finir, le contrat a été accordé à un consortium Bombardier-Alstom.]  L’ambassadeur de Lorimier voit en général des signes de progrès dans l’élimination des obstacles au commerce et souligne que les obstacles tarifaires et non tarifaires sont éliminés dans de nombreux domaines.

 

d.    Mission d’observation permanente du Canada auprès du Conseil de l’Europe

Les délégués canadiens ont demandé ce qui pourrait être fait pour maximiser le rôle de la mission d’observation permanente du Canada auprès du Conseil de l’Europe.  D’après la délégation, des séances d’information organisées par l’ambassadeur le lundi matin ou après-midi avant le début des sessions ordinaires seraient fort utiles, tout comme un suivi régulier du Comité des ministres et plus de communication entre les sessions.  L’ambassadeur a précisé qu’une réduction de budget importante empêche son bureau de fournir des services additionnels à la délégation canadienne à l’APCE, mais il a laissé entendre que son adjointe et le secrétaire administratif de la délégation pouvaient discuter de moyens par lesquels son bureau pourrait être d’une plus grande assistance entre les sessions ordinaires.  Quant au Comité des ministres, ni lui-même ni son personnel n’assistaient à beaucoup de réunions, en dehors de l’assemblée annuelle.  Il a fait observer que son allocation budgétaire pour le Conseil de l’Europe a baissé de moitié, tandis que son budget global a été réduit de 3,5 %.

 

3.    Rencontre avec la délégation d’observateurs du Mexique

Une rencontre a également eu lieu avec la délégation d’observateurs du Mexique.  Il y a été question de collaboration sur des thèmes d’intérêt commun à l’APCE.  La délégation mexicaine a par ailleurs soulevé plusieurs questions au sujet desquelles elle souhaitait connaître l’avis de la délégation canadienne. Les voici plus en détail ci-dessous.

 

a.    Projet de loi C-32, Loi modifiant la Loi sur le tabac

La délégation mexicaine s’est déclarée préoccupée par la promulgation du projet de loi C-32, Loi modifiant la Loi sur le tabac.  La loi a reçu la sanction royale le 8 octobre 2009 (elle est entrée en vigueur le 18 mai 2010).  Elle interdit l’utilisation dans les produits du tabac de certains additifs, comme des colorants et des arômes, qui rendent ces produits plus attrayants pour les jeunes.  La loi répond à des craintes au sujet de produits du tabac contenant des additifs qui sont considérés comme incitant les jeunes à fumer.  La délégation mexicaine transmettait les craintes exprimées par certaines régions du Mexique où l’on cultive le tabac quant aux répercussions de la loi sur les exportations de tabac mexicain vers le Canada.  La délégation mexicaine a demandé à la délégation canadienne quelle serait la meilleure façon de soulever la question et par quelles voies officielles.  l lui a été répondu que le recours probable serait au niveau ministériel, sans doute en passant par l’ambassade du Canada au Mexique.  Il a été souligné, toutefois, que la loi a reçu la sanction royale et qu’elle entrerait en vigueur en mai 2010.

 

b.    Entreprises canadiennes ayant des activités au Mexique et leurs pratiques environnementales

Les délégués mexicains ont fait savoir à la délégation canadienne que des entreprises minières canadiennes qui mènent des activités au Mexique ne respecteraient peut-être pas les normes environnementales canadiennes. Il a été demandé dans quelle mesure ces entreprises sont assujetties aux normes environnementales canadiennes, qui sont généralement considérées comme plus strictes que les normes mexicaines.  Les membres de la délégation canadienne ont déclaré apprécier l’importance de la question pour le Mexique.  Il a été souligné qu’en règle générale, le Canada ne peut pas légiférer en ce qui concerne des activités, qu’elles soient économiques ou sociales, qui se déroulent sur le territoire d’autres pays, ni imposer le droit canadien pour des activités menées par des Canadiens à l’étranger.  Le Canada peut imposer des normes environnementales aux entreprises qui ont des activités sur le sol canadien.  Cependant, il serait très difficile de prétendre appliquer le droit canadien dans un pays étranger et cela serait contraire aux principes du droit international. Les lois de ces pays s’appliquent aux entreprises canadiennes, y compris celles qui se rapportent aux normes environnementales.  La délégation canadienne a encouragé la délégation mexicaine à soulever ces questions dans d’autres instances interparlementaires où les pays membres ont des intérêts communs dans les questions, ou à un niveau diplomatique.

 

c.    Visas canadiens pour les Mexicains

En réponse aux préoccupations exprimées par la délégation mexicaine au sujet de l’obligation continue pour les visiteurs mexicains au Canada d’obtenir un visa, la délégation canadienne a répondu que le gouvernement canadien fait tout son possible pour accélérer les formalités de demande de visa dans les villes mexicaines.

 

d.    Conférence sur le climat (COP 16)

La délégation mexicaine a rappelé aux délégués canadiens que le Mexique accueillera en novembre 2010 la XVIe Conférence des parties à la Convention cadre des Nations Unies sur les changements climatiques (COP16).  Le Canada a été encouragé à y envoyer une délégation parlementaire.

 

e.    Forum parlementaire mondial sur la jeunesse

Du 25 au 27 août, le Mexique accueillera à Guanajuato le Forum parlementaire mondial sur la jeunesse.  Le forum est organisé par l’organe législatif du Congrès mexicain par l’intermédiaire du Comité de la jeunesse et des sports.  Les délégués mexicains ont vivement encouragé les parlementaires canadiens à participer à l’événement.  La documentation préparée pour l’occasion le décrit comme étant le premier forum de ce genre, conçu pour qu’y participent des membres de gouvernements, des parlementaires et des organisations non gouvernementales.

 

4.    Rencontre avec le Bureau du Commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe

Les membres de la délégation canadienne ont profité de l’occasion pour rencontrer une représentante du Commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe.  Mme Isil Gachet, directrice du Bureau du Commissaire aux droits de l’homme, a donné à la délégation un aperçu du travail accompli par le Bureau du Commissaire, de son mandat et de certaines de ses activités récentes[2].

Mme Gachet a commencé par expliquer que le Commissaire ne fait pas enquête sur des cas individuels de violation des droits de la personne ou d’infraction à la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, ou Convention européenne des droits de l’homme (la Convention).  Les personnes qui ont été soumises à des pratiques ou à des lois contraires à la Convention peuvent porter plainte auprès de la Cour européenne des droits de l’homme, après avoir épuisé tous les autres recours juridiques dans le pays où la violation supposée de ses droits a été commise. 

Le Commissaire peut toutefois enquêter sur les pratiques et les lois des États membres du Conseil de l’Europe et les surveiller afin de s’assurer qu’elles sont conformes aux exigences de la Convention.  Le Commissaire peut agir de sa propre initiative.  Dans la surveillance des pratiques des différents États membres en matière de droits de la personne, le Commissaire fait généralement de courtes visites dans le pays visé, puis il dresse un rapport sur des questions préoccupantes particulières relevées lors de la visite dans le pays.  Ces rapports peuvent comprendre des constatations sur la situation dans le pays en question et des recommandations pour l’améliorer ou pour remédier à tout manquement aux normes du Conseil de l’Europe en matière de droits de la personne.  Le Commissaire entretient également un dialogue permanent avec les pays membres lorsque leurs pratiques en matière de droits de la personne soulèvent des questions.

Le Commissaire a créé un mécanisme d’« intervention rapide » pour les situations de crise dans des pays membres, ainsi que pour la situation au lendemain de ces crises.  Mme Gachet a fait observer que les conséquences humanitaires du récent conflit armé entre la Géorgie et la Russie comptaient parmi les crises récentes les plus sérieuses dont le Commissaire ait eu à s’occuper.

Mme Gachet a souligné que le Commissaire veille à éviter les chevauchements avec d’autres organisations gouvernementales et internationales qui ont pour mandat de s’occuper de questions en rapport avec les droits de la personne qui peuvent survenir dans des pays membres. 

Avec la récente entrée en vigueur du Protocole 14 à la Convention, la Commissaire est maintenant habilité à intervenir de sa propre initiative dans des cas individuels portés devant la Cour européenne des droits de l’homme, soit en présentant des observations écrites, soit en participant aux audiences[3].

 

5.    Rencontre avec le Secrétaire général de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe

La délégation canadienne a rencontré M. Mateo Sorinas, Secrétaire général de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe. M. Sorinas est chargé, de manière générale, du fonctionnement quotidien de l’Assemblée, du suivi de ses décisions et de la coordination des travaux de ses commissions.  La délégation a posé un certain nombre de questions sur les règles de procédure qui l’empêchent de profiter au maximum de son droit de participation à l’Assemblée. En particulier, le président de la délégation canadienne a fait remarquer que l’article 59.2 du Règlement de l’Assemblée stipule que les délégations d’observateurs doivent soumettre le nom de leurs six délégués et de six suppléants nommés pour toute la durée de la session avant le début de la session ordinaire de l’Assemblée.  Le président de la délégation a expliqué qu’en vertu de la constitution de l’Association parlementaire Canada-Europe, les délégués à l’APCE doivent appartenir aux partis politiques siégeant à la Chambre des communes et au Sénat et que leur représentation doit être proportionnelle à la représentation des partis dans les deux chambres.  Il en résulte un bassin limité de candidats pour certains partis, comme le Bloc Québécois.  Si le délégué actuel du Bloc est dans l’incapacité de participer à la session ordinaire de l’APCE, le Bloc ne pourra pas nommer de suppléant. Surtout, cette situation fait qu’il est difficile de trouver assez de délégués à envoyer aux sessions ordinaires de l’APCE, ce qui empêche la délégation d’y participer pleinement.

M. Sorinas comprend le dilemme auquel est confrontée la délégation canadienne, mais il a souligné que le Règlement de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe en ce qui concerne toutes les délégations vise à assurer une continuité.  D’autres pays rencontrent des problèmes similaires.  Il a cité le cas de l’Espagne en particulier, dont des délégués appartiennent à de petits partis représentant le Pays Basque et la Catalogne.  Il a expliqué que les délégations à composition ouverte avaient posé dans le passé des problèmes quant à la qualité de la participation des délégations.  Des participants irréguliers, même lorsqu’ils figurent sur la liste des délégués, créent aussi des problèmes dans les travaux des commissions, car il faut souvent récapituler les questions débattues dans ces réunions, ce qui perturbe parfois le bon déroulement des travaux.

La délégation canadienne a également soulevé la question de l’ordre des orateurs dans les débats à l’Assemblée.  Trop souvent, les délégués canadiens ne peuvent pas s’exprimer dans des débats importants parce qu’ils se trouvent trop loin dans la liste des orateurs.  Même si un délégué canadien est bien situé dans l’ordre des orateurs, sans raisons apparentes, son nom est repoussé plus loin dans la liste.

Selon M. Sorinas, les deux questions doivent être soumises officiellement, par écrit, au président de l’APCE, qui les transmettra à la Commission du Règlement, des immunités et des affaires institutionnelles de l’APCE.  M. Sorinas a également indiqué qu’il parlerait directement au président de la question de l’ordre des orateurs et qu’il essaierait de la faire régler au Bureau de l’Assemblée.

 

6.    Exposé du Bureau des traités du Conseil de l’Europe

Les représentants du Bureau des traités du Conseil de l’Europe ont organisé à l’intention de la délégation un exposé sur le processus des traités au Conseil de l’Europe, y compris la participation du Canada.  Ils ont expliqué les différentes étapes de la préparation et de l’entrée en vigueur d’un traité, du moment où l’on s’aperçoit qu’un traité est nécessaire, au processus d’élaboration et, pour finir, à la signature, à la ratification et à la mise en œuvre.  L’exposé était très utile et instructif, et il a permis aux délégués de bien comprendre le rôle joué par le Comité des ministres et celui de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe dans l’élaboration des traités.  Les représentants ont également souligné la contribution du Canada à l’élaboration d’un certain nombre de traités.

Les représentants ont tout d’abord fait remarquer qu’environ 40 % des traités ou conventions du Conseil de l’Europe ont pour origine des initiatives de l’APCE. C’est le Comité des ministres, cependant, qui détermine s’il est bon d’entamer le processus de rédaction d’un traité.  Une fois la décision prise, une conférence de ministres « spécialisés », possédant des compétences dans le domaine en question, est convoquée.  Lorsque l’avant-projet de traité est prêt, l’opinion de l’APCE est demandée.  Enfin, les conventions et les traités sont adoptés à la majorité des deux tiers du Comité des ministres.

Les pays observateurs ont le droit de participer au processus de rédaction. Cette participation les habilite à signer et à ratifier un traité.  Le Canada a participé à la rédaction de 17 traités.  Pour ce qui est des autres traités, il peut en devenir signataire en y adhérant.  Le processus d’accession passe par une demande au Comité des ministres par l’intermédiaire du Secrétaire général du Conseil de l’Europe.  Le Canada est signataire de sept traités du Conseil de l’Europe, y compris de la Convention sur la cybercriminalité (signée mais pas ratifiée) et de la Convention sur le transfèrement des personnes condamnées (signée et ratifiée).

 

7.    Visite du camp de concentration de Struthof

La délégation canadienne a été bouleversée par la visite du camp de concentration de Struthof, situé à une cinquantaine de kilomètres au sud-ouest de Strasbourg.  La visite lui a rappelé combien il est important de rester vigilant dans la protection des droits de la personne.  Elle lui a aussi rappelé le rôle essentiel que joue le Conseil de l’Europe dans la promotion de la démocratie, des droits de la personne et de la primauté du droit.

 

8.    Intervention canadienne dans les débats de l’Assemblée

·        Le lobbying dans une société démocratique (Code européen de bonne conduite en matière de lobbying)

M. David Tilson, député, avait préparé un discours sur ce sujet, mais en raison de la longue liste d’orateurs, il n’a pas pu le prononcer.  Le discours a cependant été remis au  service des greffiers, afin qu’il fasse partie du compte rendu officiel des séances[4] :

« Je suis heureux de pouvoir parler aujourd’hui au nom de la délégation canadienne et d’offrir mes commentaires sur le projet de recommandation relatif à un code de conduite européen sur le lobbying.

La création d’un tel code est essentielle pour que le public ait confiance dans les institutions gouvernementales et, donc, pour renforcer la démocratie et la primauté du droit.

On ne saurait surestimer l’importance d’un code de conduite auquel tous les États membres du Conseil de l’Europe adhéreraient.  Comme le rapporteur le souligne à juste titre, les citoyens ont le droit en démocratie de savoir qui contacte les décideurs au gouvernement pour essayer d’influencer leurs décisions.  En plus de créer une transparence, un code de conduite garantit pratiquement que les lobbyistes n’utilisent pas de moyens irréguliers pour influencer les décideurs en les mettant en conflit d’intérêts pour obtenir un traitement favorable de la part des pouvoirs publics.

Le rapport mentionne le Canada comme exemple dont le Conseil de l’Europe peut s’inspirer dans la rédaction d’un code de conduite.  Le Canada a un système d’enregistrement des lobbyistes depuis 1989 et un code de déontologie des lobbyistes depuis 1997.  Depuis 2008, ce code fait l’objet d’une loi sur le lobbying.  Résultat, les activités des lobbyistes sont davantage réglementées depuis la promulgation de la Loi sur l’enregistrement des lobbyistes et la création du Commissariat au lobbying du Canada, organisme indépendant qui relève directement du Parlement.  Ces réformes s’inscrivaient dans un ensemble bien plus vaste de réformes entrées en vigueur en 2007 et 2008 avec la Loi fédérale sur la responsabilité.

Entre autres caractéristiques de la nouvelle loi sur le lobbying figurent une définition élargie de titulaire de charge publique, qui comprend maintenant des titulaires de charge publique désignés parmi lesquels les ministres, le personnel ministériel, les sous-ministres, les administrateurs généraux de ministères et d’organismes, d’autres hauts fonctionnaires ministériels, le personnel militaire de haut rang et certaines personnes nommées par le cabinet; une nouvelle obligation en vertu de laquelle tous les contacts de lobbyistes avec des titulaires de charge publique doivent être signalés dans des rapports mensuels adressés au commissaire; une obligation de signaler au commissaire au lobbying dans les 10 jours la conclusion d’un engagement au nom d’un client de faire du lobbying auprès d’un fonctionnaire; une interdiction de lobbying pendant cinq ans après l’emploi imposée aux titulaires de charge publique désignés et aux membres de l’équipe de transition du premier ministre; une interdiction pour les lobbyistes d’honoraires conditionnels, ou assujettis au succès du lobbying; un Commissariat au lobbying complètement indépendant relevant directement du Parlement et doté de pouvoirs d’enquête accrus; et une interdiction d’activités politiques pour les lobbyistes lorsque ces activités risquent de placer un titulaire de charge publique en conflit d’intérêts réel ou apparent.

Je félicite le rapporteur, M. Mendes-Bota, de son rapport, mais je souhaite préciser qu’il y a eu quelques changements majeurs à la loi canadienne sur le lobbying. J’ai porté ces changements à l’attention du rapporteur.  Comme je l’ai fait remarquer, le rapport ne fait pas état des réformes importantes que je viens de décrire et qui ont fait passer le régime du lobbying au Canada de système d’enregistrement à une réglementation des activités des lobbyistes et qui leur impose un code de déontologie. J’aimerais profiter de cette occasion pour suggérer que l’on trouve le moyen de corriger le texte du rapport à un moment ou à un autre afin qu’il reflète la situation telle qu’elle est au Canada en ce qui concerne le lobbying.

En conclusion, je félicite l’Assemblée parlementaire de prendre cette mesure importante vers la création d’un code de conduite des lobbyistes qu’appliqueront tous les États membres du Conseil de l’Europe, mesure qui renforcera les institutions démocratiques en garantissant la transparence au gouvernement et en redonnant confiance au public dans le processus démocratique. La délégation canadienne appuie la recommandation de la Commission. »

 

·        Les répercussions sociales de la crise économique

M. Scott Simms, député, a prononcé un discours sur les répercussions sociales de la crise économique[5] :

« Je vous remercie, monsieur. Je remercie tout le Conseil de l’Europe de m’accorder ces quelques instants pour m’exprimer.  En tant qu’observateurs, nous nous retrouvons généralement à la fin de la liste, mais je n’en suis pas moins très reconnaissant.

Ce débat est important et je félicite les rapporteurs de leurs rapports.  Je me concentrerai sur le rapport intitulé « Les répercussions sociales de la crise économique », qui a été très bien préparé.  Il porte sur les grands thèmes qui touchent toutes les régions, y compris le continent nord-américain.  Bien souvent, lorsque je m’adresse à cette Assemblée, je dis que je viens de l’autre côté de l’océan, mais ce mois-ci, je dois dire que je viens de l’autre côté du volcan.

En venant ici, j’ai vu ce rapport et j’ai compris combien ces thèmes et les problèmes auxquels nous sommes confrontés sont communs.  La crise économique a secoué tout le système de plus de façons que nous ne l’imaginons. Le catalyseur se trouvait au sud de notre frontière.  À bien des égards, nous dormons à côté d’un géant – les États-Unis d’Amérique.  Plus de 80 % de notre commerce d’exportation est à destination de ce partenaire commercial, ce qui signifie que nous dépendons beaucoup de lui.  Nous avons certainement senti passer la crise.  Si nous nous en sortons aussi bien, c’est en partie parce que nous avons établi un très bon système bancaire à la fin des années 1990 et au début de ce siècle.

Cependant, j’aimerais parler d’une question qui est source de préoccupation au Canada et dans toute l’Amérique du Nord : la sécurité des retraites de nos personnes âgées.  Les pensions publiques et privées ont été durement touchées dans toute l’Amérique du Nord, mais au Canada tout spécialement. Dans certains cas, elles ont été dévaluées de plus de moitié en un an.  Pour l’essentiel, elles reposent sur ce que nous appelons les prestations directes, et elles sont versées jusqu’à la fin de la vie.  Avec des pensions dévaluées de moitié, tellement de gens qui ne l’étaient pas avant se sont retrouvés pauvres.

Nous sommes maintenant aux prises avec une crise et tout ce qui est arrivé est le résultat de mesures spéculatives.  Nous livrons tellement de nos programmes sociaux à la merci de spéculateurs que cela devient alarmant.  Parce que la situation des pensions est dangereuse, nous nous retrouvons dans notre pays avec des programmes sociaux débordés dont il faut absolument s’occuper.  Les garderies vont devenir la nouvelle frontière de la politique sociale au Canada tellement la demande est grande chez les jeunes.  Tellement plus de femmes travaillent, de même que d’hommes, qu’il devient essentiel de faire garder les enfants.  Cette crise économique qui frappe les pensions et d’autres secteurs sociaux encore, y compris le secteur de la santé, signifie que ce dont il faut s’occuper de toute urgence est rejeté en marge.  Comme le soulignait plus tôt un de mes collègues, nous devons nous préparer à la prochaine éruption volcanique. Des normes internationales – oui.  Des normes de conduite – absolument.  C’est pourquoi je salue ce rapport et le fait qu’il insiste sur des normes de soins de santé et de travail. L’indemnisation des travailleurs, l’assurance-emploi : voilà les méthodes que nous devons chérir.

Enfin, j’aimerais citer le passage du paragraphe 58 du rapport que j’apprécie le plus :  « Nous avons tous laissé la valeur des marchandises devenir plus importante que les vraies valeurs et l’avidité a ainsi remplacé la solidarité. » Bâtissons un monde meilleur avant tout par nos programmes sociaux.  Je vous remercie de m’avoir donné cette occasion de prendre la parole. »

 

·        Discrimination sur la base de l'orientation sexuelle et de l'identité de genre

Mme Francine Lalonde, députée, s’est exprimée au sujet de la « Discrimination sur la base de l'orientation sexuelle et de l'identité de genre ».  Un résumé de son discours est présenté ci-dessous[6] :

LE PRÉSIDENT – Je vous remercie. La parole est à Mme Lalonde.

Mme LALONDE (observateur du Canada) a déclaré avoir trouvé le rapport de M. Gross dans sa version originale admirable. Son idée maîtresse est claire et le rapport est destiné à s’appliquer à toute l’Europe.  Au Québec, d’où elle est originaire, et au Canada en général, il existe des voies légales en ce qui concerne le mariage homosexuel depuis 1977.  Au Québec, toute discrimination fondée sur l’orientation sexuelle est interdite.  Quoi qu’il en soit, même lorsqu’une telle base juridique, existe les homosexuels n’en éprouvent pas moins des difficultés, et ils doivent vivre un mensonge, sans pouvoir réaliser leur potentiel.  Hommes, femmes, lesbiennes, gais, bisexuels et transgenres devraient tous pouvoir vivre pleinement leur vie.  Le Conseil de l’Europe a accompli un travail admirable, mais il faut s’adresser aux parents qui s’interrogent sur la sexualité de leurs enfants et qui ne pensent pas qu’ils ont un avenir.  Les jeunes confrontés à cette situation se heurtent au désespoir, ce qui conduit souvent à la violence.  Ils peuvent se sentir rejetés et détruits et penser que leur seule option est le suicide.  Les recours juridiques aident ces jeunes à s’exprimer.  Mme Lalonde a remercié le président, puis remercié M. Gross de son rapport.


II

Contexte : le Conseil de l’Europe

Le Conseil de l’Europe est une organisation intergouvernementale qui vise à :

·        défendre les droits de l’homme, la démocratie pluraliste et la prééminence du droit;

·        favoriser la prise de conscience et la mise en valeur de l’identité culturelle de l’Europe et de sa diversité;

·        rechercher des solutions communes aux problèmes de nos sociétés, comme la discrimination contre les minorités, la xénophobie, l’intolérance, la bioéthique et le clonage, le terrorisme, la traite de personnes, le crime organisé et la corruption, la cybercriminalité, la violence contre les enfants;

·        développer la stabilité démocratique en Europe en soutenant les réformes politiques, législatives et constitutionnelles.

Le Conseil de l’Europe, qui a été fondé en 1949, compte maintenant 47 pays qui vont des Açores à l’Azerbaïdjan, et de l’Islande à Chypre, le Monténégro étant le dernier en date à l’avoir rejoint, en mai 2007. Le Conseil a pour principal objectif de promouvoir et de défendre le développement démocratique et les droits de la personne, et de tenir les États membres pour responsables de leurs résultats dans ces domaines.  Cependant, il est également très actif pour ce qui est de favoriser la coopération internationale et la coordination des politiques dans un certain nombre d’autres domaines, dont la coopération juridique, l’éducation, la culture, le patrimoine, la protection de l’environnement, les soins de santé et la cohésion sociale.  Le Conseil de l’Europe est à l’origine de plus de 200 conventions et traités européens, dont beaucoup sont ouverts à des États non membres, dans des domaines de politique tels que les droits de la personne, la lutte contre le crime organisé, la prévention de la torture, la protection des données et la coopération culturelle[7].

Les principales institutions du Conseil sont le Comité des ministres (son organe décisionnel, composé des ministres des Affaires étrangères des États membres ou de leurs suppléants), l’Assemblée parlementaire, le Commissaire aux droits de l’homme, la Cour européenne des droits de l’homme et le Congrès des pouvoirs locaux et régionaux.

L’Assemblée parlementaire compte 636 membres (318 représentants et 318 suppléants) que les parlements nationaux des 47 États membres du Conseil de l’Europe élisent ou nomment parmi leurs membres. Les parlements du Canada, d’Israël et du Mexique jouissent actuellement du statut d’observateur auprès de l’APCE. Le statut d’invité spécial du Bélarus, qui avait demandé à devenir membre du Conseil de l’Europe en 1993, a été suspendu en janvier 1997, après l’adoption par ce pays d’une nouvelle constitution considérée par beaucoup comme antidémocratique.

L’Assemblée élit le Secrétaire général du Conseil de l’Europe, les juges de la Cour européenne des droits de l’homme et le Commissaire aux droits de l’homme du Conseil.  Elle est consultée sur tous les nouveaux traités internationaux rédigés par le Conseil, demande des comptes au Conseil et aux États membres, réalise des études sur divers sujets d’intérêt commun pour les Européens et offre aux parlementaires nationaux une tribune commune où débattre. L’Assemblée a joué un rôle important dans le processus de démocratisation de l’Europe centrale et orientale, et elle suit de près ce qui se passe dans les pays membres, y compris les élections nationales.  Elle se réunit quatre fois par an à Strasbourg, les commissions se réunissant plus souvent. Les médias européens rendent souvent largement compte des décisions et des débats du Conseil et de l’Assemblée.

Le Conseil de l’Europe et son Assemblée parlementaire réunissent des décideurs de pays divers sur le plan politique, culturel et géographique.  Ensemble, le Conseil et l’Assemblée constituent le principal forum pour la formation d’une communauté politique trans-européenne attachée à la démocratie et aux droits de la personne.  L’Assemblée parlementaire assure également des fonctions de supervision parlementaire pour plusieurs organisations internationales clés, dont l’OCDE, la Banque européenne pour la reconstruction et le développement (BERD) et l’Organisation internationale pour les migrations (OIM).  Ce rôle varié dans l’élaboration internationale des politiques et dans la promotion et la protection de la démocratie et des droits de la personne fait du Conseil et de l’Assemblée des tribunes importantes où renforcer l’engagement multilatéral et bilatéral du Canada en Europe.  Le Canada est observateur au Comité des ministres, où sa participation est active dans plusieurs domaines de politique (les autres observateurs sont le Saint-Siège, le Japon, le Mexique et les États-Unis) et à l’Assemblée parlementaire (où les autres observateurs sont Israël et le Mexique)[8].

 

Respectueusement soumis,

 

 

 

Monsieur David Tilson, député
Association parlementaire Canada-Europe

 



[1]           Le calendrier est présenté à : http://assembly.coe.int/defaultf.asp.

[2]           Le mandat du Commissaire découle de la résolution 99 (50) sur le Commissaire aux
droits de l’homme du Conseil de l’Europe :
https://wcd.coe.int/ViewDoc.jsp?Ref=Res(99)50&Language=lanFrench&Ver=original&Site=COE&
BackColorInternet=9999CC&BackColorIntranet=FFBB55&BackColorLogged=FFAC75.

[3]           Voir l’Article 13 du Protocole n° 14 à la Convention de sauvegarde des droits de l’homme
et des libertés fondamentales, amendant le système de contrôle de la Convention. Le texte du
Protocole 14 se trouve à : http://conventions.coe.int/Treaty/FR/Treaties/Html/194.htm.

[4]           Le compte rendu exhaustif du discours de M. Tilson se trouve à :
http://assembly.coe.int/Main.asp?link=/Documents/Records/2010/E/1004261500ADD1E.htm.

[5]           Le compte rendu exhaustif du discours de M. Simms se trouve à :
http://assembly.coe.int/Main.asp?link=/Documents/Records/2010/E/1004271500E.htm.

[6]           La règle à l’APCE est que le compte rendu exhaustif des discours existe pour les
discours prononcés en anglais. Seuls des résumés sont fournis pour les discours prononcés
dans les autres langues : http://assembly.coe.int/Main.asp?link=/Documents/Records/2010/E/1004291500E.htm.

[7]           Pour une liste complète des traités du Conseil de l’Europe, voir :
http://conventions.coe.int/Treaty/Commun/ListeTraites.asp?CM=8&CL=ENG.

[8]           Des représentants canadiens de plusieurs ministères et organismes fédéraux et d’un
gouvernement provincial participent à plus de 20 réunions de commissions, de groupes d’experts
et de comités directeurs du Conseil de l’Europe par an. Les parlementaires canadiens assistant
aux quatre parties de la session annuelle de l’Assemblée parlementaire, ainsi qu’aux réunions
des commissions parlementaires à la BERD à Londres et à l’OCDE à Paris.

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