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Rapport

 

INTRODUCTION

 

La délégation canadienne à l'Assemblée parlementaire de l'Organisation du traité de l'Atlantique Nord (AP OTAN) a l'honneur de présenter son rapport sur la réunion conjointe de la Commission de la défense et de la sécurité, de la Commission de l’économie et de la sécurité et de la Commission politique, qui s’est tenue à Bruxelles, en Belgique, du 24 au 26 février 2013. Le Canada était représenté par la députée Cheryl Gallant, chef de délégation, la sénatrice Raynell Andreychuk, présidente de la Commission politique de l’AP OTAN, le sénateur Joseph A. Day, président de la Commission de la défense et de la sécurité de l’AP OTAN, le sénateur George Furey, ainsi que les députés Brent Rathgeber, Paul Dewar, et Lawrence MacAuley. La délégation était accompagnée de Mmes Michelle Tittley, secrétaire de délégation, et Melissa Radford, conseillère de l’Association de la Bibliothèque du Parlement.

 

Les réunions conjointes tenues une fois l’an à Bruxelles, auxquelles participent aussi les membres de la Commission sur la dimension civile de la sécurité et de la Commission des sciences et des technologies, ont pour objectif principal de permettre aux délégués de faire le point sur les activités et les opérations de l'Alliance avec de hauts fonctionnaires et officiers militaires en poste au quartier général de l'OTAN. Les délégués du Canada ont également rencontré l’ambassadeur Alexander Vershbow, secrétaire général délégué de l’OTAN, ainsi que M. Yves Brodeur, représentant permanent du Canada à l’OTAN, qui a organisé une séance d’information à leur intention.

 

Outre les réunions à Bruxelles, deux délégués du Canada, la députée Cheryl Gallant et le sénateur Day, ont assisté à la consultation annuelle tenue par la Commission de l’économie et de la sécurité de l’AP OTAN et par l’OCDE à Paris, en France, le 27 février 2013. Les délégués ont été en mesure de discuter, dans un premier temps, avec de hauts fonctionnaires de l’OCDE de la crise de l’endettement qui afflige actuellement une bonne partie de l’Europe et les États-Unis, de nouvelles approches en matière de politiques industrielles et du rayonnement mondial de l’OCDE, et, dans un second temps, avec des représentants de l’Agence internationale de l’énergie, des perspectives mondiales dans le domaine énergétique.

 

Les réunions à Bruxelles et à Paris se sont déroulées selon la règle de Chatham House.

 

RÉSUMÉ DES DISCUSSIONS

Les délégués ont participé à huit séances où ils ont entendu de hauts fonctionnaires et officiers militaires en poste au quartier général de l'OTAN, des représentants de rang élevé de l’Agence européenne de défense de même que divers ambassadeurs et représentants permanents à l’OTAN et à l’Union européenne. La sénatrice Andreychuk a présidé deux séances de la Commission politique, et le sénateur Day, trois séances de la Commission de la défense et de la sécurité.

 

Parmi les sujets abordés, mentionnons les opérations militaires courantes de l'OTAN, l'état de ses capacités militaires et de la défense intelligente, les partenariats, l'élargissement de l'OTAN, les nouveaux types de menaces, la mise en œuvre des résolutions du Conseil de sécurité de l’ONU consacrées aux femmes, à la paix et à la sécurité, ainsi que les relations commerciales entre les États-Unis et l’Europe.

 

En ce qui a trait aux opérations courantes de l’OTAN, les délégués ont appris que l'Afghanistan demeure la priorité de l'Alliance. La mission de l'OTAN en Afghanistan évolue à l'heure actuelle; région par région, la responsabilité en matière de sécurité passe de la Force internationale d'assistance à la sécurité (FIAS) de l'OTAN aux Forces de sécurité nationales afghanes (FSNA). Les discussions ont porté sur les difficultés actuelles et celles qui surgiront à mesure que la fin de la mission de transition approche, soit en 2014. Même s’ils ont convenu que la dévolution des responsabilités se passe mieux que prévu, les représentants se sont dits préoccupés par la sécurité ainsi que la stabilité politique et économique dans l’avenir. Les élections présidentielles devraient se dérouler en avril, mais les Nations Unies ne pensent pas qu’elles seront libres et équitables. D’ailleurs, elles s’inquiètent de la situation du pays après la fin de la mission en 2014. Les problèmes de corruption, de narcotrafic et de terrorisme peuvent mener les dirigeants du pays à protéger leur propre groupe ethnique au lieu de protéger tous les Afghans, ce qui aurait pour effet de déstabiliser le pays. Les représentants ont fait valoir qu’une stratégie cohérente dirigée par le gouvernement afghan et appuyée par la communauté internationale était nécessaire pour pallier ces problèmes corrélatifs. Ils craignent aussi que les organisations non gouvernementales quittent l’Afghanistan après le retrait des forces militaires internationales.

 

Des représentants de l'OTAN ont brièvement traité de la mission de l'OTAN en Libye et au Kosovo ainsi que des opérations de lutte contre la piraterie au large de la Corne de l'Afrique. Quant à la Libye, des personnes ont indiqué que cette opération constituait un exemple parfait de l’importance des pays partenaires pour l’Alliance. À l’égard du Kosovo, les effectifs de la Mission « État de droit » au Kosovo de l'Union européenne (EULEX), qui comporte un volet policier, ont été réduits. Par conséquent, la KFOR (Force pour le Kosovo de l'OTAN) joue de plus en plus un rôle de premier intervenant, ce qui n'est pas une tâche militaire classique. Cette situation cause des tensions entre l’OTAN et l’Union européenne. Des représentants ont fait remarquer que la corruption continue à faire obstacle à la stabilisation du pays. En ce qui touche les opérations de lutte contre la piraterie, ils ont déclaré aux délégués que la lutte contre la piraterie et l’insécurité dans la région exige de déployer les instruments du pouvoir de contraindre de l'OTAN, comme ses opérations navales, et les instruments de son pouvoir de convaincre, comme l'aide de l’Union européenne et de l’Union africaine en vue du renforcement des secteurs de la gouvernance et des tribunaux dans les pays visés.

 

 

Des représentants ont abordé les crises syrienne et malienne. Relativement à la Syrie, ils ont maintenu que la situation dans ce pays diverge sur les plans politique et militaire de celle de la Libye et qu’une intervention militaire n’est donc pas la solution idéale. De plus, le Conseil de sécurité des Nations Unies n’a pas adopté de résolution avalisant cette intervention. Des représentants ont discuté des effets de la crise syrienne sur la Turquie, particulièrement les vagues de réfugiés et le déploiement de quatre batteries de systèmes antimissiles Patriot dans la région limitrophe à la Syrie. Les délégués du Canada ont exprimé des inquiétudes concernant l’identité des participants au conflit en Syrie et des pays qui leur fournissent des armes. Au sujet du Mali, certains ont signalé que la proximité de ce pays avec l’Europe les amène à croire que l’OTAN doit intervenir de manière plus concertée, tandis que d’autres ont fait remarquer qu’aucun consensus n’aurait été atteint au sein de l’Alliance à propos d’une intervention militaire dans cette région. En outre, des représentants ont avancé que les capacités de l’OTAN n’ont pas été nécessaires au déroulement des opérations au Mali que dirige la France jusqu’à maintenant, mais que l’Alliance est prête à participer à des activités hors combat, comme le désarmement par le contrôle et l’élimination des armes légères et des munitions, par exemple, si le gouvernement du Mali le demande. Les délégués du Canada se sont réjouis d’en apprendre davantage sur l’aide que peut offrir l’OTAN aux structures de commandement militaire dans les organisations régionales en Afrique. Des représentants ont affirmé que l’OTAN est habilitée à collaborer avec l’Union africaine, mais elle ne l’est pas avec d’autres organisations régionales, comme la Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest.

 

Les représentants ont discuté des failles actuelles de l’OTAN et de la façon dont les alliés pourraient aider à renforcer ses capacités militaires et à contrer des menaces futures en cette ère de réductions budgétaires au moyen d’initiatives de défense intelligente et d’une coopération améliorée avec l’Union européenne. Ils pressent les délégués des États membres de ne plus réduire leur budget de défense, car l’OTAN est maintenant réduite à peau de chagrin. Ils soulignent que les initiatives de défense intelligente visent à optimiser l’utilisation des ressources et ne doivent pas servir de prétexte aux gouvernements pour réduire davantage leur budget de défense. Ils affirment que l’Europe doit commencer à se doter d’une gamme complète de capacités, puisqu’aucun allié européen ne peut y parvenir par lui-même, et qu’elle doit apporter la même contribution que les États-Unis sur les plans des capacités, des responsabilités et du leadership. De plus, l’OTAN prévoit accroître ses exercices militaires, qui comportent un vaste éventail d’opérations auxquelles les alliés peuvent participer, comme le combat de haute intensité et la gestion de crise.

 

Les représentants et les délégués ont discuté des relations tendues entre l’OTAN et l’Union européenne et de la nécessité d’une meilleure coopération entre elles, particulièrement en matière d’approvisionnement et de capacités de défense. Les délégués ont été mis au courant des priorités de l’Agence européenne de défense, notamment une collaboration avec l’OTAN pour préparer un plan de développement des capacités et pour trouver les synergies nécessaires dans les projets de mutualisation et de partage de l’Agence et des initiatives de défense intelligente de l’OTAN. Les délégués du Canada ont démontré de l’intérêt envers le processus d’approvisionnement militaire de l’Union européenne, surtout à l’égard des responsabilités des autorités contractantes et des soumissionnaires choisis lorsque des portions d’un marché sont sous-traitées à des PME, et des risques associés comme les retards et coûts additionnels. Les représentants ont affirmé qu’il s’agissait de la plus grande difficulté pour l’Agence puisque les entreprises sont réticentes à modifier leur chaîne d’approvisionnement.

 

Les représentants de l’OTAN ont mis l’accent sur l’importance des partenariats et de l’élargissement de l’Alliance. L’OTAN a déjà collaboré avec des États non membres, comme l’Australie, la Nouvelle-Zélande, le Qatar et les Émirats arabes unis, dans le cadre des opérations en Afghanistan et en Libye. Ces partenariats ont permis à l’Alliance de partager avec ces pays le fardeau des opérations militaires, mais aussi d’être rapidement mise au courant de situations hors de l’Amérique du Nord et de l’Europe, là où des crises peuvent se produire. L’Alliance cherche à raffermir ces partenariats et à en nouer d’autres. Par exemple, des discussions sont en cours sur les moyens d’élargir son partenariat avec des pays d’Asie centrale et de leur confier un rôle autre que la surveillance de couloirs d’approvisionnement de l’OTAN pour sa mission en Afghanistan. Cette ouverture fait suite à la priorité que la Russie accorde à son engagement en Asie centrale alors que ses relations avec l’OTAN n’ont pas reçu autant d’attention ces dernières années. Malgré l’importance du partenariat qui unit l’OTAN et la Russie, particulièrement en Afghanistan, leurs discussions sur certaines questions épineuses, comme le projet de bouclier antimissile balistique de l’OTAN, risquent donc fort de ne pas se dénouer d’ici peu.

 

L’OTAN demeure également favorable à l’adhésion de démocraties libérales d’Europe et explique que les pays candidats n’ont toujours pas rempli les conditions d’admission. Les délégués du Canada font savoir que des parlementaires des pays candidats ont tenté de les persuader qu’il était impossible de satisfaire ces conditions. Des représentants maintiennent que certaines de ces obligations imposent aux pays candidats de prendre des décisions difficiles, mais que ce sont là des situations avec lesquelles les démocraties doivent savoir composer. Ils ajoutent que si les pays candidats ne parviennent pas à surmonter ces obstacles, ils ne seront pas en mesure de prendre des décisions encore plus difficiles au sein de l’Alliance.

 

Les délégués ont assisté à une séance d’information sur les nouveaux types de menaces que l’OTAN doit se préparer à contrer. En ce qui touche à la cybersécurité, les représentants de l’OTAN ont observé que les 28 pays membres ne s’entendent pas tous sur la teneur du mandat de l’Alliance. À ce jour, la politique sur la cybersécurité de l’OTAN a une approche essentiellement défensive et ne comporte aucune mesure offensive. Les délégués du Canada soulignent que les gouvernements ont confié des responsabilités différentes aux ministères civils et aux organisations militaires, et qu’ils n’ont pas tenu compte du secteur privé. Les représentants ont déclaré que cette description de la situation ne tient plus puisque les infrastructures civiles constituent les cibles les plus vulnérables. Quant au terrorisme, les représentants indiquent qu’aucun pays ne se sent à l’abri de cette menace. Même si le monde n’a pas encore connu d’attaques cyberterroristes, les pays doivent se préparer à les contrecarrer. L’OTAN se préoccupe également de la sécurité énergétique et est en train de renforcer la sécurité des infrastructures stratégiques. Les représentants pressent les délégués de sensibiliser les parlementaires de leur pays respectif au cyberterrorisme de même qu’aux autres nouvelles menaces. Comme la vulnérabilité d’un pays membre s’étend à toute l’Alliance, les représentants demandent aux délégués de remettre en question leur idée reçue selon laquelle des solutions nationales peuvent constituer à elles seules la voie à suivre pour contrer ces menaces.

 

Les représentants de l’OTAN ont informé les délégués des avancées dans la mise en œuvre par l’Alliance des résolutions du Conseil de sécurité de l’ONU consacrées aux femmes, à la paix et à la sécurité. Selon eux, il incombe d’abord aux gouvernements de le faire. À ce jour, l’OTAN n’a qu’un tableau partiel des efforts déployés par les pays membres pour dispenser une formation sur l’égalité des femmes dans leur armée et ministère de la Défense respectifs; les représentants réclament davantage de transparence dans ce domaine. L’OTAN a adopté quatre axes prioritaires à l’égard des femmes, de la paix et de la sécurité : sensibiliser les gens, faire preuve de leadership politique, intégrer de manière plus officielle les résolutions aux travaux de l’OTAN et renforcer la coopération avec d’autres acteurs, comme les Nations Unies. L’Alliance prend les mesures nécessaires pour que tous les processus décisionnels tiennent compte de l’égalité des femmes. Elle a d’ailleurs appris que cette méthode a amélioré l’efficacité de ses missions sur le plan opérationnel. Certains pays membres et partenaires de l’OTAN ont contribué à la collecte de données et à la mise en commun des pratiques exemplaires, tandis que d’autres lançaient de nouveaux projets. Par exemple, le Centre nordique pour les questions de genre dans les opérations militaires, établi en Suède, mène actuellement une étude des opérations de l’OTAN. De plus, le gouvernement du Royaume-Uni a mis sur pied une équipe de spécialistes, dont le mandat est de lutter contre la violence sexuelle dans les conflits armés et d’en faire la prévention. L’équipe est en mesure de se déployer rapidement à l’étranger pour recueillir des preuves et des témoignages aux fins d’enquête et de poursuites judiciaires. Les délégués du Canada ont voulu connaître les possibilités de collaboration entre l’OTAN et les Nations Unies à ce sujet. Les représentants ont expliqué qu’ils participeront à une conférence en mai avec leurs homologues onusiens et qu’ils collaboreraient à la mise en correspondance des diverses formations offertes en vue d’un partage des responsabilités de formation. Les délégués ont ajouté qu’ONU Femmes réalisait actuellement une étude sur les plans d’action nationaux élaborés par les pays, qui visent à mettre en œuvre les résolutions du Conseil de sécurité des Nations Unies consacrées aux femmes, à la paix et à la sécurité.

 

Pour terminer, les délégués ont eu droit à une séance d’information sur les relations économiques et commerciales entre les États-Unis et l’Europe. Le PIB de ces derniers compte à lui seul pour la moitié du PIB mondial, et leurs échanges commerciaux deviennent un aspect de plus en plus important de leurs relations économiques. Ils tentent tous deux de promouvoir la transparence, le capitalisme et l’économie de marché au moment où les sociétés d’État chinoises et russes dominent de plus en plus sur les marchés mondiaux. En outre, les résultats décevants du Programme de Doha pour le développement (aussi appelé le Cycle de Doha) et l’urgence de créer des emplois et de favoriser la croissance dans une conjoncture généralement ardue, amènent les États-Unis et l’Union européenne à amorcer officiellement en juin 2013 des négociations en vue d’un accord de libre-échange. Les délégués ont appris que les dirigeants actuellement au pouvoir semblent très pressés de conclure un tel accord, mais que les négociations devraient tout de même durer deux ans. Les délégués du Canada ont exprimé leur préoccupation concernant cet accord et les effets potentiels sur l’accord que leur pays tente de conclure avec l’Union européenne et qui est encore en négociation. Les représentants ont affirmé que les pourparlers avec les États-Unis se poursuivront en parallèle des négociations canadiennes, puisque les deux pays souhaitent l’établissement de normes réglementaires communes.

 

RÉSUMÉ

 

Les séances de la Réunion conjointe des commissions tenues à Bruxelles et à Paris ont permis aux délégués du Canada de discuter en profondeur des priorités actuelles de l’Alliance en matière économique et militaire avec de hauts représentants de l’OTAN et de l’OCDE ainsi qu’avec des parlementaires d’autres pays membres. Parmi les sujets abordés, mentionnons les opérations militaires courantes de l'OTAN, l'état de ses capacités militaires et de la défense intelligente, les partenariats, l'élargissement de l'OTAN, les nouveaux types de menaces, la mise en œuvre des résolutions du Conseil de sécurité de l’ONU consacrées aux femmes, à la paix et à la sécurité, et les relations commerciales entre les États-Unis et l’Europe.

 

Toutes ces questions continuent de présenter beaucoup d'intérêt pour le Canada.

 

Respectueusement soumis,

 

 

 

L’honorable Joseph A. Day, Sénateur

Délégation canadienne à l’Assemblée parlementaire de l’OTAN


 

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