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Rapport de la délégation parlementaire canadienne à la Quatrième Conférence de l’UIP à l’intention des membres de commissions parlementaires traitant de la condition de la femme et autres commissions traitant de l’égalité des sexes

 

Thème de la conférence

Depuis quatre ans, l’Union interparlementaire (UIP) organise une conférence annuelle à l’intention des membres de commissions parlementaires traitant de la condition de la femme et autres commissions traitant de l’égalité des sexes. Le thème de la conférence de 2009 était le suivant : « Le Parlement est-il ouvert aux femmes ? Une évaluation ». Lors des conférences antérieures, on a examiné des questions comme les femmes et le travail, et la violence à l’égard des femmes. 

Ordre du jour de la conférence parlementaire de 2009 sur les femmes et le Parlement

La conférence de 2009 sur les femmes et le Parlement s’est tenue les 28 et 29 septembre 2009, au Centre international de conférences (CICG), à Genève (Suisse). Des parlementaires des pays participants qui traitent de questions liées à l’égalité des sexes se sont alors réunies afin d’obtenir de l’information pertinente et opportune sur les progrès accomplis en vue d’assurer l’accès intégral et la pleine participation des femmes à la vie parlementaire, et d’intégrer la dimension de genre dans tous les travaux parlementaires.

Au cours des deux journées de délibérations, quelque 80 députées de 38 pays accompagnées de membres de leur personnel ont évalué les progrès accomplis touchant la participation parlementaire des femmes. Elles ont échangé des vues et des expériences avec leurs collègues d’autres régions du monde, rencontré des représentants d’organisations internationales et régionales, et dialogué avec des intervenants du milieu universitaire et de la société civile, entre autres.

Les participantes à la conférence ont discuté d’un grand nombre de sujets relatifs à la participation parlementaire des femmes, dont le rôle des partis politiques, l’influence du financement en politique et les effets des quotas électoraux et des systèmes électoraux, ainsi que les façons dont les femmes parlementaires modifient la politique et redéfinissent les priorités politiques pour inclure les préoccupations et les priorités particulières des femmes. 


La délégation canadienne

Le Groupe canadien de l’UIP était représenté à la conférence par la sénatrice Mobina Jaffer.

Allocution d’ouverture : le Parlement est-il ouvert aux femmes ?

Anders Johnsson, secrétaire général de l’UIP, a ouvert la conférence. Il a tout d’abord rappelé dans son allocution que 35 ans s’étaient écoulés depuis la première Conférence des Nations Unies sur les femmes, tenue au Mexique en 1975, et 15 ans depuis la quatrième conférence mondiale sur les femmes, tenue à Beijing en 1995. Il a signalé que, au cours de la conférence du Mexique, on avait à peine discuté de la participation des femmes aux processus décisionnels, ce qui avait incité l’UIP à entreprendre son travail sur les femmes en politique. Lors de la conférence de Beijing, en 1995, les États avaient été invités à prendre des mesures concrètes pour accroître la capacité des femmes à participer pleinement à la vie et aux décisions politiques. 

Le Plan d’action de Beijing avait préconisé un objectif de participation de 30 %, mais, en 2009, les femmes ne représentaient que 18,6 % des parlementaires dans le monde. De plus, a signalé M. Johnsson, malgré les progrès accomplis ces dernières années, les femmes ne sont toujours pas présentes aux plus hauts niveaux de la prise de décision. Et peu de chefs d’État sont des femmes.

M. Johnsson a affirmé que l’on devrait aborder le thème de la conférence d’un point de vue non seulement quantitatif, mais aussi qualitatif, et chercher à déterminer la mesure dans laquelle les femmes ont la capacité réelle, plutôt que symbolique, d’influer sur les parlements et sur leurs travaux. Ces éléments qualitatifs soulignent le besoin de modifier les règles des parlements et d’y créer un espace pour les femmes. Il faut examiner les parlements d’un point de vue institutionnel en considérant, par exemple, si les commissions qui traitent les questions d’égalité des sexes constituent des mécanismes efficaces pour intégrer la dimension de genre, et si les parlements sont des milieux de travail favorables à la famille et accessibles.

M. Johnsson a commenté les travaux courants et futurs de l’UIP sur ces questions. Il a conclu en disant qu’il reste du travail à faire et qu’une augmentation de un pour cent par an de la représentation politique des femmes n’est pas suffisante.  

Défis et tendances actuels

Points clés :

§  En 1945, les femmes représentaient 3 % des parlementaires dans les chambres basses; cette proportion était passée à 18,8 % en 2008.

§  Toutefois, les progrès accomplis n’ont pas été uniformes d’une région à l’autre.

§  Les tendances actuelles semblent indiquer qu’à défaut de nouvelles initiatives, les progrès stagneront.

Mme Kareen Jabre, gestionnaire des programmes de partenariat pour l’égalité des sexes de l’UIP, a ouvert la première séance en donnant un aperçu statistique révélant que, d’un point de vue historique, de grands progrès ont été accomplis. En 1945, les femmes ne représentaient que 3 % des parlementaires dans les chambres basses; en 2008, cette proportion était passée à 18,8 %. Malgré l’accroissement global de la participation, toutefois, les progrès n’ont pas été uniformes d’une région à l’autre. Ainsi, dans les pays nordiques, la participation atteint 42 %, tandis que, dans les Amériques, elle est seulement de 22 %. Les parlements des États arabes ne comptent pour leur part que 9,1 % de femmes députées. 

Le Rwanda a été le premier pays à faire élire une majorité de femmes à sa chambre basse. Hors des États nordiques, la plupart des parlements qui ont atteint l’objectif de 30 % se trouvent dans des pays en développement, et six appartiennent à des pays qui ont connu un conflit.  Beaucoup de ces pays ont adopté des mesures (législatives et volontaires) afin de promouvoir la participation politique des femmes. Mme Jabre a signalé que le contexte, les structures et le processus de recrutement influent sur cette participation. Parmi les facteurs clés figurent le soutien financier, la sécurité personnelle, le contexte social et culturel d’un pays, les gardiens des partis, le système électoral, le processus de sélection des candidats, et les règles régissant les campagnes.

Mme Jabre a déclaré en conclusion que les tendances actuelles semblent indiquer qu’à défaut de nouvelles initiatives, les progrès stagneront.

Mme Linah Kilimo, députée du Kenya, a ensuite décrit les défis auxquels sont confrontées les femmes candidates aux élections dans son pays, en particulier divers facteurs qui empêchent les femmes de se porter candidates et de participer pleinement à la vie parlementaire une fois qu’elles sont élues. Parmi ces facteurs figurent leurs responsabilités familiales, le manque d’éducation, la violence faite aux femmes, la publicité négative, le manque de financement, et le fait que les hauts dirigeants de tous les partis politiques du Kenya sont des hommes, ce qui influe sur les nominations de candidats. Les femmes des collectivités rurales sont aux prises avec des contraintes encore plus grandes. Mme Kilimo a signalé en conclusion certains signes prometteurs qui se manifestent dans son pays. Ainsi, il existe maintenant une commission sur l’égalité des chances qui s’occupe des questions intéressant les membres marginalisés de la société.

Enfin, Mme Kay Hull, députée de l’Australie, a décrit sa transformation de femme d’affaires prospère en parlementaire. Elle a été la première femme de son parti dans l’État de la Nouvelle-Galles du Sud à être élue au niveau fédéral. Elle a expliqué aux déléguées que, une fois parvenue au Parlement australien, elle a utilisé, pour devenir politicienne, les mêmes outils dont elle s’était munie comme propriétaire d’une petite entreprise, dont la négociation, la médiation, la communication et l’assurance. Elle a constaté qu’il y avait une certaine atmosphère de « clan » au Parlement, y compris un code de conduite et une hiérarchie informels. Mais elle a déclaré avoir pu travailler dans ce contexte et jouer des rôles importants au sein de commissions parlementaires. 

Un débat plénier a suivi. Les déléguées ont discuté des défis auxquels sont confrontées les femmes candidates et parlementaires dans leurs pays respectifs. Elles ont par ailleurs examiné les réussites des dernières années touchant l’accroissement de la participation des femmes.

Surmonter les obstacles : quotas électoraux visant l’égalité des sexes

Points clés :

§  Les quotas électoraux établissent des objectifs fixes pour le recrutement des femmes ou d’autres groupes sous-représentés afin de compenser les inégalités.

§  Beaucoup des pays qui ont accru la représentation des femmes dans les corps électifs utilisent une forme quelconque de quota.

§  Les quotas sont le plus souvent adoptés dans les systèmes de représentation proportionnelle. 

§  Il existe trois principaux genres de quotas, soit : les sièges réservés, les quotas établis par les partis pour les listes de candidats, et les quotas prescrits par la loi pour tous les partis.

Au cours de la deuxième séance, les conférencières ont examiné le rôle et les effets des quotas électoraux visant l’égalité des sexes, que certains pays adoptent en vue d’accroître l’accès des femmes au parlement.

Mme Drude Dahlerup, professeure à l’Université de Stockholm, a axé son exposé sur la question de savoir pourquoi les quotas électoraux visant l’égalité des sexes sont si controversés, et pourtant si populaires. Elle a expliqué qu’on utilise les quotas électoraux pour établir des objectifs fixes pour le recrutement des femmes ou d’autres groupes sous-représentés afin de compenser les inégalités. Les quotas, a-t-elle affirmé, ne résolvent pas tous les problèmes des femmes en politique, mais, dans certaines situations, ils peuvent remédier à leur sous-représentation. Parmi les pays qui ont considérablement accru la représentation des femmes au sein de leurs corps électifs, beaucoup utilisent une forme quelconque de quota. Mme Dahlerup a expliqué que les quotas sont beaucoup plus souvent utilisés dans les systèmes de représentation proportionnelle.  Il existe trois principaux genres de quotas, soit : les sièges réservés, les quotas établis par les partis pour les listes de candidats, et les quotas prescrits par la loi pour tous les partis. D’autres questions clés consistent à savoir si des règles de placement ont été établies (place des femmes candidates sur les listes) et s’il existe des sanctions en cas de non‑respect des quotas.

Une députée de l’Uruguay, Mme Daniela Paysse, a ensuite traité ces questions dans le contexte de son pays. Elle a déclaré que si, selon les sondages, les hommes comme les femmes favorisent la participation des femmes en politique, il subsiste divers obstacles à cette participation, dont la méthode de vote, ainsi que la composition des listes et la place qui y est attribuée aux femmes. Lors des premières élections parlementaires tenues après la fin de la dictature en Uruguay, aucune femme n’a été élue. Mais, conformément à une loi sur la participation politique adoptée cette année, on appliquera des quotas à titre expérimental lors des élections nationales prévues pour 2014, ainsi que des quotas applicables aux structures internes des partis. Néanmoins, l’interprétation et la mise en œuvre de ces quotas présentent encore des défis.  

Plusieurs participantes, dont la sénatrice Jaffer, ont commenté les exposés et posé des questions. Dans son intervention, Mme Jaffer a expliqué qu’il n’existe pas de quotas dans le système électoral canadien; toutefois, les chefs des partis peuvent désigner des femmes candidates dans des circonscriptions où, espère-t-on, elles ont des chances d’être élues. Mme Jaffer a par ailleurs fait remarquer que, à mesure que les législatures deviennent des milieux moins coopératifs, notamment en cas de gouvernement minoritaire, les femmes cherchent plutôt à participer à d’autres tribunes, comme les réseaux mondiaux plus accessibles et où elles peuvent avancer davantage. La concurrence d’autres domaines qui savent mieux attirer les femmes, dont l’industrie, est en outre plus grande aujourd’hui.

Surmonter les obstacles : autres mesures spéciales

Points clés :

§  Le manque de ressources économiques est l’un des plus grands obstacles à la participation politique des femmes; il est donc capital de leur faciliter l’accès à des moyens financiers.

§  On devrait envisager une formation visant à sensibiliser les femmes aux médias et à les inciter à coopérer avec eux, car ils peuvent jouer un rôle important touchant la participation politique des femmes.

§  Le soutien pratique peut aider les femmes parlementaires; par exemple, le mentorat, l’aide directe à la recherche, la rédaction de projets de loi, etc., et le soutien en matière de technologies de l’information.

§  Autres possibilités de soutien visant à surmonter les obstacles : formation en communication et au leadership, formation de formatrices, et création de groupes interpartis de coopération entre femmes parlementaires.

Au cours de la séance de l’après-midi, les conférencières ont examiné d’autres mesures spéciales destinées à accroître l’accès des femmes aux parlements, vu qu’il peut être difficile d’appliquer des quotas électoraux.

Mme Marcela Tovar, directrice du programme d’études latino-américaines au Queens College (Université de la ville de New York), a axé son exposé sur le financement des campagnes électorales. Elle a montré que le manque de ressources économiques est l’un des plus grands obstacles à la participation politique des femmes. Il est donc capital de leur faciliter l’accès à des moyens financiers si l’on veut accroître leur présence sur la scène politique. Par exemple, les femmes peuvent hésiter à investir des ressources familiales pour se porter candidates à la vie politique; il faut beaucoup de temps et d’argent pour se créer une réputation dans une circonscription et au sein d’un parti afin d’être désignée candidate, et il faut des fonds importants pour mener une campagne électorale, mais les femmes n’ont pas toujours un accès égal aux fonds de leur parti ou à d’autres sources de financement. De bonnes pratiques ont été adoptées dans diverses régions du monde. Ainsi, des deniers publics peuvent être affectés pour aider les femmes à obtenir une formation à la politique et au leadership, et des limites peuvent être fixées touchant le financement des campagnes. De plus, le financement public des dépenses de campagne électorale peut être lié directement au niveau de participation des femmes au sein d’un parti. 

Mme Colleen Lowe Morna, directrice exécutive d’une organisation de la société civile sud-africaine dite Gender Links, a ensuite exposé l’expérience de l’Afrique du Sud en mettant l’accent sur le genre et les médias. En réponse à la question de savoir si les administrations locales peuvent être utilisées comme tremplin pour accroître la participation politique des femmes, elle a déclaré que les résultats ont été inégaux. Quant à savoir si l’on devrait mettre l’accent sur la formation et le renforcement des capacités, elle a affirmé que toute formation doit être déterminée par la demande. La prestation de soutien régulier aux partis politiques, dont le mentorat, l’aide directe à la recherche, la rédaction de projets de loi, etc., et le soutien en matière de technologies de l’information peuvent être plus efficaces. Enfin, Mme Morna a souligné que les médias peuvent jouer un rôle important touchant la participation politique des femmes, car les femmes parlementaires reçoivent généralement moins de publicité dans la presse et peuvent y être stéréotypées. Une approche consistant à sensibiliser les femmes parlementaires aux médias et à les inciter à coopérer avec eux peut aider à surmonter ces problèmes.

Enfin, Mme Alyson Kozma, gestionnaire de programme au National Democratic Institute for International Affairs (NDI), organisme sans but lucratif établi à Washington (D.C.) qui travaille avec des organisations et des groupes partenaires locaux pour soutenir et renforcer les institutions démocratiques un peu partout dans le monde, a présenté un exposé au sujet du travail sur le terrain accompli par le NDI dans quatre pays. Elle a signalé les pratiques exemplaires suivantes découlant de ce travail : formation uniforme en communication; création de compétences en leadership; solidarisation des femmes entre les partis; travail avec les partis visant leur réforme interne; formation de femmes à titre de formatrices d’autres femmes; renforcement des capacités et de l’état de préparation des femmes élues; échange d’information à l’échelle internationale; mobilisation des jeunes comme moyen de modifier les attitudes et le comportement politiques. Elle a exposé d’autres recommandations, notamment faire participer les hommes à la promotion de l’avancement des femmes en politique; renforcer les partenariats entre la société civile et les partis politiques; mobiliser les femmes avant et entre les périodes électorales; leur fournir des outils pour leur permettre de concilier leurs rôles et responsabilités personnels et politiques; favoriser les possibilités de réseautage et de défense de causes.

Un débat plénier a suivi. Plusieurs participantes, dont la représentante du Canada, ont posé des questions et commenté les exposés. La sénatrice Jaffer a demandé comment les femmes parlementaires peuvent réagir au traitement parfois cruel des médias. Mme Moran a répondu que les femmes parlementaires n’ont pas à accepter tous les traitements que leur réservent les médias; il y a des mécanismes d’équilibre dans le système, et elles peuvent se prévaloir de moyens comme les nouveaux médias. Signalant que les parlementaires des différents partis au Canada collaboraient autrefois davantage touchant divers dossiers, la sénatrice Jaffer a demandé comment les parlementaires pourraient établir certaines règles de base pour favoriser ces genres de dialogues et d’initiatives mixtes, compte tenu du fait que les partis n’ont pas toujours le même point de vue sur les questions. Mme Kozma a répondu que la collaboration entre les partis peut être frustrante, mais qu’elle peut aussi produire des résultats positifs. Une démarche importante consiste à définir clairement les limites d’un réseau au départ, à délimiter clairement et étroitement les objectifs de l’initiative, et à accepter que l’on ne sera pas d’accord sur tous les points. 

Les femmes au Parlement : défis rencontrés à la chambre

Points clés :

§  Les femmes peuvent être confrontées à de nouveaux obstacles une fois au Parlement. Il peut s’agir des règles et usages des parlements (règles tacites; style des débats), de comportements et d’attitudes de longue date, et d’obstacles pratiques (p. ex., responsabilités familiales).

§  Les femmes peuvent aussi être confrontées à des défis inhérents à leurs rôles au Parlement, dont ceux associés aux affectations aux commissions et à la dynamique interne des partis politiques.

Les travaux du lendemain ont débuté par une séance sur les défis auxquels les femmes sont confrontées une fois au Parlement. 

Mme Kareen Jabre, de l’UIP, a affirmé que, une fois élues, les femmes sont confrontées à un nouvel ensemble de défis lorsqu’elles intègrent un milieu parlementaire qui possède ses règles et son mode de fonctionnement propres et qui a toujours été dominé par les hommes. S’appuyant sur diverses enquêtes effectuées par l’UIP, elle a signalé plusieurs obstacles rencontrés par les femmes, dont les règles et usages (règles tacites, manœuvres des partis politiques, débats conflictuels), le comportement et les attitudes (manque de sensibilisation aux questions féminines), des obstacles pratiques (p. ex., conciliation des responsabilités politiques et des responsabilités familiales), et les craintes et difficultés personnelles. Le soutien des partis politiques est un facteur clé, en particulier parce que les femmes n’y occupent pas toujours une place solide. 

Mme Massuma Al Mubarak, députée à l’assemblée nationale du Koweït, a décrit l’expérience des femmes qui sont entrées récemment sur la scène politique dans son pays, où les femmes ont obtenu le droit de vote en 2005. Lors des élections de juin 2008, aucune des vingt-neuf femmes qui ont brigué les suffrages n’a été élue. Toutefois, cette expérience a produit des leçons utiles. En 2009, quatre des dix-neuf femmes qui se sont présentées aux élections ont été élues, ce qui a marqué une percée historique. Il subsiste néanmoins des difficultés. Mme Al Mubarak a signalé que la Constitution koweïtienne ne fait aucune distinction entre les hommes et les femmes, mais que tel n’est pas le cas des coutumes sociales. Elle a en outre relaté les obstacles qu’elle a dû surmonter pour présenter sa candidature aux élections internes et pour se faire élire à la commission parlementaire des affaires féminines, qui a été établie en 2006. Elle a été élue à la présidence, malgré certaines objections, et l’une des premières décisions de la commission a été de suggérer un amendement visant à inclure celle-ci dans la liste des commissions permanentes.   

Mme Irene Yameogo, députée à l’assemblée nationale du Burkina Faso, a conclu la séance en donnant un aperçu de son expérience de parlementaire. Dans son pays, le militantisme des femmes pour les droits de la personne et pour les questions de participation politique au niveau national a nettement augmenté dans la période consécutive à la conférence de 1995 à Beijing. Toutefois, la proportion des députés au parlement du Burkina Faso est toujours d’à peu près 14 hommes pour une femme en raison de défis persistants, dont la conception des listes de candidats, l’accès au financement et les attitudes sociales courantes. Mme Yameogo a affirmé que les femmes doivent travailler de concert dans les parlements pour pouvoir s’intégrer pleinement à la vie parlementaire.

Au cours du débat plénier qui a suivi, certaines déléguées ont discuté des défis auxquels les femmes parlementaires sont confrontées une fois élues. D’autres ont fait mention des obstacles invisibles, comme la répartition des affectations aux commissions, les femmes tendant à être exclues des débats sur la sécurité et la défense, les questions budgétaires, l’infrastructure, et les affaires étrangères. De plus, les édifices parlementaires eux-mêmes peuvent présenter des problèmes, dont l’insuffisance d’espace pour accueillir les enfants. Les heures de séance, en particulier le soir, peuvent avoir une incidence sur les responsabilités familiales et sur la sécurité personnelle. Certains parlements ont essayé de s’attaquer à ces problèmes. Par exemple, une déléguée du Brésil a signalé que son parlement avait créé un ombudsman responsable des questions intéressant les femmes et de la législation connexe. 

Lois et politiques : favoriser une perspective d’égalité des sexes

Points clés :

§  Les commissions parlementaires peuvent jouer un rôle clé pour étudier les questions de politiques publiques intéressant les femmes, pour examiner les lois du point de vue de l’égalité des sexes et pour superviser les politiques existantes se rapportant à l’égalité des sexes et aux questions féminines.

§  Les caucus de femmes peuvent être utilisés comme tribune pour débattre les questions intéressant les femmes.

§  Un point clé consiste à fournir un financement suffisant pour permettre d’appliquer les lois et les politiques visant l’égalité des sexes. 

La cinquième séance a porté sur les initiatives destinées à améliorer la prise en compte de l’égalité des sexes dans le processus législatif, dont la création de commissions spéciales et de caucus de femmes. 

Mme Bahiya Al Jishi, membre du Conseil de la Choura à Bahreïn, a relaté son expérience à titre de présidente de la commission des services, qui s’occupe des questions d’éducation, de santé, de logement et de travail. Cette affectation lui a permis d’avoir voix au chapitre dans l’élaboration des lois intéressant les femmes. Grâce aux travaux de la commission, on a fait des efforts accrus pour procéder à une analyse sexospécifique lorsque le Parlement étudie des mesures législatives. La commission examine toutes les lois dans l’optique de l’égalité des sexes et s’emploie à contrer la discrimination et à accroître la visibilité des dossiers intéressant les femmes et les enfants. Les femmes parlementaires à Bahreïn travaillent en outre à faire en sorte que ces dossiers soient traités régulièrement, et non pas en marge d’autres priorités.

Enfin, Mme Dina Akkelidou, députée à la Chambre des représentants de Chypre, a conclu la séance en présentant un exposé au sujet du travail de la commission permanente de son parlement sur les chances égales pour les hommes et les femmes, créée en 2006. Cette commission s’occupe de la condition de la femme et de l’égalité des sexes, mais elle s’intéresse aussi à des questions multidimensionnelles, comme les droits de la personne. Elle examine les politiques gouvernementales se dégageant des projets de loi et des budgets et surveille leur conformité avec les normes nationales et internationales pertinentes. Mme Akkelidou a mentionné que la charge de travail de la commission a augmenté depuis l’accession de Chypre à l’Union européenne en raison de l’adoption subséquente de mesures législatives sur des points comme l’équité salariale, l’égalité d’accès à l’emploi, les prestations de sécurité sociale, etc. Reconnaissant qu’il subsistait certains problèmes, on a élaboré un plan d’action national pour l’égalité des hommes et des femmes étalé sur la période de 2007 à 2013 dans le but d’intégrer les préoccupations relatives à l’égalité des sexes dans tous les domaines d’activité. 

Un débat plénier a suivi. Les déléguées ont mis l’accent sur les pratiques exemplaires en cours dans leurs pays respectifs dont, par exemple, en Inde, un examen de toutes les lois afin d’y supprimer les éléments et les mentions d’inégalité des sexes. L’un des défis courants à relever consiste à fournir un financement suffisant pour permettre d’appliquer les lois et les politiques visant l’égalité des sexes. Le poste de présidente de commission capable d’inscrire les questions féminines à l’ordre du jour a été un outil important recensé à cette fin. La déléguée de Chypre a par ailleurs signalé que, même si un cadre national est en place, les commissions jouent un rôle important pour presser les ministères d’appliquer les lois et les politiques existantes.

Parlements sensibles aux différences entre les sexes

Points clés :

§  Il reste du travail à faire pour assurer que les parlements répondent aux besoins et aux intérêts des hommes et des femmes dans leur structure, leurs opérations et leurs méthodes de travail.

§  La fourniture de garderies et la structuration du calendrier parlementaire dans une perspective favorable à la famille sont des points importants. La Suède a même institué une politique selon laquelle les parlementaires peuvent prendre un congé parental.

Les exposés de l’après-midi ont porté sur les « parlements sensibles aux différences entre les sexes », c’est-à-dire qui répondent aux besoins et aux intérêts des hommes et des femmes dans leur structure, leurs opérations et leurs méthodes de travail.

Mme Julie Ballington, de l’UIP, a présenté le concept de parlement sensible aux différences entre les sexes. Un tel parlement tient régulièrement compte de ces différences dans ses régimes de travail, y compris ses opérations et ses cultures institutionnelles. Rappelant les enquêtes effectuées par l’UIP, elle a signalé que la présence accrue de femmes dans les parlements a eu le moins d’incidence sur les heures de séance (p. ex., les séances du soir n’ont pas été discontinuées). Les plus grands changements ont été signalés en ce qui concerne la tenue vestimentaire et le comportement.  Mme Ballington a par ailleurs souligné l’importance des garderies dans les parlements. Elle a affirmé que le fait d’offrir un milieu favorable à la famille peut donner un exemple éloquent à d’autres secteurs de la vie publique et privée.

Mme Hillevi Engstrom, députée au Riksdag suédois, a fait un survol des mesures prises dans son pays. Elle a tout d’abord signalé que l’intégration de la dimension de genre est un processus continu qui exige des efforts constants. Ce travail produit cependant des résultats positifs tant pour les hommes que pour les femmes, car les uns et les autres peuvent réaliser un meilleur équilibre entre leurs responsabilités professionnelles et leurs responsabilités familiales. La représentation des deux sexes au parlement suédois est à peu près égale. 

Mme Engstrom a souligné que l’ouverture d’une garderie subventionnée au parlement suédois, il y a quelque dix ans, avait constitué une mesure importante. Elle a mentionné que les politiques favorables à la famille offrent un exemple important dans la société, car elles indiquent que le parlement national est ouvert aux femmes et aux parents de jeunes enfants. La Suède a en outre institué une politique selon laquelle un parlementaire peut prendre un congé parental, auquel cas un substitut de sa circonscription peut être délégué pour le remplacer. Les parlementaires ont aussi droit à des congés pour prendre soin d’enfants malades, aux mêmes conditions que les autres travailleurs. De plus, un document de travail datant de 2003 intitulé Un milieu de travail égal pour les femmes et pour les hommes au parlement suédois et des entrevues subséquentes avec des parlementaires ont amené la Suède à adopter un rapport intitulé Quinze propositions pour réaliser l’égalité des sexes au Riksdag, qui visait à accroître la promotion de l’égalité des sexes au parlement suédois. La responsabilité d’appliquer ce rapport a été confiée au secrétaire général du Riksdag. 

Enfin, Mme Margaret Mensah-Williams a donné des exemples illustrant son expérience de vice-présidente du Conseil national de la Namibie et coordonnatrice de toutes les commissions permanentes de ce conseil au parlement namibien. Elle a signalé que les femmes doivent maîtriser les règles parlementaires si elles veulent faire progresser leurs dossiers. Elle a cité à titre de contributions efficaces des démarches comme la présentation de motions sur les questions intéressant les femmes, l’adoption à la Chambre de règles sur le décorum et le comportement, l’adoption de mesures législatives sur des questions importantes comme la violence à l’égard des femmes, la création de commissions spéciales, et la budgétisation tenant compte des différences entre les sexes. Elle a par ailleurs souligné le travail important qu’elle accomplit pour sensibiliser les jeunes de son pays à ces questions.    

Au cours du débat plénier qui a suivi, les déléguées ont discuté des mesures qui ont été prises dans leurs parlements respectifs afin que leurs institutions parlementaires et leurs milieux de travail répondent aux besoins des femmes et des familles. Par exemple, une déléguée de Maurice a fait mention de l’accès aux soins de santé qui a été fourni à tous les parlementaires de son pays, ainsi que des mesures prises pour y instituer un congé de paternité. Les déléguées ont par ailleurs réfléchi aux défis qu’il reste à surmonter dans ces domaines. 

La violence à l’égard des femmes

Un exposé spécial sur le projet de l’UIP visant à mettre fin à la violence faite aux femmes  a été présenté aux déléguées dans l’après-midi. Le secrétaire général, Anders Johnsson, leur a dit que l’UIP avait lancé, en 2008, une campagne visant à soutenir les efforts déployés par les parlements pour mettre fin à la violence à l’égard des femmes. Les principales activités prévues comprennent l’organisation de séminaires régionaux et nationaux, un programme d’aide technique, la création d’un site Web et la production de documents de campagne, et l’organisation d’activités en rapport avec la Journée internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes, le 25 novembre.

Au cours de la discussion qui a suivi, la sénatrice Jaffer a loué le travail de sensibilisation aux questions liées à la violence à l’égard des femmes fait par l’UIP et signalé que celle-ci devrait aussi encourager les parlementaires à consacrer des ressources suffisantes et soutenues à cet important travail. M. Johnsson a convenu que des ressources spécifiques sont nécessaires et qu’il doit s’agir de ressources additionnelles, et non pas prélevées sur les budgets d’autres initiatives. Il a ajouté que les parlementaires devraient utiliser tous les outils de sensibilisation à leur disposition, soit surveillance, questions aux ministres, projets de loi émanant de députés, etc. Lorsque la sénatrice Jaffer a demandé si l’UIP examinera le rôle de la culture dans ce travail, le secrétaire général a répondu que l’UIP cherchera à s’assurer que son travail dans ce domaine est sensible aux différences culturelles. 

Évaluation parlementaire

Au cours de la dernière séance de la conférence, les déléguées ont pu faire le point sur les délibérations et envisager l’avenir. Les dernières remarques ont porté sur le Résumé du séminaire rédigé par les déléguées du Kenya, rapporteuses de la conférence. (En raison des limites de temps, d’autres déléguées, dont la représentante du Canada, n’ont pu être consultées lors de la production de ce résumé.) Celui-ci est disponible à l’adresse suivante : http://www.ipu.org/splz-f/gender09/summary.pdf.  

 

Respectueusement soumis,

 

L’honorable Mobina Jaffer, sénatrice
Groupe canadien de l’UIP



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