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Rapport

 

L’Association parlementaire Canada-Afrique était représentée par l’honorable Mauril Bélanger, C.P., député, coprésident de l’Association; l’honorable Raynell Andreychuk, sénatrice, coprésidente; Mme Yasmin Ratansi, députée, vice-présidente; M. David Christopherson, député, vice-président; Mme Lois Brown, députée, vice-présidente; l’honorable Jim Munson, sénateur et Mme Cheryl Gallant, députée, membres de l’Association. La délégation était accompagnée de M. Maxime Ricard, secrétaire et de M. Michael Dewing, conseiller.

OBJECTIFS

L’Association parlementaire Canada-Afrique a effectué des visites bilatérales à Abuja, au Nigeria, à Accra, au Ghana et à Lomé, au Togo, du 16 au 22 janvier 2011. Les visites avaient les objectifs suivants : 

·        renforcer les relations bilatérales et la coopération parlementaire;

·        inciter les parlementaires à dialoguer à propos de la démocratie, de la gouvernance, des enjeux économiques et du rôle des médias;

·        renforcer les relations avec les organisations régionales, tout particulièrement la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO);

·        faire connaître aux délégués la situation dans chacun des pays et l’activité du Canada dans la région, au moyen de contacts avec des parlementaires, des fonctionnaires, des organismes de la société civile et des entreprises.

Pour atteindre ces objectifs, la délégation a rencontré des parlementaires et des fonctionnaires du Nigeria, du Ghana et du Togo, ainsi que des représentants des gouvernements et des partis politiques de ces pays, des représentants du Canada, des représentants d’entreprises, des journalistes et des membres d’organisations non gouvernementales. Elle a aussi effectué des visites sur place.

Questions clés

Le Nigeria est le pays le plus peuplé et la principale puissance de la région. Depuis le rétablissement d’un gouvernement civil, en 1999, le Nigeria éprouve des difficultés à réformer une économie axée sur le pétrole et à institutionnaliser la démocratie. Le pays est aussi aux prises avec des tensions ethniques et religieuses de longue date. Si le Nigeria est le 11e producteur mondial de pétrole, il reste que sa population est nombreuse et que son produit intérieur brut (PIB) par habitant est faible. Sur le plan international, le Nigeria participe activement aux affaires africaines et aux affaires régionales.

Au Ghana, la démocratie multipartite a été rétablie en 1992. Le Ghana est bien pourvu en richesses naturelles, mais il compte encore fortement sur l’aide financière et technique internationale. Les défis qu’il doit relever en matière de développement sont considérables, particulièrement dans les régions rurales et dans le nord du pays. Sur la scène internationale, le Ghana participe activement aux organisations régionales et collabore aux opérations de maintien de la paix.

Le Togo est un pays en transition. Après avoir subi des années durant un régime autocratique ayant laissé le pays dans un grave état de sous-développement, le Togo a organisé des élections législatives crédibles en 2007 et 2010. Le pays réintègre la communauté internationale et les apports d’aide, qui avaient été suspendus au début des années 1990, ont repris.

Le Nigeria, le Ghana et le Togo font partie des principales organisations panafricaines et régionales. Ils sont membres de l’Union africaine (UA), de la Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO) ainsi que de la Communauté des États sahélo-sahariens (CEN-SAD). En outre, le Togo est membre de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA). La CEDEAO, dont le siège est à Abuja, est une communauté économique régionale comptant 15 pays et ayant pour mission de promouvoir l’intégration économique. L’UEMAO se compose de huit membres francophones de la CEDEAO; elle fait la promotion de la convergence monétaire et économique régionale. La CEN-SAD est une organisation régionale de 23 membres faisant aussi la promotion de l’intégration régionale. Son siège se trouve à Tripoli, en Libye.

Au moment de la visite de la délégation, la CEDEAO s’adressait à l’impasse politique qui s’est produite à la suite de l’élection présidentielle du 28 novembre 2010 en Côte d’Ivoire. Il est à noter que, dans sa Déclaration de principes politiques de 1991, les chefs d’État et de gouvernement de la CEDEAO ont déclaré : « Nous nous efforcerons par conséquent d’encourager et de promouvoir dans chacun de nos pays le pluralisme politique et les institutions représentatives et garantes de la sécurité et de la liberté individuelle dans le respect de la loi, notre patrimoine commun[1]. De plus, dans son Protocole sur la démocratie et la bonne gouvernance de 2001, la CEDEAO reconnaît explicitement les principes voulant que « toute accession au pouvoir doit se faire à travers des élections libres, honnêtes, et transparentes » et que « tout changement anti‑constitutionnel est interdit de même que tout mode non démocratique d’accession ou de maintien au pouvoir ».[2] 

L’élection présidentielle s’est déroulée sous les auspices de l’Opération des Nations Unies en Côte d’Ivoire (ONUCI), qui a élaboré le processus électoral en collaboration avec les principaux partenaires ivoiriens. Les observateurs électoraux de l’Union européenne, de la CEDEAO, de l’Union africaine, de l’Organisation internationale de la Francophonie, du Carter Center, des États‑Unis ainsi que du Japon ont indiqué que les élections avaient été tenues dans l’ensemble dans une atmosphère démocratique[3]. Cependant, après que la Commission Électorale Indépendante de Côte d’Ivoire a déclaré vainqueur M. Alassane Ouattara et que les résultats ont été attestés par l’ONUCI, le président sortant, M. Laurent Gbagbo, a refusé de céder le pouvoir.

Le 7 décembre, les chefs d’État et de gouvernement de la CEDEAO ont émis un communiqué dans lequel ils ont reconnu M. Ouattara en tant que président désigné et ont demandé à M. Gbagbo de céder le pouvoir. Les chefs d’État et de gouvernement ont émis, le 24 décembre, un deuxième communiqué afin de réitérer leur position, d’exprimer leur soutien à des sanctions et d’indiquer que si M. Gbagbo ne partait pas pacifiquement, « la Communauté n’aurait d’autre choix que de prendre d’autres mesures, y compris le recours à la force légitime, afin d’atteindre les buts du peuple ivoirien »[4]. [traduction]

Le Canada entretient des relations avec les trois pays, en tant que membre du Commonwealth dans le cas du Nigeria et du Ghana et en tant que membre de l’Organisation internationale de la Francophonie dans le cas du Ghana et du Togo. Au Nigeria, le Canada est représenté par le haut‑commissariat canadien à Abuja. Le Canada a aussi un haut-commissariat auxiliaire à Lagos et un consul honoraire à Port Harcourt. Au Ghana et au Togo, les intérêts canadiens sont représentés par le haut‑commissariat canadien à Accra et par un consul honoraire à Lomé. Toutefois, au moment de la visite de la délégation, la nouvelle haute‑commissaire canadienne au Ghana, S.E. Trudy Kernighan, n’avait pas reçu son accréditation pour le Togo.

L’aide canadienne au développement offerte aux trois pays varie grandement. En ce qui concerne le Nigeria, l’Agence canadienne de développement international (ACDI) reconnaît que le pays a une importance régionale pour ce qui est de l’aide au développement et ses programmes bilatéraux mettent l’accent sur la santé et la gouvernance. Le Nigeria profite aussi d’une aide multilatérale venant d’organisations telles que le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés. Au total, en 2008-2009, 27,5 millions de dollars ont été versés.

Au Ghana, qui est l’un des 20 pays d’intérêt où l’ACDI affecte 80 % de ses ressources bilatérales, l’ACDI offre une aide dans des domaines comme la réforme du secteur public, l’amélioration de la surveillance parlementaire, la politique sur l’eau et la sécurité alimentaire. Le Ghana profite aussi de programmes multilatéraux tels que le Programme alimentaire mondial. En 2008‑2009, les versements ont été de 116,4 millions de dollars.

Au Togo, l’ACDI ne gère pas de programme d’aide important et ne planifie aucun projet à long terme. Le Togo profite cependant de certains programmes d’aide régionaux; en 2008‑2009, les versements ont été de 3,1 millions de dollars. Au moment de la visite de la délégation, le Centre parlementaire du Canada étudiait la possibilité d’établir une relation avec l’Assemblée nationale togolaise.

L’ACDI offre aussi un grand nombre de programmes d’aide régionaux multilatéraux en Afrique. Elle a, par exemple, offert une aide à la CEDEAO par l’entremise de l’Initiative sur la paix et la sécurité en Afrique de l'Ouest.

Sur le plan des relations commerciales, le Nigeria représente le troisième partenaire commercial du Canada en Afrique subsaharienne; en 2009, le commerce bilatéral de marchandises a atteint près de 700 millions de dollars. Les entreprises canadiennes sont actives dans les secteurs du pétrole et du gaz, des télécommunications, de l’énergie, de l’ingénierie et de l’éducation. Les relations commerciales entre le Ghana et le Canada se développent. Entre 2000 et 2008, le commerce bilatéral a augmenté de 193 %, atteignant près de 200 millions de dollars en 2009. Des débouchés s’offrent dans les secteurs des mines, de l’éducation, des infrastructures ainsi que du pétrole et du gaz. Les relations commerciales du Canada avec le Togo sont limitées. En 2009, le commerce bilatéral a représenté moins de 25 millions de dollars. Le secteur des services offre cependant des possibilités aux entreprises canadiennes. 

Au cours de leur visite, les délégués se sont intéressés à l’évolution de la dynamique commerciale, au moment où des pays comme la Chine et l’Inde consacrent beaucoup d’énergie pour exploiter les possibilités dans la région. Les membres ont aussi voulu apprendre comment les pays de la CEDEAO facilitent le commerce entre eux. À cet égard, ils ont, entre autres, recours à la coopération monétaire et économique entre les pays de l’UEMOA, qui utilisent une monnaie commune.

La délégation a aussi abordé, avec les parlementaires et d’autres parties prenantes au processus politique, des questions telles que les élections, le rôle des parlementaires, la liberté de presse et la santé. Elle aussi étudié des questions liées au commerce ainsi que la possibilité d’intensifier l’engagement du Canada envers ces pays.

La délégation avait aussi pour but d’approfondir la compréhension qu’a l’Association des organisations régionales africaines. Comme au cours de précédents voyages dans la région de la CEDEAO, dans la Communauté de l'Afrique orientale, en Afrique du Nord et dans la Communauté de développement de l’Afrique australe (CDAA), la délégation voulait voir comment le Nigeria, le Ghana et le Togo collaborent avec leurs partenaires régionaux au sein d’organisations telles que la CEDEAO et l’ UEMOA. La délégation était particulièrement intéressée par leur réaction à l’égard de l’impasse politique en Côte d’Ivoire.

NIGERIA

A.   Contexte

La République fédérale du Nigeria est située sur la côte ouest de l’Afrique. Sa population de 152 millions de personnes en fait le pays le plus peuplé d’Afrique. Ancienne colonie britannique, le Nigeria avait été dirigé par l’armée pendant la majeure partie de la période ayant suivi son indépendance, soit de 1960 jusqu’au rétablissement de la démocratie, en 1999. À cette époque, M. Olusegun Obasanjo (chrétien du sud du Nigeria et ancien dirigeant militaire), du Parti démocratique populaire (PDP), a été élu président, poste auquel il a été réélu en 2003. Aux élections présidentielles de 2007, la victoire de M. Umaru Yar’Adua du PDP (musulman du nord) a marqué la passation du pouvoir entre deux présidents civils pour la première fois depuis l’indépendance. À la mort du président Yar’Adua, en mai 2010, le vice-président Goodluck Jonathan (de la région du delta du Niger, au sud) a prêté serment à titre de chef d’État. Les prochaines élections sont prévues pour avril 2011.

Le Nigeria, qui est un pays vaste présentant une grande diversité ethnique, a connu de nombreux incidents violents. Dans les années 1960, le Biafra, à l’est du pays, a été déchiré par une guerre civile. Plus récemment, des conflits se sont produits dans la région pétrolière du delta du Niger, ainsi qu’entre musulmans et chrétiens dans plusieurs États du nord. De plus, des attentats meurtriers ont été menés à Abuja en octobre 2010 et au début du mois de janvier 2011.

L’économie du Nigeria est la deuxième d’Afrique. Des réformes mises en œuvre plus tôt au cours de la décennie ont aidé le Nigeria à relativement bien surmonter la récession mondiale de 2009. En 2009, l’agriculture a constitué environ 36 % du PIB, suivie du secteur pétrolier et gazier, dont la part était de 32 %. Le commerce de gros et de détail a représenté 16 % du PIB et le secteur des services, 8 %[5]

Des niveaux élevés de pauvreté persistent, particulièrement dans les zones rurales; le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) a évalué qu’entre 2002 et 2007, 49,4 % de la population vivait avec moins de 2 $ par jour[6]. Ce niveau de pauvreté se traduit dans les statistiques sur la santé de la population. L’espérance de vie à la naissance est de 49 ans seulement, alors que la moyenne africaine est de 53 ans et que la moyenne mondiale est de 68. Le taux de mortalité avant l’âge de cinq ans est de 186 pour 1 000 naissances vivantes, alors que la moyenne africaine est de 142 et que la moyenne mondiale est de 65. Les principales causes de la mortalité infantile sont la malaria, la diarrhée et la pneumonie[7]. Bien qu’au Nigeria le taux d’infection au VIH/sida (environ 3,6 %) soit inférieur à celui d’autres pays d’Afrique comme l’Afrique du Sud et la Zambie, plus de trois millions de personnes sont porteuses du virus[8].

Sur le plan de ses relations internationales, le Nigeria est la première puissance régionale de l’Afrique de l’Ouest. Le Nigeria assume la direction de la résolution des conflits dans la région de la CEDEAO. Le pays a envoyé des soldats au Libéria, en Sierra Leone, au Soudan, à Sao Tomé et en Côte d’Ivoire. Le Nigeria est en quatrième position pour ce qui est de sa contribution aux opérations internationales de maintien de la paix. Le pays entretient habituellement de bonnes relations avec ses voisins immédiats, à savoir le Bénin, le Niger, le Tchad et le Cameroun. En tant que troisième producteur de films au monde, le Nigeria joue aussi un rôle culturel important en Afrique.

Les relations commerciales avec la Chine se sont développées de façon spectaculaire sous le gouvernement du président Obasanjo (1999‑2007). La Chine a acquis des actions de sociétés pétrolières actives au Nigeria en plus d’investir directement dans d’autres secteurs, comme la fabrication, les télécommunications, l’énergie et le transport. La Chine et le Nigeria travaillent aussi à l’établissement d’une vaste zone de libre‑échange à Lagos. La Chine représente la plus importante source d’importations du Nigeria; en 2009, les importations de Chine ont constitué 15 % des importations du Nigeria, celles provenant des É.‑U., 9 % et celles des Pays-Bas, 8 %.

Le Nigeria et le Canada sont membres du Commonwealth et entretiennent de solides relations bilatérales. Le Canada reconnaît le leadership du Nigeria en Afrique et dans le monde, notamment sa contribution aux opérations de maintien de la paix. Les échanges bilatéraux ont atteint une valeur d’environ 680 millions de dollars en 2009, ce qui a représenté une diminution par rapport aux échanges de plus d’un milliard de dollars réalisés l’année précédente.

B.   Rencontres

1.    Visite du site d’un projet d’assainissement et de gestion des déchets

À Durumi, agglomération sans statut officiel abritant plus de 3 000 personnes dans la banlieue d’Abuja, la délégation a visité le site d’un projet d’assainissement et de gestion des déchets parrainé par l’ACDI. Le projet, dont le budget est de 43 603 $, est financé par le Fonds canadien d'initiatives locales. Sous la direction du African Centre for Leadership, Strategy and Development (Centre LSD), le projet a pour but de réduire les maladies en aidant la communauté à comprendre les conséquences qu’a sur la santé des résidants l’absence de mesures convenables en matière de salubrité et de gestion des déchets. L’objectif convenu est que, lorsque les gens auront fait le lien entre l’insalubrité et la maladie, ils modifieront leur comportement et trouveront des façons convenables d’éliminer leurs déchets.

La délégation a été reçue par une délégation de femmes de la communauté ainsi que par les responsables du projet, M. Otive Igbuzor et M. Orji Ogbureke, qui ont présenté un exposé expliquant que les mauvaises mesures d’élimination des déchets et, plus particulièrement, la défécation à ciel ouvert, entraînent des maladies telles que la fièvre typhoïde et la diarrhée. Afin d’aider les résidants à comprendre le lien entre les deux, ils leur ont fait calculer la quantité de matière fécale qu’ils produisent, puis le nombre d’enfants morts avant l’âge de cinq ans. 

Après avoir sensibilisé les résidants au problème, on les a formés de diverses façons à la gestion du problème sanitaire. Jamais au cours du processus les responsables du projet n’ont imposé de solutions; ils ont plutôt encouragé la communauté à prendre ses propres décisions. Ils ont aussi fait preuve de sensibilité à l’égard de la culture locale et ont veillé à ce que les hommes et les leaders traditionnels prennent part au processus décisionnel. 

Après la présentation, la délégation à entrepris une visite à pied de l’agglomération. Les médias locaux ont assuré la couverture de la visite.

2.    Faire des affaires au Nigeria

Afin de comprendre les défis qui se posent à ceux qui font des affaires au Nigeria, la délégation a rencontré M. Philip Asante, conseiller principal chez CPCS Transcom, une société d'experts-conseils d’Ottawa qui se spécialise dans le transport, le développement urbain et les infrastructures publiques. Au Nigeria, l’entreprise travaille à la restructuration de l’autorité portuaire ainsi qu’à la privatisation du service d’électricité.

M. Asante a décrit certains cas vécus dans son travail au Nigeria et a entre autres parlé de problèmes de gouvernance, de bureaucratie, de corruption et d’infrastructure, ainsi que d’un manque de transparence. La stratégie de CPCS Transcom se fonde sur la représentation locale, sur la compréhension du Nigeria et sur l’établissement de relations personnelles, qui constituent pour l’entreprise des éléments fondamentaux pour faire des affaires au Nigeria.

En réponse aux questions de la délégation, M. Asante a traité des défis que posent les entreprises chinoises. Il a indiqué que, si leur travail peut ne pas respecter les mêmes normes que celui des entreprises canadiennes, elles profitent d’ententes de financement préférentielles et de relations étroites avec des représentants du gouvernement. M. Asante a aussi parlé des défis que pose la collaboration avec la bureaucratie du Nigeria ainsi que des loyers élevés.

3.    Les élections et la gouvernance

Au moment de la visite de la délégation, le Nigeria préparait les élections d’avril 2011 relatives à la présidence, à l’Assemblée nationale, aux postes de gouverneurs et à la Chambre législative de l’Assemblée. Afin d’obtenir des renseignements sur les élections et la gouvernance, la délégation a tenu une rencontre avec les représentants d’organismes non gouvernementaux suivants : M. Carlo Binda, administrateur résident principal du National Democratic Institute (NDI); M. Kole A. Shettima, directeur du bureau africain de la MacArthur Foundation; M. Maxwell Kadiri, conseiller juridique associé de l’initiative Open Society Justice.

M. Binda a décrit le travail qu’accomplit le NDI afin d’informer les électeurs et d’observer les élections. Cette dernière tâche exige de visiter des bureaux de vote sélectionnés au hasard et de rendre compte de la situation à l’aide de messages textes chiffrés. Le NDI observe le processus électoral depuis le mois de mai 2010; il a en outre récemment observé l’inscription des électeurs. M. Binda a indiqué qu’on avait éprouvé de nombreux problèmes liés au matériel d’inscription des électeurs, mais que la Independent National Electoral Commission était au courant. Il a aussi souligné que les élections primaires étaient devenues beaucoup moins violentes, tout en indiquant qu’il restait encore beaucoup à faire pour améliorer le processus électoral.

M. Kadiri a parlé des récents conflits entre chrétiens et musulmans près de la ville de Jos. Il a indiqué que, dans son ensemble, le conflit était moins lié aux divergences religieuses, qu’aux tensions entre les populations autochtones (principalement chrétiennes) et les colons nouvellement arrivés (souvent musulmans). La tendance des populations autochtones à appuyer le parti au pouvoir et celle des colons à appuyer l’opposition ajoutent aux tensions. Lorsqu’on lui a demandé ce que pouvait faire le Canada, M. Kadiri a répondu que le Canada pourrait joindre sa voix à celle du Conseiller spécial pour la prévention du génocide de l’ONU, appuyer les initiatives de consolidation de paix et indiquer clairement au gouvernement du Nigeria qu’il doit prendre la question au sérieux.

M. Shettima a entretenu la délégation de la nécessité d’utiliser les nouvelles technologies afin de s’attaquer au problème que représentent les 50 000 décès maternels chaque année. Il a souligné les besoins en médicaments efficaces, en connaissances et en services de santé. Il a poursuivi en parlant des élections et du recours aux médias sociaux par les jeunes pour suivre les événements. Il a aussi parlé du travail accompli afin d’encourager les professionnels à jouer un rôle politique plus actif. Enfin, en ce qui concerne l’éducation, il a exprimé l’espoir que des programmes d’échange avec des universités canadiennes soient mis sur pied.

On a ensuite discuté de la question de la surveillance des élections, des problèmes liés aux appareils d’inscription des électeurs et du taux de roulement élevé parmi les politiciens. Malgré les problèmes, M. Shettima a insisté vivement pour que le Canada continue à appuyer les parlementaires nigérians et pour qu’il leur transmette son expérience du multiculturalisme et du fédéralisme. Il a souligné que, pour appuyer la démocratie en Côte d’Ivoire et ailleurs dans la région, il est important de bien faire les choses au Nigeria. 

4.    Entretien avec le ministre des Affaires étrangères

La délégation a rencontré le ministre des Affaires étrangères du Nigeria, l’honorable Henry Odein Ajumogobia. Ce dernier a d’abord présenté un aperçu de l’histoire politique du Nigeria et a fait remarquer que depuis son accession à l’indépendance, il y a 50 ans, le pays n’a été dirigé par un gouvernement civil que pendant 20 ans. Après avoir indiqué que des irrégularités s’étaient produites dans le processus d’inscription des électeurs, il a dit que les Nigérians avaient malgré tout exprimé leur appui à la Commission électorale nationale indépendante. Il a aussi parlé du travail qu’accomplit le Nigeria afin de diversifier son économie, qui dépend grandement de la production pétrolière.

Sur la question de l’impasse politique en Côte d’Ivoire, le ministre Ajumogobia a indiqué que la CEDEAO ne pourra la résoudre à elle seule et qu’un vaste consensus international sera nécessaire. Le ministre a qualifié d’excellentes les relations entre le Canada et le Nigeria et a ajouté que le Canada a toujours appuyé le peuple nigérian. Il a souligné que le Canada traitait actuellement la question des visas diplomatiques, qui seront délivrés à Abuja plutôt qu’à Lagos. 

Le ministre Ajumogobia a ensuite abordé la question des violences récentes dans le nord du pays, qui, selon lui, étaient souvent liées à des conflits personnels entre autochtones et colons. Il a aussi traité de la nécessité d’établir de bons liens de communication entre les pays d’Afrique, d’accroître le potentiel de production d’électricité au Nigeria, ainsi que de développer des secteurs comme l’agriculture, les services et la fabrication.

Enfin, le ministre a indiqué que le Nigeria doit améliorer son image et se débarrasser de sa réputation de point d’origine de nombreuses arnaques sur Internet.

5.    Visite à l’Assemblée nationale et entretien avec le président du Comité sénatorial des affaires étrangères

La délégation a visité l’Assemblée nationale, où elle a eu un entretien avec le sénateur Jibril M. Aminu, président du Comité sénatorial des affaires étrangères. Au cours de cette discussion, celui-ci a souligné que, même si le Comité ne s’était pas réuni depuis que la Côte d’Ivoire est dans une impasse politique, la réponse du Nigeria est conforme à ses politiques de longue date, dont le respect de la primauté du droit. Il a ajouté que le Nigeria était favorable à la reconnaissance de la victoire de M. Ouattara, mais que des difficultés d’ordre pratique faisaient obstacle à des mesures concrètes.

Le sénateur Aminu a ensuite abordé la question du travail réalisé par le Nigeria afin de s’occuper de la santé des mères et des enfants. L’atteinte des objectifs du Millénaire pour le développement (OMD) est prévue au budget et le gouvernement national collabore avec les gouvernements des États afin d’y arriver. Le sénateur Aminu a ensuite parlé des problèmes de dépistage du VIH ainsi que de l’incidence d’autres maladies comme l’hypertension. En ce qui concerne l’énergie électrique, le sénateur a indiqué que la question représentait un grave problème, parce qu’aucune centrale n’a été construite entre 1979 et 1999. 

En conclusion, le sénateur Aminu a présenté un aperçu de certaines des questions sur lesquelles le Nigeria doit se pencher au chapitre des affaires étrangères. Il a indiqué qu’il y avait peu d’ingérence de la part des puissances étrangères comme les États‑Unis ou l’Union européenne. Il a souligné les effets qu’ont les luttes intestines, telles que la rébellion dans la région du delta du Niger, sur les relations étrangères et sur les finances du Nigeria.

Le sénateur Aminu a aussi souligné la coopération du Nigeria avec ses voisins. Le pays avait, par exemple, réglé un litige frontalier avec le Cameroun. Il a aussi abordé les questions relatives à la traite de personnes, à la contrebande d’armes, à l’exode des cerveaux, à la réputation du Nigeria en matière de fraude sur Internet, ainsi qu’à la participation du Nigeria aux missions de maintien de la paix.

La délégation a ensuite fait la visite de l’Assemblée nationale. Lors de la visite de la délégation, la plupart des parlementaires nigérians se trouvaient dans leurs circonscriptions afin de préparer les élections prochaines.

6.    Entretien avec le vice-président de la Commission de la CEDEAO

La délégation a rencontré le vice-président de la Commission de la CEDEAO, M. Jean de Dieu Somda. Il a commencé les discussions en présentant un aperçu des institutions de la CEDEAO, dont la Commission est l’organisme central. Il a souligné que la CEDEAO assure la paix et la démocratie, qu’elle favorise l’intégration ainsi que la coopération économique et qu’elle s’occupe de questions sociales.

En ce qui concerne la question de la Côte d’Ivoire, M. Somda a fait remarquer que la CEDEAO a géré de nombreuses situations par le passé. Il a dit, néanmoins, que la situation de la Côte d’Ivoire a constitué une crise majeure. Il a décrit les mesures prises par la CEDEAO afin d’encourager M. Gbagbo à quitter la présidence et a ajouté que les chefs d’État et de gouvernement se réuniraient de nouveau en février afin de discuter du dossier.

En réponse aux questions de la délégation, M. Somda a parlé de la libre circulation de la main‑d’œuvre entre les pays de la CEDEAO.

M. Somda a souligné la contribution du Canada à la CEDEAO, mais a indiqué que des fonds supplémentaires permettraient à la CEDEAO d’embaucher plus de personnel.

Sur la question de la capacité de la CEDEAO à intervenir militairement en Côte d’Ivoire, il a exposé certains des problèmes logistiques, pratiques et politiques qui interviennent. En ce qui concerne l’intégration, il a parlé de la nécessité d’améliorer l’infrastructure des transports. Enfin, sur la question du renforcement de l’autonomie des jeunes et des femmes, M. Somda a indiqué qu’un plan stratégique était en place et que des progrès étaient réalisés au chapitre de la mortalité maternelle. Il a affirmé que la santé des enfants et des femmes était essentielle au développement.

7.    Entretien avec le Secrétaire général du Parlement de la CEDEAO

La délégation a rencontré M. Mohamed Diakite, Secrétaire général du Parlement de la CEDEAO, et les membres de son personnel. M. Diakite a présenté une vue d’ensemble du Parlement de la CEDEAO. Au cours de la discussion avec les membres de la délégation, il a parlé de la coopération entre les États de la CEDEAO en matière de production énergétique, qui nécessite l’établissement d’institutions chargées des questions de distribution et de règlementation. Il a ensuite traité du travail des organisations dans les domaines de la paix et de la sécurité, du perfectionnement des ressources humaines et de la politique agricole. Il a insisté sur la nécessité d’établir des voies de transport entre les pays de la région.

M. Diakite a donné des détails sur le budget du Parlement de la CEDEAO, qui est d’environ 15 millions de dollars et qui provient d’un prélèvement sur les droits d’importation imposés aux pays qui ne font pas partie de la CEDEAO. Le Parlement siège deux fois l’an et ses membres reçoivent des indemnités pour leurs frais de déplacement et de subsistance. Enfin, M. Diakite a parlé de la stratégie de communication du Parlement, de la situation du microcrédit au Ghana ainsi que du contrôle des armes légères.

8.    La santé, les droits de la personne et les conditions sociales

Les membres de la délégation ont eu une discussion avec Mme Hadiza Sani Kangiwa, commissaire fédérale aux réfugiés, le Dr Owens Wiwa, directeur de pays pour la William J. Clinton Foundation et Mme Ifeoma Nwakama, responsable de la stratégie et des organisations externes à la Commission nationale des droits de la personne.

Mme Kangiwa a présenté un exposé sur le travail de la Commission fédérale des réfugiés. En plus de s’occuper des questions relatives aux demandeurs d’asile, aux rapatriés, aux personnes déplacées et aux immigrants, cette commission participe à la détermination du statut de réfugié, à l’élaboration des politiques, à la gestion des camps de réfugiés, aux interventions en cas d’urgence, au rapatriement volontaire et à l’intégration locale. Les statistiques présentées à la délégation indiquaient que le nombre de personnes déplacées, environ 1,3 million, dépassait largement le nombre de rapatriés (411 000) ou de réfugiés (13 640). Mme Kangiwa a indiqué que les défis qui se posent à la commission sont le manque de ressources et de personnel, les questions relatives aux migrants et la nécessité d’établir un plan stratégique pour les personnes déplacées.

Mme Nwakama a ensuite expliqué le travail de la Commission nationale des droits de la personne, dont le mandat est de promouvoir et protéger les droits de la personne. Pour ce faire, cette commission enquête sur les plaintes, aide les victimes, mène des recherches et publie des rapports. De plus, la commission vérifie les centres de détention, présente des recommandations au gouvernement et mène des activités de sensibilisation aux droits de la personne. Mme Nwakama a exposé certaines des difficultés qui se posent à la commission, dont les limites de la loi habilitante en ce qui concerne l’indépendance, les pouvoirs, ainsi que l’inamovibilité des administrateurs principaux. Elle a aussi mentionné l’insuffisance et l’irrégularité du financement, la limitation de la portée et la capacité du personnel. En outre, les nombreuses années de régime militaire ont eu une incidence sur la culture du Nigeria en ce qui concerne les droits de la personne. Mme Nwakama a indiqué que la commission pourrait tirer avantage d’un soutien dans les domaines du renforcement des capacités, du mécanisme de traitement des plaintes, de la réforme du secteur de la justice et de la sensibilisation aux droits de la personne.

Le Dr Wiwa a ensuite présenté un exposé sur le travail de la Clinton Foundation, plus particulièrement sur celui de la Clinton Health Access Initiative, qui a œuvré pour offrir des antirétroviraux aux personnes atteintes du VIH/sida. Son approche consiste à établir des cibles et, lorsqu’elles sont atteintes, à passer au problème suivant. La fondation œuvre aussi dans les domaines de la santé maternelle et infantile, de la vaccination, du dépistage de la malaria et de l’accès aux médicaments. L’une de ses principales réalisations a été la réorganisation de la bourse de marchandises, de manière à réduire le coût des médicaments.

Au cours d’une discussion animée où divers sujets ont été abordés avec les membres de la délégation, les participants ont donné des détails sur les pouvoirs et l’indépendance de la Commission nationale des droits de la personne, qui n’a pas le pouvoir d’assigner des témoins ni de forcer l’observation. Elle peut cependant enquêter sur les plaintes portées contre des sociétés privées et du gouvernement. Ils ont aussi parlé de la situation des règlements à l’amiable et des besoins en matière de logement. 

Il a aussi été question de l’attention que l’on porte au VIH/sida au détriment d’autres maladies. Le Dr Wiwa a indiqué que l’on attache aujourd’hui une attention de plus en plus importante aux taux élevés de mortalité maternelle. Il a précisé que la question consiste à affecter les ressources efficacement et que cela dépend en bonne partie de qui en fera la promotion. Par exemple, la question du manque d’hygiène de base, qui est liée à des maladies comme le choléra, n’est pas une priorité essentielle.

Au sujet de l’aide du Canada, le Dr Wiwa a insisté vivement pour que l’ACDI n’achemine pas toute son aide par l’entremise du système des Nations Unies.

GHANA

A.   Contexte

Tout comme le Nigeria, le Ghana est une ancienne colonie britannique. Il a été le premier pays de l’Afrique subsaharienne à obtenir son indépendance. Sa population de 24,3 millions d’habitants est composée de chrétiens, de musulmans et de personnes qui observent des croyances traditionnelles. Le Ghana a connu une série de coups d’État entre son accession à l’indépendance, en 1957, et l’instauration d’un régime à un seul parti, en 1981. Au cours de cette période, l’économie du pays est minée par la mauvaise gestion. Le pluripartisme a été rétabli en 1992 et le Ghana est aujourd’hui considéré comme un modèle démocratique. M. Jerry Rawlings, arrivé au pouvoir à la suite d’un coup d’État, s’est présenté sous la bannière du Congrès démocratique national (CDN). Il a alors été élu président, poste auquel il a été réélu en 1996. La limite de deux mandats ayant été atteinte, le président Rawlings ne s’est pas présenté aux élections de 2000. C’est M. John Kufuor, du Nouveau Parti patriotique (NPP), parti d’opposition, qui a remporté les élections. Il a été réélu en 2004, mais ne s’est pas présenté aux élections suivantes. En 2008, le CDN a obtenu de nouveau la présidence, lorsque l’ancien vice-président, M. John Evans Atta Mills, a été élu. Si le Ghana a en grande partie échappé aux conflits civils, il reste que des affrontements tribaux ont eu lieu dans le nord du pays.

Le Ghana est bien pourvu en richesses naturelles, mais il compte encore fortement sur l’aide financière et technique internationale. L’agriculture constitue le tiers du PIB. La production pétrolière en mer a commencé à la fin de l’année 2010 et il reste à voir comment le Ghana gérera cette nouvelle source de revenus. La croissance économique, dont la moyenne a été de 6 % au cours des cinq dernières années, est descendue sous les 5 % en 2009; on s’attendait cependant à ce qu’elle soit supérieure à 6 % en 2010 et à ce qu’elle dépasse les 8 % en 2011[9].

Le Ghana est touché par d’importants problèmes de développement, particulièrement dans les zones rurales et dans le nord du pays. En outre, près de 80 % de la population gagne moins de 2 $ par jour. L’espérance de vie à la naissance est de 62 ans; cette moyenne est beaucoup plus élevé que la moyenne africaine, de 53 ans, et se rapproche de la moyenne mondiale, de 68 ans. Le taux de mortalité avant l’âge de cinq ans est de 76 pour 1 000 naissances vivantes, alors que la moyenne africaine est de 142 et que la moyenne mondiale est de 65. Les principales causes de la mortalité infantile sont la malaria, la prématurité et l’asphyxie à la naissance[10]. Le taux d’infection au VIH/sida (1,8 %) est beaucoup moins élevé que le taux moyen de 5 % des pays de l’Afrique subsaharienne. Environ 260 000 Ghanéens sont porteurs du virus[11].

Sur la scène internationale, le Ghana est un membre actif d’organisations régionales et participe à de nombreuses opérations de maintien de la paix. Il est d’ailleurs le pays africain qui contribue le plus aux opérations multinationales de maintien de la paix; d’importants contingents de ce pays sont présents en République démocratique du Congo, dans la région du Darfour au Soudan, au Libéria et en Côte d’Ivoire. Le Ghana, qui appuie fortement le Nouveau partenariat pour le développement de l'Afrique (NEPAD), a été l’un des quatre premiers pays à prendre part au Mécanisme africain d’évaluation entre pairs.

Le Ghana entretient une solide relation avec le Nigeria. Ces deux pays ont d’ailleurs collaboré à des missions de maintien de la paix dans la région. De nombreuses entreprises nigérianes sont actives au Ghana. Le Ghana, qui travaille à l’amélioration des relations avec ses voisins francophones, est devenu membre associé de l’Organisation internationale de la Francophonie en 2006. 

Le Ghana a aussi bonne réputation à l’étranger. Les É.‑U. et le Royaume‑Uni, où vit une importante communauté ghanéenne, sont de grands partenaires commerciaux et donateurs.

Le Ghana a récemment développé ses liens avec la Chine, qui lui offre un financement à des conditions de faveur pour des projets d’infrastructure. En septembre 2010, le président Atta Mills, a effectué une visite en Chine, où il a signé des ententes d’une valeur totale de quelque 16 milliards de dollars américains. La Chine représente aussi la principale source d’importations du Ghana; en 2009, les importations de la Chine ont constitué 17 % des importations du Ghana, celles du Nigeria, 12 % et celles des États‑Unis, 6,5 %.

Les relations bilatérales entre le Canada et le Ghana sont bonnes. Les deux pays, qui entretiennent des liens de longue date, travaillent en étroite collaboration afin de promouvoir la paix et la sécurité régionales. Le Ghana est l’un des principaux bénéficiaires de l’aide canadienne au développement, en plus de constituer le troisième marché d’exportation de marchandises du Canada en Afrique subsaharienne. Environ 70 000 Ghanéens vivent au Canada.

B.   Rencontres

1.    Visite au Parlement du Ghana et entretien avec le vice‑président adjoint

La délégation a visité le Parlement du Ghana, dont elle a rencontrée le vice‑président adjoint, l’honorable Aaron Michael (Mike) Oquaye, député. Les membres de la délégation et M. Oquaye ont échangé des idées sur le rôle et la fonction de Président du Parlement. Au Ghana, ce dernier n’est pas un membre élu du parlement, mais une personnalité éminente choisie à l’extérieur du Parlement. Deux adjoints assistent le Président, l’un du parti ministériel et l’autre de l’opposition.

La délégation et M. Oquaye ont discuté des méthodes pour en appeler d’une décision du Président du Parlement (au Ghana, on compte essentiellement sur le leadership politique pour arriver à un compromis), ainsi que de la procédure de rappel du Parlement. Il a aussi été question du processus de scrutin, particulièrement du nombre élevé de bulletins de vote annulés, de la participation des femmes au Parlement et dans le milieu politique local, ainsi que des moyens à prendre afin d’accroître leur participation.

La délégation a ensuite effectué la visite du Parlement et de sa Chambre, où les travaux étaient en cours. Après avoir été présentée par le Président de l’Assemblée, la délégation a observé une partie des délibérations. Les membres de la délégation ont été impressionnés par l’entrain des questions et la vigueur du débat. 

2.    Entretien avec le président du Ghana

Les coprésidents de l’Association et M. Christopherson ont rencontré le président Atta Mills à sa résidence officielle, le Château d’Osu. Le président a accueilli les délégués en leur parlant de l’année qu’il a passée au Liu Center for the Study of Global Issues de l’Université de la Colombie-Britannique. Les mots de bienvenue ont été rapportés par les médias d’information.

Les délégués et le président ont ensuite discuté des relations bilatérales entre le Ghana et le Canada ainsi que de l’importance des nombreuses personnes qui ont une expérience des deux pays. Ils se sont entretenus des conséquences de la production pétrolière et gazière pour le Ghana ainsi que des possibilités dont pourraient profiter les partenaires à l’égard de cette production.

La discussion a ensuite porté sur la question de la Côte d’Ivoire. Le président Atta Mills a donné des détails sur la position de la CEDEAO ainsi que sur les nombreux facteurs qui doivent être pris en compte du point de vue du Ghana. Parmi ceux-ci, il a souligné que 500 soldats du maintien de la paix ghanéens agissaient actuellement pour l’ONU en Côte d’Ivoire. Il a aussi traité des implications de la crise pour la région.

Le président a ensuite donné plus de précisions sur les plans de gestion des recettes tirées de la production pétrolière et gazière ainsi que sur les efforts du Ghana afin de trouver un juste équilibre entre l’utilisation immédiate des ressources et la nécessité d’épargner pour l’avenir. Il a parlé abondamment du dilemme qui se pose : protéger les ressources pour les générations à venir, ou faire profiter immédiatement les citoyens des retombés de cette activité. Le président a aussi parlé de la nécessité de renforcer la production agricole ainsi que la transformation agricole. Il a indiqué que le but était d’arriver à un surplus de production, de manière à nourrir le pays et développer les exportations.

Le président Atta Mills a aussi traité des relations croissantes avec la Chine. Il a fait remarquer que la relation entre le Ghana et la Chine ne date pas d’hier et que, même si les deux pays collaborent dans certains domaines, cette coopération n’exclut pas les bienfaiteurs habituels.

Au sujet de la relation entre le Ghana et le Canada, le président a indiqué qu’elle était satisfaisante, en ajoutant toutefois que la coopération pourrait être renforcée dans certains domaines, dont l’éducation, le secteur pétrolier et gazier et la transformation agricole.

3.    Entretien avec les leaders parlementaires et les membres de la délégation du Ghana au Parlement de la CEDEAO et au Parlement panafricain

Les membres de la délégation ont rencontré des députés, tant du parti ministériel que de l’opposition. Parmi eux, l’honorable Mike Oquaye, vice-président adjoint du Parlement, l’honorable Cletus Avoka, leader du gouvernement au Parlement, l’honorable Osei Kyei-Mensah-Bonsu, leader de l’opposition au Parlement, l’honorable Ambrose Derry, leader adjoint de la minorité et membre du Comité du commerce et de l’industrie, l’honorable Albert Kan-Dapaah, président du Comité des comptes publics et membre du Comité de la défense et de l’intérieur, l’honorable Gershon Gbediame, membre du Comité des comptes publics, l’honorable Dominic Azumah, membre du Comité des comptes publics, l’honorable Elizabeth Agyeman, membre du Parlement de la CEDEAO; l’honorable Alfred Agbesi, membre du Parlement de la CEDEAO, l’honorable Michael Teye-Nyanu, membre du Comité des affaires étrangères et membre du Parlement de la CEDEAO, et l’honorable Joseph Amankwanor, membre du Comité des affaires étrangères et du Comité des mines et de l’énergie.

Les membres de la délégation et les parlementaires ghanéens ont échangé des idées sur le fonctionnement de leur parlement, les rôles des députés, le rôle du Comité des comptes publics, ainsi que sur leurs relations avec les électeurs. Ils ont aussi eu une discussion franche sur la situation en Côte d’Ivoire. Tous les parlementaires ghanéens, indépendamment du parti, ont dit craindre que leur gouvernement envoie des messages contradictoires sur le rôle du Ghana dans la réponse à l’impasse politique en Côte d’Ivoire. 

4.    Visite aux bureaux d’un projet d’égalité entre les sexes, au centre correctionnel pour filles d’Accra

Les membres de la délégation ont rendu visite aux responsables d’un projet ayant pour objet d’offrir une formation professionnelle aux détenues du centre correctionnel pour filles d’Accra, le seul établissement correctionnel pour mineures du Ghana. Une vingtaine de jeunes contrevenantes, de 8 à 17 ans, dont bon nombre ont été condamnées pour des crimes graves, y acquéraient des compétences dans les domaines de la coiffure, de la restauration, de la confection de vêtements, du rembourrage et de la plomberie, entre autres.

Le projet, qui fait partie du Programme des initiatives stratégiques pour l’égalité entre les sexes (SIGEP), est mis en œuvre, en collaboration avec le ministère du Bien‑être social, par le club Zonta d’Accra, une organisation de services offerts par des femmes occupants des postes de direction.   La délégation a été accueillie par Mme Stella Bentsi-Enchill, gouverneure du club Zonta local. Treize autres membres du club Zonta ont aussi participé à la rencontre, dont Mme Irene Addo, députée. Certaines des filles ont offert une présentation aux membres de la délégation, qui ont ensuite visité les installations.

Les membres de la délégation ont été impressionnés par l’approche concertée des donateurs, de la communauté et du gouvernement. L’approche pratique à l’égard du traitement ainsi que l’accent mis sur la réinsertion ont pour but de donner aux jeunes filles des compétences qu’elles pourront utiliser dans la communauté. D’ailleurs, elles utilisaient déjà leurs compétences afin d’effectuer des réparations de plomberie et d’améliorer l’accès à l’eau pour le centre. Les délégués ont remarqué la volonté des jeunes filles d’acquérir des compétences nouvelles.

Les membres de la délégation ont apprécié le fait que les participants consacraient à la réussite du projet leur temps, leurs soins et leurs idées.  Grâce à leurs efforts, les jeunes filles seront en mesure de réintégrer la communauté, munies d’atouts qu’elles n’auraient pas autrement.

5.    Entretien avec le ministre des Finances

Les membres de la délégation ont rencontré M. Kwabena Duffuor, ministre des Finances et de la Planification économique, qui leur a présenté un aperçu de l’économie du Ghana et des effets qu’a eus sur elle la crise économique mondiale de 2008. Il a indiqué que la situation macro-économique était maintenant satisfaisante, que la monnaie était stable, que les emprunts du gouvernement diminuaient et que les dépenses étaient maîtrisées. 

Le ministre Duffuor a ensuite parlé de la nécessité de stimuler la croissance et de créer des emplois. Il a souligné que la qualité de vie des citoyens ne dépend pas uniquement des données économiques. Elle dépend aussi de l’atteinte des objectifs du Millénaire pour le développement (OMD). Il a indiqué plus particulièrement que l’éducation, surtout celle des femmes, était essentielle au développement. 

En réponse aux questions des délégués, le ministre Duffuor a exposé l’idée d’une monnaie commune pour la CEDEAO. Il a précisé que la situation en Europe, où les pays nantis renflouent les pays qui le sont moins, constituait un exemple des problèmes pouvant survenir. Il a indiqué que le Ghana n’avait pas la solidité requise pour soutenir les pays moins riches de la région. Il a en outre déclaré que, si les pourparlers sur la question se poursuivront, il reste que la région n’établira pas de monnaie commune à la hâte. Selon lui, les priorités sont plutôt centrées sur l’établissement des structures, le renforcement des gouvernements et l’amélioration de la communication.

Le ministre Duffuor a aussi traité de certains autres sujets. À propos de l’éducation, il a indiqué qu’elle est gratuite et obligatoire, que les enfants sont nourris et que des uniformes leur sont fournis. Il a aussi entretenu les délégués des difficultés relatives à la perception fiscale et à l’application de la loi. Au sujet de la dépendance sur l’industrie pétrolière qui a causé des problèmes dans d’autres pays, il a dit que le Ghana était différent et qu’il adopterait une approche judicieuse et utiliserait les nouvelles recettes pour diversifier l’économie et pour répondre aux besoins futurs.

Au sujet de l’aide au développement, le ministre a indiqué que l’amélioration de son économie, dans les cinq à dix prochaines années, devrait permettre au Ghana d’être autonome. Il a confirmé que le gouvernement a établit des plans et des prévisions afin d’aider le Ghana à s’adapter alors qu’il passe de pays bénéficiaire de dons à pays à revenu intermédiaire. Ce qui ne signifie pas que le Ghana cessera de collaborer avec des pays comme le Canada. La relation se transformera plutôt en partenariat. Concernant les fonds envoyés par les Ghanéens vivant à l’étranger, le ministre a indiqué qu’ils avaient augmenté substantiellement au cours des douze dernières années. Le ministre Duffuor a aussi parlé des effets que la production gazière, qui n’a pas encore débuté, aura sur l’économie. Il a indiqué que l’approvisionnement énergétique posait problème et que le gaz offrira une énergie fiable. Le ministre a conclu en disant que la période de transition ferait l’objet d’une gestion méticuleuse.

6.    Visite au Centre International Kofi Annan de Formation au Maintien de la Paix

La délégation a visité le Centre International Kofi Annan de Formation au Maintien de la Paix (KAIPTC) à Accra. Le Centre met en œuvre des programmes de recherche et de formation qui contribuent aux opérations de maintien de la paix dans le monde. La formation, offerte par des policiers, des militaires et des civils, met l’accent sur l’aspect opérationnel des missions de maintien de la paix. En 2010, 1 342 personnes ont suivi des cours au Centre.

Les membres de la délégation ont été accueillis par le commandant, le major‑général Christian Edem Kobla Dovlo, ainsi que par les membres de son équipe de direction. Il a été question des programmes du Centre, de sa collaboration avec le Centre Pearson pour le maintien de la paix ainsi que de sa participation à la formation sur l’égalité des sexes.

La délégation a ensuite assisté à une séance d’information sur les opérations du Centre, y compris le travail qu’accomplissent actuellement le Programme Genre, Femmes, Paix et Sécurité (GFPS) et l’Institut Femmes, Paix et Sécurité (IFPS). Le GFPS traite des questions relatives aux femmes et à la sécurité dans les conflits, dans les missions de maintien de la paix et dans les activités de reconstruction après les conflits. Il mène des recherches et offre une formation afin d’aider les organisations régionales ou continentales, comme la CEDEAO et l’UA, à comprendre la dynamique des genres et à offrir une protection contre la violence fondée sur le genre. Quant à lui, l’IFPS vise à appuyer la mise en œuvre intégrale des résolutions 1325 et 1820 du Conseil de sécurité de l’ONU sur les femmes, la paix et la sécurité. Il agit à titre de centre de connaissances et élabore des cours conçus afin de renforcer les capacités des femmes en matière de leadership. Les membres de la délégation ont aussi obtenu des renseignements sur le travail qu’accomplit le Centre aux fins de l’Opération hybride Union Africaine/Nations Unies au Darfour (MINUAD).

On a ensuite fait visiter le Centre aux membres de la délégation.

7.    Rencontre avec les gens d’affaires canadiens

Les délégués ont pris part, avec les gens d’affaires canadiens, à un dîner donné par la haute‑commissaire du Canada. Des représentants des organisations suivantes étaient présents : la Chambre de commerce canadienne au Ghana, la Commission des Minéraux, la Chambre des mines du Ghana, la Corporation commerciale canadienne, la Ghana Airports Company Ltd., la Ghana National Petroleum Corporation, le ministère des Affaires étrangères, PMI Ventures, le Institute of Justice and Human Rights, Keegan Resources, Pelangio Exploration Inc., AKSA Management, le ministère de la Justice et le bureau du procureur général. Les membres de la délégation ont eu l’occasion de discuter des possibilités qu’offre le Ghana dans des secteurs tels que le logement, la comptabilité, l’industrie pétrolière et gazière et le développement des infrastructures.

8.    Visite au Dépôt humanitaire du Programme alimentaire mondial

La délégation a visité le Dépôt humanitaire du Programme alimentaire mondial (PAM). Elle y a été accueillie par le gestionnaire du dépôt, M. Martin Walsh, et le directeur de pays, M. Ismail Omer. Le programme de dépôts de réponse humanitaire des Nations Unies (UNHRD) est appuyé par l’ACDI, pour qui la sécurité alimentaire est une priorité essentielle.

Des renseignements ont été présentés à la délégation au sujet du dépôt, qui est l’un des cinq dépôts de réponse humanitaire dans le monde. Le premier a été établi en 2000, à Brindisi, en Italie. Les dépôts contiennent des réserves stratégiques de produits d’aide d’urgence, comme des fournitures médicales, des éléments de construction d’abris ainsi que des bureaux et des modules de stockage préfabriqués. Ils ont été utilisés afin d’intervenir au cours de catastrophes comme le tsunami de 2004 en Asie, les tremblements de terre au Pakistan, les sécheresses en Afrique du Sud et le tremblement de terre de 2010 en Haïti.

Le dépôt d’Accra est un pivot logistique d’intervention humanitaire rapide au service du PAM et des autres organismes humanitaires. Il répond aux besoins de toute l’Afrique. En 2010, le dépôt a été le point d’expédition de biens d’une valeur totale de quelque 3,7 millions de dollars américains. À tire de composante du réseau mondial du PAM, il participe aussi aux interventions en cas de catastrophes internationales majeures. À titre d’exemple, le dépôt d’Accra a été utilisé afin d’acheminer des articles de secours en Haïti après le tremblement de terre de 2010.

Le dépôt offre, à certains organismes de l’ONU et organismes internationaux non gouvernementaux, des services gratuits comme le stockage et la manutention. D’autres services, tels que l’approvisionnement, les réparations et l’étiquetage, sont tarifés au coût de revient majoré de 4,5 %. Le dépôt s’approvisionne aussi chez des agriculteurs locaux.

Au cours des discussions avec la délégation, les membres de l’équipe du dépôt ont traité de l’incidence de l’augmentation du coût des aliments. Ils ont précisé que le dépôt est situé au Ghana en raison de l’infrastructure des transports et de la stabilité du pays.

La délégation a ensuite fait la visite de ce dépôt moderne, où s’élèvent d’énormes étagères remplies de fournitures médicales d’urgence, de tentes et d’aliments.

9.    Entretien avec le ministre des Ressources en eau, des travaux et du logement

La délégation a rencontré le ministre des Ressources en eau, des travaux et du logement, l’honorable Alban S. K. Bagbin. Ce dernier a commencé l’entretien en parlant de son portefeuille qui, en plus du logement, englobe des secteurs tels que le drainage et la protection du littoral. Il a souligné que le Ghana a la chance d’avoir de l’eau, mais que les pratiques agricoles et l’envasement en compromettent la qualité. Il a indiqué que le gouvernement prend des mesures pour atténuer certains des problèmes, comme la plantation d’arbres. Le ministre a aussi fait état de la coordination avec les pays voisins en ce qui concerne la gestion des ressources en eau.

En ce qui concerne le logement, le ministre Bagbin a fait état d’un manque de 1,3 million de maisons. En effet, 10 000 logements sont construits chaque année, sur les 150 000 nécessaires. Le financement pose problème, mais, grâce à un prêt de la Corée du Sud, le gouvernement espère combler le déficit d’ici dix ans. Le ministre a en outre précisé que le Ghana n’a pas de code du bâtiment et que la planification est déficiente au niveau local. 

Le ministre a parlé de la nécessité d’offrir des logements aux migrants venus du nord du pays. Il a indiqué que la solution de premier choix est d’encourager le développement au nord de manière à ce que la population soit moins tentée de déménager. Il a aussi parlé de la participation du secteur privé dans le domaine du logement.

Au sujet des relations avec la Chine, le ministre a indiqué que le Ghana est conscient des risques et qu’il est certes difficile de refuser les offres d’aide de la Chine, mais que le Ghana tente d’établir un sain équilibre dans ses relations avec les donateurs et les investisseurs étrangers. Il a aussi parlé de l’immigration chinoise en Afrique et de la mesure dans laquelle les activités de la Chine pourraient être considérées comme du colonialisme économique.

Enfin, le ministre a déclaré que le problème de la gestion des déchets et de l’insalubrité représente une bombe à retardement et que le secteur privé doit participer à l’élaboration de solutions.

TOGO

A.   Contexte

La République togolaise est située à l’est du Ghana. Le Togo contemporain faisait, au départ, partie de la colonie allemande du Togoland. Après la Première Guerre mondiale, le Togoland a été séparé en deux zones, l’une britannique et l’autre française. En 1956, la zone britannique a été intégrée au Ghana, alors que la zone française est devenue une république indépendante au sein de la communauté française. Le Togo a obtenu son indépendance complète en 1960. Sa population de six millions d’habitants se divise en 37 tribus. La langue officielle est le français. 

Le Togo d’aujourd’hui est un pays en transition. Le pays a été dirigé pendant plus de 40 ans par le même parti, à savoir le Rassemblement du peuple togolais (RPT). La mort du président autocratique Gnassingbé Eyadéma, qui était en poste depuis longtemps, a permis à son fils, Faure Gnassingbé, de prendre le pouvoir, mais a aussi permis la tenue d’élections multipartites. Les observateurs internationaux ont déclaré que les élections législatives de 2007 et 2010 ont été libres et équitables.

Le président Gnassingbé a été réélu aux élections présidentielles de mars 2010. Après l’élection, M. Gilchrist Olympio, qui a longtemps été leader de l’opposition formée par l’Union des forces de changement (UFC), a accepté de former un gouvernement d’unité nationale, dans lequel l’UFC a obtenu le quart des postes ministériels. Cet événement a marqué la fin de près de 50 années d’affrontements entre les deux partis. Toutefois, l’entente a aussi donné lieu à des divisions au sein de l’UFC, qui s’est scindé en deux groupes, l’un dirigé par M. Olympio, et l’autre par M. Jean-Pierre Fabre, qui a perdu contre le président Gnassingbé aux élections présidentielles de 2010.

L’aide des donateurs a été suspendue en 1993, après la dissolution du gouvernement par le président Eyadéma, ce qui a eu pour effet de mettre le pays en état de sous-développement. Depuis le rétablissement de la démocratie, toutefois, le pays a rejoint la communauté internationale et l’apport d’aide a repris.

L’économie du Togo est grandement axée sur l’agriculture, qui constitue 39 % de son PIB. Les principales cultures commerciales sont le coton, le cacao et le café. En 2009, un fort rendement dans ce secteur a entraîné une croissance économique de 2,2 %. On s’attend à ce que la croissance passe à 2,5 % en 2010, puis à 3,6 % en 2011. Cette croissance est cependant entravée par des problèmes liés aux réserves de phosphate. Qui plus est, les infrastructures sont en mauvais état[12].  

Le Togo est l’un des pays les plus pauvres au monde. Le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) évalue que, de 2002 à 2007, 69,3 % de la population gagnait moins de 2 $ par jour[13]. L’espérance de vie à la naissance est de 59 ans, ce qui est légèrement supérieur à la moyenne africaine, de 53 ans, mais inférieur à la moyenne mondiale, de 68 ans. Le taux de mortalité des enfants de moins de cinq ans est de 98 pour 1 000 naissances vivantes, alors que la moyenne africaine est de 142 et que la moyenne mondiale est de 65. Les principales causes de mortalité infantile sont la malaria, la pneumonie et la diarrhée[14]. Le taux d’infection au VIH/sida au Togo (3,2 %) est quelque peu inférieur à la moyenne de 5 % des pays subsahariens. Environ 120 000 Togolais sont porteurs de la maladie[15].

Les relations entre le Togo et ses voisins, c'est-à-dire le Ghana, le Burkina Faso et le Bénin, sont bonnes en général. En 2007, le Togo, le Bénin et le Nigeria ont signé un pacte visant à promouvoir la paix et la stabilité entre eux et établissant la Zone de l’Alliance de la Co-Prospérité.

Le Togo est actif au sein de l’UA et des organismes régionaux d’Afrique occidentale. Il fait partie de la CEDEAO ainsi que de la CEN-SAD. Il collabore en outre avec les membres francophones de la CEDEAO au sein de l’Union Économique et Monétaire Ouest Africaine (UEMOA)[16]. Le Togo a participé à des opérations de maintien de la paix dans la région, y compris en Côte d’Ivoire.

Avec la réforme politique mise en œuvre depuis la mort du président Gnassingbé Eyadéma, en 2005, les relations du Togo avec l’UE se sont améliorées. L’UE a recommencé en 2008 à offrir son aide financière, après 15 ans d’interruption. Le Togo entretient des relations particulièrement étroites avec la France et l’Allemagne, les anciennes puissances coloniales. Ses relations avec les États‑Unis sont bonnes. Il entretient aussi de bonnes relations avec l’Iran, la Libye, le Maroc et la Chine. Cette dernière représente d’ailleurs la plus importante source d’importations du Togo; les importations de Chine constituent en effet 37 % des importations du Togo, celles de la France 9 %, celles des Pays‑Bas 7 %, celles de l’Inde 5 % et celles des États‑Unis 4 %. La Chine a récemment offert au Togo des subventions et des prêts d’une valeur de 12 millions de dollars pour son agriculture et ses infrastructures.

Les relations bilatérales entre le Canada et le Togo sont limitées et le Canada n’a aucun programme bilatéral d’aide au développement pour ce pays. Le Togo profite toutefois de programmes d’aide régionale financés par l’ACDI. Le Canada a appuyé les efforts de l’UA et de la CEDEAO en vue d’encourager la transition démocratique au Togo. Le Canada a aussi dénoncé les violations des droits de la personne qui ont marqué les élections de 2005. Le Canada encourage le Togo à poursuivre son processus de réforme démocratique. 

B.   Rencontres

1.    Visite à l’Assemblée nationale et entretien avec le Président

La délégation a visité l’Assemblée nationale, dont le Président, l’honorable Abbas Bonfoh, l’a accueillie. Ce dernier a présenté un exposé sur l’Assemblée nationale, dans lequel il a expliqué l’équilibre des partis et le rôle des comités.

Le Président Bonfoh a indiqué aux délégués qu’il était impatient d’établir de bonnes relations entre le parlement du Togo et celui du Canada. Il a ensuite exposé comment les présidents de comités sont choisis : quatre d’entre eux proviennent de la majorité et trois de l’opposition. Les leaders de la Chambre déterminent la composition des commissions. Le Président a aussi parlé des sessions parlementaires.

Lorsque les membres de la délégation lui ont demandé quelles étaient les principales questions occupant l’Assemblée, le Président a répondu qu’il s’agissait des questions déterminées par le gouvernement, à savoir la réduction de la pauvreté, l’éducation, les soins de santé et l’agriculture. Il a aussi traité des relations entre le Togo et le Canada, ainsi qu’avec la CEDEAO. Au sujet de l’impasse politique en Côte d’Ivoire, le Président a indiqué que le Parlement tentait de trouver une solution pacifique, tout en respectant les principes démocratiques et la volonté du peuple. 

La délégation a ensuite fait la visite de l’Assemblée nationale, qui a été installée dans un centre de congrès pendant 10 ans. Après la visite, les membres de la délégation ont donné des entrevues aux médias.

2.    Entretien avec des parlementaires

Les délégués ont rencontré trois parlementaires togolais : M. Kokou Aholou, leader de l’UFC, Mme Christine Mensah-Atoemne, présidente de la Commission des Droits de l’Homme et Mme Adjaratou Abdoulaye, 2e rapporteur de la Commission des relations extérieures et de la coopération.

Les parlementaires ont discuté de la situation des partis minoritaires à l’Assemblée nationale. En règle générale, ils appuient les projets de loi d’initiative ministérielle lorsqu’ils croient qu’ils sont dans l’intérêt du pays. Étant donné que le Togo est en période de rétablissement, ils accordent au gouvernement la chance de mettre son programme en œuvre. Interrogé au sujet du traitement des partis minoritaires, M. Aholou a dit qu’ils étaient traités équitablement. Les parlementaires ont aussi discuté des façons dont le Togo peut assurer une transition pacifique vers la démocratie.

Les parlementaires ont ensuite donné des détails sur les travaux de leurs commissions. La Commission des Droits de l’Homme s’intéresse plus particulièrement aux droits des femmes et des enfants. Ils ont indiqué que la Commission est nécessaire afin de veiller à ce que les droits soient respectés, compte tenu des violations antérieures dans ce domaine. La Commission visite des établissements correctionnels et des centres de soins de santé afin de vérifier que les droits de la personne sont respectés; elle publie en outre des rapports accompagnés de recommandations.

Les parlementaires ont ensuite abordé la question de l’éducation, dont les lacunes constituent un problème de taille au Togo, particulièrement chez les femmes et les filles des zones rurales. Ils ont aussi indiqué qu’une grande partie de la population comprend mal le processus politique. Ils ont dit que de nombreuses personnes s’attendent à ce que les parlementaires bâtissent des écoles.

3.    Entretien avec le premier ministre du Togo

La délégation a rencontré le premier ministre togolais, S.E. Gilbert Fossoun Houngbo, qui a vécu au Canada et qui détient un diplôme d’études supérieures en comptabilité et en finances de l’Université du Québec à Trois-Rivières. 

La question de l’impasse politique en Côte d’Ivoire a d’abord été abordée. Le premier ministre Houngbo a dit appuyer la CEDEAO quant à l’adoption d’une position unanime sur la question. Après avoir souligné le fait que les démocraties africaines sont de jeunes démocraties, le premier ministre a indiqué que les pays de la région doivent veiller à ce que d’autres pays ne tentent pas de reproduire les événements de la Côte d’Ivoire. Il a aussi souligné que, pour la première fois, les chefs d’État de la CEDEAO avaient adopté une position claire sur les résultats d’une l’élection. Le premier ministre a aussi exposé certains des facteurs qui compliquent les tentatives visant à convaincre M. Gbagbo de céder le pouvoir.

Au sujet de la situation au Togo, le premier ministre a mentionné que des améliorations devaient être apportées au chapitre des droits de la personne. Il a indiqué que le pays connaît maintenant la liberté de presse et que les gens peuvent certes écrire ce qu’ils veulent, mais qu’ils sont encore affamés et que les réformes proposées doivent s’accompagner de dividendes, sans quoi les gens pourraient conclure que l’ancien système fonctionnait mieux.

Le premier ministre Houngbo a souligné que l’approche voulant que le gagnant emporte tout ne s’applique plus. Il a indiqué que les partis minoritaires occupent sept postes ministériels, ce qui représente le quart de tous les postes. Après avoir mentionné que le pays compte 72 partis politiques et 80 journaux (mais deux quotidiens seulement), il a dit qu’il faudra entre cinq et dix ans avant que la situation se règle.

En ce qui concerne l’économie, le premier ministre a abordé la question des réformes financières et de l’aide que le pays reçoit de l’Initiative d'aide aux pays pauvres très endettés (Initiative PPTE) du Fonds monétaire international (FMI). 

Pour ce qui est de la question de l’approche bilatérale par rapport à l’approche multilatérale en matière d’aide au développement, le premier ministre a dit être partisan de l’approche multilatérale. Il a souligné que le Togo reçoit de l’aide du Programme alimentaire mondial, dont le Canada est le troisième donateur. Il a indiqué du même souffle qu’il comprenait que, du point de vue de la politique étrangère du Canada, une aide bilatérale pourrait aider à canaliser la présence et l’aide du Canada à l’égard du Togo. Il a aussi dit qu’une certaine souplesse était nécessaire afin d’intervenir en cas de crise humanitaire.

Le premier ministre a indiqué que l’aide de la Chine pour les infrastructures était nécessaire à court terme, étant donné que les ressources du Togo sont limitées. Il a aussi souligné que les Chinois établissent des relations stratégiques en Afrique, où ils fournissent des fonds. Selon lui, les pays bénéficiaires doivent cependant ouvrir l’œil.

Le premier ministre a ensuite parlé des moyens que prend le Togo afin d’encourager les investissements du secteur privé. Il a souligné le nouveau code d’investissement du Togo, devant être approuvé par l’Assemblée, ainsi que les avantages fiscaux du Togo et le faible coût de sa main-d’œuvre.

Au terme de la rencontre, les médias d’information ont mené des entrevues avec les participants.

4.    Entrevue avec le ministre des Affaires étrangères et de la Coopération

Les délégués ont rencontré le ministre des Affaires étrangères et de la Coopération, M. Elliott Ohin. Il est l’un des sept membres de l’opposition (UFC) à détenir un poste ministériel. Ce dernier a abordé la question du statut de la CEDEAO, qui, selon lui, a un point de vue commun. Il a parlé de la réponse de la CEDEAO à l’impasse politique en Côte d’Ivoire. Tout en affirmant que la situation pourrait avoir une incidence sur le Togo et sur la région, le ministre a indiqué que la position du Togo était pacifique.

Le ministre Ohin a ensuite traité de la question de la transition du Togo vers la  démocratie. Il a indiqué que le pays avait connu une longue période de luttes intestines et que, après les élections de 2010, le gouvernement avait tendu la main à l’opposition. Un apaisement en a résulté. Maintenant, le parti majoritaire et les parties minoritaires doivent collaborer afin de réduire la misère et favoriser le développement.

Le ministre a aussi parlé de l’unification africaine et de l’intégration régionale. Il a cependant indiqué que la principale priorité du Togo était le redémarrage du pays et la promotion du développement.

Le ministre a remercié la délégation de sa visite et a exprimé l’espoir qu’elle agirait comme ambassadrice du Togo au Canada.

RENSEIGNEMENTS SUPPLÉMENTAIRES

La délégation a assisté à des séances d’information présentées par des responsables canadiens à Abuja et à Accra.

À Abuja et à Accra, la délégation a assisté à des réceptions données par les hauts‑commissaires du Canada, où elle a rencontré un vaste segment du monde politique, de la société civile, des gens d’affaires et du corps diplomatique du Nigeria et du Ghana. 

À Lomé, la délégation a tenu un déjeuner à l’intention des parlementaires togolais.

CONCLUSION

Le Nigeria, le Ghana et le Togo sont des pays très différents, aux défis très différents. Le Nigeria, qui est le pays le plus peuplé et le plus puissant de la région de la CEDEAO, est une nouvelle démocratie. Il constitue certes la deuxième économie d’Afrique, mais les écarts de revenus y sont grands. Les infrastructures des secteurs de l’énergie et des transports sont insuffisantes. Les affrontements violents y sont courants et, en raison des attentats récents à Abuja, la situation relative à la sécurité de la délégation était tendue. Le Nigeria a néanmoins un vaste potentiel.

Abuja est une ville moderne prospère. Or, dans sa banlieue, les délégués ont visité le site d’un projet de développement dans une agglomération sans statut officiel, dont les résidants n’ont pas accès à des installations sanitaires de base. La délégation a pu mesurer l’immensité du défi que doit relever le Nigeria afin d’atténuer les inégalités, même s’il dispose d’impressionnantes ressources financières et naturelles. Étant donné l’importance de la sécurité pour un pays aussi vaste et complexe que le Nigeria, les délégués sont d’avis que ces inégalités doivent être corrigées.

On a exposé à la délégation certains des défis qui se posent aux gens d’affaires au Nigeria. L’établissement de relations personnelles est, de toute évidence, essentiel aux affaires. Toutefois, le manque de transparence et de responsabilisation pose problème. De plus, d’autres pays, comme la Chine, tentent vigoureusement de saisir les débouchés qui s’offrent. Le Nigeria a de nombreux besoins urgents en matière d’infrastructure, mais les entreprises canadiennes qui veulent profiter de ces possibilités doivent être disposées à s’engager à long terme.

La question de la réputation du Nigeria comme point d’origine d’arnaques sur Internet a été soulevée à quelques reprises. Les dirigeants nigérians sont au courant de cette réputation et sont impatients de montrer le pays sous un meilleur jour.

Les membres de la délégation ont discuté des préparatifs en vue des élections d’avril 2011; ils ont en outre vu, à divers endroits d’Abuja, des groupes de gens faire la file afin de s’inscrire sur la liste électorale. La délégation s’est fait dire que le matériel d’inscription des électeurs avait connu certains problèmes, mais que la Commission électorale nationale indépendante était au courant de ces difficultés. Les délégués avaient bon espoir que les élections soient menées de façon équitable et étaient d’avis que la communauté internationale devrait y prendre part.

La délégation a aussi appris que le conflit dans le nord du pays résulte davantage de l’installation de colons dans de nouveaux secteurs que de tensions entre chrétiens et musulmans. Les délégués ont jugé que le gouvernement doit agir de toute urgence pour régler le dossier des attentats meurtriers.

Sur le plan de la santé, les membres de la délégation ont appris que beaucoup d’enfants meurent avant l’âge de cinq ans de maladies par ailleurs évitables; cette question a constitué une inquiétude pour la délégation. Comme on l’a déjà mentionné, les délégués ont observé les conditions insalubres dans lesquelles vivent de nombreuses personnes. Les délégués ont aussi été informés du taux élevé de décès maternels. Ils ont cependant été heureux d’apprendre que le Nigeria a un plan pour s’attaquer à ces problèmes, même s’il reste beaucoup à faire. Les délégués ont été particulièrement impressionnés par l’approche qu’utilise la Clinton Foundation, qui consiste à passer au problème suivant, une fois que les objectifs ont été atteints.

En ce qui concerne les relations internationales du Nigeria, la délégation a été encouragée par le niveau d’engagement du pays pour ce qui est de trouver une solution à l’impasse politique en Côte d’Ivoire. Le travail à cet égard se fonde sur le respect de la primauté du droit.

La délégation a aussi appris qu’il reste encore du travail à accomplir en ce qui touche le respect des droits de la personne, mais que l’on travaille en ce sens. Les délégués ont bon espoir que le travail sur la question du respect des droits de la personne se poursuivra.

Les relations entre le Canada et le Nigeria sont bonnes; le Canada est respecté pour avoir appuyé le peuple nigérian lors du règne des dictatures militaires. Aucune divergence importante n’a été soulevée et les responsables nigérians ont dit être heureux que leurs préoccupations au sujet de l’obtention de visas soient prises en compte. La délégation a dit croire que le gouvernement du Canada doit continuer à aider le peuple et le gouvernement du Nigeria dans leurs efforts pour améliorer la sécurité et renforcer la démocratie et la primauté du droit.

L’éducation est un secteur où une aide accrue du Canada serait bien accueillie. Le système d’éducation canadien a bonne réputation et les membres de la délégation ont été informés qu’il serait utile d’étudier les possibilités d’amélioration de l’éducation au Nigeria.

Le Ghana est un modèle de stabilité dans la région. Depuis le rétablissement de la démocratie multipartite, en 1992, le pays a assisté à plusieurs changements de pouvoir démocratiques et pacifiques. Son économie se développe et il s’approche du statut de pays à revenu intermédiaire. Cependant, des écarts de revenus existent encore et la pauvreté persiste dans les régions rurales et dans le nord du pays. Le gouvernement reconnaît la situation et tente d’y remédier. Le gouvernement a aussi des plans pour la gestion des revenus pétroliers, qu’il vient de commencer à toucher.  Les délégués ont remarqué le niveau de développement général à Accra et dans sa banlieue. La situation relative à la sécurité était beaucoup moins tendue qu’à Abuja.

Lors de sa visite au Parlement du Ghana, qui siégeait, la délégation s’est sentie honorée d’être présentée à l’assemblée, en plus d’être impressionnée par le niveau du débat. Les délégués ont aussi apprécié leur franche discussion avec leurs homologues ghanéens. Les membres de la délégation ont eu l’impression que ces discussions, ainsi que le débat qu’ils ont observé, constituaient un bon indice de la maturité relative de la démocratie ghanéenne.

Les coprésidents de la délégation et M. Christopherson ont eu l’honneur d’être reçus par le président du Ghana et ont dit être reconnaissants de l’entretien qu’ils ont eu. Les délégués ont été encouragés par la collaboration du Ghana avec ses partenaires de la CEDEAO afin de trouver une solution à l’impasse politique en Côte d’Ivoire. Ils se sont rendu compte que de nombreux facteurs doivent être pris en compte, mais ils ont bon espoir qu’une solution politique sera trouvée, dans le respect de la primauté du droit, des principes démocratiques et des normes de la CEDEAO.

La délégation a dit être heureuse que le Ghana ait un plan pour la gestion des revenus pétroliers. Les responsables du Ghana sont conscients que les revenus pétroliers peuvent entraîner des distorsions dans l’économie et semblent prêts à faire preuve de leadership afin que ces revenus soient investis judicieusement. Les membres de la délégation ont aussi été encouragés d’apprendre que la gestion des questions sociales, comme l’éducation, le logement et la gestion des déchets, et que l’atteinte des OMD font partie de l’approche du gouvernement.

La délégation a été reconnaissante d’avoir l’occasion de rencontrer des membres de la communauté des gens d’affaires canadiens. On a expliqué aux délégués que, même si des défis se posent aux gens d’affaires au Ghana, ils ne sont pas aussi importants qu’ailleurs dans la région. Comme partout en Afrique, les relations personnelles et la compréhension de la culture locale sont importantes pour la réussite des affaires.

En ce qui concerne l’aide au développement, le gouvernement s’attend à ce que la relation avec les pays donateurs change au cours des dix prochaines années, à mesure que le Ghana s’approche du statut de pays à revenu intermédiaire. On s’attend à ce que la relation d’aide se transforme en partenariat. Le gouvernement a dit espérer vivement que les donateurs récompensent le bon développement et qu’ils continuent à l’aider dans sa transition. La délégation est du même avis. 

Malgré ses réussites, le Ghana doit relever de nombreux défis. Les délégués ont pris conscience de certains d’entre eux, notamment au centre correctionnel pour filles d’Accra, où ils ont été touchés par le jeune âge des détenues. Ils ont dit avoir bon espoir que la formation et que l’approche en matière de traitement favorisent leur intégration. 

La stabilité générale du Ghana constitue un avantage évident dans cette région, où les conflits sont fréquents. C’est en raison de cette stabilité que le Centre International Kofi Annan de Formation au Maintien de la Paix et le Dépôt humanitaire du Programme alimentaire mondial y sont installés. Les délégués ont été impressionnés par la façon dont ces établissements sont gérés ainsi que par la modernité de leurs installations. 

Pour ce qui est du Dépôt humanitaire du Programme alimentaire mondial, la délégation a dit croire que l’on pourrait mieux promouvoir ses services au Canada. Les organismes non gouvernementaux participants, comme CARE et Vision mondiale, pourraient utiliser le réseau de dépôts de réponse humanitaire des Nations Unies (UNHRD) à titre de guichet unique pour les services d’approvisionnement, de transport et d’import-export. En temps de crise humanitaire internationale, cette façon de faire pourrait s’avérer efficace pour aider ceux qui en ont besoin.

Au sujet des relations du Ghana avec le Canada, la délégation a dit croire que la relation à long terme des deux pays ainsi que le fort appui du Canada à l’égard du développement du Ghana ont suscité beaucoup de bonne volonté. De nombreux responsables ghanéens, à commencer par le président, ont, avec le Canada, des liens personnels pouvant permettre de resserrer davantage cette relation. La délégation a constaté que les Ghanéens et les Canadiens ont un point de vue semblable. Les perspectives du Ghana sont bonnes, et bien qu’il s’apprête à devenir un pays à revenu intermédiaire, il aura encore de nombreux défis à relever. L’aide continue du Canada contribuera beaucoup à assurer une transition sans heurts. Plus particulièrement, le Canada pourrait aider le Ghana à améliorer son système d’éducation. Qui plus est, le Ghana est un acteur régional important et la coopération entre les deux pays, particulièrement en matière de maintien de la paix, est un élément important de ce rôle. La délégation appuie son statut à titre de pays ciblé.

Le Togo est le moins développé des trois pays. Il vient à peine de sortir d’une longue période de conflit et doit surmonter les effets de nombreuses années de stagnation. Des défis de taille attendent le pays en matière de développement. Toutefois, des progrès doivent être réalisés pour que la population appuie les réformes.

À Lomé, la délégation a remarqué les effets du long isolement du pays de la communauté internationale. Le niveau de développement est nettement moins élevé qu’à Abuja ou à Accra. Au Togo, la population se préoccupe d’abord d’obtenir les biens essentiels à la survie ainsi que de la nourriture en quantité suffisante. Ces défis sont particulièrement difficiles à relever en raison de la détérioration des infrastructures du pays.

La rencontre avec les parlementaires togolais a donné aux délégués l’impression que les parlementaires étaient impatients d’oublier les conflits récents et de collaborer au redémarrage du pays. À cette étape du développement du pays, les membres de l’opposition sont enclins à appuyer le programme du gouvernement, plutôt que de le critiquer durement. Les parlementaires sont aussi conscients de leur travail dans le domaine des droits de la personne. Par contre, les mesures que peuvent prendre les parlementaires togolais sont, en général, limitées en raison du manque de ressources.

Les délégués ont été frappés par les commentaires du premier ministre Houngbo, voulant que, pour réussir, les réformes doivent s’accompagner de dividendes. Les délégués ont reconnu que le gouvernement d’unité nationale, récemment formé, en est à ses tout premiers pas et que les réformes doivent être menées avec précaution. En revanche, ils ont été encouragés par les propos du premier ministre, lorsqu’il a affirmé qu’il était nécessaire de respecter les droits de la personne.

La délégation a été encouragée par l’appui du Togo à l’égard de la position de la CEDEAO sur l’impasse politique en Côte d’Ivoire. 

Si le pays entreprend des réformes économiques et tente de créer les conditions propices à l’investissement, il reste qu’il faudra du temps avant d’obtenir des résultats. Dans l’intervalle, le Togo aura encore besoin de l’aide de la communauté internationale. La délégation croit que le Canada serait bien placé pour accorder une plus grande attention au développement de ce pays.

En ce qui concerne les relations avec le Canada, certaines personnalités des plus hautes sphères du gouvernement entretiennent des liens personnels avec le Canada, qui constitue un pays auquel elles vouent un grand respect. Les Togolais, qui ont tendance à se sentir oubliés, étaient reconnaissants de la simple visite. Les responsables togolais sont aussi reconnaissants de l’aide que le Canada lui apporte par des voies multilatérales, comme le PAM . Les délégués ont dit croire que, étant donné la précarité de la nouvelle démocratie au Togo, toute aide du Canada à son égard serait fort appréciée. Compte tenu de l’état de développement du pays à l’heure actuelle, les membres de la délégation ont dit croire que le Canada peut jouer un plus grand rôle.

Comme on l’a mentionné précédemment, au moment de la visite de la délégation, la haute-commisssaire du Canada récemment nommée au Ghana, S.E. Trudy Kernighan, n’avait pas encore reçu son accréditation pour le Togo. La délégation a soulevé la question auprès des responsables togolais qu’elle a rencontrés et espère que Mme Kernighan obtiendra son accréditation le plus rapidement possible.

Comme on l’a indiqué à la section sur les questions clés, l’un des buts de la délégation était d’approfondir la compréhension de l’Association au sujet des organisations régionales africaines. Cette visite, ainsi que la visite précédente de l’Association au Bénin et au Burkina Faso, ont donné à la délégation le sentiment que la CEDEAO fonctionne relativement bien.

Les délégués ont en effet été impressionnés par les efforts réalisés par les trois pays afin de collaborer avec leurs partenaires de la CEDEAO pour régler la question de l’impasse politique en Côte d’Ivoire. (En effet, l’Association a publié un communiqué à cet égard, dont une copie est présentée à l’annexe.) Dans chacun des pays, la délégation a été informée que d’intenses activités diplomatiques étaient en cours parmi les pays de la région afin de tenter de résoudre l’impasse. Les délégués ont été encouragés par le fait que les pays de la région partagent le point de vue qu’ils ne peuvent laisser la Côte d’Ivoire donner le mauvais exemple, particulièrement si l’on tient compte du fait que quelque 20 pays d’Afrique doivent tenir des élections présidentielles ou législatives en 2011. Les délégués ont aussi remarqué la dynamique au sein de la CEDEAO, où les pays membres collaborent à l’élaboration de positions communes tout en veillant à leurs propres intérêts. 

Lors de leurs rencontres avec les responsables de la CEDEAO, les délégués ont été impressionnés par le travail réalisé afin de favoriser la coopération entre les pays de la région. Ils se sont toutefois rendu compte que la capacité des institutions de la CEDEAO est limitée.

Les délégués ont dit croire que le gouvernement du Canada devrait continuer à appuyer la contribution positive de la CEDEAO à l’intégration et à la stabilité régionale en Afrique occidentale. À cet égard, on encourage le gouvernement canadien à porter une attention particulière à la dynamique au sein de la CEDEAO.

Pour ce qui est de l’intégration régionale et des efforts afin de développer le commerce entre les pays de la CEDEAO, la délégation a été informée que ces pays ne sont pas prêts à établir une union monétaire à l’échelle de la région. Avant qu’une telle union puisse être réalisée, les pays doivent pourvoir à leurs besoins, comme l’amélioration de l’approvisionnement en énergie et des liens de transport. La délégation a été directement témoin de ces besoins lors de son voyage aller-retour par voie terrestre entre Accra et Lomé. La route, qu’empruntent les camions de transport, est dans un état lamentable et les procédures douanières sont désordonnées. 

Comme au cours de son autre visite en Afrique, la délégation a souligné la façon dont des pays tels que la Chine et l’Inde accroissent leur présence dans la région. En ce qui concerne le rôle de la Chine dans la région, la délégation a appris qu’il était difficile de refuser son aide. Les pays se rendent certes compte que la Chine sert ses propres intérêts en Afrique, mais ils croient que le fait d’accepter son aide peut aussi profiter à l’Afrique. On a aussi indiqué à la délégation que les Chinois s’efforcent de cultiver, auprès des décideurs, le genre de relations nécessaires afin de faire des affaires en Afrique.

Enfin, la délégation a été en mesure de mener des entrevues avec des journalistes locaux, dans les trois pays, ce qui indique une plus grande liberté de presse.

REMERCIEMENTS

Les membres de la délégation désirent remercier le haut‑commissaire du Canada, S. E. Christopher Cooter, ainsi que M. Christian DesRoches, Mme Trina Oviedo, M. David Ross, M. Hima Himawan et Mme Teresa Holmes, qui ont contribué à faire de la portion nigériane de leur visite un succès. La délégation aimerait de plus remercier MM. Otive Igbuzor et Orji Ogbureke, du African Centre for Leadership, Strategy and Development et M. Philip Asante de CPCS Transcom. La délégation aimerait en outre exprimer sa reconnaissance au haut‑commissaire du Nigeria au Canada, S.E. Iyorwuese Hagher, pour son aide quant à l’organisation du programme de la délégation.

Les membres de la délégation désirent remercier le vice-président adjoint du Parlement du Ghana, l’honorable Mike Oquaye (député), la haute‑commissaire du Canada, S.E. Trudy Kernighan, de même que MM. Charles Longtin et Ian Myles et Mmes Nuala Lawlor, Aoife Gibbons, Cheryl Gopaul et Eunice Dadson, qui ont contribué au succès de leur visite au Ghana. Les membres de la délégation aimeraient aussi remercier Mme Stella Bentsi‑Enchill ainsi que les membres du club Zonta d’Accra pour leur présentation au centre correctionnel pour filles d’ Accra. Les membres de la délégation désirent remercier le commandant du KAIPTC, le major‑général Christian Edem Kobla Dovlo, pour avoir rendu la visite possible, ainsi que Mmes Aissatou Fall et Margaret Sosuh du Programme Genre, Femmes, Paix et Sécurité pour leur présentation instructive. La délégation veut aussi exprimer sa reconnaissance à MM. Martin Walsh et Ismail Omer du Programme alimentaire mondial, pour avoir accueilli la délégation au dépôt du PAM à Accra. Les membres de la délégation aimeraient aussi remercier le haut‑commissaire du Ghana au Canada, S.E. Richard Benjamin Turkson, pour son aide quant à l’organisation de la visite.

En ce qui concerne la visite au Togo, les membres de la délégation désirent remercier le président de l’Assemblée nationale du Togo, l’honorable Abbas Bonfoh. Ils aimeraient aussi exprimer leur reconnaissance pour les efforts particuliers du ministre des Affaires territoriales, l’honorable Dédé Ahoéfa Ekoué, aux fins de l’organisation du programme de la délégation. La délégation souhaite remercier de nouveau M. Charles Longtin pour son aide quant à la portion togolaise de la visite. Elle tient aussi à remercier l’ambassadeur du Togo au Canada, S.E. Bawoumondom Amelete et l’ambassadeur du Togo au Ghana, S.E. Jean-Pierre Gbikpi-Benissan, ainsi que le consul honoraire du Canada au Togo, M. Mark Antoine et son épouse, Mme Anara Makacheva. La délégation exprime aussi sa reconnaissance à M. Rasheed Draman, du Centre parlementaire, pour avoir contribué à approfondir la compréhension des délégués au sujet de la région.

Respectueusement soumis,

L’honorable Mauril Bélanger, C.P., député, coprésident

Association parlementaire Canada‑Afrique

L’honorable Raynell Andreychuk, sénatrice, coprésidente

Association parlementaire Canada‑Afrique

 



[1] Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme, Déclaration de principes politiques de la CEDEAO (A/DCL.1/7/91) ABUJA , 4 - 6 JUILLET 1991 (Extraits), http://www2.ohchr.org/francais/law/compilation_democracy/ecowasdec.htm.

[2] Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest, Protocole A/SP1/12/01 sur la démocratie et la bonne gouvernance, décembre 2001, http://www.oecd.org/dataoecd/56/22/38873718.pdf.

[3] Opérations des Nations Unies en Côte d’Ivoire, Presidential Elections http://www.un.org/en/peacekeeping/missions/unoci/elections.shtml.

[4] Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest, communiqué, Session extraordinaire de la Conférence des chefs d’État et de gouvernement sur la Côte d’Ivoire, no 192/2010, 24 décembre 2010, http://news.ecowas.int/presseshow.php?nb=192&lang=en&annee=2010.

[5] Perspectives Économiques en Afrique, Nigeria : Vue d’ensemble, août 2010, http://www.africaneconomicoutlook.org/fr/countries/west-africa/nigeria/ (consulté le 10 janvier 2011).

[6] Programme des Nations Unies pour le développement, Population living below $2 a day (%), Rapport sur le développement humain 2009, http://hdrstats.undp.org/en/indicators/103.html (consulté le 3 mars 2010).

[7] Organisation mondiale de la santé, Nigeria: Health Profile, 13 août 2010, http://www.who.int/gho/countries/nga.pdf (consulté le 27 janvier 2011).

[8] Avert, HIV and AIDS in Nigeria, http://www.avert.org/aids-nigeria.htm (consulté le 27 janvier 2011).

[9] Perspectives Économiques en Afrique, Ghana : Vue d’ensemble, août 2010, http://www.africaneconomicoutlook.org/fr/countries/west-africa/ghana/, (consulté le 1er février 2011).

[10] Organisation Mondiale de la santé, Ghana: Health Profile, 13 août 2010, http://www.who.int/gho/countries/gha.pdf (consulté le 1er février 2011).

[11] Avert, Sub-Saharan Africa HIV & AIDS Statistics, http://www.avert.org/africa-hiv-aids-statistics.htm (consulté le 1er février 2011).

[12] Perspectives Économiques en Afrique, Togo : Vue d’ensemble, le 3 août 2010, http://www.africaneconomicoutlook.org/fr/countries/west-africa/togo/ (consulté le 2 février 2011).

[13] Programme des Nations Unies pour le développement, Population living below $2 a day (%), Rapport mondial sur le développement humain 2009, http://hdrstats.undp.org/en/indicators/103.html (consulté le 3 mars 2010).

[14] Organisation mondiale de la santé, Togo: Health Profile, 13 août 2010, http://www.who.int/gho/countries/tgo.pdf (consulté le 2 février 2011).

[15] Avert, Sub-Saharan Africa HIV & AIDS Statistics, http://www.avert.org/africa-hiv-aids-statistics.htm (consulté le 1er février 2011).

[16] Bénin, Burkina Faso, Côte d’Ivoire, Guinée-Bissau, Mali, Niger et Sénégal.

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