L’Association parlementaire canadienne
de l’OTAN a l’honneur de présenter son RAPPORT sur la session de printemps de
l’Assemblée parlementaire de l’OTAN, tenue à Oslo, en Norvège, des 22 au
26 mai 2009. La délégation canadienne était composée de la sénatrice
Raynell Andreychuk, de la sénatrice Jane Cordy, du sénateur Joseph A. Day, du
sénateur Pierre-Claude Nolin et de M. Claude Bachand, député.
Aperçu
Avant les rencontres officielles, la
délégation a rencontré l’ambassadrice Jillian Stirk et des membres de
l’ambassade canadienne à Oslo. L’ambassadrice Stirk a présenté à la délégation
des informations sur diverses questions susceptibles d’être abordées à
l’Assemblée, ainsi que sur le rôle de la Norvège dans l’OTAN et les
préoccupations de ce pays concernant les questions qui seraient débattues au
cours des prochains jours.
La session de printemps est ouverte par
le président de l’Assemblée parlementaire de l’OTAN (AP OTAN), M. John
Tanner. Ce dernier fait remarquer que l’OTAN est une équipe qui a ses forces
et ses faiblesses; cela dit, ce qui est primordial, dans une équipe, c’est
qu’elle agisse avec cohésion, malgré les divergences de vue de ses membres. Le
plus important, selon M. Tanner, c’est que les membres de l’Alliance
sont liés par une communauté de valeurs et qu’ils s’acquittent de leurs
obligations et de leurs engagements. Il ajoute que ce que l’Alliance combat en
Afghanistan, c’est une force qui rejette « nos principes ». Il
poursuit en exprimant sa conviction que la tolérance à l’endroit de ceux qui
tentent de saper nos valeurs communes n’est pas une vertu et que les membres de
l’Alliance doivent expliquer à leurs électeurs pourquoi « nous sommes en
Afghanistan ». D’après lui, l’AP OTAN pourrait jouer un rôle important en
la matière.
L’Assemblée entend ensuite M.
Jens Stoltenburg, premier ministre de la Norvège. M. Stoltenburg
commente les grandes questions de sécurité auxquelles l’OTAN est confrontée.
Figurent parmi elles le risque de prolifération nucléaire (il accorde une
attention particulière au programme nucléaire nord-coréen), le désarmement et
l’Afghanistan. Le premier ministre attire également l’attention sur des
développements récents dans le Grand Nord et certaines aspirations et
politiques conflictuelles des principaux protagonistes dans cette région. Il
met en relief la nécessité d’un renforcement de la coopération entre les
gouvernements pour gérer l’activité humaine croissante dans cette partie du
monde.
La parole est ensuite donnée à
M. Kai Eide, Représentant spécial du secrétaire général des Nations Unies
pour l’Afghanistan et directeur de la Mission d’assistance des Nations Unies en
Afghanistan (MANUA). M. Eide met l’accent sur les développements positifs
survenus en Afghanistan. Selon lui, il s’est fait une percée en matière de coopération
régionale au cours de la dernière année. Toutefois, des défis demeurent, comme
ceux du renforcement de l’armée afghane, de la lutte contre la corruption et du
relèvement de l’efficacité de l’aide. Le conférencier dit croire qu’il faut
accorder davantage d’importance au renforcement des capacités. Une période
d’échanges fait suite à la communication de M. Eide.
L’Assemblée entend ensuite Mme Jozefina
Topalli, Présidente du Parlement d’Albanie, et M. Luka Bebić,
Président du Parlement de Croatie. Mme Topalli considère que
le Sommet tenu par l’OTAN à Strasbourg a constitué l’événement le plus
important de l’histoire de son pays, abstraction faite de son accession à
l’indépendance. Prenant acte du fait que le rêve de l’Albanie de devenir membre
de l’OTAN s’est réalisé, M. Bebić remercie l’Assemblée de la
ratification dans les délais prévus de l’adhésion de la Croatie à
l’Organisation.
Après l’adoption du rapport du
trésorier, le sénateur Pierre-Claude Nolin, les participants discutent avec les
membres permanents du Conseil de l’Atlantique Nord. Avant un débat général,
M. Jaap de Hoop Scheffer, secrétaire général de l’OTAN, s’adresse à
l’Assemblée. Il fait observer que des forces de l’OTAN sont actuellement
déployées en Afghanistan, au Kosovo, en Irak et dans la Méditerranée. De plus,
l’Alliance mène des opérations de lutte contre la piraterie au large de la
Corne de l’Afrique, faisant ainsi la preuve de sa polyvalence.
Le secrétaire général souligne que sur
le plan politique, aussi, l’OTAN a été très active. La France a récemment été
réintégrée dans la structure militaire de l’OTAN et l’Alliance a accueilli de
nouveaux membres. Ces développements sont importants, estime-t-il, parce que
l’Alliance devient de plus en plus une tribune de débat politique. Toutefois,
pour le secrétaire général, il ne faut pas en conclure que tout se passe
toujours à merveille. L’Alliance est confrontée à trois grands défis :
solidarité, défis institutionnels et défis touchant les ressources. On peut
maintenant s’attaquer à ces défis dans le cadre du nouveau concept stratégique.
Selon le secrétaire général, ce nouveau
concept stratégique doit décrire la nouvelle donne, il doit donner une nouvelle
définition de ce qui constitue une menace et il doit reconfirmer la nouvelle
cohésion de l’Europe. Enfin, le nouveau concept stratégique doit traiter de la
relation de l’OTAN avec la Russie. En guise de conclusion, il signale que
l’apport de l’Assemblée parlementaire de l’OTAN revêt de l’importance, du fait
des compétences collectives de cette instance.
Pendant cette séance, une des
principales questions abordées par la Commission politique a trait aux
relations de l’OTAN avec la Russie. La sénatrice Raynell Andreychuk, du Canada
présente un rapport sur la redéfinition des relations avec la Russie. Elle
affirme que l’OTAN doit trouver des moyens de nouer un dialogue constructif
avec la Russie et qu’elle doit mettre à profit toutes les plates-formes dont
elle dispose. Le rapport cerne des éléments de convergence qui pourraient jeter
les bases d’un dialogue revivifié avec Moscou. En outre, il examine les
priorités stratégiques et les défis internes de la Russie, et propose des
domaines sur lesquels on pourrait établir un partenariat mutuellement
bénéfique. La sénatrice Andreychuk ajoute qu’à son avis, un partenariat
fructueux entre l’OTAN et la Russie est essentiel si on veut relever toute une
brochette de défis actuels en matière de sécurité, dont l’instabilité en
Afghanistan et en Asie centrale, le terrorisme, la piraterie, la prolifération
des armes de destruction massive et le contrôle des armements.
S’agissant de l’Afghanistan, fait-elle
valoir, la Russie pourrait faciliter la livraison de fournitures à la Force
internationale d’assistance à la sécurité (FIAS) de l’OTAN en élargissant les
droits de survol aérien de son territoire et en aménageant des couloirs de
transit de matériel militaire. En terminant, madame Andreychuk fait une mise en
garde : il ne faut pas qu’un resserrement de la coopération OTAN-Russie
soit dirigé contre qui que ce soit, ni ne survienne au détriment d’un pays
membre ou partenaire de l’OTAN.
Un des témoignages les plus poignants
est celui du major-général Patrick Cammaert (à la retraite), des Pays-Bas, qui
met en lumière le problème de la violence contre les femmes et les fillettes
dans les situations de conflit. L’exposé est fait à l’occasion d’une réunion
sur des questions sexospécifiques organisée par la délégation norvégienne.
M. Cammaert fait observer que la promotion des femmes dans nos forces
armées et la discussion de la violence sexuelle subie par la population civile
ne constituent pas simplement une question sexospécifique; c’est une question
cruciale de sécurité, à laquelle il faut s’attaquer d’extrême urgence, vu
l’ampleur du phénomène. À son avis, l’échelle de la brutalité avec laquelle les
femmes et les fillettes sont traitées pendant les conflits armés dépasse
l’entendement et relève des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité.
Tous les participants s’entendent pour estimer qu’il est essentiel que tous les
membres de la communauté internationale agissent à l’unisson et prennent des
mesures pour protéger les populations civiles. On fait remarquer, au cours du
débat, que la loi sur la famille récemment adoptée en Afghanistan et signée par
le président Karzaï donne un exemple de plus d’un manque de traitement sérieux
du problème. De nombreux parlementaires expriment leur indignation devant la
réaction timorée de la communauté internationale face à cette question. Il est
inconvenant, et c’est même contraire à ses principes, que l’Alliance tolère
toute forme de paix qui nuit à la sécurité « réelle » et
« absolue » des femmes.
Pendant ses délibérations, la
Commission de la défense et de la sécurité entend M. Espen Barth Eide,
secrétaire d’État, chargé du ministère norvégien de la Défense, sur la façon
dont la Norvège envisage la problématique de la sécurité et sur le renforcement
de la pertinence de l’OTAN. M. Eide présente le bilan que fait son pays du
Sommet de l’OTAN, ainsi que le contexte stratégique évolutif auquel l’OTAN doit
s’adapter. Il décrit les propositions que fait la Norvège pour accroître la
pertinence de l’OTAN, à la fois « en son sein » et « à
l’extérieur », et son approche du Grand Nord. Enfin, il donne un aperçu des
vues de la Norvège sur la présence de l’OTAN en Afghanistan. M. Eide
précise que l’OTAN va demeurer la pierre angulaire de la sécurité de la Norvège
et la principale instance multilatérale de sécurité pour le dialogue entre les
États-Unis, le Canada et l’Europe. De plus, l’OTAN devrait mettre l’accent,
selon lui, à la fois sur les défis qui se posent à elle à des distances
stratégiques et sur ceux auxquels elle est confrontée plus près de son
territoire.
M. Eide considère qu’il faut
revoir le large ensemble de questions touchant les tâches et les
responsabilités de l’OTAN plus près de son territoire. La situation dans le
Grand Nord est la première priorité des politiques du gouvernement de son pays.
La Norvège, précise-t-il, voudrait que l’OTAN, elle aussi, accorde davantage d’importance
à cette question. Tout en le faisant, elle doit également être disposée à
prendre en compte les inquiétudes de la Russie et rechercher des avenues de
coopération.
La Commission entend ensuite
l’ambassadeur Gentilini, haut représentant civil de l’OTAN en Afghanistan.
Plus positif, il estime que c’est la vie politique, et non pas les problèmes de
sécurité, qui domine les esprits à Kaboul. Il ajoute qu’une des priorités les
plus importantes est de doter comme il convient l’actuelle stratégie d’afghanisation
à long terme. Dans ce contexte, le soutien de la police nationale afghane et sa
formation revêtent une importance particulière.
Après discussion, la Commission étudie
divers projets de rapports.
La Commission de la dimension civile de
la sécurité entend Mme Elisabeth Rasmusson, secrétaire générale
du Conseil norvégien des réfugiés sur les relations entre civils et militaires
dans les zones de conflit. Mme Rasmusson soutient que l’exemple
afghan démontre clairement la nécessité d’un partage consensuel du travail
entre les acteurs militaires et humanitaires dans les situations de
conflit : pendant que les forces armées se consacrent à la stabilisation
de la sécurité et à la lutte anti-insurrectionnelle, les travailleurs
humanitaires mènent leur activité, en s’inspirant de quatre grands principes, à
savoir humanité, neutralité, impartialité et indépendance. Les organisations
humanitaires doivent rester neutres, et bien montrer qu’elles le sont, aux yeux
des autorités et populations locales, si elles veulent être en mesure de bien
faire leur travail.
Prend ensuite la parole devant la
Commission M. Jean-Francois Bureau, secrétaire général adjoint de l’OTAN
pour la diplomatie publique. M. Bureau présente sa réflexion sur le thème
de la diplomatie publique et de la nouvelle génération. Il rappelle à son
auditoire qu’au Sommet de Bucarest, les chefs d’État et de gouvernement des
pays membres ont confié à l’Alliance le mandat de promouvoir le soutien du
public et la compréhension de ses opérations au moyen d’une communication en
temps opportun, exacte, réactive et interactive. La Commission reprend ensuite
l’examen de ses divers projets de rapports.
La Commission des sciences et de la
technologie se penche d’abord sur le projet de rapport sur les changements
climatiques et la sécurité nationale. Le rapport est présenté par le sénateur
Pierre-Claude Nolin (Canada), qui, d’emblée, insiste sur le fait que le monde
va probablement se réchauffer d’au moins quatre degrés Celsius d’ici un siècle.
Il ajoute que les scientifiques lancent un cri d’alarme à propos d’un risque de
changement abrupt du climat en raison de l’affaiblissement de la circulation
des courants océaniques ou de la libération d’énormes volumes de méthane par
suite du dégel du pergélisol. Cela pourrait provoquer une crise et des conflits
portant sur l’eau et les aliments, davantage de phénomènes climatiques extrêmes
et la propagation de maladies tropicales. Le Rapporteur souligne qu’il incombe
à l’AP OTAN de veiller à ce que la volonté politique nécessaire face au défi
climatique ne s’effrite pas.
La Commission reçoit également
M. Erik Solheim, ministre norvégien de l’Environnement et du
Développement international, selon lequel il y a consensus sur le fait que les
changements climatiques poseront à l’avenir un grand défi sur le plan de la
sécurité. Prennent également la parole MM. William Potter, Sam Nunn et
Richard Lugar, professeur spécialisé en non-prolifération et directeur du James
Martin Center for Non-Proliferation Studies, Monetary Institute of
International Studies. M. Potter commente la problématique de l’état du
régime de non-prolifération. Il fait remarquer qu’en dépit des prévisions
fatalistes sur une cascade de cas de prolifération, le rythme de progression de
ce problème est actuellement bien inférieur à ce qu’on avait craint.
Enfin, les membres entendent un exposé
de M. Neil Davis, Defence Analytical Service and Advice, ministère de la
Défense du Royaume-Uni. Sa communication porte sur les moyens de relever les
défis de la limitation des budgets de défense et de l’escalade des coûts au
moyen de la collaboration et de la coopération.
La Commission de l’économie et de la
sécurité accueille ensuite Mme Josette Sheeran, directrice
exécutive du Programme alimentaire mondial (PAM) des Nations Unies sur la
problématique de la sécurité alimentaire, plus précisément des aspects de
sécurité de situations de crise et d’urgence sur le plan alimentaire. Mme
Sheeran fait mention de plusieurs opérations de l’OTAN dans lesquelles le
ravitaillement de populations affamées avait largement permis d’éviter que des
crises d’ordre sécuritaire ne dégénèrent en catastrophes humanitaires. L’aide
de l’OTAN aux réfugiés du Kosovo a contribué à l’endiguement de la violence et
de l’insécurité dans les années 1990. Aujourd’hui, le soutien de
l’Alliance à l’Afghanistan permet de maintenir des programmes d’alimentation du
PAM dans 6 000 écoles, au bénéfice de 2,2 millions d’enfants. Mme
Sheeran analyse par la suite les retombées humanitaires et politiques de la
forte poussée des prix des aliments survenue l’année précédente, flambée qui a
provoqué des émeutes dans plus de 30 pays et réduit de moitié la capacité
du PAM de distribuer des vivres.
La Commission entend également le
professeur Dag Harald Claes, du Département de science politique de
l’Université d’Oslo, au sujet des tendances des marchés mondiaux de l’énergie,
pour déterminer s’il faut s’en réjouir ou s’en alarmer. Le professeur Claes
examine le récent coup de fièvre des cours du pétrole, particulièrement l’épisode
où le prix du baril a atteint 120 $, en 2003 et en 2004. Il
fait remarquer que les fluctuations sur les marchés ne sont pas dues à des
variations de la demande. Elles résultent plutôt des distorsions d’origine
politique liées à des conflits et au comportement du cartel. Voilà pourquoi
l’instabilité des cours du pétrole a très peu à voir avec l’état véritable des
réserves. Les coûts de production du pétrole donnent un indice beaucoup plus
fiable d’un éventuel tarissement des réserves. Pour M. Claes, si on fait
abstraction des récentes distorsions des marchés, les 20 dernières années
ont été marquées par une baisse constante du coût de production du pétrole.
Respectueusement soumis,
M. Claude Bachand, député
Association parlementaire canadienne de l’OTAN (AP OTAN)