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CONFÉRENCE INTERNATIONALE SUR LE CHANGEMENT CLIMATIQUE :

COMPTE À REBOURS POUR COPENHAGUE

Les députés Kirsty Duncan et Peter Braid ont représenté la section canadienne de l’Association parlementaire du Commonwealth à la Conférence interparlementaire internationale sur le changement climatique : compte à rebours pour Copenhague (CPICC) organisée par l’APC de Grande-Bretagne au Parlement de Londres du 5 au 11 juillet 2009. La conférence a attiré 70 parlementaires de 37 pays membres ou non membres du Commonwealth qui ont débattu du dossier climatique avec une vaste gamme d’experts et de présentateurs.

La conférence avait pour but d’outiller les parlementaires pour chercher des réponses effectives et justes au changement climatique, dont des mesures d'adaptation et d'atténuation justes, réalistes et inclusives. La priorité de la conférence était l'impact du réchauffement sur les pays pauvres et vulnérables et la responsabilité de la communauté internationale dans l'aide des populations les plus touchées. Voici en résumé les grands thèmes et l'orientation des débats des cinq jours de la conférence.

Portée

Le changement climatique est le grand enjeu de notre génération. La communauté mondiale doit relever collectivement ce défi, en agissant dès maintenant. Chaque retard de 10 ans réchauffe la terre de 0,5 °C. Plusieurs présentateurs ont insisté sur la complexité et l’ampleur de la menace mondiale que présente le réchauffement. Beaucoup d'incertitude entoure des sujets comme le Gulf Stream, le bassin amazonien et les régions polaires. Fonte des glaciers, niveau de la mer, déforestation, changement des cycles météorologiques, effets sur l'agriculture et les réserves alimentaires : autant de sujets de préoccupation évoqués.

Impact sur les pays vulnérables

Les régions les plus vulnérables du globe sont l’Afrique, les deltas de l’Asie, les petits pays insulaires et l’Arctique. Quant aux secteurs les plus vulnérables, il s'agit des réseaux hydrographiques, de l'agriculture tropicale et de la santé humaine dans les régions pauvres. Son Excellence Mohammed Nasheed, président de la République des Maldives, a abordé l’impact immédiat du changement climatique sur sa population. Pays situé à seulement 1,5 m au-dessus du niveau de la mer, les Maldives sont déjà éprouvées par le réchauffement : le niveau de la mer s'élève, les cycles météorologiques changent, la pêche rapporte moins et des habitants doivent déjà se relocaliser. Une question de plus en plus préoccupante concerne les effets du changement climatique sur les droits humains. Les nations vulnérables sont touchées de façon disproportionnée par des changements dans leur mode de vie, l'accès à l'eau et à la nourriture et les menaces à la santé et à la sécurité. On peut voir le changement climatique comme une question humanitaire. Le droit à la nourriture, à l'abri, au gagne-pain, à la santé et à la sécurité, tout cela est menacé. En outre, la hausse du niveau de la mer rapetisse certains pays, entraîne déplacements et migrations forcés et l'apparition de ce que certains appellent les « réfugiés de l’environnement ». Le changement climatique est un multiplicateur de l'instabilité.

Responsabilité d'aider les pays vulnérables

Une tension découle du fait que les pays développés sont les grands responsables de la crise climatique alors que les impacts les plus lourds surviennent dans les pays en développement. Les pays développés ont l’obligation morale d'aider les pays vulnérables et leur population par des stratégies d'adaptation et d'atténuation. Il faut entendre les voix qui s'élèvent sur le front du changement climatique, faire participer de façon significative les personnes touchées par le changement; rendre compte des décisions aux populations touchées.

Stratégies d'adaptation et d'atténuation

La conférence a examiné les stratégies d'adaptation et d'atténuation. En matière économique, l'atténuation peut favoriser la compétitivité. On doit viser l'énergie renouvelable, le nucléaire et la capture du carbone.

La décarbonisation de l'environnement et l'économie durable sont sur la même face de la médaille. Le secteur privé comprend qu'une politique environnementale vigoureuse rapporte sur le plan financier. Alors que nous tentons de stimuler l'économie mondiale, il nous faut également encourager l'investissement dans les emplois verts. Cela aiderait à résoudre la crise économique, celle du crédit et celle du climat. Si les pays peuvent investir dans le système bancaire déficient, ils devraient être disposés à investir dans les stimuli verts. Nous devons viser cette triple réussite : stimuli renouvelables, avec impacts positifs sur l'économie et l'atmosphère.

Les gouvernements peuvent envisager les technologies rentables, les régimes de plafond et de bourse d'émissions, la réglementation et la fiscalité. Ils doivent investir dans la science fondamentale et la recherche-développement visant des technologies viables, comme celle de la capture et du stockage du carbone. Le marché du carbone a la possibilité de transformer positivement l'économie et d'aider à orienter le capital vers les pays en développement.

Action

Les présentateurs ont souligné que l'action nécessite un leadership politique clair. La vision doit venir des hauts dirigeants et viser le long terme. Les gouvernements doivent régir et pénaliser les pollueurs et récompenser ceux qui polluent peu. Ils doivent encourager la recherche universitaire et la technologie et favoriser le milieu des affaires. Ils doivent également répondre aux défis de relever les cibles nationales, puis d'y répondre.

Nous avons besoin d'une action mondiale, appuyée par un plan national. Nous devons réclamer une action vigoureuse malgré les difficultés économiques actuelles; nous avons une responsabilité éthique collective. Il importe que les gouvernements réalisent que les gens opèrent des changements dans leur vie, et veulent également des changements au niveau national et international.


 

Rôle des parlementaires et du Commonwealth

Les parlementaires ont un rôle essentiel à jouer dans la réponse aux défis du changement climatique. Ils occupent une position privilégiée, entre les électeurs de la base et le niveau politique du législateur, pour formuler une réponse à long terme, juste et effective.

Le Commonwealth est vu comme un instrument fondamental pour faire progresser les objectifs essentiels de la démocratie, des droits humains, de la bonne gouvernance et de la règle du droit. Les pays du Commonwealth doivent encourager un dialogue constant et significatif sur le changement climatique au niveau international et collaborer à un accord juste, complet, inclusif et effectif à ce sujet.

Les parlementaires du Commonwealth conviennent de l'énoncé qui suit, formulé aux termes de la conférence :

COMMUNIQUÉ DE LA CONFÉRENCE

1. Nous, 70 parlementaires de 37 parlements et législatures[1] de pays membres ou non membres du Commonwealth, nous sommes réunis aux chambres du Parlement de Londres du 5 au 11 juillet 2009 pour une rencontre pertinente et unique, la Conférence parlementaire internationale sur le changement climatique : compte à rebours pour Copenhague. Cette conférence avait pour but d'équiper les parlementaires à mieux tenir leur pouvoir exécutif responsable d'une réponse effective et juste au changement climatique, en préparation et à la suite de la 14e réunion de la Conférence des parties (CDP) de la Convention-cadre des Nations Unies sur le changement climatique (CCNUCC), à Copenhague, du 7 au 18 décembre 2009.

Notre priorité était d'envisager des stratégies claires et ciblées pour contribuer comme parlementaires à la réponse au défi de notre époque : contrer le réchauffement, le maintenir bien en deçà du point charnière de 2 ºC[2] et appuyer des mesures d'adaptation et d’atténuation, en respectant les droits humains et de façon juste, complète, inclusive et effective.

2. Nous reconnaissons que la prochaine CDP de la CCNUCC à Copenhague sera un moment crucial des négociations internationales sur le changement climatique. Les climatologues et leurs projections indiquent l'urgence d'une politique publique effective pour empêcher le changement d’atteindre un niveau dangereux; les économistes ont souligné que plus on laisse le changement climatique sans contrôle, plus il en coûtera cher d'en atténuer les effets et de s'adapter à ses conséquences; déjà, les groupes et les populations les plus vulnérables du globe doivent lutter pour survivre à ses effets.

3. Nous reconnaissons que les efforts actuels pour réduire les émissions de gaz à effet de serre (GES) sont insuffisants, étant donné l'ampleur des mesures requises; que les émissions de GES doivent être réduites radicalement pour que le taux de réchauffement planétaire demeure bien en deçà du point charnière de 2 ºC; que les plafonds d'émissions doivent refléter la responsabilité des pays industrialisés envers les émissions passées dans l'atmosphère; qu'il faut mobiliser des ressources adéquates pour développer des mesures et des technologies d'atténuation, les partager et les utiliser pour bien contrer la tendance actuelle à un réchauffement planétaire dangereux; enfin, que l'inclusion des mécanismes pour réduire les émissions issues de la déforestation et de la dégradation forestière et le paiement des services environnementaux dans un régime climatique post-2012 sont une occasion intéressante pour les pays forestiers de contribuer à l'atteinte de cet objectif tout en procurant d'importants avantages à leurs populations.

4. Nous reconnaissons que le climat change déjà; que les émissions actuelles de GES entraînent déjà la planète sur la voie d'un réchauffement plus poussé; que malgré qu'ils soient les moins responsables des émissions actuelles et passées de GES, les pays en développement sont déjà les plus durement touchés par le réchauffement et continueront de l'être; que les pays en développement les plus vulnérables sont aussi les moins bien équipés pour répondre aux crises humanitaires et aux défis d'adaptation anticipés et de plus en plus fréquents issus du réchauffement; enfin, que les pays industrialisés ont une responsabilité historique face au changement climatique qui leur impose une obligation : fournir suffisamment de fonds d'adaptation, sous forme de subventions; faire en sorte que ces fonds soient disponibles rapidement et efficacement et, en outre, qu'ils s'ajoutent à l'aide internationale au développement déjà fourni.

5. Nous reconnaissons que les mesures d'adaptation et d'atténuation effectives dépendent du développement et du transfert urgents de technologies convenables, en particulier aux pauvres, et que les pays tant développés qu’en développement ont de l'expertise à offrir.

6. Nous reconnaissons que la hausse du niveau des mers, les inondations, les sécheresses et la désertification causées par l'accélération du changement climatique entraînent déplacements et migrations forcés, et nous réclamons un mécanisme ou protocole mondial reconnaissant les droits des migrants de l'environnement et les responsabilités mondiales à leur égard.

7. Nous accueillons favorablement et encourageons la coordination constante de réunions internationales de haut niveau sur le changement climatique, à intervalle régulier, par la CCNUCC et nous réclamons que les pays développés favorisent des mécanismes, structures et systèmes d'engagement plus inclusifs, afin que la voix des pays en développement soit également entendue dans les processus de négociation.

8. Nous reconnaissons que l'équité et la justice doivent primer, non seulement entre les pays, mais également en leur sein. Il faut accorder plus d’attention aux droits sociaux, économiques et humains dans les négociations et leur résultat. Les principes de l’égalité des sexes et d’une justice égale doivent être pris en compte à toutes les étapes de la formulation des politiques internationales, régionales et nationales sur le climat. Les droits humains des groupes marginalisés, y compris le droit à la terre et le droit à façonner les mesures qui influent sur leur vie, doivent être respectés.

9. À titre de représentants de 37 parlements et législatures, nous exhortons nos gouvernements à :

a. Profiter de ce moment historique pour travailleur de façon concertée, créative et urgente à un accord juste, complet, inclusif et effectif sur le changement climatique.

b. Encourager et appuyer nos négociateurs à la CDP à parvenir à un accord à Copenhague et avant l'expiration du Protocole de Kyoto en 2012.

c. Insister pour une cible mondiale de réduction des émissions de 40 % en deçà du niveau de 1990 d’ici 2020, et pour un investissement rigoureux et durable afin d’atteindre cette cible.

d. Faire en sorte que les politiques et stratégies d'atténuation du changement climatique soient coordonnées aux politiques et stratégies d'adaptation.

e. Combler rapidement l'écart entre les fonds qu’on juge requis pour l'adaptation et ceux qui sont déjà engagés, et libérer facilement ces fonds pour agir rapidement en matière d'adaptation.

f. Adopter une stratégie d’intervention rapide en matière de préparation et d'adaptation aux catastrophes, à titre de réponse rentable au changement climatique et pour protéger les investissements et les acquis passés, présents et futurs de la lutte anti-pauvreté, pour assurer la cohérence des politiques et la bonne utilisation des fonds publics.

g. Rendre l'analyse sur le changement climatique présente dans toutes les politiques, de la santé et de l'éducation à l'immigration et à la défense, pour assurer la cohérence des politiques et la bonne utilisation des fonds publics.

h. Tenir compte des droits humains et des responsabilités à cet égard en vertu des accords internationaux, y compris des engagements envers les droits de la femme et la considération des différences dans le comportement des sexes, dans toutes les politiques et interventions d'atténuation et d'adaptation.

i. Tenir compte des besoins et intérêts de TOUS les intervenants, par la consultation active des groupes : femmes, hommes, enfants, minorités, groupes indigènes, société civile, les ONG, entreprises et industrie.

j. Participer à une coopération nationale, régionale et internationale explorant ouvertement toutes les possibilités de s'attaquer aux causes et conséquences nouvelles, diverses, inter-reliées et transfrontalières du changement climatique.

10. Nous, parlementaires, nous engageons à :

a. Nous inspirer de cette conférence en utilisant notre influence au niveau local, national, régional et international dans le monde pour réclamer un accord juste, complet, inclusif et effectif à Copenhague et sa mise en œuvre effective, efficace et rapide.

b. Entreprendre et encourager l'examen et le débat sur les lois relatives au climat dans nos pays.

c. Élaborer et renforcer la solidarité entre les parlementaires et forger des alliances de tous les partis au niveau local, national, régional et international, avec notamment la formation de comités, d'associations et de réseaux pertinents, cette conférence étant une première étape.

d. Sensibiliser et éduquer nos électeurs et le grand public pour parvenir à un appui massif à une action politique urgente, afin d'atténuer le changement climatique et de s'y adapter.

 

Respectueusement soumis,

 

M. Russ Hiebert, député
Président de la section canadienne de
l’Association des parlementaires du Commonwealth (APC)

 



[1] Australie, Nouvelle Galle du Sud, Bahraïne, Bangladesh, Îles Vierges britanniques, Cameroun, Canada, Assemblée législative de l’Afrique de l’Est, Allemagne, Ghana, Kenya, Kiribati, Lesotho, Malaisie, Maldives, Malte, Mexique, Namibie Népal, Nigéria, Pakistan, Parlement pan-africain, Portugal, Rwanda, Sainte-Lucie, Écosse, Seychelles, Sierra Leone, Sri Lanka, Soudan, Swaziland, Tanzanie, Gambie, Tonga, Tuvalu, Ouganda, Vietnam.

[2] Le point charnière de 2 º C est le niveau au-delà duquel, selon un consensus des scientifiques, les processus et les effets du réchauffement climatique seraient irréversibles et catastrophiques pour les écosystèmes et pour la société humaine sur la planète.

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