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Projet de loi C-508

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2e session, 36e législature,
48-49 Elizabeth II, 1999-2000

Chambre des communes du Canada

PROJET DE LOI C-508

Loi concernant la protection des fonctionnaires qui dénoncent de bonne foi des allégations de conduites répréhensibles dans la fonction publique

Attendu :

Préambule

    QUE le Canada s'est engagé à promouvoir la dignité et les droits fondamentaux de ses fonctionnaires par la protection de ceux qui dénoncent les gaspillages, la fraude, les abus de pouvoir, les violations de la loi ou les menaces pour la santé ou la sécurité publiques;

    QUE le Parlement reconnaît qu'il est dans l'intérêt public de faire en sorte que les fonctionnaires soient libres de signaler de telles situations sans crainte ni risque de représailles ou de discrimination et que la reconnaissance du droit de continuer à communiquer avec le public de manière appropriée reconfirmera et garantira que les charges publiques sont de véritables emplois de confiance dans la fonction publique,

Sa Majesté, sur l'avis et avec le consentement du Sénat et de la Chambre des communes du Canada, édicte :

1. Titre abrégé : Loi sur la protection des droits fondamentaux des dénonciateurs.

Titre abrégé

2. Les définitions qui suivent s'appliquent à la présente loi.

Définitions

« acte protégé » L'un ou l'autre des comportements suivants :

« acte protégé »
``protected behaviour''

    a) la divulgation par un fonctionnaire à un superviseur ou à un organisme public de certains renseignements qui prouvent la violation d'une loi, d'un règlement, d'une règle, d'un code de pratique, d'un énoncé professionnel ou d'une directive qui s'applique au secteur de la fonction publique visé par la divulgation ou qui a été adopté par ce secteur;

    b) la divulgation par un fonctionnaire à un superviseur ou à un organisme public de certains renseignements qui prouvent une mauvaise gestion, notamment l'incompétence et la malhonnêteté, l'inconduite, la mauvaise utilisation ou le gaspillage des ressources ou des fonds publics, la corruption, l'abus de pouvoir, un danger immédiat ou potentiel pour la santé ou la sécurité du public ou des travailleurs, y compris leur bien-être physique et mental;

    c) la divulgation par un fonctionnaire à un superviseur ou à un organisme public de certains renseignements qui prouvent la présence d'un danger immédiat ou potentiel pour l'environnement, la sécurité nationale ou la souveraineté du Canada;

    d) le refus d'un fonctionnaire de prendre part à une activité ou un projet en contravention avec une loi, un règlement, une règle, un code de pratique, une déclaration professionnelle ou une directive qui s'applique au secteur de la fonction publique dans lequel le fonctionnaire travaille ou qui a été adopté par ce secteur;

    e) le refus d'un fonctionnaire de prendre part à une activité ou un projet qui constitue de la mauvaise gestion, une mauvaise utilisation ou un gaspillage des ressources ou des fonds publics, de la corruption, de l'abus de pouvoir, un danger immédiat ou potentiel pour la santé ou la sécurité du public ou des travailleurs, y compris leur bien-être physique ou mental;

    f) le refus d'un fonctionnaire de prendre part à une activité ou un projet qui constitue un danger immédiat ou potentiel pour l'environnement, la sécurité nationale ou la souveraineté du Canada;

    g) la participation d'un fonctionnaire à une initiative ou une activité licite de liberté d'expression.

« fonctionnaire » Selon le cas :

« fonctionnai re »
``employee''

    a) personne qui est ou a été employée - ou dont la candidature à un poste est en voie d'examen - au sein de l'administration publique fédérale, y compris :

      (i) les secteurs de la fonction publique auxquels s'applique la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, la Loi sur les relations de travail au Parlement, la Loi sur la défense nationale ou la Loi sur la Gendarmerie royale du Canada,

      (ii) une société d'État, une société d'État mère ou un établissement public au sens de la Loi sur la gestion des finances publiques;

    b) quiconque fournit des biens ou des services aux termes d'un contrat à l'un des secteurs de la fonction publique ou des sociétés d'État visés à l'alinéa a).

« mesure administrative interdite » Vise notamment :

« mesure administra-
tive interdite »
``prohibited personnel action''

    a) la recommandation ou la menace de congédiement ou le congédiement, la suspension, le congédiement déguisé, l'affectation ou la mutation imposée, la réprimande ou la rétrogradation d'un fonctionnaire;

    b) toute mesure défavorable prise à l'encontre d'un fonctionnaire et touchant les conditions de son emploi, notamment le refus de promotion, d'embauche ou de toute autre mesure administrative favorable;

    c) la recommandation, l'application ou la menace de mesures de représailles, disciplinaires ou discriminatoires à l'encontre d'un fonctionnaire qui s'est livré ou a manifesté l'intention de se livrer à un acte protégé.

« organisme public » Selon le cas :

« organisme public »
``public body''

    a) l'une ou l'autre chambre du Parlement l'un de ses membres, un comité de celle-ci ou un comité mixte des deux;

    b) le Bureau du vérificateur général;

    c) tout tribunal constitué en vertu d'une loi fédérale ou provinciale, toute commission d'enquête judiciaire ou publique constituée en vertu d'une telle loi ou d'un décret du gouverneur en conseil, ou tout membre de ce tribunal ou de cette commission;

    d) toute autorité ou organisme administratif, administration public ou de réglementation - de palier fédéral, provincial ou local - ou tout organe de l'un ou l'autre;

    e) la Gendarmerie royale du Canada, tout autre organisme chargé de l'application de la loi au Canada ou tout agent de la paix;

    f) tout ministère fédéral ou provincial;

    g) une société d'État mère ou une société d'État au sens de la Loi sur la gestion des finances publiques;

    h) toute division, tout conseil, bureau, office, comité, commission, agence ou fonctionnaire d'une personne morale ou d'un organisme mentionné aux alinéas a) à g);

    i) toute entreprise d'édition ou de radiodiffusion ou autre entité médiatique ou son mandataire.

3. Aucun fonctionnaire ne peut faire l'objet d'une mesure administrative interdite ou se sentir menacé d'une telle mesure du fait qu'il s'est livré ou a manifesté l'intention de se livrer à un acte protégé.

Protection des fonction-
naires

4. (1) Le fonctionnaire qui a été soumis à une violation de la présente loi a le droit, en plus de toute procédure administrative dont il peut se prévaloir en vertu de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, la Loi sur les relations de travail au Parlement, la Loi sur la défense nationale ou la Loi sur la Gendarmerie royale du Canada, d'intenter une action au civil devant tout tribunal compétent et de choisir un procès devant juge sans jury ou devant un tribunal composé d'un juge et d'un jury pour obtenir réparation, notamment la réintégration, la nomination à un poste équivalent, toute mesure injonctive, un paiement rétroactif au titre de la rémunération, des droits d'ancienneté perdus ou d'autres avantages sociaux, intérêts compris, une indemnité compensatoire pour toute promotion future manquée et aux avantages sociaux y afférents, les dommages-intérêts généraux, les dommages-intérêts exemplaires ou punitifs, les frais juridiques raisonnables engagés par le fonctionnaire et tout autre montant que le tribunal estime juste et équitable pour rétablir la dignité et le bien-être du fonctionnaire.

Recours

(2) Tout fonctionnaire a droit au remboursement des frais juridiques engagés, que la réparation obtenue ait été accordée par un tribunal, résulte d'une procédure administrative ou d'un accord entre les parties.

Recouvre-
ment des dépens

(3) Toute action visée au paragraphe (1) doit être intentée dans les deux ans qui suivent le dernier en date des jours suivants :

Restriction

    a) le jour où s'est produite la prétendue violation ou le jour où celle-ci a cessé s'il s'agit d'une violation continue,

    b) le jour où le fonctionnaire a eu connaissance de la violation pour la première fois.

(4) Dans toute action visée au paragraphe (1), une fois qu'il a été établi que la présumée mesure administrative interdite est liée au fait que le fonctionnaire se soit livré à un acte protégé, il incombe au défendeur de prouver d'une manière claire et convaincante que cette mesure aurait été prise indépendamment de l'acte protégé pour des raisons légitimes et licites.

Fardeau de la preuve

(5) Le fonctionnaire ne peut intenter ou poursuivre une action visée au paragraphe (1) en même temps qu'une procédure administrative engagée en application de la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique, la Loi sur les relations de travail au Parlement, la Loi sur la défense nationale ou la Loi sur la Gendarmerie royale du Canada et fondée sur les mêmes motifs; il peut toutefois interrompre une procédure administrative à tout moment avant le prononcé d'une décision finale et intenter une action visée au paragraphe (1) sur les mêmes fondements.

Procédure unique

(6) Tout fonctionnaire qui obtient gain de cause dans une action de première instance au civil ou au premier palier d'une procédure administrative reçoit l'indemnisation équitable ordonnée à la date de la décision.

Choix de l'action

(7) Sauf dans les cas prévus au paragraphe (5), la présente loi n'a pas pour effet de porter atteinte aux droits ou voies de recours dont un fonctionnaire peut autrement se prévaloir.

Autres droits protégés

5. (1) Tout fonctionnaire a le droit, libre de toute restriction :

Droit d'exprimer son opinion

    a) d'exprimer librement son opinion sur toutes les questions publiques y compris celles relatives aux fonctions qui lui sont assignées, pourvu qu'il précise que cette opinion est indépendante de toute politique officielle;

    b) de s'associer librement à d'autres personnes, de s'exprimer librement et d'échanger des idées sur des questions personnelles ou d'intérêt public relatives à des programmes, des ressources ou des fonds publics, et d'aviser le public et d'autres fonctionnaires de ces réunions et échanges d'idées.

(2) Tout fonctionnaire a droit à des conditions de travail humaines comportant dignité et civilité qui favorisent la croissance personnelle, la santé et le bien-être et permettent l'acquittement des responsabilités professionnelles sans entraves.

Droits relatifs aux conditions de travail

(3) La divulgation faite par un fonctionnaire ou l'exercice de sa liberté d'expression sous le régime de la présente loi ne constitue pas une violation du secret ou de l'obligation de confidentialité qui lui est imposé.

Confiden-
tialité

6. Il incombe à tout fonctionnaire de divulguer à son superviseur ou à un organisme public toute conduite dont il a connaissance qui constitue une violation de la présente loi et qui touche lui-même ou un autre fonctionnaire.

Obligation de divulguer

7. Le président du Conseil du Trésor s'assure qu'un avis portant les dispositions de la présente loi ainsi qu'un résumé clair des droits et garanties de protection des fonctionnaires est affiché dans un endroit visible de leur lieu de travail et que d'autres moyens pour les informer de ces dispositions sont utilisés, notamment :

Affichage des droits

    a) la remise d'un résumé au moment de l'embauche du fonctionnaire;

    b) l'insertion de ces renseignements dans l'envoi de la déclaration annuelle d'impôt sur le revenu;

    c) leur communication lors d'audiences publiques tenues sous l'autorité du gouvernement du Canada;

    d) la diffusion périodique d'avis dans les médias et les établissements d'enseignement.

8. (1) Tout superviseur ou gestionnaire d'un fonctionnaire ou toute autre personne ayant autorité sur celui-ci qui contrevient à l'article 3 est passible de poursuite criminelle et d'une amende maximale de 5 000 $.

Infraction et peine

(2) Tout superviseur ou gestionnaire d'un fonctionnaire ou toute autre personne ayant autorité sur celui-ci qui contrevient à l'article 3 est responsable personnellement pour tous dommages-intérêts qui pourraient être attribués au fonctionnaire dans le cadre d'une poursuite au civil ou d'une procédure administrative.

Responsabi-
lité personnelle du superviseur

(3) Tout superviseur ou gestionnaire d'un fonctionnaire ou toute autre personne ayant autorité sur celui-ci qui contrevient à l'article 3 est, en plus d'être assujetti aux paragraphes (2) et (3), passible de sanctions disciplinaires, notamment de congédiement.

Discipline

9. Tout fonctionnaire qui obtient gain de cause dans une revendication formée en application de la présente loi reçoit des excuses publiques de la part du ministre responsable du ministère en cause et obtient du président du Conseil du Trésor un paiement à titre gracieux d'un montant que fixe ce dernier et qui tient compte des dommages et du préjudice qu'il a subis et de tous dommages-intérêts attribués à la suite de l'action au civil.

Reconnaissan ce du fonctionnaire

10. (1) Tout ministre fédéral veille à ce que les allégations écrites reçues d'un fonctionnaire du secteur de la fonction publique dont il est responsable ou à propos de celui-ci fassent l'objet d'une enquête indépendante et, notamment, d'une rencontre avec le fonctionnaire et qu'un rapport soit présenté au ministre dans les 30 jours suivant la réception des allégations.

Notification des allégations

(2) Dès réception du rapport, le ministre en fournit une copie au fonctionnaire pour commentaire ou réfutation.

Copie au fonctionnaire

(3) À moins qu'il ne soit convaincu, à la lumière du rapport et des commentaires du fonctionnaire, que les allégations sont sans fondement, le ministre veille à ce que des mesures correctives soient prises rapidement, que le fonctionnaire ait ou non commencé une action au civil ou une procédure administrative relativement aux allégations.

Mesures correctives

11. (1) Le président du Conseil du Trésor crée un registre auquel est versée une copie de chaque allégation écrite faite en application de la présente loi et de chaque rapport d'enquête présenté conformément au paragraphe 10(1), y compris les commentaires formulés par le fonctionnaire en application du paragraphe 10(2).

Registre public

(2) Sont effacés des documents qui figurent au registre en application du paragraphe (1) les éléments, selon le cas :

Exclusion de certains éléments

    a) qui révèlent des renseignements sur une personne qui doivent demeurer confidentiels en vertu de la Loi sur la protection des renseignements personnels;

    b) dont il est raisonnable de s'attendre à ce qu'ils puissent compromettre la sécurité nationale ou l'intérêt public.

(3) Le registre est un document public et le président du Conseil du Trésor veille à ce que le public y ait accès et que des photocopies puissent en être faites à un coût raisonnable pendant les heures normales de bureau.

Accès public