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LANG Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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37e LÉGISLATURE, 1re SESSION

Comité mixte permanent des langues officielles


TÉMOIGNAGES

TABLE DES MATIÈRES

Le mardi 19 mars 2002




¹ 1530
V         Le coprésident (M. Mauril Bélanger (Ottawa--Vanier, Lib.))
V         Mme Chantal Berard (directrice générale, Fédération de la jeunesse canadienne-française)
V         M. Michel Hamon Liboiron (président, Fédération de la jeunesse canadienne-française)
V         Le coprésident (M. Mauril Bélanger)
V         M. Georges Arès (président, Fédération des communautés francophones et acadienne du Canada)

¹ 1535

¹ 1540

¹ 1545
V         Le coprésident (M. Mauril Bélanger)
V         M. Michel Hamon Liboiron

¹ 1550
V         Le coprésident (M. Mauril Bélanger)
V         Mme Chantal Berard
V         Le coprésident (M. Mauril Bélanger)
V         Mme Lili St-Gelais (représentante du Centre (Ontario), Fédération nationale des femmes canadiennes-françaises)
V         Mme Brigitte Duguay (directrice générale, Fédération nationale des femmes canadiennes-françaises)

¹ 1555
V         Le coprésident (M. Mauril Bélanger)
V         Mr. Reid
V         Le coprésident (M. Mauril Bélanger)
V         M. Scott Reid
V         M. Georges Arès
V         Mr. Reid
V         M. Georges Arès
V         M. Scott Reid
V         M. Georges Arès
V         Mr. Reid
V         M. Georges Arès
V         M. Reid

º 1600
V         M. Georges Arès
V         Mr. Reid
V         M. Michel Hamon Liboiron
V         Mme Brigitte Duguay
V         Le coprésident (M. Mauril Bélanger)
V         Le sénateur Jean-Robert Gauthier (Ottawa--Vanier, Lib.)
V         M. Georges Arès
V         Le sénateur Jean-Robert Gauthier
V         M. Georges Arès
V         Le sénateur Jean-Robert Gauthier
V         M. Georges Arès
V         Le sénateur Jean-Robert Gauthier
V         M. Georges Arès

º 1605
V         Le sénateur Jean-Robert Gauthier
V         M. Georges Arès
V         Le sénateur Jean-Robert Gauthier
V         M. Michel Hamon Liboiron
V         Le sénateur Jean-Robert Gauthier
V         M. Michel Hamon Liboiron
V         L'hon. Gauthier
V         M. Georges Arès
V         M. Michel Hamon Liboiron
V         Le sénateur Jean-Robert Gauthier
V         M. Michel Hamon Liboiron

º 1610
V         Mme Chantal Berard
V         M. Michel Hamon Liboiron
V         Le sénateur Jean-Robert Gauthier
V         M. Michel Hamon Liboiron
V         Le coprésident (M. Mauril Bélanger)
V         M. Michel Hamon Liboiron
V         Le coprésident (M. Mauril Bélanger)
V         M. Benoît Sauvageau (Repentigny, BQ)
V         

º 1615
V         M. Georges Arès
V         M. Benoît Sauvageau
V         M. Georges Arès
V         Le coprésident (M. Mauril Bélanger)
V         M. Benoît Sauvageau
V         Mme Chantal Berard
V         M. Benoît Sauvageau
V         Mme Chantal Berard
V         M. Sauvageau
V         M. Michel Hamon Liboiron
V         M. Benoît Sauvageau

º 1620
V         M. Michel Hamon Liboiron
V         Le coprésident (M. Mauril Bélanger)
V         Mme Chantal Berard
V         Le coprésident (M. Mauril Bélanger)
V         M. Benoît Sauvageau
V         Mme Chantal Berard
V         Le coprésident (M. Mauril Bélanger)
V         Ms. Thibeault
V         Mme Brigitte Duguay
V         Ms. Thibeault

º 1625
V         Mme Brigitte Duguay
V         Mme Yolande Thibeault
V         M. Michel Hamon Liboiron
V         Mme Thibeault
V         Le coprésident (M. Mauril Bélanger)
V         M. Yvon Godin (Acadie--Bathurst, NPD)

º 1630
V         M. Georges Arès
V         M. Yvon Godin
V         M. Georges Arès
V         M. Yvon Godin
V         M. Georges Arès
V         Le coprésident (M. Mauril Bélanger)
V         M. Gérard Binet (Frontenac--Mégantic, Lib.)
V         Mme Brigitte Duguay
V         M. Gérard Binet
V         Mme Brigitte Duguay
V         M. Gérard Binet
V         Le coprésident (M. Mauril Bélanger)
V         Le coprésident (M. Mauril Bélanger)
V         M. Marc Boily (président, Fédération nationale des conseillères et conseillers scolaires francophones)

º 1645

º 1650
V         Le coprésident (M. Mauril Bélanger)
V         M. Benoît Sauvageau
V         Le coprésident (M. Mauril Bélanger)
V         M. Gérald C. Boudreau (président, Association canadienne d'éducation de langue française)

º 1655

» 1700
V         Le coprésident (M. Mauril Bélanger)
V         M. Jean Giroux-Gagné (vice-président, Commission nationale des parents francophones)

» 1705

» 1710
V         Le coprésident (M. Mauril Bélanger)
V         M. Benoît Sauvageau

» 1715
V         M. Gérald Boudreau
V         M. Benoît Sauvageau
V         M. Gérald Boudreau
V         Le coprésident (M. Mauril Bélanger)
V         M. Marc Boily
V         Mme Charlotte Ouellet (secrétaire générale, Association canadienne d'éducation de langue française)

» 1720
V         Le coprésident (M. Mauril Bélanger)
V         M. Gérard Binet
V         M. Jean Giroux-Gagné
V         Le coprésident (M. Mauril Bélanger)

» 1725
V         M. Paul Charbonneau (directeur général, Fédération nationale des conseillères et conseillers scolaires francophones)
V         Le coprésident (M. Mauril Bélanger)
V         M. Gérard Binet
V         Le coprésident (M. Mauril Bélanger)
V         M. Yvon Godin
V         Le coprésident (M. Mauril Bélanger)
V         M. Yvon Godin
V         M. Paul Charbonneau
V         M. Godin
V         M. Jean Giroux-Gagné
V         Le coprésident (M. Mauril Bélanger)
V         M. Yvon Godin
V         M. Paul Charbonneau
V         M. Jean Giroux-Gagné
V         Le coprésident (M. Mauril Bélanger)

» 1730
V         Le sénateur Raymond Setlakwe (Les Laurentides, Lib.)
V         M. Paul Charbonneau
V         Le sénateur Raymond Setlakwe
V         M. Paul Charbonneau
V         Le coprésident (M. Mauril Bélanger)










CANADA

Comité mixte permanent des langues officielles


NUMÉRO 030 
l
1re SESSION 
l
37e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 19 mars 2002

[Enregistrement électronique]

¹  +(1530)  

[Français]

+

    Le coprésident (M. Mauril Bélanger (Ottawa--Vanier, Lib.)): Mesdames, messieurs, puisqu'il est 15 h 30 et que les députés devront quitter à 17 h 20 pour aller voter à la Chambre, il serait approprié d'entreprendre nos travaux à ce moment-ci.

    Nous continuons l'audition de témoignages pour faire suite à l'adoption d'une résolution du comité, résolution présentée par M. Sauvageau, d'alimenter la réflexion de M. Dion concernant la préparation de son plan d'action. Nous avons entendu, hier, toute une série de présentations. D'ailleurs, je veux m'excuser de mon absence auprès des gens qui se trouvaient ici hier. J'étais face à un sérieux conflit d'horaire. Je vais certainement lire tous les procès-verbaux de ce qui s'est passé hier et les soumissions qui ont été présentées.

    Nous avons aujourd'hui parmi nous des gens qui représentent la Fédération de la jeunesse canadienne-française, Mme Chantal Berard et M. Michel Hamon Liboiron; la Fédération des communautés francophones et acadienne, M. Georges Arès et M. Richard Barette. Nous entendrons ensuite Mme Duguay et Mme St-Gelais de la Fédération nationale des femmes canadiennes-françaises; puis M. Paul Charbonneau et M. Marc Boily de la Fédération nationale des conseillères et conseillers scolaires francophones. L'Association canadienne d'éducation de langue française sera représentée par Mme Ouellet et M. Bouchard et, finalement, la Commission nationale des parents francophones par M. Jean Giroux-Gagné.

    Nous suivrons l'ordre établi. Je vous demanderais de vous en tenir à cinq minutes pour qu'on puisse entendre tout le monde durant cette session de deux heures. Je vais inviter Mme Chantal Berard à commencer sa présentation.

    Nous allons prendre quelques instants pour que le sénateur Gauthier puisse s'installer.

    Madame Berard, c'est à vous.

+-

    Mme Chantal Berard (directrice générale, Fédération de la jeunesse canadienne-française): Je vais laisser la parole à mon président.

+-

    M. Michel Hamon Liboiron (président, Fédération de la jeunesse canadienne-française): J'aimerais seulement savoir, monsieur le président, s'il serait possible de commencer tout d'abord par la FCFA et de donner la parole, tout de suite après, à la FJCF.

+-

    Le coprésident (M. Mauril Bélanger): Cela ne me pose à moi aucune difficulté, à la condition que M. Arès veuille bien s'y prêter.

    Monsieur Arès, à vous la parole.

+-

    M. Georges Arès (président, Fédération des communautés francophones et acadienne du Canada): Merci, monsieur le président.

    Je pensais avoir dix minutes; j'ai donc préparé une présentation de dix minutes. Je vais essayer de faire aussi vite que possible tout en tenant compte de l'interprétation.

    En tout premier lieu, vous me permettrez de remercier le Comité mixte permanent des langues officielles de l'occasion qui m'est donnée de venir exposer le point de vue de la Fédération des communautés francophones et acadienne du Canada sur un sujet qui lui tient particulièrement à coeur depuis sa fondation, voilà maintenant 26 ans.

    Le président du Conseil privé et ministre des Affaires intergouvernementales, l'honorable Stéphane Dion, également responsable de coordonner les dossiers touchant les langues officielles, élabore actuellement un cadre d'action pour renforcer l'appui accordé aux communautés de langue officielle vivant en situation minoritaire, ce que nous espérons être une véritable politique de développement global. Nous pourrions résumer en une seule phrase toute la mesure de nos aspirations à l'égard des attentes du gouvernement fédéral: travailler en amont plutôt qu'en aval, cesser d'être en réaction aux demandes répétées des communautés francophones et acadienne et commencer véritablement à être proactif.

    Nous avons déjà fait part de notre vision au ministre Stéphane Dion et nous avons bon espoir d'avoir été bien compris. Notre démarche vise à appuyer les efforts du ministre en vue de formuler un cadre d'action qui réponde, entre autres, aux besoins et aux aspirations des communautés francophones minoritaires. Si leurs besoins varient, toutes partagent une aspiration commune: celle de pouvoir vivre et se développer en français partout au Canada.

    La FCFA encourage donc fortement le ministre à élaborer une politique de développement global de la francophonie canadienne, afin que son cadre d'action englobe des mesures qui viendront activer de front les divers leviers de développement communautaire. Le cadre d'action que prépare le ministre Dion doit reposer sur une politique de développement global de la francophonie canadienne, une politique qui viendrait préciser et clarifier l'engagement du gouvernement fédéral à l'égard des communautés ainsi que la portée des obligations énoncées dans la Partie VII de la Loi sur les langues officielles.

    À ce jour, la loi s'est avérée insuffisante pour assurer la permanence des diverses initiatives instaurées pour appuyer le développement des communautés. Les mesures en ce sens dépendent encore trop souvent des dirigeants en place et sont menacées de sombrer dans l'oubli avec le départ des personnes qui les ont initiées.

    L'un des grands défis de la politique de développement global consiste à enrayer la précarité des acquis et à garantir une certaine pérennité, sinon la continuité, des programmes d'appui destinés aux communautés francophones. Une politique de développement global doit relever un autre défi important: réorienter l'approche fédérale pour qu'elle se fonde, non plus sur la réalisation de projets éparses, comme c'est présentement le cas, mais plutôt sur une action concertée qui inciterait les ministères et organismes gouvernementaux à intégrer les considérations relatives au développement des communautés au moment même où ils élaborent leurs politiques et leurs programmes ministériels.

    L'égalité linguistique est un élément fondamental de la structure même du Canada. Les francophones ont participé à la fondation du pays, ont contribué à son développement et continuent d'y jouer un rôle actif et important. Les communautés francophones sont présentes dans toutes les provinces et tous les territoires. Vous avez eu l'occasion d'entendre les représentantes et les représentants de ces communautés au cours des dernières journées et vous avez pu constater leur dynamisme, leur passion et leur fierté. Le gouvernement fédéral doit s'en inspirer.

    Les droits constitutionnels des communautés francophones et acadienne sont de plus en plus reconnus par la Constitution, par les tribunaux et par le législateur. Le paragraphe 16(3) représente l'expression constitutionnelle de cette réalité. Tous les parlements provinciaux et territoriaux ont des obligations constitutionnelles à l'égard des communautés francophones et acadienne ne serait-ce qu'en matière d'éducation et de droit à des établissements d'instruction publique gérés par les communautés.

    Le Parlement du Canada a aussi ses propres responsabilités constitutionnelles. De plus, le Parlement s'est doté d'une loi, la Loi sur les langues officielles qui, quasiment, constitutionnalise plusieurs droits très précis et donne ainsi au gouvernement fédéral des obligations d'agir, voire même des obligations de résultats.

¹  +-(1535)  

    Le cadre d'action doit clairement énoncer la vision du Canada sur laquelle les décideurs doivent se fonder lorsqu'ils formulent leurs programmes et leurs politiques: une société pluraliste qui réunit deux communautés de langue officielle et au sein de laquelle les francophones qui vivent à l'extérieur du Québec ne sont pas des citoyens de second plan; une société qui reconnaît aux francophones qui y vivent en situation minoritaire le droit quasi constitutionnel de se développer et de s'épanouir dans leur langue. Cela signifie, au bas mot, qu'ils doivent pouvoir profiter des politiques et des programmes fédéraux aussi pleinement que leurs concitoyens anglophones. Le cadre d'action doit faire en sorte que la promotion et l'épanouissement des minorités linguistiques se fassent aux étapes initiales de l'élaboration des politiques et des programmes plutôt qu'après coup. Trop souvent, il revient aux communautés de se battre pour quelques miettes une fois qu'un programme a déjà été instauré et son budget, largement dépensé. Face à des programmes qui sont mal adaptés à leur situation, les communautés n'ont d'autre choix que de réagir en toute dernière ligne pour exprimer leurs besoins et se voient fréquemment opposer une fin de non-recevoir.

    La FCFA considère qu'il revient au Cabinet et au Parlement d'exercer une pression pour inciter les hauts fonctionnaires de tous les ministères à s'acquitter de leurs responsabilités en vertu de la Constitution canadienne, mais aussi en vertu de la partie VII de la Loi sur les langues officielles. Lorsqu'une politique ou un programme est envisagé, les gestionnaires de l'État devraient être tenus d'en orienter un volet vers les minorités francophones, afin que la politique ou le programme en question soit adapté à leur situation particulière et que leurs membres puissent en profiter pleinement. De telles pressions seront beaucoup plus efficaces si elles émanent des plus hautes instances du pouvoir que si elles proviennent d'un seul ministère comme Patrimoine Canada ou, a fortiori, des seules communautés.

    C'est dans cette veine d'harmonisation qu'à sa dernière réunion, qui a eu lieu la fin de semaine passée, le Conseil national des présidentes et des présidents, qui regroupe toutes les associations membres de la FCFA, a adopté à l'unanimité une résolution dont j'aimerais vous faire part aujourd'hui. Je ne lirai pas les  «attendu que», mais simplement la résolution parce qu'on est à court de temps.

Il est proposé que la FCFA du Canada réclame la désignation du président du Conseil privé comme ministre responsable du programme des langues officielles et ministre responsable de la mise en oeuvre d'une politique de développement global du gouvernement fédéral avec laquelle elle est d'accord.

    Cela dit, nous ne donnons pas un chèque en blanc au Conseil privé. Il est important que nos communautés soient d'accord sur le cadre d'action du ministre Dion et que celui-ci soit fondé sur un nouveau partenariat avec nos communautés. Nos communautés se sont dotées, au cours des dernières années, de plans de développement global dans chacune des provinces et chacun des territoires. Nous demandons au ministre Dion de tenir compte de la globalité de notre développement dans son plan d'action.

    Puisque le plan d'action du ministre identifiera des orientations pour le développement de nos communautés, il est normal que M. Dion soit également responsable des Programmes d'appui aux langues officielles afin de les aligner sur nos plans de développement par le biais de mécanismes de consultation pour tous les secteurs du développement de nos communautés. Ces mécanismes de consultation serviraient, d'une part, à informer des communautés concernées de l'initiative envisagée, des impératifs politiques, des priorités et des objectifs ministériels pour qu'elles puissent ajuster leurs remarques en conséquence. Les mécanismes permettraient aux communautés d'expliquer en quoi et pourquoi l'initiative devrait être adaptée et leur donneraient l'occasion de faire valoir leurs préoccupations pour qu'elles puissent être prises en compte par les décideurs.

    La politique de développement global comprendra ainsi les différentes secteurs d'intervention jugés prioritaires par les communautés francophones et acadiennes, tels l'éducation, les arts et la culture, la justice, le développement économique, la santé, l'immigration, la coopération internationale, la communication et le développement communautaire, pour ne nommer que ceux-là. Nous sommes en train de travailler auprès des organismes francophones de ces secteurs afin de pouvoir proposer une démarche appropriée à chacun de ces secteurs en termes de consultation et de concertation. Nous proposerons ainsi un diagnostic de la situation actuelle dans chacun de ces secteurs. Nous identifierons des objectifs à atteindre en ce qui touche la participation du gouvernement. Enfin, nous proposerons des pistes d'action à entreprendre mutuellement entre les communautés et les différents ministères et autres agences gouvernementales.

¹  +-(1540)  

    Le cadre d'action devrait permettre de corriger les problèmes de mise en oeuvre de la partie VII de la Loi sur les langues officielles, d'une part en clarifiant et en expliquant clairement aux hauts fonctionnaires la portée de leurs obligations et d'autre part en instaurant des mesures d'imputabilité pour les inciter à s'y conformer. À cet égard, nous croyons que le Conseil privé à un rôle crucial à jouer en ce qui touche la responsabilité du gouvernement fédéral à l'égard du cadre d'action qui sera proposé.

    Plusieurs avenues méritent d'être explorées. Les critères d'évaluation de rendement des ministères et de leurs dirigeants pourraient, par exemple, tenir compte de leur performance à l'égard de la partie VII. La cadre d'action devrait en outre envisager la possibilité d'inclure un régime de retrait qui obligerait les ministères qui n'adaptent pas leurs initiatives aux besoins des communautés à mettre à la disposition de ces dernières, directement ou indirectement, les sommes nécessaires pour qu'elles puissent elles aussi pleinement bénéficier de l'initiative en question.

    Afin d'être réellement efficace, le cadre d'action doit impérativement comporter un mécanisme d'imputabilité. Le ministère de la Justice du gouvernement fédéral, concernant la partie VII de la Loi sur les langues officielles, a une interprétation sur laquelle nous ne sommes pas d'accord. On y dit que cette partie est un engagement sérieux et solennel du gouvernement fédéral, certes, mais qui ne crée ni droits ni obligations au gouvernement. Vous comprendrez que nous ne partageons pas cette opinion.

    Au minimum, une agence centrale telle que le Conseil privé devrait répondre au Parlement quant aux actions entreprises dans la poursuite des objectifs visés par le cadre d'action.

    Nous pouvons nous demander à quoi peut bien servir d'obtenir une politique de développement global si le gouvernement, au gré de sa volonté du jour, décide d'en changer les règles du jeu. Les communautés francophones et acadiennes savent depuis longtemps, trop longtemps, combien il importe de pouvoir compter sur des garanties solides lorsque vient le temps de mettre en oeuvre leurs droits. Rappelons encore une fois que nous ne parlons pas nécessairement de nos droits linguistiques, mais de nos droits comme citoyens.

    Le but de mon intervention n'est pas de réclamer seulement un accroissement des ressources consacrées au seul programme fédéral des langues officielles. La FCFA du Canada réclame aussi que le gouvernement fasse une utilisation plus judicieuse de ces ressources en modifiant l'approche qu'il a adoptée pour concrétiser son appui aux communautés francophones vivant en situation minoritaire.

    Nous vous remercions de votre intérêt et attendons vos questions.

¹  +-(1545)  

+-

    Le coprésident (M. Mauril Bélanger): Merci, monsieur Arès. Vous aviez raison. Vous en aviez pour dix minutes plutôt que pour cinq. Je vais accorder le même temps aux autres pour être équitable. Je vous demanderais également, monsieur Arès, si vous le voulez bien, de nous laisser une copie de la résolution pour qu'on puisse l'inclure dans le compte rendu de nos délibérations.

    M. Georges Arès: Certainement.

    Le coprésident: Merci.

    Monsieur Liboiron.

+-

    M. Michel Hamon Liboiron: Premièrement, nous voudrions remercier le Comité mixte des langues officielles de nous donner l'occasion de présenter nos pensées sur le sujet à l'étude.

    Dans le cadre de la présentation, nous aimerions partager avec vous nos idées vis-à vis du plan d'action que l'honorable Stéphane Dion élabore présentement pour renforcer l'appui accordé aux communautés de langue officielle. Évidemment, nous allons aussi vous parler de l'importance de la jeunesse francophone et acadienne au Canada.

    Nous croyons qu'il est primordial que le ministre Dion élabore une politique de développement global de la francophonie canadienne. Cette politique de développement global est essentielle pour assurer la pérennité et la cohérence des mesures d'appui aux communautés.

    La partie VII de la Loi sur les langues officielles doit être mieux respectée et renforcée. Ce n'est pas seulement le ministère du Patrimoine canadien qui est redevable aux communautés, mais l'ensemble des ministères. Une politique de développement global de la francophonie canadienne permettra au gouvernement du Canada d'avoir une approche globale envers nos communautés.

    Nous savons que, lors de sa dernière comparution devant le Comité mixte des langues officielles, le ministre Dion mettait l'accent sur l'augmentation du nombre de personnes bilingues au Canada. Il est crucial que le cadre d'action fédéral démontre la différence entre la promotion du bilinguisme et le renforcement de nos communautés. Le cadre d'action doit démontrer que la vitalité de nos communautés passe tout d'abord par une prise en charge de nos acquis et du développement de notre communauté, par exemple dans de nouveaux secteurs d'intervention tels que la santé.

    Le réseau jeunesse au pays essaie d'être inclusif dans ses activités. Nous croyons que les écoles d'immersion et d'apprentissage du français langue seconde jouent un rôle important dans nos communautés. Nous travaillons souvent avec des organismes tels que Canadian Parents for French afin d'amener les jeunes des écoles d'immersion à jouir de la richesse de la culture francophone et à participer à certaines de nos activités.

    Il ne faut cependant pas entremêler ou confondre la promotion du bilinguisme et le développement et l'épanouissement de nos communautés. Nos communautés francophones contribuent au développement et à l'épanouissement de notre pays, c'est-à-dire le Canada. Nous vivons dans un pays qui accepte la diversité des idées, des cultures et, bien sûr, des choix.

    Il est grand temps que le gouvernement fédéral développe un cadre d'action pour les communautés de langue officielle vivant en situation minoritaire.

    La jeunesse est un secteur primordial pour le développement de la société canadienne. Il va sans dire que la réalité est la même dans nos communautés. Nous voulons nous assurer de former des jeunes qui auront le désir de participer au développement de leur communauté ainsi que de la société canadienne, dont leur communauté est partie intégrante. Nous croyons que le ministre Dion doit inclure de façon spécifique et distincte un volet jeunesse dans son cadre d'action.

    Nous vivons présentement plusieurs difficultés à nous intégrer aux programmes gouvernementaux déjà existants. Il faut dire que le gouvernement priorise depuis plusieurs années la jeunesse et que nous retrouvons des programmes pour elle dans plusieurs ministères.

    Plusieurs programmes gouvernementaux ciblant la jeunesse donnent la priorité aux jeunes à risque. Nous croyons que les jeunes en situation minoritaire sont à risque. Nous croyons aussi que ces risques sont nombreux. Pour n'en nommer que quelques-uns, nous courons le risque de perdre notre langue, celui de perdre notre culture, voire même celui de perdre notre identité.

    L'avenir de nos communautés repose sur notre jeunesse. Serons-nous capables de poursuivre nos démarches et nos revendications en tant que communautés? Serons-nous capables de poursuivre notre développement? Aurons-nous les compétences de leadership nécessaires?

    Le ministre Stéphane Dion a été mandaté par le premier ministre pour coordonner les dossiers des langues officielles et élaborer une politique de développement global à l'égard de nos communautés. Les Programmes d'appui aux langues officielles sont un élément clé pour appuyer le développement de nos communautés. Nos communautés recherchent un nouveau partenariat avec le gouvernement fédéral, qui permettra le développement global de celles-ci. Nos communautés revendiquent depuis longtemps la mise en oeuvre intégrale de la partie VII de la Loi sur les langues officielles et l'imputabilité des ministères vis-à-vis du Conseil privé.

    Pour toutes ces raisons, nous réclamons la désignation du président du Conseil privé, M. Stéphane Dion, comme ministre responsable. Nous voulons nous assurer que le ministre responsable des programmes de langues officielles puisse avoir un mandat clair et un pouvoir discrétionnaire sur les autres ministères. Nous voulons nous assurer que la partie VII de la Loi sur les langues officielles soit comprise et, surtout, appliquée par tous les ministères.

    La Fédération de la jeunesse canadienne-française croit qu'il est essentiel que le gouvernement fédéral adopte un plan de développement global à l'égard de la communauté francophone. Ce plan de développement global assurera que les nouveaux programmes du gouvernement qui seront développés prendront en considération la spécificité de nos communautés. Il est évident que nos communautés manquent de ressources humaines pour accomplir leur mandat. Ce plan de développement global permettra au gouvernement fédéral de mieux cibler ces intervenants et permettra à tous les ministères de participer à notre développement.

    Disons-le encore, la jeunesse est l'unité de base de nos communautés. Sans elle, la communauté n'est pas. Sans un véritable leadership de la part du gouvernement ainsi que de la part de nos communautés, nous serons en situation délicate.

    Merci. Nous sommes prêts à répondre à vos questions.

¹  +-(1550)  

+-

    Le coprésident (M. Mauril Bélanger): Il reste quelques minutes. Madame Berard, voulez-vous ajouter quelque chose?

+-

    Mme Chantal Berard: Non. Vous pouvez poser vos questions.

+-

    Le coprésident (M. Mauril Bélanger): Merci.

    Est-ce Mme Duguay ou Mme St-Gelais qui prendra la parole?

    Mme St-Gelais.

+-

    Mme Lili St-Gelais (représentante du Centre (Ontario), Fédération nationale des femmes canadiennes-françaises): En tant que membre du conseil national d'administration et au nom de notre présidente nationale, Mme Rose-Aimée Haché, qui ne peut malheureusement être ici aujourd'hui, j'aimerais remercier le Comité mixte permanent des langues officielles de permettre à la Fédération nationale des femmes canadiennes-françaises de faire cette courte présentation.

    La Fédération nationale a pour mission de défendre les intérêts et de revendiquer les droits des femmes de la francophonie canadienne vivant en milieu minoritaire et d'appuyer celles-ci afin qu'on ait une société juste et égalitaire pour toutes les femmes vivant au Canada.

    J'invite maintenant la directrice générale de la Fédération nationale des femmes canadiennes-françaises, Mme Brigitte Duguay, à vous présenter notre position par rapport à la politique de développement global.

+-

    Mme Brigitte Duguay (directrice générale, Fédération nationale des femmes canadiennes-françaises): Merci, monsieur Bélanger.

    Notre présentation sera courte. Le message qu'on veut vous transmettre est très simple.

    Premièrement, il est important de mentionner que la Fédération des femmes canadiennes-françaises appuie entièrement la Fédération des communautés francophones et acadienne quant à sa position par rapport au document qui a été préparé pour la politique sur le plan de développement global. Nous voulons aujourd'hui présenter un point qui va venir compléter toutes les possibilités qui entourent la politique sur le plan de développement global de notre francophonie au Canada.

    Considérant que les femmes représentent environ 52 p. 100 de la population, considérant aussi que les femmes sont des agents très importants de changement au niveau du développement et de l'épanouissement de nos communautés francophones, et considérant que ces femmes sont souvent des joueuses clés dans la transmission de la langue et de la culture françaises, on peut affirmer que les femmes seront des joueuses clés dans le cadre de ce plan de développement global sur lequel l'honorable Stéphane Dion nous permet de donner nos points de vue.

    Nous avons un défi à proposer à M. Dion, et nous avons des positions claires à ce niveau-là. On sait que quand le gouvernement décide d'établir des politiques, il utilise une forme d'analyse des politiques. Ce peut être des analyses basées sur l'environnement et ainsi de suite. Je n'ai pas à vous expliquer comment on peut faire des analyses de politique. La Fédération des femmes canadiennes-françaises demande fermement à M. Dion d'utiliser l'analyse comparative entre les sexes lors de l'établissement de la politique sur le plan de développement global de nos communautés francophones et acadiennes au pays.

    Qu'est-ce que l'analyse comparative selon les sexes? C'est un outil qui facilite l'intégration systématique des considérations reliées à l'égalité entre les sexes aux processus d'élaboration de politiques, de planification et de prise de décisions. Elle correspond à une conception plus vaste de l'égalité entre les sexes et fait appel à diverses compétences et aptitudes pour assurer la participation tant des femmes que des hommes afin d'édifier la société et de préparer l'avenir. C'est un peu ce qui est élaboré à l'intérieur de nos communautés francophones.

    Il est important de mentionner que le gouvernement fédéral s'est engagé en 1995, à la veille du XXIe siècle, à établir un plan fédéral pour l'égalité entre les sexes. Le gouvernement s'est engagé à dire que, dorénavant, lors de l'élaboration de politiques et de lois au niveau du gouvernement fédéral, on utiliserait systématiquement l'analyse comparative selon les sexes. Il a dit cela il y a sept ans.

    Donc, on lance à M. Dion le défi de bâtir sa politique sur le plan de développement global à partir de l'analyse comparative entre les sexes.

    Monsieur Bélanger, je ne sais pas si je peux me le permettre, mais j'aimerais vous remettre des copies de documents bilingues qui ont été présentés par Condition féminine Canada et qui donnent une explication brève mais assez intéressante de ce qu'est l'analyse comparative selon les sexes.

    J'aimerais vous transmettre une dernière petite information sur la façon dont se fait une telle analyse. Condition féminine Canada a les ressources nécessaires, à l'intérieur de votre propre gouvernement, pour faire une telle analyse lors de l'élaboration d'une politique.

    Je pense que notre position est claire et précise. On sera prêtes à répondre à des questions, s'il y a lieu, monsieur Bélanger.

¹  +-(1555)  

+-

    Le coprésident (M. Mauril Bélanger): Merci beaucoup, madame Duguay.

    M. Reid.

[Traduction]

+-

    M. Scott Reid (Lanark--Carleton, Alliance canadienne): Avons-nous des textes de tous les groupes que nous recevons?

    Le coprésident: Le prochain groupe passe à 16 h 30. Nous avons entendu un groupe.

    M. Scott Reid: Je vois bien. Je voulais seulement savoir ce qu'il en est des mémoires. Y en a-t-il un de la Fédération de la jeunesse canadienne-française?

[Français]

+-

    Le coprésident (M. Mauril Bélanger): Ces documents ne sont pas disponibles dans les deux langues. Ils seront traduits et distribués plus tard.

+-

    M. Scott Reid: Très bien.

    J'aimerais que les témoins me disent quelles sont les relations entre les groupes. Est-ce que chaque groupe est indépendant des autres ou s'il y a des liens entre les groupes? Est-ce qu'un groupe est un sous-groupe d'un autre groupe qui est ici?

+-

    M. Georges Arès: Chaque groupe est indépendant. Les jeunes et les femmes ont choisi de devenir membres de notre fédération, comme d'autres, comme l'Association des juristes d'expression française et l'Association de la presse francophone. Donc, chaque groupe est indépendant et il n'y a pas de lien au sein des conseils d'administration.

+-

    M. Scott Reid: Qu'en est-il du financement?

+-

    M. Georges Arès: Il est séparé.

+-

    M. Scott Reid: Votre groupe, monsieur Arès, est essentiellement une fédération des autres groupes, n'est-ce pas?

+-

    M. Georges Arès: C'est une fédération qui regroupe toutes les associations provinciales et territoriales qui représentent leur communauté, plus quatre groupes nationaux, comme je l'ai mentionné.

+-

    M. Scott Reid: J'ai seulement la version anglaise de votre présentation.

[Traduction]

    Dans la version anglaise, qui est la seule que j'ai, vous dites que si les ministères ne respectent pas leurs obligations en vertu de l'article 7 de la loi, ils devraient essentiellement mettre les ressources financières nécessaires à la disposition des communautés, directement ou indirectement, pour qu'elles puissent elles aussi tirer pleinement parti de l'initiative en question.

    Cela m'intrigue. Je me demande si vous pourriez nous donner un peu plus de détails sur la manière dont cela fonctionnerait dans la pratique, si vous avez réfléchi à tous les détails.

+-

    M. Georges Arès: Nous n'avons pas arrêté tous les détails, mais j'ai la certitude que nous serions plus qu'heureux de rencontrer les ministères qui ne jugent pas nécessaire de répondre à nos besoins dans le cadre de leurs programmes, pour voir comment nos communautés pourraient recevoir ces ressources et les gérer directement.

    Le fait est que certains ministères ne veulent pas répondre à nos besoins dans le cadre de leurs programmes et initiatives et, par conséquent, certaines communautés en souffrent.

+-

    M. Scott Reid: Est-ce qu'on passerait par votre organisation? Je ne veux pas vous embarrasser si vous n'avez pas réfléchi à tous les détails, je me demande seulement comment ça marcherait.

º  +-(1600)  

+-

    M. Georges Arès: Il y a des organisations communautaires dans toutes les provinces et tous les territoires qui sont parfaitement capables de s'occuper de cet aspect. Dans toutes les provinces et tous les territoires, elles ont défini leurs priorités en matière de développement. Elles connaissent leurs besoins et savent comment les ministères pourraient combler ces besoins comme il faut. Chose certaine, il leur appartiendrait de rencontrer les représentants de ces ministères dans leurs provinces et territoires pour voir comment cela pourrait se faire.

    Ce serait bien mieux si tous les ministères, lorsqu'ils mettent au point leurs programmes et initiatives, voyaient d'eux-mêmes à combler les besoins des communautés de langue officielle et trouvaient le meilleur moyen de les combler. C'est l'attitude que nous voudrions voir émerger dans chaque ministère, et cela est nécessaire dans notre pays. Je préfère que l'on procède de cette manière plutôt que d'avoir à rencontrer un ministère et de lui dire: «Vous ne comblez pas nos besoins; donnez-nous l'argent, et nous ferons le travail nous-mêmes.» Ce n'est pas ce que nous voulons de notre gouvernement.

    Ce serait bien mieux si les ministères faisaient eux-mêmes le travail. Malheureusement, cette volonté a été absente jusqu'à présent dans un grand nombre de ministères et d'organismes gouvernementaux. Voilà pourquoi nous avons besoin d'une agence centrale quelconque, qui aurait autorité sur certains ministères, qui les obligerait à s'acquitter de leurs responsabilités en vertu de la Constitution de notre pays, de la Loi sur les langues officielles, et qui traiterait avec les communautés pour voir comment ils peuvent combler leurs besoins. C'est ça qui compte.

[Français]

+-

    M. Scott Reid: J'ai une dernière question qui s'adresse aux trois groupes. Est-ce qu'il y a un homologue de langue anglaise pour chacun des groupes? Par exemple, y a-t-il une fédération de la jeunesse canadienne-anglaise ou une fédération nationale des femmes d'expression anglaise?

+-

    M. Michel Hamon Liboiron: Oui, il existe des groupes au Canada anglais. On peut penser, entre autres, à la Students Commission, qui est un organisme national. C'est plus difficile dans chacune des provinces, bien que la Students Commission soit présente dans chacune des provinces. Voilà pour notre côté.

+-

    Mme Brigitte Duguay: Si vous me permettez de répondre pour les femmes, je dirai qu'il y a des regroupements de femmes dans différents secteurs d'intervention, ainsi que des regroupements nationaux de femmes anglophones.

+-

    Le coprésident (M. Mauril Bélanger): Sénateur.

+-

    Le sénateur Jean-Robert Gauthier (Ottawa--Vanier, Lib.): Je vais commencer par M. Arès parce que sa présentation était intéressante. Les vôtres l'étaient aussi, mais il a touché des points qui semblaient être plus névralgiques.

    Monsieur Arès, vous venez d'Edmonton, si j'ai bien compris. Vous êtes venu jusqu'ici aujourd'hui pour nous parler pendant cinq minutes, mais on vous a donné dix minutes. C'est bien cela?

+-

    M. Georges Arès: Merci pour les dix minutes.

+-

    Le sénateur Jean-Robert Gauthier: Qu'est-ce que vous voulez? Ce n'est pas ma faute. Ce n'est pas moi qui ai décidé ça.

    Vous avez parlé d'un régime de retrait. J'aimerais savoir ce qui vous porte à parler d'un régime de retrait.

+-

    M. Georges Arès: Je pense que ça existe déjà au niveau des provinces, monsieur le sénateur. Si le gouvernement fédéral ne fait pas quelque chose dans certains domaines pour les provinces, il y a un régime de retrait qui permet aux provinces de fournir les services qui sont fournis ailleurs par le gouvernement fédéral.

    Je pense qu'il est absolument nécessaire qu'on tienne compte des besoins des communautés de langue officielle. S'il y a un ministère ou une agence ou une institution qui ne veut pas voir à ces besoins, on ne peut pas laisser tomber les communautés dans des domaines où ces ministères-là pourraient agir. Il faut donc trouver une façon de le faire.

    Je dois dire que dans les communautés, on a les professionnels nécessaires pour le faire si les ministères ne veulent pas le faire. On est capables de le faire et on le fait depuis longtemps.

+-

    Le sénateur Jean-Robert Gauthier: Je n'ai pas beaucoup de temps, monsieur Arès. Le président va me couper la parole dans deux minutes.

    Vous vous appuyez sur le précédent qui existe actuellement entre les provinces et le fédéral: quand il y a un accord national, on peut s'en détacher. C'est ça?

+-

    M. Georges Arès: Absolument. Oui.

+-

    Le sénateur Jean-Robert Gauthier: Vous avez aussi soulevé la question d'un mécanisme d'imputabilité. Que voulez-vous dire par un mécanisme d'imputabilité? Est-ce que c'est les institutions fédérales qui seraient imputables? Elles le sont actuellement de toute façon. Qu'est-ce que vous avez en tête quand vous dites cela?

+-

    M. Georges Arès: On veut que les ministères soient imputables au Conseil privé et au Parlement. Ils devraient être tenus de rendre des comptes et de faire des rapports démontrant comment ils ont rempli les obligations que leur donne la partie VII.

    C'est dans ce sens-là qu'on parle d'un mécanisme d'imputabilité. En ce moment, il n'y en a pas en vertu de la partie VII. Le ministère du Patrimoine canadien, en vertu de l'article 42, peut travailler auprès des autres ministères, mais n'a aucune autorité sur ces ministères pour s'assurer qu'ils respectent leurs obligations en vertu de la partie VII. Alors, je pense qu'il est important d'avoir une instance qui ait cette autorité et qui oblige les ministères à assumer les responsabilités que leur donne l'article 41 de la partie VII.

º  +-(1605)  

+-

    Le sénateur Jean-Robert Gauthier: Vous avez dit que le coordonnateur, M. Stéphane Dion, devrait coordonner quelque chose de tangible. Vous avez dit qu'il devrait coordonner l'action des ministères. Ça, c'est dans la Loi sur les langues officielles: c'est le ministère du Patrimoine canadien qui doit faire cela.

    Quand vous dites que M. Dion devait le faire, est-ce que vous me dites que Patrimoine Canada ne fait pas son travail?

+-

    M. Georges Arès: Je pense qu'il est difficile pour Patrimoine Canada de faire un travail lorsqu'il n'a pas d'autorité sur les autres ministères. C'est un travail de sensibilisation et d'influence qui est très difficile, qui prend beaucoup de temps et qui nous laisse souvent sur notre faim, justement parce qu'il n'a pas l'autorité d'obliger les autres ministères à assumer leurs responsabilités.

    Il a développé ce qu'on appelle un PICLO. Même avec le PICLO, ça prend du temps et ce n'est pas facile. Les ministères n'embarquent pas rapidement et ne consultent vraiment pas. Ils produisent des plans d'action qui ne répondent pas à nos besoins.

    Je pense donc qu'il est nécessaire qu'il y ait une autorité plus haute. Le ministère du Patrimoine canadien est au même niveau que les autres ministères. Nous voudrions qu'il y ait une instance qui ait l'autorité sur tous les ministères. C'est nécessaire.

+-

    Le sénateur Jean-Robert Gauthier: Monsieur Liboiron, vous avez appuyé la recommandation du président de la Fédération des communautés francophones et acadienne en disant que vous aussi, vous aimeriez que M. Dion, le président du Conseil privé, soit la personne responsable des programmes fédéraux et du développement de la promotion et de la protection des communautés minoritaires de langue officielle. Est-ce que je me trompe?

+-

    M. Michel Hamon Liboiron: Non, absolument pas.

+-

    Le sénateur Jean-Robert Gauthier: Vous êtes trop jeune pour vous en souvenir, mais moi je m'en souviens. En 1972 ou 1973...

+-

    M. Michel Hamon Liboiron: Vous avez raison.

+-

    Le sénateur Jean-Robert Gauthier: ...il y avait eu une initiative de ce genre-là. Lorsqu'on a mis sur pied la Fédération des communautés francophones et acadienne, qui s'appelait dans ce temps-là la Fédération des francophones hors Québec... Je suis hors Québec, mais je n'aime pas ça me faire identifier ainsi, parce qu'il y a des millions de francophones hors Québec. Il y a 50 et quelques millions de Français en France, en Belgique, en Suisse et ainsi de suite. Donc, je n'aime pas me faire identifier comme un francophone hors Québec.

    En 1972 ou 1973, dans cette optique de mettre sur pied un programme global de développement pour les communautés, M. Trudeau, en tant que premier ministre, avait répondu à cette initiative en nommant M. Pierre Juneau comme coordonnateur. M. Juneau n'était ni député ni ministre dans ce temps-là. Il a essayé de se faire élire, mais il n'a pas réussi, et l'idée est tombée.

    Si j'ai bien compris, M. Arès et tous les autres intervenants veulent avoir accès à une personne responsable de la promotion, du développement et, éventuellement, de l'épanouissement des communautés. Est-ce que je vous comprends bien?

+-

    M. Georges Arès: Oui.

+-

    M. Michel Hamon Liboiron: Oui.

+-

    Le sénateur Jean-Robert Gauthier: Si le plan global ou le plan d'action que M. Dion soumet correspond à vos exigences, quels seraient au minimum--non pas au maximum mais au minimum--les frais de cela pour les jeunes d'aujourd'hui? Avez-vous une idée du montant que cela pourrait représenter au niveau des programmes?

+-

    M. Michel Hamon Liboiron: C'est une excellente question. J'admets qu'on a...

º  +-(1610)  

+-

    Mme Chantal Berard: Ce dont on a besoin et ce qu'on a présentement...

+-

    M. Michel Hamon Liboiron: ...c'est deux choses. Demandez-vous quel pourcentage devrait être réservé à la jeunesse dans l'éventualité de l'adoption d'un plan?

+-

    Le sénateur Jean-Robert Gauthier: En fait, ce n'est pas la réponse que je cherche, mais je vais vous donner un semblant de réponse. Parlez-moi de ce que vous faites. Parlez-moi de votre budget, des coupures que vous avez subies et des besoins que vous avez et que vous constatez à tous les jours.

+-

    M. Michel Hamon Liboiron: Parfait. Je vais commencer par vous parler de la fédération et de ce qu'elle fait. Elle est l'unique organisme rassembleur de la francophonie canadienne jeunesse. Comme la FCFA, nous avons des membres dans chacune des provinces et chacun des territoires, à l'exception du Québec et du Nunavut. L'exemple le plus marquant de ce que nous faisons est celui des Jeux de la francophonie canadienne, un rassemblement qui regroupe...

+-

    Le coprésident (M. Mauril Bélanger): La question que le sénateur vous a posée est une question très difficile. Si vous ou les autres témoins, après la réunion d'aujourd'hui, aviez des idées ou des réflexions à nous faire parvenir, cela pourrait nous être utile. Ne vous gênez pas. Il serait bon que vous le fassiez assez rapidement, disons d'ici une semaine. C'est difficile à chiffrer.

+-

    M. Michel Hamon Liboiron: Je ne veux pas m'aventurer à vous donner un chiffre.

    Comme je l'ai dit dans le mémoire, il faut comprendre que la jeunesse est le fondement de la communauté. On appelle souvent cela un secteur, ce que je n'approuve pas particulièrement. Pour le financement, il faut donner une importance accrue à la jeunesse pour qu'elle puisse régénérer la communauté. Voilà.

+-

    Le coprésident (M. Mauril Bélanger): Excusez-moi. Je dois donner la parole à M. Sauvageau.

+-

    M. Benoît Sauvageau (Repentigny, BQ): Mesdames, messieurs, merci d'avoir accepté notre invitation.

    Ceux et celles qui suivent le dossier de la francophonie sont au courant que M. Dion nous a annoncé, il y a quelque temps, le dépôt d'un plan d'action. De la manière dont les choses se présentaient, un plan d'action aurait été déposé sans consultation officielle ou sans qu'on puisse savoir ce que vous voulez retrouver et, surtout, ne pas retrouver dans le plan d'action. Je pense que ce n'est pas le premier plan d'action que le gouvernement va vous présenter. Comme la commissaire aux langues officielles l'a déjà signifié dans un de ses rapports, le temps des voeux pieux est passé et il faut maintenant passer à l'action. Elle disait que le train est à la gare, et on disait hier à la blague que le train avait probablement un problème de transmission parce qu'il n'était pas parti. Il manque juste la transmission.

    Donc, il était de votre intérêt qu'on vous entende. On aura entendu 17 ou 19 groupes pendant ces deux séances, et j'espère que le ministre Dion aura eu l'oreille attentive pendant vos présentations pour qu'on puisse retrouver ce que vous voulez dans le plan d'action, mais surtout ne pas y retrouver ce que vous ne voulez pas. Ce que vous voulez, ce n'est pas juste de l'argent. Vous voulez des gestes concrets de la part du gouvernement.

    Je vais poursuivre sur le premier commentaire du sénateur Gauthier, sur les modifications que vous souhaitez qu'on apporte aux articles 42 et 43 de la partie VII de la Loi sur les langues officielles. Moi aussi, je veux bien comprendre, parce que je pense qu'à force de le répéter, vous le ferez peut-être comprendre à d'autres personnes.

    Présentement, selon les articles 42 et 43, c'est le ministère du Patrimoine canadien qui est responsable de l'application ou de la gestion de la Loi sur les langues officielles. Vous voudriez qu'on modifie ces articles et probablement les articles qui s'y rattachent. Comme je ne suis pas un expert de la Loi sur les langues officielles, ne me demandez pas si 16 correspond à 52 et ainsi de suite. Vous souhaitez qu'on donne au président du Conseil privé les rôles qui sont actuellement ceux du ministère du Patrimoine canadien et du Conseil du Trésor. Est-ce bien l'intention de la FCFA?

+-

     Deuxièmement, le plan d'action sera déposé. Un coup qu'il sera déposé, quel suivi fera-t-on? Je m'interroge toujours sur cet aspect. Hier, j'ai posé la question aux différents groupes et je vous la pose aussi. Est-ce qu'il faut des objectifs? Est-ce qu'il faut des échéanciers? Est-ce que souhaitez certaines réalisations concrètes? Idéalement, quel devrait être le suivi de ce plan global? Et pour qu'on cesse de dépenser inutilement temps et argent, serait-il possible qu'il y ait un panel pour les différends linguistiques entre les communautés francophones et le gouvernement canadien? Il y aurait à la table des gens du gouvernement fédéral, des gens des gouvernements provinciaux et des gens des communautés francophones. On se chicanerait, mais au moins cela ne vous coûterait rien et on trouverait une solution. On l'a déjà fait quand il s'agissait d'argent, que ce soit dans le cas du sucre, de l'acier ou du bois d'oeuvre. Cela peut peut-être se faire dans d'autres dossiers.

    Je vais m'arrêter là pour le moment parce que je veux vous laisser le temps de répondre, mais j'aurai d'autres questions à vous poser.

º  +-(1615)  

+-

    M. Georges Arès: Vous voulez que je commence, monsieur?

+-

    M. Benoît Sauvageau: C'est à vous de décider.

+-

    M. Georges Arès: Sur les modifications qu'on voudrait voir, je pense que M. Dion a déjà reçu du gouvernement le mandat de coordonner toute l'initiative de la Loi sur les langues officielles.

    Pour ce qui est du Conseil du Trésor, on ne voudrait pas qu'il soit remplacé pour mettre en oeuvre les obligations qu'il a maintenant en matière de réglementation et de services. S'il est nécessaire de modifier l'article 42 pour s'assurer que l'agence centrale du Conseil privé ait une autorité sur les autres ministères, eh bien, cela se suit logiquement.

    Pour ce qui est des plans de suivi, nous aimerions qu'il y ait des mécanismes de consultation et concertation dans les domaines du développement de nos communautés. On fait déjà un certain travail auprès de certains ministères et on s'aperçoit qu'on peut faire beaucoup de chemin lorsqu'il y a ces mécanismes de consultation et concertation. Je peux mentionner Santé Canada. Il y a un comité conjoint avec Citoyenneté et Immigration, qui siège aujourd'hui, qui commence dès aujourd'hui un travail sur toute la question de l'intégration et de l'accueil des immigrants francophones dans nos communautés.

    Ce sont les mécanismes qui nous montrent le chemin, mais il va falloir quand même qu'il y ait une agence centrale pour cela, avec des mesures d'imputabilité pour s'assurer que ça va aller de l'avant.

    Pour ce qui est de la participation des gouvernements provinciaux, certains gouvernements provinciaux sont prêts à siéger. J'ai mentionné le comité consultatif en santé. Il y a trois gouvernements provinciaux qui siègent à ce comité consultatif pour essayer de voir comment on pourrait développer les soins de santé en français. Ce ne sont pas tous les gouvernements qui sont là, mais ceux qui sont de bonne volonté et qui le veulent peuvent être là. Je pense qu'on doit commencer par cela. Ce qui est intéressant, c'est qu'on peut maintenant s'asseoir avec des représentants du gouvernement fédéral, des représentants de nos communautés et des représentants des gouvernements provinciaux dans certains domaines. C'est vraiment quelque chose de nouveau.

    Dans le passé, on a souvent demandé, et cela nous a souvent été refusé, que les communautés participent à des discussions entre gouvernements. Lorsqu'on le fait, je pense qu'on s'aperçoit qu'on peut faire beaucoup de progrès avec tous ceux qui sont assis à la table.

+-

    Le coprésident (M. Mauril Bélanger): Est-ce que quelqu'un d'autre veut intervenir? D'accord.

+-

    M. Benoît Sauvageau: Pendant que je vous écoutais, monsieur Liboiron, il m'est venu à l'esprit deux commentaires qui sont peut-être irrévérencieux.

    Présentement, pendant quatre semaines, quatre mercredis, il y a le Forum pour jeunes canadiens qui se promène sur la Colline parlementaire. Ils ont des ateliers et tout cela. Il y a quatre fois 150 étudiants et étudiantes de partout au Canada. Est-ce que le budget de cette activité au gouvernement fédéral peut se comparer au budget que les jeunes francophones ont dans le Canada? Je parle d'une activité.

+-

    Mme Chantal Berard: Sûrement.

+-

    M. Benoît Sauvageau: Donc, vous avez autant d'argent qu'eux.

+-

    Mme Chantal Berard: Je connais très bien le forum, mais je ne connais pas son budget de fonctionnement parce qu'on partage rarement ce genre d'information. Puisque qu'il y a quatre rencontres de 150 jeunes, je dirais que son budget est probablement très près de notre budget de fonctionnement annuel.

+-

    M. Benoît Sauvageau: Est-ce que cela arrive souvent que l'on invite la FJCF, c'est-à-dire des jeunes francophones de toutes les provinces canadiennes, à participer à ce genre de sommet à Ottawa, toute dépense...

+-

    M. Michel Hamon Liboiron: C'est même très rare qu'on le fasse.

+-

    M. Benoît Sauvageau: Ils le font pour les autres. Je vous propose de le demander. Ils n'auront aucune raison de vous le refuser. Comme ça, des jeunes francophones de la Colombie-Britannique et de la Saskatchewan seront invités à venir faire la même chose. C'est une suggestion que je vous fais.

    Vous avez aussi parlé des écoles d'immersion. Étant donné que la jeunesse est le fer de lance des communautés francophones, pourriez-vous nous expliquer de quelle façon on devrait travailler plus étroitement avec les ayants droit qui ne fréquentent pas les institutions? Les écoles d'immersion, c'est beau, mais s'il y a 50 p. 100 des ayants droit qui ne les fréquentent pas, comment pourrait-on, dans le plan d'action, sensibiliser ces jeunes?

º  +-(1620)  

+-

    M. Michel Hamon Liboiron: La première chose à faire serait d'appuyer les plans qui existent dans les différentes divisions scolaires francophones autour du pays. Je sais que la plupart des commissions scolaires francophones qui se situent à l'extérieur du Québec, sinon toutes, ont un plan qui fonctionne, semblerait-il, plus ou moins bien. Évidemment, il s'agit toujours d'essayer d'accueillir de plus en plus d'ayants droit. Donc, la meilleure façon de faire cela serait d'appuyer concrètement les plans d'action qui existent déjà dans chacune des commissions francophones autour du pays. Il ne s'agit pas de dédoubler nos efforts, mais d'appuyer concrètement une instance qui existe déjà.

+-

    Le coprésident (M. Mauril Bélanger): Madame Berard, voulez-vous ajouter quelque chose?

+-

    Mme Chantal Berard: Au niveau des provinces, il nous manque aussi un véhicule de recrutement pour les jeunes qui sont dans les écoles d'immersion parce que nos activités sont surtout des activités parascolaires. On parle beaucoup de leadership et de rassemblement, entre autres. On essaie d'aller chercher les jeunes qui sont dans les écoles d'immersion, qui sont des ayants droit, pour les amener à vivre ces activités-là afin de leur donner le goût de faire possiblement un transfert ou, du moins, de vivre des activités dans leur langue maternelle.

+-

    Le coprésident (M. Mauril Bélanger): Merci, madame Bédard. Merci, monsieur Sauvageau.

+-

    M. Benoît Sauvageau: Monsieur le président, si vous me le permettez, je voudrais juste tenter de comprendre parce que je n'y arrive pas.

    Y a-t-il des jeunes francophones qui ne vont pas à l'école française, mais qui fréquentent des écoles d'immersion française?

+-

    Mme Chantal Berard: Oui, il y en a beaucoup.

+-

    Le coprésident (M. Mauril Bélanger): Madame Thibeault.

+-

    Mme Yolande Thibeault (Saint-Lambert, Lib.): Merci, monsieur le président. Merci d'avoir accepté notre invitation.

    Madame Duguay, vous nous avez parlé de l'analyse comparative entre les sexes. Merci de nous avoir apporté ce document. Je pense que la plupart de mes collègues du sexe féminin le connaissent très bien, mais peut-être que ça va nous rafraîchir la mémoire.

    Depuis quelque temps déjà, j'essaie de comprendre à quoi vous voulez en venir en parlant de cette analyse? Comment espérez-vous vous servir de cette analyse?

+-

    Mme Brigitte Duguay: Dans l'élaboration d'une politique comme telle, il importe de s'assurer que l'on considère toujours la différence entre les sexes. Que ce soit au niveau de la mise sur pied ou de l'application d'une politique, c'est un travail qui va être fait par des experts dans le domaine. L'analyse comparative entre les sexes vient complémenter, appuyer les travaux des gens qui établissent des politiques. Souvent, toutes les décisions prises à l'intérieur de la politique sont basées sur la différence. On considère la différence à tous les niveaux, que ce soit physiologique, psychologique, social ou autres. De vous donner les résultats de tout cela fait en sorte que souvent, on se sent impliqués dans le processus décisionnel.

    J'ai plein d'excellentes raisons pour appliquer la politique. Pour faire le travail, c'est sûr qu'il va falloir qu'il y ait les experts de l'établissement de politiques et les experts en analyse comparative selon les sexes, mais les résultats vont être les mêmes. Il va y avoir une égalité dans tout ce qui va se passer au niveau...

    On ne commencera pas à vous donner un cours sur le féminisme et tout cela, mais les politiques ne sont pas établies en fonction des besoins des femmes. Mon argument, c'était de dire que, puisque la majorité du temps ce sont les femmes qui assurent le développement communautaire, puisqu'elles sont derrière tous les dossiers dans tous les secteurs, c'est important alors que les politiques soient établies.

+-

    Mme Yolande Thibeault: En somme, ce que vous dites, c'est que vous ne voulez pas que les femmes soient oubliées dans le processus ou dans le plan d'action.

º  +-(1625)  

+-

    Mme Brigitte Duguay: C'est exactement cela.

+-

    Mme Yolande Thibeault: Monsieur Liboiron, vous nous avez parlé d'un volet jeunesse. Vous nous avez même dit que, d'après vous, votre communauté était à risque et que vous aimeriez avoir des programmes fédéraux. J'imagine que vous voulez dire un programme dans le genre de ceux que l'on offre présentement aux autres jeunes à risque. Avez-vous quelque chose de concret en tête? Avez-vous pensé à un projet en particulier, par exemple des travaux d'été subventionnés particulièrement pour votre communauté?

+-

    M. Michel Hamon Liboiron: Je pense que c'est plus grand que ça. Quand on a dit qu'on voulait un secteur jeunesse dans le plan d'action de M. Dion, ce qu'on a dit, c'est que la jeunesse est à la base de la communauté. Nous voulons assurer la continuité de la communauté. Je pense que tout le monde est d'accord là-dessus.

    En ce qui a trait à des choses concrètes, il s'agirait premièrement d'appuyer le réseau qui existe déjà. Il ne faut quand même pas réinventer la roue. Il y a des organismes, comme nous l'avons dit, dans chacune des provinces et dans chacun des territoires, à l'exception du Nunavut, que nous aimerions pousser, évidemment, et il y en a à l'extérieur du Québec. Donc, ce serait d'abord d'appuyer les instances qui existent déjà. À l'intérieur de ces instances, on pourrait créer de nouveaux projets qui répondent mieux au problème de décrochage culturel et d'assimilation. On pourrait y contribuer, comme M. Sauvageau l'a dit, en dirigeant ces gens-là dans des genres d'écoles d'immersion. Comme Mme Berard le disait, le problème est souvent que les jeunes dans les écoles d'immersion sont en effet des ayants droit, des gens qui pourraient être dans nos écoles francophones et acadiennes un peu partout. Les gens conçoivent mal comment un réseau jeunesse peut affecter à ce point-là, mais en conclusion, dans la mentalité des jeunes, le réseau est tout aussi important pour leur identité culturelle, pour leur identité tout court que le système éducatif. Donc, c'est avec le réseau jeunesse qu'on peut assurer la continuité.

+-

    Mme Yolande Thibeault: Je vous remercie beaucoup.

+-

    Le coprésident (M. Mauril Bélanger): Monsieur Godin.

+-

    M. Yvon Godin (Acadie--Bathurst, NPD): Merci, monsieur le président.

    J'aimerais vous souhaiter à tous la bienvenue. Il y a des visages qui sont familiers, que nous avons vus hier soir. Nous poursuivons aujourd'hui nos rencontres.

    Premièrement, j'aimerais dire, au sujet des femmes, que si vous attendez aussi longtemps que les femmes ont attendu pour l'équité salariale qu'elles n'ont pas encore eue, vous avez encore un bon bout de chemin à faire, malgré que vous soyez 52 p. 100. Je pense que les gouvernements n'ont pas pris leurs responsabilités et n'ont pas fait preuve de leadership, au Canada comme dans les provinces, envers les femmes. Alors, bonne chance. Continuez votre bataille. Je peux vous dire que je suis à 300 p. 100 derrière vous.

    Là-dessus, je veux revenir sur une chose qui s'est passée ici hier soir, alors que quelqu'un a dit à un des témoins--je ramène cela sur le tapis--qui était représentant des francophones de la région des Territoires du Nord-Ouest... Il disait qu'il y avait 50 p. 100 de francophones et qu'il n'y en avait plus que 3 p. 100.

    Maintenant, si on en arrive à M. Dion, le sauve-tout-de-tout, il va sauver toute la planète ou du moins le Canada. Comme président du Conseil privé qui est un responsable sans portefeuille qui ne fait que taper dans le dos des autres ministres, est-ce qu'il pourra faire avancer le dossier? Est-ce qu'on a fait du chemin, ou si on a encore seulement créé de l'espoir? On va attendre M. Dion et souhaiter qu'il fera quelque chose.

    Je trouve que vous n'êtes pas très exigeants. Honnêtement, je trouve que vous ne frappez pas fort. Ça fait 35 ans que ça ne marche pas. Alors, M. Dion va être le sauveur de tout, sans portefeuille. Est-ce que ça ne devrait pas plutôt être le premier ministre du Canada qui fasse des déclarations en disant qu'il accepte les deux langues officielles du Canada et en mettant une machine en place afin que chaque ministère soit responsable.

    Je voudrais entendre vos réactions, parce que j'ai peur de la direction dans laquelle on s'en va. Ce n'est pas que je veuille être pessimiste, mais je veux être réaliste. Je trouve que c'est juste d'acheter du temps. Le gouvernement est en train d'acheter du temps. Des études et des plans, on en a vu à la tonne et on en voit à tous les jours. C'est de l'action. C'est la loi.

    On est encore en train de s'obstiner afin de savoir si c'est déclaratoire ou exécutoire. Il n'y a pas de dents dans la loi. Air Canada enfreint la loi à tous les jours. On lui tape sur les doigts et elle continue d'enfreindre la loi. On a tous ces organismes autour qui font cela et c'est toujours la même histoire. Je pense que je veux juste provoquer une pensée pour essayer d'avoir des réponses, pour savoir comment vous voyez cela.

º  +-(1630)  

+-

    M. Georges Arès: Monsieur Godin, je pense que Mme Adam, dans son premier rapport, a fait allusion au manque de leadership flagrant au plus haut niveau. Je pense que c'était en réponse à ce commentaire que le gouvernement fédéral, M. Chrétien, a répondu en ajoutant des responsabilités au ministre Dion. On lui fait confiance, pour l'instant. On veut voir ce qu'il va produire.

    C'est important qu'il relève le défi d'actualiser l'article 41 pour qu'il ne soit pas nécessaire qu'on se présente devant les tribunaux pour obliger le gouvernement fédéral à respecter sa responsabilité conformément à l'article 41.

+-

    M. Yvon Godin: Excusez-moi. Le premier commentaire qu'il a fait, quand il est venu au comité, a été de dire qu'il n'était pas responsable, qu'il n'était là que pour coordonner. Deuxièmement, il a dit qu'il pensait qu'on devrait faire des bilingues. C'est quasiment, déjà en partant...

+-

    M. Georges Arès: Je pense qu'il y a eu une évolution dans la pensée de M. Dion. On a pu l'influencer. Lorsqu'il a fait ces commentaires-là, on est entrés en contact avec les gens de son bureau, et on leur a dit qu'on voulait leur présenter notre façon de voir les choses sur une politique de développement global. Ils nous ont dit de leur préparer quelque chose. Alors, ils nous ont indiqué qu'ils étaient prêts à consulter et à voir ce que nous pensions que devrait être une politique de développement global.

    Alors, je pense qu'il faut lui donner crédit pour cela. Je pense qu'il a encore de la consultation à faire. Il y a certaines communautés et certains organismes qui n'ont pas été consultés encore, mais j'espère qu'il va le faire avant de produire son rapport final. On veut qu'il prenne son temps.

    La politique de développement global, nous l'attendons depuis les débuts de la fédération, et je dois dire que les Canadiens et les Canadiennes l'attendent depuis le début de la Confédération. S'il y avait eu une politique de développement global pour les communautés de langue officielle en 1867, on serait beaucoup plus avancés qu'on l'est maintenant; c'est vrai. Si on l'avait eue en 1976, on serait beaucoup plus avancés qu'on l'est maintenant.

    Mais maintenant, il a une occasion, en réponse au rapport de Mme Adam, de démontrer le leadership nécessaire. Je pense que le train est en train de se remplir; on espère qu'il est en train de se remplir. On va voir de quelle [Note de la rédaction: inaudible] il est rempli lorsqu'il va partir. Mais je pense, compte tenu du fait qu'il consulte notre fédération et qu'il est prêt à recevoir de la documentation, que cela indique peut-être qu'il va y avoir quelque chose de très bien là-dedans. On l'espère. Le défi est là et nous, nous voulons qu'il ait une autorité sur les ministères, parce que dire que le premier ministre pourrait dire de respecter la dualité linguistique, d'aller de l'avant, de faire cela... Je pense que le premier ministre du temps, M. Mulroney, avait écrit une lettre à tous ses ministères, en 1989, pour leur dire de respecter les obligations du gouvernement en vertu de l'article 41, mais...

+-

    M. Yvon Godin: C'est un ministre des Finances, mais sans argent.

+-

    M. Georges Arès: C'est ça, justement. Alors, s'il n'y a pas une autorité centrale avec un pouvoir sur les ministères pour les obliger à aller de l'avant, à se concerter avec les communautés afin de voir ce que sont leurs besoins et s'il n'y a pas dans leurs programmes une initiative d'y répondre, je pense qu'on va manquer le bateau. Alors, c'est de cela qu'on a besoin. On a besoin d'une personne qui va s'assurer que cela va se faire.

+-

    Le coprésident (M. Mauril Bélanger): Merci, monsieur Arès. Merci, monsieur Godin.

    Une toute petite question, monsieur Binet. Ensuite, on passera à l'autre groupe. Allez-y.

+-

    M. Gérard Binet (Frontenac--Mégantic, Lib.): Je voulais couvrir tout le débat que M. Godin a fait, mais je n'en aurai pas le temps. C'est que je suis vraiment conscient qu'on a une bonne commissaire aux langues officielles. Je n'ai aucun doute là-dessus. On a aussi M. Dion. Personne ne peut douter de ses compétences. On a aussi un bon premier ministre, qui est francophone. Donc, d'après moi, on peut mettre du positif là-dedans, monsieur Godin.

    Ce que j'ai aimé dans la rencontre, c'est l'idée de l'implication du comité des femmes. Je trouve cela très bien. Quand cette implication a-t-elle commencé? Quand la Fédération nationale a-t-elle été créée?

+-

    Mme Brigitte Duguay: Ça fait 88 ans.

+-

    M. Gérard Binet: Quatre-vingt-huit ans.

+-

    Mme Brigitte Duguay: C'est en 1914 que la Fédération nationale des femmes canadiennes françaises a été créée. On en a fait du chemin.

+-

    M. Gérard Binet: J'entendais souvent parler de la fierté de parler français. On sait que la mère, au tout début, peut facilement inculquer des idées. Je peux vous dire que je trouve cela très bien, mais manifestez-vous un peu plus fort. D'après moi, c'est une bonne porte d'entrée pour aider à résoudre le problème.

+-

    Le coprésident (M. Mauril Bélanger): Alors, il ne me reste qu'à remercier ce premier groupe de témoins de sa patience, de sa contribution.

    Nous allons faire une pause de deux minutes, question de changer de place, et nous reviendrons tout de suite. Je suspens l'assemblée pour deux minutes.

º  +-(1635)  


º  +-(1641)  

+-

    Le coprésident (M. Mauril Bélanger): Mesdames et messieurs, je déclare que nous avons le quorum pour entendre les témoins.

    Selon l'ordre de présentation que j'ai devant moi, ce sera premièrement, de la Fédération nationale des conseillères et conseillers scolaires francophones, M. Paul Charbonneau et M. Boily. Ensuite, de l'ACELF, l'Association canadienne d'éducation de langue française, nous entendrons Mme Ouellet et M. Gérald Boudreau, puis, de la Commission nationale des parents francophones, nous entendrons M. Jean Giroux-Gagné.

    Nous avons reçu des documents, mais puisqu'ils ne sont qu'en français, nous ne pouvons les distribuer: nos règles nous l'interdisent. Nous les ferons traduire avant de les distribuer à tous les membres du comité.

    Vous avez vu un peu comment ça se déroule. On va essayer d'y aller assez rondement afin qu'il y ait suffisamment de temps pour des questions. Sachez qu'il y aura un vote ce soir à la Chambre, même plusieurs. Alors, vers 17 h 15 ou 17 h 30, nous devrons quitter.

    On commence par monsieur Boily.

+-

    M. Marc Boily (président, Fédération nationale des conseillères et conseillers scolaires francophones): Merci, monsieur le président.

    J'aimerais d'abord vous remercier d'avoir accepté de nous entendre en préparation au dépôt éventuel de la politique de développement global des minorités de langue officielle par le ministre Stéphane Dion. Nous vous en sommes reconnaissants, car il s'agit sans doute de la première fois que vous accueillez officiellement des représentants des conseils scolaires francophones hors Québec.

    Dans cette courte présentation, nous commencerons par vous décrire ce que nous sommes et qui nous représentons pour, dans un deuxième temps, traiter de la situation des écoles françaises et enfin, en troisième lieu, formuler quelques recommandations dont devrait tenir compte une politique de développement global de la francophonie.

    Nous sommes un des derniers organismes francophones et acadiens créé au Canada. Nous représentons 31 conseils scolaires francophones et acadiens et, par ricochet, l'ensemble des conseillers scolaires des conseils et commissions scolaires hors Québec. Nous sommes constitués en fédération depuis une dizaine d'années et nous représentons aussi un rassemblement des directeurs généraux sous notre égide depuis l'an 2000. Nous sommes donc à la fois un groupe récipiendaire de subventions du Programme d'appui aux communautés de langue officielle tout en étant, par l'entremise de nos membres, gestionnaires des subventions du Programme des langues officielles dans l'enseignement.

    Nous sommes enfin le produit de luttes incessantes de la francophonie et des parents qui, depuis l'adoption de la Charte canadienne des droits et libertés, ont eu recours à tous les moyens inimaginables pour obtenir gain de cause, c'est-à-dire la reconnaissance dans les faits des droits reconnus par l'article 23 de la Charte; luttes qui ont donné naissance, sous une forme ou une autre, à 31 conseils scolaires homogènes dont la mission est d'offrir une éducation de qualité à tous ces ayants droit de la francophonie canadienne.

    Grâce à ces combats donc, nous disposons maintenant d'un réseau de plus de 600 écoles dans lesquelles oeuvrent plus de 10 000 professionnels et qui dessert la moitié des ayants droit de la Charte. La moitié seulement des élèves se qualifiant sous l'article 23 sont dans nos écoles. Les autres 150 000 élèves s'assimilent toujours dans d'autres réseaux d'écoles anglaises, d'immersion ou de langue anglaise.

    De plus, le dernier résultat de l'étude PISA de l'OCDE rendu public par le CMEC nous confirme que nos étudiants, bien que très forts en sciences et en mathématiques, sont extrêmement faibles en français. Fruit du hasard? Non.

    Nous croyons essentiellement qu'il s'agit de la confirmation que tant et aussi longtemps que les gouvernements ne nous financeront pas à un niveau permettant d'assumer le principe de réparation inhérent à l'article 23, la situation demeurera au moins inquiétante. Nous avons, à quelques dollars près, le même financement que l'école anglaise. Pourtant, nos besoins sont tout autre et la nature même de l'intervention pédagogique et communautaire fait en sorte que les coûts pour atteindre l'excellence sont nettement supérieurs. En outre, les données qu'il nous a été possible d'obtenir confirment que moins de 10 p. 100 de ce financement provient du gouvernement fédéral. Ainsi, alors que l'article 23 doit réparer les torts du passé, la Cour suprême est bien claire sur cette question: l'absence de structures conformes aux besoins brise et éclate littéralement les communautés faute de concertation, certes, mais—et oui, il faut bien le dire—faute de financement et d'input des conseils scolaires.

    Nous proposons donc au gouvernement fédéral de nous aider à l'aider. Aider en obtenant l'information exacte sur les besoins en éducation, en mettant sur pied un mécanisme d'imputabilité direct dans les dépenses fédérales en éducation et en se dotant d'un budget suffisamment important pour que la francophonie se dote des infrastructures lui permettant de faire preuve d'efficacité et d'efficience dans ses actions auprès des minorités.

    Nous lui proposons de le faire de trois façons: en nous permettant de développer l'expertise nationale destinée à alimenter l'action fédérale; en révisant les cadres de référence dans les relations fédérales-provinciales sur l'éducation de la minorité; en faisant éclater le concept même de l'éducation pour pouvoir finalement doter la francophonie d'un système qui lui serait propre.

    Vous ne seriez pas surpris si nous vous annoncions que nous sommes sous-financés, certes, comme système, mais aussi comme organisme national. Il est temps que les autorités reconnaissent l'importance de dialoguer avec un représentant national des conseils et commissions scolaires qui sera en mesure de faire valoir ces points de vue.

    Le gouvernement canadien a besoin d'un réseau de conseils fort au plan national pour agir directement auprès des minorités.

º  +-(1645)  

Il a le droit d'agir directement auprès de nous. La cour, dans le renvoi sur la sécession du Québec, confirme ce principe non écrit de responsabilité envers la minorité que nous représentons.

    Nous avons la gestion de nos écoles partout au pays. Pourtant les relations du gouvernement du Canada en éducation en français langue première sont exactement les mêmes avec les provinces qu'elles étaient avant la mise en place de la gestion. À quelques iotas près, la façon de financer, de négocier, de consulter n'a pas changé, comme si la création du seul palier de gouvernement francophone ayant des assises constitutionnelles n'avait jamais changé quoi que ce soit. Il est temps que le gouvernement du Canada reconnaisse ou s'aperçoive de notre présence et réalise l'ampleur de ses pouvoirs en éducation de la minorité.

    Nous ne croyons pas qu'une politique de développement global pourrait apporter le résultat escompté si, dans un programme comme les langues officielles en enseignement, on ne reconnaît pas la place que doivent occuper les élus légitimes et officiels de la francophonie en éducation. Nous sommes devenus un partenaire incontournable au même titre que le CMEC. Au gouvernement fédéral de le reconnaître en faisant des ententes bipartites avec les ministères des ententes tripartites.

    Nous devons aborder la problématique au plan national pour trouver des solutions efficaces. Nous le devons, car individuellement, nous nous faisons littéralement manger la laine sur le dos. Individuellement, nous devons laisser le ministère développer des programmes pédagogiques, par exemple, sans notre avis ni notre consentement. Sans une approche nationale, nous devons laisser les ministères faire à leur guise dans le soutien qu'ils désirent apporter aux conseils et commissions scolaires. Sans une approche nationale axée sur les conseils, on se retrouve avec toutes sortes de petits projets financés, on ne sait trop pourquoi, par des groupes communautaires et syndicaux dans des domaines de juridiction de nos conseils et ce, sans notre accord, sans nous consulter et sans même que nous en soyons formellement informés.

    Nous ne sommes pas un système d'éducation comme les autres. En fait nous le sommes, mais cela ne devrait pas être le cas. Présentement, nous évoluons comme des copies conformes des écoles et conseils scolaires anglophones. Nous ne devrions pas l'être, mais on nous a créés comme ça. Nous ne devrions pas l'être, parce que notre mission est beaucoup plus large et que de réparer les torts liés à l'absence historique d'écoles françaises demande beaucoup plus qu'un cours de français à la place du cours d'anglais et des autres cours, comme en anglais, mais en français.

    Nous devrions avoir les moyens d'agir différemment parce que nous avons des besoins différents. Une politique de développement global doit donc être soutenue par un financement massif des besoins de la minorité, mais aussi être soutenue par une volonté marquée que nous ne retrouvons pas présentement de soutenir un système différent qui déborde de notre compréhension actuelle de ce qu'est une école et qui accepte les principes d'excellence, de réparation et cet objectif d'épanouissement culturel et linguistique de l'école française.

    Il faut donc nos critères, nos programmes et un ministre qui s'en fait le défenseur et le porte-parole. Pendant qu'on essaie de «fiter» dans les programmes de la majorité, on perd, à un rythme ahurissant, des enfants au profit de l'école anglaise.

    Alors, si une politique de développement global de la minorité veut dire des écoles pour les deux ans et plus, soit. Si cela veut dire une véritable télévision éducative pancanadienne, soit. Si cela veut dire des infrastructures éducatives, sportives et culturelles complètes, soit. Si cela finit par se traduire par un imposant fonds d'investissement, soit. Si cela veut dire cesser de s'enfarger dans les fleurs du tapis, bravo!

    Certains leaders dans la communauté affirment qu'il leur faut un fonds de réparation. Nous prétendons que le gouvernement du Canada doit faire plus, beaucoup plus que les subventions reçues dans les programmes de tout acabit, beaucoup plus, par exemple, que les subventions du programme de langue officielle en enseignement, soit à peu près 5 p. 100 des dépenses actuelles. Appelons cette demande comme on voudra. Le gouvernement canadien devrait injecter plus pour les minorités. Et l'avenir des minorités passe par l'éducation.

    Nous avons, en effet, besoin d'un effort soutenu, d'un fonds d'investissement qui donnera le ton une fois pour toute, un fond qui donnera les outils et qui fera en sorte que nous cesserons de venir nous plaindre en comité parlementaire, un fonds qui assurera l'avenir des minorités et, par le fait même, l'avenir du Canada, un fonds qui, d'année en année, empêchera la moitié de notre clientèle potentielle de choisir d'autres options que la survie et l'épanouissement.

º  +-(1650)  

+-

    Le coprésident (M. Mauril Bélanger): Merci, monsieur Boily.

    Messieurs et mesdames, je dois vous aviser que, à moins qu'il y ait des changements à la Chambre, la sonnerie devrait commencer à 17 h 15. Cela veut donc dire qu'à 17 h 20 ou 17 h 25 au plus tard, nous devrons quitter. Alors, je voudrais vous inviter à aller un peu plus rapidement.

+-

    M. Benoît Sauvageau: C'est ce que je voulais dire, par respect pour nos invités. En même temps, si nous voulons poser des questions, ça prendrait environ cinq minutes chacun, parce que nous, de toute façon, nous quitterons à 17 h 20.

+-

    Le coprésident (M. Mauril Bélanger): Alors, c'est juste pour vous dire que je vais laisser la parole aux gens, mais que je vais aussi raccourcir les périodes d'intervention des collègues.

    Monsieur Boudreau, à vous la parole.

+-

    M. Gérald C. Boudreau (président, Association canadienne d'éducation de langue française): Monsieur le président, membres du comité mixte, madame la commissaire, messieurs et madame. Depuis 55 ans, l'Association canadienne d'éducation de langue française, autrement connue comme l'ACELF, mène son action dans le domaine de l'éducation, fondement de la vitalité linguistique et culturelle des communautés francophones. Elle a comme mission d'inspirer et de soutenir le développement et l'action des institutions éducatives francophones du Canada.

    Dans le cadre de cette mission pancanadienne, elle oeuvre principalement dans trois sphères d'activités. Premièrement, elle oeuvre dans des activités qui visent la consolidation et le développement des réseaux éducatifs complets et de qualité dans l'ensemble du Canada, du préscolaire au postsecondaire. Deuxièmement, elle oeuvre dans un volet qui vise à créer des activités de recherche, de sensibilisation et d'animation liées au développement d'une identité culturelle francophone dynamique et d'un fort sentiment d'appartenance à la francophonie. Troisièmement, l'ACELF contribue de manière significative à la réflexion, à la concertation entre les organismes et les institutions engagées en éducation francophone, à l'établissement de nombreux partenariats et à la représentation par délégation des intérêts des organismes et des institutions francophones qui travaillent au développement de l'éducation de langue française au Canada.

    Appuyée de cet engagement, l'ACELF désire partager avec vous certaines inquiétudes par rapport à la situation du fait français au Canada. En dépit de l'engagement du gouvernement fédéral stipulé à l'article 41 de la Loi sur les langues officielles du Canada, la réalité par rapport à la francophonie canadienne demeure alarmante et ne reflète pas les résultats escomptés.

    La population des francophones au pays basée sur les statistiques de 1996--malheureusement, nous n'avons pas les dernières statistiques--est passée de 7,5 p. 100, en 1951, à 4,5 p. 100 de la population canadienne. Cette baisse s'explique par une immigration anglophone plus importante, une mobilité interprovinciale défavorable aux communautés francophones et acadienne, des transferts linguistiques, une baisse du taux de fécondité, une pyramide d'âge vieillissante et l'exogamie.

    À l'extérieur de la province de Québec, l'indice de continuité linguistique a diminué entre 1971 et 1996, passant de 73 p. 100 à 63,8 p. 100. Par ailleurs, les francophones de chaque province et territoire ont néanmoins développé un fort sentiment d'appartenance à leurs communautés francophones provinciales, territoriales et locales.

    Depuis 1982, l'article 23 de la Charte canadienne des droits et libertés garantit les droits à l'instruction dans la langue de la minorité. Je n'ai pas à vous instruire du contenu ni des implications de cet article. Nous connaissons tous et toutes les nombreux litiges nécessaires pour le faire respecter.

    Bien que le nombre d'élèves francophones se soit accrû grâce à cet article 23, il n'en demeure pas moins que l'effectif scolaire ciblé par celui-ci n'est encore qu'à demi touché, c'est-à-dire 54,4 p. 100 en 1996. Pis encore, les parents qui décident de ne pas envoyer leurs enfants à l'école française privent du même coup leurs petits-enfants et leurs arrière-petits-enfants du droit de la fréquenter et, par voie de conséquence, les assimilent dans la culture de la majorité, possiblement pour toujours.

    Ici, nous n'avons pas abordé le sérieux problème de décrochage scolaire dans les écoles de langue française. Non plus, faute de temps, avons-nous abordé le problème qui s'aggrave de la pénurie d'enseignants et d'enseignantes.

    En considération de ce tableau peu reluisant et brossé bien trop rapidement, je recommande, au nom de l'ACELF, les suivantes. Première recommandation: que le gouvernement fédéral, conformément à l'article 41 de la Loi sur les langues officielles du Canada, s'engage plus activement et plus efficacement à favoriser l'épanouissement des minorités francophones du Canada et à appuyer leur développement, ainsi qu'à promouvoir la pleine reconnaissance et l'usage du français dans la société canadienne.

º  +-(1655)  

Cet engagement du gouvernement fédéral est non seulement une responsabilité, mais une obligation constitutionnelle.

    Deuxième recommandation: que le gouvernement fédéral s'assure concrètement que les sommes versées aux provinces et aux territoires pour l'éducation en langue française soient utilisées uniquement à cette fin et non à d'autres fins, au moyen de comptabilité créative et que des mesures coercitives soient mises en place pour contrer les efforts subtils des provinces à utiliser ces sommes pour équilibrer leur budget ou à d'autres fins.

    Troisième recommandation: que les ministères fédéraux subventionnaires réduisent la bureaucratie contraignante qui étouffe souvent l'énergie et frustre les efforts des bénévoles se dévouant en faveur des regroupements francophones du pays. Les employés de ces organismes sont si fréquemment occupés à remplir des formulaires et à préparer des rapports d'étape et autres que la réalisation même des projets répondant à leur mission est compromise.

    Quatrième recommandation: que le gouvernement fédéral s'assure que ses agences et ses bureaux dans les régions respectent positivement la lettre et l'esprit de la Loi sur les langues officielles afin que tous les francophones, partout où ils se trouvent au Canada, puissent se sentir à l'aise d'utiliser sans gêne leur langue dans leurs interventions auprès de ces agences et bureaux. Il faut vraiment vivre en minoritaires pour constater que cela n'est pas toujours le cas.

    Cinquième recommandation, et plus spécifiquement: que les gouvernements engagent des fonds adéquats pour permettre aux jeunes et aux intervenants de faire des voyages d'échange afin de mieux se connaître, de mieux connaître leur pays et de mieux partager leur expertise; qu'ils engagent aussi des fonds adéquats pour appuyer la formation des jeunes dans le développement de leur identité et le perfectionnement des enseignants et des enseignantes; qu'ils engagent aussi des fonds adéquats pour faciliter la réalisation de stages pratiques de formation pédagogique, pour des jeunes Québécois et Québécoises, dans les écoles des communautés francophones et acadiennes du Canada; qu'ils engagent aussi des fonds adéquats pour appuyer la recherche fondamentale en éducation en langue française et la diffusion la plus large possible de celle-ci; et enfin, qu'ils engagent des fonds adéquats pour faciliter la création d'outils pédagogiques pertinents aux francophones de la minorité.

    Merci de m'avoir écouté.

»  +-(1700)  

+-

    Le coprésident (M. Mauril Bélanger): Merci, monsieur Boudreau.

    J'invite maintenant M. Giroux-Gagné à prendre la parole.

+-

    M. Jean Giroux-Gagné (vice-président, Commission nationale des parents francophones): Merci. Je m'inquiétais déjà du fait que j'étais le dernier à prendre la parole auprès d'un auditoire qui avait toutes les chances de vouloir s'en aller. Si, de surcroît, vous êtes pressés de vous en aller parce qu'il y a autre chose qui vous attend, je suis suffisamment psychologue pour savoir que vous ne retiendrez rien de ce que je vous dirai dans les dix dernières minutes.

    Messieurs les ministres, sénateurs, députés et collègues, madame la commissaire aux langues officielles, chers partenaires que je ne croyais pas voir ici et très chers partenaires des communautés minoritaires, je suis président de la Fédération des comités de parents du Nouveau-Brunswick et vice-président de la Commission nationale des parents francophones. Notre présidente, Mme Soltermann, a fait une présentation à Ottawa la semaine dernière, et je crains qu'elle ne doive occasionnellement travailler hors du champ de notre bénévolat, évidemment. Nonobstant, elle vous salue et vous transmet ses respects et aussi le souci le plus grand qu'elle se fait de vos travaux si importants pour le Canada.

    La Commission représente les fédérations de parents de toutes les provinces et de tous les territoires du Canada dont, tout récemment, le Nunavut. Ces fédérations regroupent donc plus de 500 comités de parents francophones oeuvrant d'un océan à l'autre. Nous sommes le bénévolat dans les écoles francophones canadiennes.

    Le mouvement de parents est très actif. Nos membres ont dû menacer et poursuivre, effectivement, devant les tribunaux, presque tous les gouvernements territoriaux et provinciaux du pays. Dans certains cas, ils l'ont fait plus d'une fois. Ainsi, grâce à l'article 23 de la Charte, plus de 30 poursuites ont été menées avec succès au cours des 20 dernières années, et c'est loin d'être terminé. Vous connaissez le nom de certains de nos parents: Mahé, Martel, Arsenault-Cameron, Doucet-Boudreau.

    Plus tard cette année, la Cour suprême entendra une quatrième cause nationale sur la mise en oeuvre de l'article 23. Après les parents de l'Alberta, du Manitoba et de l'Île-du-Prince-Édouard, ce sera le tour des parents de la Nouvelle-Écosse de se faire entendre. Le Nouveau-Brunswick est aussi en liste.

    N'êtes-vous pas frappés par le fait que ces causes reviennent sans arrêt? Pourquoi faut-il continuer ces démarches? Les provinces ne sont-elles pas signataires de la Charte? N'ont-elles pas la responsabilité de fournir à leurs citoyens de langue française une éducation de qualité égale? Ce mot «égalité» est d'une difficulté telle à comprendre qu'aucune province ne semble y parvenir.

    Vous demandez nos suggestions pour le plan de relance des langues officielles. Ce que nous vous suggérons, c'est tout simple: cessez d'habiliter la majorité et assurez-vous, très étroitement, d'habiliter la minorité.

    Le gouvernement fédéral a dépensé près de 10 milliards de dollars dans les 32 dernières années pour les langues officielles dans l'enseignement. C'est plus que pénible d'en arriver à savoir comment l'argent a été utilisé. Les provinces ne disent jamais comment l'argent a été utilisé. C'est souvent parce que cet argent a été versé dans les fonds communs et qu'elles ne savent plus elles-mêmes ce qu'il en est advenu. Elles ont subvenu aux moyens de leur propre système d'éducation, souvent bien modeste, en ce qui concerne les besoins de la minorité. Je vous rappelle ici l'étude réalisée en 1996, Où sont passés les milliards? C'est une question qui, par ailleurs, est demeurée sans réponse, sinon en ce qui concerne des sommes importantes données à l'Université McGill.

    Le Programme des langues officielles a-t-il été modifié suivant l'adoption de la Charte, en 1982, pour le rendre plus conforme à l'article 23? Non. Le gouvernement du Canada continue de financer à coups de milliards ceux qui bafouent nos droits, qui utilisent on ne sait trop comment les fonds destinés à l'éducation française et qui assistent les bras croisés à l'érosion progressive de nos communautés.

    Pour reprendre un thème qui, je note, a été cher ici, je pose la question suivante: Où est l'imputabilité? Le résultat net de 32 ans d'aide fédérale en éducation, c'est que l'érosion progresse toujours et vite, malgré les milliards. Pourtant, nous gagnons constamment devant les tribunaux.

    La gestion scolaire? Cent fois sur le métier, ici comme chez Boileau, il nous faut revenir et remettre notre ouvrage afin que les provinces acceptent de partager les pouvoirs scolaires avec les conseils francophones d'éducation.

    Les ministères provinciaux ne respectent entièrement pas l'article 23, ni dans leurs lois—voyez la toute dernière, au Nouveau-Brunswick, écrite après tous les avis de la Cour suprême—ni dans les faits.

»  +-(1705)  

    Le fédéral continue d'habiliter les ministères provinciaux sans leur demander de rendre compte. Voyez Patrimoine Canada qui finançait une province où il n'y avait même pas de conseil scolaire—lequel avait été aboli malgré la loi—et qui le faisait à grand renfort de publicité, tout heureux de participer largement au problème et aucunement conscient de l'événement avant que nous ne le leur ayons souligné.

    C'est encore la majorité qui développe les contenus de l'éducation pour la minorité et qui impose sa façon de penser. Paradoxalement, vous nous financez aussi, nous les parents, pour poursuivre les gouvernements devant les tribunaux. Ici, nous rendons un juste hommage au Programme de contestation judiciaire du Canada, à la commissaire aux langues officielles, madame Dyane Adam, de même qu'à son prédécesseur, monsieur Victor Goldbloom, authentiques et fiables partenaires des minorités. Nous sommes les nouveaux gladiateurs dans l'arène, les combattants tous azimuts. Nous, les parents, connaissons le prix à payer sur le plan personnel pour qu'avance ce monde.

    Je citerai l'exemple de Noëlla Arsenault-Cameron de Summerside dans l'Île-du-Prince-Édouard. Sa cause a duré sept ans. Imaginez un peu ce que peuvent représenter ces années. Quand la Cour suprême a finalement rendu son jugement, en janvier 2000, Noëlla n'avait plus d'enfants qui fréquentaient le système scolaire; ce ne seraient donc pas les siens qui bénéficieraient des avantages par elle obtenus. Elle n'avait d'ailleurs plus de mari à ce moment-là.

    Chers députés et sénateurs, si vous voulez faire quelque chose, arrêtez donc ce cirque. Ne donnez plus aux gouvernements provinciaux les fonds supplémentaires destinés à l'éducation française de la minorité. Donnez-les directement aux conseils scolaires de la minorité, élus pour gérer ses écoles, en vous assurant que les provinces ne trouveront pas moyen de les pénaliser par derrière en reprenant l'argent. Faites le lien entre l'article 23 de la Charte et l'article 41 de la Loi sur les langues officielles. Appuyez les organismes qui ont pour mission de consolider nos communautés en situation minoritaire.

    Entendons-nous bien, l'article 23 est une admirable déclaration de principe. Beaucoup de jugements favorables s'y rapportent, mais aucune législation n'y est vraiment arrimée, aucune politique fédérale n'en a découlé clairement et les gens qui s'adressent à Patrimoine canadien ont récemment obtenu la réponse que cet article ne donne droit à aucun traitement de faveur.

    Remédier à l'érosion ne se limite pas à éduquer des enfants en français. L'objet des garanties législatives et constitutionnelles est bien la continuité de nos communautés de langue officielle, ce qui fait appel à la vie communautaire. Quelle est la part des parents dans cette oeuvre d'éducation? Les parents sont les premiers éducateurs. Dans ce sens, notre commission et ses composantes ont conçu un vaste programme d'intervention auprès des familles. Le plan national d'appui à la petite enfance vise l'inclusion des familles dans un réseau social et éducatif qui mène à l'inscription à l'école française.

    Notre plan repose sur le principe suivant: la naissance du premier enfant est le moment tournant où les parents font des choix déterminants pour longtemps. C'est le moment d'offrir activement aux parents de l'appui et des services en français, car tout le reste s'ensuivra. On envoie le deuxième enfant dans le système où on a envoyé le premier, vous le comprendrez bien.

    Notre plan propose deux types d'interventions: celles qui sont faites directement au foyer et celles qui sont faites auprès des services préscolaires tels les garderies et les prématernelles. Un de nos objectifs est l'inclusion des couples exogames qui constituent la majorité de nos jeunes couples à l'échelle nationale. Or, les études Landry et Allard démontrent bien que 65 p. 100 des enfants de ces couples exogames optent pour la langue majoritaire eu égard aux services souvent déficients en langue minoritaire.

    Pour réaliser notre plan, nous avons demandé la création d'un nouveau programme fédéral. Nous avons présenté cette demande au ministre Stéphane Dion et avons bon espoir qu'il en tiendra compte dans son propre plan d'action.

    Notre commission a appuyé le projet de loi S-32 du sénateur Jean-Robert Gauthier. Pour lui, il est essentiel que le gouvernement s'habilite lui-même pour agir en matière de langues officielles. Mais certains ont peur qu'en donnant du mordant à l'article 41 on encourage la juridiciarisation, c'est-à-dire le recours fréquent au tribunal. Vraiment? La juridiciarisation, c'est ce que nous vivons de mieux avec l'article 23 depuis 20 ans. Nous avons toujours gagné, même si c'est à peu près la seule chose qu'on ait gagnée. La poursuite judiciaire est la seule modalité vraiment opérationnelle dont nous disposons pour faire avancer la cause de la minorité officielle.

»  +-(1710)  

Nous n'en aurions pas autant besoin dans un contexte où les provinces prendraient leurs responsabilités; j'en conviens. Or, les provinces se montrent constamment effrontément récalcitrantes. Est-ce que le fédéral lui-même prend ses responsabilités? Il a beaucoup été—comment mieux le dire—flasque. Il a refusé d'inclure un remède à l'article 41 de la Loi sur les langues officielles.

    Assumez-vous et assurez-vous que nous puissions tous mener à bien une pensée politique généreuse. L'énoncé seul ne suffit pas et n'a pas suffi non plus. En d'autres circonstances, nous n'aurions pas perdu toute cette énergie en interminables combats juridiques, voyages et rencontres. Nous serions demeurés, pour notre plus grand plaisir, avec nos enfants.

    Notre commission a l'impression, depuis des années, de crier dans le désert. Nous avons produit toutes sortes de plans. Que pouvons-nous faire de plus? Votre comité sur les langues officielles devrait se doter de moyens de créer ici une différence.

    En conclusion, commencez par habiliter le gouvernement fédéral lui-même. Habilitez aussi les conseils scolaires d'éducation provinciaux parce qu'ils n'ont pas, eux, à plaire à la majorité provinciale et n'ont pas à constamment peser les enjeux de la majorité et de la minorité dans une perspective électoraliste. Habilitez aussi les communautés--je vois que c'est un thème qui est revenu constamment--dans l'ensemble des mouvements de parents. Dans toutes les provinces, c'est une chicane infinie avec Patrimoine Canada pour obtenir des subsides par ailleurs sans cesse décroissants. Pour vous donner une idée, au Nouveau-Brunswick, nous retournons à Patrimoine Canada entre 33 et 35 p. 100 de l'argent qui nous est donné en frais de gestion.

    Enfin, dotez-vous de mécanismes pour suivre le dossier sans faire porter l'odieux de la tâche aux bénévoles en leur demandant de se justifier sans cesse. En somme, donnez à l'article 23 et à l'article 41 des outils nationaux qui permettront aux communautés de passer de l'érosion à la progression.

    Merci de votre attention.

+-

    Le coprésident (M. Mauril Bélanger): Merci, monsieur Giroux-Gagné.

    Monsieur Sauvageau, vous disposez de quatre ou cinq minutes.

+-

    M. Benoît Sauvageau: D'accord, monsieur le président.

    Avec une intervention fracassante comme la dernière, même si c'était la dernière, on ne pourra pas l'oublier, et elle ne passera pas sous silence. Je tiens à vous le souligner. J'ai aussi appris beaucoup de choses, entre autres l'existence de l'étude Où sont passés les milliards? Des études, il y en a une tonne, et on ne les a pas toutes lues.

    Je vais d'abord m'adresser à l'ACELF. Vous faites cinq recommandations très concrètes, et je vous en remercie. La quatrième et la cinquième demandent que les agences et les bureaux respectent la loi. Vous avez dit aussi, et tout le monde en convient, que le gouvernement fédéral devrait lui-même respecter la Loi sur les langues officielles avant de demander à d'autres de respecter cette loi.

    Dans le cas d'Air Canada, qui ne respectait pas cette loi-là chez elle, le comité a proposé--j'en suis quelque peu responsable--qu'un formulaire de plainte soit mis à la disposition des usagers. Devrait-il y avoir, dans les agences et les bureaux du gouvernement fédéral, des formulaires de plainte afin que les utilisateurs de ces agences puissent signifier le manque de respect de la loi? C'est ma première question.

    Dans votre cinquième recommandation, vous parlez des jeunes qui voyagent, des programmes de stage. Est-ce que l'on pourrait demander la parité avec les programmes existants? J'en ai un qui me vient à l'idée, le programme Échanges-étudiants. Des jeunes d'un peu partout au Canada viennent au Québec apprendre le français alors que des jeunes du Québec vont un peu partout au Canada apprendre l'anglais. Cependant, les francophones ne fit pas dans ce programme-là. Excusez le mot anglais. Pourrait-il y avoir des programmes qui s'inspireraient des programmes existants, mais qui seraient dédiés seulement aux francophones?

»  +-(1715)  

+-

    M. Gérald Boudreau: Je vais tenter de répondre à votre première question. Je demanderais à la secrétaire générale de l'ACELF de répondre à votre deuxième question.

    Pour ce qui est de votre première question, il ne s'agit pas uniquement d'Air Canada. Bien sûr, Air Canada nous cause bien des problèmes parce qu'elle considère que tous les passagers parlent l'anglais d'abord. Do you want coffee or tea? C'est la première question qui est posée. Air Canada présume que tout le monde est anglophone. Ça, c'est la première chose.

    La deuxième chose, c'est que si une personne leur dit qu'elle est francophone, il n'y a pas d'agent qui parle français à bord certains vols. Donc, c'est un citoyen de deuxième classe. Ça, c'est la situation chez Air Canada.

    Si une personne téléphone dans d'autres bureaux et agences du gouvernement fédéral qui sont situés dans les provinces, et les territoires aussi, je présume, elle se fait répondre par un agent qui parle anglais. Si la personne insiste pour être servie en français, elle doit attendre, parfois longtemps, ou bien elle se fait répondre: «We'll get back to you». Ce n'est pas un service égal. C'est ce genre de service-là, ce genre d'attitude-là que l'on doit changer dans ce pays-ci.

+-

    M. Benoît Sauvageau: Excusez-moi. Je ne voulais pas vous interrompre, mais on n'a pas beaucoup de temps. Changer des attitudes et changer la société, ce sont de beaux mots, mais concrètement, ça ne marchera pas ou ça va prendre 100 ans. Un francophone qui arrive au Nouveau-Brunswick, qui arrive dans une autre province, qui n'est pas servi dans sa langue dans un bureau du gouvernement fédéral n'est pas nécessairement au courant qu'il y a un bureau de la commissaire aux langues officielles.

    Premièrement, est-ce qu'il devrait y avoir une campagne de publicité? Deuxièmement, est-ce qu'il devrait y avoir une façon de se plaindre? C'est ce que je veux savoir.

+-

    M. Gérald Boudreau: Je vais vous interrompre à mon tour. Si à chaque fois qu'on se fait refuser un service en français, il faut aller voir la commissaire aux langues officielles, on va passer notre vie entière à faire des plaintes. C'est comme aller en cour de justice pour faire respecter l'article 23 de la Charte. On passe des années entières à cela. C'est du temps qui est gaspillé, parce que pendant qu'on passe ce temps en cour, l'assimilation fait ses ravages.

    On ne peut pas toujours fonctionner en allant en cour de justice ou en allant chez la commissaire. Il faut que l'autorité de ce pays prenne en main sa responsabilité et ses obligations et fasse en sorte que ses fonctionnaires fonctionnent dans les deux langues.

+-

    Le coprésident (M. Mauril Bélanger): M. Boily.

+-

    M. Marc Boily: Dans bien des coins du pays, en milieu minoritaire, les francophones n'ont même pas une école pour leurs enfants. Les services fédéraux sont vraiment secondaires quand on ne peut même pas faire instruire nos enfants dans la langue de notre choix.

    Il y a 150 000 ayants droit, 150 000 francophones qui ne sont pas dans nos écoles. Comment peut-on s'attendre à ce qu'une communauté survive si on n'a pas les institutions dont on a besoin et dont on doit se doter pour assurer la survie de notre communauté?

    Cette affaire d'Air Canada, c'est beau. Demander si on veut des «pinottes» en français ou en anglais, ça passe, mais quand on n'a même pas les institutions de base pour fonctionner dans nos communautés, la survie est impossible. Finalement, au moins, on a la gestion scolaire. Il a fallu 100 ans pour l'avoir. Maintenant, on essaie simplement de concurrencer la majorité pour qu'on puisse faire la rétention des ayants droit qui devraient fréquenter nos écoles.

    Le coprésident (M. Mauril Bélanger): Merci. Monsieur Sauvageau, une dernière question rapide.

+-

    Mme Charlotte Ouellet (secrétaire générale, Association canadienne d'éducation de langue française): C'est-à-dire qu'elle est déjà posée. Est-ce que je peux y répondre.

    M. Benoît Sauvageau: C'est ce que je voulais dire. Elle est déjà posée.

    Mme Charlotte Ouellet: Concernant la parité des programmes d'échange entre francophones et anglophones, il y a effectivement énormément d'argent qui est affecté à des échanges pour que les anglophones viennent apprendre le français au Québec et l'inverse. Mais il y a un problème, à savoir que les francophones ont aussi besoin d'aller rencontrer des francophones au Québec ou ailleurs. C'est pour cela qu'il n'y a pas assez d'argent. Quand on recommande d'augmenter ces enveloppes budgétaires, c'est justement pour cela.

    À l'ACELF, on a un programme d'échange pour élèves francophones, mais on a seulement un mini-budget de 150 000 $ qui permet de faire voyager à chaque année 300 élèves du Québec à l'extérieur du Québec. Depuis trois ou quatre ans, on essaie de faire augmenter cette enveloppe pour pouvoir aussi faire voyager des jeunes entre les communautés, pour que le jeune Acadien puisse aller voir de jeunes francophones en Alberta.

    Échanges Canada a été créé en 2000, je crois, et il y a énormément d'argent qui a été mis là-dedans. Les mandataires d'Échanges Canada sont SEVEC, qui fait de l'anglais-français, YMCA, qui fait de l'anglais-anglais, les Clubs 4-H et nous, à l'ACELF. Les organismes d'éducation en français réclament depuis plusieurs années qu'il y ait un mandataire francophone. Toute l'infrastructure est chez nous. Il ne reste qu'à y mettre des sous.

    Il y a de l'argent qui est donné au Québec et qui nous revient, mais on a appris que dans deux ans, ce budget n'existera plus. Je pense qu'il est temps de demander à Échanges Canada de mandater des organismes francophones pour faire des échanges en français d'un bout à l'autre du pays.

»  +-(1720)  

+-

    Le coprésident (M. Mauril Bélanger): Ce sera certainement une des choses qui seront transmises à M. Dion, madame Ouellet. Merci.

    M. Binet.

+-

    M. Gérard Binet: Merci, monsieur le président.

    Monsieur Giroux, on a gagné à vous rencontrer aujourd'hui. J'ai bien aimé votre intervention. Vous avez soulevé des points qui sont très importants. Je disais que Mme Adam, notre commissaire aux langues officielles, faisait un très bon travail, qu'on avait un bon ministre. C'est là qu'on voit l'importance de choisir un ministre des Affaires intergouvernementales. J'ai souvent dit qu'il y a des provinces qui ont vraiment de la misère à utiliser les budgets comme il le faut.

    Voici ma question. Je voudrais savoir si ce sont vraiment des pouvoirs que vous voulez donner au fédéral pour imposer au maximum la Loi sur les langues officielles. On sait que les provinces n'aiment pas un gouvernement central fort. Si on veut aller faire des pressions au niveau provincial, c'est plus compliqué.

+-

    M. Jean Giroux-Gagné: Ma perception est que dans la chicane fédérale-provinciale qu'il y a eu ces dernières années au sujet des coupures, les provinces ont récupéré tout l'argent possible du gouvernement fédéral, sous toutes les formes possibles, pour faire fonctionner le système provincial. Cela comprenait l'argent qui allait à la minorité. Elles l'ont redistribué entre autres dans leur propre système d'éducation sans trop se soucier de savoir si cela allait à l'immersion française pour les anglophones, si cela servait à faire fonctionner les francophones dans leurs classes, si cela servait à augmenter les services, ce qui était l'objectif initial, si cela servait à payer des frais supplémentaires pour les francophones. L'argent a été repris là. Nous constatons aussi que le gouvernement fédéral n'a pas fait de suivi là-dessus. Il n'a pas demandé où cet argent allait.

    Il y a des scandales en Nouvelle-Écosse. À Saint-Claude, au Manitoba, il y a un fermier qui a hypothéqué sa ferme pour construire l'école française locale, et sa femme a enseigné là gratuitement pendant cinq ans avant que la province ne reconnaisse qu'on avait besoin d'une école française. Ce sont des choses invraisemblables. Je ne sais pas si vous hypothéquez votre maison pour pouvoir envoyer vos enfants à l'école chez vous. Cela m'affecte énormément.

    Il y a actuellement, au Nouveau-Brunswick, le débat sur l'école secondaire à Moncton. La réponse de la province est qu'on n'a pas besoin d'une école secondaire française à Moncton puisqu'il n'y a pas assez de francophones. Or, de par les études géographiques, on sait que les gens s'installent autour des écoles pour que les enfants puissent aller facilement à l'école. Il y a toute cette question-là.

    Nous vous disons de faire un suivi de votre argent, d'habiliter les bonnes personnes et d'aller travailler avec les gens de la communauté. Cela fait déjà 15 ou 20 ans, dans la majorité des cas, que ces comités-là travaillent avec les communautés. Vous auriez plus de chances d'avoir des résultats avec eux.

+-

    Le coprésident (M. Mauril Bélanger): Merci.

    M. Charbonneau.

»  +-(1725)  

+-

    M. Paul Charbonneau (directeur général, Fédération nationale des conseillères et conseillers scolaires francophones): Monsieur Binet, sur cette question, on a un avis juridique qu'on a présenté dans une langue seulement. Je vous invite à en prendre connaissance lorsqu'il sera traduit.

    C'est vrai que le gouvernement fédéral a toujours prétendu qu'il ne pouvait pas s'ingérer dans l'éducation, qui est de compétence provinciale. Donc, ces ententes qui permettent le financement de nos écoles se faisaient de gré à gré, dans un processus de bon entendement, notamment par des principes non écrits. On sait que le fédéral a une juridiction directe sur les minorités, et tous les avis nous disent que, même s'il doit toujours intervenir auprès des provinces, il peut aussi intervenir auprès des conseils scolaires.

    Le fédéral donne pour cela 140 millions de dollars par année. On ne sait pas bien où va cet argent. J'essaie actuellement de faire le décompte au nom des conseils scolaires. D'une part, il faut que j'obtienne des ententes bilatérales. Il faut que je demande des chiffres aux provinces et elles ne me les donnent pas toujours. J'ai calculé une différence de 40 millions de dollars entre ce qu'on dépense et ce qu'on est censés recevoir. On pourrait, comme le pouvoir fédéral le permet, inclure les conseils scolaires dans ces ententes bilatérales. S'il y avait une entente entre Patrimoine Canada, le ministère de l'Éducation et nos conseils scolaires, on pourrait officiellement dire au gouvernement fédéral où va son argent et on saurait surtout quel argent nous est consacré. Il y a de l'argent pour nous dont on ne sait même pas qu'il existe. On pourrait rendre des comptes plus facilement au gouvernement.

+-

    Le coprésident (M. Mauril Bélanger): Ce serait un très bon sujet d'étude pour le comité, chers collègues.

    Est-ce que vous avez terminé, M. Binet?

+-

    M. Gérard Binet: Comme je le disais hier, je suis souvent en contact avec le ministre Dion. Il va falloir qu'il exerce plus de pression auprès des gouvernements provinciaux.

+-

    Le coprésident (M. Mauril Bélanger): Merci, M. Binet.

    M. Godin.

+-

    M. Yvon Godin: On est chanceux que M. Binet soit avec nous, parce que je ne sais plus ce qu'est le mandat de M. Dion.

+-

    Le coprésident (M. Mauril Bélanger): Posez vos questions, M. Godin.

+-

    M. Yvon Godin: Oui, on va faire ça vite. Je m'adresse à M. Giroux-Gagné, qui disait que quand on dit quelque chose, c'est oublié dix minutes plus tard. Je ne pense pas que ce soit comme ça ici. Je pense que ce que vous avez dit est vraiment important.

    J'aimerais d'abord faire un petit commentaire pour dire que chez nous, on a aussi vécu cela. Chez nous, dans la région d'Acadie--Bathurst, quand le gouvernement a voulu fermer les écoles de Saint-Sauveur et de Saint-Simon, la GRC est arrivée avec des bâtons de base-ball, des chiens, des gaz lacrymogènes et des hélicoptères. Ils vargeaient sur les femmes et les enfants et les chiens mordaient les enfants. On vécu ça chez nous le 3 mai 1997. Il est important qu'on regarde la manière dont vous dites cela.

    Si le gouvernement fédéral a la responsabilité des langues officielles au Canada et qu'il donne de l'argent aux provinces pour s'assurer que les enfants de la minorité aient leurs écoles, il me semble qu'il est juste normal qu'il fasse un suivi. N'importe quel bon gérant vérifie pour voir si son argent est allé au bon endroit. Il doit ramener les provinces à l'ordre si son argent n'est pas allé au bon endroit, comme c'est arrivé en Nouvelle-Écosse, et on peut trouver d'autres exemples comme celui-là.

    J'appuie les choses que vous avez dites. Je vous dis carrément que j'appuie cela et que le gouvernement fédéral a des responsabilités. Dans son plan d'action, le ministre devrait-il dire que le gouvernement doit prendre la responsabilité de voir où l'argent va et de s'assurer qu'il va aux minorités?

+-

    M. Paul Charbonneau: Oui, d'autant plus que le gouvernement a le droit de «dealer»—excusez l'expression anglaise—directement avec les conseils scolaires qui dépensent cet argent. À ce moment-là, il saurait comment son argent a été dépensé. Moi, je vois un écart entre ce qu'on a reçu et ce qu'on aurait dû recevoir.

+-

    M. Yvon Godin: Au Nouveau-Brunswick, on s'était même débarrassé des conseils scolaires.

    M. Paul Charbonneau: Maintenant, ils en ont.

    M. Yvon Godin: Ils en ont, mais je voulais juste dire jusqu'où les provinces peuvent aller pour empêcher les parents ou des gens locaux de s'occuper de leur affaire. La province avait même aboli nos conseils scolaires.

+-

    M. Jean Giroux-Gagné: En fait, j'aurais pu citer cet exemple-là, car je le connaissais bien. J'allais vous dire qu'ils ont des conseils scolaires, mais que le ministre s'est réservé à lui seul le droit d'ouvrir et de fermer des écoles de la minorité.

+-

    Le coprésident (M. Mauril Bélanger): Merci.

+-

    M. Yvon Godin: Dans le plan d'action, est-ce qu'il devrait y avoir quelque chose qui parle de cela?

+-

    M. Paul Charbonneau: Je réponds à cela que le plus gros budget dépensé par le gouvernement fédéral est en éducation et qu'il va falloir qu'il trouve une façon de s'assurer que ce budget va directement aux minorités, pour les bons besoins. Ce sera capital dans la politique de développement global. Si l'école marche à moitié, le reste ne marche pas mieux.

+-

    M. Jean Giroux-Gagné: C'est un peu la même situation, et je reprendrais ce que disait mon ami Gérald. Le gouvernement fait peser sur les bénévoles le fardeau des responsabilités. Actuellement, avec Patrimoine Canada, ce sont les bénévoles qui doivent faire des rapports infinis pour demander l'argent et pour justifier la façon dont il est dépensé. Eux doivent justifier tout, mais quand c'est la province, qui est bien mieux armée que nous pour justifier ses dépenses, ça passe dans l'eau.

+-

    Le coprésident (M. Mauril Bélanger): Monsieur Giroux-Gagné, merci. Sénateur Setlakwe.

»  -(1730)  

+-

    Le sénateur Raymond Setlakwe (Les Laurentides, Lib.): Je suis estomaqué par ce que je viens d'entendre. Je suis d'accord sur ce que vous dites et ce que vous réclamez. Quelle serait la réaction des provinces—je suppose qu'elle serait très négative—si le gouvernement fédéral leur enlevait les montants qui leur sont accordés et qui, si j'ai bien compris, sont souvent versés dans les fonds consolidés des provinces et ne servent pas à l'atteinte des objectifs de la loi?

+-

    M. Paul Charbonneau: Il ne s'agit pas de leur enlever de l'argent. Il s'agit de reconnaître dans les faits que les ententes ont été négociées lorsqu'il n'y avait pas de conseils scolaires et que, comme on peut inclure les conseils scolaires dans les ententes, il faut s'assurer que ceux qui dépensent et ceux qui en ont besoin soient à la même table que les ministères et le Patrimoine. Le gouvernement fédéral a le pouvoir de le faire.

+-

    Le sénateur Raymond Setlakwe: Les conseils scolaires relèvent des provinces.

+-

    M. Paul Charbonneau: Oui, mais si on ajoute à cela les principes non écrits--je vous invite d'ailleurs à prendre connaissance de l'avis juridique qu'on vous a donné, mais en français seulement--, principes qui ont notamment confirmé la présence de l'hôpital Montfort, le fédéral peut et doit, surtout, inclure les conseils scolaires dans les questions relevant de l'éducation de la minorité. C'est une obligation constitutionnelle.

    Le sénateur Raymond Setlakwe: Ne craignez-vous pas...

    M. Paul Charbonneau: Je vous dirai que dans la moitié des provinces, les ministères nous consultent parce qu'ils savent bien que c'est à leur avantage. Il y a quelques chasses gardées de fonctionnaires et de ministères, qui étaient là bien avant qu'on ait nos conseils scolaires et qui n'aiment pas nous avoir dans les jambes. Il est clair qu'on soupçonne que de l'argent versé à la province pour nos programmes est utilisé pour les programmes d'immersion, qui sont ensuite adaptés pour nous. Pourtant, l'argent nous était destiné. Il est clair qu'il y en a qui ne veulent pas cela.

    Si le gouvernement fédéral veut avoir un bon système de reddition de comptes, qu'il force la note, parce que les programmes de langues officielles vont être renouvelés l'année prochaine. Puisqu'on va avoir une nouvelle entente pour cinq ans, autant en avoir une bonne, sinon on va devoir attendre cinq autres années.

-

    Le coprésident (M. Mauril Bélanger): Messieurs, mesdames, M. Boudreau, Mme Ouellet, M. Boily, monsieur Charbonneau, monsieur Giroux-Gagné, merci infiniment.

    On a pris des notes. On va maintenant faire notre devoir et transmettre ce qu'on a entendu au ministre Dion.

    Nous vous remercions de vous être prêtés à cet exercice avec peu d'avis. Je remercie encore une fois M. Sauvageau de son initiative. À la prochaine et merci beaucoup.

    La séance est levée.