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Association parlementaire Canada-Afrique

Rapport

Une délégation de l’Association parlementaire Canada-Afrique s’est rendue au Sénégal, du 5 au 10 novembre 2022. La délégation, menée par l’hon. Amina Gerba, sénatrice, coprésidente de l’Association, et Mme Brenda Shanahan, députée, coprésidente de l’Association, était formée de l’hon. René Cormier, sénateur, et M. Jamie Schmale, député. M. Rémi Bourgault, secrétaire d’Association, les accompagnait.

Objectifs de la mission au Sénégal

Les objectifs de la mission de l’Association au Sénégal étaient les suivants :

  • renforcer les relations bilatérales et la coopération parlementaire;
  • échanger avec des parlementaires sur des questions liées à la démocratie multipartite, à la gouvernance, aux droits de la personne et à la primauté du droit;
  • s’informer sur le rôle joué par les femmes à l’Assemblée nationale du Sénégal;
  • échanger avec des groupes associatifs sur la situation des femmes et leur autonomisation;
  • échanger avec des groupes associatifs sur la situation de la communauté LGBTIQ+;
  • rencontrer des représentants gouvernementaux afin de permettre à l’Association de mieux comprendre la situation politique actuelle au Sénégal;
  • discuter du conflit qui touche la région de la Casamance;
  • échanger avec des représentants d’organisations de la société civile sur des questions liées aux droits de la personne, à la liberté de presse et à la primauté du droit;
  • apprendre comment le Sénégal cherche à régler les défis liés au développement, dont les problèmes de santé publique comme le VIH/sida et la santé des mères, des nouveau-nés et des enfants;
  • comprendre l’impact du déploiement de la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf) pour le Sénégal et l'Afrique de l'Ouest, les opportunités qu’elle offre pour la région, ainsi que les défis rencontrés dans sa mise en œuvre localement;
  • rencontrer des représentants d’associations professionnelles afin de comprendre la situation économique au Sénégal sous un nouvel angle et de discuter avec eux de l’incidence des perspectives économiques mondiales sur le pays;
  • nouer le dialogue avec des organismes des Nations Unies œuvrant dans le domaine du développement économique et social de la région; et en apprendre davantage sur le soutien qu’offre le Canada au Sénégal dans les domaines du développement, de la paix et de la sécurité.

VISITE AU SÉNÉGAL

Le Sénégal est un pays de l’Afrique de l’Ouest. Il est bordé par la Mauritanie au nord, le Mali à l’est, la Guinée et la Guinée Bissau au sud, et l’océan Atlantique à l’ouest. La Gambie est presque une enclave qui s’étend de la côte vers l’est jusqu’au Sénégal, le long du fleuve Gambie. La capitale du Sénégal est Dakar. Selon les estimations de 2022, le pays compte une population de 17,9 millions d’habitants. La population est composée à 97,2 % de musulmans et à 2,7 % de chrétiens[1]. Les chefs religieux musulmans sont socialement et économiquement influents. La langue officielle du Sénégal est le français, mais quelque 38 langues autochtones sont également parlées dans le pays.

Aperçu historique[2]

Une grande partie de la région qui est aujourd’hui le Sénégal est habitée depuis au moins plusieurs milliers d’années. À partir du XVe siècle, le Portugal, les Pays Bas, la France et la Grande Bretagne font du commerce le long de la côte sénégalaise. L’emplacement du Sénégal à l’extrémité occidentale de l’Afrique en fait une base favorable pour le commerce atlantique des esclaves.Les marchands européens utilisent l’île sénégalaise de Gorée comme base pour acheter des esclaves aux royaumes du continent. Au plus fort de la traite des esclaves au Sénégal, plus d’un tiers de la population sénégalaise est réduite à l’esclavage.

Au cours de la seconde moitié du XIXe siècle, les colons français envahissent progressivement les royaumes de la partie continentale du Sénégal. Dans les années 1940, la vie politique sénégalaise est de plus en plus influencée par des mouvements nationalistes ailleurs en Afrique ainsi que par de fortes tensions internes. Le Sénégal a obtenu son indépendance en 1960, d’abord en tant que partie de l’éphémère Fédération du Mali, puis en tant qu’État totalement souverain. Léopold Senghor est élu premier président du Sénégal en août 1960.

En tant que président, Senghor maintient une collaboration interne avec les puissants dirigeants religieux musulmans, et externe avec la France. Senghor dirige un pays relativement stable grâce à son parti, le Parti socialiste (PS) qui est au pouvoir jusqu’en 1981, date à laquelle Senghor démissionne. Le premier ministre de l’époque, Abdou Diouf, lui succède. Diouf poursuit les politiques pro-occidentales de Senghor et supervise la libéralisation politique progressive du Sénégal.

En mars 2000, le leader de l’opposition Abdoulaye Wade remporte les élections présidentielles, largement considérées comme libres et équitables. La victoire de Wade et le transfert pacifique du pouvoir de Diouf au Parti démocratique sénégalais (PDS) de Wade sont considérés comme une étape importante pour la démocratie au Sénégal et dans la région, qui a connu peu de transitions démocratiques entre dirigeants civils[3]. Wade est réélu en 2007.

Lors de l’élection présidentielle de février 2012, Wade ne parvient pas à remporter un troisième mandat, perdant contre son allié de toujours, Macky Sall. La candidature de Wade à un troisième mandat avait été controversée au Sénégal, provoquant des manifestations à Dakar et suscitant des inquiétudes quant à une éventuelle instabilité politique.

Développements politiques récents

Le président Macky Sall intervient pour annuler certaines mesures prises par son prédécesseur. En septembre 2012, avec le soutien de l’Assemblée nationale, il supprime la chambre haute, le Sénat, dont 65 des 100 membres étaient nommés par le président. Le Sénat, qu’Abdoulaye Wade avait rétabli en 2007 après avoir supprimé un organe similaire, est largement considéré comme un outil de favoritisme politique[4]. Par ailleurs, un référendum constitutionnel organisé en 2016 réduit le mandat présidentiel de sept ans à cinq ans, et limite le nombre des mandats présidentiels à deux.

En février 2019, les électeurs réélisent Macky Sall pour un second mandat. Deux des plus importants adversaires de Khalifa Sall et Karim Wade, se voient interdire de se présenter à l’élection en raison de leur casier judiciaire.

Le président Macky Sall doit relever le défi de répondre aux attentes de la population, qui souhaite de meilleures possibilités d’emploi et un coût de la vie moins élevé. La détérioration des perspectives en matière de sécurité régionale préoccupe également le gouvernement sénégalais, notamment en raison de l’activité terroriste au Mali voisin. Les réseaux terroristes actifs en Afrique de l’Ouest, notamment Al Qaïda au Maghreb islamique, ne sont jusqu’à présent pas parvenus à perpétrer des attentats au Sénégal, mais le pays est potentiellement vulnérable à l’infiltration et au recrutement d’extrémistes violents[5].

Le système de gouvernement

Selon la Constitution actuelle du Sénégal, promulguée en 2001 et modifiée en 2016, le pays est une république présidentielle avec un président élu directement par un vote majoritaire absolu pour un mandat de cinq ans renouvelable une seule fois[6]. Le président est le chef de l’État et le chef des forces armées. Le premier ministre et les membres du cabinet, appelé Conseil des ministres, sont nommés par le président.

Le parlement monocaméral du Sénégal est l’Assemblée nationale, qui compte 165 sièges. Les élections parlementaires ont lieu tous les cinq ans, les plus récentes ayant eu lieu le 31 juillet 2022. Le système électoral est mixte, 112 députés sont élus directement dans les circonscriptions par un vote majoritaire, et 53 députés sont élus par une représentation proportionnelle. Lors des dernières élections, la coalition présidentielle, Benno Bokk Yaakaar (Unis par l’espoir), a remporté 82 sièges, perdant ainsi sa majorité à l’Assemblée nationale. Yewwi Askan Wi (Libérer le peuple), une coalition dirigée par M. Ousmane Sonko, a remporté 56 sièges, tandis que la coalition Wallu Sénégal (Sauver le Sénégal), dirigée par l’ancien président Abdoulaye Wade, a obtenu 24 sièges. Trois partis minoritaires détiennent chacun un siège. Lors des élections de 2022, 73 des 165 députés élus au Parlement étaient des femmes, ce qui représente 44,2 % de la totalité des députés[7].

Le Président de l’Assemblée nationale est élu par les députés pour la durée de la législature, soit cinq ans. Le Président actuel de l’Assemblée nationale est Amadou Mame Diop, député de la coalition Benno Bokk Yaakaar[8].

En plus de déposer et d’adopter des projets de loi, le Parlement sénégalais exerce une fonction de surveillance concernant les affaires du gouvernement. Cette fonction de surveillance consiste à poser des questions écrites ou orales aux députés du gouvernement et à créer des commissions d’enquête parlementaires dotées d’un mandat précis.

Le pouvoir judiciaire est indépendant des deux autres organes du gouvernement. Le pouvoir judiciaire au Sénégal est exercé par le Conseil constitutionnel, le Conseil d’État, la Cour de cassation, la Cour des comptes et d’autres cours et tribunaux.

Gouvernance et droits de la personne

Sur le plan politique, le Sénégal est l’un des pays les plus stables en Afrique de l’Ouest. Il se classe au-dessus de la moyenne régionale de l’Afrique dans plusieurs indices mondiaux qui mesurent la gouvernance, la démocratie et la corruption. Par exemple, le Sénégal occupe le 88e rang des 167 pays évalués par l’Indice de démocratie 2021 de l’Economist Intelligence Unit. De même, le Sénégal occupe le 73e rang sur 180 pays évalués par l’Indice de perception de la corruption deTransparency International 2021.

Malgré le bilan assez respectable révélé par ces indices et d’autres, plusieurs organisations s’inquiètent de certains aspects de la situation politique et de la situation des droits de la personne au Sénégal.

Conflit en Casamance

Même si la majorité des Sénégalais sont musulmans, une minorité chrétienne, les Jola, habite dans la région du Sud du Sénégal, la Casamance. Des facteurs économiques, notamment le taux élevé de chômage des jeunes[9], ainsi que des différences religieuses ont contribué à un conflit entre cette région et la capitale. En 1982, les leaders indépendantistes de la Casamance ont fondé un mouvement séparatiste, le Mouvement des forces démocratiques de la Casamance (MFDC). Les tensions entre le gouvernement sénégalais et le MFDC ont provoqué un conflit intraétatique qui a tué de 3 000 à 5 000 personnes environ et près de 50 000 personnes ont été déplacées[10].

Plusieurs cessez-le-feu et accords de paix entre le gouvernement et le MFDC ont été négociés au fil des ans. De plus, le mouvement séparatiste est depuis longtemps fragmenté à l’interne avec l’émergence de diverses factions. Le Président Macky Sall donne la priorité aux pourparlers de paix et la violence a diminué depuis une exacerbation du conflit en 2009.

La situation économique

L’économie du Sénégal tourne principalement autour des mines, de la construction, du tourisme, de la pêche et de l’agriculture, qui sont les principales sources d’emploi. Elle a connu une croissance de plus de 6 % par an entre 2014 et 2018. Toutefois, la croissance du PIB devrait ralentir, passant de 6,1 % en 2021 à 5 % en 2022[11].

De même, l’inflation des prix à la consommation s’est établie en moyenne à 5,5 % au deuxième trimestre de 2022, principalement en raison des pénuries et des augmentations des prix des denrées alimentaires et de l’énergie. Ces pénuries et ces augmentations de prix s’expliquent quant à elles par la perturbation de la chaîne de valeur mondiale résultant de la pandémie de COVID 19 et de la guerre menée par la Russie en Ukraine[12].

L’Economist Intelligence Unit prévoit que le PIB augmentera en moyenne de 8,1 % en 2023 2024. Les travaux d’exploration et d’exploitation en cours dans le secteur pétrolier et gazier du Sénégal contribueront à la croissance économique au cours de cette période[13].

Relations entre le Canada et le Sénégal

Le Canada et le Sénégal ont établi des relations diplomatiques en 1962. Les relations entre les deux pays touchent à divers domaines, notamment les activités commerciales, la promotion de la paix et de la sécurité ainsi que la prestation d’aide au développement et d’aide humanitaire.

En 2021, le commerce bilatéral de marchandises entre le Canada et le Sénégal a totalisé 184,1 millions de dollars, dont 179,2 millions de dollars en exportations et 4,9 millions de dollars en importations. L’engagement commercial du Canada au Sénégal présente un potentiel de croissance dans les secteurs des mines, de l’agriculture, du pétrole, du gaz, de l’énergie propre et du numérique[14].

De plus, le Canada et le Sénégal collaborent pour promouvoir la paix et la sécurité dans la région. En particulier, les Forces armées sénégalaises participent au Programme d’instruction et de coopération militaires du Canada. Le Canada soutient également le Sénégal dans la mise en œuvre de sa stratégie d’intégration des femmes dans les forces armées afin d’augmenter le nombre de femmes dans ses rangs[15].

Enfin, le Canada est un partenaire de longue date du développement du Sénégal, ayant fourni près de 1,3 milliard de dollars en aide publique au développement depuis 1962[16]. Plus récemment, le Canada a fourni plus de 78 millions de dollars en aide au développement au Sénégal en 2020 2021. Il soutient également le Sénégal dans ses efforts pour réduire les inégalités entre les sexes, renforcer les droits des filles et des femmes et promouvoir leur pleine participation à la société.

Le lundi 7 novembre – (Parlement, Politique et société civile)

Séance d’information avec des organisations de la société civile

Cette rencontre portait sur la situation politique, les droits des femmes, ainsi que la situation sécuritaire au Sénégal et dans la région. Si les leaders de la société civile rencontrées se réjouissent que les élections législatives de juillet 2022 se soient déroulées dans la paix, ils ont soulevé des inquiétudes par rapport au climat politique qui sévit dans le pays à l’horizon du scrutin présidentiel de 2024.

Alors que la coalition au pouvoir dispose seulement d’une courte majorité d’un député à l’assemblée (versus +43 précédemment), les tensions sont élevées à la chambre. Les manifestations de rues deviennent également de plus en plus fréquentes. Les interlocuteurs ont fait part d’un climat de malaise au niveau politique et une contestation grandissante parmi les jeunes partisans de l’opposition en rapport à l’intention prêtée au Président Macky Sall de vouloir briguer un 3ème mandat.

Rencontre avec des représentants du secteur culturel

La délégation a rencontré des représentants du secteur culturel du Sénégal. Les représentants ont parlé de la vitalité du secteur culturel à Dakar. Il a été question des relations qui existent avec des institutions d’enseignement au Canada pour la formation professionnelle, comme pour des techniciens. Les délégués ont aussi appris l’historique et les projets d’avenir de la Biennale de l’art africain contemporain de Dakar.

Entretien avec Son Excellence monsieur Mamadou Mame Diop, Président de l’Assemblée nationale du Sénégal

Pour cette rencontre, le Président de l’Assemblée nationale du Sénégal, Son Excellence monsieur Mamadou Mame Diop, était accompagné de l’honorable Aissatou Sow Diawara, députée & vice-présidente de l’Assemblée nationale du Sénégal; l’honorable Gnima Goudiaby, députée & vice-présidente de l’Assemblée nationale du Sénégal; l’honorable Babacar Mbengue, président de la Commission des Affaires étrangères, des Sénégalais de l’Extérieur et de l’Intégration Africaine et l’honorable Abou Mbow, président de la Commission des Lois, de la Décentralisation, du Travail et des Droits humains.

Le Président Diop a souhaité la bienvenue à la délégation et à l’ambassadeure. Selon lui, il est important de redynamiser les relations entre le Sénégal et le Canada, un pays qu’il a visité à plusieurs reprises. À la tête de la première assemblée paritaire gouvernement-opposition de l’histoire du Sénégal, M. Diop reconnaît les défis qui l’attendent. Les parlementaires sénégalais présents ont toutefois affirmé leur confiance envers le nouveau président pour mener à bien cette législature à la composition inédite et au mandat important à deux ans des présidentielles.

En parlant de l’Assemblée nationale du Sénégal, il a rappelé l’abolition du Sénat au Sénégal en 2012. Avec le Président, l’Assemblée nationale compte 8 vice-présidents et plusieurs présidents de commissions. La session parlementaire débute en octobre et se termine en juin de l’année suivante, soit environ 9 mois. Il peut aussi y avoir des sessions extraordinaires. Les parlementaires sénégalais ont un large éventail de pouvoir, incluant de voter des lois et d’évaluer les pouvoirs publics. Les parlementaires sénégalais qui étaient présents se sont dits fiers d’avoir le Président Diop – un président pour la parité – et comptent beaucoup sur lui.

En ce qui concerne la présence des femmes à l’Assemblée nationale, les interlocuteurs ont noté que les choses ont évolué. Les femmes parlementaires sont désormais issues de diverses couches de la société, dont des femmes éduquées, et des femmes qui le sont moins. La présence des femmes en politique a été un long cheminement au Sénégal. Toutefois, le pays a connu d’importantes figures féminines qui ont ouvert la voie depuis l’ère coloniale, donc bien avant la loi sur la parité hommes-femmes. Les femmes parlementaires avec de l’expérience encadrent et encouragent leurs jeunes collègues. Les parlementaires se disent confiantes pour l’avenir des femmes en politique au Sénégal en dépit de la persistance de certaines barrières.

Les parlementaires sénégalais ont évoqué les jeunes du pays, qui constitue une « ressource » importante dans laquelle il faut investir. L’État œuvre à faciliter l’éducation universitaire et professionnelle, notamment en réduisant les frais d’études et en augmentant les bourses. Concernant l’exploitation des ressources pétrolières du pays, les délégués ont appris que les bénéfices seront réinvestis dans le pays et sa population. Quant aux questions environnementales soulevées par l’exploitation de ces ressources, le Président Diop a assuré que les compagnies devront respecter les normes environnementales.

En terminant, malgré que des pays s’éloignent de la francophonie, le Président Diop a rappelé l’importance pour le Sénégal de l’appartenance à la Francophonie.

Le mardi 8 novembre (Relations commerciales, droits humains, diplomatie)

Entretien avec des représentants de la Division des Politiques Commerciales extérieures du Ministère du Commerce et des PME

La délégation a rencontré les responsables de la Division des Politiques Commerciales extérieures du Ministère du Commerce, de la Consommation et des PME pour discuter de la situation économique dans le pays.

Les échanges ont donné l’occasion aux officiels sénégalais d’expliquer la nécessité de la mise en place de la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf) pour le Sénégal et l'Afrique de l'Ouest et d’exposer les points saillants des politiques relatives à cette entreprise. Ils ont également partagé les efforts importants et les défis liés à la finalisation du protocole sur les marchandises et les règles d’origine qui devraient encadrer l’émission de certificats de reconnaissance de l’origine des produits. En effet, certains pays signataires militent pour que des règles d’origines souples, dynamiques et qui évolueront dans le temps soient adoptées, évoquant au passage un besoin en expertise régionale sur ces enjeux.

La question du tarif pour les pays les moins avancés/développés que le Canada octroie en faveur des pays de cette catégorie (franchise de taxes à l’importation pour des produits originaires de ces pays) a également été évoquée. Les représentants sénégalais ont mentionné les efforts du pays pour sortir de la catégorie des pays moins avancés, toutefois ils préconisent qu’un régime de taxation transitoire soit mis en place afin d’accompagner le Sénégal pour que sa sortie ne constitue pas une pénalité vis-à-vis des facilités pour lesquelles il ne serait plus qualifié.

Entretien avec Mme Fatou Niang, présidente de WIC

La délégation parlementaire a eu l’occasion de visiter les bureaux de l’Association ‘’Women Investment Club’’ (WIC), une association de femmes entrepreneures (secteur privé) qui a mis en place et gère un fonds d’impact dédié au soutien à l’entreprenariat féminin en Afrique de l’Ouest, WIC Capital.

Au Sénégal, l’accès au financement pour les femmes entrepreneures est très limité, souvent réduit aux mécanismes financiers traditionnels, tels que les banques et les institutions de microfinance. La mise en place d’un fonds WIC Capital a pour objectif de mettre les femmes entrepreneures en contact avec des instruments financiers modernes et à promouvoir le leadership et les compétences des femmes (grâce à la WIC Academy), puis d'identifier et de développer un portefeuille de PME prometteuses qui contribueront au développement des économies du Sénégal et de l'Afrique de l'Ouest.

Les projets auxquels WIC Capital participe sont sélectionnés selon le critère de la rentabilité et de la capacité à créer de la valeur pour la chaîne de valeur locale ainsi que des emplois. De l’avis des membres de la délégation, cette rencontre a permis de mieux apprécier la formidable vitalité et la force créatrice des femmes entrepreneures sénégalaises ainsi que leur volonté de transformer leur société.

Réunion avec M. Robert Kotchani, représentant régional du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme (HCDH)

Cette rencontre visait à discuter de la situation des droits de la personne au Sénégal et dans la région. Le sujet compliqué de la défense des droits humains de base des personnes LGBTIQ+ au Sénégal a été abordé avec le HCDH, dont la délégation parlementaire a visité le quartier général à Dakar.

Le nouveau représentant du HCDH au Sénégal, a décrit le travail de son bureau et comment l’organisation aborde les défis pour venir en appui aux communautés à risque.

Le mercredi 9 novembre (Coopération et développement)

Les membres de la délégation se sont déplacés à Thiès, ville située à une heure de Dakar. Cette visite a permis de rencontrer des partenaires de mise en œuvre de projets d’aide internationale financés par le Canada.

À l’occasion d’une visite de courtoisie auprès du nouveau Gouverneur de la région de Thiès, les parties ont échangé sur les objectifs de la mission et présenté le programme de la journée. L’Ambassade du Canada en a profité pour souligner les nombreux projets financés par la coopération canadienne et l’importance de cette région pour le Canada, rappelant au passage la visite en mars 2022 du Ministre Harjit Sajjan, Le Gouverneur a pour sa part mentionné la visite en 2020 de l’ancienne Gouverneure générale du Canada, Mme Michaëlle Jean.

Visite du projet de SOCODEVI

Le premier projet visité est celui de l’ONG canadienne SOCODEVI et de son partenaire local, l’Union régionale des coopératives et de construction d’habitat à Thiès, qui contribue à améliorer les conditions de vie de près de 6 500 familles membres de coopératives d'habitat dans la région.

Des bénéficiaires ont fourni un témoignage de l'accompagnement reçu grâce au projet et la délégation a aussi pu entendre divers intervenants expliquer comment l’appui du Canada permet de faciliter l'acquisition de logements sociaux en renforçant les capacités et les compétences des membres des coopératives d’habitation. La délégation s’est ensuite rendue sur le site de construction d’une villa pilote construite à partir de briques de terre compressée, permettant de souligner les avantages écoénergétiques de cette technique.

Repas de travail avec Nutrition international

La délégation a également participé à un repas de travail avec Nutrition international et deux jeunes femmes bénéficiaires des activités du Centre Conseils Ados de Thiès, appuyé par le Canada. Le centre fournit des services de santé reproductive et de nutrition aux adolescents âgés de 10 à 24 ans, y compris des suppléments hebdomadaires de fer et d'acide folique, des kits d'hygiène menstruelle, et des conseils sur la nutrition et la santé sexuelle et reproductive, dont le VIH-SIDA.

Cette rencontre a été l’occasion de discuter ouvertement des enjeux liés à l’accès à des services de santé reproductive pour les adolescentes, ainsi que des obstacles limitant l’égalité de genre et l’autonomisation sociale des jeunes filles. Autres sujets abordés en lien avec les jeunes : l’accès à une éducation de qualité, la lutte contre les mariages forcés et l’accès à l’emploi, moteurs d’autonomisation sociale et économique.

Visite du projet TOSTAN

La tournée de Thiès a ensuite mené la délégation au village de Sam Ndiaye où ils ont rencontré le personnel de l’ONG sénégalaise Tostan et des bénéficiaires du projet « Quand elle dirige, tout le monde réussit ».

Le projet met de l’avant des approches adaptées pour renforcer les droits des femmes et des filles, et lutter contre les pratiques néfastes telles que le mariage des enfants, les grossesses précoces et les mutilations génitales féminines. Ce centre de formation créé par Tostan a formé plus de 700 participants de 49 pays sur leur approche basée sur les droits de la personne.

Après un accueil chaleureux en chants et danses par les femmes du village, et les mots d’ouverture de l’Imam, Tostan a présenté les activités et son approche qui met la communauté au centre des interventions. Les représentantes du comité de gestion de la communauté ont partagé la vision cartographiée du village permettant de visualiser leurs priorités et actions en matière de promotion de la santé maternelle et infantile et de l’éducation des enfants, entre autres.

Le jeudi 10 novembre (Devoir de mémoire)

La délégation a visité l’île de Gorée, un site du patrimonial mondial de l’UNESCO depuis 1978, ainsi que la Maison des esclaves. Cette île a été témoin d’une partie de l’histoire du Sénégal et de l’Afrique. Par la suite, la délégation a visité le Monument de la Renaissance, accompagné par son architecte, M. Pierre Goudiaby Atepa.

Divers

Au début de son séjour, la délégation a visité le Musée des Civilisations Noires et la Galerie nationale des Arts ainsi que l’exposition du Collectif des Femmes plasticiennes.

Pendant un dîner de travail, la délégation a rencontré les chefs de mission de la Gambie et de la Guinée-Bissau au Sénégal pour exposer les objectifs de visite de la délégation au Sénégal et son intérêt sur ces mêmes sujets dans les pays de la région.

Les conversations ont tourné autour du contexte paix et sécurité au niveau national et régional, les impacts cumulés de la guerre en Ukraine et de la pandémie sur les populations, la situation de démocratie, des droits de la personne et de l’autonomie des femmes dans nos pays respectifs.

Les deux ambassadeurs ont montré beaucoup d’intérêt et plaidé vigoureusement en faveur d’un Canada plus engagé et plus actif à appuyer la recherche de solutions africaines aux problèmes africains. En dépit de l’absence d’un programme de développement bilatéral en Gambie et en Guinée-Bissau, le Canada arrive à faire des interventions ciblées à travers son programme multilatéral ainsi que les fonds d’initiatives locales. Toutefois, les deux diplomates voient des opportunités de renforcement de l’action canadienne dans leur pays sous forme d’appuis aux processus électoraux, la formation des forces de sécurité, les programmes de bourses en éducation post-secondaire, le commerce, et le financement d’initiatives porteuses d’emplois pour les jeunes faisant face au chômage chronique.

Lors d’un autre événement, les délégués ont rencontré trois femmes parlementaires pour discuter de la situation des femmes parlementaires au Sénégal et des défis qu’elles doivent surmonter.

Commentaires

Au terme de leur visite, les parlementaires canadiens ont indiqué avoir trouvé les divers échanges enrichissants et stimulants et ont particulièrement noté l’apport des visites de terrain qui ont contribué à approfondir leurs connaissances et leur compréhension du Sénégal. Les délégués ont pu mesurer l’impact des actions du Canada dans l’amélioration des conditions de vie de la population, tout en saisissant mieux les enjeux politiques, économiques, sociaux et culturels du Sénégal et de la région. Les délégués tiennent à souligner la passion des acteurs de la société civile, la vitalité et la force créatrice des femmes entrepreneures ainsi que le potentiel jugé exceptionnel de coopération aux niveaux économique, culturel et social avec le Sénégal et l’Afrique tout entière, concluant que le Canada a un rôle essentiel à jouer dans cette région.

Après des discussions avec des intervenants du milieu, il est apparu important pour le gouvernement du Canada de réviser les processus pour l’immigration et aussi l’adapter aux nouveaux changements technologiques. Par exemple, le gouvernement devrait envisager la création d’une application fonctionnant avec tous les systèmes d’exploitation pour les demandeurs.

Le Canada aurait avantage à renforcir les liens avec le Sénégal et pas seulement comme partenaire de la Francophonie. Le pays est un important joueur économique, culturel et démocratique dans de la région de l’Afrique de l’Ouest.

Remerciements

La délégation tient à remercier le personnel du Parlement du Sénégal d’avoir organisé l’itinéraire de la visite au Parlement.

Conclusion

La délégation aimerait remercier l’ambassadeure du Canada au Sénégal, Mme Marie-Geneviève Mounier, de même que le personnel dévoué de l’ambassade, d’avoir organisé un itinéraire très complet et d’avoir contribué au succès de la visite. Les délégués souhaitent exprimer leur reconnaissance également aux responsables d’Affaires mondiales Canada et de la Bibliothèque du Parlement qui ont aidé à produire la documentation générale nécessaire.


Respectueusement soumis,


L’hon. Amina Gerba, sénatriceMme Brenda Shanahan, députée
Coprésidente Association parlementaire Canada-Afrique Coprésidente Association parlementaire Canada-Afrique


[1] Agence centrale de renseignement, « Senegal » The World Factbook.
[2] Sauf indication contraire, la source d’information de cette section est : Britannica Digital Learning, « Senegal », Britannica Academic.
[3] Ibid.
[4] Ibid.
[5] Ibid.
[7] Union interparlementaire, « Sénégal », Parline de l’UIP.
[8] Ibid.
[9] Gabriella Jozwiak, « Senegal’s secret civil conflict: what’s the future for its young people? », The Guardian, 26 mai 2014.
[10] Académie de droit international humanitaire et de droits humains à Genève, Senegal: A Non-International Armed Conflict in Casamance.
[11] La Banque mondiale, Sénégal : Vue d’ensemble.
[12] Ibid.
[13] Economist Intelligence Unit, Senegal, Country Report.
[14] Gouvernement du Canada, Relations Canada-Sénégal.
[15] Ibid.
[16] Ibid.