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L’honorable George J. Furey, c.r., président du Sénat, a dirigé une délégation parlementaire en visite officielle en Malaisie du 10 au 13 mars 2019.

La délégation a l’honneur de déposer son


Rapport

La délégation officielle était composée des membres suivants :

  • L’honorable George J. Furey, c.r., président du Sénat;
  • L’honorable Larry W. Smith, sénateur;
  • L’honorable Marty Deacon, sénatrice;
  • M. Stuart Barnable, chef de cabinet du président;
  • Mme Evelyne Côté, secrétaire de la délégation.

Contexte

La Malaisie est un État fédéral composé de treize États et de trois territoires fédéraux comptant plus de 32 millions d’habitants. En vertu du système unique de monarchie constitutionnelle élective du pays, le roi, communément appelé Yang di-Pertuan Agong, est élu par rotation parmi les neuf sultans héréditaires pour un mandat de cinq ans et occupe principalement un rôle cérémonial. Le nouveau roi de Malaisie, Yang di Pertuan Agong Abdullah, a été élu le 24 janvier 2019 et est devenu le 16e Agong suite à l’abdication du précédent roi Mohammad V le 6 janvier 2019.

Le premier ministre est le chef du gouvernement. Il est nommé par le roi et nomme son cabinet parmi les députés de la chambre basse, avec le consentement du roi. Les dernières élections générales ont eu lieu en mai 2018, et pour la première fois depuis l’indépendance du pays, la Malaisie a élu un parti d’opposition, Pakatan Harapan (PH). Le PH est le résultat de l’alliance de quatre partis : le parti de la justice du peuple (People’s Justice Party), le parti de l’action démocratique (Democratic Action Party), le parti islamiste de Malaisie (National Trust Party) et le parti unifié indigène de Malaisie (Malaysian United Indigenous Party). L’alliance s’est formée dans le but commun de faire tomber le gouvernement en place.

En guide de compromis, l’alliance PH a choisi de présenter M. Tun Mahathir Mohamad, ancien premier ministre malaisien et actuel chef du parti unifié indigène de Malaisie, comme candidat au poste de premier ministre. Il a été entendu que, dans les années à venir, il y aurait une transition du pouvoir vers le chef du parti de la justice du peuple, Anwar Ibrahim, alors emprisonné. De plus, dans le cadre de l’accord de coalition, l’épouse de M. Anwar, Wan Azizah Wan Ismail, a été nommée vice première ministre. M. Anwar avait déjà travaillé avec M. Mahathir au cours des années 1990, à titre de vice-premier ministre et de ministre des Finances. Il a été démis de ses fonctions au sein du parti en 1998 à la suite d’un affrontement avec Mahathir, qui était premier ministre à l’époque. Suivant ce qui a largement été considéré comme des accusations à motivation politique, Anwar a été emprisonné deux fois.

À l’issue de la victoire électorale du PH, M. Anwar s’est vu accorder une grâce royale et a été libéré de prison en mai 2018. En octobre 2018, M. Anwar a remporté les élections partielles de Port Dickson, ce qui lui a permis de revenir au Parlement. On s’attend à ce qu’il succède au premier ministre Mahathir au terme de négociations et de changements dans les alliances politiques.

La Malaisie est dotée d’un corps législatif bicaméral qui consiste en une chambre haute, la Dewan Negara, et une chambre basse, la Dewan Rakyat. La chambre basse compte 223 députés élus au suffrage direct. La chambre haute est composée de 70 membres, dont 26 élus indirectement par les assemblées législatives des États du pays, quatre nommés par l’Agong parmi les trois territoires fédéraux (deux de Kuala Lumpur, un de Putrajaya et un de Labuan), et les 40 autres également nommés par le roi, indépendamment de leur État d’appartenance. Le Parlement de Malaisie entreprend actuellement une initiative de réforme de son Sénat par l’intermédiaire du Comité de travail sur la réforme du Sénat malaisien (Malaysian Senate Reform Working Committee), présidé par le sénateur Yusmadi Yusoff. Ce comité de travail bipartite dispose d’un délai de deux mois pour soumettre ses recommandations au Comité parlementaire spécial sur la réforme et la gouvernance (Parliamentary Select Committee on Reform and Governance). Les recommandations attendues devraient porter sur le rôle du Sénat ainsi que sur son indépendance, de même que sur le mandat et le système de nomination des sénateurs.

Objectifs

L’objectif de la visite en Malaisie était de partager l’expérience du Canada en matière de réforme du Sénat, de contribuer à la bonne gouvernance publique grâce à la diffusion d’informations et de pratiques exemplaires, de renforcer les liens bilatéraux entre les deux pays et de promouvoir les valeurs démocratiques et les intérêts canadiens.

Cette visite a aussi été l’occasion de discuter de questions liées à la coopération et aux possibilités en matière d’éducation entre les deux pays ainsi que de favoriser l’établissement d’un dialogue parlementaire continu en encourageant davantage les échanges parlementaires et l’importance des groupes d’amitié.

Rencontres

Lors de sa visite à Kuala Lumpur, en Malaisie, la délégation a rencontré les personnes suivantes :

  • Son Excellence Tan Sri Dato’ Seri SA Vigneswaran, président du Sénat;
  • Son Excellence Dato’ Mohamad Ariff bin Md Yusof, président de la Chambre des représentants;
  • L’honorable Datuk Liew Vui Keong, ministre au ministère du premier ministre;
  • L’honorable Mazslee Malik, ministre de l’Éducation;
  • L’honorable Dato’ Seri Anwar Ibrahim, député.



Rencontre avec Son Excellence Tan Sri Dato’ Seri SA Vigneswaran, président du Sénat

Le président Vigneswaran a souhaité la bienvenue au président Furey et à la délégation canadienne, et les a remerciés de leur visite très appréciée en Malaisie.

Le président Vigneswaran a expliqué que la Loi sur les services parlementaires (Parliamentary Services Act) avait été suspendue en 1992 et que depuis, le Parlement était gouverné par le pouvoir exécutif. Il a ajouté que le Parlement envisage maintenant de rétablir cette loi, ce qui permettrait aux deux chambres de retrouver leur autonomie opérationnelle.

Il a poursuivi en expliquant que la Malaisie envisage également de réformer le Sénat en rétablissant son intégrité et en en faisant un organe plus indépendant. Pour ce faire, il sollicite une expertise internationale auprès du Canada et d’autres pays dotés de régimes parlementaires similaires. La Malaisie est particulièrement intéressée à en connaître davantage sur la réforme du Sénat qui a eu lieu au Canada en 2015 2016. Le président Vigneswaran a ajouté que, grâce au nouveau gouvernement en place, la Malaisie a maintenant l’occasion de concevoir un Sénat exemplaire.

Les discussions ont porté sur les défis associés à la réforme d’une telle institution et sur les facteurs à prendre en compte pour parvenir à une réforme réussie et durable, tels que les élections ou les nominations des membres du Sénat, la durée des nominations et les qualifications des candidats. Présentement, pour être nommé au Sénat en Malaisie, il faut avoir rendu d’éminents services publics ou s’être distingué dans sa profession, être un représentant des minorités ethniques ou être capable de représenter les intérêts des peuples autochtones. À l’heure actuelle, un sénateur ne peut siéger que pendant six ans au plus (soit deux mandats de trois ans).

La conversation s’est ensuite tournée vers le mandat et la composition du Comité sur la réforme du Sénat, ainsi que vers la première table ronde sur la réforme qui a eu lieu le 10 janvier 2019 à Kuala Lumpur. Le but de cet événement était d’établir des critères de référence et d’élaborer un plan d’action pour le Comité.

Il a également été question de la deuxième table ronde, prévue pour le 12 mars 2019 et au cours de laquelle le président Furey prononcera le discours liminaire. Cet événement, auquel participeront des sénateurs et des présidents des assemblées d’État, représente une occasion d’entendre d’autres pays et de préparer l’ébauche de recommandations à soumettre au Sénat. Le sénateur Yusmadi a expliqué que les recommandations doivent être appuyées par au moins 60 des 70 sénateurs avant d’être adoptées par le Comité parlementaire spécial sur la réforme et la gouvernance.

Le président Furey a fait part de ses réflexions sur la valeur de la diplomatie interparlementaire et a encouragé la création d’un groupe d’amitié Malaisie–Canada.







Rencontre avec Son Excellence Dato’ Mohamad Ariff bin Md Yusof, président de la Chambre des représentants

Le président Furey a remercié le président Ariff pour son accueil chaleureux, ajoutant que la délégation canadienne était reconnaissante d’avoir eu le privilège d’assister à la cérémonie d’inauguration de la 2e session de la 14e législature et au premier discours royal de l’Agong Abdullah.

La discussion a ensuite porté sur le changement de gouvernement en Malaisie survenu l’année précédente et sur le programme de réforme que le Parlement malaisien s’est engagé à mettre en œuvre pour restaurer son intégrité et rendre l’institution conforme aux normes internationales en respectant les normes de l’Association parlementaire du Commonwealth. Le président Ariff a ajouté que, pour redonner son autonomie au Parlement, la Loi sur les services parlementaires doit être rétablie. Ils ont mentionné l’importance de mettre à jour le guide concernant les pratiques et les procédures du Parlement malaisien, étant donné que la dernière édition a été publiée en 1969.

Le président Ariff a expliqué la nécessité de mettre en place un système approprié de comités parlementaires dans le cadre duquel les comités seraient chargés d’examiner des projets de loi et d’entreprendre des études, d’établir un ordre quotidien des travaux permettant une période de questions plus fonctionnelle et définissant des limites pour la durée des débats, ainsi que de trouver des moyens de mieux dialoguer avec la société civile malaisienne.

Ils ont brièvement discuté de la réforme électorale indispensable et du fait qu’il s’agit du moment idéal pour aborder ce sujet, alors que la population cherche des façons de prendre part à l’action politique.

À la fin de la rencontre, toutes les parties ont convenu de l’importance des groupes d’amitié parlementaires et des avantages qu’ils présentent pour les deux pays.

Rencontre avec l’honorable Datuk Liew Vui Keong, ministre au ministère du premier ministre

Le président Furey a remercié le ministre Liew d’avoir accepté de rencontrer la délégation canadienne. Il a informé son hôte qu’il était heureux d’avoir l’occasion de visiter la Malaisie afin de mieux comprendre sa situation actuelle et ses défis.

En tant que ministre au ministère du premier ministre qui supervise la loi, le ministre Liew a donné à la délégation un aperçu de certaines des priorités du gouvernement. Le gouvernement PH cherche à rétablir le statut du Sarawak et du Sabah comme territoires de la Fédération de Malaisie, conformément à l’Accord relatif à la Malaisie. Cet accord conclu en 1963 stipulait que le Sabah et le Sarawak, ainsi que Malaya et Singapour, s’uniraient pour former le pays de Malaisie, sur le principe qu’ils seraient tous deux traités comme des territoires, et non comme deux des treize États. Le ministre Liew a également expliqué qu’une autre de leurs priorités était d’abaisser l’âge minimum de vote, de 21 à 18 ans. De tels changements exigeraient des amendements constitutionnels, ce qui nécessite une majorité des deux tiers tant à la Chambre des représentants (actuellement dominée par la coalition au pouvoir) qu’au Sénat (actuellement dominé par l’opposition). Néanmoins, il a expliqué qu’il estime que le temps est peut-être venu de le faire puisque la Malaisie traverse une période de changements fondamentaux qui pourrait être l’occasion idéale d’apporter des modifications constructives et positives à la Constitution.

Parmi ses autres priorités figurent la dépénalisation des drogues, l’abolition de la peine de mort, la réforme du système carcéral et la mise sur pied d’un comité parlementaire de la justice, étant donné que la Malaisie est l’un des seuls pays du Commonwealth qui en soit dépourvu.

Rencontre avec l’honorable Mazslee Malik, ministre de l’Éducation

Le président Furey a commencé la réunion en remerciant le ministre de l’Éducation de bien vouloir rencontrer la délégation canadienne, puis lui a demandé un bref portrait de son ambitieux programme de réforme. Le ministre Mazslee a informé le président de certaines des priorités :

  • prolonger la scolarité obligatoire au-delà de l’âge de 12 ans;
  • améliorer la qualité de l’éducation en formant des enseignants plus compétents et motivés, et améliorer les infrastructures;
  • modifier les perceptions afin d’intégrer la formation technique et professionnelle à l’enseignement général plutôt que celle-ci soit considérée comme un « deuxième choix »;
  • faire des écoles publiques le choix privilégié des élèves et des parents.

Tous reconnaissent qu’il est essentiel de motiver les élèves et qu’aujourd’hui, il faut employer des moyens différents et non conventionnels, comme l’utilisation des médias sociaux, la mobilisation des parents et de la société civile, la participation des athlètes qui pourraient inspirer les enfants et la collaboration de la communauté.

Le président Furey et le ministre Mazslee ont convenu qu’il serait bénéfique pour tous d’accroître la coopération en matière d’éducation entre les deux pays. La conférence de l’Asia-Pacific Association for International Education (APAIE) a été évoquée aux fins de discussion. L’édition 2019 de la conférence s’est tenue à Kuala Lumpur et l’édition 2020 aura lieu à Vancouver. Tous espèrent que les conférences de ce genre offriront aux deux pays l’occasion de présenter leurs institutions respectives et pourraient mener à de nouveaux partenariats.

Enfin, ils ont discuté de l’initiative Bourses et programmes d’échanges éducationnels pour le développement Canada-ANASE, dans le cadre de laquelle le Canada octroiera 10 millions de dollars en cinq ans à des étudiants de niveau postsecondaire et à des professionnels en milieu de carrière pour leur permettre d’accéder à l’éducation au Canada. En 2018, 15 boursiers de cette initiative provenaient de Malaisie.

Rencontre avec l’honorable Dato’ Seri Anwar Ibrahim, député

M. Anwar a souhaité la bienvenue à la délégation canadienne et a profité de l’occasion pour remercier le Canada de l’accueil chaleureux qu’il a reçu lors de sa visite en février 2019. Ils ont discuté du rôle et de l’importance du Comité parlementaire spécial sur la réforme et la gouvernance en Malaisie, dont il est le président, ainsi que de la nécessité d’une réforme du Sénat.

Puisque M. Anwar devrait devenir premier ministre au cours des prochaines années, il a énuméré certaines de ses priorités lorsque cette transition aura lieu :

  • Parvenir à une approche équilibrée des droits de la personne, de la démocratie et de la gouvernance;
  • Veiller à ce que la transformation démocratique pacifique de Malaisie soit couronnée de succès en renforçant les institutions démocratiques, en encourageant la réforme parlementaire et l’autonomie judiciaire, en luttant contre la corruption et en protégeant la liberté des médias;
  • Mettre l’accent sur le commerce et l’investissement en faisant preuve de plus d’agressivité dans l’évolution vers une économie de marché.

Des discussions ont suivi au sujet de l’Accord de partenariat transpacifique global et progressiste (PTPGP), qui est l’accord de libre-échange entre le Canada et dix pays de la région Asie Pacifique, dont la Malaisie. M. Anwar a expliqué que certaines des plus grandes préoccupations de la Malaisie concernent les litiges, ainsi que les secteurs pharmaceutique et agricole. Il a ajouté que la Malaisie fait preuve de prudence lorsqu’il est question de grands pays dictant les conditions des accords commerciaux, mais qu’en tant qu’ancien ministre des Finances, il ne peut pas revenir sur l’engagement de la Malaisie envers le libre-échange, et donc le PTPGP doit se poursuivre.

Autres activités

Pendant leur visite en Malaisie, les délégués ont eu le privilège d’assister à la cérémonie d’inauguration de la 2e session de la 14e législature, un événement historique puisqu’il s’agissait du premier discours royal du nouveau roi malaisien, l’Agong Abdullah.

La délégation canadienne a participé à la deuxième table ronde sur la réforme du Sénat malaisien à Port Dickson, à laquelle ont assisté des présidents des assemblées législatives des États, des sénateurs ainsi que des représentants des médias et de la société civile. Le président Furey a prononcé le discours liminaire et a fait part de l’expérience du Canada en matière de réforme du Sénat. Après le discours, la délégation canadienne a été invitée à participer à une séance de questions et réponses. La table ronde a aussi été l’occasion pour les délégués de rencontrer des parlementaires fédéraux et provinciaux et de discuter avec eux.

La délégation a eu l’occasion d’en apprendre davantage sur la récente transformation du paysage politique malaisien lors d’une séance d’information offerte par la haute commissaire du Canada et quelques cadres supérieurs. Cela a également donné aux délégués canadiens un aperçu des relations bilatérales entre les deux pays, de la situation du PTPGP en Malaisie et des nombreuses réformes entreprises par le pays.









Remerciements

Les membres de la délégation canadienne tiennent à remercier Mme Julia G. Bentley, haute-commissaire du Canada en Malaisie, ainsi que tout le personnel de l’ambassade pour l’aide qu’ils leur ont apportée avant et pendant la visite et les rencontres.

Les délégués souhaitent également remercier Affaires mondiales Canada et la Bibliothèque du Parlement pour la documentation qu’ils ont fournie dans le cadre de la préparation du voyage.

Respectueusement soumis,



L’honorable George J. Furey, c.r.

Président du Sénat