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LANG Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING JOINT COMMITTEE ON OFFICIAL LANGUAGES

COMITÉ MIXTE PERMANENT DES LANGUES OFFICIELLES

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mardi 13 juin 2000

• 1537

[Français]

La coprésidente (Mme Raymonde Folco (Laval-Ouest, Lib.)): Messieurs, bienvenue à cette quinzième séance du Comité mixte permanent des langues officielles.

Conformément à l'alinéa 108(4)b) du Règlement, nous procéderons aujourd'hui à l'étude des politiques et des programmes des langues officielles. Monsieur Parent, Président de la Chambre des communes, permettez-moi...

M. Yvon Godin (Acadie—Bathurst, NPD): Madame la présidente...

La coprésidente (Mme Raymonde Folco): Oui, monsieur.

M. Yvon Godin: Comme je l'ai dit plus tôt, je n'ai pas l'intention de rester très longtemps, parce que je dois assister à une réunion du Comité des ressources naturelles. On a commencé ce matin et on doit finir.

J'aimerais soulever une question de privilège.

La coprésidente (Mme Raymonde Folco): Allez-y, monsieur.

M. Yvon Godin: Veuillez m'excuser, monsieur le Président et monsieur le greffier.

Le 23 mars, j'avais envoyé une lettre à la commissaire aux langues officielles, Mme Dyane Adam, qui m'a envoyé une réponse. Je vais lire sa réponse et demander qu'on en fasse la traduction pour ensuite en faire la distribution au comité, car je ne suis absolument pas satisfait de la réponse que j'ai obtenue.

À une réunion du Comité du développement des ressources humaines, le Parti réformiste avait demandé un document qui n'avait pas pu être déposé parce qu'il n'avait pas été traduit en français. Je m'y étais opposé et j'avais soulevé la question devant ce comité-ci. J'en avais même fait part à la commissaire aux langues officielles lorsqu'elle était venue témoigner devant ce comité.

Maintenant, j'ai reçu cette lettre et j'en suis totalement insatisfait. Je lui ai même écrit pour lui dire que je n'étais pas satisfait de sa réponse. Je veux juste consigner au compte rendu la lettre qu'elle m'a envoyée.

    Je donne suite à la plainte que vous avez déposée le 23 mars dernier au sujet de la non-disponibilité en français de rapports de vérifications effectuées en 1991 et en 1994 au sein de Développement des ressources humaines Canada (DRHC).

    Un responsable du ministère nous a indiqué que le rapport de 1991, intitulé «Vérification de contributions importantes, rapport national», fut publié à l'époque par le ministère de l'Emploi et de l'Immigration. DRHC soutient que ce rapport a vraisemblablement été traduit vers le français en conformité avec les exigences de la Loi sur les langues officielles, mais pour des raisons administratives, ne serait plus disponible aujourd'hui. En ce qui touche le rapport de 1994, qui était un suivi à celui de 1991, il s'agisait d'une ébauche qui n'aurait jamais été complétée suite à la réorganisation du ministère. En conséquence, aucune distribution de ce document n'a été faite.

    Le ministère nous a également informés que, suite à la demande du comité permanent des ressources humaines, les deux documents ont été traduits aussi rapidement que possible, compte tenu des contraintes de temps imposées par un tel exercice, et distribués à ce comité le 17 mars dernier.

• 1540

    Nous sommes satisfaits des explications et des correctifs apportés par DRHC et nous concluons notre enquête.

Madame la présidente, je suis totalement insatisfait. Je veux que le comité se penche sur cette question. Je vais mettre cela à l'ordre du jour. Je vais envoyer la lettre à la greffière pour être certain que la traduction en sera faite et qu'elle sera envoyée au comité. Il est inacceptable qu'un rapport qu'on a demandé deux semaines avant qu'un comité se réunisse ne soit pas disponible sous prétexte qu'on n'a pas eu le temps de le faire et que c'est la raison pour laquelle on l'a remis plus tard.

Comme je l'avais dit à ce moment-là, ça semble toujours être la faute des francophones si des documents n'arrivent pas, parce qu'on blâme toujours la traduction. Il est bien rare qu'on ait un document qui doive être traduit vers l'anglais. La plupart du temps, ce sont les francophones qui prennent le coup.

Donc, j'ai répondu à cette lettre de la façon suivante:

    J'ai pris connaissance de votre réponse à ma lettre du 23 mars dernier concernant des documents de Développement des ressources humaines non traduits en français qui avaient été présentés au Comité permanent du développement des ressources humaines.

    Je fus très surpris et déçu de votre justification. J'ai bien peine d'accepter que des documents fédéraux ne puissent être disponibles même pour des raisons administratives.

    Pour le rapport de 1994 qui était un suivi de 1991, je ne comprends pas qu'on puisse remettre au public une ébauche comme document. Pourquoi un document ou plutôt une ébauche soit rendu public en anglais? Je ne comprends pas les raisons qui expliquent une telle initiative, surtout que par la suite, le ministère en question a décidé de ne pas le compléter.

    Je peux comprendre les contraintes de temps imposées par la traduction, cependant le ministère avait plus de deux semaines avant de distribuer les documents au Comité permanent des ressources humaines. Je crois que ce délai était assez long. Si je prends exemple de la Chambre des communes le Hansard, document de référence quotidien pour les propos dits à la Chambre des communes; ce document est disponible dans les deux langues dans la même journée. J'ai bien peine à croire que la justification était valable dans cette situation.

    Dû à la Loi fes langues officielles, tout document présenté aux Comités parlementaires doit être dans les deux langues. Malheureusement, le document anglais n'a pu être déposé, car il n'y avait pas la version française dudit document. Vous devez comprendre, Madame Adam, que pour les députés francophones siégeant à la table, nous fumes pointés dû au fait que ces documents devaient être traduits. Pour les députés anglophones, ils ont été pénalisés parce qu'ils ne pouvaient avoir accès aux documents car ils devaient attendre la version française pour les collègues francophones. Je crois que c'est injuste que les francophones doivent être les victimes à quelque part de cette négligence.

    Madame Adam, j'aurais aimé une réponse autre de votre part. À mes yeux, ces justifications sont non valables et je constate qu'encore une fois (de trop), les francophones ont été bafoués dans leur droit.

Je vais déposer ce document au comité.

La coprésidente (Mme Raymonde Folco): Monsieur Godin, voici ce que je propose, si vous me le permettez. Donnez une copie de la lettre à la greffière. Nous allons la faire traduire en anglais et distribuer la version originale et la version anglaise à l'ensemble des membres de ce comité.

Ce que je propose, dans un deuxième temps, c'est que nous regardions cela de plus près au Sous-comité du programme et de la procédure et que j'écrive une lettre à la commissaire aux langues officielles au nom de ce comité.

Est-ce que cela serait à votre satisfaction?

M. Yvon Godin: Oui.

M. Louis Plamondon (Bas-Richelieu—Nicolet—Bécancour, BQ): D'abord, il faut que le comité soit d'accord pour approuver ou ne pas approuver la réponse de Mme Adam.

La coprésidente (Mme Raymonde Folco): J'ai dit qu'il y aurait une réunion du Sous-comité du programme et de la procédure avant la rédaction de la lettre.

M. Louis Plamondon: Après la réunion du Sous-comité du programme et de la procédure, il faudra revenir à l'ensemble du comité et le comité adoptera une résolution ou écrira la lettre.

La coprésidente (Mme Raymonde Folco): Si c'est ce que l'ensemble des membres du comité souhaitent, on peut très bien faire cela.

M. Louis Plamondon: Je peux aussi vous faire part d'une centaine de cas comme celui-là. Les réunions seront longues. Ce qu'il soulève se passe à longueur d'année. Ce n'est pas nouveau. Je suis ici depuis 16 ans et ça a toujours été comme cela.

La coprésidente (Mme Raymonde Folco): Je voudrais qu'on arrive à une conclusion là-dessus, parce qu'on a fait venir deux personnes qui attendent et que, par politesse, je ne veux pas les faire attendre trop longtemps. J'ai proposé qu'on fasse cela.

M. Louis Plamondon: On va s'occuper de la lettre.

La coprésidente (Mme Raymonde Folco): Monsieur Godin a accepté. Nous allons le faire. Il est sûr que la réunion du Sous-comité du programme et de la procédure ne pourra avoir lieu qu'à l'automne, monsieur Godin. Vous savez cela. Mais on aura une telle réunion du Sous-comité du programme et de la procédure. Nous ferons rapport à l'ensemble des membres du comité à ce moment-là et nous vous donnerons évidemment une copie de la lettre qui aura été écrite pour la commissaire.

Monsieur Godin.

M. Yvon Godin: Madame la présidente, je suis satisfait de cela. Si le Bloc québécois peut nous présenter une centaine de cas semblables, cela ne me pose pas de problème. Pour ma part, j'en ai un...

La coprésidente (Mme Raymonde Folco): Il n'y a pas que du côté du Bloc québécois qu'il y a de tels cas, monsieur Godin. Il y en a aussi du côté des libéraux.

M. Yvon Godin: Je ne voulais pas prendre le temps de nos invités, mais le Président de la Chambre peut sans doute comprendre le problème qu'on a dans les comités. Il a eu l'occasion d'écouter et de voir notre problème. Merci.

La coprésidente (Mme Raymonde Folco): Merci, monsieur Godin. Je tiens simplement à souligner que le problème des francophones au Canada n'est pas le problème d'un seul parti politique, mais de l'ensemble des partis politiques à la Chambre, et peut-être aussi au Sénat.

• 1545

Excusez-moi, monsieur Parent et monsieur Marleau. Je voudrais vous souhaiter la bienvenue à cette rencontre. Nous avons l'intention d'examiner avec vous les rapports de la Chambre des communes avec la partie VII de la Loi sur les langues officielles.

Avant que je vous donne la parole, monsieur Parent, permettez-moi de revenir une peu en arrière pour transmettre un renseignement aux membres du comité. Je ne sais pas si la lettre que je voudrais citer a été distribuée aux membres du comité.

Une voix: Oui.

La coprésidente (Mme Raymonde Folco): La lettre du 16 septembre 1999.

La sénatrice Joan Thorne Fraser (De Lorimier, Lib.): Je fais appel au Règlement, madame.

La coprésidente (Mme Raymonde Folco): Oui, madame Fraser.

La sénatrice Joan Fraser: Nous n'avons que la version française. Est-ce qu'il existe une traduction officielle de ce document?

La coprésidente (Mme Raymonde Folco): J'en ai une version en français et... Non, je n'ai pas la version anglaise de la lettre. Si, la version anglaise est au verso de...

La sénatrice Joan Fraser: Non, non, non. Il y a...

La coprésidente (Mme Raymonde Folco): Continuez, s'il vous plaît, madame Fraser.

La sénatrice Joan Fraser: Je continue. Ah, c'est ça.

La coprésidente (Mme Raymonde Folco): Vous l'avez trouvée.

La sénatrice Joan Fraser: Je vous fais mes excuses, madame la présidente.

La coprésidente (Mme Raymonde Folco): Je vous en prie.

Nous avons donc la lettre dans les deux langues ainsi que le protocole d'entente dans les deux langues. Si vous ne les avez pas, signifiez-le. Moi, je les ai devant moi.

Je ne veux pas lire la lettre au complet, compte tenu du fait que vous l'avez en main. Je veux simplement vous rappeler qu'il s'agit d'une entente entre la commissaire aux langues officielles et le Président de la Chambre des communes au sujet du respect de la partie VII de la Loi sur les langues officielles.

Nous demanderons à M. Parent de nous expliquer aujourd'hui comment cette entente est mise en application dans la gestion de la Chambre des communes. Si je comprends bien, monsieur Parent, vous n'avez pas de présentation d'ouverture à faire aux membres de ce comité.

L'hon. Gilbert Parent (Président de la Chambre des communes, Lib.): Vous avez bien compris.

La coprésidente (Mme Raymonde Folco): Très bien. Alors, ni M. Parent ni M. Marleau n'ont de notes à présenter, ce qui fait que nous pouvons passer immédiatement aux questions que nous voulons adresser à M. Parent. Je tiens à souligner le fait que M. Parent ne peut rester avec nous que jusqu'à 16 h 30. Si cette partie de la réunion se poursuit après 16 h 30, M. Marleau sera disponible pendant encore quelques minutes.

Avant de céder la parole à M. Hill, je voudrais vous rappeler que durant la deuxième partie de cette réunion, nous allons revoir le rapport intérimaire que je vous ai présenté la semaine dernière. Merci.

La parole est à vous, monsieur Hill.

[Traduction]

M. Grant Hill (Macleod, Alliance canadienne): Merci.

Je vous remercie tous les deux d'être ici. Il me semble que M. Godin vient tout juste de soulever un problème dont devrait normalement s'occuper la Chambre et non notre comité. J'aimerais donc que vous me disiez ce que vous pensez: cette question aurait- elle due être adressée à la Commissaire aux langues officielles ou à la Chambre des communes aux fins d'examen de ses travaux internes.

Le Président Gilbert Parent: Eh bien, comme vous le savez, nous essayons de bien faire la distinction entre deux choses. Il y a d'une part l'administration de la Chambre dont nous sommes chargés et, d'autre part, la Chambre des communes et les comités eux-mêmes.

En règle générale, la Chambre des communes ne se soumet pas elle-même à aucune commission ni à aucune «force de l'extérieur». La Chambre se réserve le droit d'établir ses propres règles et de faire ces propres interprétations, si vous voulez. En apparence simplement, d'après ce qui a été dit ici, il semble que vous vouliez un rapport, qui était en anglais et qu'il voulait qu'il soit traduit en français. Il me semble que si cela s'est passé au comité, le comité aurait dû régler le problème à ce niveau. Si cette question avait dû relever de la Chambre, le Chambre s'en serait occupé elle-même.

Il s'est adressé au commissaire aux langues officielles. Je suppose qu'il a cru que c'était la chose à faire. Cependant, j'estime qu'un comité est son propre maître et que si la plainte vise les travaux d'un comité, je suis tout à fait prêt alors à laisser le comité faire ce qu'il est censé faire.

Est-ce que cela répond à votre question?

M. Grant Hill: Tout à fait. Allons plus loin. Notre comité a pour mandat de surveiller de près l'application de la Loi sur les langues officielles. À votre avis, ce comité a-t-il un rôle quelconque lorsqu'il s'agit d'examiner des plaintes visant d'autres comités et mettant en cause la Loi sur les langues officielles?

• 1550

Le Président Gilbert Parent: Votre comité par exemple, peut examiner des plaintes impliquant l'administration des affaires de la Chambre. Si un membre qui veut que sa plainte soit déposée auprès de la Chambre et qu'elle ne se rend pas jusque là n'est pas satisfait, la plainte pourrait alors être examinée par votre comité. Dans l'ensemble, toutefois, les comités de la Chambre devraient examiner eux-mêmes ces plaintes.

Puis-je vous citer les chiffres que nous avons reçus au sujet du nombre ou des types de plaintes?

M. Grant Hill: C'était ma prochaine question.

[Français]

M. le Président Gilbert Parent: Si vous me le permettez, puisqu'il m'a posé ses questions en anglais, je vais lui répondre en anglais.

[Traduction]

En ce qui a trait à l'administration, nous avons reçu 17 plaintes à la Chambre... Est-ce pendant la présente session?

Une voix: La présente législature.

Le Président Gilbert Parent: La présente législature. Cela veut dire trois ans. Nous en avons reçu 17 dont la ventilation est la suivante: Une portait sur la session de formation unilingue, une se rapportait aux enseignes unilingues, quatre concernaient des services en français non disponibles, deux portaient sur des menus et reçus de caisse unilingues du Restaurant, deux concernaient des versions unilingues des débats, une se rapportait à la composition des employés de l'Administration de la Chambre, une concernait un message unilingue sur une boîte vocale, une portait sur la qualité médiocre du français sur le site Internet parlementaire, une concernait une entrevue non effectuée dans la langue de préférence du candidat, deux avaient trait à une enseigne anglaise différente de l'enseigne française et une autre traitait de l'information sur la façon de traiter les plaintes. Voilà pour ce qui est des 17 plaintes impliquant l'administration.

En ce qui a trait aux comités, deux plaintes nous ont été présentées. La première était qu'aucun représentant de la communauté francophone n'avait été invité à participer aux audiences publiques. La deuxième avait trait à une motion adoptée limitant la liberté des députés de déposer des motions dans la langue officielle de leur choix. Il s'agit là des plaintes que nous avons reçues.

Vous seriez peut-être curieux de savoir combien de temps il a fallu pour régler les plaintes impliquant l'administration. Dans le cas d'une d'entre elles, entre zéro et dix jours. Sept plaintes ont nécessité entre onze à trente jours et deux plaintes entre trente et un et soixante jours. Pour une autre plainte, il a fallu entre soixante et onze et quatre-vingt dix jours. Ainsi, nous essayons de répondre aux plaintes entre soixante et quatre-vingt-dix jours. Pour quatre des plaintes, il nous a fallu quatre-vingt-onze jours ou plus et je n'en suis pas très fier, mais c'est la vie. Vous devriez avoir cette information. Deux plaintes n'ont pas été réglées parce qu'elles concernent la CPAC, qui vient s'ajouter au secteur de l'administration.

En ce qui a trait aux deux plaintes provenant des comités, il a fallu entre zéro et dix jours pour régler l'une d'entre elles et quatre-vingt-onze jours ou plus pour l'autre. Ce sont les deux seules plaintes que nous avons eues au sujet des comités.

Madame la présidente, je suis disposé à déposer ce document si vous le voulez, à titre d'information.

La coprésidente (Mme Raymonde Folco): Merci, monsieur Parent. Nous avons un exemplaire en français et l'autre en anglais que nous ferons photocopier et distribuer. Nous avons déjà tous ces exemplaires? Nous distribuerons tous les exemplaires qui portent sur ce que vous venez tout juste de nous expliquer,

[Français]

le document Plaintes sur les langues officielles 1997-2000,

[Traduction]

en français et en anglais, aux membres présents. Merci.

Monsieur Hill.

M. Grant Hill: Pour terminer, y a-t-il eu des conflits entre la Chambre et le comité plus particulièrement en ce qui a trait à la Commissaire aux langues officielles?

Le Président Gilbert Parent: Vous voulez dire votre comité et la Chambre?

M. Grant Hill: Non, je veux parler de la Commissaire aux langues officielles. Le protocole d'entente que nous avons ici vise à mettre en place un processus officiel. Y a-t-il eu des conflits à cet égard?

Le Président Gilbert Parent: Non, nous n'avons pas eu trop de mal à respecter le protocole.

M. Grant Hill: Merci.

[Français]

La coprésidente (Mme Raymonde Folco): Merci, monsieur Hill.

Monsieur Plamondon.

M. Louis Plamondon: Ce sera assez rapide. Cela concerne justement le protocole. Je suis surpris qu'un protocole soit nécessaire entre vous, qui représentez l'autorité de la Chambre, et le commissaire aux langues officielles.

• 1555

D'ailleurs, dans les attendus de l'entente, on sent qu'il y a des divergences de points de vue entre le commissaire aux langues officielles et vous-même ou vos conseillers juridiques. Quand je parle de vous, je ne parle pas de vous en tant qu'individu; je pense au poste de Président de la Chambre que vous occupez.

L'attendu se lit comme suit:

    Attendu que le Président de la Chambre est d'avis que la juridiction du Commissaire en vertu de la Loi sur les langues officielles est limitée à l'instruction de plaintes touchant l'administration de la Chambre et qu'elle ne comprend pas les travaux des procédures internes de la Chambre et de ses comités;

De son côté, le commissaire est d'un avis contraire. Il dit que la Loi sur les langues officielles est comme une espèce de grand parapluie qui recouvre tout ce qui se passe dans l'administration fédérale et que cela doit avoir priorité, un peu comme le politique ne peut s'ingérer dans la justice. Je pense que personne ne peut se soustraire ou prétendre se soustraire à la Loi sur les langues officielles.

Je ne dis cependant pas, si je lis l'entente au complet, qu'il doit y avoir à chaque jour une mésentente épouvantable entre vous et le commissaire. Je le comprends bien. Toutefois, cela crée un précédent qui m'apparaît dangereux. Si chaque instance de notre gouvernement ou chaque ministère couvert par la Loi sur les langues officielles se met à signer des protocoles, eh bien, qui va gérer ces protocoles? Et quand il y aura conflit, à qui s'adressera-t-on?

Est-ce qu'il est nouveau qu'un tel protocole soit signé? Est-ce la première fois? Et pourquoi le commissaire d'alors, M. Goldbloom, l'a-t-il signé le dernier jour de son mandat et vous, deux mois plus tard?

M. le Président Gilbert Parent: Je vais d'abord répondre à la dernière question. Je l'ai signé quand je l'ai reçu et lui l'a signé quand il a pu. C'est ainsi que les choses se passent.

À propos de votre autre question, je dirai qu'il est de ma responsabilité constitutionnelle de protéger les droits et les privilèges des parlementaires. Je peux dire, dans un sens général, que ni la Chambre des communes ni ses comités ne se soumettent à des commissions qui sont extérieures à la Chambre. Cela veut dire que, comme l'exprime cette belle formule québécoise, nous, les parlementaires élus par le peuple canadien, sommes «maîtres chez nous».

C'est pour cette raison que je ne voulais pas que l'entente soit mal comprise. L'administration de la Chambre, c'est-à-dire ce qui concerne l'administration et l'ensemble des travaux, est soumise à la loi, sauf ce qui se passe dans les comités et en Chambre.

Vous avez demandé si c'était la première fois qu'il y avait un protocole comme celui-là. C'est la première fois que moi j'en ai signé un. Notre greffier pourrait peut-être nous dire s'il y en a eu d'autres.

La coprésidente (Mme Raymonde Folco): Monsieur Marleau.

M. Robert Marleau (greffier de la Chambre des communes): À ma connaissance, il n'y en a eu qu'un seul autre, sans doute moins bien connu que celui-ci. Il va dans le même sens, cependant, soit celui du respect des privilèges et de la responsabilité du Président vis-à-vis des agences extérieures qui veulent interagir avec les Communes et les députés. C'est une entente sur l'exécution des mandats de perquisition par la GRC dans les bureaux de députés.

C'est un protocole semblable qui établit une démarche donnant aux deux parties l'assurance d'un suivi quant à l'objectif poursuivi.

M. Louis Plamondon: Je comprends bien que vous ayez un protocole avec la GRC. Dans ce cas, il s'agit du privilège des députés d'échapper à des perquisitions effectuées pour toutes sortes de raisons. Ce sont des droits. Mais comment les droits des députés peuvent-ils venir en contradiction avec la Loi sur les langues officielles ou avec le respect de la Loi sur les langues officielles? C'est ce qui m'apparaît comme un précédent.

En ce qui a trait aux langues officielles, ce document constitue un précédent qui me fait un peu peur parce qu'on invoque les droits des élus, comme si ces derniers pouvaient se soustraire à la Loi sur les langues officielles parce qu'ils sont élus. Il me semble que le respect de la Loi sur les langues officielles est aussi sacré que le serment d'allégeance que prêtent les députés au gouvernement canadien et à la Reine, par exemple.

• 1600

M. le Président Gilbert Parent: Je vais permettre au greffier d'ajouter quelque chose ensuite, mais je vous dirai tout simplement qu'il faut qu'il soit absolument clair que les droits et les privilèges des élus de la Chambre relèvent, à mon avis, de ma responsabilité constitutionnelle. C'est pour cela qu'ils m'ont élu Président: pour protéger ces droits. Or, pour cette raison, je ne peux pas et je ne dois pas soumettre ces droits et ces privilèges à une autre agence que la Chambre des communes dans sa totalité, c'est-à-dire tous les parlementaires ensemble. Si on fait cela, il me semble que n'importe qui pourrait nous questionner sur presque tout ce que nous faisons en Chambre.

Je vais passer la parole à mon greffier. Peut-être aura-t-il autre chose à dire.

M. Robert Marleau: Je reviens à la genèse du problème: pourquoi y a-t-il un protocole? Plutôt que d'examiner la question dans un contexte où on a essayé d'établir des territoires juridiques ou de privilèges, disons que le protocole tire son origine de conversations avec le bureau des langues officielles, à un moment où il y avait eu un problème dans un comité parlementaire. La plainte m'avait été adressée à titre de greffier, par le biais du bureau de liaison des langues officielles de la Direction des ressources humaines.

Si la question provenait d'un comité parlementaire, je répondais d'emblée que je n'y pouvais rien puisqu'il s'agissait d'un comité parlementaire. Et cela retournait chez le commissaire aux langues officielles. Parfois, on oubliait la chose pendant plusieurs semaines. Cela a créé une certaine frustration.

On a eu un ou deux incidents dans les années 1970 et quelques-uns dans les années 1980, et M. Goldbloom, je pense, a vécu la même expérience. Alors, on a décidé d'essayer au moins de s'engager. Il y a un engagement. Autant il y a deux déclarations qui n'acceptent pas directement l'interprétation de la loi donnée par M. Goldbloom, ou qui n'acceptent pas nécessairement l'interprétation du Président sur le privilège parlementaire, autant il y a une marche à suivre. Nous nous sommes engagés à donner suite aux deux genres de plaintes dans un délai de 30 jours. Cela n'empêche pas les plaintes contre le président d'un comité ou contre un comité parlementaire.

Lorsqu'il y a une plainte contre un comité parlementaire, je la reçois et nous la remettons au président du comité ou à l'autorité du comité dans un délai normal. On ne la transmet pas au commissaire aux langues officielles comme on le faisait dans le passé. À ce moment-là, il appartient au comité de s'en saisir et de décider ce qu'il entend faire de cela. Dans les deux cas, cela s'est réglé de façon satisfaisante pour le commissaire aux langues officielles. Il s'agissait plutôt d'une marche à suivre dans les cas où il y avait conflit ou perception d'un conflit de juridiction.

Dans le cas de l'administration, c'était aussi un engagement. Pour tout ce qui est régi par le Bureau de régie interne, nous n'acceptons pas qu'il y ait de dérogation à la loi. Nous l'appliquons à la lettre et nous essayons de répondre aux plaintes aussi rapidement que possible.

M. Louis Plamondon: Cela se comprend, mais dans votre première réponse, monsieur le Président, vous dites qu'en vertu de vos fonctions, vous êtes garant des droits constitutionnels. Vous avez mentionné la Constitution. Que je sache, la Constitution dit qu'on doit respecter les langues officielles.

Deuxièmement, cela ne vous donne pas le pouvoir de dire qu'en tant que grand maître de la Constitution, vous interprétez votre devoir de déléguer au commissaire aux langues officielles l'interprétation de toute demande que vous pourriez recevoir concernant les langues officielles, plutôt que de vous opposer au commissaire ou même de signer un protocole.

M. le Président Gilbert Parent: Je dis que la responsabilité constitutionnelle m'incombe, et vous savez que n'importe quel député ou n'importe quel sénateur peut toujours soulever de telles questions par voie de motion. C'est là que la Chambre en est saisie, et c'est débattu. On en discute et la Chambre prend une décision. Si un député veut faire cela à la Chambre des communes ou si un sénateur veut faire cela au Sénat, il appartiendra au Sénat ou à la Chambre des communes de décider. Je ne me perçois pas comme un souverain qui a toutes les réponses. J'ai des opinions, des avis, mais c'est mon interprétation. S'il en est autrement, vous me corrigerez. Si vous ne le faites pas ici, vous le ferez à la Chambre des communes.

• 1605

M. Louis Plamondon: D'accord.

La coprésidente (Mme Raymonde Folco): Sénateur Fraser.

La sénatrice Joan Fraser: Monsieur Plamondon va mourir d'étonnement, mais j'abonde dans le même sens que lui.

M. Louis Plamondon: Oui, je vais sourire.

La sénatrice Joan Fraser: C'est la première fois.

M. Louis Plamondon: C'est une bonne habitude à prendre.

La sénatrice Joan Fraser: Il me semble quand même étonnant qu'on applique le concept primordial des privilèges de la Chambre des communes et du Parlement à ce genre de loi et, plus précisément, à cette loi-là. Il me semble que les privilèges de la Chambre des communes et du Sénat concernent surtout des choses comme la liberté d'expression et la liberté de fonction en tant que parlementaire, mais quand il s'agit de droits qui sont ceux de tous les Canadiens, je ne conçois pas que la Chambre des communes puisse dire que la loi s'applique, mais qu'elle va décider elle-même de la façon dont elle va s'appliquer.

Monsieur le Président, vous me pardonnerez, je l'espère, mais je reste bouche bée et je suis pas mal perturbée. Parlons des personnes. Je sais que vous comprenez vous-même l'importance des langues officielles, mais un beau jour, un de vos successeurs pourrait ne pas la comprendre du tout et même ne pas être sympathisant. Qu'est-ce qu'on ferait à ce moment-là?

M. le Président Gilbert Parent: À mon avis, s'il y a des changements à faire, ils seront faits par les parlementaires eux-mêmes. Si vous dites qu'un autre Président pourrait ne pas comprendre, madame, malgré tout le respect que j'ai pour vous, je dirai qu'il ne devrait pas être Président. Nous avons deux langues officielles.

Comme je l'ai dit plus tôt, nous avons eu 17 plaintes en tout, en comptant celles reçues du côté de l'administration et les deux autres. Il me semble que nous avons réagi très rapidement à ces plaintes et que nous avons fait notre possible pour y donner suite.

Vous aviez une autre question et je vais passer la parole à mon greffier.

M. Robert Marleau: J'ajouterai tout simplement, madame le sénateur, que je comprends que vous restiez bouche bée devant cette interprétation parce qu'elle n'est pas très connue. Par exemple, ni le Sénat ni la Chambre des communes ne sont assujettis à la loi sur l'information, et cela par choix. Mais c'est clair dans ce cas-là. C'est dit. Même l'administration de la Chambre et l'administration du Sénat ne sont pas assujetties à cette loi.

Nous ne sommes pas techniquement assujettis à la Commission canadienne des droits de la personne, mais nous respectons l'esprit de la loi. Les deux Chambres se comportent de manière à respecter l'équité en matière d'emploi, etc., comme si la loi s'appliquait, mais techniquement, le commissaire n'a pas le droit de mener une enquête, surtout si ça touche les travaux de la Chambre.

S'il y a une résolution du Sénat ou de la Chambre des communes qui est discriminatoire en matière de droits de la personne, il n'y a pas d'autre autorité que la Chambre elle-même qui puisse réparer l'erreur, si erreur il y a. D'ailleurs, on a une charte des droits de la personne. Étant donné que je ne suis pas avocat, je n'ose même pas en parler en présence du sénateur qui est à votre gauche.

La sénatrice Joan Fraser: Il est gentil. Ne vous inquiétez pas.

M. Robert Marleau: Il y a même eu une une contestation en vertu de la Charte canadienne des droits et libertés. Cette charte, qui a été adoptée il y a presque deux décennies, s'applique au Parlement. Jusqu'à quel point entre-t-elle en conflit avec le privilège parlementaire? Nous ne le savons pas tout à fait. D'ailleurs, il n'y a eu qu'une seule cause, la cause Donahoe c. Canadian Broadcasting Corporation, où la Cour suprême a dit que les privilèges des deux Chambres et des législatures à l'échelle du pays primaient sur la charte dans le cas des droits d'expression de la presse. C'est la seule cause qui soit allée devant la Cour suprême et la cour a jugé que l'application du privilège parlementaire était raisonnable dans ce cas-là. Elle s'est gardé une porte ouverte pour le futur en disant qu'elle ne donnait pas carte blanche au privilège parlementaire.

• 1610

Si le privilège parlementaire peut brimer l'application de la première loi de base qui protège les droits des Canadiens, je pense qu'il est logique de présumer que la cour pourrait statuer qu'il faut que les deux Chambres se comportent raisonnablement dans l'exercice de cette interprétation de la Loi sur les langues officielles. Cela demeure également une question de politique. Si la décision Donahoe c. Canadian Broadcasting Corporation peut appuyer le privilège parlementaire face à la Charte canadienne des droits et libertés, je pense qu'il est logique de penser que ça s'applique également à la Loi sur les langues officielles.

La sénatrice Joan Fraser: Si nous voulions changer cette situation et faire en sorte que les deux Chambres soient assujetties à la juridiction du commissaire, devrions-nous le faire par voie de simple résolution ou s'il nous faudrait adopter une loi à cet effet?

M. le Président Gilbert Parent: Nous pourrions déposer une motion en Chambre, tenir un débat et adopter une résolution.

La sénatrice Joan Fraser: Une résolution?

M. Robert Marleau: Oui, une simple résolution d'une des Chambres.

La sénatrice Joan Fraser: Une simple résolution d'un Chambre ne s'appliquera qu'à cette Chambre.

M. le Président Gilbert Parent: C'est exact.

M. Robert Marleau: Oui, vous avez raison. À mon avis, il ne serait pas nécessaire de modifier le texte législatif si la Chambre s'exprimait tout simplement pour dire qu'elle choisit d'assujettir ses travaux et ceux de ses commissions parlementaires aux dispositions de cette loi. Cela suffirait.

La sénatrice Joan Fraser: Ce serait un très beau moment parlementaire. Merci, madame la présidente et monsieur le Président.

M. Louis Plamondon: Vous avez parlé de l'adoption d'une résolution. Un amendement ne serait-il pas nécessaire puisque vous avez parlé d'une interprétation qui n'était pas claire face à la Constitution? Cette dernière est claire dans d'autres domaines, mais pas dans celui-ci. Je devrais peut-être poser cette question au sénateur.

Une voix: Le sénateur est un nouveau témoin!

Le sénateur Gérald-A. Beaudoin (Rigaud, PC): D'après moi, il y a ici une question qui est complètement occultée et qui est évidente: la seule chose qui est suprême au Canada, c'est la Constitution. Elle règle tout: l'exécutif, le législatif et le judiciaire. Là où je vous donne en partie raison, c'est quand vous dites que les privilèges parlementaires, ce qu'on appelle en droit lex parliamenti, ne relèvent pas des cours de justice. Il y a une chose qu'on appelle les privilèges parlementaires, mais quand il s'agit de bilinguisme, ce n'est pas un privilège parlementaire. Le bilinguisme est une principe de la Constitution canadienne: ce sont les articles 16 à 20 ou 22 de la Charte canadienne des droits et libertés, l'article 133 pour le Québec et le fédéral, et l'article 23 de la loi du Manitoba.

C'est un débat fascinant. Je ne m'attendais pas à assister à un si beau débat. Je suis cependant un peu surpris qu'il faille une entente quelconque entre le commissaire aux langues officielles et le Président de la Chambre. D'après moi, c'est une question d'application de la loi. Je pense que lorsque vous rendez une décision sur une question de privilège, vous êtes souverain. C'est vous qui avez ce pouvoir-là. La cour de justice a souvent dit qu'elle n'interviendrait pas dans la question des privilèges des parlementaires et que c'était le Président qui était le gardien des privilèges parlementaires.

Cela dit, je suis bien obligé d'admettre que, parce que nous avons enchâssé les droits linguistiques dans la Constitution canadienne, ce qui prime finalement en matière de bilinguisme, c'est la Constitution. On n'en sort pas. La Loi sur les langues officielles est une loi quasi constitutionnelle, mais elle n'est pas au-dessus de la Constitution. C'est la Constitution qui est au-dessus de la Loi sur les langues officielles.

Tout ce que je peux dire, c'est que s'il s'agit d'un simple privilège, la Cour dira qu'elle refuse d'intervenir face aux décisions que prennent les Présidents de la Chambre des communes et du Sénat. S'il s'agit d'un vrai privilège parlementaire, elle n'intervient pas. C'est un des privilèges du pouvoir législatif. Cependant, si on adopte une loi qui n'a pas été rédigée dans les deux langues et si on ne respecte pas le droit d'expression dans les deux langues, la cour va intervenir.

Je ne dis pas qu'un protocole d'entente n'est pas possible. Au contraire, c'est possible, mais chacun doit rester à sa place. Je n'imagine pas que le commissaire aux langues officielles puisse avoir un différend avec vous sur un privilège. C'est impossible, car il n'a aucun pouvoir sur les privilèges. Même les tribunaux n'ont pas le pouvoir d'intervenir quand vous interprétez un privilège. Ils peuvent toutefois intervenir et le législatif peut intervenir si on n'a pas respecté la Constitution et le bilinguisme. À ce moment-là, les tribunaux peuvent intervenir.

• 1615

Est-ce que ça peut se faire dans un protocole? Peut-être. Je n'ai pas eu la chance de lire ça. Je viens tout juste d'en prendre connaissance. Comme vous le disiez au début, dans une Chambre législative, le Président est le gardien des privilèges. Il est dans sa maison et c'est lui qui est le patron. Mais au-dessus du Président, au-dessus du premier ministre et au-dessus de tous, il y a la Constitution que personne ne peut violer. Personne ne peut violer la Constitution. Qu'arrive-t-il si on le fait? Eh bien, c'est la cour qui se prononce. La cour a souvent dit, comme l'indiquait M. Marleau, qu'elle respecte beaucoup les deux corps législatifs, le Sénat et la Chambre, et qu'elle n'interviendra pas dans vos privilèges, mais si jamais vous ne respectez pas la Constitution, elle va vous le dire.

C'est tout ce que j'avais à dire, mais je trouve ça tellement intéressant que j'aimerais bien avoir le temps d'y réfléchir davantage. J'ai lu rapidement ce protocole, qui m'apparaît très général. Il me semble qu'il devrait être plus précis et qu'on devrait faire la part des choses.

Je me rappelle avoir un jour donné une opinion, si mon souvenir m'est fidèle, alors qu'on disait qu'il n'était pas nécessaire que tout ce qui se passait en comité soit traduit. J'avais dit que l'article 133 était très clair: il faut que les lois soient adoptées dans les deux langues lors des trois étapes et que, si elles ne le sont pas, il y a violation de la Constitution. Est-ce qu'on doit faire la même chose en comité? Je pense que, puisqu'un comité est une émanation de la Chambre, il doit être aussi bilingue que l'est la Chambre des communes. Je pense que ça va jusque-là. Mon opinion avait peut-être un peu surpris les gens, mais le gouvernement l'avait finalement acceptée.

D'après moi, c'est toujours la Constitution qui l'emporte. Je ne parle pas des lois ici. Pour ce qui est de la liberté d'expression, il y a une liberté d'expression plus grande à la Chambre des communes et au Sénat que pour les citoyens qui sont en dehors. Ça, c'est accepté et les cours l'ont dit. Il est possible qu'un protocole soit la voie à suivre, mais ça prendrait plus qu'une journée pour en formuler un très bon.

M. le Président Gilbert Parent: Ça nous prendrait peut-être plus qu'une journée, mon cher sénateur. Ce n'est pas la loi qui est en question ici, mais le pouvoir d'enquête sur la Chambre des communes.

Le sénateur Gérald Beaudoin: Le pouvoir d'enquête du commissaire sur la Chambre des communes?

M. le Président Gilbert Parent: Oui.

Le sénateur Gérald Beaudoin: Cela me gêne un peu car cela consiste à s'insérer dans un corps législatif qui est égal au pouvoir exécutif et au pouvoir judiciaire. Ça m'agace un petit peu. C'est tellement vrai que, quand on veut arrêter un sénateur ou un député, on s'adresse directement au Président de la Chambre pour lui demander la permission de le faire. En Angleterre, c'est encore plus fort. À qui se rapporte leur Président puisqu'ils n'ont même pas de constitution? Ils ont de grands principes, mais quand même, j'ai l'impression qu'on ne doit pas enquêter sans que le Président dise oui.

M. le Président Gilbert Parent: Vous me demandez qui conseillerait le Président. C'est la Chambre des communes qui me conseille, et ce sont les sénateurs qui conseillent le Président du Sénat.

• 1620

C'est pourquoi j'ai dit à M. Plamondon que je devrais obéir aux règles ou aux lois de la Chambre si une motion quelconque était présentée en Chambre pour être débattue et que la Chambre décidait, pour n'importe quelle raison, pour ses propres raisons, que les choses doivent se faire de telle ou telle façon. Disons que je suis le serviteur de la Chambre. Ce n'est pas moi qui fais les lois. Cependant, selon la Constitution, il m'appartient de protéger les droits et les privilèges des parlementaires de la Chambre.

Le sénateur Gérald Beaudoin: Vous êtes garant des privilèges.

M. le Président Gilbert Parent: C'est ça.

Le sénateur Gérald Beaudoin: Plus que le serviteur, le garant. C'est-à-dire qu'il vous revient de faire en sorte que les privilèges des députés et des sénateurs soient reconnus et appliqués.

La coprésidente (Mme Raymonde Folco): Monsieur Plamondon.

M. Louis Plamondon: Je pense qu'on pourrait débattre interminablement de cette question. Je me demande si on ne devrait pas adopter une solution pratico-pratique et former un sous-comité présidé par le sénateur Beaudoin, par exemple. Pour ma part, je serais très heureux d'y siéger, avec peut-être un membre de chaque parti, pour mener une réflexion sur le sujet afin que le comité puisse prendre position et faire une recommandation aux deux Chambres, à savoir si on maintient le statu quo ou si on leur présente une résolution.

Nécessairement, si tous les partis y siègent, ça ne provoquera pas un long débat dans les deux Chambres. Ce serait peut-être une façon de régler la question. Le sénateur disait qu'il avait besoin de plus qu'une journée pour y réfléchir. Personnellement, il y a un mois que j'ai ce document entre les mains et, chaque fois que je le lis, j'y vois... À certains moments, il m'est très sympathique, et à d'autres moments, il m'est très antipathique. On pourrait essayer d'arriver à un juste milieu.

Je pense que si on a écrit un texte semblable, on a dû réfléchir longtemps avant de le faire. Cela n'a pas dû être fait sur un coup de tête. Il y a peut-être moyen de l'améliorer, de l'éliminer ou de le modifier. Mais j'aimerais bien que ceux que ça intéresse prennent le temps d'y réfléchir davantage.

M. le Président Gilbert Parent: Madame la présidente, pourrais-je répondre?

La coprésidente (Mme Raymonde Folco): Je vous en prie, monsieur Parent.

[Traduction]

Le Président Gilbert Parent: Vous savez, ce protocole n'a pas été écrit du jour au lendemain. Nous n'avons pas consacré seulement deux semaines à sa rédaction. Il nous a fallu deux ans pour essayer de mettre de l'ordre dans tout cela.

La Chambre veut respecter toutes les lois du Canada—elle le fait à coup sûr—et ce faisant, elle croit être tout simplement un bon citoyen. Pourtant, en cas d'infraction, de possibilité d'infraction ou de mise en question de la Chambre, il va sans dire qu'elle est tenue de discuter d'une telle question avec ses propres membres. Nous sommes les élus du pays.

Nous avons eu des discussions avec notre greffier, avec nos avocats, avec le Bureau du commissaire aux langues officielles de même qu'avec les greffiers adjoints et tout au long du processus nous nous disions: «Il faut que les choses soient bien claires. Comment allons-nous travailler?» C'est tout ce que nous avons essayé de faire.

Comment parvient-on à bien comprendre quelque chose? En essayant de rédiger un protocole. Il s'agit de préciser les responsabilités de chacune des parties. Puis, dans la meilleure tradition canadienne, je crois, ce que nous avons ici c'est un protocole d'entente sur la façon dont nous allons fonctionner.

Est-ce que je crois que la Chambre devrait fonctionner dans les deux langues? Bien sûr. S'il vous plaît—que vais-je répondre? Nous sommes un pays bilingue, officiellement bilingue.

[Français]

C'est pour cette raison qu'on a le droit de parler ou en français

[Traduction]

ou en anglais, comme vous voulez le faire. Bien sûr. Si un problème se pose au niveau de l'administration...

Louis, si vous prenez l'autobus

[Français]

et que tu ne peux pas parler français au chauffeur, porte plainte. On va examiner la situation

[Traduction]

et nous essaierons de régler le problème du mieux que nous le pouvons. Nous allons essayer. C'est ce que nous allons faire. Nous n'allons pas vous dire: «Ne viens pas te plaindre à nous.» Non, nous examinerons la plainte et essaierons d'y répondre.

Si, pareillement, quelque chose se produit à un comité, nous allons lui demander de régler le problème. Le comité, au même titre que la Chambre, est maître de sa destinée. Mais nous ne prétendons pas que vous êtes au-dessus de la loi. Nous ne voulons pas être au- dessus de la loi, nous voulons plutôt assumer nos fonctions et nos responsabilités. Les miennes sont très claires, elles sont établies depuis 500 ans. Tout ce que nous visons par ce protocole d'entente, c'est de tenter de préciser les responsabilités et les rôles des parties.

• 1625

Si cela est de l'intransigeance, alors je dis que dans bien des cas on fait preuve d'intransigeance lorsqu'on en vient à s'entendre au moyen d'un protocole sur la répartition des responsabilités entre différents groupes.

J'ai affirmé au début de mon exposé, et je m'en tiens à ce que j'ai dit, que la Chambre des communes ne se soumet pas à aucune enquête externe et pourtant, elle est plus que disposée à traiter toutes les plaintes formulées à son endroit.

Est-ce que j'entends quelqu'un dire que la Chambre des communes n'a pas assumé ses responsabilités? Y a-t-il quelqu'un au sein de ce comité qui le dit? Si c'est le cas, dites-moi ce qui ne va pas. Je suis responsable. La tâche n'incombe pas à mon greffier, mais à moi. Lorsque je ne parviens pas à régler le problème, je retourne à la source de mon autorité, la Constitution, comme vous l'avez dit. Je retourne aussi aux parlementaires, dûment élus par nos citoyens canadiens. Si ce protocole a été d'entente a été établi, c'est pour que je puisse assumer mes responsabilités sans qu'il y ait de malentendu.

J'espère que je vous ai bien fait comprendre ma position et que vous comprendrez également l'interprétation que j'ai faite de ce protocole.

S'il est nécessaire que je revienne comparaître devant ce comité

[Français]

ou n'importe où ailleurs pour expliquer ce que je pense ainsi que mes responsabilités, je serai très heureux de venir en parler.

La coprésidente (Mme Raymonde Folco): Monsieur Parent, nous vous sommes très reconnaissants de votre présence ici aujourd'hui. Ce que je proposerais à M. Plamondon, compte tenu du fait que c'est notre dernière réunion, serait de laisser passer l'été...

M. Louis Plamondon: Oui, d'accord.

La coprésidente (Mme Raymonde Folco): ...sur votre proposition, quitte à ce que nous en rediscutions à l'automne si vous le désirez. Nous aurons alors l'ensemble des députés.

M. Louis Plamondon: D'accord.

La coprésidente (Mme Raymonde Folco): Si vous voulez ramener cette question sur le tapis à l'automne, on pourra l'examiner de plus près à ce moment-là.

M. Louis Plamondon: Ça va.

La coprésidente (Mme Raymonde Folco): Monsieur Parent, encore une fois, je vous remercie. Est-ce que les membres du comité ont d'autres questions à adresser à M. Parent ou à M. Marleau? Je sais que M. Marleau peut rester quelques minutes de plus.

M. le Président Gilbert Parent: Si vous le voulez. Sinon, je vous remercie de m'avoir invité. J'espère que vous m'inviterez encore.

[Note de la rédaction: La séance se poursuit à huis clos]