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LANG Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING JOINT COMMITTEE ON OFFICIAL LANGUAGES

COMITÉ MIXTE PERMANENT DES LANGUES OFFICIELLES

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mercredi 3 mars 1999

• 1537

[Traduction]

La coprésidente (L'hon. Sheila Finestone (Mont-Royal, Lib.)): Je vois que nous avons le quorum. Le Comité mixte permanent des langues officielles a le plaisir de recevoir la ministre du Patrimoine, Sheila Copps, ainsi que Norman Moyer avec lequel nous avons eu de longues discussions la dernière fois.

Madame la ministre, avez-vous une déclaration d'ouverture?

Tout d'abord, madame la ministre, j'aimerais vous dire que lors de notre réunion d'hier nous avons fait savoir à quel point nous apprécions l'augmentation de 10 millions de dollars du budget des langues officielles. Nous recevions alors le commissaire aux langues officielles, et nous discutions de son rapport et du rapport de Donald Savoie et de M. Fontaine.

À cette occasion, les députés qui sont ici ont posé toutes sortes de questions et il est possible qu'ils vous demandent aujourd'hui des précisions, en particulier au sujet du communiqué de presse que vous avez publié. C'est un grand plaisir d'avoir cette occasion de discuter avec vous.

Madame la ministre.

[Français]

L'hon. Sheila Copps (ministre du Patrimoine canadien, Lib.): Merci, madame la présidente.

[Traduction]

La troisième personne parmi nous est Hilaire Lemoine, le directeur général en langues officielles au ministère.

[Français]

J'aimerais commencer par une petite présentation et, par la suite, avoir la possibilité de répondre aux questions. Ce que nous avions essayé de faire avec l'annonce...

[Traduction]

La coprésidente (Mme Sheila Finestone): Un instant, s'il vous plaît. Les microphones ne fonctionnent pas.

Très bien, je vous en prie.

Mme Sheila Copps: Merci, madame la présidente, et merci aux membres du comité de m'avoir invitée à comparaître pour vous parler des choix. Hier, nous avons annoncé que nous réinvestissions dans les programmes des langues officielles et en particulier dans le soutien des minorités linguistiques. Cela indique que nous faisons un choix pour l'avenir.

Je vais donc parcourir notre exposé après quoi nous aurons du temps pour les questions.

[Français]

Par l'annonce que nous avons faite hier des 70 millions de dollars de nouveaux fonds par année, nous avons commencé à redresser les écarts antérieurs dans le financement des programmes pour les langues minoritaires au Canada. Finalement, cela nous remet dans la bonne direction.

[Traduction]

Nous préparons l'avenir en bâtissant sur des fondations solides dans des secteurs comme l'enseignement de la langue seconde ou l'enseignement dans la langue de la minorité.

• 1540

[Français]

Pour renouveler la vision, il faut se concentrer sur quatre points: investir dans les communautés linguistiques en situation minoritaire, 10 millions de dollars par année; consolider la contribution de l'ensemble des institutions fédérales au développement des communautés et de la dualité linguistique, 6 millions de dollar par année—on pourra préciser si certains le désirent—; collaborer avec les provinces pour améliorer l'accès aux services dans la langue de la minorité, 4 millions de dollars par année; l'appui à l'enseignement dans la langue de la minorité et la langue seconde, 50 millions de dollars de nouvel argent par année.

Quel est le statut des communautés minoritaires au Canada? La vitalité de ces communautés est au coeur de notre dualité linguistique. Près de deux millions de Canadiennes et Canadiens appartiennent à des communautés minoritaires de langue officielle.

[Traduction]

Cela représente un million de francophones à l'extérieur du Québec et un million d'anglophones au Québec.

[Français]

Il y a 970 000 personnes des communautés francophones et acadiennes qui indiquent que leur langue maternelle et leur première langue officielle parlée est le français, alors que 926 000 personnes au Québec indiquent que leur langue maternelle et leur première langue officielle parlée est l'anglais.

L'objectif du réseau communautaire.

[Traduction]

Quel est l'objectif du réseau communautaire? Pour commencer, il s'agit de favoriser l'épanouissement des communautés minoritaires. Il existe dans tout le pays un réseau de 350 groupes communautaires qui ont été créés et développés en partant du principe des ententes Canada-communautés qui nous permettent de signer des ententes sur plusieurs années pour financer les groupes qui appartiennent à une minorité linguistique en tenant compte de leurs véritables priorités. Ce n'est donc pas le gouvernement qui choisit les priorités des communautés, ce sont elles-mêmes qui fixent leurs propres priorités et de nouveaux fonds y sont consacrés.

Passons maintenant aux objectifs des institutions fédérales...

[Français]

L'objectif est de consolider notre engagement à l'égard des communautés linguistiques minoritaires. En 1988, on a institué les articles 41 et 42 énonçant l'engagement des institutions fédérales à contribuer au développement des communautés minoritaires de langue officielle. Après une discussion avec la communauté, en 1994, on avait déjà un engagement renouvelé du premier ministre et les plans d'action de 27 institutions fédérales clés.

Je pense qu'après notre rencontre d'aujourd'hui, vous aurez aussi la possibilité de discuter avec d'autres ministères du gouvernement pour vérifier jusqu'à quel point est respectée la politique mise de l'avant par les articles 41 et 42. Je crois que M. Massé viendra ici le 9 mars pour discuter de ces articles. Comme vous le savez, on a réussi à s'entendre avec le Conseil du Trésor pour qu'il s'occupe du respect desdits articles. En effet, un ministre responsable au centre est toujours mieux en mesure d'encourager les autres à respecter la loi.

Le protocole d'entente de 1997 que j'ai signé avec M. Massé prévoit une plus grande responsabilisation des ministères. En 1999, avec les fonds destinés à faciliter la mise en oeuvre des articles 41 et 42 de la loi, des projets communs seront établis dans les secteurs prioritaires du gouvernement et de la communauté.

[Traduction]

Quels sont les objectifs des 70 millions de dollars qui doivent être consacrés à la langue seconde? Il s'agit d'offrir la possibilité d'apprendre l'autre langue officielle. Entre 1951 et 1996 le nombre des Canadiens bilingues a plus que doublé, pour passer de 1,7 million à 4,8 millions. C'est une augmentation considérable quand on considère que cela représente 42 p. 100 de la proportion des Canadiens bilingue. Je crois pouvoir dire sans hésiter que c'est la plus grosse augmentation qu'on ait pu constater dans cette génération. Cela est dû en partie aux garanties constitutionnelles en ce qui concerne l'éducation dans la langue de la minorité qui ont été mises en place en 1982.

• 1545

Le bilinguisme augmente dans presque toutes les provinces et territoires et dans les régions métropolitaines de recensement partout au Canada. On trouve le plus haut taux de bilinguisme au Québec, 38 p. 100, et ensuite au Nouveau-Brunswick, 33 p. 100. À l'heure actuelle, 2,7 millions d'enfants apprennent le français ou l'anglais comme langue seconde. Cela représente 52 p. 100 de la population étudiante.

D'après un récent sondage d'opinions à l'extérieur du Québec, trois parents sur quatre pensent qu'il est important d'enseigner l'anglais et le français aux enfants dans les écoles canadiennes. Au Québec, 85 p. 100 des gens considèrent que le gouvernement fédéral doit faire plus pour promouvoir le bilinguisme.

Considérons maintenant le succès des programmes d'immersion française. C'est une innovation canadienne qui est désormais utilisée dans le monde entier, d'Israël en Irlande, de Finlande en Nouvelle-Zélande. Il y a actuellement 317 000 étudiants qui sont inscrits dans des programmes d'immersion française un peu partout au Canada et on prévoit que 20 p. 100 des enfants qui se trouvent actuellement dans des écoles primaires et secondaires anglophones auront une expérience d'immersion.

Quant aux anglophones hors Québec, je suis convaincue que les programmes d'immersion sont le moteur du développement et du bilinguisme parmi les jeunes. Le taux de bilinguisme chez les anglophones de 15 à 19 ans est deux fois et demi plus élevé que celui de l'ensemble des anglophones. Pour cette raison, je pense que le moment est venu de profiter de ce succès et de bâtir sur cette base.

[Français]

Deuxième statistique concernant la réussite: l'enseignement dans la langue de la minorité. L'objectif est de permettre aux communautés minoritaires de langue officielle d'avoir accès à l'enseignement dans leur langue.

Actuellement, il y a 261 000 élèves dans les écoles primaires et secondaires de langue seconde, soit 160 000 dans près de 700 écoles de langue française à l'extérieur du Québec et 101 000 dans le système scolaire anglophone au Québec.

L'accès à l'enseignement dans la langue de la minorité est à la fois un droit, selon l'article 23, et une nécessité.

Vous voyez ici la carte du Canada, qui montre jusqu'à quel point on commence à avoir un vrai système d'enseignement secondaire et postsecondaire à travers le Canada. Par l'application de l'article 23, on a pu développer un réseau collégial et universitaire de 19 établissements à l'extérieur du Québec, et on peut voir un début de gestion scolaire dans la langue seconde même à Terre-Neuve. La seule province qui n'a pas encore fait l'application de la gestion scolaire francophone est la Colombie-Britannique, et on y travaille. Vous pouvez constater, par exemple, qu'on a fait l'expansion des installations à la Faculté Saint-Jean, à Edmonton, au Collège universitaire de Saint-Boniface, à Winnipeg, à la Cité collégiale, au Collège des Grands Lacs, et j'en passe.

Investir dans l'éducation rapporte.

[Traduction]

En 1971, 31 p. 100 des anglophones en situation minoritaire de 25 à 34 ans avaient moins de neuf ans de scolarité. En 1996, il n'y en avait plus que 3 p. 100. Voilà une statistique incroyable en l'espace de 25 ans, c'est une réalisation très positive.

[Français]

Le pourcentage de jeunes francophones entre 15 et 34 ans qui possèdent un diplôme universitaire est passé de 3,9 p. 100 en 1961 à 13,5 p. 100 en 1996, ce qui démontre que l'éducation rapporte.

Pour ce qui est du pourcentage de diplômés universitaires francophones hors Québec, le groupe le plus scolarisé, chez lequel on trouve le plus de diplômés universitaires au Canada, est présentement celui des francophones hors Québec. Les francophones diplômés hors Québec représentent 13,5 p. 100 de la population; les non-francophones hors Québec, 13,2 p. 100; les francophones au Québec, 11,7 p. 100; et au Canada, pour tous les groupes linguistiques, 13,1 p. 100 de la population.

[Traduction]

Je tiens à répéter cela car, pour le travail qui nous attend, c'est une statistique particulièrement importante. Autrement dit, nous sommes partis d'une situation où les francophones qui vivaient hors Québec étaient parmi les gens les moins éduqués en 1971 pour arriver à une situation complètement inverse: en l'espace de 25 ans, ce sont les francophones hors Québec qui sont le groupe linguistique le plus éduqué au Canada à l'heure actuelle.

• 1550

[Français]

Les priorités pour l'avenir sont: accès à l'éducation postsecondaire; investissements dans la nouvelle technologie pour améliorer l'accès des petites collectivités à l'éducation postsecondaire; enseignement de qualité dans la langue de la minorité; consolidation de la contribution fédérale au développement des communautés. Voilà encore un engagement renouvelé.

Tout indique que nos programmes font la différence. Des progrès importants sont réalisés pour donner aux communautés minoritaires de langue officielle les outils dont elles ont besoin pour participer et contribuer pleinement à la société canadienne. Les jeunes Canadiens veulent pouvoir utiliser les deux langues officielles; c'est le temps de bâtir sur ces fondations solides.

J'aimerais aussi, madame la présidente, remercier toutes les personnes autour de cette table qui ont lutté pour obtenir cette reconnaissance dans le budget. Un montant de 70 millions de dollars n'apparaît pas du jour au lendemain. C'est grâce à votre travail et à celui de beaucoup de membres du comité qu'on a réussi à convaincre le ministre des Finances et le premier ministre. Lorsqu'on a des investissements à faire, que ce soit dans l'éducation, dans la jeunesse et surtout dans le respect d'un pays qui valorise deux langues officielles, ce sont des investissements majeurs. Certains pourront dire, en coulisse, jusqu'à quel point cela a été difficile par moments, mais, finalement, on a réussi et on en est très heureux. Merci, madame la présidente.

[Traduction]

La coprésidente (Mme Sheila Finestone): Merci beaucoup, madame la ministre.

J'aimerais vous demander une précision sur la diapositive qui s'intitule «Bâtir un avenir meilleur». Vous parliez de la gestion scolaire dans les écoles francophones, ce qui nous fait particulièrement plaisir; dans la note explicative que vous avez envoyée au sujet de ce qui doit être fait, votre communiqué de presse est intitulé «Le gouvernement du Canada investit de nouveaux fonds dans les programmes de soutien en langues officielles». Vous avez souligné, et c'était très important, les 19 collèges et universités francophones qui se trouvaient à l'extérieur du Québec, mais je ne vois absolument rien au sujet des huit collèges publics et universités de langue anglaise qui se trouvent au Québec et dont vous dites qu'ils bénéficieront en partie de ces 50 millions de dollars que vous avez réservés. Quelle est l'explication de ce graphique?

Mme Sheila Copps: Ce graphique sert à expliquer les difficultés auxquelles nous nous heurtons actuellement, à un moment où nous essayons de construire sur de nouvelles bases. En effet, le système collégial postsecondaire en langue anglaise au Québec est assez développé, mais ici, nous avons essayé de montrer les nouveaux développements, et non pas toute la gamme des écoles qui existent. Nous pourrions certainement le faire dans une autre carte, mais ici nous avons essayé de montrer les institutions qui ont été créées depuis la Constitution et depuis que le statut de langue officielle d'une minorité a été reconnu. Dans certaines provinces, c'est très récent.

La coprésidente (Mme Sheila Finestone): Merci beaucoup pour cette précision. Je suis certaine que le comité aimerait savoir exactement ce qui est consacré aux collèges et aux universités de langue anglaise au Québec. Les circonstances ont beaucoup changé dans cette province.

Mme Sheila Copps: Nous pourrions certainement préparer une autre carte pour ces établissements-là, mais dans la plupart des cas, ils existaient déjà avant la Constitution. Ce que j'ai essayé de montrer avec cette carte-ci, c'est ce qui n'existe que depuis quelques années. Au Québec, le problème c'est que la communauté de langue anglaise est en train de perdre des établissements qui existaient; il n'est donc pas question d'en créer de nouveaux. Cela dit, ce sont les deux côtés d'une médaille.

La coprésidente (Mme Sheila Finestone): Je pense que vous pourriez réexaminer sérieusement ce qui se passe dans toutes les communautés en dehors de l'île de Montréal où on a besoin de services.

Mesdames et messieurs, Angela Vautour doit partir, je lui donnerai donc la parole après M. Mark.

M. Inky Mark (Dauphin—Swan River, Réf.): Merci, madame la présidente.

Tout d'abord, madame le ministre, permettez-moi de vous souhaiter la bienvenue et de vous remercier de comparaître devant le comité aujourd'hui. Cela va peut-être vous surprendre, mais je vais afficher une attitude très positive. L'amélioration des programmes de langue à l'intention de nos enfants, voilà toujours de bonnes nouvelles, quel que soit le jour de la semaine où nous l'annonçons. Comme député de la circonscription de Dauphin—Swan River, je sais que ce sont-là d'excellentes nouvelles en ce qui concerne les programmes linguistiques dans les deux localités francophones, Saint-Lazare et Sainte-Rose du Lac ainsi que pour le régime des écoles publiques qui offrent l'immersion française comme programme de langue seconde.

• 1555

Ma question s'inscrit dans la même optique que celle de madame la présidente. Hier, nous avons entendu ce qu'avait à dire le commissaire, réunion très intéressante. Je veux demander à la ministre si elle peut nous assurer que les anglophones au Québec toucheront un financement par habitant équivalent à ce que touchent les francophones hors Québec.

Mme Sheila Copps: Il ne faut pas oublier qu'un financement égal ne signifie pas nécessairement un financement par habitant, mais je peux vous dire que oui. Évidemment, quand on songe à la situation dans certaines provinces... Par exemple, j'ai vu des statistiques dans le journal ce matin qui révélaient le montant disproportionnel donné à Terre-Neuve. Ce n'est que cette année que Terre-Neuve a commencé à reconnaître les droits des communautés francophones. Cela signifie donc, qu'on part à zéro. Par conséquent, il leur faut un plus gros investissement au départ.

[Français]

Une voix: C'est du rattrapage?

Mme Sheila Copps: Oui, c'est du rattrapage.

[Traduction]

On peut également dire que dans le domaine de l'éducation, les textes disponibles en français coûtent, en moyenne, environ 20 p. 100 de plus et donc il y a des problèmes en ce qui touche les coûts.

Avec ce financement supplémentaire, nous espérons cibler les plus grands besoins. Je sais que mes collègues, surtout ceux des régions rurales du pays, me disent qu'il leur faut un plus grand soutien que dans certaines des régions plus urbanisées. Plus particulièrement, je pense que c'est vrai en ce qui concerne la minorité anglophone au Québec qui dans certaines régions de la province s'estime très isolée. Ces Québécois ont parfois besoin d'une aide un peu plus soutenue que s'ils habitaient Montréal.

La coprésidente (Mme. Sheila Finestone): Vous avez entendu, je suis heureuse de voir que vous êtes à l'écoute.

M. Inky Mark: J'aimerais poser encore une brève question.

Que pensez-vous de la politique sur le multiculturalisme dans le domaine des langues et à votre avis, quelle relation existe-t-il entre cette politique et le programme des langues officielles?

Mme Sheila Copps: À vrai dire, je pense que la politique sur le multiculturalisme au Canada repose sur une position historique que nous avons adoptée lorsque nous avons fondé un pays qui respectait la diversité culturelle. Nous sommes le seul pays au monde qui a eu ses origines en réunissant deux peuples. Nous n'avons pas toujours eu la main très heureuse, et nous ne faisons toujours pas tout aussi bien que nous le voudrions, mais nous sommes partis du principe constitutionnel fondamental qui veut que l'on peut parler des langues différentes, appartenir à des groupes culturels différents, professer des religions différentes et construire un pays. À mon avis, cela cadre tout à fait avec la politique sur le multiculturalisme selon laquelle lorsque l'on fait partie d'un nouveau pays, comme le nôtre, nous forgeons ensemble nos cultures, d'une façon pluraliste—et je dis «cultures», au pluriel aussi.

J'ai grandi dans une localité où huit personnes sur dix dans ma circonscription parlent une langue différente. Ce n'est peut-être pas une statistique très exacte, mais si vous faites du porte à porte, vous trouverez probablement huit personnes sur dix qui ne parlent, comme langue maternelle ni le français, ni l'anglais. Ces personnes apportent une contribution et créent une synergie merveilleuse. Je pense que la création d'une vision multiculturelle pour le pays repose en fait sur les deux peuples fondateurs qui sont en réalité sinégétiques et non pas antagonistes.

M. Inky Mark: Merci, madame la présidente.

Le coprésident (Mme Sheila Finestone): Avez-vous terminé? Merci.

Madame Vautour.

[Français]

Mme Angela Vautour (Beauséjour—Petitcodiac, NPD): Merci de votre présentation, madame la ministre. Je veux vous remercier au nom des communautés linguistiques minoritaires; c'est sûr que cela va les aider. Du côté anglophone, les programmes d'immersion ont certainement besoin d'aide au Nouveau-Brunswick. En tant qu'Acadienne de cette province, je pense qu'il y a encore beaucoup d'amélioration à apporter, surtout quand on pense à la SAANB qui a fermé ses portes l'année dernière; cela était inacceptable.

C'est certain que l'argent est une bonne nouvelle; par contre, il faut regarder l'ensemble de la situation. Tout le monde sait, comme Donald Savoie l'a souligné dans sa recherche, que les minorités francophones hors Québec vivent souvent dans des régions qui connaissent des problèmes de développement régional; il y a là un manque d'emplois et ces francophones partent pour aller dans des régions anglophones et finissent par s'assimiler. Cela, on le voit beaucoup au Nouveau-Brunswick. Comme je le dis souvent, je pense que la moitié de l'Alberta est peuplée de gens du Nouveau-Brunswick.

L'article 41 de la Loi sur les langues officielles dit que le gouvernement fédéral s'engage à appuyer le développement des communautés. On sait que cet article n'est pas toujours respecté. On est certainement favorable à une augmentation de 16 millions de dollars du montant consacré à l'appui des communautés.

• 1600

Cependant, il faut comprendre qu'il n'y a rien pour se réjouir. Les 16 millions de dollars seront divisés parmi toutes les provinces du territoire, si je comprends bien.

Lorsqu'on réduit de 40 millions le budget de l'APECA, un organisme qui s'occupe du développement régional en Atlantique, où il y a de nombreux francophones hors Québec, comment peut-on se réjouir d'une injection de 16 millions pour tout le pays? Les francophones de l'Atlantique ne sont-ils pas perdants?

Mme Sheila Copps: Je ne peux pas parler de l'APECA. Si vous voulez faire venir le ministre responsable de l'APECA, vous êtes la bienvenue.

L'investissement que nous faisons aujourd'hui n'est pas seulement de 16 millions de dollars, mais bien de 70 millions de dollars par année, de sorte que le montant annuel totalisera près de 250 millions de dollars. C'est pour l'appui.

Je présume, pour donner un exemple, qu'en éducation, cela ne va non seulement permettre aux jeunes de vivre à l'école dans leur langue, mais également permettre d'embaucher des professeurs. Cela va créer une base.

Là où se trouvent des défis, que ce soit au Nouveau-Brunswick, au nord de l'Ontario... Mon père est né à Haileybury et a été élevé à Timmins. Il a appris à parler le français dans la rue, quand il était jeune. Il était anglophone, mais il a appris la langue dans la rue parce que la population était francophone à près de 90 p. 100. On n'a qu'à se rendre maintenant à Timmins pour voir jusqu'à quel point les choses ont changé. On vit aussi la vague culturelle américaine.

L'investissement dans l'éducation commence à porter fruit. On vient de parler du nombre de diplômés de collèges et universités qui sortent de l'école et qui sont capables de s'organiser, de créer des réseaux. On est en attente de l'accréditation du premier réseau virtuel de langue française hors Québec dans le monde. Les gens se débrouillent, mais ils n'ont pas accès aux garderies, aux emplois. Dans la deuxième étape que nous essayons de franchir, nous tentons de faire apprécier la valeur des deux langues officielles.

Ce que je trouve fort impressionnant,

[Traduction]

—et je suis enchantée que Inky ait fait cette déclaration d'aujourd'hui—les gens commencent à comprendre que c'est une plus- value que de parler deux langues. Si l'on songe au niveau d'éducation...

[Français]

et que cela attire des emplois, il faut alors commencer à parler de valeur économique.

Au Nouveau-Brunswick, hier, j'en ai parlé justement, et c'est une chose que j'essaie de souligner dans d'autres domaines du ministère du Patrimoine. Par exemple, en ce moment, c'est dans le domaine culturel que la croissance des emplois est le plus rapide, mais les organismes de main-d'oeuvre ne sont pas toujours disponibles pour aider les groupes culturels. Selon eux, si c'est culturel, cela implique les langues officielles et les subventions. Mais cela peut être un investissement. Il faut voir ce que nous avons fait, par exemple, avec les East Coast Music Awards, qui font vraiment connaître les artistes, vendre des disques, etc.

Dans toutes les parties du ministère du Patrimoine canadien, j'essaie de m'assurer qu'il y ait de l'égalité dans les dossiers, que ce soit l'anglais... Pourquoi demande-t-on aux francophones d'utiliser l'enveloppe des langues officielles alors qu'on investit dans la culture? Au Québec, par exemple, pourquoi demande-t-on aux groupes anglophones d'utiliser l'enveloppe des langues officielles lorsqu'ils font du théâtre?

Ces inconsistances doivent être rééquilibrées, mais cela nécessite aussi un effort d'éducation et d'équipe. Il faut réfléchir sur ce fait: si nous n'avions pas eu ces programmes, où en serions-nous dans la francisation qu'on vit actuellement ou vice versa?

[Traduction]

Je vois les choses de façon plus optimiste. Je crois que nous avons fait des progrès, mais il ne suffit pas de 10 ou 20 ans pour créer un système d'enseignement respectueux des deux langues officielles. Nous commençons à voir les fruits de nos efforts, par exemple avec les jeunes qui viennent travailler sur la Colline, les pages originaires de Colombie-Britannique qui parlent un français remarquable.

• 1605

Lorsque j'étais enfant, j'aurais été désespérée d'avoir un professeur comme ceux qui enseignent aujourd'hui. La mienne était une nonne grise. Elle était extraordinaire. Elle m'a appris le français, mais la conversation ne faisait pas partie de l'enseignement. Il fallait étudier Molière et la grammaire, mais les professeurs ne s'intéressaient guère de savoir si nous pouvions parler français.

Vingt ans plus tard, les choses ont complètement changé et tout le monde est d'accord, même au Parti réformiste, pour reconnaître la valeur... Je le dis de façon très positive. Vous souvenez-vous des protestations soulevées à propos des boîtes de céréales dans ce pays? C'étaient d'énormes campagnes de protestation. Je pense donc que nous avons fait des progrès, mais nous sommes un certain nombre à trouver qu'ils sont trop lents et trop modestes. Nous aimerions que les choses aillent beaucoup plus vite.

[Français]

Mme Angela Vautour: Je dois être d'accord avec Mme la ministre que le Parti réformiste... Il faut se dire qu'on a peut-être fait du chemin dans le parti. Il est vrai que du côté de l'immersion, je reçois des plaintes de familles anglophones qui veulent s'assurer de pouvoir y envoyer leurs enfants, parce que c'est une valeur additionnelle que d'être capable de parler les deux langues. Je comprends certainement la situation d'un anglophone qui n'a pas la chance d'apprendre une deuxième langue et qui se retrouve dans des situations où la deuxième langue pourrait l'aider.

En plus de l'argent additionnel injecté, on a parlé du manque d'application des articles 41 et 42. Concrètement, qu'est-ce qui pourrait contribuer à assurer l'application de ces deux articles?

Mme Sheila Copps: D'abord, revenons à la première entente signée avec le Conseil du Trésor. Pourquoi cela a-t-il été important et appuyé beaucoup par les communautés minoritaires? C'est une chose que la ministre du Patrimoine demande à ses collègues de respecter la Loi sur les langues officielles, mais quand cela vient de ceux qui donnent l'argent, l'orientation change un peu. Donc, l'application des articles 41 et 42 pourrait être dirigée par le Conseil du Trésor. C'est un mécanisme bien plus efficace.

M. Massé viendra ici le 9 pour vous expliquer de quelle façon nous sommes allés de l'avant avec les plans dans chaque ministère. Il faut aussi que nous demeurions vigilants. Nous avons demandé des plans précis dès l'an dernier parce que, sans un échéancier précis et sans un ministre responsable au centre, les paroles sont parfois plus difficiles à mettre en application.

Mme Angela Vautour: Il y a une situation un peu triste au Nouveau-Brunswick, où les employés du ministère du Développement des ressources humaines ont été transférés à la province et ont perdu le droit de travailler dans leur langue. Les réunions se déroulent dans la langue choisie par le directeur. Le service est offert dans les deux langues mais les employés ont perdu le droit de travailler dans leur propre langue. Surtout au Nouveau-Brunswick, qui est une province bilingue, je n'aurais jamais pensé qu'on puisse reculer à ce point-là. Cela ne devrait même pas être un sujet de discussion autour de cette table. On a trop de problèmes et on ne devrait pas en ajouter.

J'espère que des démarches seront entreprises pour redonner ce droit aux employés fédéraux transférés à la province. L'application de la loi n'a pas continué; il y a là un manque qu'il faudra régler à un moment donné parce qu'on continue avec les dévolutions à des agences et le problème persistera. Il faut que quelqu'un intervienne et règle cela avant que cela ne devienne un monstre.

Mme Sheila Copps: M. Massé a déjà commenté non seulement le rapport Savoie, mais aussi les commentaires de M. Goldbloom, qui disait qu'il faudrait analyser encore les instruments disponibles pour s'assurer que le respect des langues officielles soit dorénavant inscrit dans toutes les ententes de transfert et qu'il y ait un suivi. Je pense qu'il pourra vous en parler plus longuement quand il viendra la semaine prochaine.

Mme Angela Vautour: Merci.

La coprésidente (Mme Sheila Finestone): Merci, madame.

[Traduction]

Sénateur Robichaud.

• 1610

Le sénateur Louis J. Robichaud (L'Acadie—Acadia, Lib.): Merci, madame la présidente.

Je souhaite la bienvenue à la ministre du Patrimoine canadien. Nous sommes toujours heureux de vous voir, croyez-moi. Vous ne parlez jamais trop, même si vous venez de le dire—et je n'en crois rien.

[Français]

Je voudrais, à l'instar de ceux qui m'ont précédé, remercier la ministre pour l'augmentation des octrois consacrés au respect des langues officielles dans ce pays. C'est une augmentation qui, peut-être, satisfera les besoins des minorités au pays. Je ne sais pas encore si elle compense toutes les coupures des trois ou quatre dernières années et si elle nous ramène au niveau antérieur, mais elle est certainement bienvenue.

J'ai noté que vous aviez dit dans vos remarques, madame la ministre, qu'il y avait une augmentation sensible du bilinguisme au pays à cause des mesures gouvernementales. Je me demande si vous avez des statistiques. Est-ce que l'augmentation du bilinguisme se produit chez des anglophones qui sont devenus bilingues ou chez des francophones qui sont devenus bilingues?

Mme Sheila Copps: Ce qui devrait transparaître dans les statistiques, c'est évidemment qu'il y a plus de francophones qui apprennent l'anglais, étant donné que le Québec est la province la plus bilingue et celle qui compte le plus de francophones, et que la deuxième province bilingue, quant au statut, est le Nouveau-Brunswick. Il est certain, cependant, que l'attrait pour l'apprentissage du français est assez élevé chez les anglophones.

Mme Vautour a parlé du fait qu'il y a des enfants dont les parents font la queue jusqu'à minuit pour les placer dans les écoles d'immersion. L'investissement que nous faisons va permettre aussi de revivifier des programmes qui avaient été un tant soit peu freinés.

Le sénateur Louis Robichaud: J'ai été absent au cours des dernières semaines, des derniers mois. Je constate que le rapport Savoie préconise que plusieurs ministères—27, je crois—se partagent la responsabilité du respect des deux langues officielles. Je sais qu'au cours des ans, il y a eu des promoteurs de l'idée de la confier entièrement à un même ministère. Selon le rapport Savoie, cette responsabilité doit demeurer partagée entre plusieurs ministères. Est-ce qu'on pourrait avoir l'opinion de la ministre du Patrimoine canadien à ce sujet?

Mme Sheila Copps: En effet, l'application de la Loi sur les langues officielles est la responsabilité du ministère du Patrimoine. Nous avions signé, il y a au moins deux ans, une entente avec le Conseil du Trésor pour l'application spécifique des articles 41 et 42.

Vous parlez de 27 ministères, mais on peut dire, bien sûr, que tous les ministères sont responsables de respecter la Loi sur les langues officielles. Toutefois, en ce qui concerne l'application de la loi, Patrimoine Canada en est responsable vis-à-vis des communautés, alors que le Conseil du Trésor en est responsable en ce qui concerne le gouvernement. C'est pourquoi M. Massé viendra ici pour discuter des questions soulevées par M. Savoie au sujet des façons de garantir le respect des langues officielles quand il y a transfert de juridiction, etc.

• 1615

C'est une description assez exacte, mais les 27 ministères sont obligés par la loi de présenter un plan pour leur propre secteur.

[Traduction]

La coprésidente (Mme Sheila Finestone): Madame la ministre, pourriez-vous nous donner des précisions sur le rôle de Michael O'Keefe à Patrimoine Canada, qui dirige un comité chargé de réunir des représentants de Statistique Canada, du Bureau du Conseil privé, du Secrétariat du Conseil du Trésor, de Développement des ressources humaines, du Bureau du commissaire aux langues officielles et du ministère de la Justice. Quel rôle joue-t-il et de quelle façon va-t-il assumer ses responsabilités dans ses relations avec le Conseil du Trésor?

Mme Sheila Copps: Je vais demander à Hilaire Lemoine de vous parler de ce comité, car il fait partie des mesures d'application des articles 41 et 42 que nous avons prises avec le Conseil du Trésor.

[Français]

M. Hilaire Lemoine (directeur général, Programme d'appui aux langues officielles, ministère du Patrimoine canadien): Merci, madame la ministre.

[Traduction]

Le comité qui vient d'être constitué se compose de fonctionnaires qui veillent à ce que les recherches entreprises au niveau interministériel sur les questions concernant les services en langues officielles soient bien coordonnées. Statistique Canada, Développement des ressources humaines, l'industrie et le patrimoine se penchent sur la question. Nous avons constitué un groupe de travail formé de chercheurs qui assurent la coordination de la recherche dans l'ensemble du secteur public. C'est l'une des mesures administratives que prend le ministère pour s'acquitter de sa mission de coordination prévue aux articles 41 et 42.

La coprésidente (Mme Sheila Finestone): C'est donc une fonction de recherche; il ne s'agit pas de l'application de politiques ou de principes.

M. Hilaire Lemoine: Non, c'est une fonction de recherche.

La coprésidente (Mme Sheila Finestone): Merci beaucoup. Je reviendrai sur ce sujet plus tard.

[Français]

Monsieur Plamondon.

M. Louis Plamondon (Bas-Richelieu—Nicolet—Bécancour, BQ): Madame la ministre, je ferai quelques remarques avant d'en arriver à ma question.

Dans votre document, à la page 4, à propos de la communauté francophone et acadienne, vous mentionnez le chiffre de 970 000 personnes de langue maternelle française, mais vous oubliez de dire que, parmi celles-là, il n'y en a que 618 000 pour qui c'est la langue d'usage. Au Québec, il y a 622 000 personnes de langue maternelle anglaise et 926 000 personnes qui ont l'anglais comme langue d'usage. Vous indiquez la différence pour ce qui est de l'anglais, mais vous ne le faites pas pour le français, à la page 4. Cette différence montre très bien que la vitalité de la minorité anglophone au Québec est beaucoup plus grande que celle de la minorité francophone dans le reste du Canada. C'est simplement une observation à propos de la page 4.

Je reviens maintenant à vos 70 millions de dollars. Je voudrais vous rappeler quelques chiffres. Lorsque vous êtes arrivée au pouvoir, en 1993, on prévoyait un budget de 310 millions de dollars pour les langues officielles. Or, dans le Budget des dépenses principal de cette année-là, les sommes réellement consacrées aux langues officielles ont été de 232 millions de dollars, soit une perte nette de 78 millions. Par la suite, les budgets ont été fixés à 240 millions de dollars pour l'année 1994-1995, ce qui représentait une perte de 70 millions de dollars par rapport à 1993, et à 210 millions de dollars pour 1995-1996, ce qui représentait une perte de 100 millions de dollars par rapport à 1993.

Alors, quand vous nous arrivez avec une augmentation de 70 millions de dollars, vous ne faites que réparer, très peu, les erreurs commises lorsqu'on a pris la décision de réduire les budgets consacrés à la dualité linguistique du Canada.

Parallèlement, alors que vous étiez responsable du BIC, du Bureau d'information Canada, vous n'avez pas hésité à consacrer 60 millions de dollars à de la propagande, dont 15 millions pour les fameux drapeaux, ce qui vous a valu le surnom, dans les journaux, de Lady Flag. Je le répète avec humour, parce que je l'ai lu dans les journaux.

Vous avez dépensé également 5 millions de dollars pour Option Canada et vous avez toujours refusé de présenter les factures, même si le vérificateur général du Canada vous l'a demandé à maintes reprises. Vous avez dépensé 5 millions de dollars, et personne ne sait où ils sont allés. Ils ont été dépensés par un comité bidon dont le président a dit lui-même qu'il n'avait jamais tenu de réunion ou rien su de la façon dont ils avaient été dépensés. Vous avez augmenté de 500 p. 100 le budget des fêtes du Canada, et de ces 500 p. 100, 60 p. 100 vont au Québec.

• 1620

Quand j'analyse tout cela globalement, d'un côté les pertes par rapport au budget de 1993, et de l'autre, l'augmentation de 70 millions de dollars d'aujourd'hui, je n'ai pas tellement envie de célébrer, comme mon ami M. Robichaud de l'autre parti. C'est mieux que rien, mais c'est loin d'être ce que c'était. C'est un premier commentaire, madame la ministre.

Mme Sheila Copps: J'aimerais remercier le député qui me fait me rappeler que lorsqu'il était député du Parti conservateur, nous avions justement un plan pour investir davantage dans le domaine des langues officielles. Malheureusement, quand on a pris le pouvoir, on s'est retrouvés avec un déficit de 42 milliards de dollars par année et on a vécu pas mal de difficultés. Ce qui est intéressant dans l'investissement annoncé cette semaine, c'est qu'une fois tournée la page conservatrice, ou a recommencé les investissements.

L'autre chose qui est intéressante, c'est que le député endosse une politique de respect des deux langues. J'espère que c'est vraiment là sa pensée. Il faut dire qu'il y a divers gouvernements. Le gouvernement conservateur et M. Bouchard lui-même, qui a été secrétaire d'État, avaient indiqué dans des discours combien il était important de garantir le respect des deux langues officielles et d'encourager le bilinguisme au Canada.

Si M. le député le souhaite, madame la présidente, je peux déposer le texte d'un très beau discours que M. Bouchard a prononcé comme secrétaire d'État, quand il était membre du Parti conservateur, à l'appui de cette politique.

On est contents, finalement, que le Bloc s'engage, avec les autres partis...

Le sénateur Jean-Maurice Simard (Edmundston, PC): C'est de la partisanerie.

Mme Sheila Copps: ...canadiens, à respecter cette politique.

Quand on parle de partisanerie, on parle toujours du Bloc. Cette semaine, il y a une autre revendication historique qui ne marche pas.

Le sénateur Jean-Maurice Simard: Partisanerie libérale.

[Traduction]

La coprésidente (Mme Sheila Finestone): Sénateur Simard, s'il vous plaît.

Je vous serais reconnaissante, madame la ministre, de bien vouloir nous laisser copie de ce discours.

Mme Sheila Copps: Bien sûr.

[Français]

La coprésidente (Mme Sheila Finestone): Monsieur Plamondon.

M. Louis Plamondon: Ça fait plusieurs fois, je pense, que la ministre dépose ce discours-là.

Des voix: Ah, ah!

M. Louis Plamondon: Vous n'avez pas répondu à mes remarques sur les coupures effectuées dans le budget de 1993, sauf pour dire qu'il y avait un déficit attribuable au Parti conservateur lorsque votre parti est arrivé au pouvoir. Le fait demeure que vous aviez le choix de couper là où vous le vouliez dans le budget de votre ministère et que vous n'avez pas protégé les intérêts des groupes en situation de minorité. Vous avez coupé très largement.

Mme Sheila Copps: Monsieur Plamondon, vous devez reconnaître que, depuis que je suis ministre du Patrimoine canadien, quand on a fait des révisions de programmes, j'ai choisi—et j'en ai fait la promesse l'année dernière—de donner priorité à la restauration des fonds attribués aux langues officielles.

M. Louis Plamondon: Après les avoir coupés.

Mme Sheila Copps: Non, non. Vous parlez d'Option Canada; je n'étais même pas là. Vous me blâmez pour des gestes posés alors que je n'étais même pas là. J'étais au ministère de l'Environnement. Alors, si vous voulez vous adresser à d'autres personnes qui viendraient vous rencontrer...

M. Louis Plamondon: Êtes-vous prête à déposer tous les documents d'Option Canada? Êtes-vous prête à déposer toutes les factures que vous demande le vérificateur général du Canada? Vous les cachez. Vous refusez de répondre au vérificateur général du Canada parce qu'il s'y trouve quelque chose de croche et de louche. Vous avez toujours refusé de le faire en Chambre et vous refusez encore aujourd'hui de le faire.

Ma deuxième question, madame la ministre, porte sur certaines de vos déclarations en Chambre concernant la Semaine de la francophonie, qui est pour bientôt. Vous vous rappelez que votre ministère, de façon illégale, s'était approprié le nom de Semaine de la francophonie, lequel appartenait à l'ACELF. Cette association détenait les droits sur le nom de cet événement. Vous vous rappellerez qu'elle avait été extrêmement surprise d'apprendre que vous vous étiez approprié le volet de l'éducation par le biais d'une firme de consultants engagée pour organiser l'événement. Cette semaine comporte, en effet, un volet public et un volet éducation.

• 1625

En Chambre, dans la réponse que vous faisiez à une de mes questions, vous disiez que ce que je laissais entendre était faux, que jamais il n'y avait eu de chantage relativement à une subvention de 125 000 $ au cours des négociations avec l'ACELF. Celle-ci vous reprochait de vous être approprié cette désignation sans son autorisation. Vous avez toujours soutenu que c'était par le biais de la firme Leroux et associés, laquelle organise maintenant la Semaine de la francophonie, que vous vous étiez approprié cette désignation.

[Traduction]

La coprésidente (Mrs. Sheila Finestone): À l'ordre, s'il vous plaît.

Monsieur Plamondon, nous sommes ici pour étudier les crédits supplémentaires consacrés au programme des langues officielles. Nous sommes ici pour faire en sorte que les enfants et les jeunes qui veulent acquérir des aptitudes professionnelles... et que les services de santé soient garantis aux communautés de langue minoritaire.

Excusez-moi, monsieur Plamondon, vos questions sont irrecevables. Veuillez vous en tenir au sujet à l'ordre du jour, qui concerne le budget de cette année.

Merci. Vous pouvez continuer.

[Français]

M. Louis Plamondon: Madame la présidente, mes propos sont directement en rapport avec les dépenses du ministère et avec ce qui va se passer concernant la francophonie. Ils sont directement reliés à tout ce qui se passe aujourd'hui avec l'annonce de l'augmentation des sommes dans le domaine de la dualité linguistique. Donc, il me semble que je pose une question directement reliée à cela, du moins autant que les félicitations adressées à la ministre tout à l'heure par M. Robichaud. Je ne crois pas que cela s'y rapportait, n'est-ce pas?

La coprésidente (Mme Sheila Finestone): Poursuivez en posant une question précise.

M. Louis Plamondon: Je terminais lorsque vous m'avez coupé la parole.

Mme Sheila Copps: Je pense et j'espère que la Semaine de la francophonie touche tous les francophones du Canada.

M. Louis Plamondon: Oui, elle appartient à tous les francophones, mais le nom de la Semaine de la francophonie appartenait à l'ACELF et vous vous l'êtes approprié. D'ailleurs, son président, M. Bordeleau, vous l'avait reproché. Mais vous avez ensuite négocié sous pression pour qu'ils acceptent que vous preniez le nom. Or, vous avez toujours dit que votre entente avec l'ACELF ne comportait pas de conditions.

Mme Sheila Copps: Comment connaissez-vous toutes ces...

M. Louis Plamondon: J'ai une lettre signée par M. Lemoine, ici présent et responsable du Programme d'appui aux langues officielles, dans laquelle il dit ceci, qui est grave et constitue un élément de chantage: «La présente donne suite à votre lettre du 12...»

[Traduction]

La coprésidente (Mme Sheila Finestone): Voulez-vous éteindre son micro, s'il vous plaît?

Monsieur Plamondon, vous avez parlé pendant 10 minutes et 40 secondes. Si vous souhaitez poser la question, j'autoriserai une réponse, mais vous avez largement dépassé votre temps de parole. Excusez-moi, vous ajoutez bien des fioritures à votre question. Posez-la directement, s'il vous plaît.

[Français]

Posez une question directe. Monsieur Plamondon, déposez votre lettre et laissez la ministre répondre à toutes les remarques que vous venez de faire. S'il vous plaît, déposez votre lettre.

M. Louis Plamondon: [Note de la rédaction: Inaudible] ...en retour de l'appropriation du nom. C'est écrit: «s'engage à fournir le contenu de la page tabloïd» et, enfin: «Nous sommes prêts à recommander un montant de 125 000 $ dollars à la ministre du Patrimoine.»

C'est M. Lemoine qui signe cette lettre, à condition qu'on accepte de concéder le nom. Vous avez toujours refusé et toujours nié qu'il y ait eu un élément de chantage auprès de M. Bordeleau. Je dépose donc la lettre et j'espère qu'elle sera rendue publique.

La coprésidente (Mme Sheila Finestone): Merci.

Madame la ministre, voulez-vous répondre?

Mme Sheila Copps: Si vous voulez avoir la vraie version des faits, quand je suis devenue ministre du Patrimoine, il m'a semblé un peu étrange qu'on tienne une semaine de la francophonie ici, dans cette salle. Personne n'en parlait et personne ne le savait dans l'ensemble du Canada. Je me suis donné pour objectif de célébrer non seulement la Francophonie avec un grand F, mais aussi la francophonie canadienne. Pourquoi pas? Il n'y a personne qui a le monopole de la francophonie canadienne.

M. Louis Plamondon: [Note de la rédaction: Inaudible].

Mme Sheila Copps: Excusez-moi, mais...

La coprésidente (Mme Sheila Finestone): Madame Fraser, s'il vous plaît.

Mme Sheila Copps: J'aimerais seulement préciser un point, madame la présidente. Mon intérêt pour la Semaine de la francophonie est le suivant: tous ceux et celles qui vivent dans ce pays doivent respecter et valoriser la possibilité de vivre dans les deux langues. Nous avons été capables de faire fêter les Acadiens l'année dernière, lors du Festival des Acadiens. Nous nous ouvrons à tout le monde par le moyen d'une fête de la francophonie canadienne.

Quand on fait les Jeux de la Francophonie, on invite tout le monde à y participer. C'est Donovan Bailey qui a gagné la dernière médaille. Tient-on à une fête qui ne célèbre qu'un groupe déterminé?

• 1630

[Traduction]

La coprésidente (Mme Sheila Finestone): Sénatrice Fraser, s'il vous plaît.

La sénatrice Joan Fraser (De Lorimier, Lib.): J'aimerais ajouter ma voix à celles qui vous ont félicité d'être allé chercher des fonds supplémentaires pour les minorités de langue officielle. Nous savons tous que la concurrence pour ces crédits est féroce. Il y avait de nombreux programmes très utiles qui avaient besoin de rattrapage, et il n'est jamais facile d'obtenir de l'argent pour les communautés linguistiques. Je vous félicite de ce résultat politique très concret qui va faire beaucoup de bien à notre pays.

Je m'intéresse à différents sujets. Le premier d'entre eux concerne les Ententes Canada-Communautés qui, je suppose, sont actuellement en cours de renégociation. Sans vouloir les dévoiler, puisqu'elles n'ont pas encore été renégociées, est-ce que vous pourriez nous donner une idée des secteurs où l'expérience montre que ces ententes donnent des résultats particulièrement satisfaisants, et des autres secteurs où des améliorations seraient nécessaires? En particulier, pouvez-vous nous dire quels sont actuellement les montants respectifs du financement de base et du financement de projets?

Mme Sheila Copps: D'après ce qu'ont dit très clairement les communautés de langue minoritaire que j'ai consultées, en particulier la communauté anglophone du Québec, c'est que les besoins s'accroissent considérablement dès que l'on s'éloigne du centre-ville de Montréal. Plus on s'en éloigne et plus il devient difficile de vivre, d'aller à l'école et d'accéder aux différentes institutions. Je crois que c'est sur ce problème qu'il faut mettre l'accent.

Ce que nous espérons également—et je sais que c'est dur pour M. Plamondon de l'admettre—et qui risque à mon avis de devenir un succès considérable pour le Canada, c'est la construction d'un réseau de soutien, par exemple, pour les communautés de langue minoritaire de l'ensemble du pays, qui nous permettra de renforcer notre pays. Évidemment, son objectif n'est pas de construire un pays plus fort.

J'espère que ces ententes vont favoriser les interconnexions, et non pas nécessairement ce qu'on appelle en jargon gouvernemental le financement à effet de silo. Je sais que Mauril Bélanger a travaillé sur cette question en tant que député, mais j'espère favoriser une plus grande interconnexion entre les minorités francophones hors Québec et les minorités anglophones au Québec, qui jusqu'à maintenant, n'ont guère collaboré aux différents projets.

On a prévu 10 jours pour

[Français]

Sommet de la francophonie canadienne à Moncton, au mois d'août.

[Traduction]

Nous espérons qu'il en résultera un réseau d'entreprises artistiques dont les différentes communautés culturelles pourront profiter.

J'ai assisté au gala de l'ADISQ à Montréal et j'ai rencontré le groupe Noir Silence. J'ai demandé à ses membres s'ils avaient voyagé à l'extérieur du Québec pour faire des spectacles, car c'est un orchestre de jeunes tout à fait enthousiasmant et pour les jeunes, la musique est une chose qui dépasse un peu le monde de la politique. Ils m'ont dit qu'ils étaient allés une fois à Kirkland Lake avec tout leur matériel, mais qu'en fait, ce spectacle leur a coûté plus qu'il n'a rapporté.

Il y a donc tout un réseau artistique au Québec pour les artistes francophones, comme il existe un réseau artistique dans les autres parties du pays pour les artistes anglophones. Pourquoi ne pas essayer d'établir des ponts entre les deux? C'est ce que j'espère réaliser avec les communautés.

Le deuxième élément du message que je voudrais adresser aux communautés, c'est que nous devrons probablement leur accorder davantage de financement par enveloppe, de façon qu'elles puissent décider elles-mêmes de leurs dépenses, au lieu d'utiliser des années-personnes ici même pour décider de l'attribution de subventions de 10 000 ou 20 000 $. Ce n'est pas une bonne façon d'utiliser les rares montants disponibles, et je pense également qu'il faut encourager l'interconnexion et l'interresponsabilité.

Voici donc quelques idées auxquelles nous allons nous atteler.

La troisième réflexion porte sur l'éducation. Pour ceux d'entre vous qui ont des écoles de langue française et des écoles de langue anglaise aux niveaux supérieur et universitaire, le danger que nous risquons dans nos plans d'action avec les provinces est que celles-ci risquent de partir du principe que s'il s'agit d'une communauté linguistique minoritaire, nous devons assumer l'intégralité des responsabilités financières, alors que s'il s'agit d'aller à l'école dans la langue de la minorité, ce sont elles qui vont construire les bâtiments, etc.

• 1635

Nous prévoyons donc de négocier des plans d'action exigeant que les provinces nous donnent une idée de leurs intentions. Simultanément, et en particulier avec le réseau d'écoles francophones hors Québec, je souhaiterais beaucoup pouvoir créer des structures plus formelles qui nous permettraient d'avoir une relation fondée sur une discussion en table ronde de leurs besoins.

Dans une certaine mesure, ce qui se produit actuellement, c'est que le ministère du Patrimoine canadien devient en quelque sorte comme un mini-ministère de l'Éducation, mais 10 provinces, trois territoires et de très nombreuses requêtes, il me semble qu'il serait beaucoup plus logique pour nous de dire aux communautés linguistiques: «Parfait, créons un réseau. Nous avons un certain montant à dépenser, et c'est vous qui devriez prendre une partie des décisions quant à l'utilisation que vous voulez faire de cet argent». Je sais que dans mon coin de pays, le Collège des Grands Lacs propose la création d'un nouveau secteur collégial dans le sud de l'Ontario. Je sais que dans certains milieux on estime... C'est quelque chose qui est actuellement en discussion, et je pense que c'est important pour la collectivité. La collectivité est devenue suffisamment adulte pour faire elle-même le tri entre certains de ses problèmes et nous donner ensuite ses solutions, au lieu de simplement nous dire: «Voici notre problème, faites quelque chose.»

Je pense que les cinq années d'expérience que nous avons déjà dans le cas des Ententes Canada-communautés prouvent bien que si l'on confie aux collectivités le soin de prendre les décisions, elles y donnent suite et, de façon générale, elles le font de façon relativement efficace, rentable et économe, ce qui est votre objectif—faire une utilisation optimale du budget afin de ne pas devoir le consacrer à l'appareil bureaucratique. Je dis cela sans vouloir manquer de respect à la bureaucratie.

La sénatrice Joan Fraser: Dans un deuxième temps, votre dossier, que nous avons reçu, signale qu'une entente a été signée avec le Québec à un moment donné pendant les 10 dernières années—je ne suis pas certaine de la date—précisément dans le but d'offrir des services sociaux et des services de santé en anglais. Comme vous le savez, il s'agit là actuellement d'une question brûlante pour les milieux anglophones du Québec. Je crains de ne pas bien connaître cette entente. Pourriez-vous nous dire quel est son but, ce qu'elle a donné et, le cas échéant, quels sont les progrès en cours?

Mme Sheila Copps: En fait, cette entente a été signée pour favoriser les services offerts dans la langue minoritaire dans le cadre de l'ancien système du RAPC. Il s'agissait d'offrir un concours supplémentaire pour faciliter la prestation de services, mais cette fois-ci avec des transferts inconditionnels. L'une des choses sur lesquelles nous nous sommes penchés dans le cadre des plans d'action qui seront négociés pour le prochain plan quinquennal en matière d'éducation, c'est précisément le fait qu'il faut également un plan d'action. L'explication en est que si nous accordons un transfert forfaitaire sans aucune condition, rien ne nous garantit que cet argent sera dépensé à la fin prévue.

Peut-être Hilaire voudra-t-il dire quelques mots au sujet de l'enveloppe sociale.

M. Hilaire Lemoine: L'entente a en réalité pour but d'offrir des services supplémentaires en anglais dans le domaine de la santé au Québec. C'est là quelque chose que nous faisons en réponse aux demandes qui nous ont été présentées dans ce sens. De toute évidence, avec la formule de plan d'action, il nous sera beaucoup plus simple de mieux surveiller, si vous me permettez l'expression, l'acheminement proprement dit de ces crédits.

La coprésidente (Mme Sheila Finestone): Excusez-moi si vous voulez bien, mais je pense qu'il s'agissait de faire en sorte qu'une personne siège à chacun des 16 conseils régionaux en matière de santé et de services sociaux au Québec, et cette entente devrait être prête pour signature à la fin du mois.

M. Hilaire Lemoine: En effet, vous avez raison. C'est également une des mesures utilisées. Il se pourrait que d'autres initiatives soient également proposées, mais dans le cadre de l'entente en question, c'est effectivement ce dont il s'agit actuellement.

La sénatrice Joan Fraser: Pouvons-nous avoir la certitude que cet argent sera considéré comme un concours financier supplémentaire et qu'il ne servira pas à remplacer des crédits provinciaux qui auraient de toute manière été dépensés?

M. Hilaire Lemoine: Tout à fait.

La sénatrice Joan Fraser: Je vous remercie.

La coprésidente (Mme Sheila Finestone): Je vous remercie.

Sénateur Simard, voulez-vous poser une question? Non? Dans ce cas, c'est moi qui vais intervenir.

• 1640

Je sais que vous avez rencontré les représentants des 925 000 anglophones minoritaires qui sont éparpillés ici et là dans les régions isolées mais également concentrés à Montréal. Comme vous l'avez déjà dit, vous m'avez déjà entendue parler du problème de l'isolement du problème de ces collectivités. Il est extrêmement important qu'elles n'aient pas à consacrer tout leur temps à essayer de concocter des plans sans même avoir un financement de base. Je pense que vous en êtes parfaitement conscient, et j'en prends acte.

Je sais par ailleurs que ces collectivités se sont employées sérieusement à mettre au point un plan d'action et à définir le rôle des arts et des groupes culturels—les regroupements d'agriculteurs, les journaux communautaires—lesquels sont tout aussi importants, dans un certain sens, que les groupes communautaires.

S'agissant maintenant de la distribution de cet argent, et j'ignore si vous pourrez me répondre, mais le fait est que ces groupes ont reçu 2,2 millions de dollars depuis quatre ans et qu'ils aimeraient que ce concours passe à 5,8 millions de dollars par an. Cela vaut pour 15 ou 16 des principaux secteurs au sein desquels on trouve une multitude de groupes divers. Avez-vous pris cette demande en considération? Dans quel sens entendez-vous agir ici?

Mme Sheila Copps: Nous en avons déjà un peu bavardé vous et moi, et je pense que l'un des problèmes qui se poseront à nous lorsque nous nous emploierons à déterminer comment distribuer cet argent, c'est qu'il faut effectivement tenir compte des véritables problèmes que pose la vie en région rurale. Mais l'enveloppe dont vous parlez représente environ 30 p. 100 du total, et je dois vous dire qu'il y a d'autres collectivités, qui ont d'autres problèmes, et qui vont probablement aussi demander le même genre de choses, de telle sorte que tout cela va devoir se négocier.

La coprésidente (Mme Sheila Finestone): Nous en avons effectivement déjà parlé et je pense qu'il est important que vous affichiez votre position en ce qui concerne la connaissance du français comme outil de travail. Vous dites dans votre communiqué de presse que vous voulez participer aux travaux de recherche, aux communications ainsi qu'à la prestation des services en région, et vous avez même insisté à ce sujet.

Que va-t-il se passer dans le cas du français en tant qu'outil de travail pour les anglophones au Québec? S'ils veulent du travail, il faut qu'ils puissent travailler en français.

Mme Sheila Copps: Je vous dirais, et c'est peut-être là un bon point de départ... Lorsqu'on songe à la formation de la main-d'oeuvre entre autres dossiers, ce que nous essayons de faire au ministère du Patrimoine canadien, c'est de jeter les fondations nécessaires dans le domaine de l'éducation. Ce nouveau financement va pouvoir nous aider également à offrir des concours communautaires. J'espère donc obtenir ainsi certains réseaux.

Il me semble qu'il serait éminemment logique d'avoir par exemple une tournée de concerts dans divers centres communautaires un peu partout au pays, une tournée qui soit bien orchestrée et qui permettrait aux anglophones et aux francophones de découvrir de jeunes artistes qui se produisent dans les deux langues.

Je ne peux par contre me prononcer pour ce qui est des enveloppes de la formation de la main-d'oeuvre ni vous dire qui a accès à l'enseignement linguistique à l'extérieur du système officiel d'instruction publique, parce que même avec l'enveloppe dont nous disposons, comme la chose a déjà été dite, les problèmes restent immenses. Même avec l'augmentation annuelle de 70 millions de dollars, nous allons certes pouvoir tourner la page et relever certains des défis qui s'étaient présentés à nous, mais nous ne pouvons aller beaucoup plus loin que cela, compte tenu de l'envergure de l'enveloppe financière.

La coprésidente (Mme Sheila Finestone): Madame la ministre, je vous remercie pour ces réponses.

Je sais que votre temps est compté, mais il reste deux personnes qui souhaitent vous poser une question et je me demande si vous voudriez bien y répondre?

Inky, à vous.

M. Inky Mark: Merci madame la présidente.

Si vous me permettez une observation, c'est la première fois depuis que j'assiste aux travaux de ce comité que j'ai utilisé autant l'anglais. Peut-être le comité devrait-il pratiquer la dualité des langues afin que nous ayons un juste milieu.

C'est d'ailleurs précisément l'objet de ma question. La dualité linguistique qu'on constate sur la Colline chez les politiciens vous satisfait-elle?

Mme Sheila Copps: Je me sens extrêmement privilégiée parce que, même si j'ai commencé à apprendre une seconde langue assez tard dans ma vie—j'étais adolescente—j'ai un certain don pour les langues. Dans mon propre cabinet, j'essaie de me discipliner en faisant en sorte que tous les documents parviennent en français à mes employés francophones et en anglais à mes employés anglophones. Cela simplifie les choses. En revanche, tout le monde, n'a pas cette faculté.

• 1645

Si vous considérez la Colline comme un microcosme de ce que le pays pourrait devenir, je pense que c'est une expérience très positive du point de vue des possibilités d'apprendre une deuxième langue. Claude Drouin, le député de Beauce, est arrivé ici alors qu'il ne parlait pas un mot d'anglais, mais il a vraiment beaucoup apprécié de pouvoir acquérir cette langue. C'est la même chose pour d'autres qui sont arrivés totalement ignorants du français et qui peuvent maintenant commencer à l'apprendre. Nous sommes très privilégiés ici parce que la plupart des Canadiens n'ont pas la possibilité de suivre des cours de langue dans le cadre d'un programme du gouvernement.

Je me considère personnellement comme doublement privilégiée parce que je dois également vous avouer que, lorsque j'ai appris à parler une deuxième langue, cela m'a également permis d'acquérir une perspective différente des choses. Je me suis rendu compte à quel point mon raisonnement était limité dans l'autre langue. Cela m'a donc ouvert l'esprit à des choses que je n'avais en fait jamais comprises. Peut-être était-ce également dû à la puberté, je l'ignore. Après tout, les deux sont survenus en même temps, n'est- ce pas?

M. Inky Mark: Personnellement, je crois à l'option multilingue. Moi aussi, j'ai grandi dans deux langues et comme vous, je suis le produit de cette génération dont les professeurs de français ne parlaient pas très bien le français eux-mêmes mais qui nous avaient néanmoins appris à lire et à écrire dans cette langue.

À l'heure actuelle, quel est le pourcentage de députés fédéraux qui maîtrisent les deux langues? Quelqu'un le sait-il?

Mme Sheila Copps: Vous devriez vous mettre en rapport avec le président pour lui poser la question. Quant à moi, je l'ignore, en fait, ce n'est pas...

[Français]

en rapport direct avec ce qui se passe actuellement. On parle des jeunes.

Malheureusement, quand nous sommes sortis de l'école, nous n'avions pas ces avantages. Louis, quand j'ai voulu aller à l'Université Laval en 1972, je me suis fait dire par l'Université Western Ontario que je devais me rendre en France pour recevoir une éducation en français. C'est un fait. Je voulais aller au Québec et ils m'en ont refusé le droit. On ne peut pas comparer la situation vécue il y a 25 ans et celle d'aujourd'hui.

Quand on voit les étudiants sur la Colline... Ma fille parle mieux le français que moi; elle est capable de s'exprimer avec beaucoup de mots. Des changements ont été faits; ce n'est pas assez, mais

[Traduction]

Je pense que la situation est infiniment meilleure qu'elle l'était quand j'étais à l'école, voilà tout.

[Français]

La coprésidente (Mme Sheila Finestone): Vous avez terminé?

Mauril Bélanger.

M. Mauril Bélanger (Ottawa—Vanier, Lib.): Merci, madame la présidente.

[Traduction]

Monsieur Mark, nous connaissons aujourd'hui une situation assez intéressante, pourvu qu'on étudie la question avec toute l'objectivité possible. Cela m'est personnellement difficile étant donné que c'est quelque chose qui me touche de très près. J'avais pensé que c'était un peu le monde à l'envers, si vous me passez l'expression, et je voulais vous féliciter pour votre attitude, fort courageuse à mon sens, à la défense des langues officielles et des efforts déployés par le gouvernement canadien pour promouvoir cette dualité linguistique. De cela, je vous suis très reconnaissante.

Je suis également très heureuse, lorsque je prends la parole en français à la Chambre, les collègues de votre parti ne me chahutent pas pour que je passe à l'anglais. Je ne peux hélas pas en dire autant du deuxième parti d'opposition. Lorsque je prends la parole en anglais—après tout, mon électorat est à 60 p. 100 anglophone—ces gens-là m'interpellent en me disant que je devrais parler exclusivement français. Ce n'est pas le même genre d'ouverture d'esprit que celle dont vous faites preuve ici, et je voulais vous en remercier.

[Français]

Ce qui me frustre dans ces processus-là, madame la présidente...

M. Louis Plamondon: [Note de la rédaction: inaudible].

M. Mauril Bélanger: Est-ce moi qui ai le droit de parole ou non?

M. Louis Plamondon: [Note de la rédaction: Inaudible] ...j'ai tout à fait le droit...

M. Mauril Bélanger: Vous êtes sensible quand on parle de choses que vous n'aimez pas.

M. Louis Plamondon: [Note de la rédaction: Inaudible].

M. Mauril Bélanger: Un peu de respect, s'il vous plaît.

M. Louis Plamondon: [Note de la rédaction: Inaudible].

M. Mauril Bélanger: L'envers de la médaille de ce que je viens de mentionner, c'est que nos grands amis, nos soi-disant grands amis de la francophonie du Bloc, quand le gouvernement fait un bon coup et donne un grand coup de barre pour aider les communautés minoritaires, adoptent une attitude de pisse-vinaigre et essaient de trouver des coûts et de dire que tout va mal, que tout est noir. On semble broyer du noir pour nous. Il semble que ces gens-là seraient plus heureux si on était assimilés. alors que c'est le contraire qui se produit. On oublie de mentionner que...

[Traduction]

La coprésidente (Mme Sheila Finestone): Excusez-moi, messieurs. Salut!

[Français]

M. Mauril Bélanger: Je suis fatigué de me faire pointer du nez par des gens qui... [Note de la rédaction: Inaudible].

M. Louis Plamondon: [Note de la rédaction: Inaudible].

• 1650

[Traduction]

La coprésidente (Mme Sheila Finestone): À l'ordre, je vous prie. Excusez-moi tous les deux. J'ai déjà signalé que la ministre devait nous quitter. Dois-je encore une fois fermer vos micros? J'ai demandé à la ministre si elle voulait bien accepter de répondre à deux dernières questions, et rien de plus.

Mme Sheila Copps: J'aimerais pouvoir rester aussi longtemps qu'il le faut, mais j'ai une autre réunion.

La coprésidente (Mme Sheila Finestone): J'en suis consciente, et je crains donc que nous devions en terminer avec ce volet de la réunion. Je voudrais en profiter pour vous remercier d'avoir été aussi franche, aussi conciliante et aussi réceptive. Merci beaucoup.

Cela étant, est-il une question que vous aimeriez mettre sur papier ou préférez-vous la poser au fonctionnaire?

Monsieur Moyer, pourriez-vous répondre à la question de M. Plamondon? Oui?

Parfait, voulez-vous donc poser votre question, monsieur Plamondon?

[Français]

M. Louis Plamondon: Ma question porte sur les ententes Canada-communautés qu'on prévoit mettre en place et sur les négociations qui auront lieu. Je ne sais pas si vous serez en mesure de répondre au nom de la ministre, mais j'aimerais vous demander quelle est la position du ministère face aux personnes avec lesquelles vous négocierez. Je déposerai un document, qui intéressera sûrement madame la présidente, qu'a fait parvenir l'ACFO à chaque organisme représentant les francophones de l'Ontario. L'association enjoint les organismes de signer une entente avec elle, sans quoi ils n'auront pas le droit de toucher aux subventions. C'est en quelque sorte ce que dit le document. De nombreux groupes de l'Ontario s'opposent à devoir passer par un seul groupe pour avoir droit aux sommes qu'on prévoit verser dans le cadre des ententes. On dit même dans le document que toute information concernant les négociations est strictement confidentielle, tant à l'interne qu'à l'externe.

Tout organisme qui signe cette entente perd son droit de parole; le négociateur en chef ou son mandataire sont les seuls porte-parole autorisés. De nombreux organismes francophones de l'Ontario se plaignent de cette situation dont le ministère semble un peu se laver les mains.

La même chose semble se produire au Québec, où il y a un porte-parole qui s'appelle Alliance Québec et qui ne fait pas l'affaire entre autres des fermiers anglophones ou des anglophones de la région de Sherbrooke. Les sommes d'argent passent par une seule place, tandis que les organismes préféreraient transiger de façon directe.

Est-ce que le ministère a défini une politique à ce niveau? Je déposerai ce document auprès du comité afin que vous soyez saisis de cette proposition qu'a présentée l'ACFO et selon laquelle toute nouvelle entente devrait passer entre ses mains.

[Traduction]

La coprésidente (Mme Sheila Finestone): Ce n'est pas tout à fait cela, monsieur Plamondon. Il y a un comité de direction qui s'occupe de répartir les fonds, et je vous ferais remarquer que ce que vous venez de dire ne correspond pas exactement à la réalité—nous parlons ici d'organismes et non pas d'individus.

[Français]

M. Louis Plamondon: Madame la présidente, je tiens à déposer ce document parce qu'il contredit les propos que vous venez de tenir. Je dois avouer qu'il s'agit peut-être d'une tentative d'agir différemment. Je souhaite que le comité prenne connaissance de ce document et que le représentant de la ministre puisse nous donner son point de vue.

La coprésidente (Mme Sheila Finestone): Merci.

Monsieur Moyer.

M. Norman Moyer (sous-ministre adjoint, Identité canadienne, ministère du Patrimoine canadien): Oui, il existe une politique au ministère et nous l'avons utilisée lors de nos premières négociations. Nous faisons preuve d'une grande flexibilité dans son application. Cette politique prévoit que chaque communauté doit identifier un porte-parole qui négociera avec nous.

Comme Mme la présidente l'a souligné, nous avons travaillé avec le Quebec Community Groups Network, qui rassemble tous les groupes au Québec. Nous avons justement parlé de la façon dont nous pourrions mener nos négociations et partager les subventions versées par le gouvernement du Canada.

Nous adaptons un peu notre approche en vue de tenir compte des réalités des communautés dans chacune des provinces. En Ontario, il existe certainement des tensions au sein des groupes et nous travaillons avec eux en vue d'identifier un porte-parole qui saura jouir de la confiance de ces communautés. Nous sommes confiants que nous y arriverons. Il est normal que des tensions surgissent à certains moments. Dans de tels cas, on prend un peu plus de temps.

• 1655

[Traduction]

La coprésidente (Mme Sheila Finestone): Je vous remercie.

Savez-vous qui a été élu à l'équipe de gestion de ce groupe communautaire québécois?

M. Norman Moyer: Il s'agit de Hugh Maynard, qui est...

La coprésidente (Mme Sheila Finestone): Hugh Maynard, c'est cela. Je vous remercie. Je pense que nous devons le remercier parce qu'il a présidé une excellente réunion. Je pense qu'il y a eu, en tout état de cause, beaucoup d'unanimité et beaucoup de convivialité. J'étais là à la demande de la ministre, et tout s'est très bien passé.

Mauril, vous vouliez poser une dernière question?

M. Mauril Bélanger: Non.

La coprésidente (Mme Sheila Finestone): Quelqu'un d'autre veut-il encore poser une question au...

[Français]

fonctionnaires qui sont parmi nous? Non?

[Traduction]

Voudriez-vous dire un dernier mot en guise de conclusion, monsieur Moyer, ou encore monsieur Lemoyne?

M. Norman Moyer: Non, mais je vous remercie beaucoup de nous avoir donné la possibilité de vous parler.

La coprésidente (Mme Sheila Finestone): Merci beaucoup.

La séance est levée.