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DEDC Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité mixte spécial sur la déclaration de situation de crise


NUMÉRO 010 
l
1re SESSION 
l
44e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 14 juin 2022

[Enregistrement électronique]

  (1835)  

[Traduction]

    Bienvenue à la 10e séance du Comité mixte spécial sur la déclaration de situation de crise, créé conformément à l'ordre de la Chambre des communes du 2 mars 2022 et à celui du Sénat du 3 mars 2022.
    La séance se déroule en mode hybride, conformément à l'ordre que la Chambre a adopté le 25 novembre 2021.
    Je rappelle à ceux qui sont présents dans la salle qu'ils doivent, pour préserver la santé et la sécurité de tous, se conformer aux recommandations des autorités de la santé publique et aux directives du Bureau de régie interne.
    Si des problèmes techniques surviennent, veuillez m'en informer, car nous devrons peut-être suspendre la séance pendant quelques minutes pour nous assurer que tous les membres sont en mesure de participer pleinement.
    Les témoins doivent aussi savoir que des services d'interprétation sont offerts. Il suffit de cliquer sur l'icône représentant un globe, au bas de leur écran.
    Nous accueillons aujourd'hui, de 18 h 30 à 20 heures, l'honorable Chrystia Freeland, ministre des Finances.
     Bienvenue à vous.
    La ministre est accompagnée de fonctionnaires: Isabelle Jacques, sous-ministre adjointe, Direction de la politique du secteur financier; Jenifer Aitken, sous-ministre adjointe par intérim, Direction juridique; Sarah Paquet, directrice et présidente-directrice générale, Centre d'analyse des opérations et déclarations financières du Canada, le CANAFE.
    Madame la ministre, nous vous souhaitons la bienvenue. Vous avez cinq minutes pour faire votre déclaration liminaire.
    La parole est à vous. Je vous en prie.
    Merci beaucoup à vous tous, madame la présidente et mesdames et messieurs les députés et sénateurs.
    Le travail du Comité est très important et j'espère que ma comparution sera utile.
    Je suis accompagnée aujourd'hui de représentantes du ministère des Finances, Isabelle Jacques, sous-ministre adjointe, Jenifer Aitken, sous-ministre adjointe, Direction juridique, et Sarah Paquet, présidente-directrice générale du Centre d'analyse des opérations et déclarations financières du Canada.
    Mes collègues ministres ont expliqué comment la Loi sur les mesures d'urgence a été invoquée et appliquée. Je suis là pour parler des coûts économiques de l'occupation et des barrages, et des mesures prises en vertu du Décret sur les mesures économiques d'urgence.
    Il y a à peine trois mois ont été levés les barrages aux principaux postes frontaliers et l'occupation de la capitale nationale, qui causaient beaucoup de tort à l'économie canadienne et à notre réputation de partenaire commercial fiable.
     Des échanges commerciaux se chiffrant en dizaines de millions de dollars par jour ont été perturbés par les barrages aux postes frontaliers. Selon Statistique Canada, à Coutts, en Alberta, le volume des échanges quotidiens touchés a représenté environ 48 millions de dollars par jour. À Emerson, au Manitoba, le montant a atteint environ 73 millions de dollars par jour.
     Le barrage du pont Ambassador a entravé des échanges d'environ 390 millions de dollars par jour. Trente pour cent des échanges canado-américains acheminés par la route transitent par ce pont.
    La confiance du monde envers le Canada comme destination des investissements a été minée. Nous nous sommes battus farouchement pour protéger la relation commerciale privilégiée du Canada avec les États-Unis pendant les négociations de l'ALENA et face aux droits illégaux et injustifiés imposés en vertu de l'article 232. Nous ne pouvions pas tolérer que cette réussite acquise de haute lutte soit compromise, et nous ne pouvions pas permettre que le gagne-pain des travailleurs canadiens continue d'être menacé, alors que nous travaillions tous si fort pour relancer l'activité après avoir subi les conséquences économiques de la COVID‑19.

[Français]

    Ainsi, le lundi 14 février, plus de deux semaines après le début de l'occupation et des blocages, le gouvernement du Canada a invoqué, en dernier recours, la Loi sur les mesures d'urgence pour rétablir l'ordre public.
    Dans le cadre de cette mesure nécessaire, le Décret sur les mesures économiques d'urgence est entré en vigueur le 15 février et a mis en place plusieurs mesures financières temporaires.
    En raison de la fin des blocages, le 23 février, le gouvernement a révoqué la déclaration d'état d'urgence en vertu de la Loi sur les mesures d'urgence ainsi que de toutes les mesures temporaires prévues dans le Règlement sur les mesures d'urgence et le Décret sur les mesures économiques d'urgence.
    Madame la présidente, j'aimerais expliquer les mesures temporaires prévues dans le Décret et montrer pourquoi l'application des mesures était nécessaire et efficace.
    Le Décret contient des mesures visant à limiter le financement des activités illégales qui ont mené à l'état d'urgence, c'est-à-dire le financement provenant de diverses organisations et de particuliers.

[Traduction]

     Ces mesures ont obligé les fournisseurs de services financiers canadiens — et non le gouvernement du Canada — à bloquer ou à suspendre le compte de particuliers ou d'entreprises participant aux barrages, et à refuser de fournir des services ou de faciliter toute opération liée au financement de l'occupation et des barrages illégaux, sans pour cela que des ordonnances judiciaires soient nécessaires. Concrètement, ils l'ont fait soit en se fondant sur les renseignements reçus des organismes d'application de la loi, renseignements dont la communication était autorisée par le Décret sur les mesures économiques d'urgence, soit en se fiant aux renseignements recueillis au moyen de leurs propres processus internes.
    Je tiens à souligner un point crucial à ce propos: les fournisseurs de services financiers ont pris ces décisions de façon indépendante. Il n'y a pas eu de directives politiques.
    Le 21 février, au cours de la période où le Décret était en vigueur, les mesures d'exécution prises en vertu du Décret sur les mesures économiques d'urgence ont abouti au blocage d'environ 280 produits financiers, comme des comptes d'épargne et des comptes-chèques, des cartes de crédit et des lignes de crédit, pour un total d'environ 8 millions de dollars, dont 3,8 millions de dollars d'une entreprise de traitement des paiements. De plus, 170 adresses Bitcoin ont été repérées et communiquées aux échangeurs de devises virtuelles.
    Les organismes d'application de la loi étaient autorisés à communiquer des renseignements aux fournisseurs de services financiers canadiens, ce qui comprenait l'identité des particuliers et des entités soupçonnés de participer à des barrages illégaux. Si les organismes d'application de la loi étaient convaincus des faits, cette communication allait aider les fournisseurs de services financiers à appliquer le Décret.
    Pour leur part, les fournisseurs de services financiers canadiens ont reçu la directive d'examiner leurs relations avec toute personne impliquée dans les barrages de façon constante et de signaler l'existence d'avoirs et d'opérations liés aux barrages à la GRC ou au SCRS.
    Madame la présidente, comme le gouvernement l'a dit à ce moment‑là, et comme les faits l'ont montré, ces mesures étaient temporaires.

  (1840)  

     Madame la ministre, votre temps de parole est écoulé.
    Nous pouvons maintenant passer aux questions.
    D'accord.
    Au premier tour, chacun aura cinq minutes. M. Motz d'abord.
    Merci, madame la présidente.
    Merci d'être là, madame la ministre.
    Comme vous êtes la plus haut placée à comparaître devant le Comité jusqu'à maintenant, pouvez-vous dire si le gouvernement lèvera le secret sur les délibérations du Cabinet à l'égard des documents dont le Comité a demandé la production?
    Merci de la question, monsieur Motz.
    Le gouvernement a reçu la motion et la fonction publique y travaille avec diligence. Tous ceux qui sont ici présents savent qu'il est important de préserver la confidentialité des délibérations du Cabinet.
    Merci.
    En somme, nous n'obtiendrons probablement rien.
    Madame Freeland, les hauts fonctionnaires de votre ministère qui vous accompagnent aujourd'hui ont comparu devant le Comité ce printemps. Pourtant, aucun des témoins que vous avez proposés ne pouvait parler des répercussions économiques de la manifestation de février au sujet desquelles nous les avons interrogés. C'est commode pour vous, étant donné que vous avez accordé beaucoup d'importance non seulement au recours à la Loi, mais aussi aux justifications économiques que vous avancez aujourd'hui pour prétendre qu'il fallait déclarer une urgence nationale.
    Mettrez-vous à la disposition du Comité des témoins experts qui pourront étayer les justifications économiques que vous avancez?
    Je peux vous citer tout de suite deux experts, si vous le voulez.
    Je ne veux pas de citations. Je voudrais avoir le nom de représentants de votre ministère qui peuvent comparaître devant le Comité.
    Flavio Volpe, président de l'Association canadienne des fabricants de pièces d'automobile, est un expert qu'il vaut la peine d'écouter. Il a été abondamment cité dans la presse.
    Je suis désolé, la question portait sur les témoins de votre propre ministère. Qui, à votre ministère, peut répondre à des questions précises sur l'impact économique? Nous avons posé la question la dernière fois et nous n'avons pas pu obtenir de réponse. Pouvez-vous donner ces noms?
    Un simple oui ou non serait bien. Si vous pouviez nous fournir les noms de ces témoins, ce serait formidable, s'il vous plaît.
    En tant qu'ancienne journaliste, monsieur Motz, je crois toujours qu'il faut aller à la source principale.
    Je vous exhorte à consulter une autre source, la représentante du Michigan, Elissa Slotkin, qui a eu pendant les blocages des observations très inquiétantes au sujet des répercussions sur les relations commerciales entre les États-Unis et le Canada.
    Là non plus, cela n'a pas nécessairement rapport avec ma question ou la réponse à ma question concernant les témoins experts de votre ministère.
    Ma question porte sur votre ministère. Quelqu'un, au gouvernement, a‑t‑il demandé à des fonctionnaires de créer un narratif de nature économique pour justifier sa décision d'invoquer la Loi sur les mesures d'urgence?
    Le gouvernement a‑t‑il été informé par des fonctionnaires, à un moment donné, que les données économiques n'existaient pas, qu'elles ne correspondaient pas aux réponses que vous attendiez ou qu'elles ne donnaient pas les résultats que vous préfériez entendre? Dans l'affirmative, le gouvernement a‑t‑il demandé à ces fonctionnaires de produire des chiffres pour étayer ses thèses, indépendamment des problèmes de données?
     Monsieur Motz, je suis la ministre des Finances du Canada. J'ai été notre négociateur en chef pendant les négociations de l'ALENA, ou j'ai dirigé les négociations, avec l'aide très compétente de Steve Verheul. J'ai eu moi-même de nombreux échanges et j'ai lu de nombreux rapports qui m'ont beaucoup inquiétée au sujet des conséquences économiques des barrages routiers illégaux et de l'occupation illégale. J'ai parlé directement à des dirigeants d'entreprise canadiens, qui m'ont dit qu'ils entendaient des investisseurs dire que leur confiance envers le Canada, en tant que destination d'investissements, était ébranlée.
    J'ai discuté directement avec de nombreux dirigeants politiques américains et j'ai lu leurs propos attestant que les barrages...
    Je suis désolé, madame la ministre, mais...
    ... encourageaient le protectionnisme à l'encontre du Canada.
    ... ma question portait sur votre propre ministère. Vous n'êtes peut-être pas au courant, mais je ne pose pas cette question sans raison.
    Pour votre gouverne, je rappelle que, dans votre exposé, vous avez avancé que... Vous avez dit que le commerce avait été « perturbé ». Mais Statistique Canada a signalé que le commerce transfrontalier en Ontario et en Alberta au moment des blocages avait en fait été en hausse de 16 % par rapport à l'an dernier. Bien qu'ils aient perturbé les échanges, qu'ils aient été inacceptables ou illégaux, il semble que les barrages aux frontières n'aient pas eu les répercussions économiques que vous alléguez, et qu'ils ne justifiaient certainement pas le recours à la Loi sur les mesures d'urgence comme vous le prétendez.
    J'ai une autre question. Vous avez dit que vous avez bloqué environ 280 comptes — environ 8 millions de dollars, selon vous. Qu'est‑ce qui a poussé le gouvernement à continuer de bloquer ces comptes bancaires après que les barrages ont été levés et que les camions ont quitté Wellington?

  (1845)  

    Je dois revenir à votre affirmation précédente au sujet des conséquences économiques, monsieur Motz. J'étais très préoccupée par le tort causé à nos relations commerciales avec les États-Unis et à notre réputation de partenaire fiable.
    Je dois citer la représentante Slotkin, qui a dit: « Ce qui est on ne peut plus clair, c'est que nous devons rapatrier le secteur manufacturier américain dans des États comme le Michigan. »
    Vous contestez donc les données de Statistique Canada?
    La représentante Slotkin a déclaré que « nous devons poursuivre le travail... »
     Monsieur Motz, excusez-moi, mais vos cinq minutes sont écoulées.
    Merci.
    Pardonnez l'interruption, madame la ministre.
    Nous allons passer à Mme Bendayan.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Madame la ministre, merci d'être là. Je crois que vous étiez au beau milieu d'une phrase et que vous citiez quelqu'un. Pourriez-vous terminer et nous fournir la citation complète pour que nous sachions à quoi nous en tenir?
    Je comprends que bon nombre d'entre nous sont élus et avons un travail partisan à faire, mais je tiens vraiment à m'exprimer très sincèrement en tant que ministre des Finances du Canada, moi qui me suis battue si fort, appuyée vraiment par l'ensemble de notre pays, pour maintenir cette relation commerciale essentielle avec les États-Unis. Il était clair pour moi qu'à chaque heure qui passait, notre réputation auprès des États-Unis comme partenaire commercial fiable et comme destination d'investissement sûre était malmenée.
    Je vais citer Elissa Slotkin, membre du Congrès du Michigan. Voici ce qu'elle avait à dire:
Peu importe qu'il s'agisse d'un adversaire ou d'un allié, nous ne pouvons pas compter sur la livraison de pièces provenant de pays étrangers.
Il est on ne peut plus clair que nous devons rapatrier le secteur manufacturier américain dans des États comme le Michigan. Sinon, ce sont les travailleurs américains [...] qui écoperont.
     Elle s'est engagée ensuite:
à poursuivre le travail que les habitants du Michigan réclament depuis 30 ans, c'est‑à‑dire à ramener la fabrication des biens essentiels aux États-Unis afin que notre sécurité économique ne dépende plus des autres.
    Il y a là un grave danger pour le Canada, chers collègues. Je redoutais très fort que ces barrages illégaux et cette occupation illégale ne fassent naître une toute nouvelle vague de protectionnisme et n'érodent profondément nos relations commerciales avec les États-Unis. C'était une véritable menace économique.
    Pour revenir à ce que disait M. Motz, le préjudice à la réputation ne se fait pas nécessairement sentir immédiatement. On peut en ressentir les effets des années plus tard. Je citerai tout à l'heure Flavio Volpe, qui a déclaré, à ce moment‑là, que les investisseurs ne choisiraient pas de placer leur argent au Canada, se disant, tout à fait raisonnablement, que rien ne garantit que les pièces fabriquées au Canada pourront être acheminées librement et facilement aux États-Unis.
    J'ai également parlé directement avec des représentants du gouvernement américain. Ils étaient extrêmement inquiets. Je ne l'étais pas moins. Les mesures que nous avons prises étaient conséquentes. Les membres du Comité ont raison de les examiner attentivement. Mais je tiens aussi à rappeler à tout le monde que le préjudice économique — dans l'immédiat et dans les semaines, les mois et les années à venir — était grave, et qu'il s'aggravait de jour en jour.

  (1850)  

     Merci, madame la ministre.
    Moi aussi, j'étais extrêmement inquiète à ce moment‑là. Lorsque la Loi sur les mesures d'urgence a été invoquée, si j'ai bien compris — d'après ce qui s'est passé alors et les témoignages entendus au Comité —, le blocage de la frontière à Coutts, en Alberta, était en cours et la frontière n'allait rouvrir que le 15 février. Le blocage à Emerson, au Manitoba, était également en cours et la frontière n'allait rouvrir que deux jours après la mise en vigueur de la Loi sur les mesures d'urgence. À Surrey, en Colombie-Britannique, c'était la même chose. La frontière n'allait rouvrir que quelques jours plus tard. Il y avait une menace constante que d'autres barrages soient dressés à la frontière de Windsor, ce qui, comme vous l'avez dit, madame la ministre, a touché des échanges commerciaux d'environ 400 millions de dollars par jour.
    Que pensez-vous de l'importance économique de ces incidents non seulement pour notre pays, mais aussi pour les travailleurs? J'ai lu une citation de Dave Cassidy, président de la section locale 444 des Travailleurs unis de l'automobile, qui représente les travailleurs de l'usine de Windsor. Il a dit:
    L'ensemble de notre économie […] dépend de l'ouverture du pont.
Si les lignes de production ne fonctionnent pas et si les travailleurs sont renvoyés chez eux, ces familles de travailleurs deviendront malheureusement des dommages collatéraux de la manifestation qui se déroule au pont.
    Madame la ministre, à quel point est‑il important d'appuyer les travailleurs canadiens en ce moment?
     Madame la ministre, je vous signale qu'il vous reste 10 secondes.
    Oui. C'est très important.
    Monsieur Fortin, vous avez cinq minutes.

[Français]

    Je vous remercie, madame la présidente.
    Madame la ministre, je vous souhaite la bienvenue au Comité.
    Je suis content d'apprendre que vous travaillez déjà à la production des documents que nous avons demandés. Je comprends ce qu'est le secret ministériel. J'imagine que vous comprenez également l'importance des travaux que nous menons et le fait que nous sommes assermentés et que nous pouvons recevoir des documents confidentiels et de l'information confidentielle.
    Nous ne pourrons pas réaliser notre mandat si nous n'avons pas toute l'information et tous les documents nécessaires pour le faire. J'ose espérer que, de votre côté, vous êtes également consciente de cela. Je vous accorde la bonne foi nécessaire pour faire ce qu'il faut pour que nous ayons cette information et ces documents.
    Cela étant dit, j'aimerais clarifier un point.
    Avez-vous participé aux discussions du Cabinet avant que la Loi sur les mesures d'urgence soit proclamée?
    Nous avons eu des discussions avec les membres du Groupe d'intervention en cas d'incident. Le Groupe réunit des ministres clés.
    Avez-vous discuté de la question de savoir s'il y avait lieu d'invoquer la Loi sur les mesures d'urgence?
    Nous avons parlé de la situation. De mon côté, j'ai parlé des importantes conséquences sur le plan économique. Nous avons aussi discuté de la manière dont nous pouvions mettre fin aux blocages et à l'occupation ainsi que de la question des coûts.
    À quel moment, ces discussions ont-elles débuté ou ont-elles eu lieu?
    Les réunions de ce comité sont publiques. Un avis a été publié pour chaque réunion de ce comité.
    Est-ce à ce comité que la décision a été prise de proclamer la Loi sur les mesures d'urgence?
    L'information était déjà publique et, comme il s'agissait d'une importante décision, celle-ci a été prise lors d'une réunion de tout le Cabinet.
    Vous avez dit que les barrages en question et l'occupation de la rue Wellington, entre autres choses, causaient des torts importants à l'économie canadienne.
    Pouvez-vous m'expliquer en quoi le barrage sur la rue Wellington a nui à l'économie canadienne?
    C'est une bonne question.
    Les conséquences étaient de deux ordres. Premièrement, il y a eu une incidence importante sur l'économie d'Ottawa et sur l'économie de la région de l'Outaouais. Je suis certaine que cela vous importe, puisque vous êtes un député du Québec.
    Selon un article de Radio‑Canada, dans lequel on citait...
    Je suis désolé de vous interrompre, madame la ministre. Je ne veux pas être impoli, mais vous savez que nous n'avons vraiment pas beaucoup de temps. Je ne veux pas que vous me parliez de l'article. J'ai peut-être mal formulé ma question.
    À votre avis, en tant que ministre, qu'est-ce qui fait que les manifestations sur la rue Wellington ont eu une incidence sur l'économie canadienne?
    Quel est le lien entre les deux situations?
    Personnellement, je ne le vois pas.
    C'est peut-être ma faute. Mon français n'est pas très bon, mais je vais essayer d'expliquer cela.

  (1855)  

    Vous pouvez utiliser le service d'interprétation.
    Non, c'est important pour moi de vous répondre en français. Vous devriez être d'accord avec moi là-dessus.
    Sauf votre respect, il est surtout important de répondre aux questions, madame la ministre.
    Les blocages et l'occupation ont eu une incidence quant à deux aspects. Premièrement, cela a compromis l'économie de la grande région d'Ottawa.
    Deuxièmement, cela a nui à la réputation du Canada. Le Canada est habituellement considéré comme un État stable sur le plan politique, ce qui est très important pour les investisseurs.
    Je comprends.
    Vous nous avez dit tantôt que la Loi avait été invoquée en dernier recours, parce que cela était nécessaire. Ma question est la suivante. Qu'avez-vous tenté avant d'y avoir recours?
    Quand on parle de dernier recours, c'est habituellement parce que l'on a essayé autre chose, et que cela n'a pas fonctionné.
    Qu'avez-vous alors tenté pour mettre fin aux manifestations sur la rue Wellington ou pour empêcher qu'elles aient lieu?
    Vous avez déjà parlé avec d'autres collègues et d'autres fonctionnaires au sujet du travail qui a été fait sur le terrain ainsi qu'avec des gens responsables de l'application de la loi en matière de sécurité publique. Cependant, je veux souligner, en tant que ministre des Finances, que chaque heure et chaque jour où il y a eu de l'occupation et des blocages ont été néfastes pour l'économie.
    Il ne me reste que quelques secondes. Qu'avez-vous tenté de faire avant d'invoquer la Loi sur les mesures d'urgence?
    Je me souviens aussi, monsieur Fortin...

[Traduction]

     Excusez-moi, monsieur Fortin, mais votre temps de parole est écoulé.
    Nous passons maintenant à M. Green.
    D'entrée de jeu, je vous souhaite la bienvenue, madame la vice-première ministre. Vous êtes ici en votre qualité de vice-première ministre et de ministre des Finances.
    Je dois dire que je suis très préoccupé par la nature de vos réponses. Je suis le quatrième intervenant, mais je ne suis pas sûr que vous ayez apporté des faits nouveaux. Vous citez des articles. Vous citez des gens. Vous parlez de sources premières.
    Je vous dirais que nous avons besoin de vous en tant que source principale d'information, vous qui avez appuyé cette mesure. J'ai besoin de savoir si le gouvernement avait, au ministère — dans votre ministère — des faits qui montraient que les répercussions économiques de l'occupation étaient suffisamment importantes pour atteindre le seuil de « menaces envers la sécurité du Canada » défini à l'article 2 de la Loi sur le SCRS. Je ne parle pas de vagues impressions. Je ne parle pas de réputation et de l'image défavorable qu'on pourrait avoir du Canada à l'étranger. Je parle de faits quantifiables que votre ministère aurait présentés pour montrer que le recours à la Loi était inévitable.
    Voici la question que je vous pose directement: quelles ont été les répercussions économiques de l'occupation? Ont-elles été suffisamment importantes pour qu'on atteigne le seuil d'une menace envers la sécurité du Canada, aux termes de l'article 2 de la Loi sur le SCRS?
    Permettez-moi d'être très claire, avec tout le respect que je vous dois...
    Soit dit en passant, ces deux précautions oratoires n'empêchent pas de répondre à ce qui précède.
    Je me ferai un plaisir de répondre à votre question si je ne suis pas interrompue. Je dois recommencer.
    Sincèrement, avec tout le respect que je vous dois, je conteste l'affirmation selon laquelle, en matière d'économie, la réputation n'a pas d'importance. En fait, la réputation du Canada comme partenaire commercial fiable, comme destination fiable pour les investissements, comme pays où règnent la paix, l'ordre et le bon gouvernement, et comme pays doté d'institutions politiques stables et efficaces... Ce sont là certaines des choses les plus précieuses que nous ayons, en tant qu'économie, et elles sont le fondement de notre prospérité.
     Je dirais...
    Ce n'est pas la question que je vous ai posée.
    Voici ce que je vous ai demandé: de quelles répercussions économiques de l'occupation votre ministère a‑t‑il pu faire état? Quel avis juridique a‑t‑on fourni qui confirme que le seuil défini à l'article 2 de la Loi sur le SCRS était atteint?
    Inutile de pontifier. Je veux parler de faits concrets.
    Je ne crois pas pontifier.
    Encore une fois, je serai très claire. Les répercussions économiques étaient tout à fait évidentes.

  (1900)  

     De quoi s'agissait‑il au juste?
    L'impact économique sur la région d'Ottawa était clair, l'impact économique sur le commerce réel qui était bloqué, l'impact économique qui allait continuer et le tort causé à notre réputation de partenaire commercial fiable...
    Pouvez-vous donner des chiffres?
    J'ai eu de nombreux entretiens avec des chefs d'entreprise canadiens.
    Cela ne suffit pas.
    Madame la présidente, il y a deux choses qui se passent en ce moment.
    Premièrement, à cause de l'audio et de l'effet Larsen, j'ai beaucoup de mal à participer. Quelqu'un a peut-être un micro ouvert.
    Vous semblez utiliser deux appareils.
    Non. J'ai mon casque d'écoute.
    Deuxièmement, il est exaspérant d'avoir si peu de temps et des réponses aussi évasives.
    Ce que le Comité cherche à connaître, ce sont les données précises, les faits.
    Monsieur Green, voulez-vous que nous suspendions la séance pour vérifier la qualité de la connexion audio? Nous arrêterons le chronomètre.
    S'il vous plaît.
    Qu'en est‑il maintenant? Y a‑t‑il un écho? Il a cessé.
    Tout va bien de ce côté‑ci. Il semble que la difficulté se pose de votre côté.
    Je vais revenir à la question la plus élémentaire: la ministre des Finances peut-elle nous fournir un document produit par son ministère, quelque chose qui ne soit pas un renvoi aux propos d'un gouverneur américain ou à l'avis de quelque entité externe, un document qui quantifie les répercussions pour qu'on voie si le seuil prévu à l'article 2 est atteint, des données qui ne concernent pas uniquement la réputation? Je parle de répercussions économiques réelles qui sont quantifiables et dont son ministère, je l'espère, aurait fait état dans un rapport ou une séance d'information. Si ces documents existent, la ministre aura‑t‑elle l'obligeance de les communiquer au Comité aujourd'hui même?
    La problème se pose lorsque vous parlez tous les deux en même temps.
    À vous, madame la ministre.
    Je rejette complètement la prémisse de la question. L'atteinte à la réputation, lorsqu'il s'agit d'une économie, d'une relation commerciale ou de la réputation du Canada...
    La ministre ne fait que répéter la même réponse.
    Au bout du compte, le travail du Comité consiste à aller au fond de la question. Vous pouvez rejeter la prémisse de la question. Il vous suffirait de dire que votre ministère n'a pas produit de renseignements internes. Il serait utile au Comité de le savoir. Pour l'instant, ce sont les mêmes réponses qui reviennent en boucle.
     Je vais passer à autre chose.
    Vous avez dit le 17 février que vous aviez parlé directement aux dirigeants des grandes banques et à la directrice du CANAFE. Quelle a été la nature de ces conversations? Les banques et le CANAFE ont-ils exprimé leur appui ou leur opposition à l'une ou l'autre des mesures temporaires du décret?
    Monsieur Green, votre temps de parole est écoulé.
    Monsieur Fortin, puis‑je vous demander d'occuper le fauteuil?

[Français]

     Vous avez la parole, madame Boniface.

[Traduction]

    Madame la ministre, je m'intéresse plus précisément à l'occupation d'Ottawa et à l'effet des mesures économiques. Comme vous le savez, la question du lien entre l'occupation d'Ottawa en particulier et les mesures économiques a été soulevée continuellement. Compte tenu des autres outils fournis par le Règlement sur les mesures d'urgence, pourquoi a‑t‑on eu besoin des mesures économiques pour mettre un terme à l'occupation? J'essaie de comprendre la réflexion qui a fait qu'on en arrive là.
     Si je comprends bien dans quel esprit votre question est posée, je commencerai peut-être par parler un peu des torts causés à l'économie d'Ottawa.
    Je signale tout d'abord que la Ville d'Ottawa a publié la semaine dernière un rapport détaillant le coût des barrages illégaux à la Ville d'Ottawa elle-même. Elle a établi le coût à 37 millions de dollars. Larry Andrade, associé chez Deloitte, a calculé que les dommages subis par les entreprises et les employés de la région d'Ottawa pendant la période d'occupation se situaient entre 150 et 207 millions de dollars. Le Conseil canadien du commerce de détail a estimé qu'il y avait des pertes de 3 millions de dollars par jour en ventes.
    Quant à la deuxième partie de votre question, qui porte sur notre réflexion, je tiens à assurer les membres du Comité que je suis très consciente du fait que le recours à la Loi sur les mesures d'urgence est une intervention grave. Je sais très bien que c'était une grosse décision. En tant que ministre des Finances, je tiens à vous dire, à vous et aux Canadiens, que la gravité de cette décision a été soupesée, dans ma propre réflexion et dans les discussions à l'intérieur de mon ministère, au regard de la gravité des dommages économiques qui étaient causés. Les dommages économiques se multipliaient. Chaque jour, des dommages précis étaient causés, mais chaque jour, la réputation du Canada en souffrait davantage. C'était un coup dur pour tous les Canadiens qui essaient d'intéresser des investisseurs à notre pays. C'était un coup dur pour tous les Canadiens qui essaient de devenir des fournisseurs d'un partenaire américain. Des chefs d'entreprise canadiens qui ont communiqué avec moi m'ont fait part de leurs vives inquiétudes. J'ai entendu le point de vue de membres du Comité qui m'ont interpellée pendant la période des questions et qui, à l'époque, étaient très inquiets. Bien sûr, je n'étais pas la seule, au ministère des Finances, à travailler sur ce dossier. Mes collaborateurs et mes collègues politiques ont tous entendu exactement la même chose.

  (1905)  

    Très rapidement, l'une des questions qui ont été soulevées, en tout cas au Comité, au sujet des mesures économiques concernait la communication, la compréhension que pouvaient avoir de ces mesures des Canadiens qui avaient peut-être fait un don au départ, estimant la cause légitime. Ils se sont certainement demandé avec inquiétude ce que ces mesures signifiaient pour eux.
    Avez-vous examiné la façon dont les mesures ont été annoncées? A‑t‑on tiré des leçons de cette démarche?
    Excellente question. Elle est très importante. Comme il est tellement important de communiquer clairement, je profite de l'occasion pour insister là‑dessus. Voici un extrait de la déclaration que la GRC a publiée le 21 février:
À aucun moment nous n'avons fourni une liste de donateurs aux institutions financières.
    Il est important que les Canadiens le comprennent, car vous avez tout à fait raison, madame la sénatrice, de signaler que quelqu'un aurait très bien pu faire un don parfaitement légal à une cause légale. Je tiens à leur assurer que la GRC n'a jamais donné leur nom à des institutions financières.
    Je tiens également à souligner que, le 9 juin, la Banque du Canada a publié son examen annuel du système financier, et elle a constaté que le degré de confiance à l'égard des institutions et du système financiers du Canada n'a jamais été aussi élevé. Je ne conteste d'aucune façon...

[Français]

     Le temps de parole est écoulé, madame la sénatrice.

[Traduction]

    Nous passons maintenant au sénateur Carignan pour cinq minutes.

[Français]

    Je vous remercie, madame la présidente.
    Madame la ministre, vous avez bien dit que le Conseil des ministres avait pris la décision de déclarer l'état d'urgence.
    N'est-ce pas?
    Oui, c'est cela.
    À quelle date cette décision a-t-elle été prise?
    Je vais vérifier cette information, car je veux vous donner une réponse précise.
    Cette décision a-t-elle été prise lors de la réunion du 13 février?
    Oui, c'est exact.
    À quelle heure la réunion a-t-elle eu lieu?
    La réunion a eu lieu à 20 h 30.
    Vous savez que, à 20 h 30, le pont Ambassador était complètement rouvert.
    N'est-ce pas?
    Oui, je le sais.
    Comment avez-vous réagi au fait que vous déclariez l'état d'urgence alors que le pont était débloqué?
    Vous saviez que le pont était débloqué et que la circulation avait repris à ce moment-là. Il est donc possible de rouvrir un pont autrement qu'en déclarant l'état d'urgence.
    N'est-ce pas?
    À ce moment-là, nous avons reçu des renseignements selon lesquels des gens menaient des efforts continus en vue de bloquer d'autres routes reliant les États‑Unis et le Canada. Il y avait des efforts constants pour poursuivre le blocage de routes; c'est un fait important.
    De plus, comme vous le savez très bien, l'occupation illégale d'Ottawa, notre capitale nationale, était en cours lorsque nous avons pris la décision.
    Au moment où vous avez pris la décision, soit le 13 février, en soirée, vous saviez que le pont Ambassador avait été débloqué. Vous saviez que les autorités avaient été capables de débloquer le pont avec les outils dont elles disposaient à ce moment-là.

  (1910)  

    À mon avis, ce qui est important, c'est que, à ce moment-là, il y avait un risque constant de voir de nouveaux blocages se mettre en place. Je me souviens qu'il y a eu un blocage après l'autre, et il y avait vraiment un risque de blocages continuels à la frontière. Je veux souligner aussi que l'occupation de notre capitale nationale était sérieuse.
    Je crois comprendre que, dans le cadre des échanges que vous avez eus avec le gouvernement américain, les États‑Unis ont offert de vous envoyer des dépanneuses.
    Pourriez-vous nous confirmer qu'ils vous ont offert d'envoyer des dépanneuses pour remorquer les véhicules?
    Lorsque j'ai parlé directement avec les représentants du gouvernement des États‑Unis, le message central était lié au niveau d'inquiétude, lequel était très élevé.
    Les États‑Unis vous ont-ils offert des dépanneuses et avez-vous accepté leur offre?
    La discussion que j'ai eue avec eux concernait le commerce entre le Canada et les États‑Unis. Cela était important pour les fonctionnaires à qui j'ai parlé.
    Ne vous a-t-on pas offert de dépanneuses?
    J'ai discuté de la possibilité que les États‑Unis nous apportent une aide. Cependant, je ne peux pas vous dire à quel point il était important pour les Américains à qui j'ai parlé…
    Je comprends.
    Cela représentait pour eux un grave danger, et il était important pour eux de communiquer avec moi…
    Nous sommes tous d'accord sur cela, madame Freeland. C'est important.
    D'ailleurs, cela a été réglé avant la déclaration de l'état d'urgence, et c'est la beauté de la chose.
    Toutefois, ma question porte sur les dépanneuses.
    Un ministre nous a dit qu'il y avait eu des échanges et que le gouvernement des États-Unis nous avait offert des dépanneuses.
    J'aimerais savoir si c'est vous qui avez pris part à cette discussion.
    J'ai déjà répondu à cette question.
    Les discussions que j'ai eues portaient sur les répercussions économiques, et j'ai proposé aux Américains de nous aider.
    D'accord.
    Les discussions que j'ai eues portaient sur l'économie.
    Je vais tenter de poser une autre question qui vous a déjà été posée.
    En tant que ministre des Finances, vous connaissez les chiffres.
    Pouvez-vous chiffrer les répercussions économiques des mesures qui ont été prises, des blocages et des effets néfastes qu'ils ont occasionnés autrement qu'en citant un rapport de la Ville d'Ottawa trois mois plus tard?
    Au moment où vous avez pris la décision, aviez-vous un chiffre en tête pour appuyer cette prise de décision? J'aimerais avoir un chiffre.
    On vous a posé la question en anglais, mais je vous la pose en français.
    J'ai beaucoup de chiffres en tête. Il était évident qu'il y avait des effets néfastes chaque jour. Cependant, j'aimerais souligner deux autres choses.

[Traduction]

     Madame la ministre, désolée de vous interrompre.
    Sénateur Carignan, votre temps de parole est écoulé.
    Nous allons passer au sénateur Harder.
    Merci, madame la présidente.
    Merci, madame la ministre, d'être là. Il est utile que vous comparaissiez en personne. Je vous en remercie.
    Comme vous le savez, je suis un sénateur de l'Ontario et j'habite à Ottawa. Ma question ne vous étonnera donc pas: pourquoi vous a‑t‑il fallu tant de temps pour en arriver à la conclusion que cette mesure s'imposait, compte tenu des répercussions à la frontière, de l'impact sur la réputation du Canada et de l'impact très réel sur les affaires à Ottawa?
    Sénateur Harder, voilà une excellente question.
    Le contexte du Comité est plus ou moins propice aux affrontements, mais j'oserai être très franche. Ce fut une période angoissante pour de nombreux Canadiens, et pour tous les membres du gouvernement, parce que nous devions concilier des impératifs importants.
    Nous n'avons pas invoqué la Loi sur les mesures d'urgence à la légère. C'est pourquoi il a fallu du temps. Nous aurions bien préféré que ce ne soit pas nécessaire. Tous les Canadiens doivent préférer un gouvernement qui préfère ne pas avoir à invoquer la Loi sur les mesures d'urgence.
    Permettez-moi alors une question complémentaire.
    Vous et le gouvernement en êtes-vous venus à la conclusion que les interventions policières du moment ne suffisaient pas à régler les problèmes d'occupation à la frontière et à Ottawa même?

  (1915)  

    Il y a dans ce groupe‑ci des sénateurs qui s'y connaissent mieux que moi en matière policière.
    En tant que ministre des Finances, je peux vous dire que, constamment, des dirigeants d'entreprises canadiens communiquaient avec moi, mes collaborateurs et mes collègues politiques. Ils étaient très inquiets. Ils m'ont fait part du point de vue de leurs clients et de leurs investisseurs, en des termes très clairs. Ce ne sont pas des gens qui paniquent inutilement. Ils pouvaient vraiment voir s'éroder chaque jour leurs entreprises et, par conséquent, l'économie nationale.
    J'ai aussi pris très au sérieux, sénateur Harder, les points de vue exprimés par nos partenaires américains dans les échanges que nous avions, ainsi que dans les déclarations publiques d'hommes ou de femmes politiques américains qui sont à la recherche du moindre prétexte pour imposer des mesures protectionnistes au Canada. Cette occupation et ces blocages illégaux étaient des prétextes parfaits pour faciliter la tâche aux protectionnistes américains qui veulent nous fermer leur marché.
    Merci.
    J'ai une question à vous poser sur le financement de l'occupation, du convoi.
    Avez-vous des éléments de preuve attestant qu'on a utilisé des cryptomonnaies? Quels sont-ils? À votre avis, y avait‑il lieu de craindre que des cryptomonnaies illégales ne servent à appuyer ce qui est finalement devenu un convoi illégal et une occupation illégale?
    Comme je l'ai dit dans mon exposé, la GRC a signalé, le 19 février, qu'elle avait communiqué 170 adresses Bitcoin avec des places d'échange de monnaie virtuelle.
    Permettez-moi de dire deux choses d'ordre général.
    Tout d'abord, ce qui me préoccupait le plus, au sujet du blocage illégal et de l'occupation illégale, c'était l'impact économique — ce que nous pouvions voir de nos propres yeux, à vrai dire. Toutefois, à mesure que la situation évoluait et que nous sommes intervenus, il m'est apparu clairement que certaines lois canadiennes étaient en retard sur l'évolution du secteur financier. C'est pourquoi nous avons doté le CANAFE de façon permanente de nouveaux pouvoirs pour qu'il puisse surveiller cet espace financier qui n'est pas si nouveau.
    Avez-vous des preuves que des cryptomonnaies ont servi au blanchiment d'argent?
    Je ne vais pas aborder cette question, qui me semble relever plutôt de la GRC, en fait.
    Ai‑je le temps de poser une autre question?
     Il vous reste 15 secondes.
    Je vais donc me contenter de vous remercier d'être là.
    Nous allons passer au sénateur White.
     Merci beaucoup.
    Je suis désolé d'être arrivé en retard. Je ne me sens pas très bien aujourd'hui.
    Merci beaucoup d'être là, madame la ministre.
    Nous croyons savoir qu'aucune accusation n'a été portée relativement au blocage d'avoirs. Nous comprenons également que les avoirs ont été débloqués avant toute enquête approfondie. C'est ce que disent les autorités chargées de l'application de la loi.
    Quels autres moyens de bloquer ces avoirs ont été envisagés dans la semaine ou les semaines précédant le recours à la Loi?
    Je dois dire, monsieur le sénateur, que je ne vous entends pas très clairement, mais je crois avoir compris la majeure partie de vos propos. En ce qui concerne le blocage des comptes, je tiens à préciser que dès le 24 février, tous les comptes bloqués en vertu du décret ont été débloqués. J'ajouterai néanmoins que, d'après ce que je crois savoir, un certain nombre de comptes restent bloqués en vertu d'ordonnances et de procédures judiciaires sans lien avec les mesures prises en vertu de la Loi sur les mesures d'urgence.
    Monsieur le sénateur, vous voulez sans doute aussi que je dise un mot d'un recours auquel nous avons réfléchi, soit le recours à des ordonnances judiciaires pour bloquer des comptes.

  (1920)  

    Effectivement.
    Il m'a semblé que c'est à quoi vous vouliez en venir.
    Ce pouvoir existe bel et bien. Mais nous avions une préoccupation: il fallait des pouvoirs supplémentaires pour agir plus rapidement. Le 6 mars dernier, je crois, le commissaire adjoint de la GRC, Michel Arcand, a confirmé que le recours à la Loi sur les mesures d'urgence permettait à la GRC et aux institutions financières d'intervenir beaucoup plus vite. Il a confirmé qu'il aurait fallu une ordonnance distincte pour chaque compte bloqué en d'autres circonstances, ce qui aurait pu prendre des jours. Il a également confirmé que, sans la Loi sur les mesures d'urgence, la GRC n'aurait pas eu le pouvoir de coordonner les efforts entre elle et le Service de police d'Ottawa.
    Je vous remercie, madame la ministre. C'est vraiment à ce genre d'intervention que je songeais. Le 17 février, une injonction Mareva a été présentée par un avocat local et un groupe de gens d'affaires qui ont fait exactement la même chose que la Loi sur les mesures d'urgence. Par conséquent, cette option aurait certainement dû être envisagée.
     Je ne pense pas que la GRC ait jamais discuté de la possibilité de recommander le recours à la Loi sur les mesures d'urgence une semaine plus tôt, au moment où nous avons entendu ses représentants. Il sera intéressant de les entendre lorsqu'ils comparaîtront de nouveau.
    Puisque l'objectif n'était pas de saisir les avoirs, mais seulement de les bloquer, je suppose que, en posant ma question, je voulais savoir pourquoi le gouvernement n'avait pas pris cette mesure, et vous y avez répondu, merci.
    Quels autres moyens avez-vous envisagés, en dehors du recours à la Loi, pour certains avoirs? Il aurait été possible qu'un organe policier, notamment la GRC, vienne en aide au pouvoir civil. La GRC se sert du pouvoir civil probablement bien des fois en une année, le plus souvent pour du matériel. A‑t‑on envisagé cette possibilité, si la Loi sur les mesures d'urgence n'avait pas été invoquée? Si oui, pourquoi le gouvernement a‑t‑il décidé de ne pas se prévaloir de cette possibilité?
    Monsieur le sénateur, en ce qui concerne les pouvoirs dont la GRC estimait avoir besoin, je pense qu'il conviendrait tout à fait de s'adresser directement à elle.
    J'ai parlé des ordonnances judiciaires et des démarches beaucoup plus longues qu'elles nécessitaient, puisqu'il fallait une ordonnance pour chaque compte, par opposition à l'approche permise par la Loi sur les mesures d'urgence.
     Cela dit, je tiens à souligner une chose: je suis très consciente du fait que les pouvoirs conférés par la Loi sur les mesures d'urgence au sujet du blocage des comptes bancaires sont sérieux, graves. Je reviens donc sur un point que vous avez soulevé. Il s'agissait de bloquer, de suspendre les comptes. Il n'était absolument pas question de confisquer quoi que ce soit. Je tiens également à souligner que ces comptes ont été débloqués dès le 24 février. J'ajoute également que les décisions ont été prises par les institutions financières elles-mêmes en fonction de leur interprétation de la Loi et de leurs échanges avec la GRC.
    Il ne s'agissait pas de décisions politiques, et les petits donateurs n'ont aucunement été ciblés.
     Votre temps de parole est écoulé, sénateur White.
    Merci beaucoup.
     Vous aurez un deuxième tour.
    Mesdames et messieurs les membres du Comité, si vous êtes d'accord, nous avons le temps de faire un deuxième tour où chacun aura cinq minutes. Gardons à l'esprit que seulement deux sénateurs interviendront et que cela nous mènera à 20 heures, si tout le monde est d'accord. Normalement, nous nous contenterions de quatre minutes, mais comme nous avons le temps, tout ira bien.
    Nous allons commencer par M. Brock pour cinq minutes.
    Merci, madame la présidente.
    Madame la ministre Freeland, vous conviendrez avec moi que...
    Madame la présidente, j'invoque le Règlement. Je suis désolé de vous interrompre, mais je crois que si nous ne nous limitons pas à quatre minutes, cela empêchera un libéral de poser ses questions à la ministre Freeland, ce qui serait injuste. Nous préférons donc nous en tenir aux quatre minutes déjà approuvées dans les règles de procédure que le Comité a adoptées par voie de motion.
    Je crois que M. Naqvi aura l'occasion de poser la question.

  (1925)  

    Il y a trois libéraux au Comité, madame la présidente.
    C'est le même nombre de tours.
    En passant de quatre à cinq minutes, vous éliminez la possibilité d'un troisième tour, ce qui écarte la possibilité qu'un troisième libéral pose des questions.
    Normalement, nous n'avons pas de troisième tour, mais si j'entends des objections, nous allons en rester à quatre minutes.
    Monsieur Brock, vous avez la parole.
    Dois‑je redémarrer mon chronomètre, madame la présidente?
    Oui, s'il vous plaît.
    Je suis maintenant prêt. Merci.
    Madame la ministre Freeland, vous conviendrez avec moi que la Canadian Broadcasting Corporation, une société d'État financée par les contribuables, a déclaré le 10 février 2022 que les dons de GoFundMe à la manifestation du convoi provenaient de l'étranger.
    Êtes-vous d'accord?
    Je n'ai pas cet article sous les yeux et je n'ai pas mémorisé tous les articles de la CBC, mais je suis prête à vous croire.
    En fait, le journaliste disait que les dons provenaient des États-Unis, du Royaume-Uni, de France, d'Allemagne, d'Australie, de Nouvelle-Zélande et des Pays-Bas.
     Accepteriez-vous cela comme un fait?
    Je n'ai pas l'article sous les yeux, mais vous dites que c'est ce qu'il dit.
    Le journaliste est même allé jusqu'à dire que le convoi aurait pu être financé par la Russie.
    Vous en souvenez-vous?
    Vous êtes encore en train de vous référer à l'article.
    Oui.
    Le 21 mars 2022, la CBC, sans explication, ni excuse, ni autre précision, a retiré son article concernant le financement des manifestations.
    Êtes-vous au courant de cela?
    Je ne parle pas au nom de la CBC. Je parle au nom du ministère des Finances.
    Je ne vous demande pas de parler au nom de la CBC. Je vous demande si vous étiez informée que la CBC avait retiré son reportage, la fausse nouvelle, au sujet du financement et des dons faits au convoi.
    Monsieur Brock, ce n'est pas la CBC qui est interrogée ici, je pense. C'est le gouvernement du Canada.
    Répondez seulement à la question, madame la ministre. Étiez-vous au courant, oui ou non? C'est une question simple.
    Je n'ai pas l'article devant moi et je ne suis pas ici pour répondre à des questions au sujet de la CBC et de ses reportages.
    La vice-première ministre, la ministre la plus influente du Cabinet, n'est pas prête à dire si, oui ou non, la CBC a retiré une fausse nouvelle?
    Monsieur, je ne parle pas au nom de la CBC.
    Vous, la ministre la plus influente du Cabinet et la vice-première ministre, vous vous êtes fiée à un article initial de la CBC et vous avez partagé vos inquiétudes avec les Canadiens concernant le « financement terroriste » et le « blanchiment d'argent », ce sont vos mots. Est‑ce exact?
    Permettez-moi d'être très claire. Ma principale préoccupation liée à l'occupation illégale et les barrages illégaux, c'est le tort qu'ils ont causé à l'économie canadienne.
    Permettez-moi d'être très clair, madame la ministre, vous avez fait allusion plusieurs fois au financement terroriste et au blanchiment d'argent.
    Prétendez-vous que vous n'avez pas utilisé ces mots?
    Je suis ici aujourd'hui pour parler de notre principale motivation qui nous a incités à prendre des mesures très rigoureuses.
    Et je suis ici pour vous poser des questions et je m'attends à avoir des réponses, contrairement à ce qui se passe à la période des questions.
    Voici ma question, madame la ministre. Vous rappelez-vous avoir utilisé les termes « financement terroriste » et « blanchiment d'argent » à la Chambre et les avoir repris à l'extérieur de la Chambre, oui ou non?
    Si nous étions dans une cour de justice, où je pense que vous avez déjà travaillé, cela s'appellerait de l'intimidation à l'égard du témoin, monsieur Brock.
    Madame la présidente...?
    Pouvons-nous laisser la témoin répondre?
    Comme je l'ai dit, ma principale préoccupation, en tant que ministre des Finances, et ma principale justification pour la mise en place de ces mesures très rigoureuses, comme je l'ai clairement dit dans mon allocution préliminaire...
    Vous ne répondez pas à la question. Je vais continuer.
    L'hon. Chrystia Freeland: [Inaudible] sont les répercussions économiques.
    M. Larry Brock: Vous ne répondez pas à la question, et je vais continuer.
    Madame la présidente, j'invoque le Règlement. C'est tout à fait possible que M. Brock n'aime pas la réponse qu'il entend, mais la témoin a le droit de répondre. Ne pourrait‑on pas lui donner la chance de répondre?
    Madame la présidente, la témoin n'aime peut-être pas les questions, mais elle n'a pas le droit d'établir ses propres faits en donnant une réponse qui n'est pas une réponse et qui n'a aucun lien avec la question.
    Nous allons reculer le chronomètre de 20 secondes et vous permettre de poser votre dernière question.

  (1930)  

    Êtes-vous d'accord avec moi pour dire que le sous-directeur du CANAFE, M. MacKillop, a confirmé devant un comité que le financement du convoi ne provenait pas d'activités terroristes ou de blanchiment d'argent, et que les centaines et les milliers de dollars donnés au convoi par des gens ordinaires... provenaient de leurs propres ressources et ne posaient aucun problème de sécurité? Acceptez-vous cela?
    Ce que j'accepte, monsieur Brock, c'est que la principale menace visait l'économie canadienne et notre réputation en tant que partenaire commercial et de destination d'investissement. Je l'ai clairement dit dans mon allocution préliminaire...
    Merci pour votre non-réponse, madame la ministre.
    ... et c'est ce que je pense.
    Merci pour votre non-réponse, madame la ministre. C'est très utile.
    Nous passons à M. Naqvi.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Madame la ministre, je vous remercie de votre présence aujourd'hui.
    Comme vous le savez, madame la ministre, je représente la circonscription d'Ottawa-Centre, qui a été l'épicentre de l'occupation, juste en face de cet édifice. Ce n'était pas seulement dans la rue Wellington, mais au‑delà, dans tout le quartier entourant la Colline du Parlement. Les manifestations ont fait du tort à des centaines de commerces, dont le Centre Rideau, que nous sommes nombreux à fréquenter, j'en suis certain. C'est le plus important centre commercial de la ville et des milliers de personnes y travaillent. La veille de la réouverture au terme du décret de fermeture pris par le gouvernement provincial, ces commerces ont été forcés de fermer leurs portes durant trois semaines consécutives.
    Nous avons constaté un impact réel. En fait, mon bureau a répondu à de nombreuses questions provenant de travailleurs et de propriétaires de commerces qui voulaient avoir de l'aide, premièrement pour que nous mettions fin au blocage et à l'occupation, et deuxièmement, pour que nous leur fournissions une aide financière leur permettant de traverser cette période.
    D'après votre analyse, pouvez-vous nous parler des préjudices économiques particuliers que vous constatiez à cause de cette occupation et nous dire également quelles auraient été les conséquences économiques pour la ville d'Ottawa si vous n'aviez pas mis fin à l'occupation en invoquant la Loi sur les mesures d'urgence? Pouvez-vous également nous parler de ce qui se passait à Windsor et aux postes frontaliers de Pacific Highway, de Coutts et d'autres et des répercussions que ces barrages ont eues sur l'économie canadienne en général?
    Je vous remercie de votre question, monsieur Naqvi.
    Je tiens à vous dire, en votre qualité de député d'Ottawa-Centre, que vos électeurs et vous-même avez été parmi les personnes les plus durement frappées par ce barrage illégal et cette occupation. Le sénateur Harder m'a demandé pourquoi cette situation a pu se poursuivre aussi longtemps. D'après les échanges que nous avons eus, je sais que de nombreux résidents vous ont également posé cette question. Je pense qu'elle est tout à fait légitime.
    Je voudrais leur dire, par votre entremise, que je regrette sincèrement et profondément ce qu'ils ont vécu. J'espère qu'avec le temps, ils comprendront que la raison pour laquelle nous avons agi de façon prudente et réfléchie, c'était parce que pour nous, c'était vraiment une mesure de dernier recours. Je suis fermement convaincue que c'était la meilleure chose à faire. C'est ce que je crois maintenant, avec le recul. Ces mesures devaient être prises et elles l'ont été après mûre réflexion.
    Quant aux répercussions économiques pour la ville d'Ottawa, comme vous le savez pertinemment, la ville a présenté un rapport faisant état de l'impact direct pour la ville elle-même. Le coût est évalué à 37 millions de dollars. Le Conseil canadien du commerce de détail a calculé que les pertes, juste pour le Centre Rideau auquel vous avez fait allusion, et pour les ventes s'élevaient à trois millions de dollars par jour.
    J'ai déjà cité Larry Andrade, de Deloitte, qui a calculé que les préjudices subis par les entreprises et les employés pendant l'occupation d'Ottawa se situaient entre 150 et 207 millions de dollars. Et c'est seulement pour Ottawa. Il s'agit donc d'un impact très très important. Et vous connaissez très bien les répercussions psychologiques et personnelles que cela a eues sur tellement de gens.

  (1935)  

    Monsieur Naqvi, votre temps est écoulé.
    Chers collègues, nous passons maintenant à trois minutes.
    Allez‑y, monsieur Fortin.

[Français]

    Je vous remercie, madame la présidente.
    Madame Freeland, j'aimerais faire une petite remarque préliminaire.
    Tantôt, vous avez dit à M. Brock qu'un juge considérerait qu'il vous harcelait ou qu'il harcelait le témoin. Personnellement, je crois qu'un juge vous dirait que c'est assez et que vous devez répondre aux questions qui vous sont posées. Nous vous en serions reconnaissants.
    En ce moment, nous perdons notre temps. Cela fait presque une heure que vous témoignez, mais vous tournez en rond. On vous a demandé ce qui a été fait avant que l'on invoque la Loi sur les mesures d'urgence, mais vous n'avez pas répondu à la question, vous avez patiné. On vous a demandé pourquoi vous aviez attendu si longtemps, mais vous avez encore patiné. Le sénateur Carignan vous a demandé si les États‑Unis vous avaient offert d'envoyer des dépanneuses et vous avez encore patiné. C'est vraiment décevant, madame la ministre.
    Je ne sais pas comment nous allons faire pour nous acquitter du mandat que la Chambre des communes nous a donné. Nous avons besoin d'information et de documents, pas d'un spectacle de patinage artistique. Sauf votre respect, je souhaiterais que vous répondiez à nos questions.
    Je vais vous le demander une dernière fois: pouvez-vous nous dire, en trente secondes, ce qui a été tenté avant que l'on invoque la Loi sur les mesures d'urgence?
    Vous avez déjà parlé avec beaucoup de mes collègues et avec des fonctionnaires d'autres ministères.
    J'aimerais que vous répondiez à la question, madame la ministre.
    Pouvez-vous répondre à la question, oui ou non? Savez-vous ce qui a été fait avant la proclamation de la Loi sur les mesures d'urgence?
    J'étais en train de répondre à la question.
    Si vous me le permettez...
    Vous patinez encore. Il me reste une minute et demie. Je sais que vous êtes capable de patiner pendant une minute et demie, mais vous comprendrez que c'est un peu exaspérant.
    Si la situation se reproduisait demain matin et qu'il y avait des barrages sur la rue Wellington, qu'est-ce qui serait fait différemment pour ne pas que cela dure aussi longtemps que la dernière fois? Avez-vous une réponse rapide à nous donner à ce sujet?
    J'espère que les mesures que nous avons prises en ce qui a trait aux blocages illégaux vont faire en sorte que ces événements ne se reproduisent pas.
    Vous l'espérez, et nous l'espérons tous. Ce que je comprends, c'est qu'il n'y a rien de prévu pour changer la donne.
    Une de vos collègues nous a dit que, si c'était à refaire, l'intervention sera plus rapide et que l'on empêcherait les camionneurs de bloquer la rue Wellington.
    Qu'en pensez-vous? Pourquoi ne les a-t-on pas empêchés de s'y installer, l'hiver dernier?
    Vous posez une question concernant les mesures prises par les forces policières d'Ottawa et ce qu'elles ont fait ou n'ont pas fait. Ce n'est pas une décision du gouvernement fédéral ou de la ministre des Finances.
    C'est votre réponse à la question de tantôt, madame Freeland. Vous avez dit que vous aviez participé à des discussions et que la proclamation de l'état d'urgence avait été faite en dernier recours parce que c'était nécessaire.
    Si c'était nécessaire et que c'était le dernier recours, c'est donc que vous avez essayé autre chose auparavant ou alors, sauf votre respect, vous dites n'importe quoi.
    Si c'était le dernier recours, quels étaient les premiers? Qu'aviez-vous tenté auparavant?
    Monsieur Fortin, encore une fois, sauf le respect que je vous dois, vous avez posé une question particulière et détaillée au sujet des mesures prises par les forces policières d'Ottawa, et non concernant les pouvoirs du ministère des Finances.
    Madame Freeland, vous remporteriez une médaille si nous étions dans une compétition de patinage.
    Je vous remercie.

[Traduction]

    Vos trois minutes sont écoulées.
    Monsieur Green, vous disposez de trois minutes.
    Je dois dire que je trouve étonnant et peut-être un peu gênant que la ville d'Ottawa nous ait fourni une analyse plus détaillée des répercussions économiques de l'occupation que celle que notre gouvernement fédéral a faite des répercussions des barrages aux postes frontaliers du pays. Mais je m'écarte du sujet.
    Le 17 février, vous avez dit que vous vous êtes entretenue directement avec les dirigeants des grandes banques et la directrice CANAFE. Les banques et le CANAFE ont-ils exprimé leur soutien ou leur opposition aux mesures temporaires décrétées?
    Le 17 février, le décret était en place. Je regarde mon agenda. Je crois que mon entretien avec les dirigeants des banques a eu lieu le...
    Madame la ministre, je vous en prie. Je vous demande simplement de répondre. Est‑ce qu'ils se sont opposés aux mesures, oui ou non?
    Je veux être précise et éviter de confirmer une date qui est fausse.
    C'est bien, c'est de bonne guerre. Vous consultez vos notes. Pouvez-vous partager avec le Comité les notes que vous avez prises durant vos entretiens avec eux?
    Ce ne sont pas des notes de cet entretien. C'est un agenda personnel d'entretiens...

  (1940)  

    Avez-vous pris des notes lors de vos rencontres avec les dirigeants des banques et du CANAFE, oui ou non?
    Permettez-moi de dire quelque chose qui me semble pertinent de vous dire au sujet des rencontres que j'ai eues avec les dirigeants des grandes banques. En fait, j'ai deux choses à dire.
    Premièrement, avant l'invocation des mesures d'urgence, je me suis entretenue avec des chefs d'entreprise canadiens, y compris avec certains dirigeants de banque.
    Le coprésident (M. Matthew Green): J'ai déjà eu la confirmation. Je veux seulement savoir si vous avez pris des notes?
    L'hon. Chrystia Freeland: Ils se préoccupaient de l'état de l'économie canadienne. Quand il s'agit ...
    Avez-vous des notes, oui ou non?
    Concernant les conversations que j'ai eues avec les dirigeants des banques après l'invocation des mesures d'urgence, à ce moment‑là, leur rôle était d'agir en conformité avec la loi que nous avions adoptée...
    Madame la ministre, tous les gens qui suivent les délibérations du Comité en ce moment peuvent voir que vous persistez à refuser de répondre à une question très simple. Franchement, je trouve votre attitude presque offensante.
    Ma question est simple: Avez-vous des notes sur ces rencontres de haut niveau, oui ou non? Je ne vous en demande pas la teneur.
    Je trouve qu'il est déplacé de dire à une collègue députée qu'elle est offensante...
    J'ai dit que votre attitude était « presque » offensante, à en juger par ce qui se passe.
    Je vous rappelle que quand vous parlez tous les deux ensemble, c'est difficile de comprendre. Le temps passe, madame la ministre, pourriez-vous répondre, s'il vous plaît?
    Je pense avoir parlé de la teneur de ces conversations. Il était tout à fait opportun que mon sous-ministre et moi-même ayons des conversations personnelles et en groupe avec les dirigeants des grandes banques. Ils nous ont parlé de...
    Avez-vous des notes? Avez-vous des notes?
    Je vous parle maintenant de la teneur de ces conversations.
    Je vous demande si vous avez pris des notes?
    Le temps est écoulé.
    C'est incroyable.
    Madame la présidente, vous savez...
    J'invoque le Règlement, madame la présidente, je crois que le député n'a plus la parole.
    Nous passons au sénateur White.
    Merci beaucoup.
    Je vous remercie encore de votre présence, madame la ministre.
    J'invoque le Règlement, madame la présidente.
    D'accord, allez‑y.
    Arrêtez le chronomètre, s'il vous plaît.
    Veuillez arrêter le chronomètre pour le sénateur, s'il vous plaît.
    Je ne suis pas d'accord avec ma collègue, Mme Bendayan, de refuser à M. Green son droit d'invoquer le Règlement. Je pense que nous pouvons invoquer le Règlement en tout temps.
    Je suis d'accord avec vous, mais il n'a pas indiqué que c'était un rappel au Règlement.
    C'est ce qu'il a dit juste avant d'être interrompu.
    Je ne l'ai pas entendu.
    Monsieur Green, est‑ce que vous vouliez prendre la parole? Je n'ai pas entendu...
    Non. Vous savez ce que je pense en ce moment? Je m'attends simplement à ce que nous soyons obligés de convoquer la témoin à nouveau pour obtenir quelques réponses. Nous tournons en rond depuis plus d'une heure, sans réussir à obtenir de réponses. Je vais donc m'arrêter ici. Ce n'est même pas un rappel au Règlement.
    Je vous remercie.
    Sénateur White, allez‑y.
    Merci beaucoup.
    Je suppose que le chronomètre est remis en marche.
    Madame la ministre, merci encore de votre présence.
    J'ai été déçu de vous entendre dire que c'était une séance de confrontation, parce que je considère que c'est une séance de recherche de faits, tout à fait conforme à la loi. C'est seulement une opinion, parce que je ne pense pas que cela devrait être une confrontation.
    Cependant, j'avais plusieurs préoccupations à l'esprit pendant que nous franchissions le barrage. Je vis à Ottawa et, en tant que sénateur, je représente cette ville.
    La première, c'est de voir le maire négocier une entente avec des gens qui, nous étions tous d'accord là‑dessus, commettaient un acte criminel. Est‑ce que le fait de voir le maire signer un contrat avec Mme Lich, je pense, pour autoriser les manifestants à ériger une forteresse autour de la Colline du Parlement, en échange de la libération d'autres secteurs, a incité le gouvernement fédéral à invoquer la Loi sur les mesures d'urgence?
    Je vous remercie de votre question, sénateur. Je ne crois pas qu'il soit approprié pour moi ce soir de porter un jugement sur les actions prises par les autorités compétentes d'Ottawa, mais je vais vous rappeler, comme nous le savons tous, que les autorités n'avaient pas réussi, au moment de l'invocation de la Loi sur les mesures d'urgence, à mettre fin au barrage et à l'occupation illégaux. De mon point de vue, en tant que ministre des Finances, cela posait un grave problème pour le Canada et pour notre économie. Il est donc fort possible que, si les autorités avaient réussi à mettre fin à l'occupation, nous ayons agi différemment, mais cela n'a pas été le cas.

  (1945)  

    Pour être juste, je pense que nous portons un jugement. Nous avons entendu... je pense que c'est le sénateur Harder qui a parlé d'un « échec de la police », et je pense que tout le monde serait d'accord pour affirmer que c'était bel et bien un échec de la police — sauf si notre plan était de nous retrouver dans cette situation.
    Je pense donc que nous portons un jugement, mais la vérité, c'est que le maire a négocié. Je pose la question parce que je peux vous dire que j'ai envoyé des courriels, des textos et des appels à tous les ministres et à tous les députés du parti ministériel, dans l'espoir qu'ils me répondraient pour me dire leur étonnement de voir le maire négocier avec des criminels.
    Est‑ce que cela vous a incités à agir, étant donné qu'il était évident que d'autres étaient en train de prendre des mesures qui ne devaient pas être prises...?
    Ce que je peux vous dire, sénateur, c'est que je suis d'accord; j'ai toujours été d'accord, et je suis d'accord avec vous aujourd'hui pour dire qu'il n'est pas correct de négocier avec des gens qui posent des actes illégaux.
    Merci beaucoup.
    Ce n'est pas ainsi que le gouvernement doit se comporter.
    Une dernière brève question à poser, bien qu'elle nécessitera peut-être une longue réponse.
    De toute évidence, la province avait déjà invoqué sa propre loi sur les situations d'urgence. Il semble que cette loi provinciale manque de mordant et qu'elle n'a pas aidé la police à mettre fin au blocage.
    Pouvez-vous nous dire — et j'espère que le solliciteur général de l'Ontario viendra témoigner — ce qui manque à cette loi provinciale que nous ayons été obligés d'invoquer la loi fédérale à la place.
    Je suis désolée, mais le temps de M. White est écoulé.
    Merci.

[Français]

    Madame Freeland, le ministre de la Sécurité publique nous a dit que le gouvernement a invoqué la Loi sur les mesures d'urgence sur les conseils des forces de l'ordre.
    Est-ce le cas?
    Personnellement, je n'ai pas reçu un tel conseil.
    Le ministre de la Sécurité publique vous a-t-il informée du fait que les forces de l'ordre vous suggéraient d'invoquer la Loi sur les mesures d'urgence?
    Nous avons eu beaucoup de discussions de groupe, mais je ne me souviens pas d'une telle discussion.
    Selon ce que je comprends, vous ne vous rappelez pas que le ministre de la Sécurité publique vous ait dit que les forces de l'ordre nous demandaient d'invoquer la Loi sur les mesures d'urgence.
    Est-ce bien cela?
    Personnellement, je ne me souviens pas d'une telle discussion.
    Vous rappelez-vous alors qui vous a suggéré d'invoquer la Loi sur les mesures d'urgence?
    Je vais être très claire: c'était une décision collective du Cabinet.
    Oui, mais il y en a toujours un qui a la brillante idée, qui sort le lapin, et qui dit: « nous devrions faire cela ». Qui l'a sorti le premier?
    Un moment, s'il vous plaît.
    C'est une décision collective que nous avons prise à ce moment-là, et aujourd'hui, il s'avère que je veux personnellement assumer la responsabilité de cette décision. C'était mon point de vue quand nous avons décidé que c'était la bonne chose à faire et c'est également le cas maintenant.
    Est-ce vous qui en avez eu l'idée?
    Nous avons eu beaucoup de discussions, mais je pense que c'est important pour le gouvernement...
    Ce que je veux savoir, c'est si c'est vous qui avez eu l'idée d'invoquer la Loi sur les mesures d'urgence.
    Monsieur le sénateur, c'était une décision très sérieuse, une décision politique.
    J'ai compris cela.
    C'était une décision politique, mais je ne veux pas éviter d'en assumer la responsabilité.
    Dans ce cas, qui en a eu l'idée?
    Je suis prête à dire que j'étais d'accord avec cette décision quand nous l'avons prise et c'est encore le cas aujourd'hui. Nous avons fait la bonne chose.
    J'ai compris depuis longtemps que vous approuviez la décision.
    Qui en a eu l'idée? Qui vous l'a suggérée?
    C'était une situation d'urgence et nous en avons beaucoup discuté.
    D'accord, mais qui vous a suggéré de geler les comptes de banque?
    Encore une fois, nous en avons beaucoup parlé. Le sénateur Harder et M. Fortin m'ont demandé pourquoi il a fallu beaucoup de temps pour régler la situation. Nous avons eu beaucoup de discussions au ministère et beaucoup de conversations avec les autres collègues. Chaque heure de chaque jour, nous nous demandions...

  (1950)  

[Traduction]

    Madame la ministre, je m'excuse. Le temps de M. Carignan est écoulé.
    Chers collègues, nous pouvons faire un autre tour d'une minute et conclure.
    Si cela vous convient, nous allons commencer par M. Motz.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Madame la ministre, je partage la frustration de bon nombre de mes collègues autour de cette table. Nous avons patiné pendant 90 minutes, sans obtenir aucune réponse, en fait.
    Vous semblez beaucoup consulter votre cahier. Pouvez-vous le présenter au Comité dans son intégralité, oui ou non?
    Je n'ai pas à m'excuser de m'être préparée consciencieusement à venir témoigner.
    Pouvez-vous présenter ce cahier au Comité, s'il vous plaît?
    Je crois qu'il est important de faire mes devoirs. Ces notes sont pour mon usage personnel.
    Pouvez-vous les présenter au Comité, oui ou non?
    De toute évidence, c'est non.
    Avez-vous signé le mémoire au Cabinet proposant la déclaration de l'état d'urgence?
    Je ne me souviens pas précisément qui l'a signé, mais j'espère l'avoir fait. Je serai ravie de l'avoir signé.
    Merci.
    Merci, monsieur Motz.
    Monsieur Virani, c'est à vous.
    Je vous remercie.
    Madame la ministre, je vais être bref.
    Le dégel des comptes a commencé, par application du règlement, pas seulement le 24 février à la levée des mesures d'urgence, mais dès la fin de l'activité illégale. Donc, si une personne cessait de participer au barrage illégal, son compte bancaire allait être dégelé, est‑ce exact?
    Oui, c'est exact. En fait, la GRC a fait une déclaration, que j'ai apportée ici pour pouvoir la consulter...
    Je n'ai qu'une minute, madame Freeland, mais c'est fantastique. Merci.
    Les restrictions relatives aux biens visaient à briser les chaînes d'approvisionnement qui permettaient au convoi de poursuivre ses activités durant des semaines. Est‑ce exact?
    C'est exact.
    En fait, la simple invocation du règlement et la menace de révoquer l'assurance du camion d'un manifestant n'ont pas suffi à convaincre les gens à mettre fin à leur action illégale et à quitter les lieux. Est‑ce exact?
    C'est ce qu'ont déclaré les forces de l'ordre, certainement.
    Vous avez parlé des risques à la réputation du Canada, et je sais que votre collègue, la ministre Ng, et vous-même avez travaillé très fort sur des dossiers comme le projet de loi américain Reconstruire en mieux et les crédits d'impôt pour les véhicules électriques. Lorsque nous avons des problèmes, comme les interruptions de l'approvisionnement sur le pont Ambassador, qui nuisent à l'industrie de l'automobile, est‑ce que cela a un impact direct sur votre capacité à mettre fin aux mesures protectionnistes des Américains, comme le projet de loi Reconstruire en mieux.
    Madame la ministre, oui ou non?
    Absolument.
    Merci.
    Monsieur Fortin, vous avez une minute.

[Français]

    Je vous remercie, madame la présidente.
    Madame Freeland, nous savions à l'avance que le convoi se dirigeait vers la Colline du Parlement. Il y avait aussi un blocage sur le pont Ambassador. Les camions s'en venaient, et cela inquiétait les policiers.
    À un moment donné, est-ce qu'un membre du Cabinet ou vous-même êtes intervenus auprès des services policiers pour leur dire qu'il fallait prendre des mesures visant à sécuriser le Parlement?
    Monsieur Fortin, comme vous le savez très bien, ce n'est pas normal...
    Il reste 20 secondes, madame la ministre.
    ...et ce n'est pas correct...
    Vous ne le savez pas?
    ...pour la ministre des Finances de parler avec les policiers d'Ottawa pour...
    Si j'ai bien compris, madame la ministre, vous n'avez jamais rien fait pour empêcher le barrage.
    Est-ce exact?
    Non, ce n'est pas cela.
    Qu'est-ce que vous avez fait pour démanteler le barrage, à part invoquer la Loi sur les mesures d'urgence?

[Traduction]

    Désolée, monsieur Fortin, votre temps est écoulé.
    Monsieur Green, allez‑y.
    Madame la ministre, c'est vous qui avez la responsabilité ultime. D'après votre témoignage, je crois qu'elle vous a échappée. Vous avez dit que la GRC avait « ordonné » de geler les comptes, puis avez ensuite dit qu'elle avait « consulté » les banques au sujet des comptes qui devaient être gelés.
    Qui a pris la décision? La GRC ou les banques?
    J'ai clairement dit qu'il y avait deux voies. En vertu du décret, les banques, en utilisant leurs processus internes, ont agi ainsi pour s'assurer qu'elles se conformaient au décret.
    Est‑ce que certains de ces comptes...
    Le décret permettait également à la GRC de communiquer directement avec les banques et de leur transmettre des renseignements pour leur permettre de se conformer au décret.
    Y avait‑il des comptes reliés à des groupes extrémistes violents motivés par des raisons idéologiques?
    Là encore, ce n'était pas le rôle du ministère des Finances de...

  (1955)  

    Avez-vous reçu des comptes rendus?
    ... déterminer quels comptes devraient être gelés ou non. C'est un...
    Avez-vous reçu des comptes rendus?
    ... point très important sur lequel je tiens à insister.
    Vous pouvez insister autant que vous le voulez. Avez-vous reçu des comptes rendus?
    Monsieur Green, votre temps est écoulé.
    Sénateur White, vous avez la parole.
    Merci beaucoup.
    Je vais rapidement répéter ma question précédente qui, faute de temps, n'a pas eu de réponse.
    La province a également invoqué sa propre loi sur les situations d'urgence. Pouvez-vous nous dire ce qui fait défaut à cette loi provinciale pour qu'on invoque la loi fédérale?
    Merci beaucoup.
    Merci de répéter cette question.
    Vous m'avez également demandé, sénateur, quelles leçons nous avons retenues quant à ce qui devrait être intégré à la loi provinciale. Je pense que c'est à la province de le déterminer, mais nous avons une bonne relation de travail avec la province. L'une des leçons que j'ai retenues de tout cela, et nous avons déjà commencé à y travailler, c'est que nous devons moderniser les pouvoirs du CANAFE et les adapter au XXIe siècle. C'est l'une des leçons que nous avons apprises et nous avons déjà pris des mesures à cet égard.
    Je vous remercie de cette information. Pour être juste, toutefois, notre rôle est de faire des recommandations à la fin de notre étude, et j'espère que nous pourrons. Les recommandations peuvent s'adresser à la ville et à la province. Quant à savoir si elles les accepteront, c'est une autre histoire.
    Je vous remercie, madame la présidente.
    Merci, sénateur White.
    Le sénateur Carignan sera le dernier.

[Français]

     Madame la ministre, vous avez dit ne pas savoir si les forces de l'ordre avaient conseillé d'invoquer la Loi sur les mesures d'urgence, que ce n'était jamais venu à vos oreilles. Vous avez pris une décision sans avoir demandé l'avis ni le conseil des forces de l'ordre.
    Dans le cadre des discussions que j'ai eues avec mes collègues, mon devoir était de transmettre des renseignements et de faire part de nos inquiétudes relativement à l'économie.
    J'ai bien compris cela. J'ai siégé moi aussi au Conseil des ministres.
    C'est de cette question que j'ai parlé.
    Je sais comment cela fonctionne, car j'ai siégé au Conseil des ministres. Vous avez pris une décision et vous avez voté là-dessus. Vous avez décidé d'avoir recours à la Loi sur les mesures d'urgence sans connaître la position des forces de l'ordre relativement à cette décision.
    Le ministre de la Justice avait le devoir de nous informer des pouvoirs qui étaient à notre disposition. Il y a un élément important dont nous n'avons pas discuté, c'est du fait que le ministre de la Justice nous a renseignés au sujet de la Charte canadienne des droits et libertés.

[Traduction]

    Sénateur Carignan, je m'excuse, mais votre temps est écoulé. J'ai été généreuse.

[Français]

    Vos excuses ne devraient pas s'adresser à moi, mais au public.

[Traduction]

    Permettez-moi d'exprimer, au nom du Comité, nos remerciements à la ministre Freeland de sa présence.
    Chers collègues, nous allons faire une pause de quelques minutes avant d'accueillir le ministre Blair.

  (1955)  


  (2005)  

    Nous poursuivons nos travaux.
    Nous accueillons, jusqu'à 21 h 30, l'honorable Bill Blair, ministre de la Protection civile. Il est accompagné de sa représentante, Jacqueline Bogden, sous-secrétaire du Cabinet, Protection civile et relance à la suite de la COVID.
    Soyez le bienvenu, monsieur le ministre. Vous avez cinq minutes pour votre allocution préliminaire. Allez‑y.
    Merci beaucoup, sénatrice.
    Tout d'abord, je tiens à remercier très sincèrement le Comité de m'avoir invité et de me donner l'occasion de prendre la parole devant lui aujourd'hui.
    Madame la coprésidente, le recours à la Loi sur les mesures d'urgence le 14 février a été le premier depuis la création de la loi en 1988. La décision d'invoquer la Loi sur les mesures d'urgence est une décision importante pour tout gouvernement et, à ce titre, elle mérite un examen attentif. Je suis reconnaissant au Comité de l'excellent travail qu'il accomplit pour jouer ce rôle important au nom de tous les Canadiens.
    La responsabilité du maintien de l'ordre public au Canada, de l'application des règlements municipaux, des lois provinciales et du Code criminel relève des corps policiers compétents. Ces derniers ont également l'importante responsabilité de faire respecter la Charte des droits et libertés afin de faciliter les manifestations licites et pacifiques. En Ontario, ces pouvoirs et cette responsabilité sont bien définis dans la Loi sur les services policiers de l'Ontario. Pour la gouverne du Comité — je sais, madame la coprésidente, que c'est un sujet que vous connaissez très bien —, j'ai apporté, dans les deux langues officielles, un exemplaire de la Loi sur les services policiers de l'Ontario qui, je l'espère, vous sera utile.
    Au fur et à mesure que les événements et les manifestations se déroulaient, d'abord avec des convois roulant à travers le Canada, puis avec l'établissement d'un campement de manifestants dans la ville d'Ottawa, nous avons pu observer la fortification de ce campement avec des camions lourds et des remorques. Nous avons ensuite été témoins de blocus ciblés, qui ont effectivement bloqué des corridors commerciaux vitaux et coupé le mouvement des biens et des services essentiels vers notre secteur manufacturier et le mouvement des biens et des services essentiels dans tout le pays. Ces blocus, surtout les blocus frontaliers, ont eu des répercussions particulièrement importantes.
    Je sais que des témoins précédents ont expliqué au Comité certaines de ces répercussions. J'ai également reçu des lettres de mes collègues ministres en Alberta, du premier ministre du Manitoba et d'ailleurs au pays, expliquant certains des énormes défis que ces barrages représentaient et la menace à la sécurité économique des administrations provinciales et des municipalités de tout le pays. Nous avons également reçu de nombreux rapports d'entreprises de fabrication du secteur privé au sujet de l'impact énorme de ces barrages.
    Tout au long de cet événement, nous avons constaté dans de nombreuses administrations — y compris ici même à Ottawa — que les organismes d'application de la loi étaient incapables de régler rapidement et efficacement les comportements graves et nuisibles de certains participants. Par exemple, la police a été incapable d'enlever les camions lourds qui bloquaient bon nombre de rues à Ottawa ainsi que des routes municipales et provinciales à Ottawa, à Windsor, à Emerson au Manitoba, à Coutts en Alberta et Pacific Highway en Colombie-Britannique.
    Afin de déterminer pourquoi la police éprouvait ces difficultés, j'ai eu des discussions et j'ai consulté directement les dirigeants de la police et le maire ici à Ottawa, par exemple. J'ai demandé au chef de police d'Ottawa s'il pouvait me dire pourquoi ils n'étaient pas en mesure d'identifier et de remorquer les véhicules. D'après mon expérience — j'ai passé de nombreuses années dans la police —, il me semblait que l'identification et le remorquage de ces véhicules auraient été une étape logique. Le chef m'a toutefois dit, et j'ai accepté son explication, qu'il ne croyait pas que cela pouvait se faire sans provoquer une explosion de violence, et que cela ne pouvait pas être fait en toute sécurité par ses agents chargés de l'application des règlements. Je lui ai ensuite parlé du remorquage des véhicules dans la rue, et il m'a dit qu'en dépit du fait qu'ils avaient conclu un certain nombre de contrats de service avec des entreprises de remorquage dans la région de la capitale nationale, aucune de ces entreprises n'était disposée à venir retirer ces véhicules. Le chef Sloly nous a dit qu'ils se préoccupaient de leur sécurité ou de leurs relations d'affaires avec l'industrie du camionnage. Quoi qu'il en soit, ils avaient décidé de ne pas intervenir.
    Il est ressorti les mêmes renseignements, soit dit en passant, de mes discussions avec le ministre McIver, en Alberta, qui a indiqué qu'ils n'étaient pas en mesure d'assurer la sécurité des dépanneuses pour remorquer les véhicules qui bloquaient l'autoroute Coutts. Il a demandé, et nous avons examiné, s'il y avait d'autres dépanneuses à la disposition du gouvernement canadien. Nous avons dressé la liste des véhicules à la disposition des Forces armées canadiennes, par exemple, et on nous a dit qu'elles n'avaient pas les véhicules appropriés à cette fin et qu'elles n'étaient pas en mesure d'aider. Le problème a donc traîné en longueur.
    J'ai également eu des discussions avec la commissaire de la GRC au sujet des défis que devait relever la GRC dans l'élimination des barrages routiers sur l'autoroute de Coutts. J'ai demandé pourquoi on ne recourait pas à l'Alberta Traffic Safety Act pour détourner la circulation à l'extérieur de ces routes ou pour remorquer les véhicules qui bloquaient la circulation. La commissaire m'a informé que selon les renseignements qu'elle détenait et relativement auxquels ils menaient une enquête, on soupçonnait la présence d'armes à feu chez les participants à ce blocus en particulier. Elle était, à juste titre, très préoccupée par la sécurité de ses agents qui auraient participé à l'opération, mais en fin de compte, on m'a dit que, tant qu'ils n'étaient pas en mesure — par la suite, au terme d'une enquête — de procéder à des arrestations et de saisir ces armes, le contexte ne leur permettait pas d'invoquer les pouvoirs à leur disposition en vertu des lois municipales, provinciales et fédérales.

  (2010)  

    Par conséquent, ces barrages ont persisté pendant une assez longue période, soit plus de deux semaines en Alberta et plus de sept jours à Windsor. Tout au long de cette occupation, on nous a également informés qu'il y avait une forte probabilité que d'autres barrages soient érigés aux points d'entrée, comme au pont Blue Water à Sarnia, sur Pacific Highway à Surrey ou au Peace Bridge à Fort Erie. Nos fonctionnaires nous ont fourni de l'information solide indiquant que les participants à ces barrages avaient l'intention de retourner aux endroits qu'ils avaient déjà bloqués ou de bloquer de nouveaux points d'entrée parce que c'était une tactique très efficace.
    Monsieur le ministre, je suis désolée. Je vais devoir vous interrompre pour que nous puissions passer aux questions. Merci beaucoup.
    Nous allons commencer par M. Motz. C'est un tour de cinq minutes.
    La parole est à vous, monsieur Motz.
    Merci, madame la coprésidente.
    Merci, monsieur le ministre, d'être ici.
    Monsieur le ministre, vous venez de nous expliquer que vous avez eu de nombreux contacts avec les responsables de l'application de la loi avant l'invocation de la Loi sur les mesures d'urgence, et pourtant, lorsque mon collègue, M. Fortin, a demandé au témoin précédent, la ministre Freeland, si elle avait parlé à la police, elle a dit qu'il serait tout à fait inapproprié qu'un ministre fasse une telle chose.
    Lequel de vous deux a raison?
    Pour que ce soit bien clair, je rencontrais régulièrement — j'avais établi une table de consultation avec les trois ordres de gouvernement, une table tripartite, avec la Ville d'Ottawa, y compris le maire — nos homologues provinciaux et mes fonctionnaires. C'est lors d'une réunion avec le maire d'Ottawa pour discuter de la façon dont nous pourrions aider la Ville d'Ottawa à rétablir l'ordre, la paix et la sécurité dans la ville d'Ottawa que j'ai discuté avec son chef de police.
    J'en déduis donc que la ministre Freeland n'avait pas raison.
    Permettez-moi de vous poser une autre question, monsieur.
    Votre gouvernement affirmera sans aucun doute que les documents que nous avons demandés sont des documents confidentiels du Cabinet, mais en tant que président du Conseil privé de la Reine, allez‑vous divulguer ces documents confidentiels du Conseil privé de la Reine?
    Pouvez-vous préciser de quels documents confidentiels vous parlez, monsieur?
    Nous parlons des documents que nous avons demandés. Comme vous le savez, le Comité a demandé tous les documents qui ont servi à prendre la décision d'invoquer la Loi sur les mesures d'urgence. Nous avons déjà entendu des ministres, les ministres Lametti et Mendicino, qui ont dit très clairement qu'ils invoquaient le secret professionnel de l'avocat ainsi que le secret du Cabinet pour justifier la non-divulgation de cette information.
    Je vous demande, en tant que président du Conseil privé, si vous envisageriez de divulguer ces documents confidentiels?

  (2015)  

    Monsieur Motz, je crois qu'il y a des processus en place pour déterminer quels documents devraient être divulgués de façon appropriée. Il y a des questions de secret professionnel de l'avocat, par exemple. Ce sont des domaines qui sont bien compris et respectés, et je sais que l'article 38 de la Loi sur la preuve au Canada décrit aussi très clairement comment on déterminerait si des renseignements liés à d'autres documents confidentiels pourraient être divulgués.
    Je respecte ces processus, monsieur Motz, et je respecte la loi.
    Merci beaucoup.
    Monsieur le ministre, lorsque vous étiez chef du Service de police de Toronto en 2010, vous aviez près de 20 000 policiers supplémentaires à votre disposition pendant le sommet du G20. Ce soutien vous a été fourni — financé et organisé — par le gouvernement fédéral.
    Ici, à Ottawa, nous avons accueilli l'ex‑chef de police Sloly, qui a témoigné devant le Comité, et les médias ont révélé qu'il ne demandait au gouvernement fédéral que 1 800 agents, soit environ le dixième de ce que l'on vous avait fourni à Toronto.
    Pourquoi n'avez-vous pas mis l'accent sur la prestation de ces ressources au lieu d'invoquer des pouvoirs extraordinaires sans précédent dans la Loi sur les mesures d'urgence?
    Je tiens à préciser que la planification du sommet du G20 à Toronto avait été menée par la GRC et s'est déroulée sur plusieurs mois, ce qui a coûté très cher au gouvernement fédéral de l'époque. Tous les agents dont vous avez parlé — enfin, pas tous, à proprement parler — étaient disponibles pour maintenir l'ordre public à Toronto, mais c'était un événement planifié, alors qu'il s'agissait plutôt d'une perturbation spontanée de l'ordre public à Ottawa.
    En passant, monsieur Motz, je pense que vous savez qu'il y avait des agents...
    Non, je ne suis pas d'accord.
    Vous saviez des semaines à l'avance que cet événement avait été prévu. Le Service de police d'Ottawa et les fonctionnaires d'Ottawa ont tous participé à la planification du positionnement et des endroits où ils devaient stationner. Vous étiez au courant, n'est‑ce pas?
    Si vous me le permettez, monsieur Motz, je pense que vous savez que les services de police de l'Ontario, la GRC et la Police provinciale de l'Ontario fournissaient, dès le début de cet événement, des ressources policières à la Ville d'Ottawa pour aider à maintenir l'ordre public, mais il est clair que l'on n'a pas réussi à résoudre les problèmes. Il n'a pas été possible de déplacer ces véhicules, particulièrement aux postes frontaliers, même si la Police provinciale de l'Ontario et d'autres services de police se trouvaient à Windsor...
     Merci, monsieur le ministre, mais c'est à mon tour de poser des questions. En fait, je crois que vous avez déclaré le 13 février aux médias nationaux que la non-application de la loi dans la capitale nationale était « inexplicable ».
    Vous étiez au centre des discussions pour avoir invoqué la Loi sur les mesures d'urgence. Avant la décision de déclarer cette urgence d'ordre public, vous a‑t‑on informé qu'elle était proposée sur la recommandation des organismes d'application de la loi?
    Je ne suis au courant d'aucune recommandation des organismes d'application de la loi. Bien honnêtement, c'était une décision du gouvernement. C'était une décision du gouvernement, même si je pense que nous avons, à juste titre, la responsabilité de consulter nos fonctionnaires et les diverses administrations et d'autres qui ont le pouvoir de contester.
    Comme vous vous en souviendrez, avec la loi...
    Si je vous comprends bien, les forces de l'ordre n'ont pas fourni de conseils ou de recommandations pour invoquer la loi, comme le ministre Mendicino le dit aux Canadiens depuis quelques mois.
    Je serais heureux de répondre à votre observation, si vous me le permettez, monsieur Motz...
    Je suis désolée. Le temps de M. Motz est écoulé.
    Nous y reviendrons peut-être.
    Monsieur Naqvi, vous avez la parole.
    Eh bien, pourquoi ne pas y revenir tout de suite? Pourriez-vous préciser votre pensée?
    Merci beaucoup.
    Les consultations que j'ai eues avec les forces del'ordre portaient sur l'exercice de leurs fonctions en vertu des règlements municipaux, des lois provinciales et du Code criminel. Elles avaient clairement des difficultés à atteindre l'objectif légitime de rétablir l'ordre public à Ottawa, de protéger la population de la ville et d'ouvrir ces corridors commerciaux vitaux qui étaient bloqués. Les forces de l'ordre avaient clairement du mal à le faire, et il me fallait comprendre pourquoi. J'ai posé un certain nombre de questions aux responsables policiers sur la façon dont leurs forces s'acquittaient de leurs fonctions et sur les obstacles qu'elles rencontraient pour faire leur travail.
    Avant d'invoquer la Loi sur les mesures d'urgence, le gouvernement doit notamment veiller à ce qu'aucune autre loi du Canada ne puisse s'appliquer dans ces circonstances. Je pense qu'il était absolument essentiel et approprié de consulter les forces de l'ordre pour comprendre pourquoi elles n'étaient pas en mesure d'atteindre cet objectif légitime afin que nous puissions, en fonction des renseignements qu'elles nous fournissaient, prendre des décisions sur ce qui leur permettrait de rétablir l'ordre, de rétablir la paix, d'ouvrir ces corridors commerciaux et de mettre fin à ce qui était clairement une urgence nationale.

  (2020)  

    Vous soulevez un très bon point et je me suis posé la même question. Lorsqu'on examine le décret et le règlement pris en vertu de la Loi sur les mesures d'urgence, on constate qu'il s'agit d'un ensemble de pouvoirs très précis, d'une portée presque « chirurgicale »; c'est le mot que j'ai utilisé.
    Comment le gouvernement et le Cabinet ont-ils décidé quels pouvoirs étaient nécessaires pour mettre fin à l'occupation d'Ottawa et aux barrages aux postes frontaliers?
    C'est une question très importante. Nous avons examiné très attentivement ce qui se passait à Ottawa, à Windsor, à Coutts, en Alberta, et partout au pays. Nous avons pris une décision, en nous fondant sur les renseignements que nous transmettaient nos fonctionnaires et les forces de l'ordre locales, au sujet des défis auxquels ils faisaient face.
    Vous remarquerez dans ces dispositions, par exemple, que de nombreuses administrations nous ont dit qu'elles étaient pratiquement dans l'incapacité d'obtenir les dépanneuses dont elles avaient besoin pour évacuer les gros camions lourds qui étaient utilisés dans les blocages. Ces véhicules ont ancré les barrages et il était presque impossible pour la police de trouver une solution pacifique à ces manifestations en raison de la présence de ces camions, cependant elle n'était pas en mesure de les évacuer. Nous avons ajouté une disposition dans la loi qui nous permettait d'exercer un certain contrôle et de réquisitionner ces véhicules auprès des entreprises de remorquage. Je pense qu'en réalité ces entreprises étaient reconnaissantes que nous ayons pris cette mesure, parce que cela leur a permis de faire leur travail sans crainte de représailles.
    Nous avons donc inclus cette disposition. C'est une mesure extraordinaire. Je tiens à préciser que nous avons travaillé en étroite collaboration avec la province de l'Ontario qui quelques jours plus tôt, comme vous vous en souviendrez, avait invoqué sa propre loi sur les mesures d'urgence avec un certain nombre de mesures très importantes. Mais la province n'a pas réglé le problème auquel les forces de l'ordre étaient confrontées, alors nous l'avons fait dans le cadre de notre loi.
    Il y avait aussi des questions concernant la nécessité de désigner certaines zones à protéger afin que la police puisse prendre des mesures efficaces pour le faire. Par exemple, nous avons la Loi sur les ponts et tunnels internationaux qui protège le pont Ambassador, mais elle ne s'appliquait pas dans ces circonstances, parce que les barrages ont été érigés sur une route municipale. Nous devions avoir la capacité d'exercer un contrôle sur cette zone et de la désigner comme lieu à protéger en vertu de la Loi sur les mesures d'urgence. Cela n'était pris en charge par aucune autre loi fédérale, provinciale ou municipale.
    Pouvez-vous également nous parler du moment où vous avez invoqué la Loi sur les mesures d'urgence, non seulement pour gérer l'occupation d'Ottawa et les barrages routiers, mais aussi pour faire de la prévention? Vous avez fait allusion aux convois susceptibles de se diriger vers d'autres postes frontaliers et que le gouvernement avait également à l'esprit lorsqu'il a invoqué ces pouvoirs.
     Oui, monsieur. Tout d'abord, il y avait un lien évident entre les manifestations et les blocages qui se déroulaient ici à Ottawa d'une part, et, pour parler clairement, les personnes qui aidaient la manifestation par l'entremise de collectes de fonds et d'autres activités ainsi que les porte-parole de la manifestation d'autre part. Nous voyions ces convois roulant, et ils surgissaient à un certain nombre de points d'entrée. À mon avis, le choix de ces points d'entrée a représenté une menace très importante pour la sécurité nationale, parce qu'il s'agit d'infrastructures essentielles. Ces corridors de transport, ces routes de ravitaillement essentielles, le lien avec le secteur manufacturier en Ontario et dans d'autres régions du Canada sont des infrastructures essentielles pour notre pays.
    Nous pensions qu'il était nécessaire de mettre fin aux blocages à Ottawa et de mieux protéger tous ces points d'entrée en raison des problèmes que les forces de l'ordre avaient rencontrés pour les maintenir ouverts.
    Nous avons eu quelques succès. Par exemple, à la suite d'une enquête de la GRC, un certain nombre de personnes ont été arrêtées pour des crimes très graves. Le barrage a été levé à Coutts, mais il a persisté à Emerson et sur l'autoroute du Pacifique. Il a fallu sept jours pour ouvrir le corridor à Windsor, mais nous recevions de solides renseignements, et, franchement, les manifestants ont dit haut et fort qu'ils allaient se rendre au pont Blue Water à Point Edward. Ils voulaient se rendre au Peace Bridge. Ils étaient menaçants, et nous estimions que ces points d'infrastructure essentiels étaient également en péril. Des mesures préventives ont été prises pour décourager ces actions et pour le faire d'une manière qui ne nécessitait pas le recours à une force écrasante. Il s'agissait plutôt de créer de fortes désincitations à la perturbation durable des infrastructures essentielles, ce qui constitue une urgence nationale.
    Monsieur le ministre, je suis désolé, mais le temps de M. Naqvi est écoulé.
    Nous allons passer à M. Fortin.

[Français]

    Je vous remercie, madame la présidente.
    Bonjour, monsieur Blair.
    Monsieur Blair, je vous remercie de votre témoignage. Vous êtes peut-être l'un de ceux qui ont été les plus clairs jusqu'à maintenant, et j'en suis ravi.
    Nous nous entendons sur le fait que le convoi qui est venu bloquer la rue Wellington à Ottawa était déjà annoncé depuis un certain temps. Un article paru dans Le Nouvelliste le vendredi 20 janvier 2022, soit une semaine avant l'arrivée du convoi, disait que:
[...] vendredi de la semaine prochaine, les camionneurs se réuniront avant l'aube aux postes frontaliers de Saint‑Théophile dans Chaudière‑Appalaches, de Stanstead en Estrie et de Saint‑Bernard‑de‑Lacolle, en Montérégie, avant de se regrouper dans le secteur de l'autoroute 40 à Vaudreuil, à l'ouest de Montréal, pour prendre la route d'Ottawa.
Des camionneurs en colère doivent aussi provenir ce jour-là d'autres provinces canadiennes. La manifestation à Ottawa devrait culminer vers midi, selon ce qui est prévu.
    Dans les journaux, on prévoyait au moins une semaine d'avance la venue à Ottawa d'un convoi qui regroupait beaucoup de camions d'un peu partout au Canada, et même des États‑Unis.
    Vous êtes ministre à cette époque. Qu'est-ce qui se passe au Conseil des ministres? Quelqu'un dit-il qu'il faudrait faire quelque chose, qu'il faudrait empêcher ce qui s'en vient?

  (2025)  

[Traduction]

    Je pense que c'est une précision importante en matière de responsabilité. Tout d'abord, des manifestations légales et pacifiques ont lieu tous les jours au Canada. En vertu de la Constitution et de la Charte des droits et libertés, les Canadiens ont le droit de participer à des manifestations légales et pacifiques. Dans tous les cas, il incombe à la police de surveiller ces événements et de faciliter les manifestations licites et pacifiques, ainsi que de maintenir l'ordre public et de veiller au maintien de la primauté du droit et de la sécurité publique.
    Je connaissais la compétence de la police, parce qu'il s'agissait d'un événement annoncé publiquement, mais je ne crois pas, monsieur Fortin, que la police ait eu pleinement conscience de sa nature. Sauf votre respect, il ne s'agissait pas seulement d'une manifestation, mais d'un blocage. C'était un campement, et il était fortifié par ces gros camions. Quand les manifestants sont arrivés, mes conversations avec les forces de police ont révélé que cela ne correspondait pas à ce qu'elles avaient prévu. Les forces de l'ordre étaient prêtes à surveiller une manifestation, mais cela s'est rapidement transformé en quelque chose d'autre. C'est devenu une occupation.

[Français]

    Je suis désolé de vous interrompre, monsieur le ministre. Je ne veux pas être impoli, mais vous savez que notre temps de parole est limité.
    Dois-je comprendre que, quand le Conseil des ministres a vu que ce convoi s'en venait sur la Colline du Parlement, à Ottawa, il a décidé de ne pas s'en mêler parce que cela relevait du Service de police d'Ottawa?
    À aucun moment, le Conseil n'a réfléchi à ce qu'il pouvait faire pour empêcher la venue du convoi.
    Est-ce vraiment le cas?

[Traduction]

    Comme tous les Canadiens, j'ai des opinions, mais je suis également très conscient du fait que ma responsabilité de ministre n'est pas de diriger la police de quelque façon que ce soit — en particulier pour ce qui concerne la compétence de la police, qui est régie par une loi provinciale et non par le gouvernement fédéral.

[Français]

    Nous parlons quand même de la Colline du Parlement, du Parlement du Canada. Une semaine d'avance, des camionneurs disent qu'ils s'en viennent bloquer le Parlement, et vous, vous dites que cela relève du Service de police de la Ville d'Ottawa.
    Est-ce bien cela?

[Traduction]

     Si vous me le permettez, en fin de compte c'est la responsabilité de la police compétente, mais elle a toute la capacité... C'est souvent le cas. À ma connaissance, il existe de solides relations de collaboration — parce que j'en ai fait partie par le passé dans un rôle différent — entre tous les services de police au niveau municipal, provincial et fédéral. Ils travaillent ensemble et s'entraident.
    Monsieur Fortin, je ne crois pas qu'il soit approprié que le gouvernement ou qu'un politicien donne des directives à la police sur la façon de gérer cet événement. Nous nous assurons qu'elle dispose des ressources et des pouvoirs dont elle a besoin, mais c'est à elle de prendre ces décisions.

[Français]

     Qu'arriverait-il si cela se reproduisait, monsieur Blair?
    Supposons que, vendredi de cette semaine, des journaux annoncent que, dans une semaine, plusieurs camions viendront bloquer la rue Wellington et le Parlement.
    Dois-je comprendre que vous laisseriez la Police provinciale de l'Ontario et le Service de police d'Ottawa s'en occuper et que vous ne vous en mêleriez pas?
    N'avez-vous aucun plan pour empêcher que cela arrive? Ai-je raison de dire qu'aucune autre mesure ne serait prise et que ce serait comme en février dernier?

[Traduction]

    Non. Permettez-moi d'être très clair.
    Tout d'abord, je suis convaincu que les responsables des forces de l'ordre et de la sécurité sur la Colline du Parlement ont tiré des leçons de ce qui s'est passé. Ils ont vu les difficultés qu'ils ont rencontrées. Je suis convaincu qu'ils réagiront de façon appropriée.
    Je sais aussi que des discussions importantes ont lieu au Parlement et au comité de la procédure, par exemple. D'autres travaux sont en cours pour voir comment nous pourrions peut-être gérer plus efficacement l'ensemble de la Colline parlementaire.

[Français]

    Il y a effectivement des démarches en cours et des comités se penchent sur le sujet afin que nous soyons mieux préparés à l'avenir, mais, au gouvernement, il n'y a rien de prévu.

[Traduction]

     Monsieur Fortin, je m'excuse. Vos cinq minutes sont écoulées.

[Français]

    Je vous remercie, madame la présidente.
    Je vous remercie, monsieur Blair.

[Traduction]

    Monsieur Green, vous avez cinq minutes.
    Monsieur le ministre, vous êtes avec nous aujourd'hui en qualité de ministre de la Protection civile. Quand avez-vous pris connaissance de la menace à la sécurité et quand les préparatifs ont-ils commencé officiellement?

  (2030)  

    Tout d'abord, nous savions, monsieur Green, qu'il y aurait une manifestation. Cette manifestation s'est rapidement transformée en bien autre chose qu'une manifestation légale et pacifique. Il y avait des éléments de criminalité et d'occupation, et il y avait la présence de ces véhicules.
    Nos fonctionnaires ont continué de nous tenir régulièrement au courant des efforts déployés par les forces de l'ordre pour régler le problème.
    Monsieur le ministre, quand avez-vous appris qu'il y avait une menace à la sécurité? Nous avons des rapports publics selon lesquels le Centre intégré d'évaluation du terrorisme donnait des séances d'information sur la participation potentielle d'extrémistes motivés par des raisons idéologiques. La Commission de la capitale nationale et le Service de police d'Ottawa ont échangé des courriels au sujet de la nature de cet événement.
    À titre de ministre de la Protection civile, quand avez-vous appris que cela pouvait constituer une menace pour la sécurité? Quand avez-vous commencé vos préparatifs?
    J'aimerais connaître la date, monsieur.
    Je n'ai pas la date sous les yeux. Au tout début de cette manifestation — puis de l'occupation — grâce au travail de nos fonctionnaires, j'étais régulièrement informé. J'ai eu droit à des séances d'information de la part de nos fonctionnaires, et ils nous ont parlé de leur travail. Ils ne cherchaient pas à obtenir des directives opérationnelles à ce moment‑là, mais je recevais des renseignements sur des préoccupations en matière de sécurité liées à...
    Seriez-vous prêt à partager le contenu de ces séances d'information avec le Comité, monsieur, pour que ce soit clair? Nous pourrions peut-être les examiner à huis clos.
    Malheureusement, monsieur Green, il s'agissait pour moi de séances d'information verbales. Je ne peux que vous faire part de mes souvenirs.
    Ne prenez-vous pas de notes? Vous qui avez été policier pendant des décennies, ne prenez-vous pas des notes détaillées sur vos réunions?
    J'ai toujours été très prudent avec les notes ou les documents concernant les questions confidentielles.
    J'ai eu droit à des séances d'information verbales de la part de fonctionnaires, mais je ne prends pas de notes en lien à ces réunions.
    Est‑ce que votre personnel prend des notes, monsieur?
    Encore une fois, je n'ai pas cette information. Je n'ai pas de notes avec tout le respect...
    Vous ne savez pas si votre personnel prend des notes en votre nom lors des réunions? Vous ne le savez pas, monsieur?
    Je n'ai pas de notes concernant ces séances d'information. J'ai assisté à ces séances d'information...
    J'ai compris. Je vous demande maintenant si votre personnel a pris des notes.
    Je vais me renseigner, mais je ne crois pas, franchement, que mon personnel ait accès à certaines des séances d'information confidentielles auxquelles j'ai le privilège d'assister.
    D'accord. Ce ne serait pas dans le classeur qui se trouve devant vous. Aucun de ces résumés ou comptes rendus n'y figure. Le fait de pouvoir consulter vos notes pour vous rafraîchir la mémoire comme vous l'auriez fait lorsque vous...
    Malheureusement, monsieur Green, j'ai vérifié minutieusement. Aucune des notes dont vous parlez n'y figure.
    À titre plus officiel, le rapport adressé aux Chambres du Parlement dans le cadre des consultations sur la Loi sur les mesures d'urgence décrivait votre participation à plusieurs discussions préalables à la déclaration. Dites-vous qu'il n'existe pas de notes sur les discussions qui se sont déroulées dans le cadre des consultations officielles sur la Loi sur les mesures d'urgence?
     Non. Je dis que je n'ai pas personnellement pris de notes au cours de ces consultations ou de ces discussions. Je ne parle que de moi et des notes qui seraient en ma possession. Je ne peux pas vous confirmer...
     Vous êtes ministre, monsieur. Vous avez du personnel. Sauf votre respect, ils vous doivent des comptes. Je vous demande donc, puisque vous n'assumez pas cette responsabilité à titre personnel, si vous allez assumer la responsabilité ministérielle de fournir au Comité les notes prises par quiconque aux réunions de consultation sur la Loi sur les mesures d'urgence qui ont mené à l'invocation de la Loi?
    Sauf votre respect, monsieur Green, j'assume l'entière responsabilité de mon travail de ministre et de ma propre conduite, et, comme je vous l'ai dit — et je vous l'ai dit très franchement —, j'ai assisté à un certain nombre de séances d'information. Je n'y ai pas personnellement pris de notes, et je ne peux donc pas vous les remettre. Mais je me souviens très bien de ces séances d'information, et je suis prêt à en partager la teneur s'il y a lieu.
    Vous avez entendu ma question, n'est‑ce pas?
    Mais votre question était fondée sur une prémisse qui, à dire vrai, était erronée, et j'estime nécessaire de la corriger. Si vous voulez modifier votre demande maintenant...
    Je le ferai par voie de motion à une date ultérieure, de façon plus officielle.
    Des militaires ont-ils participé aux opérations liées au G20, monsieur?
    À ma connaissance, non...
    Il n'y avait pas de militaires...
    Je suppose que vous parlez des réunions du G20 en 2010, à Toronto.
    En tout cas, pas dans le cadre du maintien de l'ordre ou d'une fonction les mettant en contact direct avec la population...

  (2035)  

    Je suis sûr que vous êtes au courant de l'aide apportée aux autorités civiles...
     Votre temps de parole est écoulé. Pouvez-vous attendre le prochain tour?
    Certainement.
    Monsieur Fortin, voulez-vous assurer la présidence, s'il vous plaît?

[Français]

[Traduction]

    C'est une bonne chose que je prenne des notes.
    Des voix: Oh, oh!

[Français]

    Madame Boniface, vous avez la parole.

[Traduction]

    Monsieur le ministre, j'aimerais revenir sur le rôle des provinces. Nous venons de milieux semblables, et je me pose des questions sur le rôle de la province et m'étonne des lacunes des dispositions d'urgence qui ont rendu nécessaire l'invocation de la loi fédérale.
    J'essaie de comprendre exactement le rôle de la province du point de vue de son propre décret d'urgence.
    J'ai une note devant moi. Je vais vous en lire une partie, si vous le permettez, sénatrice.
    Tout d'abord, le 11 février, le premier ministre de l'Ontario a déclaré l'état d'urgence à l'échelle de la province, en raison de « la perturbation de l'infrastructure de transport » et « d'autres infrastructures essentielles » partout dans la province. Des ordonnances ont été rendues au sujet des autoroutes de la série 400, des aéroports, des hôpitaux, etc., outre une ordonnance interdisant un certain nombre d'activités, dont les déplacements à destination et en provenance d'infrastructures essentielles.
     À ce que je sache, et cela me paraît assez important, le décret d'urgence n'a pas créé de pouvoir d'arrestation. Il n'a pas abordé la question des dépanneuses. Il ne nous permettait pas de réserver des espaces pour les activités policières nécessaires à la protection des lieux. Il n'y était pas question de mesures financières susceptibles de régler efficacement certains des problèmes auxquels nos agents de suivi financier étaient confrontés.
     Lorsque l'administration provinciale a jugé bon de rendre des ordonnances, elle l'a fait. Soit dit en passant, on y prévoyait un certain nombre d'amendes qui, à ma connaissance, n'ont pas vraiment été appliquées. Mais je crois que les forces de l'ordre avaient besoin de pouvoirs supplémentaires pour trouver une solution pacifique à la situation et pour faire face à ce que nous pensions très sincèrement être une menace importante pour la sécurité nationale et, par conséquent, une urgence. Nous avons donc adopté des mesures qui n'étaient prévues ni dans la loi de réglementation en vigueur ni dans la déclaration d'urgence de l'Ontario.
    Ce choix me laisse encore perplexe.
    Je reviens à une question d'un de mes collègues sur les préparatifs en vue des réunions du G20. Vous avez dit que le délai était beaucoup plus court. Peut‑on dire, réflexion faite, que la situation ici à Ottawa était devenue telle que la capacité de la police locale et de la police provinciale était dépassée?
     Cela me paraît juste. Je pense que le service de police d'Ottawa n'avait manifestement pas les moyens de se débrouiller tout seul. Il a demandé de l'aide très rapidement. J'ai eu des conversations avec des responsables du maintien de l'ordre de toute la province qui ont envoyé des ressources, mais la situation les dépassait.
    À mon avis, les policiers savaient qu'il leur incombait d'essayer de régler la situation de façon pacifique. Ce qu'ils m'ont dit traduisait le souci sincère que leurs actes ne donnent pas lieu à des réactions violentes, et ils ont fait de leur mieux pour éviter cette violence. Nous avons également tenu compte des circonstances qu'ils décrivaient pour déterminer que nous serions en mesure d'adopter certaines mesures susceptibles de dissuader les fauteurs de troubles de poursuivre l'occupation d'Ottawa et des points d'entrée cruciaux à nos frontières.
    Franchement, cela faisait aussi partie de ma réflexion sur les mesures qu'il faudrait prendre pour aider les forces de l'ordre à trouver une solution pacifique.
    Le commandement intégré était en place depuis un certain temps. Y a‑t‑il eu un moment où vous ou d'autres personnes, à Sécurité publique ou ailleurs au gouvernement, avez envisagé de confier exclusivement à la GRC la responsabilité des opérations à Ottawa?
    Cela ne nous était pas possible en vertu des pouvoirs législatifs régissant les services de police à Ottawa et en Ontario. Je pense que les responsabilités sont très clairement énoncées.
    Par ailleurs, ce n'est pas une responsabilité fédérale, si je peux, en tout respect, me permettre de le rappeler. La prestation de services de police suffisants et efficaces incombe d'abord et avant tout à la commission locale des services de police. Et, au final, la responsabilité en revient au solliciteur général de la province de l'Ontario.
    J'ai eu un certain nombre de conversations avec le solliciteur général et avec des chefs de police au sujet de l'aide fournie dans la province et ailleurs. Nous avons discuté, par exemple, de la situation sur le pont de Windsor. En fait, je connais le commissaire de la PPO, tout comme vous. C'est un chef de police très expérimenté et compétent. J'ai beaucoup de respect et de confiance à l'égard des dirigeants de tous les services de police qui sont venus à la rescousse, mais ils affrontaient des situations auxquelles les pouvoirs juridiques en vigueur — à l'échelle municipale, provinciale et fédérale — ne leur permettaient pas de trouver une solution pacifique.
    C'est sur la foi de ces renseignements que nous avons pris des décisions sur ce qu'il fallait faire pour faciliter cette solution pacifique.

  (2040)  

    Je crois que mon temps de parole est écoulé.
     Oui, exactement à temps. Je suppose que vous le vérifiez vous-même.
    Sénateur Carignan, vous avez cinq minutes.

[Français]

     Je vous remercie, madame la présidente.
    Monsieur le ministre, votre collègue du ministère de la Sécurité publique nous a dit avoir invoqué la Loi sur les mesures d'urgence sur les conseils des forces de l'ordre.
    En avez-vous été témoin? Avez-vous entendu les conseils des forces de l'ordre?
    Avez-vous entendu des représentants des forces de l'ordre demander l'application de la Loi sur les mesures d'urgence?

[Traduction]

    Non, monsieur.
    Franchement, j'aurais été très surpris que la police fasse une recommandation stratégique ou demande une autorisation législative. Dans mes conversations avec les responsables du maintien de l'ordre — et j'en ai eu un certain nombre directement avec eux —, je cherchais à connaître leurs difficultés. Il y avait des problèmes de ressources, mais ils n'arrivaient pas à concrétiser leur finalité légitime.

[Français]

    C'était à cause des dépanneuses. C'est toujours l'histoire des dépanneuses. Les forces de l'ordre étaient dans l'impossibilité de remorquer les véhicules.
    Est-ce exact?

[Traduction]

    La question des dépanneuses est un bon exemple. J'ai demandé au chef, ici, et j'ai aussi demandé à la GRC, pourquoi ces véhicules n'étaient pas identifiés et remorqués. Que je sache, c'est une mesure ordinaire pour la police, et c'est ce qui se fait dans d'autres administrations, mais le chef de la police d'Ottawa s'est dit sincèrement inquiet qu'elle puisse passer pour une provocation et entraîner de la violence. Il a également exprimé la crainte sincère que ses policiers ne soient mis en danger.

[Français]

    De quelle manière la Loi sur les mesures d'urgence a-t-elle permis de faciliter le remorquage des véhicules qui étaient à Ottawa?
    Quel est le pouvoir supplémentaire énoncé dans la Loi sur les mesures d'urgence ou dans le Décret qui a permis aux forces de l'ordre de remorquer les véhicules?
    En vertu de la législation actuelle, un policier peut, sans avoir recours à la Loi sur les mesures d'urgence, obliger un chauffeur de dépanneuse à faire son travail. Si le chauffeur refuse d'obtempérer, il peut être accusé au criminel. Le Code criminel accorde déjà aux agents le pouvoir d'obliger le remorquage de véhicules.
    Qu'est-ce que la Loi sur les mesures d'urgence a changé à cet égard?

[Traduction]

    Les services de police de toutes les administrations du pays ont des contrats avec des entreprises de remorquage. Ils ne sont pas propriétaires des dépanneuses dans la grande majorité des provinces. Ils souscrivent des contrats. Les entreprises sous contrat possèdent les types de véhicules qui permettent de remorquer de gros semi-remorques.
    Malheureusement, dans toutes les administrations... Je vais vous parler d'une lettre que j'ai ici — j'en ai apporté des copies — et que m'a envoyée mon homologue de l'Alberta, le ministre McIver. Il dit ceci, et je pense que c'est très important: « Malgré tous nos efforts pour régler la situation, la Gendarmerie royale du Canada [...] a épuisé toutes les alternatives locales et régionales pour atténuer les interruptions de service depuis une semaine à cet important poste frontalier. » Il nous demandait de l'aide.

[Français]

    Si vous ne savez pas si les services policiers, les forces de l'ordre, ont conseillé d'utiliser la Loi sur les mesures d'urgence, savez-vous qui a conseillé au gouvernement de le faire?

[Traduction]

     Non. Tout d'abord, monsieur, la police ne m'a pas conseillé de recourir à la Loi sur les mesures d'urgence. Les policiers ont décrit très clairement leurs difficultés.
    J'ai entendu. J'ai compris.
    Bien, monsieur.
    Il y a eu plusieurs discussions entre collègues. Je peux vous dire que, compte tenu des conversations que j'ai eues et de ce que j'ai appris des difficultés des responsables du maintien de l'ordre, je n'ai pas...

[Français]

    Est-ce vous qui avez eu l'idée d'invoquer la Loi sur les mesures d'urgence?

[Traduction]

    Pardon?

[Français]

    Est-ce vous qui avez eu l'idée d'invoquer la Loi sur les mesures d'urgence?

[Traduction]

    Très franchement — et je vous dirai que je n'étais pas en train de suggérer d'invoquer la Loi sur les mesures d'urgence —, j'estimais nécessaire d'envisager toutes les options légales pour déterminer si l'urgence atteignait le seuil juridique. Il me semblait important de l'envisager, tout comme d'examiner la question de savoir s'il existait des pouvoirs qui, à ce moment‑là, n'étaient pas prévus dans une loi au Canada pour aider la police et si ces mesures étaient à notre portée.
    Il fallait aussi se demander si ces mesures contribueraient effectivement à une résolution pacifique de la situation.

  (2045)  

[Français]

    Qui vous a suggéré de geler les comptes bancaires?

[Traduction]

    Je ne me souviens pas de cette recommandation.
    Si vous me permettez d'ajouter quelque chose... C'est une question de sémantique, mais personne n'a recommandé de saisie.
    L'hon. Claude Carignan: [Inaudible]
    L'hon. Bill Blair: Non, monsieur, si vous permettez, c'est une précision importante, parce que la capacité de geler un compte est...
    Monsieur le ministre, si je gelais votre compte pendant trois jours, vous diriez peut-être que c'est une saisie.
    Si vous me permettez, sénateur, je pense que la notion de « saisie » est bien définie en droit criminel et en droit civil au Canada en ce qui concerne la confiscation.
    Certes.
    Cela justifierait une saisie. Le fait de geler ces avoirs...
    Je pense que la Cour suprême ne serait pas d’accord avec vous.
    Sauf votre respect, en droit, il y a une différence très importante entre geler un bien et saisir un bien, et les procédures juridiques dans les deux cas sont très différentes. Il existe des processus juridiques très importants et compliqués...

[Français]

    Je ne vous contredirai pas sur ce point. Je peux cependant vous garantir que, quand vous gelez un compte de banque, cela constitue une saisie, selon la Cour suprême.

[Traduction]

    Sénateur Carignan, votre temps de parole est écoulé. Merci.
    Sénateur Harder, c'est à vous.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Merci de votre visite, monsieur le ministre.
    Monsieur le ministre, je tiens à vous remercier de votre franchise, non seulement ce soir, mais tout au long de l’événement. Je remarque, par exemple, qu’au début du processus d’observation de ce mouvement d'occupation, vous avez dit que la police devait faire son travail. Ce soir, vous avez reconnu que les forces de l’ordre n’étaient pas en mesure de trouver une solution pacifique à ce problème.
    Nous avons eu le plaisir d'observer tout cela à Ottawa, et pendant plusieurs jours. Pourquoi a‑t‑il fallu tant de temps au gouvernement pour en arriver à la conclusion qu’il fallait agir?
    Tout d’abord, nous avons toujours pensé qu'il fallait intervenir, mais que c’était le rôle du corps policier compétent. Je tiens à préciser, comme vous pouvez l’imaginer, que j’ai beaucoup de respect pour l’institution policière et la délimitation des responsabilités en droit canadien.
    Nous avons donc donné toutes les occasions possibles et offert tout le soutien et toutes les ressources nécessaires pour aider la police à trouver une solution efficace, mais elle nous a dit très clairement qu’elle n'y arriverait pas et qu’elle ne pourrait pas réussir sans aide.
    Elles ne nous a pas indiqué le genre d'aide à lui apporter, mais nous a parlé des problèmes qu’elle avait.
    Quand le gouvernement de l’Ontario a élaboré son décret d’urgence, vous a‑t‑il consulté quant à ce qu'il devrait y inclure?
    J'étais au courant qu’il y songeait, mais nul ne m’a posé la question personnellement. Je n’ai pas été personnellement consulté à ce sujet.
    En un sens, ce qui devait être inclus ou laissé de côté relevait de sa propre décision.
    Bien sûr, c’était sa décision et son autorité, et je n’ai pas été consulté sur ce qu’il inscrirait dans sa loi.
    Il s'est produit une concordance intéressante d'événements avec l’imposition de l’ordonnance et le survenu à la tête du corps policier compétent.
    Quel lien faites-vous entre la Loi sur les mesures d’urgence et le changement survenu à la tête de la police qui a mené à ce qui a été une intervention policière très réussie?
    Vous me posez‑là une question difficile, sénateur Harder.
    Je pense que le fait d'invoquer la Loi sur les mesures d’urgence et d'avoir pris des mesures en conséquence était nécessaire. Je pense très honnêtement que le principe de la nécessité absolue est important. Je suis convaincu qu’il y avait un état d’urgence et qu’il y avait une menace très réelle à notre sécurité nationale, particulièrement dans le cas des infrastructures essentielles, en raison de l'action des manifestants et de leur occupation des lieux.
    Je crois également que l’octroi de ces nouveaux pouvoirs a permis de faire un certain nombre de choses. Je pense que cela a donné à la police les outils voulus pour régler les problèmes qu’elle n’avait pas pu régler jusqu’à ce moment‑là. En outre, je pense que cela a envoyé un message très clair à ceux qui se livraient à cette activité illégale que le jeu était terminé et qu’il y aurait des conséquences à leurs actes. Nous l’avons vu. Nous en avons été témoins. Beaucoup d’entre eux ont simplement plié bagage et sont partis. Quant aux autres, la police avait encore un travail à faire et elle l’a fait. Soit dit en passant, je profite de l’occasion pour féliciter les policiers pour la façon très professionnelle dont ils ont agi.
     Je suis d’accord.
    J’ai une dernière petite question. J’aimerais que vous me confirmiez, d’après votre expérience policière et suivant votre rôle de ministre, qu’il serait inapproprié que la police demande au gouvernement d’invoquer la loi. Ce n’est pas à elle de dicter au gouvernement quelles mesures d’urgence il devrait prendre.

  (2050)  

    Non, je ne crois pas qu’il aurait été approprié que les forces de l’ordre fassent ce genre de demande, et elles ne l’ont pas fait. En revanche, elles ont répondu honnêtement à nos questions sur les défis auxquels elles faisaient face. Ces renseignements ont finalement éclairé notre décision...
    C’est une obligation de consulter...
    L'hon. Bill Blair: ... mais ce n’était pas fondé sur la demande de la police. Oui, exactement.
    L'hon. Peter Harder: Merci.
    Merci, sénateur Harder.
    Nous allons passer au sénateur White.
     Merci beaucoup, madame la présidente, et merci au ministre pour sa présence.
    J’ai quelques brèves questions.
    Nous avons parlé de l’invocation de la loi provinciale sur les mesures d’urgence et du fait que — pour reprendre le résumé que vous en avez fait — celle‑ci a eu peu ou pas d’impact. Avez-vous discuté avec la province de la possibilité de retourner à la planche à dessin pour ajouter certains outils qui, selon vous, manquaient la première fois où la loi a été invoquée?
    Non, sénateur, je n’ai pas eu cette conversation avec la province.
    Croyez-vous que le gouvernement provincial aurait dû en discuter? De toute évidence, cela n’a pas fonctionné. La proportionnalité est un élément important d’une loi d’urgence, qu’elle soit provinciale ou fédérale. De toute évidence, les outils prévus n’étaient pas proportionnels au défi, au point de n'avoir aucun impact. Croyez-vous que la province aurait dû tenir davantage compte du fait que cela n’a eu que peu ou pas d’impact sur la levée des barrages?
     Je crois que le gouvernement provincial a agi de bonne foi, qu’il a pris les mesures nécessaires et qu’il a invoqué les pouvoirs qu’il pensait être en droit d’adopter en vertu des lois provinciales. Je crois également qu’il y a un certain nombre de choses qui n’étaient peut-être pas accessibles à la province et qui sont devenues notre responsabilité.
    Je tiens à souligner — et je sais que vous le savez déjà, sénateur, tout comme votre comité — qu’avant que nous invoquions notre loi fédérale et la Loi sur les mesures d’urgence, nous avons eu des consultations avec les premiers ministres des provinces de tout le pays, y compris avec celui de l’Ontario.
     Je pense qu’il était question de déterminer ce que serait un recours proportionnel et approprié aux pouvoirs dont disposent les divers ordres de gouvernement. Je pense que nous avions pris l’engagement commun de trouver une solution pacifique, et tout autant Queen's Park qu'Ottawa étaient prêts à prendre toutes les mesures qui leur permettraient d'y parvenir.
    Merci.
    Des représentants de la GRC nous ont dit qu’il y avait un plan en place pour faire évacuer le convoi. En fait, le sous-commissaire nous a dit qu’il croyait que ce plan aurait permis de chasser le convoi, d'éliminer le siège ou les barrages du centre-ville.
    Avez-vous eu l’occasion d’examiner ce plan avant d’invoquer la loi?
    Je n’ai pas personnellement pris part aux opérations policières. En fait, j’ai beaucoup de respect pour l’intégrité opérationnelle et l’indépendance de la police pour ce qui est de la prise de décisions. La police est régie par la primauté du droit, par la Charte des droits et libertés, et je m’attends à ce que ses interventions soient efficaces et proportionnelles.
    Nous avons constaté que, pendant un certain nombre de semaines, les forces de l’ordre, particulièrement ici à Ottawa, mais pas seulement, n’avaient pas été en mesure de résoudre rapidement cette paralysie des infrastructures essentielles au pays. Les barrages routiers à Windsor, par exemple, ont duré sept jours. Au bout du compte, la police a réussi à briser le siège, mais à un coût énorme non seulement pour l’économie du Canada, mais aussi pour les gens. Les travailleurs, qui étaient au ralenti quand leurs usines ont dû fermer, ont perdu des heures de travail. Ils ont perdu leur capacité de subvenir aux besoins de leur famille et de la nourrir.
    Ces barrages ont eu un impact très réel sur ces Canadiens.
    Si vous me le permettez, monsieur le ministre, avant d’invoquer la Loi sur les mesures d’urgence, n’aurions-nous pas dû jeter un coup d'œil sur les plans de la GRC? De toute évidence, la stratégie appliquée n'a pas fonctionné durant les premières semaines, mais la GRC, qui est un organisme fédéral, nous a dit qu’elle avait un plan qui, selon elle, aurait fonctionné quelques jours seulement avant que la Loi ne soit invoquée. Savez-vous si le ministre de la Sécurité publique, qui a un lien plus direct avec la GRC, a examiné ce plan pour voir si oui ou non...? Autrement dit, a‑t‑on estimé que ce plan serait un échec et qu’il fallait faire autre chose? Savez-vous si quelqu’un au gouvernement a vu ce plan?
     Je ne peux parler qu’en mon nom personnel, sénateur, mais je peux vous dire que je n’ai vu aucun plan qui aurait permis de mettre fin efficacement à ces sièges illégaux et aux énormes répercussions qu’ils ont eues sur cette collectivité et sur les Canadiens partout au pays. Je n’ai pas vu de plan qui aurait permis de régler efficacement ce problème.
    L’une des choses les plus importantes, et j’y reviens sans cesse, c’est que les gens ont pensé qu'il aurait été facile de faire venir les dépanneuses pour évacuer tous ces véhicules. En fait, ce n’était pas le cas. Il s'agissait de gros camions — et vous avez parlé de forteresse — nous étions face à un campement fortifié. L’incapacité des corps policiers de faire enlever ces camions a grandement nui à leur capacité de mettre fin à l'occupation des lieux et d’éliminer cette menace. Par conséquent, nous estimions que c’était quelque chose que nous devions faire.
    Un certain nombre d’autres mesures ont également été nécessaires pour désigner certains espaces aux fins des mesures d’application de la Loi, par exemple pour traiter de situations particulières où des gens amenaient des enfants dans ces zones, ce qui rendait le travail de la police très difficile et dangereux.

  (2055)  

     Si vous me permettez d’ajouter quelque chose, parce que le président va m’interrompre, avez-vous exprimé des préoccupations au sujet du maire d’Ottawa qui négociait avec des gens ayant participé à des activités criminelles, pour leur permettre d'occuper certains espaces et pour libérer d'autres terrains?
    Tout d’abord, je n’ai eu aucune conversation avec le maire au sujet des négociations qu'il a menées.
    Cependant, je dirais qu’à la suite de... Quand j’ai vu le document sur ce qui avait été convenu, soit le fait de permettre aux manifestants de lever leurs barrages routiers et d'interrompre leurs activités de protestation dans certains secteurs, pour les limiter à la rue Wellington et à la promenade Sir John A. Macdonald, je me suis dit que cela compliquerait les choses pour la police, parce qu'on pouvait interpréter cette manœuvre comme étant une autorisation donnée par le maire de se concentrer autour de la Colline.
     Monsieur le ministre, je crains que le temps soit écoulé. J'en suis désolé.
    Merci beaucoup, madame la présidente.
    Merci, monsieur le ministre.
     J’invoque rapidement le Règlement. Je regarde l’écran Zoom, et il semble que le greffier et l’interprète français ont peut-être encore leurs micros allumés, ce qui pourrait nous faire réagir. Il n’y a pas d’icône de sourdine sur leurs écrans, à moins qu’il n’y ait pas de micro.
    Je crois comprendre qu’il n’y a pas de micro.
    Que se passe-t‑il du côté de l’interprète français? On dirait que son micro ne se met pas en sourdine... Il y a un effet de Larsen. Cela fait deux ans et demi que je travaille sur Zoom et je n’ai jamais eu ce genre de double Larsen.
    Poursuivez avec M. Green, et nous allons étudier la question pendant ce temps.
    Nous allons entamer le tour suivant. J’aimerais avoir l’avis du Comité. Nous pouvons accorder quatre minutes à certains députés et trois minutes aux autres et nous avons assez de temps pour ce faire. Au lieu de faire un tour d’une minute à la fin, nous pourrions continuer pendant cinq minutes. Si les députés veulent partager leur temps avec d’autres, ils peuvent le faire. J’ai parlé à certains d'entre vous, mais je veux m’assurer que tout le monde est d’accord.
    Madame la présidente, je préférerais m’en tenir aux règles que nous avons établies pour ce comité, c’est-à-dire que le prochain tour devrait être de quatre minutes.
    C’est la motion dont nous sommes saisis, alors je crois comprendre que nous devons nous y conformer.
    Nous allons passer à M. Brock, pour quatre minutes.
    Bonsoir, monsieur le ministre. Je tiens à vous remercier sincèrement de votre présence aujourd’hui.
    Dans la foulée des observations du sénateur Harder, je tiens à vous remercier sincèrement de votre franchise et de votre disponibilité à répondre convenablement à toutes les questions qui vous ont été posées. Vous ne vous êtes pas montré agressif et vous nous avez donné des réponses détaillées.
    Tout le processus vise à découvrir la vérité, à déterminer s’il était légalement justifié d'invoquer la loi. Contrairement à la vice-première ministre, qui a fait perdre 90 minutes d'un temps précieux au Comité, je vous en remercie sincèrement.
    Je commencerai toutefois par vous dire tout mon étonnement et toute ma confusion de constater qu’une personne de votre expérience au sein du gouvernement, une personne ayant votre expérience des services de police pendant plusieurs décennies, une personne ayant participé à l’invocation de pouvoirs d’urgence qui n’ont jamais été utilisés dans l’histoire de ce pays n'ait pas pris de notes. Je trouve cela absolument incroyable.
    Je vous pose carrément la question. Êtes-vous en train de dire au Comité que, dans vos échanges avec le Cabinet ou vos fonctionnaires, vous n’avez pas pris de notes? Vous n’avez jamais pris de notes, peu importe le nombre de réunions?
    C'est effectivement le cas, Monsieur Brock. Je ne prends pas de notes.
    Merci.
    Je vais vous exposer une série de faits qui, à mon avis, ont sérieusement miné la confiance des Canadiens à l’égard du gouvernement en ce qui a trait à la raison d’être de la loi. Je vais vous demander si vous êtes d’accord ou non.
     Le ministre Mendicino a dernièrement été la cible de critiques, à la Chambre et dans la presse, parce qu’il a dit très clairement que c’est sur l’avis d’organismes d’application de la loi non partisans qu'il a été décidé d'invoquer la loi. Nous savons maintenant que ni la GRC ni la police d’Ottawa n’ont demandé au gouvernement d’invoquer la loi, malgré ces affirmations.
    Êtes-vous d’accord ou pas?

  (2100)  

     Parce que je veux être très franc et direct avec ce comité, la police ne m’a pas demandé...
    Merci.
    Si vous me le permettez...
    Non, vous avez répondu à ma question.
    Mon temps est limité, monsieur le ministre. Malgré tout le respect que je vous dois, mon temps est limité.
    Entendons-nous, monsieur, c’est une question importante que vous avez posée.
    La police m’a fourni l’information à laquelle j’ai donné suite et que je croyais vraie, ce qui a éclairé ma décision subséquente d’appuyer la Loi sur les mesures d’urgence.
    Merci, monsieur le ministre.
     Le ministre Mendicino a également voulu faire croire que le « convoi de la liberté » avait tenté de mettre le feu à un appartement d’Ottawa après y avoir enfermé des résidents, ce qui, selon la police d’Ottawa, n’était pas vrai. Ce faisant, il a induit les Canadiens en erreur.
    Êtes-vous d’accord?
    En partie.
    Merci.
    Tout d’abord, je sais que ce n’était pas lié à la manifestation, mais je n’attribue aucun motif à qui que ce soit.
    Merci.
    Malgré les signalements d’armes à feu illégales dans les cabines de certains camionneurs ayant manifesté à Ottawa, aucune accusation n’a encore été portée contre eux.
    Malgré les allégations du ministre Mendicino selon lesquelles des manifestants auraient menacé des femmes d’agression sexuelle, aucune accusation d’agression sexuelle n’a encore été portée.
    Êtes-vous d’accord?
    Si vous me permettez d’apporter une précision, la GRC m’a informé que, dans le cadre de son enquête sur une partie des barrages routiers en Alberta, elle avait des renseignements fiables selon lesquels des armes à feu étaient présentes. Elle a ensuite mené une enquête et a porté des accusations.
    Cette affaire est maintenant devant les tribunaux, et je ne vais pas faire de commentaire parce que ce serait déplacé, mais dans ce cas, on a trouvé des armes à feu qui présentaient une menace importante pour la sécurité publique et pour la police chargée de l’enquête.
    C’était en Alberta.
    Aucune arme n’a été trouvée à Ottawa.
    Encore une fois, la police est mieux placée que moi pour vous fournir ces renseignements.
    Je n’ai pas tous les détails de ses enquêtes, et je ne vais pas faire de commentaires. Ce ne serait pas approprié de ma part.
    Merci, monsieur Brock.
    J’invoque le Règlement, monsieur le président.
    Le ministre vient de laisser entendre encore une fois que les armes trouvées à Coutts appartenaient à des manifestants, et ce n’est pas vrai. La GRC a dit très clairement que ce n’est pas vrai...
    J’invoque le Règlement, madame la présidente. Je ne crois pas qu’il y ait de débat...
    Je n’ai pas terminé.
    Ce n’est pas un rappel au Règlement. Quel est le rappel au Règlement? Est‑ce pertinent, sinon...
    M. Glen Motz: Je n’ai pas terminé.
    Laissez‑le terminer avant d’évaluer la situation.
    Puis‑je remplir ma fonction de présidente, s’il vous plaît?
    Monsieur Motz...
    Ce n'est pas un sujet à débat. Par respect, permettez-lui de terminer son rappel au Règlement.
    Monsieur Brock, nous allons permettre à M. Motz de parler.
    Merci, madame la présidente.
    Je pense qu’il est important que le Comité obtienne des renseignements exacts. Les Canadiens exigent reddition de comptes et transparence, mais il est fallacieux de laisser entendre, voire d'insinuer que les manifestants avaient un lien avec les armes à feu trouvées à Coutts...
    J’invoque le Règlement, madame la présidente...
    ... et la GRC l’a dit clairement...
    ... et ce député ne fait pas un rappel au Règlement, madame la présidente.
    La GRC a clairement indiqué qu’il s’agissait d’une organisation criminelle qui n’avait aucun lien avec les manifestants, alors ne laissez pas entendre le contraire.
    Nous en resterons là.
    Madame Bendayan, vous avez la parole.
    J’aimerais avoir une décision sur le rappel au Règlement, madame la présidente.
    Ce n’est pas un rappel au Règlement.
    Poursuivez.
    Madame la présidente, j’aimerais parler du même rappel au Règlement.
    Je viens d’indiquer qu’il ne s’agit pas d’un rappel au Règlement, et j’ai demandé à Mme Bendayan de continuer.
    Je demanderais donc que cette intervention soit rayée de la transcription, parce qu'on ne peut jouer la montre à coup de rappels au Règlement bidons visant à exprimer son désaccord avec les propos d’un témoin. C’est inapproprié, et je pense que M. Motz se place au‑delà de tout ça.
    Quand une déclaration est fausse, il faut la corriger. Sinon, que faisons-nous à la Chambre?
    Pouvons-nous commencer, madame Bendayan?
    Je suppose que nous pouvons nous entendre pour dire que nous ne sommes pas d’accord sur ce qu’est une fausse déclaration, monsieur Motz, mais je vous remercie d’avoir invoqué le Règlement.
    Madame la présidente, si nous sommes libres de faire ces interventions et si nous sommes prêts à contester la légitimité des déclarations entendue, alors je dois souligner que, tout à l'heure, M. Motz a déformé les propos de la ministre Freeland quand il a contesté sa déclaration, disant qu'elle avait été inexacte.

  (2105)  

    Je vous invite à prendre la parole.
    Allez‑y, madame Bendayan.
     Merci, madame la présidente.
    Merci beaucoup pour votre témoignage d’aujourd’hui, monsieur le ministre.
    J’aimerais savoir ce que vous pensez d’une lettre du gouvernement de l’Alberta datée du 5 février. Je me souviens d’avoir vu cette lettre, qui a été rendue publique, et de l’avoir lue à la Chambre. On y disait notamment que la GRC avait épuisé toutes les options locales et régionales pour atténuer les interruptions de service qui duraient depuis une semaine. La GRC demandait une aide urgente au gouvernement fédéral.
    Vous souvenez-vous de cette lettre, monsieur le ministre?
    Je me souviens de la lettre et, pour aider le Comité, j’en ai apporté des copies pour tous les membres, si vous voulez que je la dépose.
    Ah? Je ne savais pas. Oui, faites‑le donc.
    Avez-vous d’autres lettres ou communications de ce genre provenant d’autres provinces? Si vous avez quoi que ce soit d’autre à soumettre au Comité, je suis tout à fait ouvert à l'idée.
    J’ai aussi une lettre qui me semble pertinente. Elle est datée du 11 février et est adressée au premier ministre. J’en ai une copie, parce que j’étais en copie conforme. Elle vient du premier ministre du Manitoba, qui parle du corridor commercial essentiel, de l’ordre et de la fluidité de la circulation qui sont indispensables au maintien de la chaîne d’approvisionnement sur laquelle comptent tous les Manitobains.
    Merci, monsieur le ministre, et merci de nous avoir fourni ces copies.
    Que vous ont dit les provinces et les municipalités avant l’application de la Loi sur les mesures d’urgence? J’essaie de comprendre si ce qui a été demandé aurait pu être fourni par le palier fédéral sans que celui n'invoque la Loi sur les mesures d’urgence. Selon vous, pour répondre aux demandes qui vous ont été adressées, fallait‑il nécessairement passer par la Loi sur les mesures d’urgence ainsi que les règlements et les pouvoirs s’y rattachant?
    Merci.
    Si je puis me permettre, l’une des choses que le ministre de l’Alberta demandait était... Il essayait d’avoir accès à des dépanneuses. Il ne pouvait pas les obtenir des entreprises de remorquage de l’Alberta qui ne voulaient tout simplement pas intervenir, pour un certain nombre de raisons que le ministre m’a expliquées. Il a demandé si les Forces armées canadiennes disposaient de véhicules adaptés pour remorquer jusqu’à 70 véhicules de l’autoroute Coutts, et nous nous sommes renseignés. C’est une de mes responsabilités, parce que je réponds aux demandes d’aide.
    Nous nous sommes informés auprès des Forces armées canadiennes qui nous ont indiqué qu’elles n’avaient pas de véhicules appropriés. Le ministre McIver n’était pas le seul à avoir de la difficulté à faire retirer ces véhicules. Ils faisaient office de point d'ancrage des manifestations. C’était vraiment un défi important pour les organismes d’application de la loi et cette demande illustre certains des défis qu’on nous demande de relever.
    Nous avons réagi, grâce à l’une des mesures de la Loi sur les mesures d’urgence, en mettant ces véhicules à la disposition de ceux qui en avaient besoin.
    Je crois savoir que vous connaissez bien le régime d’assermentation des agents de la GRC. Pouvez-vous nous dire en quoi l’invocation de la Loi sur les mesures d’urgence nous a aidés à fournir du personnel de soutien?
    C'est exact.
    Je me suis retrouvé dans cette situation à plusieurs reprises. Comme policier, j'avais aussi l'habitude de venir à Ottawa pour donner un coup de main lors de grandes manifestations. Nous avons toujours été confrontés à un défi. Les policiers qui viennent d'un peu partout au pays, en particulier les agents de la GRC, ne sont pas assermentés pour agir comme agents dans la province de l'Ontario et ne peuvent donc pas appliquer certaines lois et dispositions dans cette province.
    Pour faciliter les déplacements et faire en sorte que des policiers de partout au Canada puissent venir à Ottawa et aider à l'application des mesures adoptées, un article de la Loi sur les mesures d'urgence a permis aux agents de la GRC d'agir à titre de policiers ici, en Ontario, ou n'importe où ailleurs au pays où ils ont besoin de cette autorisation.
     Tout à l'heure, dans le cadre de votre témoignage, vous avez mentionné que des menaces de barrages réapparaissaient. Je crois comprendre que la police a déclaré publiquement qu'elle avait intercepté un convoi parti d'Ottawa pour bloquer de nouveau le pont Ambassador. Étiez-vous au courant?
    C'est ce que nous disaient...
     Monsieur le ministre...
    ... des sources de renseignement, soit que les organismes d'application de la loi redoutaient...
    Monsieur le ministre, je suis désolée. Le temps imparti à Mme Bendayan est écoulé. Excusez-moi. Merci.
    Nous allons maintenant passer à des tours de trois minutes.
    Allez‑y, monsieur Fortin.

[Français]

    Je vous remercie, madame la présidente.
    Monsieur le ministre, j'ai pris rapidement connaissance des lettres que vous venez de nous remettre. Elles sont datées du 5 février 2022. L'une provient de la première ministre du Manitoba et l'autre, du premier ministre de l'Alberta. Il semblerait qu'ils étaient dépassés par la situation.
    Lorsque vous avez invoqué la Loi sur les mesures d'urgence, un document sur les consultations tenues auprès des premiers ministres au sujet des mesures d'urgence figurait en annexe.
    Avez-vous lu ce document à ce moment?

  (2110)  

[Traduction]

    Oui, monsieur.

[Français]

    Dans ce document, il est indiqué que le premier ministre de l'Alberta a déclaré sur Twitter que le gouvernement albertain s'opposait à l'invocation de la Loi sur les mesures d'urgence. Il s'y opposait le 14 février 2022.
    Ensuite, il est indiqué que la première ministre du Manitoba a déclaré que la situation variait considérablement selon la province et le territoire. Elle a dit, au sujet de cette déclaration, ne pas être convaincue pour le moment que la Loi sur les mesures d'urgence devrait être appliquée au Manitoba. Vu la vaste portée de cette loi jamais invoquée encore et le signal que donne son utilisation, elle était d'avis qu'il n'était pas constructif d'y avoir recours au Manitoba.
    Ainsi, le 14 février 2022, les premiers ministres respectifs du Manitoba et de l'Alberta vous ont dit qu'ils n'avaient pas besoin de la Loi sur les mesures d'urgence.
    Or, le gouvernement l'a quand même invoquée. Ne trouvez-vous pas cela un peu étonnant?

[Traduction]

    Franchement, non, monsieur Fortin, cela ne m'étonne pas.
    Je peux vous dire que la Loi sur les mesures d'urgence exige que les ministres soient consultés. Cette consultation a eu lieu. Je suis seulement...

[Français]

    Vous n'avez cependant pas suivi les recommandations, manifestement.
    Je suis désolé de vous interrompre, monsieur Blair. Je suis très impoli, mais nous n'avons pas beaucoup de temps.

[Traduction]

    Bien sûr.

[Français]

    Quand les policiers ont dégagé la rue Wellington à Ottawa, nous n'avons rien vu de magique. Il n'y a pas eu de déploiement de chars d'assaut de l'armée, ni d'hélicoptères, ni d'équipes d'intervention d'urgence. Nous n'avons rien vu de tel. Des policiers sont arrivés calmement et lentement, puis ils ont évacué les manifestants. Ensuite, des dépanneuses ont remorqué les camions.
    Personnellement, je n'ai rien vu qui me permettait de penser que tout cela arrivait grâce à la Loi sur les mesures d'urgence. Cela m'est apparu être une simple opération policière, comme vous en avez peut-être mené lors du Sommet du G20 ou d'autres événements.
    Êtes-vous capable de me dire en quoi cette évacuation de la rue Wellington relevait des pouvoirs conférés par la Loi sur les mesures d'urgence?

[Traduction]

    Oui, monsieur. Je pense que les policiers pouvaient recourir à des dispositions très importantes qui ont permis de parvenir au dénouement de cet événement.
     Par exemple, ils ont pu obtenir des dépanneuses pour la première fois. Ils n'avaient pas pu auparavant...

[Français]

    Je suis désolé, monsieur le ministre. Je ne veux pas savoir ce qu'il était possible de faire, mais ce qui a été fait en réalité.
    A-t-on utilisé des mesures d'urgence pour dégager la rue Wellington? Cela n'en avait pas l'air quand nous regardions les événements à la télévision.

[Traduction]

     Merci, monsieur Fortin. Excusez-moi. J'ai été généreuse avec le temps.
    Monsieur Green, vous avez trois minutes.
    Monsieur le ministre, j'ai déjà parlé de la juxtaposition des différents styles de police. J'ai parlé de ce qui s'est passé avec les Wet'suwet'en et la « force dominante pouvant être mortelle ». Nous avons parlé du G20.
     À votre avis, que pensez-vous de la juxtaposition? Comment expliquez-vous aux Canadiens que les gens qui protestaient contre le G20 se sont retrouvés face à des policiers en tenue anti-émeute, qu'ils se sont fait bousculer et ont été généralement privés de leurs droits garantis par la Charte, tandis qu'on se trouvait à dérouler le tapis rouge pour les manifestants à Ottawa? On leur a permis d'être hébergés à l'extérieur de la ville, et on a souvent eu l'impression qu'il existait une sorte de collaboration entre la police et les manifestants occupant les lieux.
     Pouvez-vous nous parler de la juxtaposition de ces deux états des services policiers au Canada?
    C'est une question très importante. Merci, monsieur Green.
    Je pense qu'il est important pour nous de comprendre le principe de la proportionnalité dans la réaction de la police. Comme je l'ai dit, il incombe à la police de faire respecter la Charte, de faciliter les manifestations pacifiques licites et, dès le moment où ces manifestations deviennent illégales, de faire respecter la Loi, mais de le faire moyennant un recours minimal à la force...
     Je vous arrête ici. Merci.
    Votre question exige une réponse plus complète, mais vous pouvez m'arrêter si vous voulez.
     Vous pourrez nous la fournir par écrit, si vous le souhaitez, à la fin. Il me reste deux minutes.
    Le chef Sloly a dit qu'il n'y avait peut-être pas de solution policière à la manifestation et il a depuis déclaré que nos institutions et nos services de police n'étaient pas prêts pour le convoi.
    Êtes-vous d'accord avec l'évaluation de l'ancien chef de police?
    J'accepte l'évaluation du chef Sloly selon laquelle il n'était pas préparé pour ce qui s'est passé à Ottawa.
    En votre qualité de ministre responsable de la protection civile, quelle responsabilité assumez-vous pour le manque de préparation face à une manifestation de masse dans la capitale du pays?
    Je précise que le chef Sloly relève de sa commission des services policiers et...
    Je parle de vous, monsieur.
    Encore une fois, monsieur...
    En tant que ministre responsable de la protection civile, vous deviez forcément avoir des protocoles en place en cas de barrages aux principaux points d'entrée et dans la capitale du pays.
    Quelle responsabilité assumez-vous pour le manque de préparation qui a mené aux événements qui se sont produits pendant l'occupation?

  (2115)  

    Nous avons constaté que les manifestants n'étaient pas sur des terres fédérales, mais sur des terres municipales. Je pense qu'ils exploitaient...
    Ne disposiez-vous pas de protocoles pour tout le pays en votre qualité de ministre responsable de la protection civile, en vertu des conventions de lutte contre le terrorisme ou de tout ce qui a fait suite au projet de loi C‑51? Êtes-vous en train de dire que, dans vos lettres de mandat, il n'a pas été précisé que vous deviez vous préparer à un état d'urgence et avoir un plan national pour faire face à une telle situation?
    Oui, mais pas... il ne s'agissait pas d'un événement terroriste. Soyons clairs, monsieur Green, il ne s'agissait pas d'un événement terroriste. Il s'agissait d'un blocage illégal...
    C'était une situation d'urgence.
    C'était une infraction criminelle. Dans bon nombre des lieux occupés, cela relevait de la police compétente, que nous appuyons.
    La situation n'a‑t‑elle pas atteint un point où elle relevait de votre responsabilité? Ou n'a‑t‑elle jamais atteint un tel point? C'est ce que vous déclarez aujourd'hui?
    Elle est devenue une situation d'urgence, mais elle ne l'était pas au début. C'était un problème d'ordre public extrêmement difficile pour le service de police compétent, ici à Ottawa.
    Vous êtes ministre de la Protection civile...
    Comme cela s'est produit à la frontière, elle est devenue plus préoccupante...
    ... et nous n'étions pas préparés.
     Elle a atteint le niveau de... à la frontière, elle est devenue une menace pour la sécurité nationale et une menace contre les infrastructures essentielles.
     Le temps est écoulé.
    Reconnaissez-vous que vous n'étiez pas prêts, monsieur?
    Monsieur Green, votre temps est écoulé.
    Allez‑y, sénateur White.
     Je vais entrer dans le vif du sujet, parce que vous avez dit que la Loi permettait d'avoir recours à des agents de la GRC et à d'autres policiers d'autres services, mais il y a une autre solution que nous pouvons utiliser pour les assermenter.
    Je suis certain que vous avez participé à l'assermentation des agents de la GRC pour les événements du G8 et du G20. Ici, à la fête du Canada, je pense qu'on assermente 700 ou 800 agents de la GRC pour qu'ils puissent remplir les mêmes fonctions qu'un policier municipal.
    Est‑ce exact?
    Oui. Cela prend du temps, sénateur. C'était le défi. Cela prend du temps, et nous essayions de faciliter une intervention rapide pour répondre aux besoins de la ville d'Ottawa et de l'administration.
    C'est parfait. Merci. Je ne voulais qu'on reste sur l'impression qu'il n'y avait qu'une seule option.
    Pouvez-vous nous dire si, dans vos quelque 37 années de services policiers, vous avez déjà vu un événement de ce genre? Vous avez été policier à Toronto, la plus grande ville du pays. Avez-vous déjà vu quelque chose de ce genre?
    Comme policier, j'ai assisté à beaucoup de manifestations dans ma vie, sénateur White. J'ai été le chef du maintien de l'ordre public à Toronto pendant environ neuf ans. Bien sûr, j'y ai été chef de police pendant 10 ans. J'ai également aidé d'autres administrations dans le cadre d'événements d'ordre public.
    Je dirais que nous avons eu à composer avec des situations particulièrement difficiles, mais je n'ai jamais vu de situations où des camions ont été utilisés de cette manière, essentiellement pour bloquer des axes routiers et instaurer un état de siège au point où les déplacements... Il est relativement simple de faciliter le déplacement des gens dans le cadre d'une manifestation. C'est parfois difficile, mais c'est faisable. Or, ces camions ont singulièrement compliqué les choses.
    Les actions ciblées qui se déroulaient à notre frontière visaient clairement à causer le plus de tort possible aux Canadiens et à l'économie canadienne, ce qui a représenté un défi de taille en raison des chevauchements et des conflits en matière de compétences.
    Rapidement, l'autre endroit a présenté au Sénat un projet de loi concernant des manifestations contre des responsables de la santé, des infirmières et infirmiers et des hôpitaux. Notre comité des affaires juridiques a envisagé d'ajouter quelque chose pour rendre illégale l'utilisation de véhicules pour participer à ces manifestations.
    Est‑il temps que nous adoptions une loi au Canada pour interdire l'utilisation de véhicules lors de telles manifestations?
    Je pense que c'est une conversation très importante que nous devrions avoir ici, au Parlement. Il y a un certain nombre de facteurs qui doivent être examinés en profondeur.
    Il est certain que l'utilisation des véhicules a compliqué la situation. Nous devons également envisager de prendre les mesures qui s'imposent — cela fait partie de ma responsabilité — pour veiller à ce que les infrastructures essentielles, y compris les installations manufacturières dans ces corridors commerciaux essentiels, disposent des pouvoirs nécessaires que l'on peut utiliser pour les protéger.
     Merci, madame la présidente. J'ai terminé.
     Merci, sénateur.
    Allez‑y, sénateur Carignan.

[Français]

    Je vous remercie, madame la présidente.
    Monsieur le ministre, le sénateur White, tout à l'heure, parlait des plans de la GRC pour lever les barrages. Le 12 février 2022, le Service de police d'Ottawa a diffusé l'avis suivant:
Tous les agents disponibles furent déployés hier soir. Nous avons un plan pour mettre fin à cette occupation illégale, et nous attendons les renforts nécessaires pour y arriver.
    Le 12 février 2022, le Service de police d'Ottawa disait qu'il y avait un plan.
    Avez-vous été informé de ce plan?

  (2120)  

[Traduction]

    Nous l'avons été de sources ouvertes. Bien sûr, je lis les médias et je regarde la télévision comme tout le monde, mais je n'avais pas vu de plan détaillé et, franchement, la situation qui existait ici à Ottawa et ailleurs au Canada exigeait plus que seulement d'autres ressources humaines. Il fallait pouvoir régler des problèmes très difficiles auxquels les services policiers étaient confrontés.

[Français]

    Il fallait aussi avoir un plan.

[Traduction]

    Bien sûr.

[Français]

    Vous n'avez pas parlé à des représentants du Service de police d'Ottawa pour connaître son plan.
    Est-ce bien cela?

[Traduction]

    Avec tout le respect que je vous dois, sénateur, permettez-moi de vous répéter qu'il s'agit d'une activité opérationnelle relevant de la police compétente, et il ne convient pas que je participe de quelque façon à cela.

[Français]

    Savez-vous que le Service de police d'Ottawa a fait remorquer des véhicules et des camions le 10 février 2022?

[Traduction]

    Il y avait de petits véhicules, des voitures.

[Français]

    Non, je parle des camions.

[Traduction]

    Comment ont-ils été enlevés, monsieur? Pourriez-vous nous le préciser?

[Français]

    Êtes-vous au courant que le Service de police d'Ottawa a fait remorquer des camions le 10 février 2022?

[Traduction]

    Je ne suis pas au courant, monsieur.

[Français]

    D'accord.
    Vous n'avez donc pas parlé à des représentants du Service de police d'Ottawa pour connaître son plan. Le 12 février 2022, on a dit qu'il y avait un plan. Le 10 février 2022, il avait été possible de faire remorquer des camions. Le 13 février 2022, le blocage sur le pont Ambassador a été démantelé, les véhicules ont été remorqués et le pont a été rouvert. Le 13 février 2022, à 8 h 30, il y a eu une réunion du Conseil des ministres, et le Conseil est arrivé à la conclusion qu'il n'y avait pas d'autres moyens que d'adopter la Loi sur les mesures d'urgence pour mettre fin à l'occupation.

[Traduction]

    Je dois préciser qu'il a fallu, par exemple, sept jours pour faire lever le barrage du pont Ambassador, et nous disposions alors de preuves solides indiquant que les manifestants avaient l'intention d'y retourner et de bloquer d'autres ponts.
    Nous n'avions pas l'intention de jouer au chat et à la souris, parce que si nous avions passé sept jours pour retirer les véhicules, l'impact sur les Canadiens en termes de temps, d'argent et de ressources en personnel aurait été énorme, et nous voulions nous assurer de mettre fin à cette menace une bonne fois pour toutes et de façon concluante.

[Français]

    Si j'ai bien compris, vous n'aviez pas connaissance qu'il y avait un plan, vous n'avez pas reçu d'avis de la part des forces de l'ordre, vous n'avez pas pris connaissance de leur plan. Du haut de votre tour, vous avez décidé qu'il fallait invoquer la Loi sur les mesures d'urgence.
    C'est cela?

[Traduction]

    Sénateur, sachez que j'étais au courant du travail que faisait la police, mais je n'ai pas été informé de son plan et il n'y avait d'ailleurs pas lieu que je le sois.

[Français]

    Qui l'a été?
    Nous avons l'impression que personne au sein du Cabinet ne se parle. Personne n'a été informé par les services de police du fait que ceux-ci avaient un plan et qu'ils pouvaient faire remorquer les véhicules. On dirait que le Cabinet était complètement déconnecté de la réalité.

[Traduction]

    Sénateur, je tiens à préciser que votre interprétation est inexacte. Les policiers ne m'ont jamais dit qu'ils étaient prêts à régler la situation efficacement et qu'ils avaient les outils pour le faire.
    Monsieur le ministre, je suis désolée, mais je dois vous interrompre.
    Nous avons six intervenants. Chacun a une minute. Nous allons commencer par M. Motz.
    Merci, madame la présidente.
    Monsieur le ministre, la manifestation à Coutts, en Alberta, a été réglée la veille de l'application de la Loi sur les mesures d'urgence. La police à Coutts l'a fait sans les mesures prévues dans la Loi sur les mesures d'urgence. De plus, nous savons que le barrage du pont Ambassador à Windsor a également été démantelé par les forces de l'ordre avant l'application de la Loi sur les mesures d'urgence.
    Étant donné ce que nous savons déjà, le fait d'invoquer la Loi sur les mesures d'urgence était‑il vraiment justifiable compte tenu du seuil qui devait être atteint, à savoir que la Loi ne pouvait être invoquée que si aucune autre loi au Canada ne permettait de régler le problème?
    Merci de la question.
    Le dénouement à Coutts a coïncidé avec l'aboutissement d'une enquête policière qui a permis la saisie d'armes à feu et qui portait sur un certain nombre de personnes impliquées dans une série d'événements très graves qui ont mené à des accusations dont le tribunal est maintenant saisi.
    Nous avions également indiqué que nous prenions des mesures et, je pense, que des gens probablement rationnels ont suivi les conseils et ont quitté les lieux. Monsieur Motz, pour être clair, le démantèlement du barrage de Coutts n'a pas mis fin à la menace en Alberta ni ailleurs au Canada. Ces manifestants ont exprimé très clairement leur intention de continuer à perturber notre frontière.
     Merci, monsieur le ministre. Je vais devoir vous interrompre. Je vous prie de m'en excuser encore une fois.
    Monsieur Virani, vous avez la parole.
    Merci, monsieur le ministre.
    J'ai quatre questions très brèves.
    Pour en revenir à ce qu'a dit M. Fortin, n'est‑il pas exact qu'en invoquant la Loi sur les mesures d'urgence que, comme vous l'avez indiqué, le simple fait d'avoir invoqué ces pouvoirs a incité certaines personnes à quitter les barrages illégaux. Du coup, le nombre de manifestants a diminué, ce qui a facilité le dénouement éventuel parce qu'il y avait moins de gens à qui on devait faire quitter les lieux?

  (2125)  

    Je crois que cela ne fait pas l'ombre d'un doute, monsieur.
    Pour ce qui est d'une question posée par M. Brock, je crois comprendre que, lorsque l'évacuation des gens a été entreprise — oui, ces manifestants l'ont fait de façon pacifique et on devrait les en remercier. Je suis d'accord avec vous là‑dessus, mais à un moment donné, les manifestants ont tenté de s'emparer d'un revolver ou d'une arme à feu de policiers qui les évacuaient. Est‑ce aussi ce que vous avez cru comprendre?
    Je n'ai pas d'information à ce sujet, monsieur Virani.
    Malgré la difficulté de la tâche, je pense que la police a très bien fait son travail.
    Mme Boniface vous a posé une question sur la différence entre le décret provincial et le décret fédéral. Je crois comprendre que le décret provincial ne s'appliquait qu'aux camions immatriculés en Ontario ou autorisés aux fins d'assurance en Ontario, mais qu'il ne visait pas les camions immatriculés ou assurés en Alberta. Est‑ce exact?
    Monsieur Fortin, vous avez une minute.

[Français]

    Je vous remercie, madame la présidente.
    Monsieur le ministre, j'ai lu les deux lettres que vous nous avez remises. Les premiers ministres respectifs du Manitoba et de l'Alberta vous demandent que le gouvernement fédéral prenne des mesures, mais il n'est mentionné nulle part que l'on vous demande d'invoquer la Loi sur les mesures d'urgence. On vous demande de les aider en fournissant du matériel et du personnel pour remorquer les véhicules.
    Encore une fois, quand nous regardons l'annexe dont nous parlions tantôt, nous constatons que trois provinces ont demandé l'invocation de la Loi sur les mesures d'urgence. Il s'agissait de l'Ontario, de la Colombie‑Britannique et de Terre‑Neuve‑et‑Labrador. Les autres provinces s'y opposaient toutes.
    Monsieur le ministre, sur quoi vous êtes-vous basé au juste pour invoquer la Loi sur les mesures d'urgence? Les provinces n'en voulaient pas, les policiers ne vous le demandaient pas.
    Sur quoi vous êtes-vous basé pour décider d'invoquer la Loi sur les mesures d'urgence?

[Traduction]

    Nous nous fondions sur des évaluations selon lesquelles il existait une urgence nationale et qu'elle représentait une menace importante pour l'intérêt supérieur des Canadiens.
    Qui vous a dit cela?

[Français]

    D'où vient l'idée qu'il s'agissait d'une urgence nationale?

[Traduction]

    Je savais, par exemple, que notre frontière était bloquée. En Ontario, cela représentait 400 millions de dollars d'échanges commerciaux par jour. Partout dans la province, les usines automobiles tournaient au ralenti. Des milliers de travailleurs étaient littéralement renvoyés chez eux.
    À mon avis, monsieur, cela va plus loin qu'une simple menace pour la sécurité nationale contre des infrastructures essentielles, c'est‑à‑dire la fabrication et le transport, et nous devions agir.
    Merci, monsieur Fortin.
    Monsieur Green, vous avez la parole.
    Monsieur le ministre, pouvez-vous s'il vous plaît fournir au Comité des documents qui indiquent qu'il y avait des plans pour réinstaller les barrages ou pour en créer à d'autres postes frontaliers?
    Je n'ai pas ces documents; on m'en a informé.
    Je crois aussi, monsieur Green, et...
    Avez-vous reçu un document d'information à ce sujet?
    J'ai eu une séance d'information verbale, mais j'ai aussi lu un certain nombre de rapports de sources ouvertes sur le même sujet. On craignait sincèrement et légitimement que ces barrages réapparaissent.
    C'était une question à laquelle il fallait répondre par oui ou par non.
    Croyez-vous, oui ou non, que la réaction face au convoi et à l'occupation à Ottawa a été un échec des services de maintien de l'ordre?
    Je crois que cela n'a pas fonctionné. Ce sont les mots que j'utiliserais; cela n'a pas fonctionné. Ils n'ont pas été en mesure de régler la situation.
    Croyez-vous que votre préparation et votre état de préparation aux situations d'urgence ont été un échec?
    Je suis bien conscient de ma responsabilité, monsieur. Franchement, ce n'était pas à moi de veiller à ce que le Service de police d'Ottawa intervienne efficacement face à un événement d'ordre public dans cette ville. Quand la police a éprouvé des difficultés, j'ai senti que je devais l'aider de toutes les façons possibles.
    Allez‑y, sénateur White.
    Merci beaucoup.
    Merci encore, monsieur le ministre.
    Cela a duré des semaines. Je ne suis pas certain que les Canadiens comprennent à quel point il est difficile pour les policiers d'être en service 12 ou 14 heures par jour, jour après jour, et pourquoi, à un moment donné, il fallait que quelque chose arrive. Qu'il s'agisse de la Loi sur les mesures d'urgence ou d'autre chose, nous en discuterons, mais il fallait faire quelque chose pour remédier à la situation. Le fait que les événements prenaient de l'ampleur allait avoir une incidence sur les services de police.
    Sénateur, je pense qu'il est plus que juste de reconnaître qu'il s'agissait d'un événement extrêmement délicat pour tous les agents qui travaillaient ici, à Ottawa, à Windsor et partout au pays. C'est un travail difficile que nous leur avons demandé de faire. La situation durait depuis des jours. Nous savons que les policiers ont fait l'objet de critiques de part et d'autre, des personnes qui étaient directement touchées, et ce, de façon importante, des citoyens qu'ils ont juré de protéger et de servir, ainsi que des manifestants qui ont des droits, mais ces droits ont été largement dépassés au point de constituer un crime.
    Il était très difficile pour les policiers d'intervenir.
    Une partie de la conversation que j'ai eue avec le chef de police à Ottawa portait sur ses préoccupations à l'égard de ses agents et des répercussions que cet événement avait sur eux.

  (2130)  

    La dernière question revient au sénateur Carignan.

[Français]

    Monsieur le ministre, vous avez parlé avec le chef de police d'Ottawa de tous les sujets que vous nous avez présentés, mais vous n'avez pas eu de discussion concernant son plan pour libérer le centre-ville d'Ottawa. C'est incroyable! J'ai de la difficulté à vous croire.
    Vous réaffirmez que vous n'avez pas discuté avec des représentants du Service de police d'Ottawa de son plan pour libérer la rue Wellington.
    Est-ce cela?

[Traduction]

    Sénateur, j'ai été policier pendant 39 ans et chef de police à Toronto. Je connais la différence en matière de responsabilité. J'ai beaucoup de respect pour l'autorité et les responsabilités du chef de police.

[Français]

    Oui, mais vous aviez une décision à prendre en tant que ministre...

[Traduction]

    Je sais qu'il est inapproprié de ma part de conseiller ce chef de police de quelque façon que ce soit, ou de lui donner des directives. Je me suis fié aux séances d'information que je recevais de notre [inaudible] GRC au sujet d'un plan...

[Français]

    La question n'est pas de savoir s'il fallait donner des directives au Service de police d'Ottawa, mais plutôt de savoir s'il avait un plan pour libérer le centre-ville d'Ottawa.
    Si vous aviez posé la question, on vous aurait dit, au Service de police d'Ottawa, qu'il y avait effectivement un plan pour libérer le centre-ville et que vous n'aviez pas à vous inquiéter. À ce moment, vous auriez attendu et vous n'auriez pas eu à déclarer l'état d'urgence.
    Le 10 février 2022...

[Traduction]

    Sénateur Carignan...

[Français]

    ... on avait déjà remis 1 550 contraventions et procédé à 25 arrestations.

[Traduction]

    Sénateur, si vous me le permettez, je vais répondre très rapidement. J'ai fondé mon jugement sur les faits, et les faits étaient de savoir si la police avait un plan ou non, et ce plan s'était avéré singulièrement inefficace pour régler la situation.

[Français]

    Je suppose que vous avez suivi la situation à la télévision vous aussi.
    N'est-ce pas?

[Traduction]

    Sénateur Carignan, votre temps de parole est écoulé.
    Au nom de tous les membres du Comité, permettez-moi, monsieur le ministre, de vous remercier de votre présence.
     Madame la présidente, j'invoque le Règlement. Je veux faire consigner au compte rendu un commentaire au sujet d'un mot que j'ai mal prononcé. Je crois que le compte rendu montrera que j'ai insinué que la vice-première ministre avait été offensante. Ce n'est pas ce que je voulais dire et je lui fais toutes mes excuses. Je voulais dire, pour le compte rendu, « qu'elle était à la limite de l'outrage au Comité ».
    Plutôt que de devoir prendre la parole à la Chambre et présenter mes excuses, j'ai pensé le faire maintenant et permettre que le compte rendu soit corrigé. Je ne voulais pas laisser entendre qu'elle avait été offensante.
    Merci.
    Au nom de tous les membres du Comité, je tiens à remercier le ministre Blair de s'être joint à nous.
    La séance est levée.
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