Passer au contenu

SJQS Rapport du Comité

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

Opinion dissidente du Parti réformiste

Au départ, précisons que la modification proposée ne traite pas du droit à l’instruction dans la langue de la minorité, ni de la création de commissions scolaires linguistiques. Le droit à l’instruction dans la langue de la minorité est protégé par l’article 23 de la Charte des droits et libertés. Nous soutenons fermement ces droits, notamment la création de commissions scolaires linguistiques là où le nombre le justifie. Cependant, la modification proposée mettra un terme au droit à l’école confessionnelle, un droit protégé depuis 1867.

On ne devrait jamais modifier la Constitution à la légère ou à la hâte. Nous croyons qu’avant toute modification constitutionnelle, le Parlement doit s’assurer qu’il existe un consentement démocratique, que la modification respecte la primauté du droit et qu’elle est dans l’intérêt national. Si elle porte atteinte aux droits enchâssés des minorités, le Parlement doit spécialement veiller à ce que le consentement démocratique comprenne l’approbation manifeste de la minorité.

Nous sommes arrivés à la conclusion que la motion ne répond pas à ces exigences et qu’elle ne devrait pas être approuvée par le Parlement.

En principe, le Parti réformiste préférerait la tenue d’un référendum provincial avant que le Parlement envisage une modification en vertu de l’article 43. Un référendum sur une question claire, tenu selon des règles équitables, permet de déterminer l’ampleur du consentement parmi la population. Nous reconnaissons que ce n’est pas actuellement une exigence constitutionnelle, et qu’une province peut proposer une telle modification sans tenir de référendum. Mais si ladite modification éliminera des droits, ceux qui la proposent doivent démontrer, au-delà de tout doute raisonnable, qu’une majorité bien informée de la population l’approuve.

En l’absence de référendum, est-ce que ceux qui ont proposé la modification satisfont à l’exigence du consentement démocratique? Nombre des témoins disent que la modification fait l’objet d’un vaste consensus au Québec. Toutefois, d’autres témoins soutiennent que, bien que les commissions scolaires linguistiques fassent l’objet d’un consensus, rien n’indique qu’il y a consensus sur l’élimination du droit à l’école confes sionnelle.(1)

Le gouvernement du Québec a décidé de ne pas tenir de référendum sur la question. Il n’a pas non plus tenu d’audiences publiques sur cette modification proposée à l’article 93. Il n’y a pas eu de vote libre à l’Assemblée nationale.

En l’absence de référendum, nous croyons qu’il faudrait remédier au doute sur le consensus en faveur de ceux qui s’opposent à la modification. Nous ne remettons pas en question la manifestation d’un vaste consensus sur la création de commissions scolaires linguistiques, mais répétons que ce n’est pas la question soumise au comité conjoint. La question en jeu est l’élimination des droits confessionnels protégés par l’article 93. Ceux qui s’opposent à cette élimination devraient pouvoir clairement exprimer leur point de vue.

De plus, ce comité devrait s’assurer que ce qu’il propose de faire respecte la deuxième exigence, la primauté du droit. Est-ce qu’on utilise la bonne procédure de modification? Certains ont questionné le processus bilatéral, mais son à-propos a été confirmé par le gouvernement du Canada et certains spécialistes juridiques. La plupart des témoins l’ont supposé.

Il ne faudrait pas s’attendre à ce que le comité tranche la question à la hâte, en respectant une échéance artificielle. Une décision judiciaire aurait réglé l’aspect juridique. Sans une telle décision, le comité aurait dû à tout le moins recevoir un mémoire complet sur la question, ce qui lui aurait permis de l’examiner à la lumière des meilleurs avis juridiques possible.

La dernière exigence est celle de l’intérêt national. En raison de la nature même de cette exigence, seul le Parlement peut y satisfaire. En vertu de l’article 93, le Parlement a la responsabilité de garantir les droits et il est indéniable que cette modification éliminera des garanties constitutionnelles qui furent essentielles à l’adoption de l’Acte d’Amérique du Nord britannique. Il est clair que les lois provinciales ne peuvent protéger les droits des minorités avec autant d’efficacité que les dispositions constitutionnelles, car on peut les modifier sans le consentement de la minorité.

Le Parlement pourrait envisager d’éliminer de l’article 93 toutes les garanties applicables au Québec seulement s’il est convaincu qu’il a des raisons impérieuses de le faire. Rien de tel n’a été prouvé au comité. On a reconnu que le projet de loi 107 était compatible avec l’article 93. Peut-être sera-t-il plus pratique sur le plan administratif pour le gouvernement québécois de n’avoir que des commissions scolaires linguistiques, mais il ne faudrait pas éliminer les droits acquis dans la Constitution pour de simples raisons de simplification administrative.

Il n’est pas dans l’intérêt du Canada que le Parlement approuve une modification constitutionnelle qui n’a pas été ratifiée, par référendum, par les personnes directement visées et qui remplace les garanties constitutionnelles des minorités par des dispositions dans les lois ordinaires.

Pour toutes ces raisons, nous ne pouvons recommander que le Parlement adopte la résolution proposée.


(1) La Coalition pour la confessionnalité scolaire a recueilli la signature de 235 000 adultes québécois opposes à la modificaiton.