Une délégation de six parlementaires
représentant la Section canadienne du Forum interparlementaire des Amériques
(FIPA), dirigée par l’honorable Pierrette Ringuette, sénatrice, s’est rendue à
Buenos Aires, en Argentine, du 15 au 19 mars 2010. L’honorable Michel Rivard,
sénateur, Mme Bev Shipley, députée, M. Pablo Rodriguez, député, Mme Nicole
Demers, députée, et M. Peter Julian, député, faisaient également partie de la
délégation. Les membres de la délégation étaient secondés par M. Leif-Erik
Aune, secrétaire de la délégation, ainsi que par M. Michael Holden, analyste de
la Bibliothèque du Parlement auprès de la délégation.
La visite de la délégation comportait
deux objectifs. Le premier objectif était de discuter de la participation
mutuelle du Canada et de l’Argentine au FIPA et de permettre aux délégués
canadiens de tirer parti du rôle du FIPA en tant que forum destiné à améliorer
la coopération et la diplomatie interparlementaires dans le but d’engager un
dialogue avec leurs homologues argentins sur un certain nombre de questions. La
Section canadienne souhaitait notamment faire valoir auprès des parlementaires
argentins l’importance de mettre sur pied un organisme permanent au moyen
duquel participer au FIPA : une section argentine permanente du FIPA, semblable
à la Section canadienne, qui est considérée par plusieurs comme un modèle de
participation au sein de l’association.
Le deuxième objectif de la délégation
canadienne était de participer à l’atelier sur le commerce à l’intention des
parlementaires avec ses homologues de l’Argentine. L’atelier en Argentine
représentait le cinquième événement du genre présenté par le FIPA. Le tout
premier atelier sur le commerce, qui a eu lieu à Ottawa en mars 2007,
comprenait des participants provenant de huit pays membres du FIPA. Un an plus
tard, une délégation canadienne participait à un atelier similaire, mais
bilatéral cette fois-là, avec des parlementaires de Trinité-et-Tobago. Un
atelier régional à l’intention des parlementaires de l’Amérique centrale et de
l’Amérique du Sud a été organisé au Costa Rica en novembre 2008, et un atelier
bilatéral entre le Canada et le Pérou a eu lieu en mars 2009.
Le FIPA accorde beaucoup d’importance à
ces ateliers sur le commerce. Compte tenu du rôle joué par le commerce
international pour favoriser la croissance économique, la prospérité et le
développement, il est indispensable que les parlementaires aient une solide
connaissance des règles commerciales internationales et des négociations, ainsi
que de leurs incidences politiques plus générales. Grâce à de tels ateliers, le
FIPA s’est donné comme priorité d’aider les parlementaires dans l’ensemble de
l’hémisphère à renforcer leur compétence technique sur le plan des questions
touchant le commerce international et la politique commerciale. En participant
à cet atelier bilatéral, la Section canadienne espérait progresser vers cet
objectif.
La visite de la délégation en Argentine
représente la troisième fois en autant d’années que les représentants de la Section
canadienne du FIPA se rendaient dans d’autres pays membres du FIPA pour établir
des relations bilatérales et participer à des ateliers sur le commerce. La
visite a également permis aux parlementaires du Canada et de l’Argentine de
discuter des occasions de renforcer les liens économiques entre les deux pays.
ATELIER SUR LE COMMERCE
L’atelier sur le commerce a pris la
forme d’un événement d’une journée qui eut lieu le 16 mars 2010. L’événement
était organisé par le Congrès de l’Argentine et animé par le Centre de droit et
de politique commerciale (CTPL) de l’Université Carleton à Ottawa. Le ministère
des Affaires étrangères et du Commerce international (MAECI) a assuré le
financement de l’événement.
L’honorable Julio Corbos, Président du
Sénat de la République argentine, a ouvert l’atelier. Il a d’abord fait valoir
les intérêts que partageaient le Canada et l’Argentine : leurs points de vue
similaires concernant la défense des droits de la personne; leur intérêt mutuel
à promouvoir la démocratie; leur participation à des organisations
multilatérales; et leurs perspectives communes concernant le développement
pacifique de l’énergie nucléaire ainsi que la non-prolifération. Le président
Corbos a également souligné que le Canada et l’Argentine estiment avoir une
responsabilité collective de travailler en commun pour tenter de trouver une
solution à la crise économique et financière mondiale. Il a aussi discuté du
rôle important joué par le FIPA comme forum pour la diplomatie parlementaire et
moyen par lequel les parlementaires de l’hémisphère peuvent collaborer pour
résoudre des problèmes communs.
Dans le cadre de son mot d’ouverture,
la sénatrice Ringuette a souligné l’importance du rôle joué par les ateliers
sur le commerce sur le plan des efforts de relations externes et de
renforcement des capacités dans les Amériques. Elle a aussi mis en évidence
l’utilité de ces ateliers pour les parlementaires, mentionnant notamment qu’en
leur permettant de mieux comprendre les règles commerciales et les questions commerciales,
les parlementaires peuvent apprendre à exercer une meilleure influence sur
l’élaboration, la portée et l’orientation des politiques commerciales
internationales dans leur pays d’origine.
Le dernier conférencier d’ouverture
était l’ambassadeur du Canada en Argentine, son Excellence Timothy Martin. M.
Martin a souligné que l’atelier sur le commerce représentait une excellente
occasion pour les parlementaires d’échanger des idées alors que les pays
émergent de la crise financière et économique. Il a également félicité le FIPA
du rôle qu’il a joué pour encourager la région à prendre part aux questions
commerciales, faisant valoir que le commerce est un facteur clé de la
croissance et de la prospérité économiques. Il a toutefois rappelé aux
personnes présentes que le commerce à lui seul ne peut pas garantir la
prospérité et que les pays doivent travailler en commun pour veiller à ce que
l’ensemble des pays et des citoyens ait l’occasion de profiter des échanges
commerciaux.
L’atelier comprenait deux séances et
une discussion d’experts présidées par M. Phil Rourke, directeur exécutif du
CTPL. Les deux séances, qui ouvraient la voie à la discussion d’experts qui a
suivi, portaient sur les enjeux suivants : chaînes de valeur et choix en
matière de politique commerciale stratégique; et ententes commerciales
bilatérales et régionales. La discussion d’experts a mis l’accent sur le rôle
des parlements dans le commerce et le développement.
A. Séance 1 : Chaînes de valeur
et choix en matière de politique commerciale stratégique
M. Phil Rourke a commencé la séance
d’ouverture de l’atelier sur le commerce en donnant un bref résumé de la
situation économique mondiale actuelle et des perspectives prochaines. Il a
indiqué qu’alors que les marchés internationaux démontrent un regain
d’optimisme après la récession économique mondiale de 2008-2009, des défis et
des risques continuent d’être rattachés à la reprise. Il a notamment attiré
l’attention sur la possibilité d’une « récession à double creux » (« double-dip
recession »), soit une récession caractérisée par une première chute du PIB
suivie, après une reprise avortée, d’une rechute plus profonde.
Parallèlement, M. Rourke a fait
remarquer qu’il y a une différence importante entre la dernière récession et
les récessions antérieures. En particulier, il a mentionné que le contexte
mondial d’investissement et d’échanges est beaucoup plus libéral de nos jours
et qu’il comporte nettement moins de barrières commerciales et de différends
commerciaux. D’après lui, la libéralisation du commerce a consolidé les liens
entre les pays. Cette intégration entraîne moins de différends entre les
partenaires commerciaux étant donné que les économies sont, plus que jamais
auparavant, interdépendantes.
Fait encore plus important à signaler,
l’intégration économique internationale a fondamentalement modifié la façon
dont fonctionne le commerce international, donnant naissance au phénomène des «
chaînes de valeur » ou du « commerce d’intégration ». Comme l’a mentionné M.
Rourke, les pays (plus précisément leurs entreprises) ne fabriquent plus de
produits en vase clos et ne se font plus concurrence pour conquérir une part du
marché international. Ils fabriquent des produits ensemble, en faisant appel à
des facteurs de production, à des conceptions et à de la main-d’œuvre qui
proviennent de partout au monde. Il a cité en exemple l’expérience du Canada
aux États-Unis à cet égard, faisant référence aux industries de l’automobile et
de l’acier comme exemples où les processus de production des deux pays sont
fortement intégrés. Il a rappelé aux parlementaires que les pièces de véhicules
franchissent la frontière canado-américaine à plusieurs reprises lors des
diverses étapes de production et d’assemblage d’automobiles.
Faisant référence à la production et à
l’assemblage d’ordinateurs, M. Rourke a souligné que le phénomène du commerce
d’intégration s’observe aussi à l’échelle mondiale. Les divers composants sont
conçus, fabriqués et assemblés à l’échelle planétaire, ce qui fait qu’il est
pratiquement impossible de déterminer le pays de fabrication d’un produit.
Autrement dit, il a fait valoir que des termes comme « Fabriqué au Canada » ou
« Fabriqué en Chine » perdent peu à peu leur sens. En raison de cela, M. Rourke
a laissé entendre que, de façon générale, les entreprises appuient les
politiques qui favorisent la libre circulation des biens et des services à
l’échelle mondiale afin d’être les plus concurrentielles possible.
M. Rourke a aussi souligné que, bien
que le monde des affaires se soit adapté à cette nouvelle réalité du commerce
international, les gouvernements n’ont pas encore l’habitude de percevoir le
commerce de cette manière. Il a mentionné que, dans beaucoup de cas, les
gouvernements ont encore une conception mercantiliste du commerce où les exportations
sont considérées comme « favorables » dans la mesure où elles favorisent la
croissance économique et la création d’emplois, tandis que les importations
représentent des occasions « sacrifiées » au chapitre de la croissance
économique et de l’emploi. Il a sommé les personnes présentes à envisager la
politique commerciale dans l’optique des chaînes de valeur mondiales.
Au cours de la discussion qui a suivi
le discours d’ouverture de M. Rourke, les parlementaires ont échangé leurs
idées et leurs préoccupations concernant le commerce et la politique
commerciale, et ont entendu les points de vue des experts en politique
commerciale de l’Argentine, qui participaient aussi au Forum. La discussion a
porté sur un large éventail de questions, y compris la participation de
l’Argentine au Marché commun du Cône sud (Mercosur), les parallèles entre la
relation du Canada avec les États-Unis et la relation entre l’Argentine et le
Brésil, les occasions de relations économiques plus étroites entre le Canada et
l’Argentine et la notion de « libre-échange » par rapport à celle de commerce «
loyal ». Au nombre des autres questions qui ont fait l’objet de discussions,
mentionnons l’augmentation des accords commerciaux régionaux et leur incidence
sur la légitimité de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) et sur
l’environnement commercial mondial en général. La question du commerce des
services a notamment été abordée. On a indiqué que davantage de progrès avaient
été réalisés sur le plan de la libéralisation du commerce des services dans le
cadre des accords bilatéraux plutôt que dans le cadre des accords
multilatéraux, et que cela représente donc un exemple de la façon dont les
accords bilatéraux entraînent des niveaux d’accès aux marchés « fragmentés »
dans le monde.
La plus grande partie de la discussion
a porté sur la relation entre les politiques commerciales et les conséquences
sociales. Plusieurs conférenciers ont souligné la nécessité d’une politique
d’ouverture commerciale pour générer des retombées économiques et sociales
valables, notamment celles qui découlent de la diversification des marchés, de
la familiarisation aux nouvelles méthodes de production et technologies, et des
pressions concurrentielles accrues. En revanche, pour les parlementaires, il
était tout aussi important de définir l’objectif visé par la politique
commerciale. Les participants ont indiqué que la politique commerciale ne
permet pas à elle seule de régler toutes les questions qui découlent des effets
du commerce. Par conséquent, il s’avère nécessaire d’utiliser d’autres outils
pour faire front aux conséquences associées à la politique commerciale.
L’élaboration de politiques destinées à s’attaquer à des questions comme la
répartition des richesses, la protection de l’environnement et la liberté des
gouvernements de légiférer dans l’intérêt du public ont été des exemples cités
par les personnes présentes.
B. Séance 2 : Ententes
commerciales bilatérales et régionales
Le format de la deuxième séance était
quelque peu différent de la première séance. Au lieu de commencer par un exposé
donné par un conférencier invité, la deuxième séance visait à établir un
dialogue entre les parlementaires, entrecoupé d’interventions occasionnelles
des experts en politique commerciale.
Bien que la deuxième séance devait
porter principalement sur l’augmentation des accords commerciaux bilatéraux et
régionaux depuis l’impasse survenue dans le cycle de négociations de Doha de
l’OMC, les discussions ont également porté sur la hausse des accords
commerciaux bilatéraux et régionaux ainsi que sur leur nature, de même que sur
le lien entre les politiques commerciales et les retombées sociales,
poursuivant ainsi la conversation entamée lors de la première séance.
Sur la question des ententes
bilatérales, on a laissé entendre que l’augmentation de tels traités a découlé
de la lenteur des négociations commerciales multilatérales, laquelle a
contribué à cette augmentation. Compte tenu du manque de progrès réalisés à
l’OMC, les pays ont choisi de consacrer leurs ressources limitées à la
négociation d’ententes, là où des progrès concrets pouvaient être obtenus. On a
souligné que le Canada faisait partie des pays qui ont suivi cette tendance.
Son engagement dans les Amériques, bien qu’il fasse partie d’une politique plus
globale au chapitre de l’engagement politique, comprenait la négociation de
plusieurs ententes commerciales bilatérales.
Mme Juliana Peixhoto, chercheuse auprès
de la Faculté latino-américaine de sciences sociales, a laissé entendre que des
coûts économiques sont rattachés à cette tendance : les ententes bilatérales et
régionales tiennent de plus en plus compte des besoins particuliers ainsi que
des cordes sensibles et des intérêts des partenaires. À ce titre, le contenu
des accords régionaux et bilatéraux présente des écarts considérables. La «
configuration variable » grandissante observée dans les ententes commerciales
crée un dédale d’initiatives et d’engagements qui se chevauchent et complexifie
le système commercial mondial.
Toutefois, la plus grande partie de la
discussion qui eut lieu lors de cette séance a porté sur la façon de promouvoir
l’égalité et la justice par le truchement des échanges commerciaux et des
politiques commerciales. On a indiqué que davantage d’efforts doivent être
déployés pour promouvoir les échanges commerciaux dans les régions éloignées de
l’Argentine et qu’il fallait aussi étudier la croissance des échanges et les
politiques commerciales dans le contexte de la crise financière et économique
mondiale, plus particulièrement le genre de croissance nécessaire pour
s’attaquer à des questions comme la répartition des richesses, les droits dans
le domaine du travail et la dégradation environnementale.
Certains conférenciers ont également
discuté de l’importance de démocratiser la politique commerciale : la nécessité
d’inclure davantage d’intervenants lors des discussions commerciales, y compris
les parlementaires, et le besoin d’uniformiser les règles du jeu pour certains
des intervenants. On a souligné que les sociétés possèdent des ressources
considérables pour faire pression sur les gouvernements à propos de questions
commerciales particulières. Pour leur part, les gouvernements doivent
s’attaquer à des problèmes au niveau de la collectivité, plutôt qu’au niveau de
l’organisation. À ce titre, on a indiqué que les politiciens devraient
s’efforcer d’aider les citoyens aux niveaux local et communautaire afin
d’améliorer leurs propres moyens de pression pour compenser l’avantage dont
bénéficient les sociétés.
L’évolution des ententes bilatérales et
régionales a également été un sujet de discussion. On a fait observer que des
pressions sont exercées au Canada et ailleurs dans le monde pour démocratiser
les accords commerciaux : faire en sorte que les ententes fassent l’objet d’un
examen plus rigoureux par les parlementaires et intègrent mieux la
participation de la société civile tout en tenant compte des questions comme
les droits dans les domaines du travail et de l’environnement.
Les parlementaires ont également abordé
certaines questions de politique qui doivent être réglées pour améliorer
l’efficacité des ententes bilatérales et régionales. Par exemple, on a indiqué
que les gouvernements devaient améliorer les cadres stratégiques pour
promouvoir la recherche et le développement (en mettant l’accent sur le
développement), orienter les produits et chercher à accroître la
commercialisation de la recherche.
La principale conclusion de cette
séance était qu’avec l’élargissement du champ d’application des accords
commerciaux et la prise en compte des questions sociales qui découlent des
échanges commerciaux, les accords deviennent beaucoup plus complexes. Il en de
même de l’analyse de ces accords et de la compréhension de leurs répercussions.
À titre d’exemple, on a souligné qu’un puissant groupe d’intérêts exerce des
pressions pour établir des règles d’origine sur mesure afin d’avantager
certaines entreprises. De vastes connaissances sont requises au point de vue de
l’établissement de programmes pour comprendre les répercussions plus globales
de ces demandes particulières. On a également cité en exemple la question de la
réglementation des investissements directs à l’étranger (IDE). Un des
conférenciers a souligné qu’il n’y a actuellement aucun mécanisme multilatéral
en place pour réglementer les IDE et leurs conséquences sociales, économiques
et environnementales. Des efforts sont encore nécessaires pour consolider le
lien entre les IDE et les obligations contraignantes dans les sphères sociale
et environnementale.
C. Séance 3 : Rôle du Parlement
dans le commerce et le développement
La troisième et dernière séance de
l’atelier sur le commerce a pris la forme d’une discussion d’experts. Trois
conférenciers ont effectué des déclarations préliminaires : M. Ricardo
Rozemberg, chercheur auprès de l’Université de San Martin, a parlé de
l’évolution récente de la politique commerciale et des relations commerciales
en Argentine; Mme Cecilia Alemany du réseau de recherche économique du Mercosur
a commenté le lien qui existe entre le commerce et le développement ainsi que
l’importance d’améliorer les institutions régionales comme le Mercosur; et M.
Marcelo Saguier du Département des relations internationales de la Faculté
latino-américaine de sciences sociales a discuté de la question de la
responsabilité sociale d’entreprise (RSE) et du développement social.
Dans le cadre de ses observations, M.
Rozemberg a souligné que le commerce et les relations commerciales représentent
un phénomène relativement nouveau en Argentine, et que l’expérience du pays est
limitée en ce qui a trait à la façon de mettre sur pied un système commercial
plus ouvert. Il a indiqué que, jusqu’à tout récemment, l’économie de
l’Argentine était fondée sur un modèle de produit prélevé sur l’exportation.
Les exportations se limitaient à la production excédentaire qui n’avait pas été
dépensée dans le marché intérieur.
Ce modèle a évolué sur l’ordre de la
Banque mondiale, laquelle préconisait l’ouverture des marchés et la promotion
plus explicite des exportations. M. Rozemberg a cependant fait remarquer que la
nouvelle politique commerciale de l’Argentine présente des défis aux plans
législatif et judiciaire, notamment la nécessité de concevoir et de mettre en
place des politiques commerciales dans un pays qui a peu d’expérience pour ce
faire, la nécessité d’internaliser les accords commerciaux internationaux, et
l’obligation pour le système judiciaire de renforcer son rôle d’intervention
afin de régler les différends commerciaux.
M. Rozemberg a aussi abordé la question
de la participation mixte du Parlement aux enjeux de politique commerciale en
Argentine. Il a souligné que les comités parlementaires n’assument pas un rôle
actif sur le plan de l’élaboration de nouvelles règles visant à assurer la
coordination avec le pouvoir exécutif, mais que le Congrès de l’Argentine a
joué un rôle important en mettant en œuvre la taxe à l’exportation récemment
instaurée sur les produits agricoles en Argentine.
En dernier lieu, M. Rozemberg a parlé
du rôle du Comité parlementaire mixte du Mercosur au chapitre de l’élaboration
d’une politique commerciale pour les pays du Mercosur. Il a indiqué que le
Mercosur doit discuter de questions importantes et que les intervenants doivent
veiller à ce que le pouvoir exécutif ne négocie pas d’accords sans d’abord
consulter les parlements en tant que représentants de la société civile.
La deuxième conférencière était Mme
Cecilia Alemany. L’exposé de Mme Alemany a été axé sur la façon de renforcer le
lien entre le commerce et le développement économique, notamment dans le
contexte de grands bouleversements comme la crise économique et financière
mondiale qui a débuté en 2008. Elle a souligné que les réalisations économiques
et sociales s’érodent rapidement en période de crise, et qu’elles sont
difficiles à recouvrer. Elle a fait remarquer que, d’après les indicateurs
économiques, la reprise de l’Argentine à la suite de la crise financière
asiatique survenue à la fin des années 1990 a été rapide, mais que du point de
vue du développement, il a fallu une décennie complète pour rattraper les
progrès déjà réalisés.
Mme Alemany a mis en évidence un défi
important auquel sont confrontés les parlementaires pour s’attaquer aux
problèmes de développement économique, notamment ceux qui ont découlé des
crises économiques : des pressions considérables sont exercées sur ceux qui
doivent affronter de nouveau l’électorat pour ce qui est de produire des
résultats à court terme – idéalement durant leur mandat en cours – plutôt que
de mettre l’accent sur des solutions de politique à long terme. Elle a indiqué
que les crises économiques permettent aux parlementaires de poser de
s’interroger sur les failles des politiques économiques en place et de tirer
des leçons des erreurs commises dans le passé. Dans le cas présent, les
parlementaires ont la chance de travailler à l’atteinte de l’objectif à plus
long terme consistant à redéfinir le système commercial international afin
qu’il réponde aux questions et aux préoccupations locales. En revanche, à cause
du manque de vision à long terme, Mme Alemany a fait valoir que le discours
récent entourant le commerce et l’économie mondiale a affaibli l’ordre
commercial mondial.
En dernier lieu, Mme Alemany a abordé
la question des défis permanents auxquels est confronté le Mercosur sur le plan
de son évolution en tant qu’institution régionale. Elle a fait observer que 80
% des règles et des règlements du Mercosur n’ont pas été mis en œuvre par ses
États membres et a indiqué que davantage d’efforts doivent être faits au niveau
multilatéral pour réaliser des progrès dans ce secteur.
Le troisième conférencier, M. Marcelo
Saguier, a traité de la question de la RSE et du développement social dans le
contexte des investissements directs à l’étranger. Il a indiqué que le défi
fondamental que doit relever la RSE est de modifier le système de gouvernance
de sorte que les investisseurs continuent d’avoir des droits d’investissement,
mais qu’outre ces droits, ils soient aussi responsables de respecter certains
codes de conduite. Il a mentionné qu’alors que de nombreuses entreprises
considèrent qu’un système d’observation volontaire des principes de RSE devrait
être en place, les pays estiment qu’ils devraient pouvoir prévenir les dommages
et régler les problèmes à l’aide de l’ensemble de règles internationales et de
responsabilités légales liées à la réglementation de l’investissement et de la
RSE.
M. Saguier a fait valoir que l’approche
d’observation volontaire des politiques de RSE comporte des failles auxquelles
on pourrait s’attaquer en mettant en œuvre des règles contraignantes. Il a
indiqué qu’un pacte mondial pourrait constituer un mécanisme utile par lequel
établir un dialogue en vue de la conclusion d’un accord contraignant. On a
mentionné aux parlementaires que de nombreuses discussions liées à la RSE se
déroulent actuellement dans le cadre d’autres forums : le Pacte mondial des
Nations Unies; les accords d’intégration du commerce (comme le Mercosur et
l’UE); et les initiatives organisées à l’échelle nationale.
Pour conclure son exposé, M. Saguier a
discuté des mesures que pourraient prendre des pays comme le Canada et
l’Argentine pour élaborer des politiques de RSE qui dépassent le cadre des lois
nationales en vigueur. Il a d’abord proposé que les gouvernements se servent
des sources de financement comme « levier » destiné à interdire à des
organismes comme Exportation et développement Canada de fournir un soutien
financier à des entreprises qui ne respectent pas la RSC, par exemple. Il a
aussi proposé que les gouvernements commencent également à « surveiller » les
sources privées de financement en établissant des critères associés à la RSE
pour les prêts privés aux fins d’activités d’investissement. En dernier lieu,
il a mentionné que des pays comme le Canada pourraient adopter des lois qui
feraient en sorte que les opérations à l’étranger des entreprises canadiennes
soient assujetties aux lois canadiennes. Il a conclu en mentionnant que la
situation économique actuelle représente une excellente occasion de réfléchir à
la manière de réglementer l’investissement et au rôle des parlements dans le
contexte des activités effectuées par les entreprises transnationales.
Après les exposés, les parlementaires y
sont allés de leurs propres interventions et ont fait des observations sur les
témoignages fournis. Le Mercosur a été un des principaux sujets de discussion.
Les parlementaires ont discuté du fait qu’étant donné que le Mercosur est une
union douanière, ses pays membres ne peuvent pas négocier des accords de
libéralisation du commerce de façon individuelle. On a mentionné que le Mercosur
négocie des accords commerciaux en tant que bloc parce qu’il estime que ce
faisant, il renforce sa position de négociation par rapport aux économies plus
importantes, comme les États-Unis.
Les parlementaires ont également
discuté de l’évolution et de l’essor du Mercosur, notamment le fait que
l’institution dépasse maintenant le cadre d’une simple entente de coopération
et d’intégration économiques. Ils ont fait référence au programme de
main-d’œuvre sociale, à la possibilité que le Mercosur devienne une institution
de coordination, aux droits des femmes et au rôle des femmes au sein du
Mercosur, ainsi qu’à d’autres occasions de coopération sociale et technique à
l’intérieur du bloc.
Les parlementaires ont aussi soulevé la
question du risque potentiel qui découle de l’intégration de la RSE ainsi que
des dispositions plus rigoureuses dans les domaines de l’environnement et de la
main-d’œuvre au sein des accords commerciaux bilatéraux et régionaux. On a
notamment laissé entendre que de telles mesures pourraient être utilisées comme
obstacles déguisés au commerce et qu’elles pourraient avoir un effet de
distorsion sur les échanges et les marchés des produits de base.
Une autre question soulevée au cours de
la discussion concernait le fait que de nombreux pays en développement peuvent
avoir des lois rigoureuses dans les domaines de l’environnement ou du travail,
voire une politique très efficace de RSE, mais qu’ils pourraient ne pas avoir
la capacité d’appliquer leurs propres lois. De plus, aucune institution
internationale appropriée n’est en place à l’heure actuelle pour appliquer les
politiques de RSE ou les lois dans les domaines de l’environnement et du
travail. On a indiqué que des progrès pourraient être réalisés dans ce secteur
si des pays exportateurs de capitaux relativement riches comme le Canada
pouvaient appliquer leurs propres normes dans les pratiques des entreprises
nationales à l’étranger.
Enfin, les parlementaires ont discuté
des défis associés à l’élaboration de politiques qui permettent d’atteindre un
juste équilibre entre la production de résultats positifs à court et à long
termes pour faire face aux crises économiques. On a mentionné que peu
d’instruments sont disponibles pour mesurer l’ampleur d’une crise ou les
répercussions prévues des diverses interventions politiques sur la production
et l’activité économique. Cette absence d’instruments fait qu’il est difficile
d’étudier et de mettre en œuvre des options stratégiques appropriées qui soient
dans le plus grand intérêt économique à long terme aux niveaux national et
international.
AUTRES RENCONTRES
En plus de participer à l’atelier sur
le commerce, la délégation canadienne a également eu l’occasion de renforcer
son réseau de contacts en Argentine en rencontrant plusieurs membres du Congrès
de l’Argentine, ainsi que des universitaires étudiant le Canada et des
représentants d’entreprises canadiennes qui font des affaires en Argentine.
A. Rencontres avec le
vice-président de l’Argentine et les membres du Sénat et de la Chambre des
députés de l’Argentine
La délégation canadienne a eu l’honneur
de tenir sa première rencontre officielle à Buenos Aires avec M. Julio Cobos,
vice-président de la République de l’Argentine. Le président du Comité des
affaires étrangères au Sénat de l’Argentine et des membres du groupe d’amitié
interparlementaire Canada-Argentine participaient aussi à cette rencontre.
La sénatrice Ringuette a commencé la
réunion en faisant valoir la relation économique et le partenariat du Canada
avec l’Argentine. Elle a discuté de l’objectif de la visite de la délégation,
qui consistait à participer à l’atelier sur le commerce et à établir des
relations efficaces entre les parlementaires canadiens et leurs homologues dans
d’autres pays membres du FIPA.
Le vice-président Cobos a aussi mis en
évidence ce qu’il considère comme étant les forces de la relation établie entre
le Canada et l’Argentine. Il a discuté des investissements effectués par le
Canada en Argentine, du fait que les échanges entre les deux pays ont augmenté
en 2009, et ce, malgré la crise financière et économique qui a entraîné la
chute du flux des échanges, ainsi que de la mesure dans laquelle la relation
commerciale bilatérale est renforcée par la coopération sociale, culturelle et
parlementaire entre le Canada et l’Argentine.
Au cours de la discussion qui
s’ensuivit, les parlementaires ont commenté un certain nombre de questions
économiques, y compris la décision récente de l’Argentine d’utiliser certaines
de ses réserves étrangères pour payer une partie de sa dette nationale. Les
membres ont aussi parlé des craintes d’inflation en Argentine et du lien qui
existe entre l’inflation et la pauvreté.
De plus, les parlementaires ont recensé
les nombreux intérêts et points communs entre le Canada et l’Argentine. La
question de la réforme de l’éducation en Argentine a notamment été soulevée. La
délégation a été informée que l’Argentine est en train de mettre en œuvre un
ensemble de réformes afin de faire front à la baisse de la qualité de
l’éducation dans ce pays. On a souligné que le Canada et l’Argentine
considèrent tous deux que la santé et l’éducation constituent des besoins
fondamentaux, et que ce sont des secteurs importants de croissance économique
et de développement social.
On a aussi fait observer que le Canada
et l’Argentine ont des problèmes semblables en ce qui a trait aux champs de
compétence du fédéral et des provinces dans les domaines de la santé et de
l’éducation, ainsi qu’à la capacité des provinces de financer les programmes
dont ils sont responsables. On a informé la délégation que les provinces de
l’Argentine font valoir qu’elles n’obtiennent pas les revenus nécessaires, que
ce soit par l’entremise de leurs règles d’imposition ou des transferts directs
du gouvernement fédéral, pour financer correctement leurs responsabilités
grandissantes dans ces secteurs. On a également souligné la présence d’écarts
considérables entre les provinces de l’Argentine. Tandis que certaines
provinces, comme Buenos Aires, sont riches, d’autres sont aussi pauvres que
certains des pays africains les plus pauvres. Les membres de la délégation
canadienne ont fait remarquer que ces défis stratégiques ressemblent
étrangement à ceux du Canada.
B. Rencontre avec le ministère
des Affaires étrangères de l’Argentine
La délégation canadienne a rencontré
des représentants du ministère des Affaires étrangères de l’Argentine,
notamment M. Victorio Taccettii, secrétaire des relations internationales, et
M. Tony Trombetta, directeur général pour l’Amérique du Nord. Cette rencontre a
permis à la délégation canadienne de discuter des questions commerciales avec
les principaux représentants du gouvernement argentin. Deux questions générales
ont été abordées lors de ces discussions : les questions afférentes au commerce
multilatéral à l’OMC; et les relations commerciales entre le Canada et
l’Argentine et les occasions de renforcer la coopération économique entre les
deux pays.
En ce qui a trait à la question des
négociations commerciales multilatérales, on a informé la délégation que
l’Argentine voit d’un bon d’œil un certain nombre de positions prises par le
Canada à l’OMC. Les représentants ont notamment souligné la position du Canada
envers la protection de la propriété intellectuelle, en particulier dans le
secteur de la protection conférée par un brevet touchant les produits
pharmaceutiques, ainsi que sa position concernant la gestion des
approvisionnements dans le secteur agricole. Ils ont fait observer que la loi
sur les brevets en Argentine n’est pas aussi élaborée qu’au Canada et, qu’à ce
titre, ils avaient hâte de discuter du lien qui existe au Canada entre la
protection conférée par un brevet et la loi sur la concurrence. Les
parlementaires canadiens ont donc discuté du coût des médicaments pharmaceutiques
pour le système de soins de santé, et de la nécessité de trouver le juste
équilibre entre la protection des droits de propriété et la hausse du prix des
médicaments sur ordonnance.
Pour ce qui est de la question de la
gestion des approvisionnements, les parlementaires ont discuté de l’appui
politique généralisé envers le système en place au Canada. Ils ont fait
remarquer que le Canada, en plus de défendre vigoureusement la gestion des
approvisionnements auprès de l’OMC, a une politique normalisée visant
l’exemption des produits laitiers, de la volaille et des œufs de ses accords
commerciaux bilatéraux.
La discussion à propos de la relation
entre le Canada et l’Argentine a porté sur les similitudes entre les deux pays.
Les deux pays partagent une frontière avec des économies dominantes, les
États-Unis dans le cas du Canada et le Brésil dans le cas de l’Argentine. De
plus, tous deux se fient aux échanges commerciaux avec de plus grands pays
comme moteur important de la croissance économique.
La rencontre a également permis à la
délégation d’examiner les secteurs où une coopération plus étroite pourrait
être établie avec l’Argentine. On a laissé entendre que les occasions de liens
plus étroits existent dans des secteurs comme la coopération dans le domaine de
la science et de la technologie, notamment la production alimentaire, ainsi que
dans le secteur de l’énergie renouvelable. On a indiqué que l’énergie de
remplacement était sans doute le secteur le plus prometteur pour renforcer la
coopération entre les deux pays.
C. Rencontre avec l’Association
argentine d’études canadiennes
La délégation a participé à un déjeuner
de travail informel avec des représentants de l’Association argentine d’études
canadiennes (ASAEC). L’ASAEC est la seule association de ce genre au monde.
Cette association a été créée en 1997 dans le but de réunir des Canadiens et
des personnes qui s’intéressent à la culture et à la société canadiennes afin
de mieux faire comprendre le Canada au sein de l’Argentine. L’Association s’est
aussi donné comme mandat de renforcer les liens entre les deux pays, notamment
dans des secteurs comme la science et la culture.
Les représentants de l’ASAEC ont donné
un aperçu du mandat et des activités de l’organisation aux membres de la
délégation. Ils ont indiqué que leurs travaux portent sur les aspects culturels
des études canadiennes, ce qui la démarque des autres programmes d’études
canadiennes. En mettant l’accent sur les aspects culturels du Canada, l’ASAEC
essaie de promouvoir les valeurs canadiennes et le mode de vie canadien en
Argentine. Certaines des initiatives mises en place par l’ASAEC pour atteindre
cet objectif comprennent la promotion de liens plus étroits entre les
professeurs canadiens et argentins, et les échanges d’étudiants entre les deux
pays.
La délégation canadienne a eu une
discussion animée avec les dirigeants et le personnel de l’ASAEC. Les sujets
abordés comprenaient l’étude de l’ASAEC du modèle canadien pour les jeunes
contrevenants et l’incarcération des jeunes, l’importance des relations
interparlementaires pour nouer des liens entre les pays et les questions liées
à l’agriculture et à l’exploitation minière en Argentine.
D. Rencontre avec le chef de la
Commission de l’énergie de l’Argentine
La délégation canadienne avait prévu
une rencontre avec le président du Comité de l’énergie de la Chambre des
députés, le délégué Fernando Solanas, durant la matinée du 18 mars 2010.
Malheureusement, les événements survenus au Congrès de l’Argentine ont empêché
M. Solanas d’assister à la réunion. La journée précédente représentait le
premier jour de séance du Congrès depuis que le parti de la présidente
argentine Cristina Fernández de Kirchner avait perdu le contrôle de la Chambre
des députés lors des élections de mi-mandat de juin 2009, un événement rare
dans la vie politique de l’Argentine. La délégation canadienne s’est fait dire
que le premier jour de séance avait été plutôt tumultueux et qu’il ne s’était
terminé qu’à 4 h 30. En conséquence, M. Solanas n’était malheureusement plus disponible.
La délégation canadienne a donc
rencontré M. Felix Herrero, chef de la Commission de l’énergie de l’Argentine.
Les deux parties ont discuté de la relation positive qu’entretiennent le Canada
et l’Argentine dans le secteur de la coopération nucléaire et des opinions sur
la puissance nucléaire comme source d’électricité en Argentine. On a indiqué
que l’Argentine cherche à renforcer sa capacité en énergie nucléaire et que le
Canada a été un partenaire efficace pour aider l’Argentine à renforcer ses compétences
dans ce secteur.
La question de l’énergie de
remplacement a également fait l’objet de longues discussions. La délégation
canadienne a proposé de collaborer de façon plus étroite avec l’Argentine pour
l’aider à envisager d’autres sources d’énergie de remplacement comme l’énergie
solaire, l’énergie éolienne et l’énergie marémotrice. On a mentionné aux
membres de la délégation que certains s’opposent à l’énergie nucléaire et à
l’énergie hydroélectrique en raison des dommages environnementaux que ces types
d’énergie peuvent entraîner. Dans le cas de l’énergie nucléaire, les
préoccupations concernent l’élimination des déchets radioactifs, tandis que
pour l’énergie hydroélectrique, ce sont les dommages éventuels aux écosystèmes
locaux qui soulèvent des inquiétudes.
Des questions touchant l’exploitation
minière ont aussi été soulevées. M. Herrero a donné aux membres de la
délégation un aperçu de certaines des questions de compétence liées à la
propriété et à la taxation des ressources et de l’activité minières en
Argentine. Exception faite de l’uranium et du pétrole, l’exploitation minière
est régie par les provinces en Argentine, mais celles-ci ont indiqué ne pas
obtenir une part importante des redevances, des impôts et des autres retombées
économiques associés à l’activité minière. La délégation canadienne a indiqué
que le Canada fait face à des problèmes semblables. Alors que les ressources
souterraines au Canada sont également régies par les provinces, le gouvernement
fédéral perçoit des impôts auprès des sociétés et des particuliers pour les
activités minières et les activités de production d’énergie.
E. Rencontre avec le Président
de la Chambre des députés et les représentants des comités parlementaires de
l’Argentine
Le jeudi 18 mars 2010, lors de ce qui a
peut-être été la rencontre la plus importante de sa mission à Buenos Aires, la
délégation canadienne a eu l’occasion de rencontrer M. Eduardo Fellnerle, le
Président de la Chambre des députés, ainsi que des représentants du Comité
Mercosur de l’Argentine, du Comité des relations internationales, du groupe
d’amitié interparlementaire Canada-Argentine de la Chambre des députés et des
membres du comité du commerce au Sénat. Même si les députés argentins avaient
travaillé jusqu’à 4 h 30 dans le cadre d’une séance marathon du Congrès, un
grand nombre d’entre eux ont participé à la rencontre.
Mme Gabriela Michetti, la présidente du
Comité Mercosur, a ouvert la réunion en mentionnant combien elle admirait et
respectait le Canada, notamment pour le travail du Canada dans le domaine de
l’éducation et ses efforts pour améliorer l’accessibilité des personnes
handicapées. Elle a également parlé du Mercosur et de l’Accord de libre-échange
nord-américain (ALENA), se disant intéressée à échanger des idées sur les deux accords
ainsi que sur leur interprétation.
La sénatrice Ringuette est intervenue
en présentant la délégation canadienne et en soulignant les attitudes et les
valeurs communes des Canadiens et des Argentins, notamment dans des secteurs
comme les droits de la personne, l’éducation, le commerce et la coopération
dans des domaines tels que l’énergie et la science et la technologie. La
sénatrice Ringuette a également résumé les débats qui ont eu lieu lors de
l’atelier sur le commerce qui s’est tenu deux jours plus tôt. Beaucoup de
parlementaires argentins n’ont pu participer à l’atelier parce qu’ils se
préparaient à la journée d’ouverture de la nouvelle séance du Congrès.
Ces déclarations préliminaires ont été
suivies des discussions et de l’échange de points de vue les plus animés de
toutes les rencontres de la délégation canadienne à Buenos Aires. Les
parlementaires canadiens et argentins ont effectué de nombreuses interventions
et le temps consacré à la rencontre était écoulé bien avant la fin des
discussions.
Un large éventail de sujets ont été
abordés lors de cette rencontre, allant des récentes entreprises de coopération
entre le Canada et l’Argentine, y compris l’accord sur la sécurité sociale qui
a été signé dernièrement entre les deux pays et les activités conjointes en
Haïti, en passant par l’activité minière, la demande mondiale de ressources
naturelles, la conversation des terres et des eaux et les changements
climatiques, ainsi que les tensions diplomatiques entre l’Argentine et le
Royaume-Uni pour l’exploration pétrolière et gazière dans les Îles Malouines
(Falkland) qui font l’objet d’un litige.
Alors que les parlementaires ont abordé
un éventail de sujets lors de cette rencontre, la requête par les
parlementaires argentins d’accroître les relations bilatérales dans le secteur
de la coopération dans le domaine de la science et de la technologie entre le
Canada et l’Argentine a été un des principaux points de discussion. La
délégation canadienne a offert de transmettre cette requête au gouvernement du
Canada et a également proposé qu’une délégation de parlementaires argentins se
rende au Canada pour faire avancer cet objectif.
Les parlementaires argentins ont aussi
fait observer qu’il est inhabituel qu’une délégation de parlementaires doive se
rendre à l’étranger dans le but d’intensifier des relations commerciales. Ils
ont indiqué que l’atelier sur le commerce représente un outil important et
utile qui permet aux parlementaires de discuter des questions commerciales de
façon informelle. Ils ont également mentionné que l’atelier bilatéral entre le
Canada et l’Argentine leur permettait d’avoir une ouverture d’esprit et
d’envisager de jouer un rôle plus actif au chapitre de la politique
commerciale.
La délégation canadienne a aussi
entendu beaucoup de rétroaction positive concernant l’importance et le rôle
potentiel du FIPA dans l’hémisphère. Certains parlementaires argentins ont
indiqué souhaiter que le FIPA organise un événement comparable à l’atelier sur
le commerce, mais qui mettrait l’accent sur la pertinence des relations
fédérales-provinciales dans le secteur du développement économique et social.
La compétence partagée ou litigieuse, notamment dans le domaine de l’extraction
des ressources, est une question importante en Argentine tout comme dans d’autres
pays de l’hémisphère.
Les parlementaires argentins ont aussi
fait observer que de nombreux points qui se trouvent souvent à l’ordre du jour
du FIPA portent sur des sujets qui présentent un intérêt particulier pour
l’Argentine, notamment l’économie, les finances et la dette, le commerce et la
lutte contre le terrorisme. Ils ont mentionné que pour tirer pleinement parti
des occasions présentées par l’association, l’Argentine cherchera à créer une
section argentine du FIPA, laquelle prendra pour modèle la Section canadienne.
À la fin de la rencontre, on a
généralement reconnu que les participants n’avaient fait qu’effleurer une
multitude de questions que tous avaient hâte de régler. Si le temps l’avait
permis, ces discussions auraient abordé des questions comme l’investissement
étranger dans les mines, l’assurance environnementale pour les projets
d’exploitation des ressources, la prise en compte des leçons tirées de l’ALENA
et du Mercosur, la façon dont le Canada a répondu à la hausse de la demande mondiale
de matières premières et l’établissement d’une coopération bilatérale plus
étroite entre le Canada et l’Argentine.
La sénatrice Ringuette a conclu les
discussions en soulignant que les parlementaires canadiens sont également
intéressés à examiner ces questions avec leurs homologues argentins. Elle a
souligné que les discussions telles que celles qui venaient d’avoir lieu sont
un exemple parfait des raisons pour lesquelles les parlementaires argentins
doivent participer au FIPA : échanger des idées et miser sur leurs expériences
mutuelles avec leurs homologues de l’hémisphère. Des institutions comme le FIPA
et le groupe d’amitié interparlementaire Canada-Argentine ont été créés
expressément pour poursuivre ce genre de dialogue.
F. Rencontre avec la Commission
de la science et de la technologie de la Chambre des députés
La délégation canadienne a rencontré
les parlementaires qui siègent à la Commission de la science et de la
technologie à la Chambre des députés. Le but de la rencontre était de discuter
des questions d’intérêt commun et d’examiner les secteurs où une coopération
plus étroite pourrait être établie entre le Canada et l’Argentine dans le
domaine de la science et de la technologie.
On a fait valoir, dès le début de la
rencontre, la coopération bilatérale actuelle en science et en technologie. Les
parlementaires ont souligné le fait que la technologie canadienne est déjà
présente en Argentine avec le réacteur nucléaire CANDU. En fait, peu après le
retour de la délégation canadienne au Canada, on a annoncé la construction
d’une quatrième centrale nucléaire en Argentine, laquelle utilisera le réacteur
CANDU.
Les parlementaires canadiens ont
également indiqué que des occasions considérables de renforcer la coopération
dans le domaine de la science et de la technologie existent aussi dans d’autres
secteurs, notamment l’agriculture et les technologies environnementales. En ce
qui a trait à l’agriculture, on a mentionné qu’il était nécessaire de
diversifier la production pour répondre aux demandes considérables de produits
agricoles dans les secteurs de l’alimentation, des combustibles et des aliments
pour animaux ainsi qu’à des fins industrielles. Pour ce qui est des
technologies environnementales, les parlementaires ont discuté de la
coopération dans les domaines de la gestion des eaux usées et des sources
d’énergie renouvelable, comme l’énergie solaire.
Les participants ont aussi abordé le
rôle du gouvernement pour promouvoir et développer la science et la
technologie. Ils ont parlé de l’importance de mettre en place un cadre
législatif approprié pour faciliter la recherche et le développement ainsi que
du rôle que le gouvernement peut jouer pour veiller à commercialiser
efficacement la recherche. En outre, les deux parties ont discuté de
l’importance de bénéficier du cadre législatif approprié pour faciliter la
recherche ainsi que les subventions gouvernementales requises pour encourager
la recherche en science et en technologie. La délégation canadienne a été
informée que l’Argentine examinait la possibilité de mettre en œuvre un cadre
de réglementation national au cours de l’année. Les parlementaires canadiens
ont offert à leurs homologues argentins de leur faire part de l’expérience
canadienne au chapitre de la conception et de la mise en œuvre des règlements
par l’intermédiaire de l’ambassade du Canada à Buenos Aires.
G. Rencontre avec des
représentants d’entreprises canadiennes
La dernière rencontre de la délégation
canadienne a eu lieu à l’ambassade du Canada à Buenos Aires, où les membres ont
rencontré des représentants d’entreprises canadiennes faisant des affaires dans
le pays. Beaucoup des entreprises œuvraient dans le domaine des opérations
minières en Argentine, bien que d’autres entreprises, notamment celles des
industries de la construction et du secteur agroalimentaire, étaient également
présentes.
Au cours de cette rencontre, trois
thèmes généraux ont fait l’objet de discussions, soit le rôle de l’Argentine au
sein du Mercosur et l’avenir de l’institution; l’activité minière en Argentine;
et les politiques commerciales de l’Argentine, notamment ses taxes à
l’importation sur les produits agricoles.
En ce qui a trait au Mercosur, les
participants avaient des opinions divergentes quant à l’avenir de
l’institution. Certains ont fait observer que le Mercosur est une institution
qui met de moins en moins l’accent sur le libre-échange et l’économie et
qu’elle devient de plus en plus une association générale de pays. Un
participant a indiqué que le Venezuela fait maintenant partie du Mercosur en tant
qu’entité politique, mais que ce pays ne participe pas au tarif extérieur
commun qui définit l’union douanière. On a laissé entendre que les différences
observées au chapitre des politiques monétaires, des règlements et des
situations de développement économique au sein Mercosur constituaient des
obstacles à long terme pour l’avenir de l’institution. D’autres participants ne
partageaient pas ce point de vue, faisant valoir que le Mercosur a en fait un
avenir prometteur. D’après certains, le Mercosur continue de croître et
d’évoluer vers l’atteinte de son objectif à long terme d’essayer d’égaler le
modèle de l’Union européenne. Pour ce faire, on a indiqué que le Mercosur
pourrait adopter une devise commune au cours des cinq à sept prochaines années.
Les discussions concernant la question
de l’exploitation minière en Argentine ont abordé un certain nombre d’enjeux.
Au nombre de ceux-ci, mentionnons les préoccupations environnementales
associées à l’activité minière. On a mentionné que les contrôles miniers en
Argentine sont suffisants, mais qu’on a des préoccupations grandissantes
concernant l’incidence de l’exploitation minière sur l’environnement. Une des
préoccupations particulières qui a été mentionnée a trait à la mise en œuvre de
certaines des lois environnementales du pays. Des participants ont laissé
entendre que les provinces les plus pauvres de l’Argentine n’ont pas les
ressources nécessaires pour appliquer ces lois. Ce manque d’application a
contribué à l’essor d’un mouvement de lutte contre l’exploitation minière en
Argentine. Le pays a récemment mis en œuvre une interdiction concernant
l’exploitation à ciel ouvert et l’utilisation de certains produits chimiques
lors du processus d’extraction.
La question de la compétence
fédérale-provinciale en matière d’exploitation minière a également été soulevée
lors de cette rencontre. Des représentants d’entreprise ont fait valoir que le
gouvernement fédéral perçoit des droits d’exportation sur l’exploitation
minière (laquelle est régie par les provinces en Argentine), mais qu’il ne
verse pas ces revenus sans condition aux provinces. La délégation s’est fait
dire que les provinces cherchent des façons de soutirer plus de l’avantage
financier découlant de l’activité minière qui se déroule dans leurs provinces.
Le dernier sujet de discussion
important, soit l’imposition de taxes à l’exportation sur les produits
agricoles en Argentine, est une question complexe. Au cours des dernières
années, l’Argentine a mis en œuvre ou a augmenté considérablement les taxes à l’exportation
dans le but d’accroître les recettes fédérales. La délégation a été informée
que même si celles-ci diminuent la compétitivité des produits argentins sur les
marchés étrangers, les taxes à l’exportation constituent une source importante
de recettes gouvernementales dans un pays qui compte des flux de revenus
relativement restreints. Bien qu’on ait fait valoir que la politique sur les
taxes à l’exportation soit une mesure populaire en Argentine, certaines
entreprises canadiennes ont fait remarquer qu’il est passablement difficile de
s’adapter aux nouvelles règles et politiques gouvernementales, notamment celles
qui représentent des obstacles au commerce.
CONCLUSION
La délégation représentant la Section
canadienne du FIPA a effectué une visite productive à Buenos Aires. Elle a
réussi à atteindre ses deux principaux objectifs : participer à l’atelier sur
le commerce à l’intention des parlementaires; et, par l’entremise du FIPA,
nouer des liens plus étroits avec les parlementaires argentins.
L’atelier sur le commerce a offert
beaucoup de renseignements utiles et a constitué une excellente occasion pour
les parlementaires d’examiner des questions difficiles au chapitre de la
politique commerciale d’une façon transparente et informelle, avec le concours
du CTPL et le savoir-faire des principaux experts en commerce de l’Argentine.
Les parlementaires argentins appuyaient l’événement et se sont efforcés de
démontrer à la délégation canadienne la nécessité de renforcer les
connaissances des parlementaires au chapitre des échanges commerciaux.
La seule fausse note à l’atelier sur le
commerce est le moment auquel il a eu lieu puisqu’il s’est déroulé au beau
milieu d’une période de tensions politiques en Argentine. Le parti de la
présidente argentine Cristina de Kirchner avait récemment perdu le contrôle du
Congrès, entraînant l’instabilité des circonstances politiques alors que les
parlementaires argentins se préparaient à la séance d’ouverture du Congrès.
Étant donné que la séance d’ouverture se tenait le lendemain de l’atelier, peu
de parlementaires argentins ont été en mesure d’assister à l’événement en
personne, bien qu’un grand nombre d’entre eux ont été représentés par leurs
conseillers politiques.
La délégation canadienne est toutefois
convaincue que l’intérêt à l’égard de la tenue de tels ateliers est élevé en
Argentine. Ce constat est devenu apparent deux jours après l’atelier lors d’une
rencontre extrêmement dynamique et fort courue avec les parlementaires
argentins. Nombre des questions examinées au cours de l’atelier sur le commerce
ont été abordées de nouveau lors de cette rencontre, et on a généralement
reconnu que les parlementaires n’avaient réussi qu’à faire un survol de ces
questions avant la fin de la période allouée à la rencontre.
Selon la délégation canadienne, on a
également réussi à faire valoir aux parlementaires argentins l’importance du
FIPA en tant que forum de dialogue et de diplomatie entre les parlementaires,
ainsi qu’en tant qu’instrument au moyen duquel les parlementaires de l’hémisphère
peuvent avoir des discussions ouvertes sur les questions et les défis
stratégiques auxquels sont confrontés les pays des Amériques. En effet, un des
objectifs précis de la délégation était d’encourager l’Argentine à créer une
section argentine permanente du FIPA, comparable à la Section canadienne. La
délégation canadienne est heureuse de signaler que plusieurs parlementaires
argentins se sont engagés à mettre sur pied un tel organisme permanent.
En
dernier lieu, la délégation aimerait remercier le ministère des Affaires
étrangères et du Commerce international, le Secrétariat technique du Forum
interparlementaire des Amériques, le Centre de droit et de politique
commerciale et l’ambassade du Canada en Argentine de leur soutien lors de la
planification et de la coordination du programme.
Respectueusement
soumis,
Randy
Hoback, député
Président, Section canadienne
du Forum interparlementaire des Amériques
(FIPA)