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Rapport

Une délégation de l’Association interparlementaire Canada-Royaume-Uni était en visite en Écosse et à Londres, au Royaume-Uni, du 19 au 26 janvier 2013. 

La délégation, dirigée par le député James Rajotte, était constituée des membres suivants : l’honorable Ghislain Maltais, sénateur; l’honorable Terry Mercer, sénateur; M. John Carmichael, député; M. Malcolm Allan, député. Les membres de la délégation étaient accompagnés d’Elizabeth Kingston, secrétaire administrative de l’Association interparlementaire Canada-Royaume-Uni.

Voici les thèmes de la visite :

1) un aperçu du système parlementaire, ce qui comprend la déconcentration des pouvoirs au Royaume-Uni, au profit de l’Écosse en particulier;

2) le processus référendaire en Écosse, notamment le décret prévu à l’article 30 de la Scotland Act et les dispositions législatives en découlant;

3) le processus de consultation publique;

4) le débat sur l’indépendance;

5) les scénarios postréférendaires.

À Westminster, voici les sujets abordés lors des discussions avec les membres de la délégation :

1) le Partenariat commercial entre le Canada et l’Union européenne et la crise de la dette en Europe;

2) la promotion du partenariat stratégique entre le Canada et le Royaume-Uni;

3) la situation financière en Grande-Bretagne vue de plus près.

1) Un aperçu du système parlementaire, ce qui comprend la déconcentration des pouvoirs au Royaume-Uni

Les Parlements séparés de l’Écosse et de l’Angleterre ont été abolis par l’Acte d’union de 1707, qui a établi un Parlement unique à Westminster, à Londres.

Par contre, l’Écosse a conservé de nombreuses caractéristiques distinctes, dont sa propre Église et son système de droit. Certains pouvoirs administratifs ont été transférés à l’Écosse en 1885 avec la création du Scottish Office (Bureau de l’Écosse) en tant que ministère du gouvernement britannique chargé de bon nombre des questions qui, en Angleterre et au pays de Galles, relevaient des ministères britanniques traditionnels, telles la santé, l’éducation, la justice, l’agriculture, les pêches et l’agriculture. Cette nouvelle entité était chapeautée par un ministre britannique, le secrétaire d’État à l’Écosse.

En 1979, les propositions du gouvernement en place visant à établir une Assemblée écossaise ont été soumises à un référendum. Les propositions ont reçu l’appui d’une faible majorité, qui ne représentait toutefois pas 40 % de l’électorat, soit le seuil fixé pour y donner suite.

En 1989 était mise en place la Convention constitutionnelle écossaise constituée de représentants de la société civile écossaise et de certains des partis politiques. Elle était chargée de rédiger un projet de dévolution détaillé comprenant des propositions relatives à l’élection directe d’un Parlement écossais doté de vastes pouvoirs législatifs. Le rapport de la Convention, publié en 1995, a donné lieu à de nouvelles propositions que le gouvernement britannique a présentées en 1997.

Ces propositions ont été approuvées par une majorité écrasante lors du référendum du 11 septembre 1997 : 74 % des électeurs ont voté pour l’établissement d’un Parlement écossais, et 63 % ont voté pour que celui-ci ait le pouvoir de fixer le taux de base de l’impôt sur le revenu.

À la suite de l’adoption de la Scotland Act 1998, l’exécutif écossais (officiellement désigné gouvernement écossais depuis août 2007) et le Parlement écossais ont été constitués le 1er juillet 1999 - date du transfert aux ministres écossais des pouvoirs dévolus qu’exerçaient auparavant le secrétaire d’État à l’Écosse et d’autres ministres britanniques.

Les élections au Parlement écossais combinent le système uninominal à un tour traditionnel (pour l’élection de 73 députés de circonscription) et un mode de représentation proportionnelle dit du membre additionnel (pour l’élection de 56 députés régionaux, sept pour chacune des huit régions qui élisent un représentant au Parlement européen).

2) Le processus référendaire en Écosse, notamment le décret prévu à l’article 30 de la Scotland Act et les dispositions législatives en découlant

Sous Tony Blair, et à la suite de l’élection générale de 1997, le projet de déconcentration des pouvoirs en faveur de l’Écosse renaît au sein du gouvernement du Royaume-Uni. La Scotland Act de 1998 établit le cadre législatif nécessaire pour instituer le Parlement et l’exécutif écossais. Près de 300 ans après l’Acte d’union de 1707 ayant fusionné les Parlements écossais et anglais à Westminster, le Parlement écossais se réunissait de nouveau en 1999.

L’élection de mai 2011 a porté au pouvoir le Parti national écossais (SNP) pour la quatrième session du Parlement écossais. En remportant 69 des 129 sièges, le SNP a obtenu la majorité qui avait échappé à tous les partis depuis la création du Parlement écossais en 1999. Le dirigeant du SNP, Alex Salmond, est devenu premier ministre. Une des principales promesses électorales du parti était de tenir un référendum sur l’indépendance de l’Écosse.

Par conséquent, en janvier 2012, le gouvernement écossais a présenté des propositions en vue de la tenue en 2014 d’un référendum sur l’indépendance de l’Écosse. En octobre 2012, le premier ministre Alex Salmond et le premier ministre britannique, David Cameron, signaient l’Accord d’Édimbourg, confirmant ainsi le mandat du Parlement écossais de tenir un référendum sur l’indépendance de l’Écosse. L’accord balisait comme suit le processus :

-le fondement juridique serait clair;

-le Parlement écossais adopterait la loi nécessaire;

-le processus serait mené de manière à susciter la confiance des Parlements, des gouvernements et de la population;

-sa teneur serait juste et permettrait au peuple écossais d’exprimer sa volonté de manière décisive et d’aboutir à un résultat qui commanderait le respect de tous.

Étant donné que le gouvernement du Royaume-Uni a compétence en matière constitutionnelle, il a accordé au Parlement écossais le pouvoir de tenir le référendum en vertu de l’article 30 de la Scotland Act, de sorte que les pouvoirs du Parlement et de l’exécutif écossais pourront être remaniés au fil du temps par un accord conclu entre les deux Parlements et sanctionné par décret.

3) Le processus de consultation publique

La délégation a constaté la diversité des arguments de part et d’autre du débat référendaire. Les partisans du oui ne voient pas pourquoi l’Écosse ne devrait pas avoir la maîtrise complète de ses affaires, du fait que, sous le système actuel, les besoins uniques de l’Écosse ne sont pas pris en compte par Westminster et les intérêts écossais sont toujours subordonnés à ceux de l’Angleterre.

Ceux qui s’opposent à l’indépendance de l’Écosse craignent une perte de stabilité financière et de sécurité. L’État nouvellement indépendant serait en concurrence avec son plus proche, et plus grand, voisin, le Royaume-Uni. De plus, en gardant la livre pour monnaie, l’Écosse dépendrait d’une banque étrangère. Bref, ceux qui sont contre l’indépendance jugent la séparation une approche trop radicale et trop risquée. Il serait plus avantageux pour l’Écosse de demeurer au sein du Royaume-Uni et d’accroître ses pouvoirs par dévolution. C’est l’approche à laquelle souscrit le très honorable lord Wallace de Tankerness, c.r., avocat général pour l’Écosse.

Si l’Écosse devait voter pour l’indépendance, le scénario le plus vraisemblable serait le suivant :

-L’Écosse conserverait le monarque comme chef d’État, et continuerait de faire partie du Commonwealth britannique.

-L’Écosse conserverait la livre, à moins de voter expressément pour l’adoption de l’euro.

-L’indépendance ne se ferait pas tout de suite. Il faudrait négocier des enjeux comme la part écossaise de la dette du Royaume-Uni, le partage des champs pétroliers de la mer du Nord, une union monétaire éventuelle, et la prise en charge des bases militaires et des bureaux du gouvernement britannique. De plus, le statut de l’Écosse en tant que membre de l’OTAN et de l’Union européenne ne serait pas assuré.

Les membres de la délégation ont rencontré Mme Fiona Hyslop, secrétaire du Cabinet à la Culture et aux Affaires extérieures. Celle-ci a déclaré qu’à la suite d’une victoire du oui, la défense et la sécurité demeureraient la responsabilité première du gouvernement écossais. Par ailleurs, elle a fait valoir que seule une Écosse indépendante pourrait accéder à l’Union européenne.

Si l’Écosse devait voter contre l’indépendance, on s’attend à ce que le débat se porte sur le transfert de pouvoirs accrus à Holyrood. La date du référendum a été fixée au 18 septembre 2014. La question sera celle-ci : l’Écosse devrait-elle être un pays indépendant? Oui ou non. D’autre part, les citoyens écossais âgés de 16 et 17 ans auront le droit de voter lors du référendum, conformément à une politique de longue date du Parti national écossais. L’Écosse a obtenu le pouvoir d’élargir le droit de vote pour ce référendum seulement. La Commission électorale est chargée de superviser le référendum, et fera rapport des résultats au Parlement écossais. Le scrutin et son dépouillement seront administrés comme dans le cas d’une élection locale. La campagne en faveur de l’indépendance de l’Écosse, Yes Scotland, a été lancée en mai 2012 avec l’appui du SNP, du Parti vert écossais et du Parti socialiste écossais, tandis que la campagne en faveur du maintien de l’Écosse au sein du Royaume-Uni, Better Together, s’est amorcée en juin 2012, sous la direction de M. Alaistair Darling, ancien chancelier de l’Échiquier, et bénéficie de l’appui du Parti conservateur, des libéraux démocrates et des travaillistes.

4) Le débat sur l’indépendance

Les membres de la délégation ont eu l’occasion de s’entretenir avec des représentants des deux camps. Le débat a porté sur des questions liées à la Constitution, aux finances, à la monnaie, à la défense, ainsi qu’à l’appartenance à l’Union européenne et aux Nations Unies.

Le principal enjeu constitutionnel a trait au statut du monarque comme chef d’État et à la question de savoir si l’Écosse fera partie du Commonwealth. Il a également été question de la nature des relations entre l’Écosse et le reste du Royaume-Uni et de l’imposition possible du passeport pour franchir les frontières.

Pour ce qui est des répercussions financières, le coût de l’établissement d’une Écosse indépendante ainsi que la politique financière et monétaire d’une Écosse séparée ont soulevé des questions. L’Écosse continuerait-elle d’utiliser la livre, et, le cas échéant, serait-elle financièrement indépendante? D’autre part, comment établirait-on et répartirait-on les redevances pétrolières de la mer du Nord? L’Écosse produirait-elle des recettes fiscales suffisantes pour soutenir une économie distincte? Autre sujet de préoccupation : le risque d’instabilité économique attribuable à l’incertitude constitutionnelle engendrée par la tenue du référendum lui-même.

L’Écosse aurait-elle ses propres forces armées, et si oui, comment seraient-elles financées et équipées? À cet égard, des préoccupations particulières ont été exprimées au sujet des emplois, des contrats et des marchés publics de la défense. Par ailleurs, les citoyens écossais continueraient-ils de faire partie de régiments anglais, gallois et nord-irlandais? La place de l’Écosse au sein d’organisations internationales comme l’OTAN et les Nations Unies a également été abordée.

Le statut d’une Écosse indépendante au sein de l’Union européenne a donné lieu à un débat vigoureux pendant la visite, puisque le premier ministre Cameron avait déclaré à la Chambre des communes britannique qu’advenant sa réélection comme premier ministre, en 2015, il tiendrait un référendum sur le maintien ou non de l’adhésion de la Grande-Bretagne à l’Union européenne. D’après le SNP, l’incertitude quant à la place de l’Écosse au sein de la Communauté européenne découle d’un scepticisme croissant à l’égard de la place de la Grande-Bretagne au sein de l’Europe. Un vote pour l’indépendance garantirait à l’Écosse sa place parmi les membres de l’Union européenne.

Visite à Westminster

Avant une visite fructueuse en Écosse, les membres de la délégation ont eu deux jours de réunions à Westminster. Ils ont alors mis l’accent sur les questions commerciales et d’investissement.

Le Partenariat commercial entre le Canada et l’Union européenne (AECG) et la crise de la dette en Europe

Le Canada et le Royaume-Uni entretiennent des relations profondes et positives. La Déclaration conjointe Canada-Royaume-Uni, signée à Ottawa par les premiers ministres Harper et Cameron le 22 septembre 2011, met en lumière la force de cette relation et la coopération constante entre les deux pays.

Le Canada et le Royaume-Uni ont tous deux la même souveraine, Sa Majesté la reine Elizabeth II, et ils comptent parmi les plus anciennes traditions de démocratie parlementaire dans le monde. Le rapport entre nos deux pays se fonde sur une longue tradition de partenariat stratégique. Nous avons traversé ensemble deux guerres mondiales et presque tous les grands conflits du dernier siècle.

Depuis mai 2009, le Canada négocie avec l’Union européenne la mise en place d’un accord économique et commercial global (AECG). Le Royaume-Uni appuie sans réserve l’AECG et joue un rôle important de soutien aux négociations commerciales avec le Canada. Aux termes de la Déclaration conjointe Canada-Royaume-Uni, nous tenterons d’en arriver à un résultat ambitieux et mutuellement réussi de la négociation de l’AECG entre le Canada et l’Union européenne. Cela se traduira par la croissance économique des deux pays, grâce à la stimulation de la concurrence et des échanges commerciaux, à l’élargissement de l’accès aux marchés et à la promotion des investissements conjoints et de l’innovation. Ce point de vue a certainement été réaffirmé par le député John Mann, membre du comité des finances, et M. Nick Baird, chef de la direction d’UKTI (United Kingdom Trade and Investment). Ceux-ci ont cependant soutenu que certains membres du Royaume-Uni seraient plus enclins à signer une entente commerciale plus souple avec l’Europe, sous prétexte que la crise financière de l’Union européenne a grandement intensifié les réserves à l’égard de la participation du Royaume-Uni.

La promotion du partenariat stratégique entre le Canada et le Royaume-Uni

Les membres de la délégation ont également eu l’occasion de rencontrer des membres du Colloque Canada-Royaume-Uni à Westminster. Cette initiative est un événement annuel qui vise à élargir les connaissances et à renseigner le public sur les avantages à tirer de relations étroites et dynamiques entre nos deux pays. L’événement se déroule en alternance dans chaque pays, réunissant sur invitation des parlementaires britanniques et canadiens, des fonctionnaires, des universitaires, des représentants du secteur privé, des étudiants diplômés et d’autres. Un objectif principal de ces rencontres est de publier des études tout en cherchant à promouvoir les relations déjà solides qui existent entre nos deux pays. Les sujets comprennent une longue liste de questions d’intérêt mutuel, de la crise économique mondiale aux connaissances, aux compétences et à l’innovation nécessaires pour participer à l’économie mondiale, en passant par les dimensions arctique et nordique des enjeux mondiaux, et la présence internationale dans les États fragiles. Certains ont laissé entendre que l’Association interparlementaire Canada-Royaume-Uni pourrait être un point de contact naturel pour le Colloque et son travail de sensibilisation du public à ses activités et à ses publications dans le contexte parlementaire.

Situation financière en Grande-Bretagne

Le Royaume-Uni est un acteur de premier plan dans l’économie mondiale, mais traverse actuellement des temps difficiles. Le gouvernement élu en 2010 a hérité d’un déficit considérable. Cette situation l’a amené à effectuer de fortes compressions dans le secteur public. Afin de stimuler l’économie, le gouvernement a annoncé des mesures visant à promouvoir l’investissement, les activités manufacturières et les exportations, particulièrement en ce qui concerne l’investissement dans l’infrastructure, et l’économie verte. Il s’agit d’une bonne nouvelle pour les caisses de retraite canadiennes, qui ont massivement investi dans le marché britannique. La situation de la zone euro continue toutefois de présenter un risque considérable pour l’économie du Royaume-Uni, vu l’importance de ses relations commerciales avec l’Union européenne.

En terminant, les membres de la délégation remercient le Parlement écossais, ainsi que la section du Royaume-Uni de l’APC de l’accueil et de l’organisation d’un programme extrêmement intéressant. En outre, nous apprécions l’aide et l’appui que nous avons reçus du Haut-commissariat du Canada à Londres et nous savons gré au ministère des Affaires étrangères et du Commerce international de nous avoir offert une séance d’information avant notre départ.

Respectueusement soumis,

Le président,

Association interparlementaire Canada-Royaume-Uni

Ed Holder, député

 

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