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Rapport

 

La septième session annuelle du Forum parlementaire transatlantique, qui s’est tenue à Washington les 11 et 12 décembre derniers, a connu un niveau de participation sans précédent. Placé sous les auspices de l’Assemblée parlementaire de l’OTAN, de la National, de la National Defense University (NDU) et du Conseil atlantique des États-Unis (ACUS), le Forum parlementaire transatlantique permet aux parlementaires de l’Alliance de s’entretenir de manière informelle avec de grandes figures des cercles de réflexion politique installés à Washington. Le rapport complet des délibérations du Forum se trouve à l’adresse http://www.nato-pa.int/Default.asp?SHORTCUT=22.

La délégation canadienne était composée du Sénateur Pierre Claude Nolin, de la Sénatrice Marilyn Trenholme Counsell et du député Claude Bachand, accompagnés d’un greffier et d’un analyste.

Plus de 80 parlementaires de quelque 25 pays membres ou partenaires de l’OTAN ont pris part à la session. Des réunions ont eu lieu un mois avant les caucus présidentiels de l’Iowa et les débats ont porté en bonne partie sur les importants défis de politique étrangère qu'une nouvelle administration devra relever. Il a aussi été question du délai fixé par les Nations Unies pour les négociations sur le statut final du Kosovo et ce à un moment extrêmement difficile pour les forces alliées en Afghanistan. Une bonne douzaine de spécialistes sont intervenus sur divers sujets, dont le sommet de Bucarest, la discussion autour de la nécessité d'un nouveau concept stratégique, l'évolution de la situation en Russie et au Proche-Orient, ou encore la défense antimissiles.

La présidente de la Chambre des représentants des États-Unis, Nancy Pelosi, a pris la parole lors de la session : évoquant l’époque où elle-même siégeait à l’Assemblée parlementaire de l’OTAN, elle a souligné le rôle majeur que jouait cette dernière dans le débat sur la sécurité.

Au nombre des orateurs représentant l’administration américaine figuraient le sous-secrétaire adjoint à la Défense chargé de l’Europe et de la politique de l'OTAN, M. Dan Fata, et le général de corps d’armée Henry A. Obering III, directeur de l’Agence de la défense antimissiles. La session s’est achevée sur une allocution du général de l’USMC (e.r.) James L. Jones, président du directoire de l’ACUS, qui vient d’être désigné comme envoyé spécial responsable des questions de sécurité aux négociations israélo‑palestiniennes.

Les discussions qui ont eu lieu lors du Forum ont porté sur de grandes questions qui devraient être à l'ordre du jour du sommet de Bucarest, prévu pour les 2, 3 et 4 avril 2008. Sont évoqués ci-après dans les grandes lignes les sujets qui ont été débattus.

UN NOUVEAU CONCEPT STRATÉGIQUE

On s'est généralement entendu pour dire qu'il était temps d'envisager la promulgation d'un nouveau concept stratégique de l’OTAN. L’Alliance a adopté six de ces concepts depuis 1949, dont le dernier, au sommet de Washington en 1999. Depuis, le système international a gagné en complexité. Les nouvelles missions militaires ont contraint l'Alliance à adopter une orientation plus expéditionnaire. La défense du territoire, la cyber-défense et la sécurité de l'approvisionnement en énergie sont également des questions préoccupantes, et l'Alliance doit adapter le mode d’interaction de ces militaires avec les autorités civiles.

Le nouveau concept stratégique devra être bref, lisible et faire comprendre aux façonneurs d'opinion et à la population en général ce qu'est l'OTAN, pourquoi elle est pertinente et quelle est sa direction. Il y a aussi des questions particulières qu'il faut de toute évidence aborder.

L'une des plus pressantes de ces questions est la relation entre l’OTAN et l’Union européenne. Un accord-cadre entre ces deux entités devrait miser sur une vision stratégique commune. Il serait de bon de mettre en place un tel accord d'ici décembre 2008, sujet que les chefs d'État devraient proposer à la table de négociations à Bucarest.

UN « POUVOIR INTELLIGENT »

Les centres de réflexion américains ont commencé à réévaluer la façon dont les États-Unis exercent leur pouvoir, avec notamment le projet bipartisan sur le « pouvoir intelligent » mené par Joseph Nye et Richard Armitage, du Center for Strategic and International Studies (CSIS)[1]. Le rapport auquel a donné lieu le projet contient des critiques de ce que l'on appelle la guerre à la terreur. Il conclut que, faute d'armes nucléaires, Al-Qaïda ne pose aucune menace existentielle pour les États-Unis. C'est un organisme qui retourne le pouvoir des États-Unis contre eux‑mêmes et cherche à y provoquer des réactions. Selon le rapport, les États-Unis ont réagi de façon qui a terni leur réputation internationale et amoindri leur ascendant.

Les auteurs du rapport estiment que la prochaine administration américaine aurait tout avantage à orienter l'approche des États-Unis vers le « pouvoir discret », en adoptant des normes fondées sur l'internationalisme et en appuyant un renforcement des capacités multilatérales, ce qui comprendrait une réforme constructive des Nations Unies. Le « pouvoir militaire » n'est pas à négliger, mais, utilisés à bon escient et combinés de manière optimale, le « pouvoir militaire » et le « pouvoir discret » aboutissent à un « pouvoir intelligent ».

LA NOUVELLE RUSSIE

La présentation de Dimitri Medvedev comme candidat aux élections présidentielles en tant que dauphin du président russe Vladimir Poutine constitue, aux dires de certains analystes, une véritable amélioration pour la Russie. M. Medvedev est souvent considéré comme un libéral, du moins dans le contexte russe. Il a de bons états de service sur les questions de l'éducation, des soins de santé et du logement. Pour certains experts, il devrait être plus tolérant à l'égard de l'opposition et défendre mieux la transparence de l'appareil gouvernemental. On dit également de lui que c'est quelqu'un avec lequel l’Ouest peut traiter. Pourtant, malgré tous ces atouts, cette nomination ne change pas la structure fondamentale de la vie politique en Russie.

LA DÉFENSE ANTIMISSILE

L’administration américaine est convaincue qu'elle aura bientôt les moyens technologiques de se défendre contre une attaque de missiles balistiques. Elle est en train d'élaborer des propositions visant à lier le système américain à un programme parallèle de l’OTAN, mais, si les avancées avec l'Alliance sont manifestes, le dialogue avec la Russie s'est révélé très difficile.

LE MOYEN-ORIENT

Pour ce qui est des perspectives de paix au Moyen-Orient, on a indiqué au Forum qu'il y avait trois conditions essentielles pour avancer. Le premier pas de nature conceptuelle consiste à reconnaître qu'une solution équitable et durable est possible, même si elle n'est pas parfaitement juste. De plus, les négociations sont le seul moyen de faire avancer le processus et d'en arriver à une entente. Troisièmement, les États-Unis devront entrer en jeu pour que cela se fasse. Si le processus de paix n'avance pas, les choses se feront d'une manière qui ne conviendra à personne.

Il y a des leçons importantes à tirer du Moyen-Orient que les États-Unis et leurs alliés doivent comprendre. C'est une région sur laquelle les grandes puissances ont longtemps cherché à imposer leur volonté et ont échoué de façon spectaculaire. C'est une région où des tribus endurcies auront toujours davantage à gagner ou à perdre que les parties externes.

Il y a eu les discussions d’Annapolis parce que le président palestinien avait de bonnes intentions, que les Israéliens voulaient être pragmatiques et que l'administration américaine a finalement reconnu qu'elle avait quelque chose à gagner dans le processus de paix. Les perceptions de menaces américaines sont un facteur important dans le processus. Pour les Américains, il y a un déficit d'autorité dangereux dans la région élargie et certains acteurs qui ne sont pas des États contestent les modérés en Palestine, en Irak et en Iran.

Au Moyen-Orient en son sens large, le facteur le plus important de ces dernières années, c'est la montée de l’Iran. L'équilibre du pouvoir va dans cette direction, tout en étant limité par de nombreux facteurs, notamment la présence des États-Unis et de leurs alliés dans la région. L'Iran exerce désormais une influence beaucoup plus grande que celle qu'il a eue pendant des siècles et, de l'avis des Américains, cela est attribuable aux erreurs que les États‑Unis ont commises.

Pour ce qui est de la récente Estimation du Renseignement National (NIE en anglais) que les États-Unis ont publiée sur l’Iran, certains analystes à Washington y voient le revirement le plus spectaculaire jamais vu dans ce type de document. Il y est dit que l’Iran est un État rationnel guidé par une analyse coûts-bénéfices. Le gouvernement iranien a reconnu qu'il y avait eu une brèche dans son service de renseignement et estimait qu'il valait mieux mettre un terme à son programme nucléaire, mais il travaille toujours à la matière fissile et aux missiles balistiques.

LA COURSE À LA PRÉSIDENCE AUX ÉTATS-UNIS

Deux orateurs, un des responsables de la campagne de la candidate du Parti démocratique Hilary Clinton et un des responsables de la campagne du candidat du Parti républicain Rudy Giuliani ont fourni aux participants au Forum des renseignements intéressants sur la course à la présidence aux États-Unis. Ils ont notamment indiqué qu'aucun des candidats n'était un champion du libre-échange. En fait, les favoris, la sénatrice Clinton et le sénateur McCain, seraient très désireux de revoir les modalités de l’ALENA s'ils sont élus.

Respectueusement soumis,

M. Leon Benoit, député
Président
Association parlementaire canadienne de l’OTAN (AP OTAN)


 



[1] On peut obtenir une copie électronique du rapport auprès du Center for Strategic and International Studies (CSIS), à l'adresse : http://www.csis.org/smartpower/. Consulté en janvier 2008

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