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Rapport

1. La Sous-commission sur les relations transatlantiques  de la Commission politique a effectué une visite en Finlande du 21 au 24 septembre. La délégation s’est penchée sur des questions touchant à la sécurité et à la défense finlandaises, en particulier la situation sécuritaire de l’Europe du Nord, la coopération nordique en matière de sécurité, les relations avec l’OTAN et le rôle de la Russie dans la sécurité européenne. Les dix membres de la délégation conduite par le sénateur Sergio de Gregorio (Italie) ont rencontré des personnalités du gouvernement et du parlement, ainsi que des experts indépendants.

I.  L’ENVIRONNEMENT SÉCURITAIRE DE LA FINLANDE

2. Les intervenants du pays hôte ont considéré que l’environnement sécuritaire de la Finlande était aujourd’hui « meilleur que jamais ». Le sous-secrétaire Markus Lyra, et d’autres, ont estimé que cette situation positive résultait principalement de la fin de la Guerre froide. L’élargissement de l’OTAN et de l’UE, et notamment l’inclusion des États baltes dans les deux organisations, a considérablement amélioré le contexte sécuritaire du pays, a-t-il expliqué. La Finlande n’est confrontée à aucune menace immédiate, comme l’indique le Livre blanc de la sécurité nationale, mais les responsables finlandais ont souligné que leur pays devait néanmoins continuer à se préparer aux menaces militaires susceptibles de peser un jour sur le territoire ou sur les fonctions vitales de la société. La guerre qui a eu lieu en Géorgie en août 2008 est d’ailleurs venue rappeler que l’usage de la force militaire en Europe était toujours possible, ont-ils fait valoir. Ils ont aussi insisté sur le fait que les défis sécuritaires mondiaux influaient de plus en plus sur la sécurité de la Finlande, et que celle-ci devait dès lors se préparer à une gestion plus difficile des crises militaires et civiles le long des frontières de l’Europe et au-delà. Ils ont estimé que la prolifération des ADM, le terrorisme et les conflits entre États figureraient parmi les principaux défis sécuritaires de l’avenir. Les interlocuteurs ont considéré, d’une manière générale, que l’importance des opérations de gestion des crises allait s’accroître.

3. Contrairement à la plupart des pays de l’Alliance, la Finlande conserve une politique basée sur la défense territoriale et la conscription générale. Ces deux éléments demeurent la pierre angulaire de la défense nationale et bénéficient de l’appui sans réserve de la grande majorité de la population (plus de 80% des citoyens sont favorables à la conscription). La Finlande est un État frontière depuis 800 ans et « lorsqu’elle a eu besoin d’aide, dans la plupart des cas, elle n’en a pas reçu », a dit le secrétaire d’État auprès du premier ministre, Risto Volanen. Il a expliqué qu’à l’inverse de la plupart des pays membres de l’OTAN, la Finlande n’avait pas obtenu de dividende de paix après la fin de la Guerre froide, raison pour laquelle les dimensions des forces armées nationales et les budgets de la défense étaient restés relativement stables. Par rapport à sa population de 5,4 millions d’habitants, la Finlande dispose d’un effectif de défense assez important. En temps de guerre, ses forces armées pourraient rassembler 285 000 hommes pour l’armée de terre, 30 000 pour les forces navales, et 35 000 pour les forces aériennes. Le budget de la défense 2009 est de l’ordre de 2,7 milliards d’euros, soit environ 1,55 % du PIB. Ce chiffre ne tient pas compte des dépenses supplémentaires affectées à la gestion des crises. Le Livre blanc de la sécurité et de la défense, qui est actualisé tous les quatre ans et qui a été approuvé par le gouvernement et le parlement en février dernier, recommande de consacrer 2 % du PIB à la défense à partir de 2011. La Finlande subit toutefois autant que n’importe quel autre pays les répercussions de la crise financière mondiale, qui risque d’avoir un impact sur les investissements de défense, a-t-on indiqué à la délégation.

4. La défense finlandaise a connu d’importants changements au cours des quatre ou cinq dernières années, et des adaptations majeures ont été apportées à la structure de l’armée, dont le nombre de quartiers généraux a été réduit. En lieu et place, la Finlande a créé un commandement de défense capable de conduire des opérations interarmées. Le maintien d’une capacité de défense crédible est une priorité absolue de la politique de défense. En cas de mobilisation, les forces de défense finlandaises (FDF) compteraient entre 340 et 350 000 hommes. Le ministre de la Défense a cependant informé la délégation que d’ici à 2015 environ, ce chiffre diminuerait pour se situer autour d’un peu plus de 200 000 hommes. Les forces du temps de guerre sont divisées en deux grandes catégories : les forces territoriales et les forces opérationnelles. L’effectif du temps de paix devrait être réduit à 15 000 hommes. Chaque année, les FDF enrôlent 25 000 conscrits, qui représentent environ 75 % de la tranche d’âge. Les responsables finlandais de la défense pensent que la conscription générale reste une solution efficace pour le pays, bien que le nombre d’engagés volontaires soit en augmentation. Pour faire face aux besoins futurs, les responsables des plans de défense finlandais étudient le développement de capacités militaires susceptibles d’être utilisées de manière souple pour des tâches multiples, ont indiqué des responsables du ministère de la Défense. 

5. Si l’on veut maintenir  le niveau de capacité actuel dans l’avenir, il faudra prévoir d’importantes réévaluations du système, ou des augmentations considérables des crédits de défense. Étant donné que la Finlande ne pourra pas relever seule la totalité des défis sécuritaires, elle s’attache à accroître sa coopération internationale, notamment en ce qui concerne le renforcement de l’interopérabilité, la planification des forces et les ressources, et l’augmentation de sa participation à l’entraînement et aux exercices de l’OTAN.

6. La délégation a également eu l’occasion de visiter le Commandement aérien de Carélie, à Kuopio, ce qui lui a permis d’avoir une bonne vue d’ensemble des responsabilités du Commandement aérien de l’Est. Le colonel Ari Jussila, commandant du Commandant aérien de Carélie, a indiqué à la délégation que les forces aériennes finlandaises étaient en cours de modernisation. L’un des principaux programmes prévus à cet égard concerne l’amélioration des capacités du F18 Hornet, et l’accent est également mis sur la poursuite du développement du système de surveillance des forces aériennes, en particulier sur l’amélioration du radar de surveillance au sol. L’effectif du temps de paix, qui est d’approximativement 3 000 hommes, passerait à environ 35 000 hommes en temps de guerre.

7. Contribution de la Finlande aux opérations de gestion des crises : la délégation a également reçu beaucoup d’informations sur la participation finlandaise aux opérations de soutien de la paix et de gestion des crises. Il lui a été indiqué que la Finlande participait très activement depuis longtemps aux opérations internationales de soutien de la paix. Plus de 50 000 militaires finlandais ont été déployés depuis la première participation du pays à des opérations de ce type, en 1956. En 2007, la Finlande a créé un Centre de gestion des crises (CMC), basé à Kuopio ; il s’agit d’une institution gouvernementale et d’un centre d’expertise de la gestion des crises civiles, dont la tâche principale consiste à former et à recruter des experts pour des missions internationales de gestion des crises civiles et d’édification de la paix. Le CMC Finlande assume les fonctions de bureau national pour tous les professionnels finlandais détachés au titre de la gestion des crises civiles et mène des recherches axées sur ce domaine, a dit à la délégation Ari Kerkkänen, le directeur du Centre. Le sous-secrétaire Markus Lyra a noté que le nombre limité d’experts disponibles continuait de poser un problème. Il a ajouté que la nécessité de leur trouver à emploi approprié à leur retour constituait un autre défi. La sous-secrétaire Ritva Koukku-Ronde a souligné le lien existant entre sécurité et développement et a déploré le compartimentage qui continue de caractériser la démarche de la plupart des pays. Il est crucial, a-t-elle dit, de renforcer la cohérence politique, notant que la meilleure approche de la prévention des conflits, qui est aussi la moins onéreuse, est l’éradication de la pauvreté. La délégation a appris qu’actuellement quelque 144 civils et 720 militaires finlandais étaient déployés dans le cadre d’opérations de gestion des crises. La majeure partie des militaires (412) est déployée au Kosovo. Le CMC participe aussi régulièrement à des activités de formation conduites par l’OTAN et coopère avec les pays membres et les pays partenaires de l’Alliance dans le cadre du Partenariat pour la paix ; du personnel du Centre est détaché auprès du Centre euro-atlantique de coordination des interventions en cas de catastrophe (EADRCC).

II. LES RELATIONS DE LA FINLANDE AVEC L’OTAN  

8. La Finlande coopère de longue date avec différents pays membres de l’OTAN, ainsi qu’avec l’Alliance en tant qu’organisation. Hormis l’opération Active Endeavour en Méditerranée, le pays participe à toutes les opérations OTAN de gestion des crises, a dit à la délégation le sous-secrétaire Markus Lyra. Actuellement 720 soldats finlandais participent à différentes opérations, dont la plupart au Kosovo. Deux cents militaires finlandais sont déployés en Afghanistan. Le général Ari Puheloinen, chef de l’état-major des forces de défense, a ajouté que la Finlande était aussi en train d’engager une coopération avec le centre de cyber défense de l’OTAN. Des responsables de la défense, dont le général Jarmo Lindberg, commandant des forces aériennes finlandaises, ont souligné, par ailleurs, que le fait que les FDF étaient largement compatibles avec les forces de l’Alliance témoignait également de la coopération étroite qui existe. La Finlande fait aussi partie de la capacité de  transport aérien stratégique (SAC), qui regroupe actuellement 10 pays membres de l’OTAN et la Suède. La coopération de la Finlande avec l’OTAN et d’autres organisations internationales est bénéfique pour le développement des capacités des forces de défense.

9. Les responsables finlandais ont souligné à plusieurs reprises que leur pays souhaitait poursuivre et, lorsque c’est possible, approfondir ses relations avec l’Alliance, notamment en matière de gestion des crises. L’un d’eux a également indiqué qu’il n’excluait pas que la Finlande contribue à la Force de réaction de l’OTAN (NRF) à l’avenir. Toutefois,  si les FDF s’emploient à développer des capacités propres à assurer leur compatibilité avec les forces de l’Alliance, Helsinki ne recherche pas une adhésion pour le moment. Une appartenance future à l’OTAN n’est pas exclue mais, à l’heure actuelle, il n’existe ni un consensus politique entre les décideurs, ni un soutien suffisant de l’opinion publique finlandaise, comme le sous-secrétaire Markus Lyra et d’autres interlocuteurs l’ont indiqué à la délégation. Les élites politiques sont divisées à propos de l’adhésion à l’OTAN, a ajouté M. Lyra, la droite de l’échiquier politique y étant favorable, et la gauche y étant opposée. Le directeur de l’Institut finlandais des affaires internationales, Raimon Väyrynen, a indiqué qu’actuellement il n’y avait pas de tendance majoritaire en faveur d’une adhésion à l’Alliance dans la population.

10. Pour la Finlande, l’OTAN représente l’outil le plus efficace pour renforcer l’interopérabilité et les capacités militaires, et l’organisation la plus importante pour maintenir la sécurité et la stabilité dans la région euro-atlantique. Le pays participe à 7 domaines de coopération et à 22 plans d’action dans le cadre du PPP. Des responsables finlandais des affaires étrangères et de la défense suivent, par ailleurs, les discussions sur la mise au point du nouveau Concept stratégique de l’OTAN, et Helsinki a décidé d’accueillir un séminaire à ce sujet en mars prochain, a-t-on indiqué à la délégation.

11. Finlande-UE : il a également été indiqué que la Finlande est un fervent partisan du « muscle militaire » de l’UE qui commence à se développer. Les interlocuteurs finlandais ont noté qu’à partir de 2011, leur pays  participerait à deux groupements tactiques – le groupement tactique nordique, et un autre conduit par les Pays-Bas. La Finlande est aussi tout à fait favorable à d’autres structures européennes qui contribuent à améliorer les capacités militaires des membres de l’UE, entre autres l’Agence européenne  de défense (EDA), dont les interlocuteurs ont estimé qu’elle était appelée à devenir un instrument très important. Le sous-secrétaire Lyra a également souligné que la politique européenne de sécurité et de défense (PESD) revêtait une importance considérable aux yeux de la Finlande, qui ne souhaite toutefois pas que l’Union devienne une alliance militaire. L’OTAN existe déjà pour cela, a-t-il dit. Les interlocuteurs finlandais ont reconnu que la coopération OTAN-UE restait très en deçà de ce qu’elle pourrait et devrait être ; mais il s’agit d’un problème politique et ils ne s’attendent pas à des avancées majeures à court terme.

III. LA COOPÉRATION NORDIQUE EN MATIÈRE DE DÉFENSE

12. Les responsables finlandais ont souligné toute l’importance que revêt pour leur pays la coopération nordique en matière de défense. Celle-ci est axée sur trois éléments principaux : l’Accord nordique coordonné pour le soutien militaire de la paix (Nordic Co-ordinated Arrangement for Military Peace Support - NORDCAPS), qui met l’accent sur le développement de la logistique, des opérations et de l’entraînement conjoints ; la coopération nordique en matière d’armements (Nordic Armaments Co-operation - NORDAC), qui prévoit le développement et  l’acquisition en commun de matériel de défense ; et les structures nordiques d’appui de la défense (Nordic Supportive Defence Structures – NORDSUP), qui visent à soutenir les capacités opérationnelles des pays. Contrairement à l’adhésion à l’OTAN, au sujet de laquelle l’opinion publique finlandaise est actuellement divisée, la coopération nordique en matière de défense jouit d’un grand soutien populaire. Pour les adversaires de l’appartenance de la Finlande à l’OTAN, elle est considérée comme une bonne solution de remplacement, et pour les tenants de l’adhésion à l’Alliance, elle est vue comme un excellent complément. La Finlande, qui préside la coopération nordique en matière de défense en 2009, est responsable de l’ensemble du développement et de la coordination à cet égard. L’une des priorités de la présidence finlandaise a été de renforcer la coopération concernant les capacités opérationnelles dans le plus grand nombre de domaines possible. En outre, Helsinki a mis l’accent sur la définition de mécanismes communs de conduite et de coordination de la coopération.

13. Selon le sous-secrétaire Markus Lyra et d’autres interlocuteurs, la coopération nordique en matière de défense va continuer à se développer sur la base des orientations du rapport Stoltenberg. Celui-ci a été présenté en février 2009 aux ministres des Affaires étrangères nordiques par Thorvald Stoltenberg, ancien ministre des Affaires étrangères et de la Défense de Norvège. Dans l’optique des dix à quinze prochaines années, ce rapport recense treize domaines dans lesquels les pays nordiques peuvent accroître leur coopération, et formule des recommandations concernant  l’instauration d’une coopération plus étroite entre les cinq pays nordiques, notamment pour l’édification de la paix, la police aérienne et la surveillance maritime, la sécurité dans le Grand Nord, la cyber sécurité, et la coopération entre les services des affaires étrangères et la défense.

14. Le Grand Nord : bien que la Finlande ne soit pas un acteur majeur de la sécurité de l’Arctique, les interlocuteurs ont souligné l’importance du rôle joué par le pays dans la protection des frontières du Grand Nord. La géopolitique  se modifie dans cette région en raison du réchauffement de la planète, ont indiqué les interlocuteurs finlandais. La mer Arctique va devenir accessible aux pays riverains, et des litiges risquent de surgir à propos de ses ressources naturelles et d’autres intérêts. Le ministre de la Défense, Jyri Häkämies, a ajouté qu’il y avait déjà des signes d’une présence militaire accrue dans le Grand Nord. Cette présence va devenir plus visible qu’elle ne l’était auparavant, lorsque l’accès entre les deux mers n’était pas ouvert. Il est « impératif » de partager les informations relatives à l’image maritime dans le Grand Nord, a-t-il déclaré. Un autre interlocuteur a dit que l’on ne savait pas si la Russie ferait preuve « d’agressivité » dans l’exploitation des ressources naturelles de l’Arctique, mais qu’il était évident qu’elle les exploiterait le plus largement possible.

IV. AFGHANISTAN

15. Raimo Väyrynen, directeur de l’Institut finlandais des affaires internationales, a indiqué que l’Afghanistan figurait en bonne place dans l’agenda politique de la Finlande, et pas seulement parce que 200 soldats finlandais participent à la FIAS. Vingt instructeurs de police finlandais sont également déployés en Afghanistan. Les priorités d’Helsinki dans le pays sont la bonne gouvernance et le développement des zones rurales. L’Afghanistan est le deuxième bénéficiaire de l’aide au développement finlandaise, et c’est le pays dans lequel l’assistance s’accroît le plus ; seul le Mozambique reçoit davantage. Outre l’engagement de l’État finlandais, dix organisations non gouvernementales (ONG) finlandaises travaillent en Afghanistan depuis de nombreuses années.

16. Les interlocuteurs finlandais ont donné à entendre que la communauté internationale n’avait pas compris ce pays. De surcroît, son approche du défi afghan a manqué de maturité puisque, jusqu’ici, elle s’est focalisée sur une réponse essentiellement militaire. Un analyste finlandais indépendant a dit que la communauté internationale ne pouvait gagner la guerre ou la paix en Afghanistan, et qu’elle pouvait seulement gagner du temps.

17. Les interlocuteurs finlandais ont estimé que la force militaire était nécessaire pour renforcer la sécurité et la stabilité et ont reconnu que l’Afghanistan aurait besoin d’une aide internationale globale à long terme. Consciente du fait que la réussite dans ce pays exige une approche régionale plus large, la Finlande a également nommé un coordonnateur spécial pour sa politique à l’égard de l’Afghanistan et du Pakistan, a-t-on dit à la délégation. Les interlocuteurs ont aussi souligné que la prise en charge locale devait s’accroître en Afghanistan et que le pays devait s’attaquer à la corruption et édifier des institutions stables. Vu la complexité de la situation afghane, la communauté internationale devra faire preuve de patience avant qu’une amélioration sensible n’intervienne. Le renforcement de la sécurité et de la stabilité du pays nécessitera également des négociations avec les groupes talibans, ont fait valoir certains interlocuteurs, ajoutant que les talibans ne constituaient pas un bloc monolithique, mais comprenaient diverses composantes.

18. Même si les médias ont tendance à brosser un tableau plutôt sombre de l’Afghanistan, l’engagement de la communauté internationale a permis un certain nombre de réalisations, ont souligné les interlocuteurs finlandais au cours de la réunion, citant entre autres l’adoption d’une constitution et les élections qui l’avaient précédée, et la mise en place de la gouvernance et des institutions de l’État, en particulier l’armée et la police. En outre, le PIB a connu une augmentation de 6 à 8 % au cours des dernières années, les infrastructures se sont améliorées et les soins de santé ont progressé, ce qui a notamment conduit à une baisse significative de la mortalité infantile.

19. Mais il subsiste, par ailleurs, de sérieux défis, dont la poursuite de l’insurrection. Le nombre d’attaques a augmenté et la violence s’est étendue dans la quasi-totalité du pays. Il semblerait que les insurgés n’aient aucun mal à recruter, a fait  valoir l’un des interlocuteurs. Dans ce contexte, il a appelé l’attention sur les quelque 20 000 madrasas, qui constituent une source de recrutement pour le terrorisme.       

V. RUSSIE

20. La Russie étant le pays qui partage la plus longue frontière avec la Finlande, elle a figuré en bonne place à l’ordre du jour de la visite de la sous-commission. Pour Helsinki, la Russie est le facteur le plus important à prendre en compte dans toute évaluation concernant la sécurité, a indiqué le major-général Mika Peltonen, chef des plans et de la politique du ministère finlandais de la Défense. La Russie est l’élément majeur de l’environnement sécuritaire de la Finlande, a-t-on fait savoir à la délégation. Un autre expert indépendant a considéré que les trois principaux  défis sécuritaires de la Finlande aujourd’hui sont « la Russie, la Russie et la Russie ». La Russie est totalement différente de ce qu’était l’URSS et, du point de vue finlandais, c’est un voisin beaucoup plus facile que ne l’était  l’Union soviétique, a dit à la délégation le sous-secrétaire Markus Lyra.  La Russie évolue de manière positive, mais il existe de nombreuses sources de préoccupation, notamment la liberté de la presse, les droits humains, et la situation des ONG.

21. Moscou a des intérêts stratégiques dans des régions adjacentes à la Finlande, notamment les régions de la mer du Nord, la péninsule de Kola, Saint-Pétersbourg et le corridor de transport de la mer Baltique. Le gazoduc North Stream, qui est en cours de construction, accroîtra encore l’importance stratégique du golfe de Finlande, ont fait remarquer les interlocuteurs. Le secrétaire d’État, Risto Volanen, a estimé que la Russie ne disposait pas de ressources financières suffisantes pour procéder aux investissements majeurs dont ses infrastructures énergétiques ont grandement besoin. Un autre intervenant a  indiqué qu’en dehors de son industrie de l’armement, la Russie ne comptait aucune industrie compétitive, mais que son économie reposait sur l’énergie et sur les matières premières, et qu’il n’existait « aucune volonté réelle de réforme économique ».

22. La Russie s’efforce de retrouver son statut de grande puissance, en tirant parti de ses gigantesques ressources énergétiques et de son vaste réseau de transport d’énergie. Elle est également prête à promouvoir ses intérêts en projetant sa puissance militaire à l’extérieur de ses frontières. La modernisation des forces armées russes connaîtra peut-être un retard vu l’affaiblissement de la situation économique, mais leurs capacités vont s’améliorer  progressivement, ont indiqué certains interlocuteurs. Un autre intervenant a estimé que grâce aux énormes revenus qu’elle tire du pétrole et du gaz, la Russie était en passe de redevenir un acteur mondial.

23. Dans le même temps, la Finlande voit aussi la Russie comme une opportunité, et pas seulement comme un défi, a déclaré un responsable finlandais, ajoutant « nous devons nous montrer avisés dans notre manière d’inciter Moscou à être un acteur et un partenaire responsable dans notre partie du monde ». Dans le même ordre d’idées, le secrétaire d’État Volanen a dit qu’il importait de s’assurer également la participation de la Russie.

24. Les réunions ont aussi permis à la délégation de prendre connaissance du point de vue de la Finlande sur les relations OTAN-Russie, ainsi que de son analyse de la brève guerre entre la Russie et la Géorgie d’août 2008. Arkady Moshes, directeur de programme à l’Institut finlandais des affaires internationales, a estimé que les relations Russie-Occident s’étaient détériorées en 2008, principalement à cause de cette guerre. Selon lui, l’issue de la guerre a permis à Moscou de retirer certains avantages tactiques dans le Caucase. La Russie a, en outre, montré qu’elle était prête à se battre et à accepter des pertes humaines, a-t-il déclaré, ajoutant que Moscou avait « obtenu ce qu’elle voulait », à savoir entraver - ou repousser – la concrétisation des demandes d’adhésion de la Géorgie à l’OTAN et à l’UE. La Géorgie s’est, de surcroît, retrouvée grandement affaiblie tant sur le plan économique que sur le plan militaire, a-t-il indiqué. Selon lui, une restauration de l’intégrité territoriale par des voies pacifiques était déjà exclue avant la guerre, et une restauration par des voies militaires l’est maintenant aussi. Des experts indépendants ont également considéré qu’un coup avait été porté à la crédibilité de la coopération occidentale en matière de sécurité.

25. Il s’agit néanmoins de gains purement « tactiques » et non « stratégiques » pour la Russie, qui ne sait pas exactement ce qu’elle va faire maintenant, a-t-il estimé. En ce qui concerne l’Ossétie du Sud, Moscou ne contrôle pas totalement le gouvernement. Même si l’annexion et l’incorporation au territoire russe apparaissent comme la prochaine étape logique, puisque les Ossétiens du Sud y seraient favorables, ce n’est pas la solution que le Kremlin privilégierait. La Russie fournit depuis longtemps une aide financière considérable à la région, mais celle-ci est, pour l’essentiel, « empochée par le régime » de Tskhinvali. La Russie tient cependant à construire des infrastructures dans la région. La situation en Abkhazie est plus compliquée car les Abkhazes préfèrent l’indépendance. Si le « modèle du Kosovo » avait été appliqué à l’Abkhazie, celle-ci aurait été une entité beaucoup plus viable, a fait valoir M. Moshes. Les Abkhazes préféreraient aussi obtenir des investissements d’autres pays, et pas seulement de la Russie. Il a également souligné que la politique de la Russie à l’égard de l’Ossétie du Sud et de l’Abkhazie n’avait reçu absolument aucun soutien de la part des pays de la CEI, et que même le « soft power » de la Russie – sa capacité à susciter de manière indirecte l’empathie et l’adhésion à son projet - n’était pas parvenu à influer sur la position des partenaires de Moscou au sein de la CEI.

26. En plus de l’instabilité qui prévaut dans le Caucase du Sud, la situation s’est considérablement détériorée dans le Caucase du Nord. Dans ce contexte, M. Moshes a évoqué le nombre de militants des droits de l’homme qui ont été enlevés ou tués, ainsi que le nombre élevé de victimes dans les forces de police. Les Russes désignent maintenant parfois entre eux la Tchétchénie comme « l’étranger intérieur », a-t-il ajouté. Il est dès lors difficile de dire quel est l’impact de la guerre de Géorgie sur la politique étrangère et sécuritaire de Moscou.

27. M. Moshes a estimé que la poursuite de la politique de la « porte ouverte » de l’OTAN serait un élément crucial pour le développement des relations entre l’Alliance et la Russie. Il a toutefois ajouté que, d’une manière générale, la marge de progression était extrêmement faible s’agissant du renforcement des relations OTAN-Russie. À cet égard, il a relevé que ces relations n’avaient pas vraiment fonctionné dans le passé, puisque ni le Conseil conjoint permanent (CCP), ni le Conseil OTAN-Russie (COR) ne fonctionnaient bien, principalement à cause du repli sur soi de Moscou. Interrogé à propos des réactions russes à une éventuelle demande d’adhésion de la Finlande, il a répondu que les réactions négatives qui se manifesteraient dans un premier temps cesseraient une fois le pays devenu membre de l’OTAN.

28. Un déplacement à F-Secure, une grande société de fabrication de logiciels spécialisée dans le développement de programmes de protection des

ordinateurs et des réseaux contre les malicieux, a clôturé cette visite très fructueuse de la sous-commission.

Respectueusement soumis,

 

M. Leon Benoit, député,
Président,
Association parlementaire canadienne de l’OTAN (AP OTAN)



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