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Rapport

1.    Introduction

Une délégation canadienne a participé à la réunion parlementaire tenue par l’Union interparlementaire (UIP) et ONU Femmes, entité onusienne consacrée à l’égalité des sexes et à l’autonomisation des femmes, à l’occasion de la 58e session de la Commission de la condition de la femme le 11 mars 2014 au siège de l’ONU à New York. Le thème choisi par l’UIP, Au carrefour du développement durable et de l’égalité des sexes : le rôle des parlements, s’intègre au thème central de la 58e session de la Commission, Les défis et les réalisations dans la mise en œuvre des objectifs du Millénaire pour le développement pour les femmes et les filles. La réunion parlementaire de l’UIP a attiré des parlementaires d’assemblées régionales et nationales, ainsi que des représentants de gouvernements et d’organisations internationales.

2.    Ordre du jour[1]

Parallèle au thème central de la Commission de la condition de la femme de l’ONU, le thème de la réunion de l’UIP, Au carrefour du développement durable et de l’égalité des sexes : le rôle des parlements, portait essentiellement sur trois axes, soit 1) les femmes dans la prise de décision : progrès faits depuis 10 ans dans la réalisation des Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD), 2) la réalisation des OMD et la responsabilité de rendre compte : le rôle des parlements, 3) la place de l’égalité des sexes dans la prochaine série des objectifs de développement. La réunion a permis aux parlementaires canadiennes d’en savoir davantage sur les progrès réalisés dans la mise en œuvre des OMD à l’échelle planétaire, ainsi que sur la contribution des autres pays, d'ONU Femmes et de l’UIP, en vue d’établir le programme de développement pour l’après-2015.

3.    La délégation canadienne

La délégation canadienne se composait des députées suivantes :

·         Mme Susan Truppe, secrétaire parlementaire pour la condition féminine,

·         Mme Hélène LeBlanc, présidente du Comité permanent de la condition féminine de la Chambre des communes.

La délégation était accompagnée de Mme Laura Munn-Rivard, analyste, Division des affaires juridiques et sociales, Bibliothèque du Parlement.

4.    Sommaire de la réunion et de la participation canadienne

Ouverture

Le secrétaire général de l’UIP, M. Anders B. Johnsson, a prononcé le premier discours d’ouverture où il mettait en lumière la coopération très importante entre l’UIP et ONU Femmes. Il a déclaré que les parlementaires doivent garder en mémoire cinq points essentiels dans leur travail en matière d’égalité des sexes :

1.        Sans la participation des femmes, il y aura peu d’avancées;

2.        On peut changer la donne, comme le montre l’augmentation de femmes parlementaires dans le monde;

3.        Les droits des femmes constituent une priorité, et le temps presse;

4.        Il faut accorder aux femmes une voix au chapitre et un pouvoir décisionnel;

5.        Le parlement fait fonction d’agent de développement, et un bon développement passe par la gouvernance démocratique.

M. Johnsson a conclu son allocution en mettant en évidence les progrès réalisés par l’UIP dans ses actions favorisant la participation des femmes dans ses réunions officielles et les délégations parlementaires, ainsi que dans les diverses branches de son organisation, qui est devenue aujourd’hui sensible à la spécificité des sexes et qui a mis fin à la marginalisation des femmes en milieu de travail.

Mme Phumzile Mlambo-Ngcuka, directrice exécutive d’ONU Femmes, a ensuite pris la parole au sujet de l’importance que revêtent les relations entre ONU Femmes et l’UIP. À son sens, l’augmentation de la participation des femmes dans les assemblées législatives constitue une importante avancée. En outre, elle permettra de débattre davantage de mesures législatives axées sur la famille, la santé et l’égalité des sexes, sur les pressions pour une responsabilisation accrue du gouvernement et sur la valorisation de différents points de vue dans le processus législatif.

Mme Mlambo-Ngcuka a félicité les pays où la participation des femmes aux parlements a connu une hausse. Selon elle, il ne s’agit pas seulement de la représentation des femmes, mais aussi de la qualité des femmes parlementaires. Parlant des données de l’UIP selon lesquelles les femmes atteindraient la parité dans les assemblées législatives dans le monde d’ici une vingtaine d’années, elle s’est dit réjouie de la parité, mais qu’elle n’avait pas le loisir d’attendre aussi longtemps.

Mme Mlambo-Ngcuka a souligné le vingtième anniversaire de la Quatrième Conférence mondiale sur les femmes ainsi que de la Déclaration et le Programme d’action de Beijing. Elle recommandait que tous les parlements examinent la mise en œuvre de ces instruments par la vérification d’un engagement par mois en vue de terminer le tout en un an.

En outre, Mme Mlambo-Ngcuka a abordé le rôle des garçons et des hommes dans la promotion de l’égalité des sexes. Selon elle, les parlementaires doivent les interpeller et les mobiliser pour qu’ils participent à la bataille pour l’égalité des sexes. ONU Femmes a lancé la campagne « He For She », qui vise à encourager les hommes à prendre position pour les droits de la femme.

Pour ce qui est de la mise en œuvre des OMD, Mme Mlambo-Ngcuka a déclaré que les parlements sont essentiels au processus et que les femmes doivent savoir que les parlementaires et les pays membres de l’ONU sont dans leur camp. D’après ses explications, les OMD ont démontré l’apport considérable des femmes aux processus de développement et l’importance d’inscrire l’égalité des sexes dans le programme de développement pour l’après-2015.

Mme Mlambo-Ngcuka a fait ressortir la recommandation d’ONU Femmes d’en faire un objectif distinct pour les femmes dans le programme de développement pour l’après-2015. L’organisation propose aussi trois axes pour son programme : 1) mettre fin à la violence faite aux femmes et aux filles, 2) répartir les capacités selon le sexe (accès aux ressources et aux débouchés), 3) accorder autant aux femmes qu’aux hommes le pouvoir de décision dans la vie privée et la vie publique. La question de la femme doit aussi être intégrée à tous les autres objectifs de développement, pour qu’on puisse établir des cibles précises liées au genre pour chaque objectif et suivre les progrès réalisés en matière d’égalité des sexes.

Session 1 : Les femmes dans la prise de décision : progrès faits depuis 10 ans dans la réalisation des Objectifs du Millénaire de développement

Le thème de la session du matin, Les femmes dans la prise de décision : progrès faits depuis 10 ans dans la réalisation des Objectifs du Millénaire de développement, portait surtout sur la présence des femmes dans les postes de décision dans le monde des affaires, le milieu juridique et la société civile ainsi que sur les moyens de réformer le milieu de travail pour briser le plafond de verre.

Mme Z. Hilal, Programme du partenariat entre hommes et femmes à l’UIP, a évoqué les dernières tendances dans la présence des femmes en politique à l’échelle planétaire. Le pourcentage de femmes dans les parlements s’établissait à 21,8 % en janvier 2014, comparativement à 15,7 % en 2005. C’est la première fois que la moyenne mondiale augmente de 1,5 point de pourcentage en un an. De même, 54 assemblées de parlements ont franchi le cap des 30 %, considéré par beaucoup comme la référence, une hausse par rapport aux 50 assemblées en 2012. En janvier 2014, il y avait 18 femmes chefs d’État ou de gouvernement, comparativement à 8 en 2005. En outre, la moyenne mondiale de femmes ministres s’est fixée à 17,2 %, en comparaison avec 14,3 % en 2005, et les portefeuilles étaient désormais plus diversifiés, dont certains traditionnellement réservés aux hommes, comme la défense ou les affaires étrangères.

Mme Hilal a abordé les travaux que l’UIP a menés au fil des ans et les enseignements tirés de ceux-ci, notamment :

·         Les quotas représentent un important moyen de faciliter l’accès des femmes au parlement. Les cadres réglementaires de ces quotas doivent être ambitieux, précisés et dotés de mécanismes de mise en place.

·         La participation des femmes est tributaire des modes de scrutin; les régimes proportionnel ou mixte tendent à favoriser l’accès des femmes au parlement.

·         Les formations politiques sont responsables de l’accès des femmes aux parlements, puisqu’ils décident entre autres des candidats, du soutien financier et des appuis.

·         La transformation des normes culturelles dans l’électorat aide aussi les femmes à se porter candidates et à être élues députées.

·         Un parlement se doit d’être un lieu où les femmes se sentent à l’aise et qu’elles souhaitent y participer; il faut donc avoir des parlements sensibles à la spécificité des sexes.

·         La violence faite aux femmes, comme les violences électorales et le harcèlement, entrave la participation des femmes aux parlements.

Mme Hilal a invité les participants à réfléchir à deux questions : quels obstacles restent-ils en matière d’accès des femmes au parlement et de quelles priorités faut-il s’occuper au cours des prochaines années?

M. J. Mendes Bota, député et représentant du Portugal à l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe, a déclaré, au début de son allocution, que les charges publiques devaient être occupées par un nombre égal d’hommes et de femmes pour refléter la composition de la société, ce qui est dans l’ordre naturel des choses. Il a d’ailleurs observé que le plafond de verre existe toujours dans l’arène politique en Europe.

Les quotas aident à améliorer la situation, mais ils ne suffisent pas. Ils doivent être assortis de mesures novatrices. Comme ils accueillent de plus en plus de femmes, les partis devraient leur accorder des avantages, par exemple plus de temps d’antenne durant les campagnes électorales.

En particulier, M. Bota a mis en exergue l’importance des formations politiques dans la promotion de la participation des femmes. Il a proposé que les partis offrent aux femmes candidates de l’encadrement, de la formation, des mesures de soutien, du temps d’antenne partagé ainsi qu’un cadre de travail plus propice à la conciliation entre la vie professionnelle et les responsabilités familiales. Il a d’ailleurs invité les femmes à faire leurs premiers pas en politique pour la voie du bénévolat pour les partis politiques, surtout à l’échelon municipal, puis à gravir les échelons jusqu’à la direction.

Mme K. Ástgeirsdóttir, directrice du Centre pour l’égalité entre les sexes (Islande), a déjà été membre du Parti des femmes en Islande, dont l’objectif était d’augmenter la représentation des femmes au parlement. Cette dernière a bel et bien augmenté puisque 43 % des sièges parlementaires islandais, de même que la présidence, sont occupés par des femmes.

Mme Ástgeirsdóttir a parlé de l’élaboration et la mise en œuvre des quotas en Islande, en particulier de mesures législatives adoptées en 2010, qui imposent aux sociétés islandaises de plus de 50 salariés de compter 40 % de membres d’un même sexe dans leur conseil d’administration. Les sociétés disposent de trois ans pour s’y conformer, alors que le gouvernement islandais a publié des listes de femmes qualifiées aux compétences et à l’expérience requises dans le monde des affaires.

Même s’il y a eu de la résistance au départ, les quotas et autres mesures d’égalisation sont désormais largement admis. La plus grande résistance s’est fait sentir au Parlement d’Islande, bien que l’assemblée, les organes parlementaires et les formations politiques n’y sont pas assujettis.

Mme Ástgeirsdóttir a noté que l’Islande célébrera bientôt le centième anniversaire du droit de vote des femmes, occasion idéale de constater les avancées en matière d’égalité des sexes.

Mme M. Semela, directrice du développement de la Fondation internationale des femmes dans les médias (IWMF), a surtout fait état du pouvoir des médias et de son incidence sur les femmes dans les postes de décision. Trois aspects de ce milieu doivent être examinés :

·         Les salles de nouvelles doivent avoir une composition plus égalitaire. D’après une étude exhaustive de la Fondation, trois quarts des postes de décision dans les médias sont occupés par des hommes.

·         Il faut assurer une sécurité personnelle renforcée aux journalistes. La sécurité est essentielle pour eux, surtout pour les femmes qui peuvent être la cible de harcèlement et de violence sexospécifiques.

·         ll faut regarder de plus près qui possèdent les médias, car les femmes désireuses de lancer un organe d’information obtiennent seulement environ 5 % du capital-risque. Les femmes pourraient choisir leur sujet et l’angle de leur reportage si davantage d’entre elles possédaient des organes d’information.

Mme Semela a abordé les obstacles que connaissent les femmes bien connues qui travaillent dans les médias ou qui font les manchettes. En particulier, elles sont souvent victimes de cyberintidimidation, puisque le cyberespace peut être un moyen d’humilier publiquement une femme ou de porter atteinte à sa crédibilité ou à sa réputation.

Mme Semela a annoncé la production en 2015 d’un autre rapport exhaustif sur les avancées des femmes dans le milieu des médias. En effet, la Fondation souhaite vérifier si le nombre de femmes dans les postes de décision dans ce milieu a connu une hausse.

Après ces exposés, les déléguées ont participé aux discussions ouvertes sur le sujet dont il est question.

Mme Susan Truppe, députée, a pris la parole au sujet des progrès réalisés en matière de représentation des femmes au Parlement du Canada, notamment du fait que 32 % des ministres sont des femmes. Elle a expliqué ensuite divers moyens que les parlementaires pourraient employer pour encourager les femmes à participer à la vie politique. Elle a ensuite abordé l’importance de l’encadrement et a donné en exemple la subvention que le ministère de la Condition féminine accordait aux municipalités ontariennes pour leur programme d’encadrement des politiciens. Elle a ajouté que les associations et groupes parlementaires de femmes contribuent grandement à valoriser la pleine participation des femmes en politique, car ils servent de lieux d’échanges d’idées et de réseautage. Pour finir, Mme Truppe a discuté du jumelage professionnel, qui permet aux jeunes femmes de constater le fonctionnement de la scène politique et du fait que les trois principaux partis politiques au Canada appuient fermement la participation des femmes en politique.

Mme Hélène LeBlanc, députée, a pour sa part évoqué le rôle des partis politiques dans l’élection des femmes. En effet, ils doivent présenter des candidates dans des circonscriptions où elles ont une chance d’être élues. Les femmes qui occupent des postes de décision doivent inciter les autres femmes à se lancer en politique. Elle a dit avoir passé une journée avec de jeunes étudiantes pour que celles-ci puissent la voir travailler sur la colline du Parlement. À son avis, ce type d’encadrement pourrait encourager les jeunes femmes à se lancer en politique.

Session 2 : La réalisation des Objectifs du Millénaire pour le développement et la responsabilité de rendre compte : le rôle des parlements

Le thème de la deuxième session, La réalisation des objectifs du Millénaire pour le développement et la responsabilité de rendre compte : le rôle des parlements, était axé sur l’incidence des OMD sur l’élaboration des politiques nationales et le rôle des parlements dans la surveillance de la mise en œuvre des OMD sur le plan de l’égalité hommes-femmes.

Mme M. C. Perceval, représentante permanente de l’Argentine à l’ONU, a insisté sur le principe de la responsabilité commune mais différenciée dans l’élaboration d’un programme de développement mondial. Tant les pays développés que les pays en voie de développement ont un rôle différent, et néanmoins essentiel, à jouer, car tous tireront des avantages de l’avancement des autres.

Concernant les travaux sur le programme de développement pour l’après-2015, Mme Perceval a laissé entendre qu’il était impossible de mettre en place un seul modèle de développement, car on doit prendre en considération les contextes sociaux et les diverses possibilités économiques de chacun. Tous les modèles de développement doivent cependant reconnaître l’égalité et la dignité des hommes et des femmes.

Mme Perceval a invité les parlementaires à songer au type de monde qu’ils souhaitent, puis à déterminer les indices de développement nécessaires pour mesurer les progrès accomplis pour concrétiser ce monde. Elle a souligné l’importance de la démocratie, de la reconnaissance de la diversité et du respect des droits de la personne.

Mme Perceval a déclaré que les femmes sont victimes de violence d’une nature et d’une ampleur inouïes dans les zones de conflits et qu’elles portent les marques de la guerre sur leur corps. La violence sexospécifique constitue l’une des principales raisons pour lesquelles les femmes doivent participer activement à l’élaboration du programme de développement pour l’après-2015 et les objectifs de développement durable (ODD). Le prochain programme de développement doit viser l’autonomisation des femmes, viser l’égalité des femmes et faire intégrer l’égalité des sexes dans tous les autres objectifs.

M. A Motter, conseiller principal de la section des affaires économiques et sociales de l’UIP, a abordé la question du prochain programme de développement pour l’après-2015 et des ODD. Il a aussi demandé comment les parlements assureront que les ODD seront mis en place et intégrés dans les principaux processus, comme le budget.

Dans son allocution, M. Motter a expliqué que les OMD servent à améliorer les conditions des pays en développement, tandis que les ODD viseront l’ensemble des pays. Les ODD ajouteront un degré de complexité, puisqu’ils établiront des corrélations entre problèmes environnementaux, économiques et sociaux. Auparavant, les divers volets du programme de développement étaient en général regroupés, comme l’environnement, l’économie et l’éducation. Cependant, de l’avis de M. Motter, les parlementaires devraient reconnaître que les ODD sont de nature complexe et voir à ce qu’ils soient considérés de manière plus holistique.

M. Motter a signalé deux études que l’UIP a menées dernièrement :

·         une étude comparative de plusieurs pays, notamment l’Italie, l’Indonésie et le Nigéria, et de leurs mécanismes de mise en œuvre des OMD;

·         une étude du comité des OMD créé au Nigéria, dont le mandat consistait à surveiller la mise en place des OMD et les progrès réalisés en la matière dans le pays.

D’après les données tirées de ces études, un dispositif privilégié pour la surveillance des OMD donne des résultats et peut les faire avancer. M. Motter a dit qu’il fallait tenir compte de divers facteurs pour sélectionner le meilleur dispositif : régime parlementaire, les capacités générales (effectifs et ressources), les règles et les forces de certains dispositifs.

Les parlements désireux d’établir un dispositif dédié aux ODD ont deux possibilités. Tout d’abord, un groupe parlementaire sur les ODD aurait l’avantage de mettre en relation un vaste réseau de parlementaires dans un cadre moins formel et permettrait d’éviter la lourdeur administrative de certaines structures parlementaires et d’avoir un horaire de réunions plus flexible. Il s’avère efficace s’il favorise une discussion ouverte et s’il se réunit périodiquement. En revanche, il y a des inconvénients : peu de ressources, un faible rayonnement et un pouvoir limité d’exiger qu’un gouvernement prenne des mesures.

L’autre dispositif parlementaire propice aux ODD serait une commission spécialisée, qui étudierait la mise en œuvre des ODD, produirait les rapports d’étape et assurerait la liaison avec les autres pays. Certes plus longue à créer, une commission aurait cependant le pouvoir d’entendre des témoins, un mandat solide, un soutien financier ainsi que la capacité de mener des évaluations régulières et de surveiller l’état d’avancement. Une telle commission n’est efficace que si elle se compose de beaucoup de membres et qu’elle est multipartite. Il faut prendre garde, car une commission de cette nature isolerait les ODD et empêcherait qu’ils soient intégrés dans les dispositifs et processus parlementaires.

Après ces exposés, les déléguées ont participé aux discussions ouvertes sur le sujet dont il est question.

Mme Susan Truppe, députée, a parlé des engagements du Canada concernant la mise en œuvre des OMD au moyen d’un certain nombre d’initiatives majeures. En effet, le Canada a versé des contributions financières importantes aux programmes visant la réduction de la mortalité infantile et l’amélioration de la santé maternelle dans le monde. Il priorisait l’éducation de base dans ses engagements internationaux et a investi des millions de dollars pour aider à réaliser les objectifs en éducation dans les pays d’Afrique. D’ailleurs, le Canada a versé des milliards de dollars en aide internationale et il continue à respecter ses engagements en matière d’aide. Le Canada axe son aide relative aux OMD sur cinq thèmes prioritaires : renforcer la sécurité alimentaire, assurer un avenir aux enfants et aux jeunes, stimuler une croissance économique durable, faire avancer une gouvernance démocratique et garantir la sécurité et la stabilité.

Mme Hélène LeBlanc, députée, a évoqué les trois principaux éléments des prochains ODD : l’environnement, l’économie et la société. Elle a dit craindre que l’économie prenne le pas sur les deux autres. Selon Mme LeBlanc, les parlementaires jouent un rôle important pour que les trois éléments soient pris en compte lors de la mise en œuvre des ODD. Le Canada n’a jamais créé de commission spéciale sur les OMD, mais il devrait songer à des moyens pour faire participer la société civile à la mise en œuvre et à la promotion des ODD, possiblement par l’établissement d’une commission royale.

En réponse aux remarques de Mme LeBlanc, M. Motter a fait observer que de nombreux pays développés, notamment le Canada, n’ont pas de dispositif dédié aux OMD parce que, selon eux, seuls les pays en développement étaient visés. Les ODD ciblent toutefois la totalité des pays et, de fait, un dispositif dédié à ceux-ci serait précieux.

Session 3 : La place de l’égalité des sexes dans la prochaine série des objectifs de développement

Le thème de la troisième session, La place de l’égalité des sexes dans la prochaine série des objectifs de développement, était principalement axé sur la possibilité de faire de l’égalité des sexes le cœur du programme de développement pour l’après-2015, notamment par l’intégration à tous les ODD.

Mme B. Pomeranzi, membre du Comité sur l’élimination de discrimination à l’égard des femmes, a discuté de la vision du Comité sur le programme de développement pour l’après-2015. À titre d’organe chargé de chapeauter les engagements de la Convention de l’ONU sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes, le Comité est conscient de la forte corrélation entre le développement et les droits des femmes. La ratification presque universelle à la Convention fait ressortir l’importance de la participation du Comité de soutien dans l’élaboration du programme de développement pour l’après-2015. Mme Pomeranzi a indiqué que l’éducation, les droits de propriété et les instruments de lutte contre la violence (comme la convention d’Istanbul) doivent en faire partie du nouveau programme.

Malgré les diverses avancées, il demeure des lacunes importantes dans l’application complète des droits de la personne, en particulier les droits des femmes en matière de santé sexuelle et génésique. Mme Pomeranzi a fait remarquer que les femmes ont subi des contretemps pour ce qui est de la prospérité économique, en partie à cause de la crise financière mondiale et des mesures d’austérité qui s’ensuivirent. Elle a recommandé de comparer les répercussions financières sur les femmes et sur les hommes pour bien comprendre celles qui ciblent les femmes.

De même, Mme Pomeranzi a proposé que les parlements participent à l’établissement des ODD, ce qui leur est possible en siégeant au Comité sur l’élimination de discrimination à l’égard des femmes.

Mme S. Palmieri, spécialiste des politiques d’ONU Femmes, a discuté du rôle de l’égalité des sexes et de l’autonomisation des femmes dans le programme de développement pour l’après-2015. Elle a ajouté qu’ONU Femmes est une nouvelle entité instaurée seulement en 2010, qui cherche à fournir une aide en matière de genre aux États membres et aux mécanismes intergouvernementaux. D’ailleurs, ONU Femmes participe aux consultations sur le programme de développement pour l’après-2015.

Mme Palmieri a noté que, d’après des consultations internationales menées par l’ONU auprès des citoyens, il fallait que l’égalité des sexes occupe une plus grande présence dans le programme de développement pour l’après-2015. Pour ce faire, ONU Femmes prônerait une approche à deux volets :

1.un objectif universel concernant l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes,

2.l’intégration du principe d’égalité des sexes dans la totalité des objectifs, des cibles et des indices.

Mme Palmieri a indiqué que les progrès dans la mise en œuvre des OMD sont à la fois inégaux et limités, particulièrement pour les objectifs associés aux femmes et à l’égalité des sexes. Le nouvel ensemble d’objectifs devrait porter davantage sur les causes structurelles de l’inégalité des sexes. Mme Palmieri a affirmé que le programme de développement pour l’après-2015 représente l’occasion de tout transformer : les pays pourront tenir compte des enseignements tirés des OMD lorsqu’ils devront adopter une politique ferme, affecter des ressources et instaurer un dispositif de reddition de comptes relativement aux prochains objectifs.

ONU Femmes souhaite l’établissement d’un objectif distinct sur l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes, afin d’englober trois cibles :

1.l’absence de violence à l’égard des femmes et des filles : il faut mettre fin aux violences comme l’excision et le harcèlement et transformer progressivement la perception que la société a de ces violences;

2.l’égalité des sexes dans la répartition des capacités : les femmes devraient avoir le même accès à l’éducation, une bonne santé générale, une santé sexuelle et génésique et des droits des femmes et des adolescentes en matière de procréation, ainsi que l’accès aux ressources et aux débouchés, notamment à la propriété foncière, à un bon emploi et à un salaire égal, afin de bâtir la sécurité sociale et économique des femmes.

3.l’égalité des sexes dans le processus décisionnel dans les entités privées et publiques : elle doit se traduire par une représentation égale des femmes dans les parlements nationaux, les conseils locaux, les médias, les organisations de la société civile, en gestion, les conseils d’administration, les familles et la société.

La mise en œuvre d’un objectif de développement distinct nécessiterait la cueillette de données améliorée et un suivi des progrès sérieux. Le programme de développement pour l’après-2015 exigerait donc de favoriser la compilation de statistiques et de données ventilées par sexe, et les parlementaires contribueront grandement à rendre cette compilation possible.

En conclusion, pour réaliser les objectifs relatifs à l’égalité des sexes, les parlementaires devront prendre les mesures suivantes : susciter la volonté et le dynamisme politique afin de réaliser les objectifs; favoriser l’adhésion du pays entier aux objectifs; adapter les objectifs au contexte national; mobiliser les ressources pour la mise en œuvre des objectifs et en suivre l’avancement.

Après ces exposés, les déléguées ont participé aux discussions ouvertes sur le sujet dont il est question.

Mme Hélène LeBlanc, députée, a pris la parole au sujet du développement et de son rapport primordial avec la durabilité et l’environnement. Elle a souligné les obstacles qui surgissent lorsque le développement économique ne se conjugue pas avec le développement durable. Par conséquent, les parlementaires doivent considérer attentivement aux coûts environnementaux de tout projet de développement.

Respectueusement soumis,

 

 

 

L’hon. Salma Ataullahjan, sénatrice, présidente
Groupe canadien de l’Union interparlementaire (UIP)

 



[1] On peut consulter l’ordre du jour et d’autres documents relatifs à la 58e session sur la page Web que l’UIP consacre à la réunion parlementaire à Au carrefour du développement durable et de l'égalité des sexes : le rôle des parlements.

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