Une délégation de la Section canadienne
de l’Association parlementaire du Commonwealth (APC) s’est rendue aux
Seychelles du 9 au 12 septembre 2010. La délégation représentant la Section
canadienne était composée des personnes suivantes :
·M. Russ Hiebert, député, président de la Section
canadienne, chef de la délégation;
·Mme Carole Freeman, députée.
La secrétaire de l’Association,
Stephanie Bond, accompagnait également la délégation.
La délégation a effectué cette visite
tout juste avant la 56e conférence de l’APC à Nairobi, au Kenya. La
Section canadienne effectue souvent de telles visites bilatérales tout juste
avant les conférences annuelles de l’APC afin de réduire les coûts que doit
assumer l’association.
Selon la constitution de l’APC, les
pays membres sont encouragés à se visiter mutuellement pour donner aux
parlementaires l’occasion d’échanger leurs points de vue et de discuter des
questions et problèmes qui les intéressent. Au cours du 7e Colloque
canadien de l’APC tenu à Ottawa, en octobre 2009, plusieurs participants ont
exprimé leurs préoccupations par rapport aux processus démocratiques utilisés
dans leur pays respectif. Afin de répondre à ces préoccupations et de faire
progresser la démocratie parlementaire dans tous les pays du Commonwealth, la
Section canadienne s’est engagée à effectuer des visites bilatérales aux
Seychelles avant la 56e conférence annuelle de l’APC à Nairobi, au
Kenya, en 2010.
La visite aux Seychelles visait à
étudier les éléments suivants :
·Les différences entre les régimes parlementaires
du Canada et des Seychelles;
·Le rôle des députés et des partis de
l’opposition au Parlement;
·Le système des comités;
·L’indépendance des médias;
·Les mécanismes susceptibles d’élargir les moyens
dont disposent les institutions et les parlementaires;
·Les méthodes permettant de renforcer la
démocratie dans le Commonwealth;
·Les stratégies de relance économique à l’issue
de la récession;
·Les relations commerciales;
·La lutte contre la piraterie.
Rencontre avec le capitaine de corvette
Richard Sturman, officier de liaison des forces navales de l’Union européenne (EU NAVFOR)
La visite a commencé par une séance
d’information sur la lutte contre la piraterie aux Seychelles donnée par
Richard Sturman, capitaine de corvette (capc) et officier de liaison d’EU
NAVFOR.
La piraterie est un grand problème aux
Seychelles et dans toute la région, et elle a des répercussions extrêmement
négatives sur l’économie des îles, qui dépend largement du tourisme.
Le Capc Sturman a fait un survol des mesures adoptées pour
lutter contre la piraterie et a décrit en détail l’opération de
l’OTAN baptisée « Nation Shield ». Les discussions ont surtout
porté sur les mesures prises pour lutter contre la piraterie et sur
l’importance de la reconstruction de la Somalie, d’où proviennent la majeure
partie des pirates. Tous les participants s’entendaient sur le fait que cet
État en déroute pose un risque pour la sécurité globale de la région. Selon le
Capc Sturman, la piraterie restera un problème tant que la Somalie ne se
redressera pas. Les forces navales de l’Union européenne s’occupent entre
autres d’escorter les navires du Programme alimentaire mondial et de créer des
couloirs de transit sécuritaires. Après la séance d’information, la délégation
a pu visiter la Garde côtière des Seychelles et en apprendre ainsi davantage
sur la collaboration entre la Garde côtière et l’EU NAVFOR dans la lutte contre
la piraterie. Mme Gillian Ormiston, troisième secrétaire (politique)
du haut-commissariat de Grande-Bretagne à Maurice, était présente et a fait le
point sur la situation politique, sociale et économique de la région.
Réunion avec le comité exécutif de la
Section seychelloise de l’APC
La réunion avec le comité exécutif de
l’APC a été présidée par les deux vice‑présidents de la Section
seychelloise, l’honorable Marie-Louise Potter et l’honorable
Wavel Ramkalawan. D’autres membres du comité exécutif étaient
présents : l’honorable David Pierre, l’honorable Nicholas Prea et
l’honorable Jeovanna Charles.
L’honorable Marie-Louise Potter a
entamé la réunion en faisant un survol du système électoral seychellois. Elle a
souligné que cette visite bilatérale était la toute première visite officielle
du Canada. Elle a noté que les Seychelles étaient l’un des plus petits et l’un
des plus récents membres de l’Association et qu’elle avait bien hâte d’échanger
des renseignements sur les meilleures pratiques et les approches communes.
On a noté que, en dépit des différences
de superficie et de situation géographique entre les deux pays, les
parlementaires sont tous élus pour représenter la population, élaborer des lois
et servir leurs électeurs. L’honorable Marie-Louise Potter a décrit les
réformes parlementaires en cours aux Seychelles, y compris certaines réformes
récentes visant les comités. Elle a également manifesté son désir de renforcer
la coopération entre les sections canadienne et seychelloise de l’APC.
M. Russ Hiebert, député, s’est déclaré
heureux de l’accueil chaleureux qu’a reçu la première délégation canadienne à
se rendre aux Seychelles et il a souligné que l’honorable David Pierre avait
participé au 7e Colloque parlementaire canadien, en 2009. Mme
Carole Freeman, députée, a également signalé que le Canada et les Seychelles
ont connu un passé colonial et une évolution linguistique semblables. Elle a
noté que, comme le Canada, de nombreux pays du Commonwealth sont actuellement
dirigés par des gouvernements minoritaires.
L’honorable Marie-Louise Potter a
ensuite souligné les récentes élections au Kenya et l’importance de préserver
la démocratie dans la région pour assurer la stabilité dans tous les pays.
L’indépendance des médias a ensuite fait l’objet d’un long débat où se sont
affrontés les députés de l’opposition et ceux du gouvernement des Seychelles.
La délégation canadienne a insisté sur l’importance de l’indépendance des
médias. Il s’en est suivi une discussion sur les médias nationaux au Canada et
les stations de télévision et journaux publics des Seychelles. La délégation
canadienne a expliqué que la Société Radio‑Canada (SRC) réussit très
bien à demeurer indépendante du gouvernement, même si elle est financée par des
fonds publics. Les personnes présentes conviennent qu’il est essentiel que les
médias des Seychelles trouvent un juste équilibre étant donné le nouveau
paradigme politique. L’honorable Marie-Louise Potter a expliqué qu’il
était urgent de renforcer les médias nationaux. Par exemple, selon les députés
de l’opposition présents, le coût d’une licence de station radio et les
restrictions imposées aux groupes qui peuvent présenter une demande de licence
constituent des obstacles à la libéralisation des médias aux Seychelles. La
délégation a appris que le président des Seychelles détient également le
portefeuille du ministère de l’Information. Les députés de l’opposition ont
également fait part de leurs préoccupations quant à la liberté de réunion.
L’emplacement du nouveau Parlement est également une source de préoccupation
pour l’opposition puisqu’aucun transport en commun ne permet aux citoyens de
s’y rendre. Au cours de la discussion, M. Hiebert a insisté sur le fait
que les pays membres de l’APC doivent promouvoir la démocratie. Il a affirmé
que la participation des citoyens ne nuisait aucunement à la stabilité et qu’au
contraire, elle l’améliorait.
La discussion a ensuite porté sur
l’histoire des Seychelles et sur l’abandon du système à parti unique. Il a
aussi été question du financement des partis, et la délégation canadienne a
expliqué les restrictions s’appliquant aux contributions et le rôle d’Élections
Canada. Aux Seychelles, il n’y a aucun plafond pour les contributions
étrangères aux partis politiques et l’opposition s’inquiète beaucoup que la
construction des nouveaux édifices du Parlement ait été financée par la
République populaire de Chine.
On a également discuté des règles
électorales, des comités, de l’indépendance du système judiciaire, du
calendrier parlementaire, de l’élection du Président et du rôle des projets de
loi émanant des députés. On a souligné que les Seychelles n’ont jamais connu de
changement de gouvernement dans toute leur histoire.
Rencontre avec les présidents des
comités
Étaient présents à la réunion sur le
rôle des comités l’honorable Terence Mondon, président du Comité des
finances et des comptes publics, l’honorable Marie-Antoinette Rose, présidente
du Comité de suivi des engagements du gouvernement, et Jeovanna Charles, membre
du Comité du Règlement.
L’honorable Terence Mondon, président
du Comité des finances et des comptes publics, a expliqué que l’Assemblée
nationale avant récemment participé à un colloque de l’Union interparlementaire
sur le renforcement des comités. Cet atelier a mis en lumière l’importance du
travail en comité et la maturité politique nécessaire pour que ce travail soit
efficace.
L’honorable Jeovanna Charles, membre du
Comité du Règlement, a décrit les responsabilités du Comité en ce qui concerne
l’éthique et l’accès à l’information. Mme Carole Freeman a
expliqué que, comme le Parlement du Canada est en situation minoritaire, les
partis risquent de paralyser le pays s’ils ne travaillent pas ensemble. Les
participants étaient d’accord qu’en comité, les parlementaires pouvaient poser
des questions plus difficiles. Il y a une séparation des pouvoirs et les
parlementaires peuvent critiquer le gouvernement pour défendre les intérêts des
électeurs.
Il a également été question du
processus d’élection des présidents des comités. La délégation canadienne a
souligné l’importance de la participation de l’opposition et le rôle essentiel
qu’elle joue dans le système des comités. Elle a signalé qu’il est important
qu’un député de l’opposition préside le Comité des comptes publics au Canada.
M. Russ Hiebert s’est dit heureux que l’honorable Marie-Antoinette Rose,
présidente du Comité de suivi des engagements du gouvernement, participe au 8e
Colloque canadien à Ottawa.
Rencontre avec des représentants de la
division du commerce du ministère des Finances
M. Charles Morin, négociateur en chef
pour l’accession des Seychelles à l’Organisation mondiale du commerce (OMC), au
ministère des Finances, et M. Ziyaad Ebrahim, directeur du commerce,
au ministère des Finances, ont fait un survol des intérêts du Canada aux
Seychelles et des relations commerciales entre les deux pays. M. Morin a
souligné que de nombreux Canadiens d’origine seychelloise envoient de l’argent
aux membres de leur famille qui sont restés au pays. M. Morin a expliqué
c’est dans le secteur des services que l’on pourrait le plus développer le
commerce entre les deux pays. Les secteurs des services financiers, de l’assurance
et du tourisme sont aussi prometteurs. M. Morin a souligné que le secteur
de la pêche seychellois avait besoin d’aide sur le plan technique et que le
Canada pourrait jouer un rôle de premier plan à cet égard. Il a ensuite fait le
point sur l’accession des Seychelles à l’OMC et sur les accords de
libre-échange dans la région. Une assistance technique est également requise
dans les secteurs du commerce et de la protection de la propriété
intellectuelle. On note enfin des besoins dans le domaine de la formation,
malgré le taux élevé d’alphabétisation dans ce pays.
Rencontre avec le Comité consultatif
sur les médias de l’Assemblée nationale
La délégation a rencontré
l’honorable Michel Marie, président du Comité consultatif sur les médias,
et les honorables Gervais Henrie et Vicky Theresine, membres du
Comité. Étaient également présents des représentants des médias : Mme Marie‑Anne Lepathy
de Seychelles Nation, Mme Marceline Evenor de la
Seychelles Broadcasting Corporation et Mme Sharon Telemarque de GEMPlus.
L’honorable Michel Marie a présenté les
responsabilités du Comité. Il a noté que la Chambre faisait de plus en plus de
pression pour qu’on améliore les relations de travail avec les médias et il a
décrit des mesures prises récemment pour améliorer la compétence des
journalistes, comme des ateliers de formation. L’honorable Gervais Henrie,
un ancien journaliste, a insisté sur l’importance d’établir un code de
déontologie pour les médias.
Mme Sharon Telemarque a pour
sa part expliqué le rôle de GEMPlus, une association de membres des médias qui
vise à sensibiliser le public à la problématique homme-femme. GEMPlus est une
organisation non gouvernementale qui offre de la formation aux médias et
qui organise des activités de sensibilisation à la problématique homme‑femme.
L’honorable Vicky Theresine a expliqué que le Comité consultatif sur les
médias cherche à déterminer comment les médias nationaux pourraient mieux
couvrir les travaux des parlementaires.
La délégation canadienne a souligné
l’importance de l’indépendance des médias, ce qui a donné lieu à une longue
discussion. On a souligné que l’absence d’indépendance des médias constituait
une préoccupation majeure pour la démocratie aux Seychelles. On a demandé aux
journalistes présents s’ils se sentaient libres d’accomplir leur travail sans
sacrifier leur sécurité d’emploi dans les médias publics. Le silence qui a
suivi a amené la délégation à conclure que les pressions politiques et
l’autocensure sont des obstacles à l’indépendance des médias aux Seychelles. Le
coût élevé des licences a encore une fois été décrit comme un grand obstacle à
la diversification des médias. Mme Carol Freeman a insisté
sur la nécessité d’avoir des stations de radiodiffusion privées aux Seychelles.
M. Hiebert a pour sa part souligné l’importance de promouvoir la liberté
d’expression et de permettre aux citoyens d’exprimer leurs opinions. Il a
ajouté que des échanges comme ceux-ci étaient bénéfiques pour la démocratie et
que le gouvernement n’avait pas à décider des nouvelles qui feront les
manchettes. On a expliqué comment le Conseil de la radiodiffusion et des
télécommunications canadiennes (CRTC) s’y prenait pour accorder les licences.
Les personnes présentes se sont entendues qu’il fallait, en raison du nouveau
paradigme politique, faire preuve d’ouverture par rapport aux points de vue
divergents. Les journalistes présents ont déploré l’absence de journalisme
d’enquête et souligné qu’Internet pouvait favoriser la liberté d’expression. On
a rappelé que le Président était responsable du ministère de l’Information.
L’honorable Gervais Henrie, membre du Comité, a expliqué que la
création de nouvelles stations radio n’était pas nécessairement la
solution : il vaudrait mieux favoriser l’impartialité et l’indépendance
dans les médias.
En terminant, les membres de la
délégation voudraient remercier le Service d’information et de recherche
parlementaires de la Bibliothèque du Parlement de l’excellente documentation
qu’il leur a fournie en vue de la visite bilatérale. Un merci tout particulier
à M. Robert Orr, haut‑commissaire du Canada en Tanzanie, aux îles
Comores, aux Seychelles et en Zambie, ainsi qu’au personnel du
haut-commissariat pour leur très grand professionnalisme.
Respectueusement soumis,
Russ Hiebert, député, président de la Section
canadienne
de l’Association parlementaire du Commonwealth (APC)