Le 16 mai, le nouveau président de la
République française Nicolas Sarkozy, a officiellement pris ses fonctions à la
tête de l’État. Sarkozy, représentant l’Union pour un mouvement populaire
(UMP), de centre-droite, a été élu le 6 mai dernier par 53,1 % des
électeurs français face à sa rivale socialiste Ségolène Royale, pour un mandat
de 5 ans. Le taux de participation record au scrutin (84 %) illustre
l’importance accordée à cette élection par le pays. Le scrutin a été marqué par
l’affaiblissement de l’extrême-droite représentée par le Front national de
Jean-Marie Le Pen (10 % du vote au 1er tour) et la montée du
centre représenté par François Bayrou (18 %).
La forte participation des électeurs
dénotait un besoin de rénovation des politiques économiques et sociales. Les
Français reconnaissaient un vrai besoin de réformes, qu'ils accompagnent d'une
forte demande d'efficacité (en votant pour les grands partis).
Le 17 mai, Nicolas Sarkozy a nommé
Premier ministre François Fillon, ancien ministre sous Chirac avec le mandat de
former un nouveau gouvernement. Ce gouvernement, de taille modeste, 19
ministres et secrétaires d’État, est composé de 12 hommes et 7 femmes.
C’est l’état de grâce. Le président
Sarkozy profite d’un taux de popularité de 67 %, jamais atteint depuis
Charles de Gaulle. Les élections législatives qui se dérouleront le 17 juin
confirmeront ce résultat en reconduisant largement la majorité UMP au
Parlement.
Les enquêtes d’opinion ont montré qu’en
votant pour Sarkozy, les Français reconnaissaient un vrai besoin de réformes,
qu'ils accompagnent d'une forte demande. Il y a consensus sur la nécessité de
procéder à des réformes structurelles importantes pour dynamiser l'emploi,
redresser la compétitivité, rénover les systèmes d'éducation-formation et
d'innovation, améliorer l'efficacité des actions publiques.
Au premier tour, le taux de
participation a été de 60.50 % et le parti du président Sarkozy a obtenu
39.54 du vote et les socialistes 24.73%.
C’est dans ce contexte qu’une
délégation canadienne s’est rendue en France dans le cadre d’une mission
parlementaire lors du deuxième tour des élections législatives. Cette visite a
permis aux parlementaires canadiens de tisser des liens avec leurs homologues
français et poursuivre le dialogue parlementaire sur des sujets d’intérêts
communs.
La délégation aimerait également
remercier M. Claude Laverdure, ambassadeur du Canada en France, ainsi que tous
les représentants de l’ambassade canadienne à Paris, notamment Marc Berthiaume
et Julie Normand de la Section politique des efforts que ceux-ci ont déployés
pour faire de cette visite un grand succès. Les membres de la délégation ont
quitté la France en étant certains que leur visite avait contribué au
renouvellement et au renforcement des relations parlementaires entre les deux
nations.
Les élections législatives
françaises en bref
Les élections législatives permettent
d’élire les députés à l’Assemblée nationale. Ils sont au nombre de 577 et sont
élus au suffrage universel direct pour un mandat de cinq ans renouvelable sauf
si la législature est interrompue par une dissolution (article 24 de la
Constitution).
Le nombre de candidats s’élève à 7.639
dont 3.177 femmes. Près de 44,5 millions d’électeurs sont donc appelés
aux urnes afin d’élire leurs 577 représentants à l’Assemblée nationale.
Depuis 1958, cinq dissolutions sont
intervenues : en 1962, 1968, 1981, 1988 et 1997. Il ne peut être procédé à
une nouvelle dissolution dans l’année qui suit ces élections.
Le vote a lieu par circonscription,
chacune d’elles correspondant à un siège.
Les députés sont élus au scrutin
majoritaire à deux tours.
Pour être élu député, le candidat doit
obtenir :
au premier tour, la majorité absolue des
suffrages exprimés et un nombre égal au quart du nombre des électeurs inscrits;
au second tour, la majorité relative suffit, en
cas d’égalité le plus âgé des candidats est élu. Pour se présenter au second
tour de scrutin, le candidat doit avoir recueilli un nombre de voix d’au moins
12,5 % du nombre d’électeurs inscrits.
13 juin 2007
La délégation a rencontré M.
François Logerot, Président de la Commission nationale des Comptes de
Campagne et des Financements politiques, qui a sommairement expliqué les
grandes lignes du système de financement des candidats et des partis politiques
lors des élections législatives.
Les obligations
du candidat
Le candidat est tenu de respecter un
certain nombre de formalités substantielles :
·désigner un mandataire financier (personne
physique ou association de financement) et le déclarer en préfecture dès le
début de la campagne électorale; ce mandataire ouvrira un compte bancaire
unique retraçant les mouvements financiers du compte (recettes et dépenses);
·ne pas dépasser le plafond des dépenses
applicable à l'élection en cause;
·faire viser son compte par un expert-comptable
sauf si aucune dépense et recette n'a été engagée;
·déposer à la commission un compte en équilibre
ou, éventuellement, en excédent;
·fournir toutes les pièces justificatives de
dépenses et de recettes.
Les décisions de la commission
À l'issue de l'examen des comptes de
campagne, la commission peut prendre différents types de décisions :
·approuver le compte de campagne;
·approuver après réformation le compte, notamment
lorsque des dépenses engagées par le candidat ne présentent pas de caractère
électoral;
·rejeter le compte en cas de manquement aux
règles de droit électoral (absence d'expert-comptable, don de personne morale,
compte en déficit, dépassement de plafond...).
La commission peut également constater le
non-dépôt ou le dépôt hors délai d'un compte par le candidat.
Les conséquences des décisions de la
commission
Le rejet, le non-dépôt et le dépôt hors
délai du compte privent le candidat de son droit au remboursement des dépenses
de campagne et entraînent la saisine du juge de l'élection. Ce dernier
peut :
·soit prononcer l'inéligibilité du candidat;
·soit ne pas prononcer l'inéligibilité, s'il
considère que le candidat est de bonne foi ou s'il juge que la commission n'a
pas statué à bon droit.
Les décisions de réformations peuvent
diminuer le montant du remboursement dû au candidat.
Celui-ci peut contester la décision prise par la commission en intentant un
recours gracieux devant elle, ou contentieux devant le Conseil d'État.
Le remboursement du candidat
Pour être remboursé, un candidat doit
réunir un certain nombre de conditions :
·avoir obtenu au moins 5 % des suffrages exprimés
(au moins 3% pour les élections européennes et territoriales de Polynésie
française);
·avoir respecté les obligations lui incombant);
·avoir engagé des dépenses présentant un
caractère électoral;
·ne pas avoir vu son compte rejeté.
Dès lors, le candidat est remboursé du
montant arrêté par la commission à hauteur de son apport personnel (versements
personnels et emprunts du candidat remis au mandataire), dans la limite du
demi-plafond fixé pour chaque circonscription.
Les obligations des partis politiques
Le parti, ou groupement politique,
doit :
·tenir une comptabilité;
·arrêter ses comptes chaque année;
·les faire certifier par deux commissaires aux
comptes (chargés de vérifier leur légalité et l'absence de financement par des
personnes morales);
·déposer les comptes de l'année n-1 au plus tard
le 30 juin de l'année.
Le financement des partis politiques
Il existe deux types de financement :
·un financement privé regroupant les versements
d'autres formations politiques, les cotisations des adhérents et des élus, et
les dons des personnes physiques;
·un financement public direct divisé en deux
parts égales : une première fraction est destinée au financement des
partis et groupements politiques en fonction de leurs résultats aux élections à
l'Assemblée nationale (les candidats doivent avoir obtenu chacun au moins 1 %
des suffrages exprimés dans au moins cinquante circonscriptions en métropole,
et pour les partis et groupements politiques ayant présenté des candidats
seulement outre-mer, avoir obtenu au moins 1 % des suffrages exprimés dans
l'ensemble des circonscriptions dans lesquelles ils se sont présentés).
Une seconde fraction est attribuée aux partis et groupements politiques
bénéficiaires de la première fraction proportionnellement au nombre de membres
du Parlement qui, chaque année, déclarent s'y rattacher.
La discussion a ensuite porté sur les
ressemblances et les différences entre les systèmes canadiens et québécois. La
députée Claude DeBellefeuille a sommairement expliqué les règles canadiennes
quant au remboursement des dépenses des candidats et le financement des partis
par Élections Canada au montant de $1.75 par votes reçus. De plus, les délégués
canadiens ont expliqué que c’est un fonctionnaire nommé par la Chambre des
communes qui administre l’ensemble des dispositions législatives sur le
fonctionnement des élections et le financement des partis politiques.
Jeudi 14 juin 2007
Le député Pierre Lequiller a reçu la
délégation pour un petit-déjeuner de discussions sur l’avenir de l’Union
européenne suite à l’élection de Nicolas Sarkozy. Ce grand ami du Canada a fait
part d’anecdotes de ses nombreux voyages au Canada et une discussion s’ensuivit
sur la situation politique canadienne au cours de laquelle le sénateur a brossé
un tableau des derniers événements politiques et une éventuelle campagne
électorale fédérale. Le sénateur Bacon en a profité pour féliciter M. Lequiller
pour sa réélection dès le premier tour.
L’entretien a ensuite porté sur les
perspectives d’une éventuelle ratification d’un nouveau traité constitutionnel
pour l’Union européenne suite à la tentative infructueuse de 2005. En tant que
président de la Délégation de l’Assemblée nationale à l’Union européenne, le
député Lequiller connaît très bien cet enjeu majeur pour l’avenir du projet
européen auquel il croit beaucoup.
Selon lui, le rejet de la constitution
de 2005 par le peuple français relevait plus de la politique intérieure (grève
étudiante sur le contrat première embauche, situation économique précaire,
faible popularité de Jacques Chirac) que d’une répudiation du projet européen.
Il a dit espérer que le nouveau président Sarkozy aidera à relancer le
processus politique menant à une consolidation des institutions européennes.
Pour y parvenir, le couple
franco-allemand est incontournable, mais il y a lieu de tenir compte des
préoccupations des 25 pays membres de l’Union européenne afin de maximiser les
chances de réussite.
Mme Sylvie Goulard, universitaire, ancienne conseillère de Romano Prodi, président du
mouvement Européen-France a rencontré la délégation afin de discuter des grands
enjeux internationaux et du rôle qu’entend jouer le président Sarkozy.
Mme Goulard a dit souhaiter que l’on
parvienne à trouver des pistes afin de relancer les discussions sur une
éventuelle adoption d’une constitution européenne. Depuis le rejet de la
proposition constitutionnelle en 2005 par les électeurs français, il semble que
l’Europe soit paralysée. Pour elle, ce rejet doit être vu comme étant celui des
dirigeants en place à ce moment et non comme un rejet du projet européen. Par
conséquent, elle a dit espérer que le nouveau président, fort d’un solide mandat
de l’électorat, puisse insuffler un nouvel élan au projet.
Sur le processus de paix au
Proche-Orient, Mme Goulard a fait remarquer que Sarkozy était un fidèle allié
d’Israël et qu’il faudrait attendre avant de voir l’influence de la France au
sein du Quartette (Russie, États-Unis. Union européenne et ONU) qui tente de
relancer les discussions de paix dans cette région trouble.
Finalement, elle a fait part de son
pessimisme sur l’avenir de l’Irak. Outre les tensions entre chiites et
sunnites, elle a dit craindre qu’une invasion du nord du pays par l’armée
turque ne fasse éclater ce pays.
En soirée, la délégation a pu assister
au dernier meeting électoral de l’UMP à Versailles, au cours duquel le nouveau
Premier ministre François Fillon a tenté de motiver ses troupes afin qu’elles
se mobilisent pour obtenir le plus de sièges possible au second tour.
Vendredi 15 juin 2007
La délégation a rencontré le candidat
socialiste de Seine-Saint-Denis dans le 1er arrondissement à Paris, M. Bruno
LeRoux. Après une discussion sur les enjeux locaux et nationaux de cette
élection, le candidat a gracieusement invité les parlementaires canadiens à
venir assister à son dernier rassemblement électoral. La délégation a
grandement apprécié cet exercice, car nous avons pu converser avec des
électeurs de cette circonscription populaire et pluriethnique de Paris, et ce,
dans une ambiance conviviale. Le candidat a finalement remporté l’élection avec
62.71 % du vote.
Samedi 16 juin 2007
En cette dernière journée de campagne,
la délégation a eu le privilège de rencontrer le député sortant, M. Julien
Dray, dans le local électoral à Ste-Geneviève-des-Bois dans la circonscription
électorale des Essones. M. Dray a été un proche conseiller de la candidate
socialiste défaite Ségolène Royal lors des présidentielles du mois précédent.
M. Dray a fait part de ses observations
sur le déroulement de la campagne, où des sondages le plaçaient en difficulté,
et sur les pistes de réflexion que doit explorer le Parti socialiste pour se
moderniser et proposer des solutions aux problèmes actuels de la France.
Le candidat Dray a finalement obtenu
53.48 % des voix devant son adversaire de l’UMP.
Dimanche 17 juin 2007
Pour conclure cette mission, la
délégation a rencontré le député-maire de Cachan, M. Jean-Yves LeBouillonec,
afin de comprendre le rôle du maire dans le processus électoral. Il a expliqué
brièvement qu’il doit s’assurer du bon déroulement du vote dans sa municipalité
et qu’il agit en tant que représentant de l’État.
Pour conclure, la délégation a pu
constater de visu le déroulement du vote dans un bureau de scrutin en
compagnie du maire et par le fait même être témoin privilégié d’un moment fort
de la démocratie française.