Header Image Association parlementaire Canada-Afrique

Rapport

 

L’Association parlementaire Canada-Afrique est représentée par l’honorable Mauril Bélanger, député, coprésident de l’Association; l’honorable Mobina S.B. Jaffer, sénatrice, vice-présidente de l’Association; Mme Johanne Deschamps, députée, vice-présidente de l’Association; M. Larry Miller, député, directeur de l’Association; l’honorable Terrance Stratton, sénateur, membre de l’Association et Mme Candice Hoeppner, députée, membre de l’Association.  La délégation est assistée de Mme Julie Lalande-Prud’homme, secrétaire exécutive de l’Association, et de M. Michael Dewing, analyste de l’Association.

OBJECTIFS

L’Association parlementaire Canada-Afrique a effectué les visites bilatérales en Algérie et en Tunisie du 15 au 20 février 2009.  Les objectifs des visites étaient les suivants :

·         amener les parlementaires à discuter les sujets d’intérêt commun;

·         renforcer les relations bilatérales;

·         favoriser la compréhension mutuelle des enjeux bilatérales; 

·         se renseigner sur les questions continentales et leurs incidences sur les organismes régionaux;

·         étudier l’activité canadienne dans la région, ainsi que le rôle des groupes et des entreprises de la société civile.

Pour atteindre ces objectifs, la délégation a rencontré des parlementaires algériens et tunisiens, ainsi que des représentants des gouvernements et des partis politiques, des représentants canadiens, des représentants des Nations Unies et d’organisations non gouvernementales.  En Algérie, elle a aussi visité un projet de développement parrainé par l’Agence canadienne de développement international (ACDI). 

ALGÉRIE

   A.     Questions clés

L’Algérie se classe au deuxième rang des pays d’Afrique en termes de superficie et au deuxième rang des pays comptant le plus de francophones au monde.  Sa population de presque 34 millions est composée d’Arabes et de Berbères et est à 99 p. 100 musulmane sunnite.  Démocratie multipartite, l’Algérie se remet des troubles politiques des années 1990 qui ont entraîné plus de 150 000 décès.  Bien que les conditions de sécurité se soient améliorées, les groupes rebelles sont encore actifs et les conditions sous-jacentes continuent de représenter des défis, tels que le chômage, la migration urbaine rapide, la productivité industrielle inadéquate et l’effondrement de l’infrastructure.  L’économie est basée en grande partie sur les hydrocarbures.  Les tentatives de diversification ont eu un succès mitigé et le développement économique est également ralenti par la corruption.

Les dernières élections ont eu lieu en 2004.  La chambre basse du Parlement algérien, l’Assemblée populaire nationale (APN), compte 389 députés qui sont élus directement au moyen d’un système de liste proportionnelle.  Il y a 30 femmes, ou 8 p. 100 du total des élus.

À l’APN, le pouvoir est détenu par l’Alliance présidentielle, une coalition formée par le Front de Libération Nationale (FLN), le Rassemblement National Démocratique (RND) – lequel est composé d’anciens membres du FLN – et du Mouvement de la Société pour la Paix (MSP), parti islamiste modéré.  Le Parti des Travailleurs (PT) est le principal parti de l’opposition, suivi du Rassemblement pour la Culture et la Démocratie (RCD). 

Le Conseil de la Nation est la chambre haute du Parlement algérien.  Il a été créé en 1996.  Les deux tiers de ses 144 membres sont élus indirectement par les assemblées régionales et un tiers des membres sont nommés par le président de l’Algérie.  Ces derniers sont des personnalités connues du domaine des arts, des sciences, de l’économie et des professions.  Quatre membres du Conseil de la Nation sont des femmes, soit 3 p. 100 du total.

En novembre 2008, le Parlement algérien a approuvé l’abolition de la limite de deux mandats à la présidence.  Le président Abdelaziz Bouteflika a annoncé subséquemment qu’il se présenterait pour un troisième mandat.

Les relations entre le Canada et l’Algérie sont bonnes.  Cela est en partie attribuable aux 50 000 personnes d’origine algérienne qui vivent au Canada, surtout dans la région de Montréal.  Avec des échanges commerciaux totalisant 5,5 milliards de dollars, l’Algérie est le principal partenaire commercial du Canada en Afrique et au Moyen-Orient.  De plus, les entreprises canadiennes ont fait des investissements considérables dans les secteurs énergétiques de l’Algérie.  Le programme d’aide bilatérale de l’ACDI est axé sur le développement du secteur privé et la réforme de la formation professionnelle.  En 2006-2007, l’ACDI a déboursé 2,3 millions de dollars en aide.

   B.     Rencontres

1.    Rencontre avec M. Mamadou Mbaye, coordonnateur résident des Nations Unies et représentant résident du Programme des Nations Unies pour le développement

Le coordonnateur résident des Nations Unies représente tous les organismes de développement de l’ONU actifs en Algérie, soit le Programme des Nations Unies pour le développement, l’UNICEF, le Programme alimentaire mondial et l’Organisation mondiale de la santé.  Comme le titre le laisse entendre, le coordonnateur résident travaille pour améliorer la cohérence et l’efficience des efforts de l’ONU dans le pays.

M. Mbaye commence par donner un aperçu de la situation des organismes de l’ONU en Algérie.  En décembre 2007, une bombe a détruit le siège de l’ONU, tuant 19 personnes.  Depuis cet événement, le personnel de l’ONU a réévalué le rôle de l’ONU dans le pays.  M. Mbaye dit que le retrait de l’Algérie n’est pas une option, mais que l’ONU doit trouver des moyens d’apporter une valeur ajoutée.

L’Algérie, souligne-t-il, est un pays à revenu moyen, dont la dette est minime et les réserves atteignent 147 milliards de dollars américains.  Bien que ce pays n’ait pas besoin de soutien financier, l’économie y est très fragile et les conditions de sécurité demeurent incertaines.  L’économie étant fondée presque entièrement sur la production de pétrole, les fluctuations de prix du pétrole ont une grande incidence.  Par conséquent, l’Algérie cherche d’autres sources de revenus, comme le tourisme.

M. Mbaye mentionne un certain nombre de défis pour l’Algérie – comme le risque de catastrophes naturelles, la hausse des prix des aliments et la migration – et affirme que le gouvernement doit dire à l’ONU quelles sont ses priorités.  Les programmes actuels de l’ONU en matière de gouvernance, d’environnement, de pauvreté et de gestion du risque font présentement l’objet d’un examen et les nouveaux projets pourraient être axés sur le système bancaire.

M. Mbaye aborde également la situation de la femme en Algérie, ainsi que la situation des réfugiés et la contribution du Canada à leur bien-être. 

2.    Rencontre avec M. Saïd Sadi, secrétaire général du Rassemblement pour la Culture et la Démocratie

Le Rassemblement pour la Culture et la Démocratie (RCD) est un parti berbère laïque, formé lors de l’adoption du système multipartiste en 1989.  M. Sadi est un ancien candidat à la présidence.

Après avoir décrit brièvement le RCD, M. Sadi déclare que la cause des problèmes de l’Algérie est la fraude électorale, qui engendre à son avis l’abus d’autorité, le manque de légitimité et la corruption.  Il dit que même si l’Algérie n’est plus un pays où domine un parti unique, elle souffre de pensée unique.  Parlant des restrictions imposées aux partis d’opposition, M. Sadi affirme que ces dix dernières années le RCD a été limité à 19 membres à l’APN, alors qu’il faut 20 membres pour proposer des initiatives parlementaires.  De plus, il ajoute que le RCD ne peut pas apparaître à la télévision.  Il se montre particulièrement préoccupé par l’abolition de la limite de deux mandats au poste de président et la mobilisation des ressources de l’État en faveur du titulaire.

En réponse aux questions de la délégation, M. Sadi parle du rôle des femmes dans la société, soulignant les limites de leur participation politique.  Il parle également de la répression politique, de la difficulté qu’ont les partis d’opposition à communiquer avec les citoyens et du manque de mécanismes permettant aux jeunes mécontents de s’exprimer.  Il poursuit en décrivant les conditions imposées aux observateurs internationaux aux prochaines élections et la situation en matière de financement des partis.

3.    Rencontre avec MM. Abdellaziz Belkadem et Salah Goudjil du Front de Libération Nationale

Jusqu’en 1989, le Front de Libération Nationale (FLN) était l’unique parti politique en Algérie.  C’est le parti du président Bouteflika et il détient le plus grand nombre de sièges à l’APN.  M. Belkadem est le secrétaire général du parti et a été premier ministre de 2006 à 2008.  M. Goudjil est membre de l’APN.  Le début de la rencontre est couvert par les médias.

M. Belkadem commence en mentionnant les bonnes relations entre l’Algérie et le Canada et exprime son espoir de voir ces relations s’étendre.  En discutant avec la délégation, il parle des enjeux de la création d’emplois pour les étudiants diplômés.  Selon lui, la réconciliation nationale et la hausse du prix du pétrole ont permis à l’Algérie de réduire le chômage de 33 p. 100 à environ 12 p. 100.

En ce qui concerne les efforts pour augmenter la représentation féminine au Parlement, M. Belkadem dit qu’il y a eu un amendement constitutionnel à cet effet et qu’une loi organique pour adopter l’amendement est en préparation.  Il fait remarquer le progrès fait par les femmes depuis l’indépendance, mais ajoute qu’étant donné la prévalence des attitudes conservatrices, le plus gros problème a été de convaincre les gens de voter pour les femmes.  Il affirme que les femmes devraient travailler au sein des partis politiques et rappelle qu’elles sont présentes dans d’autres domaines, comme la médecine et le système judiciaire.

La discussion bifurque ensuite vers l’économie.  M. Belkadem dit que l’Algérie ne sera pas en position d’exporter des produits agricoles à moyen terme.  Bien que le pays soit autosuffisant en fruits et en viande, il importe des céréales, du lait et des oléagineux.  Parce que le prix du lait est subventionné, les producteurs ne sont pas intéressés à augmenter la production; l’Algérie importe donc du lait en poudre.  En ce qui concerne la récession financière mondiale, il dit qu’étant donné le manque d’investissements à l’étranger et les réserves solides de l’Algérie, la crise financière n’a pas eu beaucoup d’incidences financières, mais qu’elle a eu une incidence économique attribuable à la demande réduite pour les produits pétroliers.

4.    Rencontre avec M. Abderrezak Mokri, vice-président du Mouvement de la Société pour la Paix

Le Mouvement de la Société pour la Paix (MSP) est un parti islamiste modéré qui condamne le terrorisme et s’efforce de participer au processus politique.  Il est devenu parti légal en 1991 et fait partie de la coalition au pouvoir depuis 1999.  Il compte 51 membres à l’APN et 10 au Conseil de la Nation, ainsi qu’un certain nombre de représentants élus à l’échelle locale.

M. Mokri explique que le MSP épouse les valeurs islamiques et le patriotisme.  Il dit qu’en raison d’une fraude électorale, l’équilibre politique en Algérie ne reflète pas l’équilibre de la société.  Néanmoins, le MSP adopte une approche pragmatique et voit en sa participation un moyen d’améliorer la démocratie.

M. Mokri est accompagné de deux femmes qui travaillent pour le MSP à l’échelle nationale, Mmes Fatima Saidi et Ratiba Ben Belkacem.  Elles parlent de leur rôle et de leur influence dans le parti et disent qu’elles n’ont pas été élues au Parlement en raison de la résistance persistante dans la société et de la nature du système de scrutin fondé sur les listes.  Elles parlent aussi du rôle que jouent les valeurs islamiques dans leur réflexion politique et de l’appui qu’elles ont de leurs maris, dont un est membre du Parlement. 

Les membres du MSP parlent ensuite de leur position en tant que parti islamiste.  Ils ont payé un lourd tribut pour avoir dénoncé le terrorisme : 400 de leurs membres ont été assassinés.  Ils aimeraient que l’Islam ne soit plus associé au terrorisme.  Mais selon eux, malgré le fait que seulement une infime minorité de musulmans tuent au nom de l’Islam, les médias occidentaux ont tendance à associer l’Islam au terrorisme.

5.    Rencontre avec M. Farouk Ksentini, président de la Commission Nationale Consultative de Promotion et de Protection des Droits de l’Homme

La Commission Nationale Consultative de Promotion et de Protection des Droits de l’Homme (CNCPPDH) a été créée par le gouvernement algérien en 2001.  Elle a été établie pour surveiller la mise en application des dispositions de la Déclaration universelle des droits de l’homme, examiner les plaintes déposées par les citoyens et prendre des mesures lorsque des infractions aux droits de la personne sont signalées.

M. Ksentini commence par décrire l’évolution des droits de la personne en Algérie.  Selon lui, l’Algérie a la volonté politique et les outils pour devenir un État de droit.  Il décrit la structure de la CNCPPDH, la façon dont elle traite les 20 000 à 30 000 plaintes reçues annuellement et présente ses conclusions.  La CNCPPDH examine les plaintes contre les organismes gouvernementaux et veille à ce que les organismes visés assurent le suivi.  Il parle aussi des relations de la CNCPPDH avec Amnistie Internationale et les médias, qu’il décrit comme normales.  En parlant des droits des prisonniers, il dit que la CNCPPDH a fait campagne contre l’incarcération préventive et l’usage de la peine de mort, qu’il souhaiterait être limité aux cas de meurtre.  Au sujet de la religion, il affirme que même si la constitution algérienne garantit la liberté de religion, il y a eu quelques incidents mineurs impliquant des non-musulmans.

6.    Rencontre avec M. Mostefa Bouchachi, président de la Ligne Algérienne pour la Défense des Droits de l’Homme

La Ligue Algérienne pour la Défense des Droits de l’Homme (LADDH) est un organisme non gouvernemental indépendant, non partisan, constitué en 1985 et reconnu légalement en 1989.  L’organisme travaille à la défense des droits de la personne au moyen de la formation et de la sensibilisation.  Il collabore avec les groupes de la société civile en Algérie et sur la scène internationale.

M. Bouchachi explique que la LADDH organise des séminaires et des séances de formation pour les activistes et les journalistes.  Il dit que la situation des droits de la personne en Algérie régresse en raison de l’état d’urgence continuel.  Il déclare notamment que les droits civils et politiques sont gelés depuis 20 ans, que les manifestations et les réunions publiques sont interdites, que la torture est utilisée dans les centres de détention, que le pouvoir judiciaire n’est pas indépendant du pouvoir exécutif et bien que les forces de la sécurité aient rétabli la paix, elles opèrent en toute impunité.

Au cours des échanges avec la délégation, M. Bouchachi signale que la LADDH n’a pas accès au gouvernement et n’a pas de contact avec la CNCPPDH.  Il dit que la LADDH traite les cas de torture et de liberté de religion en rappelant au gouvernement qu’il a la responsabilité d’enquêter.  Il demande également l’abolition de la peine de mort.  Enfin, M. Bouchachi demande au Canada de recommander vivement au gouvernement algérien d’améliorer les droits de la personne et la suprématie du droit, affirmant que sans démocratie, les islamistes vont prendre le pouvoir.

7.    Rencontre avec Mme Zohra Bitat, vice-présidente du Conseil de la Nation

Mme Bitat, vice-présidente du Conseil de la Nation, est accompagnée de membres du Conseil de la Nation : Mme Leila Tayeb, Mme Dalila Halilou, le professeur Ali Berchiche et le professeur Rachid Bougherbal.  Tous ont été nommés par le président.  Les médias sont présents à l’ouverture de la rencontre.

Mme Bitat commence par décrire brièvement le Conseil de la Nation, les raisons de sa création et son rôle.  Les sénateurs algériens parlent également du développement de l’Algérie depuis l’indépendance, des relations entre l’Algérie et le Canada, des enjeux régionaux et du terrorisme.

La discussion qui s’ensuit porte sur la représentation des femmes au Parlement et dans la société, le conflit israélo-palestinien, la situation des immigrants algériens au Canada et le rôle du Parlement dans chacun des pays.

8.    Rencontre avec le professeur Abdennour Laraba, président d’honneur de l’Association Amine et visite de l’Hôpital Maillot

L’Association Amine prend en charge la scolarisation des enfants qui sont à l’Hôpital Maillot et poursuivre leur crédo de faire de l’hôpital un lieu de vie pour l’enfant hospitalisé.  Fondée en 1997, l’Association organise les classes ainsi que les activités pédagogiques et culturelles.  Elle a reçu près de 25 000 $ de l’ACDI. Ces fonds venant du Fonds d’Appui à la Société Civile sont destinés à la formation au personnel soignant pour la gestion des situations de détresse des enfants atteints de maladies chroniques lourdes et/ou graves Cette initiative s’inscrit dans le cadre de l’amélioration des capacités para médicales et humaines du personnel médical et paramédical du service de pédiatrie de l’hôpital Maillot, entreprise depuis plus de 4 années. Elle tend à renforcer le respect des droits de la personne dans une situation de vulnérabilité tel que la maladie, le stress et l’anxiété. Ces situations affectent le psychisme du personnel avec des incidences négatives sur l’accomplissement de leurs tâches. Le service de pédiatrie en partenariat avec l’association AMINE proposent de poursuivre l’initiative en mettant sur pied une palette variée de formations au profit du personnel soignant et encadreurs pour les munir d’outils de gestion et de maîtrise des situations critiques afin de préserver au mieux le bien-être des enfants malades.

L’Hôpital Maillot est un établissement de formation situé dans un ancien palais.  Selon le professeur Laraba, l’hôpital a une approche holistique et cherche à régler à la fois les problèmes de santé et les problèmes sociaux.  Il voit l’hôpital comme une ville, avec des écoles et des installations de loisir.

La délégation visite l’hôpital, les salles communes – où souvent les mamans restent avec leurs enfants – et l’école et l’aire de jeu aménagées par l’Association Amine.  En réponse aux questions portant sur les besoins de l’Algérie en matière de soins de santé, le professeur Laraba mentionne qu’une centaine d’hôpitaux sont en construction en Algérie, ce qui entraîne un besoin accru de professionnels qualifiés.

9.    Rencontre avec M. Abdelkader Messahel, ministre d’État chargé des Affaires maghrébines et africaines

Le ministre Messahel est entré au ministère des Affaires étrangères en 1971.  Il a occupé différents postes diplomatiques avant d’être nommé ministre d’État chargé des Affaires maghrébines et africaines en 2001.

Le ministre Messahel commence par faire un survol de l’histoire des relations de l’Algérie avec le reste de l’Afrique.  Il passe en revue le développement africain, faisant remarquer que l’Algérie a joué un rôle déterminant dans le lancement du Nouveau Partenariat pour le développement de l’Afrique (NPDA) en 1999.  À l’échelle régionale, il signale que l’autoroute transsaharienne, qui va de l’Algérie à Lagos au Nigeria en passant par le Mali, le Niger et le Tchad, donnera accès à l’intérieur du continent et liera ces pays les uns aux autres.  À l’échelle internationale, il souligne l’importance pour les pays donateurs et les pays bénéficiaires de travailler ensemble comme des partenaires.  Il parle du succès du NPDA, constate que la gouvernance en Afrique s’est améliorée et qu’il y a moins de coups d’État et de conflits qu’avant.  En effet, il dit que les défis actuels de l’Afrique sont le changement climatique, la migration interne et le terrorisme.

Dans les échanges avec la délégation, le ministre Messahel parle de la situation au Darfour, disant que les différentes parties de la région ne sont pas encore prêtes à conclure une entente, mais qu’il faut faire confiance aux Africains pour trouver une solution.  Cela implique de garantir l’intégrité du territoire, ainsi que la souveraineté soudanaise, car si les frontières ne sont pas respectées, le pays entier pourrait s’effondrer.  Au sujet des marchés communs, il dit que l’Afrique du Nord accuse un retard par rapport aux autres régions africaines, comme la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC) et la Communauté de l’Afrique orientale (CAO).  Enfin, à propos du changement climatique, il note que même si l’Afrique ne pollue pas autant que le monde développé, elle subit les conséquences du changement climatique, tout en n’ayant pas les ressources pour y faire face.

Le début de la rencontre est couvert par les médias et des entrevues ont lieu après.

10. Rencontre avec M. Bentebet Reguieg, député et président du Comité des affaires étrangères, de la coopération et l’émigration à l’APN

La rencontre avec M. Reguieg est la première des quatre réunions à l’APN.  Il est accompagné de M. Azzedine Abdelmadjid, député, de M. Aissa Khiri, député, et de M. Mohammed Yarfaa, député.  Le début de la rencontre est couvert par les médias.  M. Reguieg commence en donnant un aperçu de l’APN.  Il dit qu’il existe des mécanismes pour superviser le gouvernement, notamment pour faire part des opinions durant l’élaboration des lois et la participation aux ateliers.  Le Comité des affaires étrangères, de la coopération et de l’émigration est chargé de la promotion de la démocratie parlementaire et de l’établissement de relations politiques.  L’APN compte 30 groupes d’amitié avec d’autres pays et cherche présentement à former un groupe d’amitié Algérie-Canada.  M. Yarfaa parle aussi des relations de l’Algérie avec le reste de l’Afrique et de la mise au point d’une infrastructure pour aider au développement.

Au cours des échanges avec la délégation, M. Reguieg parle de la capacité des membres à proposer les lois; 20 membres doivent appuyer le texte proposé.  Il parle aussi de la représentation des femmes à l’APN, qu’il juge insuffisante.

11. Rencontre avec M. Nouari Tayeb, député et président du Comité des finances et du budget à l’APN

M. Tayeb est accompagné de M. Djemaa Rekkas et M. Mouloud Hachemane, tous deux députés.  Il commence par décrire le travail du Comité des finances et du budget.  Il donne ensuite un aperçu de la situation économique et des perspectives de développement de l’Algérie.  Il parle également de la coopération avec le Canada.

En réponse aux questions de la délégation, M. Tayeb explique les projets de développement – comme la construction de nouvelles habitations et de nouvelles routes – et la transition de l’Algérie à une économie de marché.  En ce qui concerne la pénurie de professionnels qualifiés, il dit être conscient des défis et M. Hachemane dit que l’Algérie a besoin de plus de spécialistes.  M. Tayeb parle aussi de la situation des émigrants algériens au Canada, certains dont les compétences n’ont pas été reconnues.  La délégation dit que tous les partis canadiens admettent la nécessité d’améliorer ce point. 

12. Rencontre avec les représentants d’organismes régionaux

La rencontre avec les députés qui représentent également des organismes régionaux est présidée par M. Aissa Khiri, député, membre du Conseil consultatif du Maghreb.  Il est accompagné de 10 députés, dont M. Abdelkader Semmari, député et membre du Parlement arabe intérimaire, et de M. Laroussi Hammi, député et président du Caucus nord-africain au Parlement panafricain.

Le Conseil consultatif du Maghreb fait partie de l’Union du Maghreb Arabe (UMA), fondée en 1989 par l’Algérie, la Libye, la Mauritanie, le Maroc et la Tunisie.  Le Parlement arabe intérimaire a été créé en 2005 par la Ligue des États arabes, une association regroupant 22 pays de langue arabe.  Le Parlement panafricain est un corps législatif de l’Union africaine (UA).  Mis en place en 2004, il a actuellement des pouvoirs de surveillance et de consultation.  Ses 265 représentants sont élus par les assemblées législatives des 53 pays de l’Union africaine.

Au cours des discussions avec la délégation, les députés algériens donnent un aperçu de leurs rôles dans ces trois organismes régionaux.  Ils parlent aussi du rôle des femmes au sein de ces organismes.

13. Rencontre avec M. Abdelaziz Ziari, président de l’Assemblée populaire nationale

Médecin de formation, M. Ziari a été élu à l’APN pour la première fois en 1982.  Il est retourné pratiquer la médecine durant les années 1990 et a ensuite servi de conseiller au président Bouteflika.  Réélu en 2007, il a également été élu président de l’APN.

M. Ziari parle des relations commerciales bilatérales, de l’amélioration des conditions de sécurité en Algérie, de la situation politique à l’approche de l’élection en avril et du rôle des associations de parlementaires et des groupes d’amitié.  Il recommande un renforcement des relations bilatérales et demande à la délégation canadienne d’envisager la création d’un groupe d’amitié Canada-Algérie.  Dans un dialogue avec la délégation, il parle également de l’évolution du rôle de la femme dans la société et des moyens qui pourraient être utilisés pour augmenter la représentation des femmes au Parlement.

TUNISIE

   A.     Questions clés

La Tunisie est une république constitutionnelle de quelque 10 millions d’habitants.  Sa population est un mélange d’Arabes et de Berbères et est à 98 p. 100 musulmane.  Le gouvernement est un régime présidentiel fort dominé par un seul parti politique, le Rassemblement Constitutionnel Démocratique (RCD).  L’opposition est fragmentée entre huit petits partis dont cinq sont représentés au Parlement. Les huit partis de l’opposition officielle sont faibles et divisés.  La société civile est représentée par des groupements de gens d’affaires, des syndicats, des associations professionnelles et caricatives sur lesquelles le gouvernement exerce un contrôle serré.  Il existe un déficit important au niveau des libertés d’association et d’expression.  Par contre, la Tunisie est un chef de file de la promotion du statut légal et social des femmes.  Le gouvernement a assoupli son emprise de l’économie, laquelle est diversifiée, et les secteurs agricole, minier, touristique et manufacturier sont forts.  Bien que les politiques économiques et sociales progressistes aient amélioré les conditions de vie, le chômage demeure un problème sérieux.

La Chambre des députés compte 189 membres, dont 152 sont élus par le système majoritaire fondé sur les listes de parti.  Les électeurs de chaque circonscription choisissent une liste de candidats et tous les sièges des circonscriptions électorales vont à la liste gagnante.  Tous ces sièges sont détenus par le RCD.  Afin d’assurer une représentation diversifiée au Parlement, les 37 autres sièges (ce nombre sera porté à 50 aux élections de 2009) sont attribués proportionnellement aux autres partis qui n’ont pas obtenu une majorité absolue aux élections.  Il y a 43 femmes députées, soit 23 p. 100 du nombre total. Les dernières élections à la Chambre des députés ont eu lieu en 2004.  Le RCD détient 152 des 189 sièges, le Mouvement des démocrates socialistes 14, le Parti de l’unité populaire 11 et il y a quelques petits partis.

Il y a 126 membres à la Chambre des conseillers, la chambre haute du Parlement tunisien.  Celle-ci a été créée en 2003 et les premiers membres ont été choisis en 2005.  Un tiers des membres sont élus indirectement par les conseils municipaux.  Un autre tiers est élu par les syndicats et les associations professionnelles.  Le dernier tiers, nommé par le président, est formé de personnalités bien connues.  Les membres ont un mandat de six ans et la moitié des mandats sont renouvelés tous les trois ans.  Il y a 17 femmes, soit 15 p. 100 des membres.

Le Rassemblement Constitutionnel Démocratique est dirigé par le président Zine El Abidine Ben Ali; il détient la majorité des sièges à la Chambre des députés et à la Chambre des conseillers.  Le RCD gouverne la Tunisie depuis l’indépendance.  Il est régi par le Politburo, un bureau politique de dix membres.

Le Canada et la Tunisie ont de bonnes relations de longue date.  D’abord centrées sur le développement, elles sont maintenant axées sur le commerce, la coopération politique, les investissements dans le secteur privé, l’éducation et les relations culturelles et universitaires,  et l’immigration.  L’ACDI n’a plus de programme bilatéral avec la Tunisie depuis septembre 2008 mais en 2006-2007, elle a déboursé 1,8 million de dollars en aide par l’entremise des programmes multilatéraux et la Tunisie bénéficie d’autre part de l’aide canadienne via les programmes régionaux et multilatéraux de l’ACDI et les projets du CRDI.  Le commerce entre le Canada et la Tunisie représente environ 160 millions de dollars par année.  Il y a quelque 15 000 personnes d’origine tunisienne au Canada.

   B.     Rencontres

Le programme officiel de rencontres de la délégation a été mis en place par les services internationaux de la Chambre des Députés. Par ailleurs, l’ambassade du Canada à Tunis a complété le programme de la visite bilatérale en prévoyant des occasions de rencontres qui ont permis à la délégation de rencontrer chacun des partis politiques et des membres de la société civile. De même, une rencontre a été organisée avec la Banque Africaine de Développement.

1.    Séance de travail avec les membres de la Chambre des députés

La délégation de l’Association parlementaire Canada-Afrique tient une séance de travail à laquelle participent 12 députés de la Chambre des députés.  La séance est présidée par M. Charfeddine Guellouz, président du groupe d’amitié parlementaire Tunisie-Canada. 

M. Guellouz commence par donner un aperçu du Parlement tunisien, des objectifs fondamentaux du gouvernement tunisien ainsi que de sa situation économique et sociale.  Il exprime son espoir de voir les relations entre les parlementaires tunisiens et canadiens et les échanges économiques se développer. 

Avec les membres de la délégation, les députés tunisiens discutent d’agriculture, de questions liées au Moyen-Orient, des moyens que pourrait prendre la Tunisie pour aider le reste de l’Afrique, ainsi que du problème des pénuries d’eau.  Ils demandent l’appui du Canada pour aider la Tunisie à régler ces problèmes.  À cette demande, la délégation canadienne répond que les relations entre le Canada et la Tunisie, autrefois axées sur l’aide au développement, se sont transformées en partenariat économique et commercial.  Dans le but d’encourager ce partenariat, la délégation dit souhaiter voir les obstacles au commerce s’atténuer et les échanges économiques augmenter.

La délégation et les députés tunisiens discutent également du processus politique tunisien et des défis auxquels la Tunisie a eu à faire face depuis l’instauration du pluripartisme en 1989.  Évoquant la tourmente politique qu’a connue l’Algérie, les membres de la Chambre des députés expliquent que la Tunisie ne peut se permettre de sacrifier cinq décennies de progrès durement gagnés.  Les députés discutent des systèmes d’éducation et des soins de santé de la Tunisie, ainsi que du bon niveau de vie au pays.  Ils parlent également des progrès réalisés par les femmes dans la société tunisienne – en particulier, leur présence dans le domaine de la médecine, dans l’appareil judiciaire et l’augmentation de la fréquentation universitaire des femmes, ainsi que du rôle des femmes au parlement.  On souligne que, en Tunisie, la loi accorde un statut particulier aux femmes enceintes détenues en prison et que, après leur accouchement, on les transfère dans un endroit séparé afin qu’elles y élèvent leur enfant.  La discussion porte ensuite sur l’environnement et le changement climatique. 

Pour terminer, la délégation canadienne demande le concours des députés tunisiens pour aider les Canadiens à mieux comprendre l’Islam.

2.    Rencontre avec M. Fouad Mebazaâ, président de la Chambre des députés

Élu pour la première fois en 1964, M. Mebazaâ a mené une longue carrière politique et diplomatique.  Il est président de la Chambre des députés depuis 2004 et est membre du bureau politique du RCD.

Après avoir donné un aperçu du développement en Tunisie, M. Mebazaâ souligne qu’il reste beaucoup à faire.  L’entretien avec la délégation est axé sur l’importance de resserrer les liens, la situation des immigrants tunisiens au Canada, la contribution de l’entreprise privée au chapitre du développement, la nécessité de réduire les obstacles tarifaires et augmenter les échanges économiques et l’importance de résister au protectionnisme pendant la crise financière.

3.    Rencontre avec M. Mohamed Nouri Jouini, ministre du Développement et de la Coopération internationale

M. Mohamed Nouri Jouini est ministre du Développement et de la Coopération internationale depuis 2003.  Il était auparavant conseiller du président.

Le ministre Jouini commence en donnant un aperçu de son ministère et de son rôle dans la planification économique, le développement régional, la coopération économique et financière à l’échelle internationale, la promotion de l’investissement et les statistiques officielles.  Il précise que, étant donné que le commerce extérieur est le moteur de la croissance économique de la Tunisie, il s’inquiète des répercussions du protectionnisme alors que les pays réagissent à la crise financière.  Les échanges commerciaux de la Tunisie, qui se font en grande partie avec l’Europe. Néanmoins, la Tunisie souhaite diversifier son commerce.  Selon le ministre Jouini, les entreprises canadiennes ne participent pas suffisamment à l’économie tunisienne et il exprimé le desire d’augmenter le commerce et le tourisme .

En réponse aux questions posées par la délégation, le ministre Jouini parle du secteur agricole tunisien et du rendement qui, d’après lui, pourrait être amélioré.  Il évoque la crise financière, précisant que l’ampleur de ses répercussions dépendra de sa durée.  Si elle dure un an ou deux, la crise sera moins sévère.  Toutefois, si elle durait plus de deux ans, tous en seraient affligés sérieusement.  Le ministre discute des mesures prises par la Tunisie en réponse à la crise, notamment, la réduction du fardeau fiscal qui pèse sur les firmes locales et étrangères, la réalisation de dépenses d’investissement et la concentration de ses efforts sur les principaux secteurs commerciaux.

À propos du rôle des femmes dans l’économie, le ministre Jouini souligne que, dans le secteur public, les mères de jeunes enfants peuvent travailler à mi-temps tout en recevant les deux tiers de leur salaire.  De plus, si elles restent à la maison pour élever de jeunes enfants, leurs emplois sont assurés.

Il fait également remarquer que la majorité de la population tunisienne fait partie de la classe moyenne, et que les personnes très pauvres ou les personnes très fortunées sont peu nombreuses. Il met l’accent sur l’importance de l’éducation et souligne les mesures prises pour aider les gens à accéder à la propriété.

4.    Rencontre avec M. Abdelwahab Abdallah, ministre des Affaires étrangères

Ancien professeur d’université et éditeur d’un quotidien, M. Abdallah a été nommé ministre en 1984.  Il a occupé les postes de ministre, député, ambassadeur et conseiller principal avant d’être nommé ministre des Affaires étrangères en 2005.  Il est membre du bureau politique du RCD.

Le ministre Abdallah commence par donner un aperçu des relations entre la Tunisie et le Canada.  Il signale que, même si le Canada et la Tunisie ont, de tout temps, d’excellentes relations, il aimerait les voir s’intensifier.  La délégation s’accorde pour dire que les deux pays profiteraient du développement des échanges bilatéraux.  Le ministre Abdallah explique que, en raison de son emplacement géographique stratégique, la Tunisie est un excellent point d’accès à l’Afrique subsaharienne.  Il ajoute qu’il souhaiterait voir s’établir bientôt un lien aérien direct entre la Tunisie et le Canada, précisant que cela favorisera et approfondira les échanges.  En réponse aux questions de la délégation, le ministre Abdallah exprime son point de vue sur le conflit israélo-palestinien.

5.    Rencontre avec le premier ministre Mohamed Ghannouchi

Le premier ministre Ghannouchi est économiste de formation.  En 1992, il devient ministre de la Coopération internationale et de l’Investissement extérieur jusqu’à sa nomination en tant que premier ministre en 1999.  Il est vice-président du RCD et membre du bureau politique.

Le premier ministre Ghannouchi fait remarquer l’intérêt accru que suscite l’Afrique à l’échelle internationale et il dit espérer que cet intérêt aidera au développement du continent.  Il mentionne que, en Afrique du Nord, la situation s’améliore grâce aux politiques favorisant le secteur privé et la convergence en matière de politiques de la part des pays nord-africains.  Il souligne que les échanges entre les pays nord-africains se développent et que la Tunisie a de bonnes relations avec l’Union européenne et d’autres pays africains, comme le Mali, le Niger, le Sénégal et le Tchad.

Le premier ministre Ghannouchi fait remarquer qu’il faudra du temps avant que le marché commun africain se concrétise.  Parce que la question du Sahara constitue un obstacle à une plus grande intégration régionale au Maghreb, les efforts se poursuivent bilatéralement. Pendant ce temps, différentes régions d’Afrique poursuivent également leur efforts visant une meilleure intégration au sein de leurs régions respectives.  Il se dit d’accord sur le fait que le protectionnisme représente un risque sérieux pour l’économie mondiale, car il pourrait engendrer une réaction en chaîne.

Pour ce qui est des relations entre le Canada et la Tunisie, le premier ministre Ghannouchi affirme que celles-ci pourraient se développer davantage.  À son avis, les deux pays pourraient profiter davantage des nombreuses possibilités qui s’offrent à eux, notamment, la présence de quelque 2 000 étudiants tunisiens au Canada, les 17 000 touristes canadiens qui visitent la Tunisie chaque année et l’usage d’une langue commune, le français.  Cependant, le premier ministre fait remarquer le déséquilibre commercial qui caractérise les relations entre les deux pays.  Il ajoute qu’un lien aérien direct entre la Tunisie et le Canada faciliterait les échanges.  La délégation canadienne souligne l’importance des échanges parlementaires pour l’apprentissage mutuel entre leurs deux pays.

La discussion porte ensuite sur le rôle de la Ligue des États arabes.  Il soulève alors le rôle des associations dans la société tunisienne et la nécessité d’un dialogue social. 

6.   Rencontre avec M. Abhallah Kallel, président de la Chambre des conseillers

M. Kallel a occupé plusieurs postes administratifs et ministériels avant d’être élu président de la Chambre des conseillers en 2005.  Il est membre du bureau politique du RCD.  Il est accompagné de neuf membres de la Chambre des conseillers.

M. Kallel commence par donner un aperçu de l’approche de la Tunisie en matière de développement, laquelle repose sur le développement de la main-d’œuvre.  Il indique que la structure du pluripartisme tunisien permet d’éviter les crises et d’assurer la stabilité.  Il passe ensuite en revue les conditions sociales en Tunisie.

Pendant la discussion avec la délégation, M. Kallel précise les investissements intérieurs de la Tunisie et sa gestion économique.  Il parle de la composition de la Chambre des conseillers, ainsi que de l’immunité parlementaire, qui s’étend aux activités hors de la Chambre.  Il décrit également les trois objectifs du plus récent plan quinquennal du gouvernement, à savoir conserver et améliorer le capital déjà développé, poursuivre le progrès social et bâtir l’infrastructure du pays.  Il sollicite l’aide de pays comme le Canada, ce à quoi la délégation répond que les relations du Canada avec la Tunisie prennent désormais la forme d’un partenariat économique et ne sont plus fondées sur l’aide au développement.

En outre, M. Kallel explique le rôle que joue la Chambre des conseillers dans l’examen des projets de loi et la méthode de nomination de ses membres.  La délégation et M. Kallel discutent également de la situation de la femme, de la protection des minorités et de l’image de l’Islam dans le monde.

7.    Rencontre avec M. Mohamed Ghariani, secrétaire général du RCD

M. Ghariani est membre du RCD depuis 1983.  Il a occupé le poste d’ambassadeur et de conseiller du président.  Il a été nommé secrétaire général du RCD en 2008 et est membre du bureau politique du RCD.

M. Ghariani souhaite la bienvenue à la délégation et donne un aperçu de l’histoire du RCD.  Il mentionne que, pendant les années qui ont suivi la déclaration de son indépendance, la Tunisie a dû exercer un leadership fort pour combattre l’analphabétisme, mettre sur pied le système d’éducation et émanciper les femmes.  C’est pourquoi on n’a autorisé qu’un seul parti politique.  Après l’élection de M. Ben Ali comme président, le 7 novembre 1987, le pays a entamé sa marche vers la démocratie.  M. Ghariani ajoute que les partis de l’opposition sont représentés tant à la Chambre des députés qu’à la Chambre des conseillers.  Par ailleurs, le pays compte quelque 10 000 associations. Il mentionne que le terrorisme demeure néanmoins une préoccupation sérieuse.

En ce qui a trait à l’économie, M. Ghariani précise que la Tunisie a connu une croissance économique de l’ordre de 6 p. 100.  La classe moyenne est nombreuse et l’éducation est accessible à tous les Tunisiens.  

En réponse aux questions posées par la délégation, M. Ghariani explique en quoi consiste la relation entre le gouvernement et le RCD.  Il précise que le RCD suit les règles qui régissent les partis politiques et que l’État compte sur le RCD pour mettre en œuvre les programmes.  Il insiste sur le fait que le parti, qui compte quelque 2,3 millions de membres, n’exploite pas les ressources financières de l’État.  Il donne un aperçu de la procédure qui dicte la tenue des réunions du comité central du RCD, une ou deux fois par année, et les congrès généraux, une fois aux cinq ans.

M. Ghariani parle ensuite de politiques économiques, des sièges à la Chambre des députés réservés aux partis de l’opposition, de l’organisation des élections et du contrôle des médias.  Sur ce dernier point, il signale que les médias n’ont par exemple pas le droit de diffuser des incitations au terrorisme ou à la violence et il s’inquiète de la désinformation et des écrits diffamatoires véhiculés par certains médias. En réponse à une question sur le temps d’antenne médiatique, le secrétaire général du RCD explique que de façon générale, le temps d’antenne est bien défini. Cependant, pendant une campagne électorale, ils procèdent à un tirage au sort pour le déterminer. Il souligne que les médias évoluent progressivement en Tunisie.

8.    Rencontre avec Mme Sarra Kanoun Jarraya, ministre des Affaires de la femme, de la famille, de l’enfance et des personnes âgées

Mme Sarra Kanoun Jarraya a travaillé dans le domaine de la santé publique avant d’être nommée secrétaire d’État en 2004, et ministre des Affaires de la femme, de la famille, de l’enfance et des personnes âgées, en 2007.

Mme Jarraya donne un aperçu de son ministère, lequel a des liens horizontaux avec les autres ministères, et des partenariats avec les groupes de la société civile.  Elle souligne que son ministère est chargé de plusieurs secteurs de la société.  Elle explique ensuite les mesures en place pour favoriser l’équilibre travail-famille, ainsi que les types de services de garde à l’enfance offerts aux familles et le soutien aux personnes âgées.  Elle parle également de la stratégie nationale de lutte contre la violence, qui repose sur la sensibilisation à ce problème.  La discussion porte également sur les possibilités de collaboration entre le Canada et la Tunisie pour améliorer la situation de la femme.

9.    Rencontre avec les représentants de la Banque africaine de développement

La Banque africaine de développement (BAfD) est une banque de développement multilatérale régionale.  Cinquante-trois pays africains et 24 pays non africains en sont membres.  Sa mission consiste à promouvoir le développement social et économique au moyen de prêts, d’investissements dans le capital-actions et d’assistance technique.  Son siège social se situe temporairement à Tunis. 

Le Canada a intégré le Fonds africain de développement (FAD) – une filiale de la BAfD – en 1973 et la Banque africaine de développement (BAfD) en 1982.  Pour la période 2005 à 2015, le gouvernement du Canada s’est engagé à verser l’équivalent de 172 millions de dollars américains dans le cadre du Fonds en fiducie pour les pays pauvres très endettés.  En outre, en 2008, le Canada s’est engagé à consacrer 302 millions de dollars canadiens afin de réapprovisionner le FAD([1]).

M. Modibo Toure, directeur de Cabinet du président de la BAfD, souhaite la bienvenue à la délégation.  Il dit que la visite de la délégation survient à un moment important pour la BAfD.  En 2006, plusieurs réformes institutionnelles ont été mises en place dans le but d’améliorer la consultation avec les clients.  Dans le contexte de la crise financière mondiale, la BAFD révise ses approches et procède en ce moment à une série de consultations.

M. Louis Kasekende, économiste en chef de la BAfD, donne ensuite un aperçu de la stratégie à moyen terme de la BAfD et de sa réaction à la crise financière.  Il explique que les défis auxquels font face les pays africains découlent, notamment, de l’insuffisance de l’infrastructure, de la faiblesse des institutions gouvernementales, de l’intégration régionale limitée, de la présence d’États fragiles et de l’augmentation de la concurrence.  Par contre, les forces de la BAfD résident dans sa structure, la confiance de ses partenaires, le rôle croissant du secteur privé et l’amélioration de ses processus et de son rayonnement.  La BAfD se concentre sur l’infrastructure, la gouvernance, le secteur privé et l’amélioration de l’éducation, tout en tenant compte des questions à facettes multiples que sont la problématique homme-femme, l’environnement, le changement climatique et la gestion du savoir.  M. Kasekende passe ensuite en revue les répercussions de la crise financière et la réponse de la BAfD à la crise, qui se traduira par l’augmentation des prêts. 

Au cours de la discussion avec la délégation, M. Kasekende parle du fonds en fiducie canadien qui soutient les efforts de la BAfD pour réaliser une analyse comparative entre les sexes.  Il donne des détails sur la façon dont la BAfD investit son argent, dont l’intérêt sert à assumer ses frais administratifs.  La discussion porte ensuite sur la menace du protectionnisme, l’intégration du commerce et l’évaluation des risques.

La délégation écoute la présentation de M. Timothy Turner, directeur du département du secteur privé.  M. Turner, un Canadien, souligne tout d’abord que, grâce aux gouvernements canadiens qui n’ont pas cédé à la pression de déréglementer le secteur des services financiers, le système bancaire canadien est l’un des plus forts dans le monde.  Il poursuit en décrivant la stratégie de la BAfD relative au secteur privé, qu’il fonde sur l’idée que le secteur privé peut faire de l’argent et, en même temps, produire des résultats dans le domaine du développement.  Il parle également du processus d’évaluation des projets, puis de la crise financière et du rôle contracyclique joué par la BAfD, qui devra tôt ou tard reconstituer son capital.  Il demande au Canada d’appuyer le Fonds d’aide au secteur privé africain.  En réponse aux questions de la délégation, M. Turner parle des évaluations environnementales, de la situation du crédit et de la durabilité de l’environnement.

10. Rencontre avec M. Moncer Rouissi, Comité Supérieur des Droits de l’Homme et des Libertés Fondamentales

Créé en 1991, le Comité Supérieur des Droits de l’Homme et des Libertés Fondamentales est un organisme consultatif qui relève du président.

M. Rouissi donne un aperçu du comité.  Le président nomme 15 des 30 membres du comité.  Chacune des deux chambres du Parlement est représentée au comité, lequel compte, en outre, des membres de diverses associations, comme les syndicats.  Le comité établit lui-même son programme et peut se présenter à l’improviste dans les prisons.  Il a également des contacts avec des organisations de défense des droits de la personne d’autres pays.

Pendant la discussion avec la délégation, M. Rouissi parle de la situation de la liberté de religion, de la situation de la femme, de la loi successorale, de l’avortement, de l’interdiction de la polygamie et des enquêtes sur des allégations de torture.  Il ajoute que le comité n’est pas habilité à porter des cas devant les tribunaux, pas plus qu’il n’a de lien avec le Parlement.  Le comité présente ses recommandations au Président. 

11. Autres rencontres

La délégation a eu l’occasion de rencontrer des représentants de tous les partis politiques soit à l’occasion du dîner à la résidence du Canada ou encore lors de rendez-vous séparés. Elle a aussi pu rencontrer des représentants du monde associatif et journalistique. Ces rencontres ont permis à la délégation de connaître les difficultés d’opération en Tunisie de certains partis politiques et acteurs de la société civile dont les approches ou les opinions diffèrent de celles des autorités en place. Bien que le gouvernement tunisien n’ait pas recours à des méthodes d’intimidation physiques envers les opposants, il n’en reste pas moins que les autorités utilisent plusieurs types de moyens de pression allant de la privation de publicité officielle dans certains medias, au gel de fonds, à l’incapacité de louer des locaux pour des réunions. De même, il appert que la Tunisie s’est dotée d’institutions de type démocratique sans avoir encore pris les mesures nécessaires pour que la vie démocratique se développpe pleinement au quotidien dans les institutions et la société tunisienne.  

INFORMATION SUPPLÉMENTAIRE

La délégation assiste à des séances d’information présentées par des fonctionnaires canadiens du ministère des Affaires étrangères et du Commerce international (MAECI) et l’ACDI.

En Algérie, l’ambassadeur du Canada convie les gens d’affaires à un déjeuner et les journalistes algériens à un cocktail dînatoire.  La délégation assiste également à deux déjeuners offert par leConseil de la Nation et par l’Assemblée populaire nationale.  

En Tunisie, l’ambassadeur du Canada organise une réception pour les représentants des différents partis politiques, les gens d’affaires et les membres du corps diplomatique.  La délégation participe également à un déjeuner offert par la Chambre des députés et à un dîner offert par les membres de l’Association d’amitié Canada-Tunisie, laquelle est composée de gens d’affaires. 

CONCLUSION

Grâce à sa visite en Algérie et en Tunisie, la délégation comprend davantage le développement politique et économique des deux pays et les défis auxquels ils font face.  Autant en Algérie qu’en Tunisie, la délégation a participé à des rencontres de haut niveau.  En Algérie, la délégation a rencontré de hauts fonctionnaires du parti au pouvoir, le président de l’APN et le vice-président du Conseil de la Nation.  En Tunisie, les membres de la délégation ont rencontré cinq des 10 membres du bureau politique du parti au pouvoir, y compris le premier ministre, les présidents des deux chambres du Parlement, ainsi que des ministres de premier plan.

En ce qui a trait aux rencontres avec les autres partis, la délégation a pu rencontrer librement deux partis en Algérie – un parti du gouvernement de coalition et un parti de l’opposition.  En Tunisie, elle a pu rencontré les représentants des autres partis représentés au Parlement et un seul parti non représenté au Parlement. En Tunisie, elle a pu rencontré des représentants de tous les partis tant ceux représentés au Parlement que ceux qui n’y sont pas.

Pour ce qui est des relations avec le Canada, les homologues de la délégation algérienne ont souligné les points communs que partagent le Canada et l’Algérie, y compris leur superficie et l’usage du français.  Ils ont également fait remarquer la qualité de leurs relations et le fait qu’elles ne sont pas fondées sur un passé colonialiste.  Ils ont dit souhaiter que les relations bilatérales se développent.  Ils ont également mentionné la présence de nombreux Algériens au Canada. 

Les homologues de la délégation tunisienne ont eux aussi dit souhaiter un renforcement des relations bilatérales.  Ils ont demandé l’assistance du Canada dans un certain nombre de domaines et une participation accrue des entreprises canadiennes à l’économie tunisienne.  La délégation a toutefois souligné que les relations bilatérales sont désormais fondées sur un partenariat économique, et non plus sur l’aide au développement.  Dans ce contexte, elle a encouragé la Tunisie à réduire ses tarifs et à offrir au Canada les mêmes avantages tarifaires que l’Europe.

En ce qui touche les relations interparlementaires, les parlementaires algériens et tunisiens ont dit souhaiter que les liens s’étendent davantage.  Les parlementaires algériens, en particulier, ont demandé que soit créé un groupe d’amitié parlementaire Canada-Algérie.

La délégation a remarqué l’importante présence des forces chargées de la sécurité en Algérie.  Elle était escortée par des policiers à motocyclette pendant tous ses déplacements et elle a noté de nombreux barrages routiers et la présence de policiers partout dans la ville d’Alger.  La présence des forces chargées de la sécurité était moins perceptible en Tunisie.

Durant les rencontres en Algérie et en Tunisie, on a discuté de la situation des immigrants originaires de l’Afrique du Nord au Canada.  Plus précisément, la délégation a appris que plusieurs immigrants algériens se plaignent d’être incapables d’exercer leur profession au Canada.  Elle a également constaté que des plaintes similaires sont peu nombreuses de la part des Tunisiens vivant au Canada.

La question des vols directs à destination du Canada a été mentionnée fréquemment.  Les Algériens ont exprimé leur reconnaissance quant à l’introduction, depuis juin 2007, de deux vols hebdomadaires entre Montréal et Alger.  Les Tunisiens attendent avec impatience l’établissement des vols directs à destination du Canada prévu d’ici quelques années.

En ce qui concerne l’intégration régionale en Afrique du Nord, la délégation a appris que, à cause de la question du Sahara qui est toujours en suspens, les efforts d’intégration se poursuivent principalement sur une base bilatérale et via le monde des affaires.  Elle a en outre été mise au fait des projets d’infrastructure, comme la construction de l’autoroute transsaharienne, qui devraient améliorer l’intégration régionale.

La situation de la femme a pris beaucoup de place dans les discussions autant en Algérie qu’en Tunisie.  La délégation a voulu connaître les mesures prises pour accroître la représentation des femmes au Parlement, ainsi que la situation générale des femmes.  Elle a été mise au courant des mesures prises en Algérie pour accroître la présence des femmes.  En Tunisie, la délégation a félicité les progrès accomplis dans le pays, notamment en ce qui concerne la rémunération égale pour les hommes et les femmes et ses programmes destinés aux mères d’enfants en bas âge.  Elle a été impressionnée en constatant que la Tunisie a adopté une loi donnant un statut spécial aux femmes enceintes détenues en prison qui, après avoir accouché, sont transférées dans un endroit séparé pour élever leur enfant. 

La situation économique mondiale a également pris beaucoup de place dans les discussions.  Tous s’accordaient pour dire que le protectionnisme doit être évité.  La délégation canadienne a dit souhaiter que les tarifs soient abaissés.  On a également discuté des défis posés par la création d’emploi pour les nombreux jeunes Algériens et Tunisiens et de la situation de l’immigration illégale.

En Algérie, les médias semblent relativement libres.  Ils étaient présents pendant les rencontres avec les parlementaires et la délégation a pu rencontrer un certain nombre de journalistes qui exercent leur profession, y compris ceux qui représentent les services de nouvelles internationales.  La visite de la délégation a été couverte dans différents journaux algériens.  En revanche, en Tunisie, les médias faisaient l’objet d’une surveillance étroite.  La délégation a dit s’inquiéter de l’absence de liberté de la presse dans ce pays et des restrictions imposées aux journalistes.

REMERCIEMENTS

La délégation tient à remercier l’ambassadeur Patrick Parisot et le personnel de l’ambassade du Canada à Alger, en particulier M. Lajos Àrendàs, Mme  Nawal Lebah, M. Nicolas Ouerdane et M. Sébastien Moffett, grâce à qui la visite a été un succès.

Elle tient à remercier également l’ambassadeur Bruno Picard et le personnel de l’ambassade du Canada à Tunis, tout particulièrement M. Ridha Blel, pour leur aide dans l’organisation et le déroulement du volet tunisien de la visite.

 

Respectueusement soumis,

 

L’hon. Raynell Andreychuk, sénatrice
Coprésidente
Canada-Africa Parliamentary Association

L’hon. Mauril Bélanger, C.P. député
Coprésident
Canada-Africa Parliamentary Association

 



([1])     Groupe de la Banque africaine de développement, Canada and AfDB Group Launch New Technical Cooperation Fund to Finance Development Projects in Africa, communiqué, 15 avril 2008 (http://www.afdb.org/en/news-events/article/canada-and-afdb-group-launch-new-technical-cooperation-fund-to-finance-development-projects-in-africa-1557/).

Haut de page