Réunion de la Sous-commission sur l’avenir de la sécurité et des
capacités de défense (DSC)
Une délégation de la Sous-commission de
l’Assemblée parlementaire OTAN sur l’avenir de la sécurité et des capacités de
défense s’est rendue à Kyiv le 12 octobre 2009, soit quelques jours à peine
avant le lancement de la campagne organisée en vue d’un scrutin présidentiel
décisif pour l’Ukraine.
La principale conclusion tirée par la
délégation à l’issue de cette visite aura été que la politique intérieure continue
de compliquer considérablement la mise en œuvre de politiques étrangère et de
sécurité cohérentes ainsi que la poursuite des processus de réforme. On peut
toutefois s’attendre jusqu’à un certain point à un renforcement de la stabilité
ainsi qu’à la réalisation de nouveaux progrès une fois le processus électoral
arrivé à son terme.
Emmenée par Sverre Myrli (Norvège),
rapporteur de la Sous-commission, la délégation se composait de parlementaires
venus de huit pays membres de l’OTAN. Elle s’était donné pour objectif de mieux
comprendre les préoccupations de l’Ukraine en matière de sécurité au travers de
rencontres avec des membres du parlement ukrainien et des responsables du
pouvoir exécutif.
La délégation a également visité le
centre d’essais du constructeur aéronautique Antonov. Les aéronefs de transport
Antonov sont largement utilisés par les pays de l’OTAN aux fins du transport
stratégique à l’appui des opérations, notamment dans le cadre de la mission en
Afghanistan.
LE SCRUTIN PRESIDENTIEL
D’après Andrei Shkil, chef de la
délégation ukrainienne auprès de l’AP-OTAN, les grandes orientations
géopolitiques de l’Ukraine ne constituent pas un enjeu dans le cadre de ce
scrutin et ce, même si des pressions s’exercent depuis l’étranger en faveur
d’une modification de la ligne actuelle.
L’électorat se sent avant tout concerné
par la crise économique et les questions en rapport avec le maintien de
l’ordre. Les parlementaires rencontrés ont d’ailleurs indiqué que les électeurs
ne leur avaient posé, au fil des ans, aucune question sur l’OTAN ; en
fait, ceux-ci sont plus intéressés par des problématiques comme le salaire
minimum, le statut officiel de la langue russe, la politique énergétique et
l’enseignement. Quant aux candidats, s’ils ont un quelconque désaccord au sujet
de l’OTAN, celui-ci concernerait plutôt l’opportunité d’organiser ou non un
référendum.
M. Shkil prévoit que la présidence de
l’Ukraine reviendra à Ioulia Timochenko, après quoi la situation de l’Ukraine
se stabilisera et le pays sera mieux armé pour réaliser des avancées concrètes
en matière de politique étrangère en général, et de coopération avec l’OTAN en
particulier. Quel que soit le vainqueur du scrutin présidentiel, on ne
reviendra pas sur les grandes orientations stratégiques de la politique
étrangère ukrainienne, ont déclaré plusieurs intervenants.
LES RETOMBEES DE LA CRISE POLITIQUE
ET ECONOMIQUE INTERIEURE SUR LA SECURITE
On espère que les élections permettront
de sortir de l’impasse politique qui, au plan intérieur, oppose le président au
Premier ministre et paralyse dans une large mesure le pays. Ainsi, les postes
de ministre des Affaires étrangères et de ministre de la Défense sont vacants
depuis plus de six mois. Cette situation a particulièrement de quoi inquiéter
dans le second cas, étant donné que le chef d’État-major des forces armées a
démissionné et qu’il importe de retrouver une situation stable. De l’avis des
parlementaires ukrainiens, ces vacances seraient une conséquence de
l’affrontement politique qui débouche aujourd’hui sur la tenue d’un scrutin
présidentiel.
Ostap Semerak, membre de la commission
budgétaire du Verkhovna Rada, a expliqué que la situation budgétaire des forces
armées ukrainiennes était relativement complexe et n’avait fait qu’empirer dans
le sillage de crise financière, qui entraîné une chute spectaculaire du PIB
ukrainien. Alors que le système budgétaire national fait actuellement l’objet
d’une vaste réforme prévoyant notamment le transfert de nouvelles compétences
aux autorités locales, le président a opposé un veto à un texte de loi
parlementaire sur la décentralisation. De même, il n’a pas été possible, en
raison de la situation politique, de faire adopter le budget de l’État, et avec
lui les crédits destinés aux forces armées. M. Semerak a indiqué que moins de
1% du PIB serait consacré aux forces armées 2009-2010, ce qui constitue un
chiffre bien faible en regard des normes OTAN. La majeure partie de ces
dépenses sont affectées au maintien des effectifs.
Ces problèmes financiers ont fait
ressentir leurs effets sur les forces armées de diverses manières. Tout
d’abord, ils ont entraîné un allégement significatif du programme
d’entraînement au combat. Les forces armées se sont aussi retrouvées dans
l’impossibilité de participer à des exercices multinationaux parce que le
Verkhovna Rada n’avait pu adopter la législation nécessaire. Du coup, la
plupart des crédits qui auraient pu être utilisés dans ce contexte ont été
perdus. D’après les membres du Rada, cette situation est la conséquence des
dysfonctionnements qu’a connus le parlement durant la crise politique et à
l’approche des élections ; aux dires de Victor Korendovitch, qui dirige le
département Politique militaire et planification stratégique du ministère de la
Défense, ces problèmes ont obligé le secteur de la défense à identifier
certains de ses biens susceptibles d’être mis en vente de manière à pouvoir
financer son budget.
LES REFORME DANS LE DOMAINE DE LA
DEFENSE
Durant son exposé sur le processus de
réforme du secteur ukrainien de la défense, Victor Korendovitch (ministère de
la Défense) a expliqué que les forces armées ukrainiennes s’employaient à
atteindre une interopérabilité pleine et entière avec la Force de réaction de
l’OTAN. L’Ukraine devrait en effet être le premier pays partenaire de l’OTAN à
participer à cette dernière.
Alors que les plans prévoyaient que les
forces armées passeraient de 245 000 à 143 000 hommes entre 2005 et 2011,
les effectifs ukrainiens se sont finalement stabilisés à 200 000 hommes
environ, un chiffre jugé prudent compte tenu de l’importance prise par la
défense territoriale depuis la guerre d’août 2008 en Géorgie.
Selon Mikola Tomenko, vice-président du
Verkhovna Rada et co-président du Conseil interparlementaire Ukraine-OTAN, les
forces armées s’acheminent, entre autres réformes, vers une
professionnalisation complète. La seule question qui divise les principaux
groupes politiques est celle du rythme auquel devrait s’opérer cette
transformation. C’est ainsi que le premier ministre a suggéré une
professionnalisation rapide, à laquelle s’est opposé le président qui la juge
impossible et propose que soient votées des lois sur un renforcement des
effectifs.
L’UKRAINE, L’OTAN ET LA SECURITE
REGIONALE
Igor Argouchinski, chef du département
Sécurité internationale au sein du Conseil national ukrainien de sécurité et de
défense, a longuement évoqué le rôle de la Russie dans le domaine de la
sécurité régionale. Selon lui, l’élite politique russe cherche encore et
toujours à renforcer son influence en Ukraine
et a pris du poil de la bête depuis le
« succès » du conflit intervenu en Géorgie. L’influence de la Russie
en Ukraine – et la position de Moscou selon laquelle ce pays fait partie de sa
sphère d’influence – seraient plus que jamais renforcées si l’OTAN devait admettre
qu’on se trouve devant un contentieux bilatéral ne concernant en rien
l’Alliance. Il a suggéré que le dialogue OTAN-Russie mette encore et toujours
l’accent sur le principe d’inviolabilité de l’intégrité territoriale des États
et consacre le caractère inévitable d’une adhésion de l’Ukraine à l’OTAN.
L’Ukraine met actuellement en œuvre son
premier programme national annuel avec l’OTAN. Ses perspectives d’adhérer à
l’Alliance à moyen terme sont bonnes, a déclaré M. Argouchinski, qui a
encore ajouté que l’Ukraine satisfait d’ores et déjà à l’essentiel des normes
et critères pour le lancement d’un Plan d’action pour l’adhésion (MAP), sans
oublier sa contribution aux opérations de l’OTAN. En fin de compte, a-t-il
déclaré, l’adhésion de l’Ukraine sera soumise à une décision purement politique
dans le chef des États membres de l’OTAN. Les responsables ukrainiens ont
demandé à pouvoir faire entendre leur voix dans le débat en cours sur le
nouveau concept stratégique de l’OTAN. M. Argouchinski a fait l’éloge du
Bureau de liaison de l’OTAN en Ukraine, affirmant qu’il avait contribué de
manière exceptionnelle à mieux faire connaître l’Organisation dans son pays.
CENTRE D’ESSAIS DU CONSTRUCTEUR
AERONAUTIQUE ANTONOV
La délégation a pu visiter le Centre
d’essais de la firme aéronautique Antonov, dans la banlieue de Kyiv. M. Marcin
Koziel, directeur du Bureau de liaison de l’OTAN à Kyiv, a présenté un exposé
sur les arrangements techniques en vertu desquels l’OTAN peut louer des
appareils Antonov à l’appui de diverses missions, et sur les contributions que
l’Ukraine apporte aux opérations de l’OTAN en vertu de ces mêmes dispositions.
Alexander Kiva, directeur adjoint du Centre, a présenté aux membres un exposé
sur la gamme des appareils Antonov et leur utilisation de par le monde. La
compagnie, a-t-il déclaré, produit des aéronefs de transport fiables et
robustes aptes à opérer dans des conditions extrêmement difficiles et à
transporter des charges plus importantes que leurs concurrents. La
délégation a noté que même au plus profond de la crise, la firme Antonov avait
continué à bénéficier d’un soutien sans réserve du gouvernement.
Le 72e séminaire Rose-Roth
RESUME
Le 72ème
séminaire Rose-Roth, qui s’est tenu à Lviv, en Ukraine, du 13 au 15 octobre, a
montré que les pays membres de l’OTAN et leurs partenaires ukrainien et
géorgien tentent de réaliser un équilibre entre deux principes contradictoires
: édifier une relation de coopération avec la Russie et protéger le droit
d’États souverains à choisir leur propre voie en matière de politique
étrangère. Les travaux étaient principalement axés sur l’Ukraine, mais des
sessions ont également été consacrées à la Géorgie, au Moldova, au Bélarus et à
la sécurité énergétique.
Il est apparu que beaucoup d’États de
l’ex-Union soviétique ont le sentiment d’être soumis à une pression croissante
de la part de la Russie. Les Ukrainiens ont souligné les déclarations
présomptueuses de Moscou visant à remettre en cause l’indépendance du pays, la
pratique préoccupante des russes qui consiste à délivrer des passeports aux
Russes de souche dans la région de la Crimée, et l’utilisation des
approvisionnements énergétiques comme moyen d’influer sur la politique
ukrainienne. Les Moldoves ont évoqué la persistance de la présence de forces
russes dans la région de la Transnistrie, qui soutiennent un régime non reconnu
au plan international sur leur territoire national. Les Géorgiens ont souligné
les efforts continus de la Russie pour faire de l’Abkhazie et de l’Ossétie du
Sud, qui sont reconnues comme parties du territoire souverain de la Géorgie,
des États distincts. Dans tous les cas, l’ambition de la Russie est de
maintenir à ses frontières des États faibles sur lesquels elle puisse exercer
une grande influence, notamment en termes de politique étrangère. L’objectif
principal de Moscou est d’empêcher ces États d’adhérer aux structures
euro-atlantiques, raison pour laquelle les deux pays qui aspirent à devenir
membres de l’OTAN – la Géorgie et l’Ukraine - subissent le plus gros de cette
pression.
Les participants se sont accordés sur la
nécessité d’établir de meilleures relations avec la Russie sur la base de leurs
intérêts mutuels. La préoccupation qui en découle est toutefois que, tels
qu’ils sont perçus, les intérêts stratégiques de la Russie font de sorte qu’il
est difficile d’y parvenir sans sacrifier des intérêts stratégiques essentiels
de l’Ukraine, de la Géorgie et d’autres États de la région. Comme l’a établi
Boris Tarasiuk, président de la Commission de la Verkhovna Rada sur
l’intégration européenne et fondateur et directeur de l’Institut de coopération
euro-atlantique, « oui, nous devrions instaurer une coopération avec la Russie,
mais à quel prix ? »
La session dédiée à l’Ukraine a montré que
ce pays réalise des progrès substantiels pour se conformer aux normes de l’OTAN
et atteindre les objectifs fixés dans son plan annuel. Il faut toutefois qu’un
consensus national se dégage concernant l’adhésion à l’OTAN, ce qui n’est
toujours pas le cas. Comme l’a relevé Simon Lunn, du Centre de Genève pour le
contrôle démocratique des forces armées, « c’est tout le pays qui adhère à
l’OTAN, pas seulement l’armée. » Même s’il existe un consensus entre les grands
partis politiques au sujet d’une appartenance à l’OTAN à terme, cela ne s’est
pas encore traduit par un vaste soutien populaire. Andreï Shkil, chef de la
délégation de l’Ukraine auprès de l’Assemblée parlementaire de l’OTAN, a
cependant souligné que le soutien de la population s’est accru et que, par
ailleurs, de nombreux membres actuels de l’Alliance avaient connu des
difficultés analogues en matière de sensibilisation de leur opinion publique
alors qu’ils étaient en route vers l’adhésion. Les réunions consacrées au
Moldova et au Bélarus ont montré que la pression exercée par la Russie sur ses
voisions ne se limite pas aux pays qui cherchent à devenir membres de l’OTAN.
Le Bélarus et, jusqu’à récemment, le Moldova, se sont tous deux montrés coopératifs
envers Moscou. Pourtant, a indiqué Vlad Lupan, expert indépendant, cela pas
empêché la Russie de mener des actions dans la région séparatiste de la
Transnistrie, ce qui, ironiquement, a poussé le Moldova à adopter un
comportement de plus en plus pro-occidental. Le Bélarus est également en train
d’adapter ses politiques en vue de s’engager auprès de l’Union européenne.
Ces deux cas montrent peut-être que l’attitude de Moscou à l’égard de ses
voisins pourrait en fait rapprocher ces derniers des institutions occidentales.
La sécurité énergétique et le rôle qu’elle
joue dans la région ont été au cœur de nombreux débats entre les participants.
Comme l’a relevé Ferdinand Pavel, du German Institute for Economic Research,
l’UE importe 35% de son gaz et 45%
de son pétrole de Russie, dont une grande
partie par le biais de pipelines qui traversent l’Ukraine. Cela confère à la
Russie un moyen de pression considérable, auquel elle recourt à des fins
politiques et économiques. Plusieurs participants ukrainiens ont noté, par
exemple, qu’une grande partie de la capacité de raffinage de pétrole de leur
pays a été achetée par des investisseurs russes, qui la laissent en sommeil.
Même si cela ne semble pas avoir de sens sur le plan économique, les avantages
politiques sont évidents en ce sens que l’Ukraine est maintenue sous la coupe
de la Russie.
La session finale du séminaire portait sur
la Géorgie. Giorgi Baramidze, vice-premier ministre géorgien, a évoqué
l’attitude de « patience stratégique » adoptée par son pays vis-à-vis de la
Russie depuis la guerre de 2008. Il s’est félicité du rapport de la Commission
européenne sur les événements qui ont conduit à cette guerre et a souligné que
la Géorgie est plus déterminée que jamais à mener à bien les réformes nécessaires
pour intégrer l’Union européenne et l’OTAN. Selon Ghia Nodia, directeur de
l’Institut du Caucase pour la paix, la démocratie et le développement, le pays
réalise des progrès tant au niveau politique qu’au niveau économique.
Économiquement, la Géorgie se comporte relativement bien dans le contexte de
récession mondiale, et elle maintiendra son approche libérale vis-à-vis des
investissements étrangers. Le pays traverse cependant toujours une phase de
maturation politique. Le gouvernement a appris à mieux travailler avec
l’opposition, mais le véritable test de démocratie de la Géorgie se fera
lorsque se produira le premier transfert de pouvoir constitutionnel. Un point
est ressorti clairement du débat : le gouvernement géorgien et l’opinion
publique sont plus déterminés à intégrer l’OTAN et l’UE aujourd’hui qu’avant la
guerre de 2008.
INTRODUCTION
Le 72e séminaire Rose-Roth
s’est tenu à Lviv, en Ukraine, du 13 au 15 octobre ;
il a rassemblé trente-quatre parlementaires de dix-neuf pays pour trois jours
d’intenses discussions sur l’Ukraine, accompagnées de sessions consacrées à la
Géorgie, à la Moldova, au Bélarus et à la sécurité énergétique. Organisé
conjointement avec la Rada suprême d’Ukraine, le séminaire a réuni des
délégations des pays membres de l’OTAN, du Kirghizistan, du Tadjikistan, de
l’Assemblée du Kosovo, de la Moldova et de la Géorgie, ainsi que des
représentants d’instituts de recherche, d’organisations non gouvernementales et
de l’OTAN.
L’idée essentielle qui est ressortie des
débats est que les pays de l’OTAN et leurs partenaires en Ukraine et en Géorgie
s’emploient à mettre en équilibre deux principes antagoniques : bâtir des
relations de coopération avec la Russie et protéger le droit des Etats
souverains à définir librement leur politique étrangère.
L’UKRAINE ET L’OTAN
Le point de vue de l’Ukraine
L’intégration euro-atlantique de l’Ukraine
demeure l’une des grandes priorités de la diplomatie ukrainienne, selon le
directeur de la direction OTAN du ministère des Affaires étrangères, Mykhailo
Osnach. Donnant le ton des débats dans une allocution liminaire, ce dernier a
indiqué que l’euphorie des premières années de l’indépendance était retombée et
que les autorités avaient pris conscience de
l’existence de problèmes et de menaces
nouveaux. Elles ont renoncé aux armes nucléaires mais conservé les immenses
forces héritées de l’URSS. Leur rapprochement de l’OTAN s’est traduit par la
modernisation des forces en question, la réforme du secteur de la sécurité, la
poursuite de la démocratisation et la construction d’une société civile
effective et d’une économie de marché moderne. Les progrès accomplis à cet
égard sont largement reconnus.
Faisant le point sur les relations
officielles avec l’OTAN, M. Osnach a appelé l’attention sur le
franchissement d’une étape importante, l’an dernier, lorsqu’au niveau politique
l’OTAN a déclaré pour la première fois qu’elle souhaitait voir l’Ukraine la
rejoindre. En décembre 2008, le pays a été invité à souscrire à un
programme national annuel (PNA) avec l’OTAN, programme qu’il a entériné en
août. Le PNA de 2010 est en cours d’élaboration ; il comprend des
chapitres consacrés à la sécurité, à l’économie, à l’appareil judiciaire, à
l’ordre public et à d’autres secteurs encore. Les normes à respecter sont essentiellement
non militaires, d’après M. Osnach, et les réformes à entreprendre pour y
satisfaire devraient continuer en dépit des difficultés dues à la crise
économique.
La coopération que l’Ukraine entretient
avec l’OTAN consiste notamment en contributions aux opérations, avec l’envoi de
forces de maintien de la paix et de moyens de transport aérien stratégique. Il
a également été décidé d’incorporer des troupes ukrainiennes dans la Force de
réaction de l’OTAN. L’Ukraine souhaite aussi coopérer dans des domaines aussi
divers que la cyber guerre et la piraterie, deux dangers de nature nouvelle, ou
encore, le projet d’hélicoptère franco-britannique. M. Osnach a proposé de
dynamiser les formes plus classiques de la coopération, telles que les
exercices conjoints, la réinsertion des anciens militaires ou l’élimination des
armes et munitions tombées en désuétude. Il a demandé à l’OTAN d’inviter
l’Ukraine à jouer un rôle plus actif dans le processus de transformation de
l’Alliance, plus spécifiquement dans le contexte du débat sur le nouveau
concept stratégique de l’OTAN.
M. Osnach a souligné en outre que le
Plan d’action pour l’adhésion (MAP) demeurait le seul moyen officiel de
préparation des candidats. Aussi la prochaine étape à franchir pour l’Ukraine
reste-t-elle l’adoption d’un MAP, même s’il se peut, à un stade ultérieur, que
le PNA soit considéré comme une préparation suffisante à l’adhésion.
M. Osnach a estimé que l’instauration
d’un partenariat entre l’OTAN et la Russie ne pouvait que profiter à l’Ukraine
et que les aspirations euro-atlantiques de Kyiv ne menaçaient aucun pays tiers,
Fédération de Russie comprise. Au contraire, l’adhésion de l’Ukraine à l’OTAN
servirait les intérêts russes puisqu’elle garantirait la stabilité de l’Ukraine
et l’association d’un pays allié de plus à une étroite coopération avec Moscou.
Evoquant l’image de l’OTAN dans la
population ukrainienne, M. Osnach a affirmé qu’une fois les élites
politiques parvenues à un consensus sur l’adhésion l’opinion publique
suivraient, comme cela a été le cas dans d’autres pays. Selon lui, cette même
opinion publique est plus favorable à l’OTAN depuis la déclaration du Sommet de
Bucarest. Le chef de la délégation de l’Ukraine auprès de l’Assemblée, Andrey
Shkil, a cependant indiqué que le soutien à l’OTAN était effectivement en
hausse, surtout parmi les plus jeunes générations, mais que si les pays alliés
obligeaient l’Ukraine à faire antichambre, cette tendance pourrait
s’arrêter ; il est urgent de répondre aux aspirations de l’Ukraine avant
que l’indifférence ne gagne le public et les milieux politiques.
Le professeur Oleksiy Haran, de
l’Université nationale « Académie Kyiv-Mohyla », a souligné que la
responsabilité des réformes incombait aux autorités ukrainiennes et a déploré
l’incapacité de ces dernières d’agir avec détermination depuis la Révolution
orange. Il a évoqué trois événements qui avaient obligé l’Ukraine à
reconsidérer sa confiance dans les garanties de l’OTAN : le conflit
géorgien, avec la participation de la Flotte de la mer Noire de la Fédération
de Russie, basée à Sébastopol ; la guerre du gaz entre la Russie et
l’Ukraine, en janvier 2008, avec la prise de position de l’Union
européenne, qui a considéré que cela ne concernait que les deux pays ; et
la « remise à zéro » décrétée par l’administration Obama dans les
relations avec la Russie : faute de détails sur la teneur des discussions
russo-américaines, les Ukrainiens n’ont pu que se demander aux dépens de qui
s’effectuerait cette remise à zéro.
Evoquant l’avenir, M. Haran a parlé
de deux points de friction potentiels dans les relations entre Moscou et
Kyiv : la Crimée et la présence de la Flotte de la mer Noire, question qui
demeure en suspens en raison du refus de la Russie d’ouvrir des négociations
sur les modalités du retrait de cette flotte.
Le point de vue de l’OTAN
Le point de vue de l’OTAN sur la
coopération avec l’Ukraine a été énoncé par le chef du Bureau de liaison de
l’OTAN à Kyiv, Marcin Koziel. Celui-ci a déclaré que la sécurité et la
démocratisation de l’Ukraine conservaient une importance cruciale pour les
Alliés. La décision stratégique prise par cette dernière au Sommet de Bucarest,
où elle a annoncé que l’Ukraine et la Géorgie deviendraient un jour membres de
l’OTAN, a été confirmée au Sommet de Strasbourg/Kehl et à une récente réunion
des ministres des Affaires étrangères des pays alliés. À l’intérieur de
l’Alliance, le débat ne porte pas sur la question de savoir si l’Ukraine
entrera ou non dans l’OTAN mais, bien plutôt, sur le rythme du processus
d’accession.
M. Koziel a ajouté que la
concrétisation des décisions de Bucarest concernait l’OTAN et l’Ukraine, à
l’exclusion de tout pays tiers. La porte de l’OTAN reste ouverte à toute
démocratie désireuse de partager les avantages et les charges inhérentes à
l’adhésion et prête à satisfaire aux critères requis.
Selon M. Koziel, l’Ukraine est le
seul partenaire de l’OTAN dont la réforme du secteur de la sécurité bénéficie
d’une coopération aussi dynamique et exhaustive de la part de l’OTAN, qui lui
apporte une aide, un financement et des conseils uniques en leur genre.
Actuellement, la collaboration qu’entretient l’Ukraine avec l’OTAN comporte un
PNA dont M. Koziel a indiqué qu’il était, pour l’essentiel, identique au MAP.
Les autorités de Kyiv peuvent également demander la réunion du Conseil
OTAN-Ukraine si elles se sentent menacées.
De l’avis de M. Koziel, les progrès
accomplis par l’Ukraine sur le front des réformes sont mitigés. Un certain
nombre de ministères ont bien avancé, mais le sous-financement de ces réformes,
notamment dans le secteur de la sécurité, est préoccupant. A titre personnel,
M. Koziel a souligné combien il était important pour le pays de parvenir à
un consensus national autour des points les plus importants de l’ordre du jour
gouvernemental et, avant tout, sur la sécurité nationale. Il a recommandé que
tout soit mis en œuvre pour lutter contre la corruption, qui ouvre la porte aux
influences extérieures, et pour mettre en place d’urgence un système efficace
de coopération et de coordination interministérielles afin de mener à bien les
réformes en cours.
Un point de vue indépendant
Dans une seconde allocution destinée à
préciser l’orientation des discussions, le chef du programme Russie et Eurasie
du Royal Institute of International Affairs (Chatham House), James Sherr,
a émis un point de vue plus sévère. Selon lui, l’Ukraine entre dans une période
particulièrement périlleuse où elle se retrouve une fois encore coincée entre
l’est, l’Ouest et elle-même. Pour la première fois depuis la fin de la Guerre
froide, ces trois facteurs sont tous défavorables.
Evoquant la paralysie intérieure dont
souffre l’Ukraine, M. Sherr s’est demandé si les dirigeants du pays
étaient capables de conjuguer leurs efforts en cette période critique et de
faire fi de leurs intérêts personnels pour s’atteler à des tâches nationales
urgentes. En Ukraine, il est plus facile d’empêcher de gouverner que de
gouverner. Le pays n’a pas besoin de nouvelles élections, mais d’une nouvelle
Constitution.
A l’Est, M. Sherr a distingué une Russie
dangereuse qui ne croit pas dans la liberté de l’Ukraine de décider de son
propre destin. Il se peut que les élites politiques russes cherchent à protéger
leurs intérêts économiques par la méthode historiquement éprouvée qui consiste
à bloquer la réforme des défectuosités structurelles de l’économie russe en
créant des turbulences d’ampleur internationale.
Pour ce qui est de l’Ouest, M. Sherr
a affirmé que les avantages d’une adhésion à l’OTAN n’apparaissaient pas à
l’Ukraine aussi clairement que dans le passé. La question de l’élargissement ne
figure plus en tête de l’ordre du jour de l’OTAN ; le conflit géorgien a
eu de grandes répercussions ; enfin, l’idée est de plus en plus répandue
dans cette partie du monde que les pays alliés sont devenus moins vigilants
quant à leurs propres normes.
Aussi les autorités ukrainiennes chargées
de la sécurité nationale en sont-elles venues à ces quatre conclusions :
dans la région, les frontières ne sont plus sacro-saintes ; des questions
apparemment réglées, dont celle de la Crimée, peuvent refaire surface à tout
moment ; la guerre est possible, ici ; sans les garanties de
l’article 5 automatiquement fournies par l’adhésion, l’Ukraine ne pourrait
compter sur aucune défense de la part des Alliés.
L’une des implications de ces conclusions
est qu’il n’est plus nécessaire de façonner les forces armées ukrainiennes sur
le modèle de l’OTAN ; des forces de petite taille, très motivées, bien
équipées et convenablement financées sont adaptées au contexte de l’Alliance, mais
les autorités de Kyiv considèrent de plus en plus volontiers que les intérêts
nationaux seraient mieux servis par des forces non professionnelles dotées d’un
large effectif (effectif qui sera doté d’un équipement médiocre et qu’il ne
faudra pas financer) et combinées à un arsenal de missiles à courte et à
moyenne portée.
M. Sherr a demandé à l’Ouest de
préserver ses intérêts et son influence en maintenant une présence active en
Ukraine, en mettant en œuvre des ressources politiques et morales aussi bien
que financières et en faisant la preuve de ses compétences et de son aptitude à
la conduite des affaires. Il a également suggéré que l’on parle moins
d’adhésion et plus d’intégration et que les relations entre l’OTAN et l’Ukraine
soient recadrées autour de la fourniture par la première de garanties de
sécurité bien réelles à la seconde.
L’UKRAINE ET LA SECURITE ENERGETIQUE
Un groupe de travail présidé par le chef
de la délégation de la Turquie auprès de l’Assemblée, Vahit Erdem, s’est penché
sur la dépendance énergétique de l’Ukraine vis-à-vis de la Russie et des
conséquences de cet état de fait pour l’Union européenne. Andriy Tchubyk,
du NOMOS Centre d’Ukraine, a décrit la situation actuelle de son pays : la
production intérieure ne permet de répondre qu’à 20 % des besoins en
pétrole et qu’à un tiers des besoins en gaz naturel, de sorte que l’Ukraine
dépend des fournitures énergétiques russes.
Certes, les dirigeants ukrainiens ont
conçu divers programmes pour résoudre le problème : un programme
énergétique national pour la période 1997-2010 visait une diminution de moitié
des importations de gaz russe, mais M. Tchubyk a précisé que cet objectif
n’avait jamais été atteint, faute de volonté politique. Par exemple, l’Ukraine
n’a pas constitué de réserves de gaz stratégiques, ce qui l’a rendue plus
vulnérable aux interruptions des approvisionnements. Autre obstacle : la
privatisation des installations pétrolières nationales, qui sont tombées dans
des mains russes et que Moscou peut désormais utiliser comme moyen de pression.
Ferdinand Pavel, de l’Institut allemand de
recherches économiques, sis à Berlin, a présenté une perspective plus large de
la situation énergétique de l’Union européenne par rapport à la région. Les
« conflits gaziers » auxquels l’Ukraine a été mêlée ont retenti comme
un « signal d’alarme » aux oreilles des décideurs. L’Union européenne
devrait négocier en tant que telle avec la Russie, plutôt que de laisser ses
membres se disperser en négociations bilatérales avec celle-ci. Pour M. Pavel,
les risques pourraient être atténués grâce à la constitution d’un marché
mondial pleinement intégré dans lequel les flux ne seraient pas
« réservés » ; dans un tel système, une interruption majeure des
approvisionnements ferait ressentir ses effets partout. M. Pavel a
également indiqué que la Russie était elle-même confrontée à des problèmes
d’ordre énergétique, dont la concurrence de plus en plus vive exercée par le
Moyen-Orient, l’Afrique du Nord, ou encore, les terminaux de gaz naturel
liquéfié, qui grignotent ses parts de marché dans l’Union européenne. Qui plus
est, sa capacité de production intérieure est en baisse (gisements pétrolifères
et gaziers), conséquence d’une focalisation excessive sur la politique des
oléoducs.
L’OTAN, L’UKRAINE ET LES RELATIONS AVEC
LA RUSSIE
Un observateur indépendant du Carnegie
Moscow Centre, Andreï Ryabov, a décrit la position officielle de la Russie au
sujet des relations entre l’OTAN et l’Ukraine. Evoquant le point de vue des
décideurs russes, il a déclaré que, dans l’esprit de ces derniers, il sera très
malaisé de concrétiser les objectifs stratégiques de la Russie dans l’espace
« postsoviétique » s’ils n’entretiennent pas des relations aussi
étroites que privilégiées avec l’Ukraine sur le double plan politique et économique.
L’adhésion de l’Ukraine à l’OTAN menacerait très sérieusement les intérêts
russes ; toute l’architecture de la sécurité en Europe serait profondément
déséquilibrée au profit de la communauté européenne et la Russie ne tiendrait
plus son rang : bousculée par l’Asie, elle perdrait aussi son statut
d’acteur sur la scène européenne.
D’autre part, les décideurs russes savent
que les ressources dont ils disposent pour influer sur la politique intérieure
et extérieure ukrainienne sont, en fin de compte, limitées. Ils en ont donc
conclu qu’en ce qui concerne la politique étrangère de Kyiv la meilleure
solution réside dans une constante oscillation entre la Russie et l’Ouest.
M. Ryabov a estimé que le dialogue
nouveau que préconise le secrétaire général de l’OTAN, récemment entré en
fonction, crée des possibilités quant aux relations entre l’OTAN et la
Russie ; le tout est de savoir sur quoi portera le dialogue :
s’agira-t-il de questions pratiques, comme l’élargissement de l’OTAN, ou de
questions plus générales, comme l’aménagement d’une nouvelle architecture de
sécurité en Europe, sur la base des propositions du président de la Fédération
de Russie, M. Medvedev ? Quoi qu’il en soit, M. Ryabov a plaidé
pour que soient exploitées les occasions d’un renouvellement du dialogue, de
manière à établir un ordre du jour pour l’avenir de ces relations croisées.
James Greene, conseiller principal auprès
de l’Initiative pour la région de la mer Baltique, de la mer Noire et de la mer
Caspienne (et ancien chef du Bureau de liaison de l’OTAN à Kyiv) a estimé que
l’Ouest avait perdu la plus grande partie de son influence sur la Russie et
qu’il courait le risque de perdre complètement celle qu’il exerçait sur
l’Europe centrale et orientale (ECO). Plus il s’efforcera de préserver la maigre
influence qu’il conserve auprès de la Russie, plus il s’aliénera les pays de
l’ECO. M. Greene a recommandé, au contraire, une stratégie d’association avec
ces pays, l’objectif étant de les faire participer aux efforts collectifs
occidentaux d’ouverture en direction de la Russie.
Selon M. Greene, la plupart des
suppositions émises par l’Ouest au sujet de la Russie après la Guerre froide se
sont révélées fausses, dont celle d’une convergence entre les valeurs russes et
les valeurs occidentales, convergence qui serait la conséquence naturelle des
réformes et de l’instauration de relations économiques. En fait, le
rapprochement entre la Russie et l’Ouest a été d’une ampleur limitée ; sur
le terrain économique, les avantages des entreprises occidentales ont été
restreints par la fusion des milieux d’affaires et des services du
renseignement en Russie : l’« effet Coca-Cola » a été neutralisé
par des facteurs tels que le contrôle des médias par l’Etat.
M. Greene a signalé que l’élite russe
avait atteint l’un de ses objectifs stratégiques en parvenant à
« blesser » l’Ouest sur le plan géopolitique. Il a donc recommandé de
prendre des mesures effectives pour se protéger des tentatives russes de saper
la sécurité dans la région, tout en maintenant le contact dans l’espoir d’une
éventuelle convergence. Selon lui, la politique de l’OTAN ne s’est pas adaptée
à ce paradigme fluctuant.
Evoquant le partenariat entre l’Ukraine et
l’OTAN, M. Greene a indiqué que l’OTAN perdait de son influence et de son
intérêt : en effet, nombreux sont les Occidentaux convaincus que l’Ukraine
est incapable de venir à bout de ses faiblesses internes. M. Greene a donc
suggéré que l’on laisse de côté la question de l’adhésion et de
l’article 5 pour se concentrer sur les véritables problèmes de sécurité en
consacrant des consultations honnêtes et franches aux menaces auxquelles est
confrontée l’Ukraine. Il a estimé que le PNA était un excellent instrument qui
méritait davantage d’investissements financiers et intellectuels.
La discussion a porté sur divers points,
dont l’absence de réconciliation de la Russie avec sa période soviétique.
M. Ryabov a confirmé qu’un dialogue sur des questions d’histoire serait
extrêmement difficile à organiser et qu’aucune mise en question de la
légitimité du gouvernement ne serait tolérée. L’un des vice-présidents de
l’Assemblée, Assen Agov, a évoqué le cas de la Bulgarie et émis l’idée qu’il
n’y avait pas à Moscou de « nouveaux architectes » avec lesquels il
soit possible de dialoguer à propos de relations nouvelles. M. Greene a
confirmé qu’il ne voyait pas de véritable terrain d’entente : les intérêts
russes et occidentaux sont incompatibles entre eux, et il faut le savoir.
M. Ryabov a toutefois indiqué qu’l fallait se garder d’une politique qui
entraînerait l’isolement de la Russie, perspective dangereuse pour la
Fédération de Russie, certes, mais aussi pour la région dans son ensemble.
Répondant à diverses questions sur une
éventuelle contribution de la Russie à la résolution du problème posé par le
programme nucléaire iranien, M. Greene a indiqué qu’il se pourrait que
Moscou ait décidé d’autoriser la prolifération pour obtenir un avantage
tactique (grâce à une hausse des tarifs énergétiques, entraînant les Etats-Unis
dans un autre conflit) ; en l’occurrence, le comportement des Russes remet
en cause quelques-unes des hypothèses occidentales les plus élémentaires, selon
M. Greene. M. Ryabov a mis en garde contre une surévaluation des
liens entre le secteur de la sécurité russe et l’Iran.
LA MOLDOVA
Un groupe de travail animé par un
parlementaire ukrainien, Ostap Semerak, a passé en revue l’évolution de la
situation politique dans la Moldova. Les membres du groupe ont estimé que la
Russie usait de son influence en Transnistrie pour affirmer son rôle dans la
région.
Oleksandr Sushko (Ukraine), directeur
scientifique à l’Institut pour la coopération euro-atlantique, a indiqué que
l’Ukraine et la Moldova partageaient une frontière commune
d’environ 1 400 km (soit la deuxième du pays par ordre de
grandeur), dont 450 km pour la seule Transnistrie. Il a déploré l’absence
de tout partenaire légitime avec lequel il serait possible de collaborer pour
résoudre les problèmes frontaliers inhérents à ce tronçon, une situation qui se
traduit par une vulnérabilité accrue à la criminalité transfrontalière ou à la
contrebande, par exemple.
M. Sushko a replacé la question des
frontières dans le contexte plus vaste de celle des régions séparatistes et de
ce que l’on désigne depuis longtemps par l’appellation « conflits
gelés ». Selon lui, les institutions occidentales, y compris l’OTAN, ne
jouent qu’un rôle très limité dans le règlement de ces situations car elles
accordent désormais plus d’attention à des parties du monde plus reculées,
telles que l’Afghanistan. Par ailleurs, la Russie monopolise tous les efforts
de maintien de la paix dans la région, ce qui influe sur les démarches engagées
pour venir à bout des conflits.
Evoquant l’avenir, M. Sushko a estimé que
rien ne donnait à penser que la Russie comptait changer d’avis au sujet de la Transnistrie.
Elle pourrait consentir à ce que la Moldova se rapproche de l’Europe, mais
amputée de la Transnistrie, laquelle demeurerait dans ce cas une entité
semi-souveraine pleinement alignée sur la Fédération de Russie ; Moscou
pourrait s’en servir comme d’une nouvelle Kaliningrad pour faire pression sur
l’Ukraine.
L’Ukraine et l’OTAN ont des intérêts
concordants, de l’avis de M. Sushko : l’une et l’autre devraient
veiller au respect de l’intégrité territoriale de la Moldova, mais sans lui
sacrifier les aspirations occidentales du pays. M. Sushko a préconisé un
rôle accru pour l’Union européenne à moyen terme.
Un analyste indépendant moldove, Vlad
Lupan, a retracé l’historique du conflit de Transnistrie. Selon lui, le conflit
peut rester gelé pendant au moins dix ans encore, compte tenu de l’influence de
la Russie. Si les Moldoves ont changé plusieurs fois leur fusil d’épaule à la
suite de fluctuations politiques, l’intérêt des Russes pour la Moldova, lui, ne
s’est pas démenti et Moscou ne cache pas sa conviction que ce pays se trouve
dans sa sphère d’influence. M. Lupan a fait valoir que la Fédération de
Russie n’avait aucun intérêt à régler la question : pour elle, la
Transnistrie est « un porte-avions amarré tout à la fois sur le territoire
moldove comme en Ukraine ». M. Lupan a également souligné qu’une
intervention accrue de l’Union européenne pourrait être de nature à faciliter
un règlement du conflit, et il a demandé, plus spécifiquement, l’élargissement
du mandat de la mission EUBAM de l’Union européenne (mission d’assistance à la
frontière entre la République de Moldova et l’Ukraine).
Un parlementaire moldove a estimé que la
voie à suivre en la matière était de s’efforcer d’obtenir le retrait des
troupes et des munitions russes, de démontrer aux habitants de la Transnistrie
que la vie dans la Moldova allait en s’améliorant et de veiller à ce que les
partenaires européens tiennent les promesses (dont l’exemption de visa) faites
pendant la campagne électorale.
LE BELARUS
Une session animée par le chef de la
délégation du Canada auprès de l’Assemblée, Leon Benoit, a été consacrée
au Bélarus. M. Benoit a rappelé, en préambule, que le Bélarus avait obtenu
le statut de membre associé de l’Assemblée après l’effondrement de l’URSS mais
que ce statut avait été suspendu en 1997, à la suite de la prise de mesures
antidémocratiques par le chef de l’Etat, M. Loukachenko.
Pavel Daneyko (Bélarus), directeur du
Centre bélarussien de recherches et d’études économiques, a indiqué que les
Bélarussiens se rangeaient en deux catégories : ceux qui étaient
favorables à l’intégration dans l’Europe et ceux qui étaient favorables à
l’intégration dans la Russie. Selon lui, il n’y a guère de chances de voir
cette division s’estomper ; les autorités de Minsk devront donc mener une
politique d’indépendance nationale et équilibrer leur politique extérieure
entre l’Europe et la Russie.
Même dans ces conditions, un certain
nombre de facteurs donnent à penser que le pays pourrait se tourner davantage
vers l’Europe : notamment, la moitié des exportations bélarussiennes est à
destination de l’Union européenne, les valeurs européennes sont progressivement
transposées dans la réalité et dans la législation nationale et, d’une manière
générale, les relations avec l’Union s’améliorent sur le double plan politique
et économique.
Evoquant la situation intérieure,
M. Daneyko estime que les réformes sont irréversibles :
M. Loukachenko devra les poursuivre, car il reste un dirigeant soumis aux
résultats des élections et cherche à obtenir l’approbation de l’opinion. Il a
ainsi, dans le passé, joui du soutien de la population pour avoir assuré à
cette dernière des revenus stables.
Balazs Jarabik, de la Fondation pour les
relations internationales et le dialogue extérieur –sise à Kyiv –, a
décrit la situation du Bélarus sous une perspective internationale. Prenant
acte du fait que le pays passe pour être « la dernière dictature
d’Europe », il présente toutefois un point de vue différent : le
Bélarus est le seul pays de la région à ne connaître aucun conflit, il jouit
d’une grande cohésion, le sentiment d’identité nationale est de plus en plus
fort dans la population, la société civile y est en expansion, et c’est
également le seul pays de la région qui puisse intégrer l’acquis communautaire
et le mettre en pratique.
La Russie devrait considérer le Bélarus
sous un jour favorable, selon M. Jarabik : elle peut avoir la
certitude qu’il ne se laissera jamais influencer par l’OTAN et qu’il sera pour
elle un partenaire politique des plus fiables. La totale dépendance énergétique
du Bélarus vis-à-vis de la Russie représente aussi une lourde menace pour
M. Loukachenko et permet à Moscou de moins se soucier de ce pays que de
l’Ukraine ou de la Géorgie.
L’élection présidentielle de 2010
fournit à l’Ouest le moyen d’influer sur l’évolution politique du Bélarus.
M. Jarabik a recommandé que l’Union européenne offre un engagement total
de sa part en échange d’élections libres et honnêtes. Il a en outre suggéré une
multiplication des contacts à tous les niveaux entre l’Union européenne et le
Bélarus. Ces politiques pourraient déboucher sur l’amorce d’une intégration
technique du pays dans l’Union d’ici un ou deux ans.
Lors d’un échange animé, les orateurs ont
discuté de la mesure dans laquelle les changements politiques actuels sont le
résultat de la dynamique économique ou des négociations engagées par
M. Loukachenko avec l’Union européenne. Ils ont confirmé que l’idée d’une
union entre le Bélarus et la Russie n’était plus qu’une coquille vide.
M. Jarabik a expliqué que, à la suite de pressions russes, des exercices
militaires s’étaient déroulés cet été sur le territoire bélarussien, ce qui ne
s’était plus produit depuis quatre ans. De l’avis de M. Jarabik, il est
intéressant de constater qu’une partie des troupes russes n’a pas encore
regagné la Russie. Pour M. Daneyko, M. Loukachenko cherchera à
obtenir de Moscou les plus larges concessions possibles en échange d’une
éventuelle reconnaissance de l’indépendance de l’Ossétie du Sud et de
l’Abkhazie.
LA GEORGIE
Le vice-Premier ministre et ministre
d’Etat de l’Intégration européenne et euro-atlantique de Géorgie, Giorgi
Baramidze, a déclaré que la Russie occupait pour le moment plus
de 20 % du territoire de son pays et qu’elle continuait ses
violations des accords de cessez-le-feu, la première d’entre elles étant le
refus de ramener ses forces à leurs positions antérieures. Quatre bases
militaires sont en construction. Les autorités russes ont déployé près de dix
mille hommes dans les régions occupées, et ces troupes ne se trouvent qu’à
quarante kilomètres de Tbilissi. Surtout, des opérations militaires se sont
poursuivies bien après la signature des accords de cessez-le-feu.
La guerre et ses conséquences ont été le
point culminant d’une politique russe de plusieurs décennies d’existence
destinée à faire obstacle à la démocratisation et aux aspirations
euro-atlantiques de la Géorgie, selon M. Baramidze. Celui-ci a évoqué le
rapport Tagliavini à la demande de l’Union européenne et qui parle d’une
opération parfaitement planifiée et exécutée dont le début remonte bien avant
le 7 août 2008. Il a également rejeté les justifications de la
Russie, qui affirme être intervenue pour des « raisons
humanitaires ». Pour lui, le rapport en question confirme que Moscou a
contrevenu aux dispositions de la Charte des Nations unies en agressant un Etat
souverain. Par ailleurs, la reconnaissance de l’Abkhazie et de l’Ossétie du Sud
constitue une ingérence répréhensible dans les affaires intérieures de la
Géorgie.
M. Baramidze a demandé de la part de
la communauté internationale une prise de position ferme et unanime par
laquelle elle continuerait à refuser de reconnaître les deux régions déjà
évoquées, ainsi qu’une forte représentation de l’Union européenne grâce à
l’envoi d’une mission de surveillance, d’autant que la Russie s’est opposée à
la venue de l’ONU et de l’OSCE en Géorgie. Il y a lieu de convaincre Moscou de
se conformer aux six points des accords de cessez-le-feu. Pour leur part, les
autorités géorgiennes ont mis au point une stratégie conçue pour améliorer les
pénibles conditions d’existence des populations vivant en zone occupée et
articulée autour d’initiatives dans des domaines divers : relations
socio-économiques et commerciales, soins médicaux, héritage et développement de
la société civile.
Toujours selon M. Baramidze, le
conflit ne sera pas réglé à court terme et l’avenir de ces populations ne
saurait être subordonné à la situation politique. La Géorgie doit faire montre
de patience stratégique. Le vice-Premier ministre a émis le souhait que des
Etats amis épaulent son pays dans les efforts qu’il consent dans ce but, du
moins par la création de nouveaux mécanismes qui offriront aux Géorgiens des
perspectives de développement économique et démocratique en toute sécurité.
Parlant des turbulences qui caractérisent
la scène politique géorgienne, M. Baramidze a indiqué que, face à cette
situation, les autorités recouraient à l’engagement constructif, au dialogue et
à la modération. Il a avancé tout un ensemble de propositions – une
« seconde vague d’initiatives démocratiques » – et a invité
l’opposition à discuter d’un nouveau code électoral. Il a également offert aux
élus qui refusaient d’occuper leur siège de mettre à profit leur mandat pour
participer de manière constructive à la conduite du pays.
Répondant à diverses questions, le
vice-Premier ministre a longuement détaillé les réformes de politique
intérieure ; il a précisé que le gouvernement avait suggéré la création
d’une commission qui travaille à la rédaction d’une Constitution reposant sur
une structure du pouvoir mieux équilibrée (le texte en sera publié à la fin du
printemps 2010 ou même avant), renforçant le Parlement et introduisant
plus de transparence dans le système. De nouvelles règles relatives aux médias
du service public sont à l’étude, de même qu’un projet d’élection du maire de
Tbilissi au scrutin direct. Toutes ces mesures et d’autres encore devraient
déboucher sur un débat politique plus harmonieux dans la capitale et contribuer
à la stabilisation du pays ; elles devraient aussi inciter les pays
occidentaux à soutenir davantage la Géorgie et, partant, permettre de
progresser dans la résolution du problème des territoires géorgiens occupés.
M. Baramidze a conclu son
intervention en déclarant que les décisions prises au Sommet de Bucarest
avaient donné un sérieux coup de pouce à la Géorgie, laquelle a terminé,
en 2009, le premier cycle de son PNA, poursuivant ses réformes malgré les
crises politiques. La mise sur pied de la Commission OTAN-Géorgie est également
une démarche positive. Des mesures sont prises pour répondre, sur le plan
technique, aux critères d’adhésion à l’OTAN d’ici deux ou trois ans, d’après le
vice-Premier ministre ; les pays alliés devront ensuite arrêter une
décision politique sur la date à laquelle l’Alliance ouvrira ses portes à la
Géorgie. La Russie n’a certainement pas à opposer un quelconque veto en la
matière, et les pays membres de l’OTAN ne doivent pas faire dépendre cette
accession du retrait des forces russes : cela reviendrait à accorder aux autorités
russes un droit de veto de facto et à les inciter à maintenir leurs troupes sur
le territoire géorgien.
Un groupe de travail animé par
M. Agov, qui est également membre du Conseil interparlementaire
OTAN-Géorgie, a procédé à une nouvelle analyse de la position politique de la
Géorgie telle qu’elle se présente un peu plus d’un an après le conflit
d’août 2008.
Ghia Nodia, directeur de l’Institut du
Caucase pour la paix, la démocratie et le développement – sis à
Tbilissi –, a affirmé que la période comprise entre novembre 2007 et
juin 2009 a été la plus difficile qu’ait connue la Géorgie depuis le début
des années 90, certes, mais que les dégâts provoqués par les crises n’étaient
pas aussi graves qu’on aurait pu le croire au vu des circonstances. Le principal
exploit réside dans le fait que le pays a conservé son cap dans tous les grands
domaines. M. Nodia a fait une analogie avec les essais d’endurance
auxquels est soumis un nouveau modèle de voiture : il se peut que tous les
systèmes n’aient pas fonctionné, mais le modèle s’est révélé exploitable, même
s’il reste beaucoup à faire.
Le professeur Hryhoriy Perepylytsya, de
l’Académie diplomatique d’Ukraine, a estimé qu’en raison de la transformation
géopolitique du système international le conflit géorgien ne serait pas le
dernier de ce genre. Le Kremlin a vu une possibilité
de restaurer son statut de superpuissance.
Il pense que certains des Etats nés avec la disparition de l’Union soviétique
ne sont pas viables et, à ses yeux, la Géorgie est un maillon d’une chaîne
énergétique qu’il entend perturber. Dans le prolongement de sa « victoire
militaire et politique » – suivant les termes du professeur –
qu’il a remporté sur l’Ouest, sa foi dans les vertus de la force armée a
grandi. Pour prix de sa coopération dans les dossiers afghan et iranien, la
Russie exigera la fin du soutien à la souveraineté des Etats
« post-soviétiques » et refusera leur intégration européenne.
Enfin, un député géorgien, David
Darchiashvili, a estimé qu’un compromis entre une Russie anti-occidentale et
une Géorgie en cours de modernisation était impossible. Dans l’avenir, l’Ouest
devra rendre conditionnelle sa coopération avec la Russie, faire avancer le
règlement de la question des territoires occupés et faire en sorte que le rythme
des réformes géorgiennes s’accélère, y compris dans le secteur de la sécurité,
sur la base d’une analyse exhaustive de l’éventail des menaces auxquelles le
pays est confronté. Bref, la communauté internationale doit mettre ses actes en
accord avec ses déclarations.
ALLOCUTION DE CLOTURE
Simon Lunn, ancien secrétaire général de
l’Assemblée parlementaire de l’OTAN et désormais chargé de recherche au Centre
pour le contrôle démocratique des forces armées (DCAF), sis à Genève, a exposé
quelques conclusions personnelles tirées des discussions du séminaire.
Les questions abordées sont venues
rappeler utilement que même si l’Alliance est consciente des problèmes
planétaires tels qu’ils sont symbolisés par l’Afghanistan, l’OTAN doit encore
s’occuper de son pré carré. L’instabilité inhérente à cette partie du monde
– la « chaîne des conflits » – fait ressortir le thème
majeur du débat, qui se résume en une simple question : que faire au sujet
de la Russie ?
Il est clair que l’Ukraine a beaucoup
progressé depuis 1991 dans le domaine des institutions et des libertés, en
même temps qu’elle a apporté de fortes contributions à l’action de l’OTAN. Les
orateurs ont recommandé que trois secteurs fassent l’objet d’un traitement plus
ciblé à l’avenir : la lutte contre la corruption, la coordination et
l’édification d’un consensus national. Le dernier secteur est d’autant plus
important que ce n’est pas simplement un gouvernement, mais bien une société
tout entière qui adhère à l’OTAN. M. Lunn a rappelé un point important à
propos de la Géorgie : il faut veiller à ce que le retrait des forces
russes ne devienne pas une condition à remplir pour entrer dans l’OTAN, faute
de quoi le processus d’élargissement serait l’otage des choix de Moscou.
M. Lunn est ensuite passé au
« facteur Russie », qu’il a résumé comme suit : deux pressions
antagoniques s’exercent, l’admission du fait qu’une sécurité et une stabilité
durables en Europe sont inconcevables sans la coopération de la Russie, et le
droit des Etats à disposer d’eux-mêmes. Autrement dit : « Oui à la
coopération, mais à quel prix ? »
L’OTAN elle-même se ressent de
l’élargissement et des partenariats, qui ont laissé des zones grises dans la
sécurité de l’Europe. Pour M. Lunn, il semble bien que les Alliés n’aient
pris un risque en laissant planer un certain flou autour du sens de
l’article 5. Il a plaidé pour une réaffirmation de la signification
exacte de cet article, dont le sujet n’est pas les capacités, mais bien plutôt
la solidarité et l’engagement. Il est crucial qu’il ne puisse être interprété
comme s’appliquant à d’autres pays que les membres à part entière. Bien
évidemment, les mesures qui devront être prises pour rassurer des Alliés
menacés pourront apparaître comme une provocation aux yeux de certains ;
un équilibre devra être trouvé.
M. Lunn a estimé que la question de
la coopération et du partenariat avec la Russie devait être un élément central
du débat consacré au nouveau concept stratégique de l’OTAN. Cette question n’a
pas encore provoqué de schisme à l’intérieur de l’Alliance, certes, mais elle
pose des problèmes sérieux. La Russie ne facilite pas l’existence aux pays qui
préconisent la coopération, comme l’attestent de nombreux exemples de
comportement inadmissible. Il ne faut surtout pas s’imaginer qu’en raison de l’attitude
actuelle de la Russie de nouveaux élargissements légitimes de l’Alliance
passeront comme une lettre à la poste. Quoi qu’il en soit, le message adressé à
l’Ukraine et à la Géorgie au cours de ce séminaire est triple :
« Prenez patience » ; « gardez le cap et continuez à
frapper à la porte » ;
« aidez-nous en contribuant vous-mêmes à la résolution du problème des
relations avec la Russie, ce qui facilitera l’obtention d’un consensus autour
d’un avenir commun ».
Respectueusement soumis,
M. Leon Benoit, député
Président
Association parlementaire
canadienne de l’OTAN (AP OTAN)