La délégation
canadienne à l'Assemblée parlementaire de l'Organisation du traité de
l'Atlantique Nord (AP OTAN) a l'honneur de présenter son rapport sur la
réunion conjointe de la Commission de la défense et de
la sécurité, de la Commission de l’économie et de la sécurité et de la
Commission politique ainsi que des dirigeants de la Commission sur la dimension
civile de la sécurité et de la Commission des sciences et des technologies, qui
s’est tenue à Bruxelles, en Belgique, du 12 au 14 février 2012. À
Bruxelles, le Canada était représenté par la députée Cheryl Gallant, chef de la délégation, la sénatrice Raynell
Andreychuk, présidente de la Commission politique de l'AP OTAN, le
sénateur Joseph A. Day, président de la Commission de la défense et
de la sécurité de l'AP OTAN, et les députés Jack Harris et
Lawrence MacAuley. M. James Murray Latimer, secrétaire de
la délégation, et Mme Melissa Radford, conseillère de
l'Association appartenant à la Bibliothèque du Parlement, accompagnaient la
délégation.
Les réunions
annuelles tenues à Bruxelles permettent aux délégués de faire le point sur les
activités et les opérations de l'Alliance avec de hauts fonctionnaires et
officiers militaires en poste au quartier général de l'OTAN. Les délégués ont
également rencontré le secrétaire général de l'OTAN, M. Anders Fogh Rasmussen,
ainsi que M. Yves Brodeur, représentant permanent du Canada auprès de l'OTAN,
et le personnel civil et militaire canadien à la mission, qui ont organisé une
séance d'information à leur intention.
Mme Gallant
et M. Harris ont également représenté le Canada à la consultation annuelle
de la Commission de l'économie et de la sécurité auprès de l'Organisation de
coopération et de développement économiques (OCDE), tenue à Paris, en France,
le 10 février 2012. Les délégués ont eu l'occasion de discuter avec
des représentants de l'OCDE des enjeux liés à la crise de l'endettement qui
afflige actuellement une bonne partie de l'Europe ainsi que les États-Unis.
Les réunions à
Bruxelles et à Paris se sont déroulées selon la règle de Chatham House.
Résumé de la
discussion
Les délégués ont
participé à six séances. La sénatrice Andreychuk a présidé deux séances de
la Commission politique et le sénateur Day a présidé deux séances de la
Commission de la défense et de la sécurité. Des cadres supérieurs civils ainsi
que des officiers militaires supérieurs en poste aux quartier général de l'OTAN
ainsi que divers ambassadeurs et représentants permanents auprès de l'OTAN ont
pris la parole devant les délégués.
Parmi les sujets de
discussion abordés lors de ces séances, mentionnons les opérations militaires
courantes de l'OTAN, l'état de ses capacités militaires et la défense
intelligente, les partenariats, l'élargissement de l'OTAN et la transformation
de son quartier général.
En ce qui touche
les opérations courantes de l'OTAN, les délégués ont appris que l'Afghanistan
demeure la priorité de l'Alliance. Les représentants de l'OTAN affichent
toujours un optimisme prudent à l'égard des progrès réalisés dans ce pays, même
s'ils continuent de presser les gouvernements de ne plus assujettir leurs
forces miliaires à des restrictions. La mission de l'OTAN en Afghanistan évolue
à l'heure actuelle; région par région, la responsabilité en matière de sécurité
passe de la Force internationale d'assistance à la sécurité (FIAS) de l'OTAN
aux Forces de sécurité nationales afghanes (FSNA). Même si cette transition
sera terminée d'ici 2014, les FSNA auront grandement besoin du soutien en matière
financière et d'instruction des membres de l'Alliance. L'OTAN devra aussi
continuer d'accorder du soutien médical aux FSNA ainsi que du soutien en
matière de logistique et de commandement et de contrôle. Enfin, une part
importante du PIB de l'Afghanistan est actuellement attribuable à la présence
de la FIAS dans le pays. Les représentants de l'OTAN s'inquiètent par
conséquent de l'incidence sur l'économie du retrait des forces militaires
internationales.
Des représentants
de l'OTAN ont traité de la mission de l'OTAN en Libye et au Kosovo ainsi que
des opérations de lutte contre le piraterie au large de la Corne de l'Afrique.
À l'égard de la Libye, ces personnes ont indiqué que cette opération
constituait un exemple parfait de la raison pour laquelle l'OTAN continue d'être
pertinente dans notre monde. À l'égard du Kosovo, elles ont expliqué aux
délégués que les effectifs de la Force pour le Kosovo de l'OTAN (KFOR) ont été
réduits. Malheureusement, les effectifs de la Mission « État de
droit » de l'Union européenne au Kosovo (EULEX), qui comporte un volet
policier, ont également été réduits. La KFOR joue par conséquent maintenant le
rôle de premier intervenant, ce qui n'est pas une tâche militaire classique.
Enfin, les représentants de l'OTAN ont fait observer qu'une solution politique
au conflit au Kosovo continue de s'imposer, même si cet objectif est encore
loin d'être atteint. Par ailleurs, les relations de l'OTAN avec la Serbie se
sont améliorées au cours des deux dernières années. En ce qui touche les
opérations de lutte contre la piraterie, les représentants de l'OTAN ont
déclaré aux délégués que les instruments du pouvoir de contraindre de l'OTAN,
comme ses opérations navales, et les instruments de son pouvoir de convaincre,
comme l'aide internationale en vue du renforcement des secteurs de la
gouvernance et des tribunaux dans les pays visés, doivent tous être déployés
pour combattre la piraterie et l'insécurité dans la région.
Les représentants
de l'OTAN ont discuté des failles actuelles de l'OTAN et de la façon dont les
initiatives de défense intelligente pourraient aider à renforcer ses capacités
militaires et lui permettre de contrer des menaces futures en cette ère de
réductions budgétaires. Les représentants de l'OTAN ont également exprimé des
inquiétudes à l'égard du manque de ressources de l'Alliance. Ils ont noté que
la situation empirait à cet égard et que la dépendance excessive de l'Alliance
sur les actifs militaires américains fait ressortir les manquements de
l'Europe. Au cours de l'opération en Lybie, les États-Unis ont mené 75 %
de toutes les missions de ravitaillement air-air. Plus précisément, les
États-Unis ont pu affecter à cette mission un avion ravitailleur pour cinq avions
de combat contre, pour les autres alliés, un avion ravitailleur pour
23 avions de combat. Par ailleurs, 77 % du budget de l'Alliance
provient des États-Unis. Plusieurs pays membres de l'OTAN faisant face à des
crises économiques, des mesures doivent être prises pour que l'Alliance soit en
mesure dans l'avenir de combattre des menaces. Parallèlement, le coût de la
sécurité continue d'augmenter à mesure de la mise au point de technologies et
de systèmes d'armement et de l'adaptation de l'Alliance aux nouveaux domaines
comme la cybersécurité où se manifestent des menaces. En outre, plusieurs États
membres réduisent leurs dépenses en matière de défense dans le but d'équilibrer
leur budgets nationaux. Les cadres supérieurs de l'OTAN craignent que des
réductions non coordonnées dans le domaine de la défense dans l'ensemble des
pays de l'OTAN entraînent la disparition permanente de certaines capacités
militaires.
La défense
intelligente et les initiatives qui s'y rapportent visent à faire face à ces
défis. L'objectif n'est pas de dépenser davantage, mais bien de dépenser mieux
et de permettre aux États membres de l'Alliance d'établir des priorités en
matière de capacités et de se spécialiser dans certains domaines. Les
opérations de police aérienne conjointes menées au-dessus des États baltes sont
un exemple pratique de défense intelligente. Le programme de défense contre les
missiles balistiques de l'OTAN en est un autre. Les États membres ont donné
leur accord à ce programme lors du Sommet de Lisbonne de 2010, programme qui a
aussi fait l'objet de discussion lors du Sommet de Chicago en mai 2012. La
défense intelligente présente cependant des défis étant donné que les intérêts
nationaux l'emportent souvent sur l'intégration des capacités et la coopération
à cet égard entre les alliés. Si plusieurs États doivent se partager des actifs
militaires, la question se pose de savoir comment ces actifs seront mis à la
disposition des autres États membres, qui pourra prendre les décisions en
matière de déploiement et si l'Alliance aura un accès garanti à ces actifs. En
outre, pour les gouvernements, les achats militaires constituent souvent un
moyen de stimuler leur propre industrie de défense. Si certains pays comme le
Portugal semblent vouloir renoncer à une politique axée sur les retombées
industrielles en ce qui touche les achats militaires, reste à voir si d'autres
pays lui emboîteront le pas. Quand il s'agit de prendre en compte tant les
coûts des achats militaires que les coûts d'exploitation de l'équipement
militaire, les États pourraient décider de partager ces coûts, en particulier
étant donné qu'ils ne peuvent pas ce permettre seuls ces dépenses à l'heure
actuelle. Les représentants de l'OTAN ont indiqué que la question du
financement commun des opérations militaires doit aussi être examinée plus à
fond par les alliés. Certains craignent que cette possibilité encourage
certains États à s'en tenir à financer uniquement les opérations militaires au
détriment des troupes. Pour ces raisons, l'évolution du concept doit être
évaluée de façon continue.
L'OTAN a également
eu l'occasion de travailler, dans le cadre des opérations en Afghanistan et en
Lybie, avec des États n'appartenant pas à l'Alliance comme l'Australie, la
Nouvelle-Zélande, le Qatar et les Émirats arabes, pour n'en nommer que
quelques-uns. Ces partenariats ont permis de partager avec ces pays le fardeau
des opérations militaires et l'Alliance souhaite les renforcer. D'après ses représentants,
l'OTAN a établi des partenariats avec quelque 40 pays et a coopéré avec
ces partenaires dans l'exécution d'environ 1 600 tâches. Le défi pour
l'OTAN est de maintenir l'esprit de confiance et d'interopérabilité qui règne
maintenant entre l'Alliance et ses partenaires à mesure que prennent fin
progressivement ses principales missions. De nouveaux mécanismes comme les
dialogues 28+N sont mis en place dans le but d'amener des États non membres de
l'Alliance à la table où se prennent les décisions pour qu'ils discutent avec
les pays membres de l'OTAN tout particulièrement des enjeux qui exigent une
coopération mondiale comme la cybersécurité et la lutte contre la piraterie. L'OTAN
cherche également à établir des liens avec d'autres partenaires possibles. À
titre d'exemple, l'Afghanistan et l'Iraq, de théâtres d'opérations sont devenus
des partenariats; et la Lybie pourra toujours compter sur l'OTAN pour l'aider
pendant cette période de transition.
Les représentants
de l'OTAN ont déclaré que l'Alliance est également prête à accepter parmi ses
rangs de nouveaux membres européens qui répondent à ses critères, mais que la
question ne serait pas abordée au Sommet de Chicago.
Les représentants de
l'OTAN ont discuté des changements à se produire au quartier général de
l'Alliance, laquelle doit elle-même réduire ses dépenses et rationaliser ses
opérations internes. L'organisation qui comptait autrefois 11 quartiers
généraux de commandement n'en compte plus que sept. Les délégués ont également
appris que les coûts d'exploitation et de personnel de l'OTAN diminueraient de
20 %.
Conclusion
Les réunions
conjointes des commissions ayant eu lieu à Bruxelles et à Paris ont permis aux
délégués du Canada de discuter en profondeur des priorités actuelles de
l'Alliance en matière économique et militaire avec des cadres supérieurs de
l'OTAN et de l'OCDE ainsi qu'avec des parlementaires d'autres pays membres. Parmi
les sujets abordés lors de ces discussions, mentionnons les opérations
courantes de l'OTAN, l'état de ses capacités militaires et la défense
intelligente, les partenariats, l'élargissement de l'OTAN et la transformation
de son quartier général.
Toutes ces
questions continuent de présenter beaucoup d'intérêt pour le Canada.