SPECIAL JOINT COMMITTEE ON THE CHILD CUSTODY AND ACCESS

COMITÉ MIXTE SPÉCIAL SUR LA GARDE ET LE DROIT DE VISITE DES ENFANTS

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le vendredi 1er mai 1998

• 1008

[Traduction]

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson (Ontario, Lib.)): Bonjour. Bienvenue. Nous sommes très heureux d'être à Winnipeg. Nous souhaitons la bienvenue à ceux et celles qui vont témoigner devant nous aujourd'hui.

Nous aimerions débuter la journée en rappelant à tous le mandat du comité. Le mandat du comité mixte spécial ici réuni est d'examiner et d'analyser les questions relatives à la garde et au droit de visite des enfants par suite d'une séparation ou d'un divorce. Nous allons nous attarder plus particulièrement sur la nécessité d'une approche davantage axée sur l'enfant dans le cadre des politiques et des pratiques en matière de droit familial, et qui mette davantage l'accent sur les responsabilités parentales conjointes et les arrangements en matière de responsabilités parentales qui s'appuient sur les besoins et les meilleurs intérêts des enfants.

Le premier témoin que nous accueillons aujourd'hui représente la Manitoba Association of Women's Shelters. Il s'agit de Mme Waltraud Grieger.

Le sénateur Duncan J. Jessiman (Manitoba, PC): Madame la présidente, qu'est-il advenu de notre premier témoin?

Mme Waltraud Grieger (directrice générale, Manitoba Association of Women's Shelters): C'est moi.

Le sénateur Duncan Jessiman: Oh, j'ai ici Waltraud Krieger de Nova House.

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): Oui, c'est elle: Waltraud Grieger.

Le sénateur Duncan Jessiman: Oh, je m'excuse. Très bien.

Mme Waltraud Grieger: Je devrais peut-être fournir quelques explications. Lorsqu'on m'a au départ invitée à faire une présentation au panel, j'allais le faire pour le compte du foyer d'accueil dont je suis la directrice générale. Depuis, l'association provinciale des foyers d'accueil a tenu une réunion et j'ai été choisie pour faire une présentation au nom de la Manitoba Association of Women's Shelters.

Le sénateur Duncan Jessiman: Merci.

• 1010

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): Selon notre habitude...

La sénatrice Anne C. Cools (Toronto-Centre, Lib.): À l'avenir, il faudrait que le comité soit averti des changements. Peut-être que le comité a un point de vue différent, mais ces personnes ne font pas tout simplement ces changements dans leur coin. Le comité doit bien sûr donner son autorisation.

Le sénateur Duncan Jessiman: Nova House fait partie de votre association, n'est-ce pas?

Mme Waltraud Grieger: Nova House est un foyer d'accueil pour femmes et enfants victimes d'abus à Selkirk, au Manitoba.

Le sénateur Duncan Jessiman: En effet, et elle fait partie de votre association.

Mme Waltraud Grieger: Oui. Nous sommes membres de l'association manitobaine.

Le sénateur Duncan Jessiman: Merci.

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): Selon notre mode de travail habituel, nous allons vous demander de nous entretenir de vos préoccupations pendant environ cinq minutes, afin que cela nous laisse du temps pour des questions.

Mme Waltraud Grieger: Tout d'abord, bonjour.

J'aimerais dès le départ saisir les membres du comité ici présents ce matin de mes préoccupations quant au manque de renseignements distribués relativement aux audiences du comité mixte spécial Sénat-Chambre des communes au sujet du projet de loi du gouvernement les pensions alimentaires pour enfants. J'ai appris tout à fait par hasard vendredi dernier, à l'occasion d'une réunion sur la jeunesse et le service correctionnel, que vous alliez siéger à Winnipeg aujourd'hui. Cela étant, je n'ai pas été en mesure de vous préparer un texte détaillé en vue de sa distribution ce matin.

Je suis ici ce matin en tant que représentante de la Manitoba Association of Women's Shelters, dont j'ai pendant sept ans été présidente, et dont je suis cette année présidente sortante.

Merci de m'avoir donné l'occasion de vous exposer mes préoccupations et de vous soumettre des recommandations dont je crois fermement qu'elles favoriseraient, si elles étaient adoptées, le bien-être et la sécurité des enfants partout au pays. Je veux croire que le projet de loi du gouvernement renforcera et resserrera les dispositions en matière de soutien pour les enfants et fera en sorte qu'il sera plus difficile pour les parents de manquer à leurs responsabilités à l'égard de leurs enfants.

Au cours de la décennie écoulée, il y a eu une sensibilisation croissante au sein du système judiciaire et, de façon plus générale, au niveau de la communauté, aux graves problèmes que sont la violence conjugale, l'abus à l'égard d'un conjoint, et les conséquences que cela peut avoir sur les enfants.

La sénatrice Anne Cools: Madame la présidente, j'invoque le règlement. Je pense que notre témoin a déclaré qu'elle se prononce sur le projet de loi sur la pension alimentaire pour enfants, et il me semble qu'elle veut nous dire qu'elle ne dispose d'aucun renseignement sur ce projet de loi.

Nous ne sommes saisis d'aucun projet de loi du genre, en matière de soutien pour l'enfant ou d'autre chose. La présidente pourrait peut-être relire pour la gouverne du témoin l'ordre de renvoi du comité afin de préciser ce sur quoi porte notre étude.

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): Je l'ai fait.

Mme Waltraud Grieger: En effet.

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): Oui. Avez-vous compris cela?

Mme Waltraud Grieger: Oui.

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): Nous allons déposer un rapport fin novembre.

Mme Waltraud Grieger: Très bien.

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): Merci.

Mme Waltraud Grieger: C'est bien ce que j'avais compris.

La politique du procureur général en matière de violence conjugale est très simple: c'est une politique de tolérance zéro. Cette politique de tolérance zéro vise à mettre fin à la violence à l'endroit de femmes et d'autres qui se trouvent dans des relations abusives. Cette démarche relève tout autant de la dénonciation d'un grave problème social que du changement des attitudes du public. Or, je suis ici devant vous aujourd'hui pour vérifier si les lois régissant la garde d'enfants et l'accès sont justes ou injustes à l'égard des pères après le divorce. Ma réponse immédiate, sans réfléchir, c'est oui et non, étant donné le manque de soutien à l'enfant assuré par les parents qui n'ont pas la garde d'enfants, dont la majorité sont des hommes.

La Manitoba Association of Women's Shelters a en 1995-1996 offert des services à 5 017 personnes du sexe féminin, mais 1 600 d'entre elles étaient des enfants. En tant que prestateurs de services, nous croyons que tout enfant qui vit ou qui a vécu avec de la violence ou des menaces de violence est un enfant qui a besoin de protection, est un enfant à risque.

Nous savons qu'un homme qui maltraite son épouse peut également maltraiter ses enfants. Des enfants peuvent être accidentellement blessés lorsqu'ils tentent de stopper la violence ou de protéger leur mère. Les enfants qui sont témoins, chez eux, d'agressions contre leur mère sont susceptibles de devenir des époux abusifs . Même si les enfants ne sont pas la cible directe de la violence, ils subiront des abus émotifs graves et peut-être même la négligence.

J'encouragerais les membres du comité à veiller à ce que tout texte de loi visant le bien-être et la sécurité soit une priorité. Il me faut croire et savoir que votre travail veillera à ce que les enfants ne soient pas victimes d'abus physiques ou sexuels, ni négligés ou privés de la satisfaction de leurs besoins essentiels.

Nous sommes tous responsables de veiller à ce qu'à la rupture d'un mariage ou d'une autre relation, l'abus ne se poursuive pas dans l'enfant. L'enfant n'est pas un pion et ne devrait pas devenir l'arme des parents qui cherchent à continuer de se faire du mal.

Un père, dans le but de continuer de faire souffrir la mère de ses enfants, menacera peut-être de les kidnapper, fera des appels terrorisants et harcèlera la mère pour des questions de visites, d'accès, de soutien financier, et engagera de longues et pénibles batailles pour obtenir la garde des enfants. Les hommes sont financièrement mieux en mesure de piéger les mères devant la cour, tandis que les femmes sont nombreuses à compter sur l'aide juridique.

Les pères devraient être évalués pour voir si leur désir de contact avec les enfants est légitime ou bien s'il ne s'agit que d'un moyen pour savoir où vit l'épouse dans le but de continuer de la terroriser en la suivant ou en la harcelant.

La qualité des compétences parentales du père aura à ce stade été évaluée. S'il s'intéresse sincèrement à ses enfants, il est dans leur intérêt que ses talents de parent soient encouragés. Ses enfants font partie de lui. Les enfants veulent en général une forme de contact ou une autre avec leur père une fois qu'ont été apaisées leur crainte de lui et leurs craintes pour leur sécurité.

• 1015

S'il y a la moindre crainte ou pour la sécurité de la mère ou pour celle des enfants, les visites ou les échanges doivent prendre fin ou alors être surveillés par un tiers fiable.

La médiation est une autre voie qui peut être poursuivie, mais cela ne peut être efficace que si la violence et l'intimidation ont pris fin. Les médiateurs doivent être formés pour déceler les effets de la violence chez les mères et les enfants. La médiation est trop dangereuse si le problème de violence à l'égard de la conjointe n'a pas été examiné et réglé, si la victime ne se sent pas en sécurité, si l'enfant n'est pas en sécurité et si le comportement du contrevenant n'a pas changé. Un homme violent ne peut être un bon père qu'une fois que son comportement intimidant et abusif a changé.

La violence à l'égard des femmes a été définie dans la Déclaration des Nations Unies sur l'élimination de la violence contre les femmes comme étant un acte de violence fondé sur le sexe qui résulte ou qui est susceptible de résulter en des blessures ou des souffrances physiques, sexuelles ou psychologiques infligées aux femmes, et cela inclut les menaces de tels actes, la coercition ou la privation arbitraire de la liberté, que cela survienne dans la vie privée ou la vie publique. La situation inégale des femmes les rend plus vulnérables face à la violence masculine. Il a déjà été clairement démontré que les femmes canadiennes risquent surtout d'être victimisées par des hommes qu'elles respectent, qu'elles aiment et en qui elles ont confiance.

Pour nombre de personnes, la peur de la violence limite leurs choix et leur capacité de participer à part entière à la société. Un sondage de 1993 de Statistique Canada sur la violence faite aux femmes a révélé que 51 p. 100 des femmes au Canada disaient avoir été victimes de violence masculine, définie comme étant une agression physique ou sexuelle et considérée comme étant un délit en vertu du Code criminel.

Les expériences des fournisseurs de services des premières lignes racontent une histoire différente des femmes en tant que victimes et survivantes. De la tendre enfance jusqu'à l'adolescence, 81 p. 100 des victimes ont subi des sévices physiques pendant qu'elles grandissaient dans la maison de leurs parents. En ce qui concerne les sévices vécus par ces enfants, 55 p. 100 étaient graves, signifiant que ces enfants ont été frappés par des instruments durs, ont été battus ou ont été directement menacés d'agression physique au moyen de couteaux, d'armes à feu ou d'armes autres. Parmi ces enfants victimes d'abus physiques, 28 p. 100 ont rapporté que des objets avaient été lancés contre eux; 51 p. 100 avaient été frappés avec des objets durs, comme par exemple poêles à frire, porte-manteaux, cordons de fer à repasser et ceintures. Vingt-et-un pour cent avaient été battus par un parent; et 11 p. 100 avait été menacés ou blessés au moyen d'un couteau, d'une arme à feu ou d'une autre arme.

En décrivant ce qu'elles avaient vu chez elles, 63 p. 100 des victimes ont déclaré avoir vu un parent frappé entre 6 et 52 fois par an; 24 p. 100 ont vu un parent frappé avec des objets durs tels marteaux, boucles de ceinture ou téléphones entre 6 et 53 fois; 60 p. 100 avaient vu un parent tabassé; 24 p. 100 avaient vu un parent menacé ou blessé au moyen d'un couteau, d'une arme à feu ou d'une autre arme. Ces statistiques proviennent de l'Étude nationale sur la violence familiale de 1985 de Gerald Hoteling.

Lorsque nous examinons l'accès et la garde, nous pouvons raconter de façon très convaincante une histoire très différente. Nombre des femmes qui viennent chez nous négocient des ententes sur la garde d'enfants avec le parent qui n'a pas la garde sans devoir recourir aux tribunaux. Nous avons également pris connaissance de statistiques qui révèlent que lorsque les pères demandent la garde, ils ont une chance sur deux de l'obtenir. Un autre rapport indique que les pères qui cherchent à obtenir la garde gagnent dans 74 p. 100 des cas au niveau de la cour provinciale et dans 91 p. 100 des cas au niveau de la Cour suprême. Alors où se situe l'injustice? S'il y a injustice, il semblerait qu'elle vise la mère qui demande la garde.

En tant que travailleurs de première ligne, nous savons que 95 p. 100 de tous les cas d'abus sont le fait d'hommes qui s'attaquent à des femmes. Ce serait là un excellent indicateur du fait que les enfants sont témoins d'abus commis par leur père à l'égard de leur mère. Nous savons quelles sont les conséquences irréversibles, dans le présent et dans l'avenir, subies par les enfants témoins de violence, et il nous faut y être très attentifs.

Qu'en est-il des visites un soir par semaine et toutes les deux fins de semaine ordonnées par la cour? Que dit-on aux enfants lorsqu'ils ont été préparés pour la visite de papa et que celui-ci ne se présente pas au rendez-vous? Qu'en est-il du père qui a accès aux enfants et qui retourne à la cour pour réduire cet accès parce que son désir d'exercer un contrôle sur sa femme n'a pas été réalisé par suite de ses visites avec les enfants et parce qu'elle continue de résister à toute relation avec lui?

Comment pensez-vous que les enfants se sentent avec tous leurs maux et toutes leurs douleurs lorsque des visites sont annulées ou oubliées? Qu'en est-il du père qui quitte son emploi et qui fait son travail en cachette, sous la table, de façon à ne pas avoir à payer de pension? Qu'en est-il du père qui se fait saisir son salaire en vertu de la Loi sur l'obligation alimentaire des enfants parce qu'il ne respecte pas ses obligations? Peut-on parler dans ces cas d'amour paternel ou d'amour pour la famille, ou bien s'agit-il plutôt de contrôle et de veiller à ce que épouse et enfants vivent dans la pauvreté pour leur infliger une leçon?

• 1020

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): Vous avez dépassé, et de loin, les cinq minutes qui vous étaient accordées. Nous sommes prêts à entendre vos recommandations. Merci.

Mme Waltraud Grieger: J'ai presque terminé.

Qui blessent-ils? Leurs enfants, dont ils disent vouloir s'occuper et aimer.

Nous savons également qu'entre 1974 et 1992, une femme mariée courait neuf fois plus de risques d'être tuée par son conjoint que par un étranger. Les facteurs de risque montrent que les cas de maris qui tuent leur femme augmentent par suite d'une séparation. Je citerai à titre d'exemple le meurtre-suicide Lavoie survenu dans notre province et qui a fait trois orphelins.

Nous savons que de 1974 à 1992, 1 435 femmes et 451 hommes ont été tués par leur partenaire intime. Au Manitoba, 78 femmes ont été victimes de meurtre depuis 1990, et en 1997, 14 femmes ont été brutalement tuées par leur partenaire. Or, les tribunaux ne comprennent ni ne reconnaissent le risque élevé auquel sont exposées les femmes par suite d'une séparation.

Les tribunaux imposent des droits d'accès pendant que les femmes et les enfants vivent en maison de refuge. Le personnel de ces maisons est obligé de faire les arrangements de transport pour les visites avec le père lorsque des accusations ont été portées et les dates de comparution devant le tribunal fixées.

Nous savons également que le risque d'homicide entre conjoints est beaucoup plus grand dans les relations de fait que dans le cas de mariages enregistrés. Ce sont les épouses adolescentes qui courent le plus grave risque de se faire tuer par leur conjoint.

L'on sait par ailleurs que dans un type rare mais récurrent de meurtre de conjointe, un ou plusieurs des enfants sont eux aussi tués lors du même incident. De 1974 à 1992, l'on a enregistré un total de 65 «familicides» de ce genre, faisant 172 victimes. Quatre-vingt-quatorze pour cent de ces homicides ont été commis par des hommes.

Nos recommandations sont les suivantes.

Tout changement apporté à la loi devrait accorder la priorité à la sécurité pour les femmes et les enfants, et ce doit être là une priorité pour tout le monde dans ce pays.

Nous voulons également recommander que des mesures soient prises pour veiller à ce que tous les parents qui n'ont pas la garde des enfants soient responsables du soutien de leurs enfants. Ce n'est pas parce qu'il survient une séparation ou un divorce que l'on doit abdiquer ses responsabilités envers ses enfants.

Notre troisième recommandation est de veiller à ce que les enfants ne soient pas obligés à avoir des rencontres avec leur père tant et aussi longtemps que l'on n'aura pas fait toutes les évaluations requises pour veiller à ce que la sécurité de la mère et des enfants soit assurée.

Merci.

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): Merci beaucoup.

Monsieur Forseth.

M. Paul Forseth (New Westminster—Coquitlam—Burnaby, Réf.): Bienvenue.

Vous avez fait une déclaration laissant entendre que les tribunaux ne reconnaissaient pas la difficulté ou la situation des femmes. Pourriez-vous nous expliquer cela un petit mieux et peut-être nous donner quelques exemples?

Mme Waltraud Grieger: Absolument. Lorsqu'une femme arrive dans un foyer de refuge avec ses enfants, elle doit décider si elle compte mettre fin à la relation dont elle s'est soustraite ou bien s'il lui faut tout simplement un petit peu de temps pour réfléchir et décider si elle veut réintégrer la relation ou partir. Si elle décide de mettre fin à la relation, alors nous l'encourageons à chercher à obtenir des conseils juridiques au sujet d'ordonnances provisoires. Elle fera donc une demande d'ordonnance provisoire pour obtenir la garde. Le conjoint se verra peut-être convoqué. À ce moment-là, l'affaire est renvoyée au tribunal et le juge peut, et c'est ce qu'il fait dans de nombreux cas, accorder des droits d'accès, même si la femme vit en foyer de refuge.

Nous avons à l'heure actuelle au refuge une femme avec deux enfants et nous assurons le transport pour que les enfants puissent avoir des visites avec leur père pendant que la femme et les enfants vivent au foyer. Il vous faut comprendre que le conjoint a été accusé de nombreuses agressions et qu'il attend son procès. Pourtant, nous autres, au foyer, sommes maintenant responsables de veiller à ce que les enfants se rendent à ces visites, qui sont hebdomadaires et qui durent trois heures chacune.

M. Paul Forseth: Très bien. Il est très louable que vous offriez ce service, mais comment faites-vous la transition entre cet état de choses et votre déclaration voulant que les tribunaux ne soient pas sensibles à la situation?

Mme Waltraud Grieger: Notre expérience en tant que fournisseurs de services sur les premières lignes a été que lorsqu'il y a une séparation, lorsqu'il y a ordonnance et lorsque le conjoint se rend compte que sa conjointe songe sérieusement à mettre fin à la relation, alors il constate qu'il n'exerce plus aucun pouvoir, aucun contrôle sur elle. Cela aggrave la situation dans laquelle se trouvent à ce moment-là la femme et les enfants.

Cela m'inquiète également de constater que les membres de mon personnel se voient placés dans une situation où il leur faut véritablement assurer le transport des enfants étant donné que les Services à l'enfance et à la famille n'assurent pas le nécessaire pour ce genre de visites. Cela place les membres de mon personnel dans une situation risquée car je n'ai aucun moyen de savoir si ce conjoint, une fois les enfants déposés ou ramassés, ne va pas suivre mon personnel jusqu'au foyer. Pour moi, donc, c'est une question de sécurité.

• 1025

M. Paul Forseth: Très bien. Transposons cela à l'autre situation que vous avez évoquée. Votre première recommandation faisait état de la sécurité du parent ou de l'enfant, disant que c'était là la plus grande priorité. Avez-vous des exemples de cas où la sécurité n'est pas une priorité?

C'est là votre recommandation, mais je vous renvoie la balle et vous dis d'accord, mais donnez-nous des exemples de situations où la sécurité n'est pas la première priorité, afin que nous puissions cerner les problèmes.

Mme Waltraud Grieger: Je dirais que pour l'ensemble des femmes vivant en foyer, l'un des critères d'admission est le risque qu'elle-même et ses enfants courent. Je n'ai jamais accueilli de femmes au foyer qui n'étaient pas à mon avis en situation de risque.

M. Paul Forseth: Très bien. Combien de lits avez-vous dans votre foyer de refuge?

Mme Waltraud Grieger: Nous avons des lits pour 20 femmes et enfants.

M. Paul Forseth: Très bien, et combien de personnes passent en moyenne par vos installations chaque année?

Mme Waltraud Grieger: Pour l'année 1996-1997, 171 femmes et 243 enfants sont passés par nos installations.

M. Paul Forseth: Pourriez-vous nous faire un petit résumé de vos sources de financement?

Mme Waltraud Grieger: Le gros de notre financement est assuré par la province du Manitoba, par l'intermédiaire des Services à la famille. Nous obtenons une subvention. Nous touchons également un per diem pour le nombre de nuits passées au foyer par des femmes et des enfants.

Nous avons également accès au programme pour enfants de Santé Canada, par l'intermédiaire du PACE... qui est disponible. Il s'agissait au départ du programme Grandir ensemble: plan d'action canadien pour les enfants. Nous menons également beaucoup de campagnes de souscription de fonds et nous comptons par ailleurs sur des dons en provenance de la communauté.

M. Paul Forseth: Quel est votre mandat quant à la durée de séjour autorisée dans votre foyer?

Mme Waltraud Grieger: À l'heure actuelle, il n'y a pas de durée maximale prescrite. Autrefois, dans notre province, on appliquait la règle des 10 jours, mais cela a été changé par la province du Manitoba. À l'heure actuelle, cela dépend du client, et la décision est prise conjointement avec un membre du personnel, selon que celui-ci estime qu'il faudrait un séjour plus long ou plus court. La durée moyenne d'un séjour dans notre foyer est de huit jours.

M. Paul Forseth: C'est huit jours. Tenez-vous des statistiques au sujet de...? D'après ce que j'ai compris, vous n'accueillez dans votre établissement que des femmes?

Mme Waltraud Grieger: Oui, c'est cela.

M. Paul Forseth: Le personnel qui s'occupe véritablement de questions de séparation et de divorce plutôt que... Je pourrais envisager un scénario où une personne chercherait à obtenir les services offerts par vos installations. Peut-être que la femme a porté plainte en criminelle contre son conjoint. Il y aura peut-être poursuites, peut-être pas. Plus tard, elle ira peut-être vivre avec un parent, peut-être qu'il y aura une réconciliation ou autre,à un moment donné, mais il n'y a aucune intervention particulière dans le cadre de l'application de la Loi sur le divorce.

Gardez-vous des statistiques sur les différentes catégories d'affaires judiciaires dans lesquelles vos résidents sont parties?

Mme Waltraud Grieger: Non, et une partie de la raison à cela est que nous sommes un établissement d'intervention pour les crises à court terme. Ce n'est qu'au cours des deux dernières années que nous avons obtenu des fonds qui nous permettent de faire du travail à long terme avec nos clients. Nous espérons donc suivre cela un petit peu mieux que par le passé.

Quoi qu'il en soit, pour répondre à votre question, non, nous n'avons pas été en mesure de faire cela.

M. Paul Forseth: J'aurais une dernière question à vous poser. Quels sont les paramètres de base pour qu'une personne puisse utiliser vos installations? J'imagine que les services sont rares et que n'importe quelle femme qui dit qu'elle veut être hébergée chez vous... Vous devez faire une sélection, et vous offrez donc certains services à une clientèle bien particulière.

Quelles sont certaines des questions que vous posez? Je vous demanderai ensuite de décrire certains éléments de votre mandat, afin de nous expliquer quelles personnes vous accueillez et quelles personnes vous refuseriez de servir en règle générale.

Mme Waltraud Grieger: En gros, notre mandat est d'offrir des services aux femmes victimes d'abus. Par conséquent, afin d'être admissibles à notre foyer, les femmes doivent être en mesure de prouver qu'elles ont été victimes d'abus physiques, émotionnels, psychologiques, sexuels ou financiers. Je vous dirais qu'un grand nombre des personnes qui nous sont renvoyées viennent d'autres agences de services sociaux ou alors ont été invitées à communiquer avec nous après avoir appelé la ligne téléphonique d'aide.

Comptent parmi les questions que nous posons: Que s'est-il passé? Quel est l'incident le plus récent? Pouvez-vous nous expliquer la chose, nous donner un historique? Y a-t-il eu des antécédents? Quelles autres agences sont intervenues? Avez-vous eu des contacts avec la police? Avez-vous eu des contacts avec un avocat? Avez-vous eu des contacts avec d'autres agences de services sociaux? Les événements qui se sont produits chez vous ont-ils jamais été documentés par votre médecin? Voilà le genre de critères qui interviendraient dans notre décision d'admettre quelqu'un.

• 1030

M. Paul Forseth: Merci beaucoup.

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): Sénatrice Cools.

La sénatrice Anne Cools: Merci beaucoup, madame la présidente.

Est-ce que Osborne House est membre de votre organisation?

Mme Waltraud Grieger: Oui.

La sénatrice Anne Cools: Très bien. Cela m'intéresse tout simplement énormément.

Vous avez dit à M. Forseth que vous ne disposez pas de renseignements sur le nombre de clients que vous avez servis et qui demandent en fait le divorce ou vivent le divorce. Vous n'avez pas de renseignements...

Mme Waltraud Grieger: Nous aurions des renseignements sur les femmes qui ont engagé le processus. Nous n'aurions pas les chiffres quant aux femmes pour qui cela a abouti...

La sénatrice Anne Cools: Très bien. Parmi les femmes que vous avez servies, disons l'an dernier, soit en 1997, combien d'entre elles auraient engagé...? Premièrement, dites-moi combien de femmes vous avez véritablement servies, après quoi...

Mme Waltraud Grieger: On a enregistré 171 et 243.

La sénatrice Anne Cools: Elles étaient 171, d'accord. Parmi ces 171, combien d'entre elles ont lancé une procédure de divorce? Combien d'entre elles l'ont véritablement fait?

Mme Waltraud Grieger: Sans aller voir dans les dossiers pour y obtenir les chiffres exacts, je dirais que cela doit tourner autour de 50 p. 100.

La sénatrice Anne Cools: Vous estimez que le pourcentage serait de 50.

Mme Waltraud Grieger: Oui.

La sénatrice Anne Cools: Cela est-il extrêmement élevé?

Mme Waltraud Grieger: Non. Je pense que nous sommes beaucoup plus doués pour la prestation de services. Je pense que nous avons fait beaucoup de chemin.

Je travaille dans ce domaine depuis 12 ans. Si je compare la situation actuelle à celle que nous connaissions il y a environ 12 ans, je pense que nous sommes beaucoup mieux en mesure d'évaluer, de diffuser des renseignements et de renseigner les femmes sur les ressources qui existent.

La sénatrice Anne Cools: Absolument. Vous pourriez donc m'envoyer de la documentation sur ces 50 p. 100.

Mme Waltraud Grieger: Absolument.

La sénatrice Anne Cools: J'aurai une autre question à vous poser au sujet de votre clientèle. Je veux parler tout particulièrement des personnes que vous servez, avec votre propre base de services.

Vous avez fait de nombreuses déclarations au sujet de femmes qui se font tuer. Parmi les femmes et les enfants que vous avez servis, combien d'entre eux ont été tués?

Mme Waltraud Grieger: Je dirai que je ne suis pas prête à répondre à cette question, et je vais vous expliquer pourquoi.

Les services offerts dans mon foyer à une femme victime d'abus et à ses enfants sont confidentiels. Ce que je suis prête à fournir au comité c'est le nombre de femmes—et leurs noms—qui ont été tuées dans la province du Manitoba.

La sénatrice Anne Cools: Nous avons ces renseignements, mais nous n'avons pas de renseignements au sujet des personnes qui se font aider, en d'autres termes, de votre clientèle. Les renseignements qui sont publics sont à la disposition de nous tous. Ce dont nous ne disposons pas ce sont des renseignements au sujet de cette clientèle.

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): Les témoins revendiquent la confidentialité.

La sénatrice Anne Cools: Ce n'est pas un fait confidentiel. Ce n'est pas un fait confidentiel. Ces renseignements sont rapportés tous les jours. Nous ne demandons pas les noms des personnes concernées.

Je pose ces questions au témoin tout simplement parce qu'elle a dit que les personnes qu'elle sert sont menacées, etc. Il me semble que si le témoin avait eu une cliente qui avait été tuée l'an dernier, elle le saurait.

Mme Waltraud Grieger: J'imagine que oui...

La sénatrice Anne Cools: Ma question...

Mme Waltraud Grieger: Excusez-moi.

La sénatrice Anne Cools: Ma question est la suivante: Pprmi les clients que vous servez, et que vous êtes ici pour représenter, pour le compte de qui vous faites ici du lobbying...? La question que je vous pose, encore une fois, est la suivante: parmi les femmes que vous avez servies, vous avez dit penser que 50 p. 100 d'entre elles avaient en fait demandé le divorce.

J'aimerais tout simplement savoir combien de femmes parmi celles que vous avez servies ont été blessées? Je vous demanderais également de me préciser combien d'entre elles ont été gravement blessées.

Parmi les enfants que vous avez servis, j'aimerais savoir combien d'entre eux ont été menacés et blessés comme vous nous avez dit. Je pense que plus tard, nous allons entendre des témoins des services de protection de l'enfance du Manitoba.

Mme Waltraud Grieger: Je suppose que ce que je suis prête à dire est que nombre des femmes qui viennent au foyer ont été gravement blessées. Nombre des enfants ont été maltraités physiquement, sexuellement, psychologiquement et émotionnellement. C'est tout ce que je suis prête à dire.

Je dirai par ailleurs que les 14 femmes qui sont mortes dans notre province en 1997 ont peut-être ou n'ont peut-être pas reçu de services offerts par des foyers de refuge.

La sénatrice Anne Cools: Très bien. Dans la seule année 1997, au Manitoba, vous dites que 14 femmes ont été tuées par...

Mme Waltraud Grieger: Par leur partenaire.

La sénatrice Anne Cools: Par leur partenaire?

Mme Waltraud Grieger: Oui.

• 1035

La sénatrice Anne Cools: Très bien. La moyenne nationale de femmes tuées par leur partenaire est d'environ 60 à 65 pour tout le pays. Premièrement, d'où vous vient ce chiffre de 14 pour l'année?

Mme Waltraud Grieger: Eh bien, c'est 14, parce que nous avons eu 14 vigiles pour des femmes qui pleuraient des vies perdues et des familles touchées. Cela fait partie de nos dossiers de police et de nos dossiers judiciaires.

La sénatrice Anne Cools: Je vous pose la question suivante: le Manitoba a-t-il un plus grave problème que le reste du pays? Ce que j'aimerais que vous m'expliquiez est pourquoi le nombre est si élevé au Manitoba comparativement au reste du pays.

Mme Waltraud Grieger: Je ne peux pas vous expliquer cela.

La sénatrice Anne Cools: Il y a peut-être un plus gros problème ou autre chose qui intervient ici.

Mme Waltraud Grieger: Non, je penserais que la violence conjugale sous toutes ses formes est aussi courante ailleurs au Canada qu'au Manitoba.

La sénatrice Anne Cools: Très bien.

J'ai ici devant moi une déclaration selon laquelle Winnipeg est... J'aimerais vérifier certains des renseignements que nous avons relativement à d'autres études en cours, mais d'après ce que j'ai compris, un des témoins que nous allons entendre cet après-midi a examiné cette question.

Merci beaucoup.

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): Madame Wasylycia-Leis.

Mme Judy Wasylycia-Leis (Winnipeg-Centre-Nord, NPD): Merci beaucoup, madame la présidente.

J'aimerais remercier Waltraud d'être venue comparaître devant le comité. Bien que je sois membre depuis peu du comité et que je n'aie pas participé à ces audiences, ce qui me frappe est que la perspective que vous apportez est essentielle au travail du comité ici réuni, qui a été chargé d'examiner les questions relatives à la garde et au droit de visite.

J'ai été préoccupée de vous entendre dire dès le départ que vous n'avez appris la tenue de ces audiences que par pur hasard. Avez-vous vu des annonces au sujet de ces audiences, et comment avez-vous en fait appris que celles-ci allaient être tenues?

Mme Waltraud Grieger: Je n'ai pas vu d'annonce, et je suppose que ce qui m'étonne plus que n'importe quoi ce sont les personnes qui vont comparaître devant vous aujourd'hui.

Je suis allée vendredi dernier à une réunion sur les jeunes et les services correctionnels et j'ai discuté avec Jane Ursel, qui va vous faire une présentation cet après-midi. J'ai appris que quelqu'un à Ottawa lui avait dit que le comité allait faire une tournée nationale pour se renseigner sur les questions liées au droit de visite et à la garde. Pendant la réunion, j'ai très vite gratté une lettre, je l'ai faxée à mon bureau, j'ai demandé à mon personnel administratif de la faxer à Ottawa et j'ai demandé de me faire inscrire au programme.

Je m'excuse donc de ne pas être aussi préparée que j'aurais pu ou que j'aurais dû l'être, mais nous pourrons très certainement toutes les deux vous fournir ces renseignements.

J'ai discuté avec d'autres femmes oeuvrant au sein d'autres organisations de femmes, et aucune d'entre elles ne savait que ce processus avait été lancé. Je ne trouve tout simplement pas que ce soit acceptable que nous dépensions des deniers publics pour que ce groupe de personnes parcoure le pays sans qu'il y ait de représentation de quantité de groupes qui ne vont pas être présents ici ce matin parce qu'ils n'étaient tout simplement pas au courant.

Je pense qu'il devrait y avoir un meilleur moyen de diffuser des renseignements. Notre association n'avait pas été avertie de ce processus, et je pense que nous y avons un intérêt direct. Nous travaillons avec des femmes, nous travaillons avec des enfants, et notre objet est de faire en sorte que nos familles soient meilleures et se portent mieux. Je pense que nous devrions avoir notre mot à dire et que vous devriez nous écouter.

Mme Judy Wasylycia-Leis: J'ai, en ma qualité de député de cette province, les mêmes préoccupations que vous. Je pense qu'il est important que le comité entende toute la gamme des opinions au Manitoba.

Pour la gouverne de tout le comité, pourriez-vous nous dire quels groupes auraient peut-être comparu devant nous s'ils avaient été au courant des audiences, quels groupes jouent un rôle dans ces dossiers, car nous pourrions peut-être les renseigner au sujet de la tenue de ces audiences et les inviter à au moins nous soumettre des mémoires écrits.

La sénatrice Anne Cools: Madame la présidente, j'invoque le règlement. Il me semble que lorsque vous avez ouvert la séance, madame la présidente, vous avez lu l'ordre de renvoi du comité au...

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): Oui.

La sénatrice Anne Cools: La présidente pourrait peut-être déclarer publiquement ici aujourd'hui que les motions ont été adoptées à la Chambre, car cela a débuté au Sénat. C'est ce jour-là que le pays a été formellement avisé du fait que le comité allait se déplacer.

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): Très bien. L'ordre de renvoi émanant du Sénat est daté du 28 octobre 1997 et celui en provenance de la Chambre des communes est daté du 18 novembre 1997...

La sénatrice Anne Cools: La présidente pourrait peut-être tirer au clair quel...

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): ... et celui-ci expliquait clairement que nous allions nous déplacer dans le pays, et les procureurs généraux de toutes les provinces ont été avertis de nos projets de déplacement, etc. Il y a peut-être eu un problème au niveau de la communication, mais les renseignements avaient été diffusés.

Mme Waltraud Grieger: J'ai ces renseignements, et je pense que c'est là l'élément important. Certainement, Judy...

• 1040

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): Pour poursuivre avec votre rappel au règlement, nous avons publié de nombreux communiqués de presse, nous sommes passés sur la chaîne parlementaire et il y a eu de nombreux articles dans les journaux, alors tout le monde...

La sénatrice Anne Cools: À cette date-là, il avait déjà été décidé que le comité allait voyager, car l'ordre de renvoi était là.

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): Quoi qu'il en soit, poursuivez.

Mme Judy Wasylycia-Leis: Peu importe ce qui est arrivé, comment les nouvelles sont diffusées et s'il y a eu ou non échec au niveau de la communication, cela m'intéresserait toujours de savoir quels groupes, au Manitoba, participent à tout ce domaine, groupes qui seraient peut-être venus comparaître devant nous s'ils avaient reçu davantage de renseignements, et que nous pourrions peut-être encourager à nous soumettre des mémoires écrits.

Mme Waltraud Grieger: J'aurai quelques suggestions. Les Winnipeg Service Providers sont un rassemblement d'environ 15 à 18 organisations qui offrent des services directs aux femmes et aux enfants victimes d'abus et qui offrent également certains services à une clientèle masculine. Je pense que c'est un groupe solide qui pourrait faire une contribution importante en soumettant un mémoire.

Je pense par ailleurs que la COVAW devrait elle aussi se voir offrir la possibilité de soumettre quelque chose par écrit. Il s'agit de la Coalition on Violence Against Women.

Je pense que Kliniv n'était sans doute pas au courant. Il y a certainement plusieurs hommes qui s'occupent de programmes pour les hommes là-bas qui seraient désireux de fournir des renseignements et qui ont témoigné lors de l'enquête sur l'affaire Lavoie.

Nous pourrions vraisemblablement vous préparer une liste de groupes, si cela pouvait vous être utile.

Mme Judy Wasylycia-Leis: Merci beaucoup.

La sénatrice Anne Cools: Peut-être, madame la présidente—et je soulève ici encore un rappel au règlement, peut-être en tant que sénatrice—nous devrions encourager les députés à faire preuve d'un peu plus de vigilance quant à renseigner les gens de leur circonscription au sujet de ces audiences, car...

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): Je pense que nous devrions encourager tout le monde.

La sénatrice Anne Cools: La Chambre des communes surtout. Merci.

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): Merci, membres du comité. Merci beaucoup.

La sénatrice Anne Cools: Nous encourageons leur participation.

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): Merci beaucoup.

Mme Waltraud Grieger: Merci beaucoup.

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): Pendant la demi-heure qui suit, nous allons entendre trois témoins qui comparaissent à titre individuel. Il s'agit de M. Brian Vroomen, de M. Richard Boer et de M. Thomas Plesh.

La pratique que nous avons suivie pour ces comparutions à titre individuel a été d'inviter chaque intervenant à parler pendant cinq minutes, après quoi nous passons aux questions. Nous demandons aux témoins de s'en tenir à cinq minutes. Cela ne laisse pas beaucoup de temps. Soyez justes les uns envers les autres.

M. Brian Vroomen (témoigne à titre personnel): Bonjour. J'aimerais remercier le comité de m'avoir accordé cinq minutes. Je viens de Dryden, en Ontario. Je suis père divorcé et je n'ai pas la garde des enfants.

Avant de me lancer dans le vif du sujet, j'aimerais faire l'observation que voici. J'ai entendu il n'y a pas très longtemps que les chercheurs viennent tout récemment de constater, après plusieurs décennies, que la recherche cause le cancer chez les rats.

C'était censé être drôle.

M. Paul Forseth: Nous espérons que nos délibérations ne vont pas provoquer trop de bouleversements ou de consternation parmi la communauté. Notre espoir est que nos audiences correspondent à un besoin réel. Cependant, d'aucuns ont fait des déclarations politiques laissant entendre que nous ne devrions pas être en train de faire enquête dans ce domaine.

Nous ferons néanmoins de notre mieux pour garder l'esprit ouvert. Je suis pour ma part relativement convaincu que nous avons entendu une vaste gamme d'intervenants au sujet de cette question, un groupe de personnes très éclectique.

Mais allez-y, je vous prie, et je vois très bien ce que vous voulez dire.

M. Brian Vroomen: Eh bien, je voulais mentionner au tout début que bien que je ne sache pas clairement quel genre de résultats ou de changements viendront par suite de ces audiences du comité, j'ose espérer qu'avec la recherche qui est en train d'être faite ici, mes enfants et moi-même serons mieux servis que les rats.

Cela étant dit, j'imagine que vous avez tous une copie de la lettre que j'ai écrite à l'honorable Allan Rock. J'ai écrit que... La lettre n'est pas datée, mais c'était une réponse à la recommandation qu'il faisait, et je dois avouer que cela m'a beaucoup surpris. Si je n'avais pas reçu ce fax des Fathers in Search of Justice, je n'aurais même pas su quels genres de changements Allan Rock était en train de proposer, changements qui allaient avoir un très fort impact sur mes enfants et moi-même.

• 1045

Si je suis ici devant vous ce n'est pas pour répéter ce que vous avez déjà entendu de la part d'autres groupes, comme les Fathers in Search of Justice. Je suis d'accord avec eux sur bon nombre de leurs déclarations, surtout après avoir vécu ce que j'ai vécu. Je suis arrivé juste à temps pour entendre la fin de la vieille histoire sur les abus commis par le conjoint, et je ne pensais pas que l'objet du comité était d'écouter un père qui commence à en avoir assez d'entendre parler de violence conjugale à l'égard de la conjointe et d'agression sexuelle, car je regarde en arrière et je pense...

Je vis à la campagne et j'étais en voiture, un jour, en route pour la maison. Il y avait un panneau qui parlait de la semaine contre l'agression des femmes et j'ai entendu un policier à la radio déclarer que c'était inacceptable que votre mari abuse de vous sexuellement, émotionnellement ou physiquement. Je suis de cet avis. Ce que je n'approuve pas c'est que c'était le mari qui était mentionné. Il semble que nous vivions dans une société qui ne reconnaît pas que les hommes se font abuser physiquement, émotionnellement et sexuellement de diverses façons, mais je ne vois pas de foyers de refuge pour les hommes. Je n'en ai jamais vu. Il semble que notre société croit que les hommes maltraitent les femmes, et je sais que cela existe, des hommes de ce genre, mais cela fonctionne également dans l'autre sens.

Après avoir entendu l'intervenante qui m'a précédé... Je n'ai rien voulu dire avant d'avoir entendu cela... mais cela m'a un petit peu énervé, car mes impôts financent étude après étude sur la violence à l'égard des femmes et je n'en ai encore jamais vu une qui se penche sur la situation des hommes. Je vais voir ce que je peux y faire.

Comme je l'ai dit, j'ai écrit une lettre et j'en ai envoyé une copie au comité, et c'est pourquoi je suis ici. La plupart des points que j'y soulève vous ont sans doute déjà été exposés par d'autres groupes, comme par exemple les Fathers in Search of Justice.

Je vais donc tout simplement faire un bref résumé de certaines des recommandations que j'ai faites, la première étant que bien qu'on exige que je fasse des paiements de soutien... Je paie 1 000 $ par mois à titre de soutien, et je n'ai aucun problème avec cela. Même en vertu des nouvelles règles, je pourrais sans doute payer moins, mais je tiens à subvenir aux besoins de mes enfants. Je suis un père aimant. Je tiens à ce que mes enfants aient un soutien.

Je suis tout à fait responsable du versement de ces paiements. D'ailleurs, la semaine dernière, le Receveur général a décidé de puiser dans mon compte en banque pour y prendre de l'argent que je devais toujours pour des dettes d'affaires contractées pour le compte de ma femme, et pour lesquelles des conditions de remboursement étaient déjà en place, mais c'est là une autre histoire. Le bénéficiaire des paiements n'a quant à lui aucun compte à rendre quant à l'endroit où sont versés les paiements de soutien ou à la façon dont cet argent est utilisé.

J'ai eu mes enfants pendant deux mois l'été dernier. J'ai maintenu mes paiements de soutien, mais nous avions acheté un vélo pour les enfants et ma femme me devait 50 $ pour cela. Elle n'avait pas les moyens de me payer. Il lui a fallu attendre de recevoir le chèque de soutien suivant.

Il n'y a aucune reddition de comptes. Mais moi, je dois rendre des comptes, même si je ne vois aucune reddition de comptes en face. Comment l'argent est-il dépensé? Je ne demande pas. Je ne l'embête pas, je ne l'interroge pas, mais je suis ici devant vous et cela ma fait mal. Cela me fait vraiment mal. Lorsque je vois la vigueur avec laquelle on s'attaque au parent qui n'a pas la garde, typiquement le père, cela me fâche que l'on n'use pas de la même vigueur à l'endroit de l'autre personne.

En passant, lorsque mon épouse est partie, elle est partie. J'ai reçu un appel téléphonique de quelqu'un qui m'a dit: vous feriez mieux de vous asseoir, votre femme vient de vous quitter. J'ai eu très peur. J'ai deux jeunes fils. Le plus petit n'avait qu'un an à l'époque. Le plus vieux avait environ quatre ans. Elle est d'abord venue à Winnipeg, et d'ici elle est partie pour Swan River, qui se trouve à environ 800 kilomètres de là où je vis. J'ai parlé à mon avocat. Je ne sais pas ce que cela m'aurait coûté en frais d'avocat pour essayer de faire en sorte qu'ils restent plus près de moi, mais je n'avais presqu'aucun espoir. C'était la catastrophe pour moi, émotionnellement et financièrement. Il m'a fallu prendre des décisions. Je n'ai pu voir mes enfants qu'après avoir signé une entente de séparation provisoire.

Elle m'a ensuite dit: «bien sûr que tu peux les voir, une fois qu'on aura cette accord de séparation provisoire et que je saurai que j'ai la garde absolue». Les gens me disaient de ne pas le faire, mais je voulais voir mes enfants, alors j'ai signé.

• 1050

Je suis un père qui adore ses enfants. Je suis censé voir mes enfants pendant environ deux mois l'été, et en général, à l'automne, je suis censé les voir pendant une ou deux semaines. L'an dernier, j'étais censé les voir deux fois. Une fois, ça ne s'est pas passé, parce que pour une quelconque raison mon ex-femme n'est pas venue à Winnipeg, qui est l'endroit où nous nous retrouvons. J'étais censé les avoir avant Noël. Nous nous étions entendus sur la date. Notre accord parle de «dates mutuellement acceptables». J'étais donc censé les voir avant Noël. Nous nous étions entendus sur la date deux semaines à l'avance. Deux jours avant la date à laquelle j'étais censé aller les chercher, elle a changé d'avis.

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): Monsieur Vroomen, cela m'ennuie beaucoup de vous interrompre, mais vous avez déjà pris cinq minutes. Pourriez-vous, je vous prie, en arriver à vos recommandations?

M. Brian Vroomen: D'accord. Je fais des recommandations dans ma lettre. Je voulais tout simplement que le comité voie quelqu'un qui aime ses enfants, qui ne bat pas sa femme, qui ne l'a jamais fait, qui n'a pas abusé d'elle et pour qui ses enfants comptent beaucoup.

Aimeriez-vous que je répète mes recommandations ou bien que je m'arrête là?

M. Paul Forseth: C'est très bien.

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): Très bien. Merci beaucoup.

Monsieur Boer.

M. Richard A. Boer (témoigne à titre personnel): Mesdames et messieurs, j'aimerais vous remercier de l'occasion qui m'est ici donné de vous parler au nom de parents de Thunder Bay qui n'ont pas la garde de leurs enfants.

Je suis honoré et attristé par la nécessité d'être ici devant vous. Je suis honoré d'être ici car j'aurai ainsi l'occasion de peut-être changer un petit quelque chose dans le domaine des pensions alimentaires et des droits de visite, mais je suis triste à l'idée de devoir être ici, car il est triste qu'il faille que cette organisation existe. Cela fait ressortir qu'il y a déjà un déséquilibre et des inégalités dans le système.

Étant donné que je ne dispose que de cinq minutes et que ce que j'ai devant moi demanderait plus de cinq minutes à vous lire, je vais tout simplement vous résumer très rapidement ce que j'ai ici.

Lundi dernier, notre organisation, qui s'appelle Thunder Bay Fathers, s'est réunie pour la toute première fois. Les réactions ont été très positives de la part de la communauté de Thunder Bay et du nord-ouest de l'Ontario. J'ai été choqué et abasourdi par ce qui s'est produit lors de la première réunion. Parmi les 14 personnes qui s'y sont présentées, deux étaient des femmes, trois étaient tout nouvellement divorcées et les autres luttaient depuis longtemps dans les cours de divorce.

Les femmes étaient les épouses de pères qui n'avaient pas la garde de leurs enfants, et je pense que leur histoire était tout aussi triste que celle que les pères avaient à raconter.

Ce qui m'a le plus bouleversé est que parmi les 14 membres qui étaient là, trois pères pleuraient ouvertement, non pas parce qu'il leur fallait verser des pensions alimentaires pour enfants, mais parce qu'ils n'arrivaient pas à voir leurs enfants. L'un d'eux n'arrivait pas à les voir du simple fait qu'il avait été accusé d'avoir sexuellement agressé sa fille, alors que cela ne c'était jamais produit. Il s'est battu devant les tribunaux pendant plusieurs mois et rien n'a jamais été prouvé, mais il en porte toujours le stigmate. Il se promène sous le nuage de l'étiquette «agresseur sexuel d'enfants». Deux autres avaient été accusés de violence physique à l'endroit de leur femme et de leurs enfants; là encore, rien n'a été prouvé. Ces hommes ne reverront jamais leurs enfants.

Oh oui, ces pères, ils verront leurs enfants quatre jours par mois, et cela va leur coûter entre 500 $ et 1 000 $ par mois de les voir. Ces pères n'auront même pas la possibilité d'essayer d'établir des relations profondes avec leurs enfants. Ces pères n'auront même pas de mot à dire sur la coupe de cheveux de leurs filles.

Ces hommes sont blessés; ces hommes ont mal. Ces hommes sont catastrophés par ce qui arrive à leurs enfants dans ces autres foyers, mais ils ne peuvent rien y faire.

Il y a un père dont je vous parle dans le texte que vous avez devant vous et dont la fille a presque chaque jour pendant sept ans été victime d'abus. Pendant sept ans, cette fille a été battue et maltraitée émotionnellement. Les gens des services d'aide à l'enfance étaient au courant, les tribunaux étaient au courant, tout le monde était au courant, mais la seule personne qui essayait d'aider cette fille était son père, et il a fallu sept ans avant que cette fillette ne soit finalement placée chez son père. Il a finalement réussi, il y a trois ans, à obtenir la garde de cet enfant. La fille a toujours des cauchemars au sujet de ce qui s'est passé pendant ces sept ans. Je veux savoir pourquoi il a fallu que cela arrive. Je ne parle plus ici du père, je parle des enfants.

• 1055

Un certain nombre de pères qui étaient présents à cette réunion ont maintenant la garde de leurs enfants. Ces enfants sont maintenant âgés de 13, 14 ou 15 ans. Il y a ici trois pères dans ce cas. Ils ont leurs enfants à l'heure actuelle car les mères en avaient assez de s'en occuper. Ces mères ont perdu le contrôle. Elles ont mal fait leur travail et maintenant le père, qui était incompétent auparavant, doit prendre les choses en mains.

Il y a un père dont le fils... je vais vous citer directement ses propos. Ces mots ne sont pas de moi. Un père, donc, est venu me voir et m'a dit qu'il avait obtenu la garde de son enfant parce que sa mère ne pouvait plus s'en occuper. Le fils a demandé à son père: «Pourquoi n'as-tu pas résisté face à cette chienne?» Ces mots ne sont pas de moi, ces mots sont ceux d'un garçon de 12 ans qui ne comprenait pas pourquoi son père était parti—et son père n'était pas parti. Il ne comprenait pas pourquoi son père ne voulait pas de lui dans la maison—mais c'était tout le contraire. Ce père avait dépensé plus de 100 000 $ en frais judiciaires, avait perdu sa maison et tout le reste, et maintenant il habite un appartement d'une chambre et son fils dort sur le canapé.

Il y a beaucoup de cas semblables à Thunder Bay.

Je connais un père qui a un fils de trois ans qui avait été gravement battu avec une cuillère en bois «par ma maman», pour citer les propos du garçon. Cet enfant avait des bleus du bas de son cou jusqu'à l'arrière de ses genoux. Le médecin a dit qu'il s'agissait d'un grave cas de violence contre un enfant et il a appelé le service d'aide à l'enfance, qui a envoyé un travailleur social interroger la mère sur ce qui s'était passé. Celle-ci a dit qu'il était tombé d'une charrette. L'enfant n'avait pas de bleus sur ses coudes, ni de bosses sur l'arrière de sa tête. Il n'avait de bosses que dans le creux de son dos, où il n'y aurait pas eu de bleus s'il était tombé d'une charrette.

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): Monsieur Boer, j'hésite à vous interrompre, mais la période de temps prévue pour vous trois est limitée. Vous avez utilisé plus de cinq minutes, alors vous pourriez peut-être nous soumettre une recommandation?

M. Richard Boer: J'en ai quelques petites ici.

De mon point de vue, les Fathers of Thunder Bay veulent un minimum en matière de garde partagée. Nous ne voulons pas tout simplement quatre jours par mois avec nos enfants. Nous voulons voir rétablis dans notre société des valeurs familiales, des valeurs morales et un code d'éthique. Je mentionne cela car vous autres avez le pouvoir de changer les choses et de rétablir dans notre société un code d'éthique.

Nous voulons la garde partagée de nos enfants, nous voulons la possibilité d'élever nos enfants et nous voulons la possibilité d'avoir une relation avec nos enfants. Nous voulons que les mères soient tenues de rendre compte de la façon dont elles dépensent l'argent qu'elles reçoivent car, dans mon cas, et dans le cas du monsieur assis à côté de moi, cette reddition de comptes n'existe pas. Les Fathers of Thunder Bay veulent que soit aboli le système de soutien, un point c'est tout. Ils veulent la garde partagée: pendant que les enfants sont avec la mère, celle-ci est financièrement responsable des enfants; lorsque les enfants sont chez moi, moi je serai responsable de mes enfants.

À moins que je ne sois accusé d'avoir commis des abus, et que cela soit prouvé, ce qui dans mon cas...

Le sénateur Duncan Jessiman: Cela a-t-il été prouvé?

M. Richard Boer: Non, cela n'a pas été prouvé. Dans mon cas, mon ex-femme est allée au palais de justice et au refuge et elle a dit que j'avais commis des abus physiques à l'égard d'elle et de cet enfant.

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): Si vous allez parler de quelque chose de très précis comme cela, il nous faudra le numéro de dossier, le lieu...

M. Richard Boer: Le seul numéro de dossier que je puisse vous donner maintenant est le numéro de dossier aux services de soutien à la famille. Je n'a pas mon propre numéro de dossier . J'ai laissé cela à la maison.

Le coprésident (M. Roger Gallaway (Sarnia—Lambton, Lib.)): Il me faut le nom de l'affaire. Quel est votre nom au complet?

M. Richard Boer: Je m'appelle Richard Boer.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): À quelle date ce procès a-t-il débuté?

M. Richard Boer: Il n'y a jamais eu de procès.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Quand avez-vous pour la première fois comparu au tribunal? Vous rappelez-vous la date?

M. Richard Boer: J'ai comparu environ six mois après qu'elle soit partie.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Et quand était-ce?

M. Richard Boer: Je m'excuse, je ne savais pas qu'il allait me falloir fournir ces renseignements. Je ne les ai pas avec moi.

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): Laissez cela de côté. Passez maintenant aux recommandations, je vous prie, sans les références personnelles.

• 1100

M. Richard Boer: En gros, nous voulons supprimer le divorce sans égard aux tords et nous voulons la reddition de comptes. Nous ne voulons pas que les femmes quittent leur foyer, leur conjoint ou leur mariage, tout simplement parce qu'elles n'en ont plus envie et qu'elles veulent partir. Nous ne voulons plus de ces divorces hors-faute. Si le soutien n'est pas éliminé, nous voulons que le gouvernement et que les services de soutien à la famille examinent les nouvelles familles qui sont créées.

Lorsqu'un père se remarie et a des enfants, souvent il n'est financièrement pas en mesure d'élever ses enfants et cette famille est obligée de vivre en-dessous du seuil de bien-être minimal établi par le gouvernement, parce que le système de bien-être ne tient pas compte des pensions alimentaires. Si, donc, un père gagne 1 300 $ nets par mois et doit verser une pension de 450 $...

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): Je ne veux pas vous couper la parole, mais il nous faut réserver du temps pour M. Plesh et pour les questions. Les gens sont très nombreux à vouloir prendre la parole devant nous et il nous faut répartir le temps dont nous disposons.

M. Thomas Plesh (témoigne à titre personnel): Bonjour, mesdames et messieurs. J'aimerais remercier le comité de me donner l'occasion de raconter mon histoire. J'espère que ce que j'ai à partager aidera d'autres qui se trouveront dans une situation semblable à l'avenir.

Je m'appelle Tom Plesh et j'ai vécu un divorce très traumatisant et une bataille pour la garde et le droit de visite. Cela a infligé énormément de douleur et de souffrances à moi-même, à ma famille et à mes amis, et à mon avis, cela aura fait perdre énormément de précieux temps et de précieuses ressources au tribunal.

J'ai été confronté à nombre de problèmes.

Tout d'abord, j'ai été empêché de voir mon fils pendant une certaine période de temps parce qu'on m'a faussement accusé d'avoir commis des abus sexuels.

Deuxièmement, le processus qu'il m'a fallu suivre pour obtenir justice dans cette affaire a été long et coûteux.

Troisièmement, la procédure judiciaire a été délibérément étirée par mon ex-femme dans le but de m'imposer un tel fardeau financier que je serais obligé d'abandonner certaines de mes revendications en matière de garde et de droits de visite.

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): Voici un autre cas bien précis qui nous est cité. Il nous faut la référence, la date et...

M. Thomas Plesh: C'était Plesh c. Plesh. Le jugement final a été rendu à Winnipeg en 1992.

Quatrièmement, mon ex-femme a déclaré faillite afin de ne pas être tenue responsable des frais de cour, même après qu'on m'en ait accordé certains.

Voici donc une brève description de ce qui s'est passé.

Le 9 mars 1990, mon épouse m'a quitté et a pris avec elle notre fils Ryan, âgé à l'époque de trois ans et demi. On m'a autorisé à voir Ryan trois fois entre le 9 et le 30 mars: il s'agissait de deux visites en soirée de trois à quatre heures chacune et d'une visite en fin de semaine du vendredi soir au dimanche soir. Les trois fois, j'ai demandé un mot précisant les heures auxquelles Ryan était censé être ramassé et retourné au lieu de résidence de ma femme. Et j'ai fidèlement respecté les horaires et les ententes qui avaient été conclus. Sans me le dire, elle avait demandé le divorce le 8 mars 1990, soit la veille du jour où nous nous sommes véritablement séparés, lorsqu'elle a pris Ryan et vidé la maison.

Au tribunal, elle a présenté une requête de garde exclusive de notre fils. Elle a appris que je demandais moi aussi la garde exclusive, alors elle a renvoyé son premier avocat et est revenue au tribunal avec un nouvel avocat et des allégations selon lesquelles j'aurais sexuellement agressé notre fils. Ces allégations ont été appuyées par sa mère, une infirmière. Sa mère a déclaré dans un affidavit qu'elle soupçonnait qu'il y avait abus sexuels depuis six mois avant notre séparation mais qu'étant donné que nous étions toujours mariés, elle n'avait pas voulu en avertir les autorités. On ne semblait pas du tout craindre que j'agresse de nouveau notre fils les trois fois où on m'a autorisé à voir Ryan avant les comparutions devant le tribunal.

Bien que je n'aie jamais été officiellement accusé d'un quelconque crime, j'ai le sentiment d'avoir été traité par le système judiciaire comme si j'avais été coupable. On m'a tout de suite refusé tout droit de visite, mais l'ordonnance de la cour au centre de développement de l'enfance a autorisé deux visites supervisées d'une heure en juillet.

• 1105

Il a fallu attendre six à sept mois pour que Ryan soit examiné par un psychiatre. Le psychiatre était mal renseigné sur la situation et ne s'est pas occupé de l'affaire comme il l'aurait fait s'il avait été au courant de tous les faits. En dépit de cela, il n'a décelé aucun signe d'abus sexuel.

Ryan a ensuite été vu par un psychologue—le docteur Ellis—tel qu'ordonné par la cour à cause du malentendu précédent. Encore six ou sept mois se sont écoulés avant que le rapport de ce psychologue ne soit mis à la disposition de la cour. Dans ce rapport, il déclare que ses examens n'ont rien fait ressortir qui vienne appuyer une quelconque allégation d'abus. Il a recommandé que je sois autorisé à voir Ryan de façon régulière, mais ne recommandait pas que je me voie accorder la garde exclusive à cause du temps qui s'était écoulé.

Il a également recommandé que les visites soient supervisées, non pas pour protéger Ryan, mais bien pour me protéger moi contre toute allégation future. Il a d'autre part recommandé que les visites initiales durent une heure et qu'elles soient augmentées par la suite pour devenir régulières. Cependant, mon ex-femme a limité les visites à une heure, sous la surveillance de son père, et n'en a augmenté la longueur que par suite d'une ordonnance de la cour.

Pendant cet intervalle, j'ai moi-même consulté deux psychiatres et un psychologue qui ont déposé des rapports en ma faveur. Ces examens ont été subis à mon initiative—ils n'ont pas été ordonnés par la cour—ce dans le but de m'innocenter et d'accélérer le processus en matière de visites. Mon ex-femme, cependant, a fait savoir qu'elle n'était satisfaite d'aucun de ces résultats...

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): Cela m'ennuie beaucoup de vous interrompre, mais cela fait déjà plus de cinq minutes que vous parlez.

M. Thomas Plesh: Déjà?

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): Avez-vous des recommandations?

M. Thomas Plesh: D'accord.

J'aimerais que soit instauré un mécanisme de dissuasion de façon à mettre fin à l'abus du système dont j'ai moi-même été victime. Plus important encore, pour le bien des enfants et des conjoints séparés, j'aimerais que soit mis en place un système plus juste qui facilite le processus de détermination de la garde et des droits de visite. Merci.

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): Merci.

Monsieur Forseth.

M. Paul Forseth: Bienvenue.

Monsieur Brian Vroomen, vous avez déclaré avoir eu le sentiment d'avoir été presque victime de chantage. Vous avez dit avoir été placé dans une position dans laquelle vous n'alliez pouvoir avoir de contact avec vos enfants qu'une fois une entente signée. Est-ce ainsi que les choses se sont déroulées?

M. Brian Vroomen: Je me souviens d'une conversation avec elle. Elle m'a dit qu'elle voulait que les papiers financiers et d'autres soient signés afin que je puisse alors voir les enfants.

N'oubliez pas que j'étais à l'époque complète démoli. Émotionnellement et financièrement, je me portais très mal. Je voulais voir mes enfants. Je n'avais même pas eu l'occasion de leur dire au revoir.

M. Paul Forseth: Vous avez donc rempli un genre d'entente?

M. Brian Vroomen: Oui. Nous avons fait établir une entente de séparation provisoire avec un avocat.

M. Paul Forseth: D'accord. C'était avec un seul avocat, ou bien aviez-vous votre propre conseiller?

M. Brian Vroomen: J'ai obtenu des conseils auprès de... Je ne me souviens pas si je l'ai fait à l'époque, mais je suis certain que j'ai dû le faire. Mais lorsque nous avons eu le divorce, j'avais à ce moment-là un avocat.

M. Paul Forseth: D'après la description que vous avez faite de votre situation, vous avez été quelque peu pris par surprise.

M. Brian Vroomen: Oui.

M. Paul Forseth: Vous étiez émotionnellement ébranlé, et on vous avait enlevé votre enfant. Vous étiez donc dans une situation désespérée et prêt à signer une entente, n'importe quelle entente, pour pouvoir votre enfant. Avez-vous à l'époque obtenu de bons conseils indépendants? Vous vous êtes peut-être trouvé dans une situation où vous avez négocié une entente ou autre qui a établi un précédent qui a, plus tard, joué contre vous.

M. Brian Vroomen: J'ai eu des discussions avec un avocat. Je suis suffisamment intelligent pour savoir que j'aurais dû parler à un avocat, alors j'imagine que je l'ai fait. Ce que je voulais, c'était voir mes enfants. Je suppose qu'on m'a dit qu'en lui accordant la garde provisoire cela ne voulait pas forcément dire que j'allais nuire à ma propre cause lorsque j'allais plus tard demander la garde partagée, mais d'autres personnes m'avaient dit que cela pouvait arriver.

• 1110

M. Paul Forseth: Avez-vous jamais subi de procès relativement à ces accusations ou bien les choses ont-elles fini par être réglées par voie de médiation?

M. Brian Vroomen: Mon avocat a recommandé la médiation, mais elle n'en voulait pas. Cela n'a jamais abouti devant le tribunal. On ne cessait de me parler des coûts que les gens devaient payer, et je préférais dépenser mon argent sur mes enfants.

M. Paul Forseth: Il y a donc eu un arrangement négocié entre deux cabinets d'avocats, avec votre participation?

M. Brian Vroomen: Oui.

M. Paul Forseth: Très bien.

Décrivez-nous tout simplement quel genre d'arrangements vous aviez dans votre ménage en matière de garde d'enfants avant la séparation. On entend régulièrement des témoignages de familles qui étaient en train de se défaire: dans la majorité des cas, les mères ont les principales responsabilités au jour le jour quant aux soins à donner aux enfants après le divorce ou la séparation, et c'est du fait que c'est ainsi qu'étaient les choses avant l'éclatement de la famille. C'est ainsi que le couple avait organisé sa vie.

Vous pourriez peut-être nous décrire le style de vie que vous aviez pour ce qui est des soins et des arrangements relativement aux enfants, tant avant qu'après. Dressez-nous un tableau comparatif entre l'avant et l'après.

M. Brian Vroomen: Je dirige une entreprise saisonnière pour laquelle le travail est très intense du mois de janvier jusqu'au 30 avril. Après cela, je dispose de mon temps plus ou moins comme je le veux. Mon ex-épouse était intéressée par les chevaux, alors nous nous sommes installés à la campagne et nous avons acheté des chevaux. C'était son activité, et c'était saisonnier, pendant l'été.

Lorsque j'étais à la maison, donc, elle était dans l'écurie et je m'occupais des enfants. Pendant la période des impôts—je m'occupais de déclarations d'impôt—je faisais en sorte de rester à la maison pendant au moins une heure ou deux le matin afin de voir les enfants, car je savais que je n'allais rentrer à la maison qu'après minuit, voire plus tard encore. Évidemment, à l'époque, c'était elle qui était la principale fournisseuse de soins.

Pendant l'été, elle travaillait avec ses chevaux. On se rendait à des concours hippiques au Manitoba, et je m'occupais des enfants pendant qu'elle faisait son travail. Puis, à l'automne, il y avait un mélange des deux. Lorsqu'elle travaillait, je gardais les enfants. Je pouvais faire mes propres horaires.

M. Paul Forseth: D'après ce que vous avez dit, serait-il raisonnable pour moi de supposer qu'avant votre séparation vous avez eu plus de responsabilités quotidiennes et de possibilités en matière de garde d'enfants qu'après la séparation et le divorce, et que vous avez maintenant été relégué à un rôle moindre?

M. Brian Vroomen: En ce qui concerne le temps dont je dispose pour mes enfants, j'en ai tout autant, sinon plus, à l'heure actuelle, mais il se trouve qu'ils ne sont tout simplement pas avec moi.

M. Paul Forseth: D'accord.

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): Il ne nous reste que très peu de temps pour le reste des questions.

La sénatrice Cools.

M. Brian Vroomen: Puis-je disposer d'encore deux minutes?

Une chose que je n'ai pas mentionnée, et après avoir entendu les autres observations... Lorsqu'on parle de ce qui est mieux pour les enfants, mon fils aîné, qui avait quatre ans à l'époque, m'a dit quelques mois après le départ de ma femme qu'elle n'avait pas à partir si loin. C'est lui qui a dit cela. Cela est sorti de la bouche d'un enfant de quatre ans.

Au bout d'un an, elle vivait avec un autre homme qui avait deux enfants, dont un n'était pas de lui—c'était un adolescent plus âgé—et dont un autre, un garçon, avait l'âge de mon fils aîné. J'ai pensé que ce n'était pas une bonne situation pour mes enfants. Lorsqu'on parle famille, j'aime l'idée de valeurs familiales. J'aimerais qu'on ait des lois qui appuient les familles, mais ce n'est pas ce que je vois. Je vois des lois qui appuient des personnes et non pas des familles.

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): Merci.

Sénatrice Cools, soyez rapide, car nous avons une longue journée devant nous et un grand nombre de personnes à entendre.

La sénatrice Anne Cools: J'ai deux questions et je serai rapide comme l'éclair.

Monsieur Plesh, voyez-vous régulièrement vos enfants à l'heure actuelle? Les problèmes à ce niveau-là ont-ils été réglés? Pouvez-vous voir vos enfants?

M. Thomas Plesh: À l'heure actuelle, j'ai droit à une fin de semaine sur deux de 19 h le vendredi à 19 h le dimanche, et tous les mercredis de 18 h 30 à 20 h 30.

La sénatrice Anne Cools: Les problèmes ont-ils donc été réglés? Vous pouvez voir vos enfants de façon satisfaisante.

M. Thomas Plesh: Oui.

La sénatrice Anne Cools: Monsieur le président, membres du comité, on nous a saisis de beaucoup de cas de ce genre, et j'ai cité nombre de ces jugements dans différents discours que j'ai prononcés, mais dans ce cas-ci, les intéressés ont comparu devant nous. J'aimerais tout simplement déclarer, afin que cela figure au procès-verbal, qu'au Sénat, le 26 mars 1996, j'ai cité l'affaire Plesh c. Plesh. Ce monsieur s'est présenté à moi en disant que c'était de lui que j'avais parlé.

• 1115

Le juge Carr a dit ceci dans son jugement:

Le juge Carr a poursuivi en disant:

Le juge Carr fait une mise en accusation des plus mordantes. Je recommanderai que ce dossier soit examiné de plus près par notre recherchiste. Je n'ai rien d'autre à dire au sujet de cette question.

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): Merci.

La sénatrice DeWare.

La sénatrice Mabel M. DeWare (Nouveau-Brunswick, PC): J'allais demander à M. Plesh ce qui s'est passé jusqu'à la fin de... vous n'avez pas eu l'occasion de terminer. La sénatrice Cools s'en est déjà occupée.

Monsieur Boer, vous parlez aujourd'hui au nom d'un groupe de personnes. Représentez-vous une association?

M. Richard Boer: Oui, je représente les Thunder Bay Fathers. Nous sommes une organisation qui relève des Fathers for Justice. Le siège, à Toronto, m'a donné son accord pour utiliser le nom Fathers for Justice aux fins de ma comparution.

La sénatrice Mabel DeWare: Je suis heureuse que cela puisse figurer au procès-verbal.

À la fin de votre déclaration, vous avez commencé à parler d'une deuxième famille, et il nous a fallu à ce moment vous couper la parole. Cela a été porté à notre attention... le fait qu'un parent qui n'a pas la garde verse une pension alimentaire pour ses enfants et s'est entre-temps remarié, a une autre famille, et a du mal à subvenir aux besoins de celle-ci.

Nous avons entendu plusieurs cas où le père a dû se trouver un deuxième emploi ou un emploi à temps partiel pour faire vivre sa nouvelle famille. Je pense qu'il faut rappeler aux juges qu'ils doivent tenir compte du fait qu'il pourrait y avoir des familles élargies des deux côtés et qu'il serait bon d'en tenir compte lorsqu'il est question de déterminer le montant de la pension alimentaire à verser.

Auriez-vous quelque chose à dire à ce sujet?

M. Richard Boer: Je vais pour le moment m'appuyer sur ma propre expérience, car je ne voudrais pas faire intervenir là- dedans la situation financière d'autrui. Un exemple parfait est qu'à compter d'aujourd'hui, je n'ai plus d'emploi. J'ai été mis à pied. Le président de ma compagnie ma l'a annoncé il y a deux semaines. Mon père a fait un infarctus—il m'a déposé en ville—et je dois m'occuper de l'exploitation agricole familiale. Le président m'a dit que je serais mis à pied avant le 1er mai, et c'est la date d'aujourd'hui.

Il y a environ un mois et demi, j'ai reçu mon chèque de remboursement de trop-payé d'impôts, d'une valeur d'environ 2 000 $, et le service de soutien à la famille a saisi cet argent. J'avais besoin de cet argent pour faire mes paiements. Il m'a fallu 20 heures d'appels interurbains et quelques jurons dans la vingtième heure pour récupérer cet argent.

À l'heure actuelle, à cause de ces 20 heures d'appels téléphoniques, au lieu de récupérer mon chèque tout de suite, j'ai reçu un avis me disant que mes versements de pension alimentaire avaient été augmentés et que je dois payer l'équivalent d'une année complète.

La semaine dernière, j'ai dû appeler les banques et leur dire que je ne pourrai pas faire le paiement parce que j'avais perdu une semaine et demi de travail, qu'il me fallait m'occuper de mon père et de la ferme parce que mon père avait subi un infarctus. Je dois faire mon paiement hypothécaire aujourd'hui, mais mon épouse va appeler la banque pour expliquer que nous ne pouvons pas payer. Le terrain sur lequel nous avions espérer faire construire une maison est à vendre parce que nous n'avons plus les moyens de nous en occuper. Mon épouse a eu ses règles la semaine dernière. Il lui a fallu utiliser du papier hygiénique car je n'avais pas assez d'argent pour qu'on puisse acheter des serviettes hygiéniques. Voilà quelle est la situation chez moi à l'heure actuelle.

J'ai dû emprunter 200 $ pour venir ici et prendre la parole devant vous aujourd'hui. J'aurais bien voulu avoir pu m'entretenir plus longuement avec vous, car j'ai beaucoup de choses à dire. La situation financière de ma famille est à l'heure actuelle pathétique. Il y a eu de nombreux cas où j'ai communiqué avec les services de soutien à la famille pour demander de l'aide, mais je n'ai rien reçu. Je suis allé au bureau du bien-être et j'ai demandé de l'aide. Mon épouse est déjà repartie de là en pleurs, parce qu'on lui a en gros dit que c'était bien triste et bien dommage mais qu'ils n'y pouvaient rien.

Je ne reçois d'aide ni de soutien de personne. La situation dans laquelle se trouvent mon épouse et notre fille de trois ans ne compte tout simplement pas. Ces deux personnes, qui sont ma famille, sont classées comme des citoyens de deuxième classe à cause de leur relation avec moi.

• 1120

La sénatrice Mabel DeWare: Monsieur Boer, combien d'enfants de votre premier mariage soutenez-vous?

M. Richard Boer: Deux.

La sénatrice Mabel DeWare: Merci.

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): Madame Wasylycia-Leis, ce sera la dernière question pour cette séance-ci, je vous prie.

Mme Judy Wasylycia-Leis: Merci, madame la présidente. Ma première question découle des remarques liminaires de M. Vroomen. Il est important que figure au procès-verbal le fait que l'intervenante précédente, représentant la Manitoba Association of Women's Shelters, a fait des déclarations relativement importantes dans le contexte des travaux du comité, comme cela a été le cas de nombreux témoignages que le comité a recueillis un petit peu partout au pays. Ce qu'elle a dit est que tout comité qui examine les questions de garde ou de visites doit saisir la gravité de la violence conjugale et doit tenir compte de la sécurité des enfants pendant et après le divorce. J'imagine que vous seriez d'accord avec cela et je vous demanderais de nous dire ce que vous en pensez.

Deuxièmement, d'après mon interprétation du thème général des présentations faites à ce jour au comité, il semble qu'il y ait un fil conducteur. Le comité doit examiner le processus contradictoire relativement aux questions de garde et de droit de visite. Tout changement dans la Loi sur le divorce doit tenir compte des meilleurs intérêts de l'enfant, et le gouvernement a un rôle à jouer pour veiller à ce que le processus soit moins contradictoire. Je me demande si vous êtes de cet avis et si vous auriez des suggestions précises à faire dans le but de faire en sorte que le processus soit moins contradictoire.

M. Brian Vroomen: Merci. Puis-je vous appeler Judy?

Mme Judy Wasylycia-Leis: Cela me va très bien.

M. Brian Vroomen: Tout d'abord, je n'ai pas voulu dire que je ne suis pas d'accord avec cela. Je me rends compte qu'il y a une place dans la société pour des refuges du genre, car je sais qu'il y a des types qui font ce genre de choses. C'est plutôt que je voulais un partage égal du temps.

Les hommes n'en parlent pas publiquement, mais il y en a beaucoup qui sont émotionnellement, physiquement et sexuellement abusés. Cela se fait peut-être de façon différente, mais le problème existe.

Je suis tout simplement fatigué de voir que les impôts que je paie financent encore une autre étude pour savoir comment je m'y prends pour battre des femmes. J'aimerais qu'il y ait davantage d'études portant sur les hommes. Ce à quoi je voulais en venir est que dans notre société, il faudrait faire les deux. Je ne voulais pas donner l'impression que je suis contre cela; j'aimerais qu'on finisse par reconnaître que cela arrive des deux côtés, et pas juste d'un côté. Il y a des femmes qui maltraitent des hommes aussi. Je ne voudrais pas m'affubler d'une étiquette, mais je peux dire que cela a été mon cas.

En ce qui concerne votre deuxième question, au sujet du processus contradictoire, oui, je suis tout à fait de votre avis. Je suis tout à fait en faveur de ces lois visant la famille. Le processus est contradictoire. À un moment donné, mon ex-femme et moi-même avions parlé de vendre l'entreprise. Elle disait que c'était mon entreprise et que j'avais travaillé très fort. Cela m'a fait très peur car c'est ainsi que je gagnais ma vie. Puis lorsqu'elle a changé d'avocat... Malheureusement, l'entreprise était à son nom. Je la gérais, c'était mon entreprise, mais c'était à son nom.

Lorsqu'elle a changé d'avocat, elle a tout d'un coup enlevé mon nom de la procuration de signature. Et je m'étais vraiment fendu le derrière; je faisais des semaines de 90 heures. Elle a retiré l'argent du compte; elle a supprimé mon pouvoir de signature. J'ai dû la supplier pour qu'elle signe mes chèques de paye. Je n'ai jamais été payé pour pas mal d'heures que j'ai passées à travailler pour elle, et ce moins de deux mois après m'avoir dit: «Oh, tu as travaillé si fort pour monter cette entreprise».

Elle a changé d'avocat et tout d'un coup elle refusait de signer les chèques tant que son avocat ne les avait pas examinés. C'était très hostile. Je ne voulais pas dépenser d'argent sur des avocats. J'ai cédé sur beaucoup de choses; je voulais que mes enfants aient l'argent. Je me disais qu'ils finiraient par l'avoir d'une façon ou d'une autre.

Je pense qu'il devrait y avoir une période d'attente obligatoire pour que chacun se calme après une séparation. Mon épouse pensait que je n'étais pas suffisamment en forme pour prendre des décisions, mais moi je ne m'en suis rendu compte que plus tard. J'ai pris une décision que je n'aurais pas dû prendre. Même en travaillant avec un avocat... Ils font des recommandations, mais chaque avocat dira peut-être quelque chose de différent; ils ont chacun une expérience différente. Je n'étais pas du tout en mesure... Je disais oui, allons-y, n'importe quoi. Je n'avais jamais vécu cela auparavant et j'espère ne jamais avoir à le revivre.

Il devrait y avoir une période d'attente obligatoire au cours de laquelle la garde est automatiquement partagée. J'avais la garde partagée avant qu'elle ne parte, alors pourquoi faut-il que je me batte pour l'obtenir après? Je ne comprends pas.

La médiation devrait être obligatoire—non pas qu'il faille nécessairement s'en remettre à un seul juge. J'entends trop souvent dire qu'un juge aura sa propre opinion et tranchera en faveur de l'un.

J'aimerais qu'il y ait un groupe de médiation, composé, peut-être, de quatre personnes. Ce pourrait être onéreux, mais il faut plus que deux, et probablement deux hommes et deux femmes. Il devrait dont y avoir un groupe de médiation qui rende les décisions, afin que le processus soit juste. Voilà ce que j'aimerais. J'aimerais tout simplement que ce soit juste.

• 1125

Deux années avant que cela n'arrive, je savais que ce n'était pas rose, et lorsque vous vivez dans une relation, c'est difficile. Vous voulez avoir une conversation et dire: «Écoute, ça ne marche pas». C'est la chose la plus difficile à faire.

Un samedi, j'ai dit: «Bridget, tu n'es pas bien; je ne suis pas bien. Nous devrions tous les deux être heureux. Pourquoi n'essaierions-nous pas une séparation?» Nous habitions une ferme, et j'ai dit: «C'est ici que tu veux être. Je ne peux pas sortir et donner du foin aux chevaux. C'est ici que tu veux être. J'irai en ville me prendre un appartement».

Ç'aurait été difficile, mais d'après moi, c'est cela qu'il nous fallait faire. Qu'on recommence à se fréquenter, à sortir ensemble. Voilà ce que j'ai dit, et la conversation s'est déroulée très calmement. Elle a dit: «Eh bien, c'est juste avant les impôts. Ce n'est pas une bonne période pour nous, financièrement, alors pourquoi n'attendrions-nous pas?»

Après la période des impôts, on a de l'argent, je suis de nouveau heureux, notre relation va bien, nous n'avons pas de problèmes d'argent. Voilà ce que j'avais suggéré.

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): Merci beaucoup.

Je pense qu'il nous faut maintenant vous remercier très sincèrement tous les trois.

Nous allons faire une pause de trois minutes en attendant que vous quittiez la table et que s'y installent les deux témoins suivants.

M. Richard Boer: Pourriez-vous m'accorder quelques petites secondes encore?

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): D'accord.

M. Richard Boer: J'ai ici un dépliant. Je n'en ai qu'un exemplaire, mais j'aimerais que vous l'ayez.

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): Remettez-le au greffier.

M. Richard Boer: Ceci est un «dépliant sur les techniques de combat déloyal», et cela a été remis à un de mes clients dont la conjointe a participé à des séances de consultation familiale. Ces séances de consultation avaient pour objet de remettre la famille d'aplomb. Le mari avait reçu des conseils sur ce qu'il lui fallait faire pour être un bon mari et un bon père, et elle, elle avait reçu ce dépliant sur les sales tours à jouer à l'autre.

Je pensais qu'il serait bon que vous soyez au courant.

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): Très bien. Merci.

Les deux groupes que nous allons maintenant entendre sont New Vocal Man Inc., avec Joyce Owens, secrétaire; et Men's Equalization Inc., représenté par M. Roger Woloshyn.

Madame Owens, auriez-vous l'obligeance de commercer.

Mme Joyce Owens (secrétaire, New Vocal Man Inc.): Premièrement, je remercie le comité pour l'honneur et le plaisir que j'ai à comparaître ici devant lui au nom de New Vocal Man Inc. J'ai ici un résumé de la situation des plus de 500 familles avec lesquelles nous avons travaillé.

La question de la garde suite à une séparation est en règle générale décidée de façon unanime lorsque l'un des conjoints quitte le foyer. De nombreux parents qui ont la garde, en règle générale des femmes, et qui pensent avoir été traités injustement pensent que c'est le moment pour eux de se rattraper pour ces torts, imaginaires ou autres, dont ils auraient été victimes. Ces femmes sont encouragées par les avocats à se rendre dans des refuges où l'on renforce et alimente leur impression que ces prétendus torts ont été commis. Les hommes n'ont en général pas d'abri pour les encourager dans le même sens relativement à des torts, imaginaires ou autres, mais ils trouvent du réconfort auprès de leur famille et d'amis, comme c'est le cas des femmes.

La garde, après le divorce, est en règle générale accordée aux femmes parce que les juges pensent, à tort, que les femmes, ayant donné la vie à leurs enfants, ont à coeur les meilleurs intérêts de ceux-ci. C'est faux. Dans bien des cas, cela donne aux parents qui ont la garde le courage d'être vindicatifs et malicieux en invoquant ces abus fictifs qui sont censés avoir été commis.

De nombreux parents qui ont la garde et qui ne veulent pas que l'autre parent demande la garde sont encouragés par les avocats à alléguer des abus plus haineux, le plus courant étant l'abus sexuel. Cela n'étant pas suffisant, les femmes sont encouragées à faire appel à des thérapeutes féministes, dans tous les cas où cela est possible, dans le but de confirmer et de prouver les allégations .

Le droit de visite suite à une séparation n'est en règle générale pas encouragé, à moins que le parent qui n'a pas la garde y tienne beaucoup et insiste sur son droit. Le parent qui a la garde tient maintenant le haut du pavé et, dans la plupart des cas, utilise les enfants comme monnaie d'échange dans le seul but de rendre difficiles et désagréables les visites, dans l'espoir que celles-ci soient, au moins provisoirement, abandonnées.

• 1130

Les parents qui n'ont pas la garde sont souvent conseillés par des avocats qui leur disent que ces questions seront réglées avec le divorce et qu'il ne faut pour l'instant pas pousser trop fort. Ainsi, les parents qui n'ont pas la garde se trouvent dans ce qui semble, dans bien des cas, être un vide sans fin.

Les visites suite au divorce sont rendues extrêmement désagréables et difficiles pour les parents qui n'ont pas la garde ainsi que pour les enfants, ce dans l'espoir que le parent laissera tomber. Si le parent qui n'a pas la garde insiste sur l'exercice de son droit de visite, alors le chemin est truffé d'obstacles épouvantables.

De fausses allégations, surtout sur des comportements sexuels, seront utilisées pour rendre les visites impossibles pendant au moins six mois à un an. Si l'affaire s'étire devant le tribunal, le parent qui n'a pas la garde a l'impression de vivre toute une vie avant de pouvoir revoir ses enfants... et le parent qui a la garde déménagera souvent pour s'installer très très loin, ce qui rend l'exercice des droits de visite très coûteux, et même, dans certains cas, impossible.

Les parents qui ont la garde et qui présentent les traits de caractère requis sont encouragés par les conseillers juridiques à faire appel à des thérapeutes féministes qui poussent à la déposition d'allégations négatives et dommageables, tout cela aux dépens des enfants et du parent qui n'a pas la garde.

Le parent qui n'a pas la garde est souvent celui qui serait le mieux en mesure d'élever les enfants et qui a à coeur les intérêts des enfants.

Le droit des enfants et du parent qui n'a pas la garde de se connaître n'est ni respecté ni encouragé. Notre système contradictoire dans le domaine des questions familiales favorise la malhonnêteté, le désaccord, la malice, la vengeance et tout ce qui peut saper les sentiments d'amour, d'amitié et de générosité que les enfants pouvaient avoir à l'égard du parent qui n'a pas la garde, et vice-versa.

Tout cela est fait dans l'intérêt des enfants, à un coût énorme pour le parent qui n'a pas la garde, un coût dont les ramifications sont en général très lourdes sur les plans émotif, psychologique et physique. Les enfants souffrent de la même façon.

Étant donné la complexité des questions qui interviennent, nous nous excusons du fait que cette présentation paraisse incomplète et incohérente. J'aimerais ajouter que les femmes sont encouragées à se rendre dans des refuges pour femmes où on leur apprend quoi dire, comment agir et comment faire pour gagner la sympathie du juge et obtenir la garde des enfants. La plupart du temps, ces allégations d'abus—et il s'agit bien d'allégations—sont des fabrications de leur esprit. Elles n'ont pas à s'occuper de la réalité, et c'est si injuste, car ce sont les enfants qui souffrent.

Je sais qu'en ce qui me concerne, j'aurais été mieux avec mon père qu'avec ma mère. Dans notre organisation, nous luttons pour l'équité, et pour les hommes et pour les femmes, mais ce sont surtout les hommes qui se font marcher dessus.

Les femmes semblent pouvoir obtenir ce qu'elles veulent. C'est encouragé, c'est sanctionné. Et si elles se font prendre, on ne leur impose pas les mêmes peines qu'aux hommes, car elles sont censées être du sexe faible. C'est ridicule. Si elles sont prêtes à aller jusqu'à ces extrêmités, elles devraient avoir à payer de la même façon que n'importe quel homme.

Les femmes veulent l'égalité. Eh bien, qu'on ait l'égalité d'un bout à l'autre; que l'on ne se retrouve pas dans des situations où les hommes doivent payer tant et les femmes rien du tout. Elles tournent en dérision tout le système judiciaire et tout le droit de la famille.

Personnellement, j'aimerais voir...

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): Vous êtes arrivée à la fin de vos cinq minutes.

Mme Joyce Owens: Très bien. Merci.

Le sénateur Duncan Jessiman: Avez-vous des recommandations?

Mme Joyce Owens: Oui. Les avocats devraient être tenus d'être honnêtes. Les refuges pour femmes devraient voir leur financement sérieusement diminué, et je ne dis pas cela par méchanceté. Il y a des abus et, oui, il nous nous y attaquer et travailler en vue d'amener des résultats constructifs et positifs, de façon à combattre la négativité qui nous entoure et qui nuit aux familles et aux enfants. Les cicatrices durent toute une vie.

• 1135

Merci.

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): Merci.

Monsieur Woloshyn.

M. Roger Woloshyn (président, Men's Equalization Inc.): Honorables députés, honorables sénateurs, nous sommes très heureux d'être devant vous ce matin. Je suis victime des guerres du divorce. Mes enfants sont des victimes des guerres du divorce. Je suis président de Men's Equalization, au Manitoba.

Je représente 300 hommes qui sont victimes des guerres du divorce. Je parle au nom d'environ 15 000 autres hommes qui ont été illégalement arrêtés dans des guerres du divorce au Manitoba. Ils veulent que je parle également au nom de leurs enfants, bien que ni eux-mêmes ni leurs parents n'aient de droit de garde en ce qui concerne ces enfants.

Je suis certain que les honorables membres et sénateurs ont déjà entendu parler des problèmes de garde et de droits de visite que vivent des Canadiens d'un bout à l'autre du pays. Au Manitoba, nous avons un problème particulier qui vient exacerber la situation: un système judiciaire injuste, qui a un préjugé fondé sur le sexe, et qui appuie un système de soutien injuste et égoïste. Je veux parler des Services à l'enfance et à la famille, des groupes d'intervention de femmes et des refuges pour femmes.

Ce problème particulier s'appelle la politique de tolérance zéro. C'est une politique, et non pas une loi adoptée par la province du Manitoba, en vertu de laquelle des personnes en situation de difficultés conjugales se font arrêtées et renvoyées devant les tribunaux.

Voici comment cela fonctionne. La police reçoit un appel au sujet d'un problème conjugal. Peu importe qui a téléphoné, comme vous le comprendrez dans un instant. La police répond et se présente. Lorsque la police reçoit l'appel, ou il y a des preuves d'une agression et(ou) un témoin à l'agression alléguée, ou bien il n'y en a pas.

S'il y a des preuves et un témoin, le père est en général détenu. Des ordonnances d'interdiction de communiquer et de toucher sont alors tout de suite établies.

S'il y a des preuves et un témoin, et si la femme ne veut pas que le mari soit emmené, on l'emmène quand même en prison.

S'il n'y a ni preuve ni témoin et que la femme veut que le mari soit emmené, il est emmené.

À ce moment-là, le mariage et les chances que le père puisse jamais de nouveau être le père de ses enfants sont condamnés.

Dans tous les cas où une personne est arrêtée, il doit y avoir un procès. Très souvent, les accusations ne tiendront pas devant le tribunal car il n'y a ni preuve ni témoin. Le père est obligé d'accepter un engagement de ne pas troubler l'ordre public, et il est de ce fait coupé de ses enfants et il n'a plus qu'à leur souffler un baiser d'adieu.

S'il insiste pour obtenir un procès, les accusations sont différées et il est libre de s'exposer à une autre arrestation, selon les caprices de son ex-femme en devenir.

Les problèmes sont aggravés lorsque les Services à l'enfance et à la famille sont appelés à cause d'accusations d'attentat contre les moeurs. Et l'attentat contre les moeurs, mesdames et messieurs, est vite en train de devenir l'arme de choix des femmes, remplaçant l'agression, car cela leur donne un plus grand contrôle sur les enfants.

Lorsqu'on en arrive enfin à la procédure de divorce elle-même, les chances que le père ait une audition impartiale sont minimes et ses chances d'obtenir la garde de ses enfants sont nulles.

À ce jour, plus de 17 000 arrestations ont été faites en vertu de la politique de zéro tolérance. Dans au-delà de 15 000 cas, ce sont des hommes qui ont été arrêtés. Tous se sont faits enlever leur famille. S'il y a des enfants, ceux-ci perdent un père, une grand-mère, un grand-père et toutes sortes d'autres parents.

Si l'affaire survient en région rurale, la mère et les enfants quittent en règle générale l'exploitation familiale, qui devient alors l'objet de disputes et qui est presque invariablement perdue. L'effet sur notre société, surtout notre société rurale, est catastrophique.

Le coût du divorce épuise toutes les ressources de la famille, ensevelit le père sous les dettes et en fait à toutes fins pratiques un esclave de l'État. N'oubliez pas que c'est la province qui décide ce qu'il paiera, exige le paiement et fait intervenir les forces de l'État s'il ne s'exécute pas.

Dans mon propre cas, j'ai perdu mon permis de conduire car je n'ai pas d'emploi et je n'ai pas les moyens de verser les allocations d'entretien qui m'ont été imposées. Étant donné que je vis en région rurale, mes chances d'obtenir un emploi sans permis de conduire et même de m'occuper de mes propres affaires sont nulles. Je pense que mon passeport m'a également été retiré afin que je ne puisse pas quitter le pays.

Je suis un esclave. En tant qu'esclave, je n'ai même pas d'emploi.

Mes enfants sont à Winnipeg. Bien que j'aie un droit de visite illimité, je dois compter sur la bonne volonté d'autrui pour me faire accompagner en ville afin que je puisse voir mes enfants.

J'ai joint à ma présentation l'article le mieux écrit et le mieux fouillé qui soit sur les effets dévastateurs de la séparation et du divorce sur les enfants de notre société. Si vous voulez des chiffres, reportez-vous-y. Tous les chiffres sont là. Moi, je ne m'intéresse pas beaucoup aux chiffres. Je vous explique seulement ce que je vois et ce que je ressens dans mon coeur.

• 1140

Il est vrai que les enfants privés de leur père sont pris dans un piège qui limite leurs possibilités dans la vie et favorise une attitude moins responsable. Au Manitoba, nous connaissons le taux le plus élevé de pauvreté dans l'enfance et le plus fort pourcentage d'enfants membres de gangs, tout cela dans la foulée du taux de divorce le plus élevé au pays.

Des chiffres publiés récemment font ressortir que nous perdons des citoyens plus vite que n'importe où au pays, et nos politiciens se demandent pourquoi.

Je sais pourquoi, honorables membres du comité. Je sais pourquoi. C'est le système judiciaire qui détermine les relations entre les gens et l'État. Notre gouvernement au Manitoba est en train de détruire des familles, de priver des pères de leurs droits, d'aliéner grands-pères et grands-mères, d'acculer les hommes à l'économie souterraine et d'encourager le suicide.

L'on peut dire la même chose du gouvernement à Ottawa, qui ne connaît aucune opposition effective depuis quatre ans.

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): Monsieur Woloshyn, vous êtes arrivé à la fin. Pourriez-vous passer maintenant à vos recommandations, je vous prie.

M. Roger Woloshyn: Quel est le remède? Je pense qu'en ce qui concerne le divorce, la garde et le droit de visite, le système contradictoire ne peut pas être sauvé. Je crois qu'il nous faut réformer le système pour l'aligner sur ce que j'appelle le modèle néo-zélandais. D'aucuns parlent de médiation, mais je pense que c'est plus que de la médiation. C'est un système de justice réparatrice plutôt que de justice punitive.

Dans le modèle néo-zélandais, dans les sept jours suivant une plainte, les parties au litige sont tenues de se présenter devant un négociateur avec tous leurs amis, parents et défenseurs. On en arrive à une résolution qu'acceptent toutes les parties. Si aucune entente n'est négociée... ici au Canada, je recommanderais que les parties au litige soient tenues de verser 20 000 $ pour les frais judiciaires, de confier les enfants à l'agence de protection de l'enfance appropriée et d'aller au tribunal—essentiellement la situation que nous avons à l'heure actuelle.

Je pense qu'une adaptation du modèle néo-zélandais est la seule solution réalisable permettant de résoudre les problèmes du divorce, de la garde et du droit de visite, et ainsi de suite, avant que ne survienne un véritable conflit, et, comme effet secondaire positif, cela contiendrait l'explosion de l'industrie du divorce, une industrie qui est en train de paralyser l'économie de la province.

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): Merci beaucoup.

Le sénateur Jessiman.

Le sénateur Duncan Jessiman: Oui, merci.

Madame Owens, pourriez-vous nous expliquer ce qu'est la New Vocal Man Inc.? Je vois que vous en êtes la secrétaire. Pourriez-vous nous dire qui vous représentez et depuis combien de temps le groupe existe?

Mme Joyce Owens: Nous nous sommes incorporés en novembre 1991. Nous sommes un groupe de soutien pour les personnes accusées à tort surtout d'abus sexuels d'un genre ou d'un autre. Nous avons travaillé avec et pour plus de 500 familles.

Le sénateur Duncan Jessiman: Travaillez-vous à plein temps?

Mme Joyce Owens: Non, tout ce travail est bénévole.

Le sénateur Duncan Jessiman: Vous êtes aussi bénévole?

Mme Joyce Owens: C'est exact.

Le sénateur Duncan Jessiman: Avez-vous un bureau?

Mme Joyce Owens: Oui, c'est l'adresse de notre résidence.

Le sénateur Duncan Jessiman: Vous avez dit que depuis 1991 vous êtes intervenue pour le compte de 5 p. 100, n'est-ce pas?

Mme Joyce Owens: C'est exact.

Le sénateur Duncan Jessiman: Combien êtes-vous dans votre groupe?

Mme Joyce Owens: Nous n'avons plus de membres en tant que tels. Nous ne traitons avec les gens qu'individuellement. Par le passé, les gens ont trouvé qu'il était trop difficile d'assister aux réunions et de se souvenir de tout ce qui était arrivé. Les gouvernements bougeaient trop lentement pour changer la loi.

Le sénateur Duncan Jessiman: Si vous en êtes la secrétaire, y a-t-il d'autres administrateurs?

Mme Joyce Owens: Un président.

Le sénateur Duncan Jessiman: Qui est le président?

Mme Joyce Owens: Mon époux.

Le sénateur Duncan Jessiman: C'est donc vous et votre époux. S'agit-il de quelque chose que vous avez lancé et que vous continuez de soutenir?

Mme Joyce Owens: Oui, et nous avons également un vice-président et quelques autres membres qui sont là pour nous aider avec les décisions.

Le sénateur Duncan Jessiman: Je vois que le nom du groupe comprend le mot «Inc.». Vous avez donc une charte d'un genre ou d'un autre?

Mme Joyce Owens: Oui.

Le sénateur Duncan Jessiman: Vous devez avoir des membres. Comment vous faites-vous élire, ou bien...

Mme Joyce Owens: Nous sommes en train de changer cela. Nous sommes en train de changer cela car plusieurs personnes ont déménagé. Certaines sont tombées malades.

Le sénateur Duncan Jessiman: Comment fait-on pour devenir membre de votre organisation?

Mme Joyce Owens: En nous téléphonant et...

Le sénateur Duncan Jessiman: Avez-vous des membres à l'heure actuelle?

Mme Joyce Owens: Oui, nous en avons.

Le sénateur Duncan Jessiman: Combien? Vous vous êtes occupés de 500 familles. Combien de membres auriez-vous?

Mme Joyce Owens: Nous avons environ 25 membres à temps plein.

Le sénateur Duncan Jessiman: Ces personnes sont-elles celles qui élisent les responsables d'une année à l'autre?

Mme Joyce Owens: Oui.

Le sénateur Duncan Jessiman: J'en ai terminé avec mes questions.

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): Merci beaucoup.

Madame Dalphond-Guiral.

• 1145

Mme Madeleine Dalphond-Guiral (Laval-Centre, BQ): Merci.

Je vais poser ma question en français.

[Français]

Je vous remercie d'être ici aujourd'hui. Madame Owens, j'ai écouté votre témoignage avec beaucoup d'attention. Si je devais faire un commentaire, je dirais que ce que je ressens à la suite de vos propos, c'est que vous considérez que le système actuel est marqué au sceau de la conspiration et de la mauvaise foi. C'est l'impression que j'ai, mais je me trompe peut-être.

Je voudrais vous poser une question, et je la pose également à monsieur qui est à côté de vous. La grande majorité des divorces se règlent à l'amiable. Est-ce que vous croyez que dans cette grande majorité de divorces, il y a parfois des règlements qui sont la conséquence de pressions d'un côté ou de l'autre des parents? J'aimerais vous entendre là-dessus.

[Traduction]

Mme Joyce Owens: Oui, parents et amis exercent beaucoup de pressions sur les gens qui éprouvent des difficultés à obtenir un divorce ou la dissolution de leur mariage. Ils alimentent les arguments. C'est une mauvaise chose.

Il y a beaucoup de gens qui ne font pas confiance au système et je ne peux pas leur en vouloir, car c'est un système contradictoire. Dès qu'on est en présence d'un système contradictoire dans le cadre duquel les gens sont encouragés à alléguer des choses qui n'ont jamais eu lieu, il faut en changer. Nos enfants sont en train d'être contaminés, et nous ne pouvons pas tolérer cela. On demande aux législateurs provinciaux d'apporter des changements constructifs, et à ce jour, cela n'a pas été fait.

[Français]

Mme Madeleine Dalphond-Guiral: Avez-vous un commentaire, monsieur?

[Traduction]

M. Roger Woloshyn: Oui, je pense que les gens qui interviennent dans la situation de la famille—amis, parents, etc.—exercent bel et bien une influence. Je ne pense pas que l'on puisse séparer cette influence de la Loi sur le divorce elle-même. Je pense néanmoins que ces personnes devraient elles aussi avoir un certain mot à dire quant à la méthode de réconciliation utilisée, quelle que soit la situation, et qu'elles devraient être en mesure d'exercer de la pression positive pour garder les gens ensemble au lieu de les séparer.

On connaît l'axiome voulant que deux personnes qui travaillent ensemble sur quelque chose peuvent faire beaucoup plus que deux personnes qui travaillent séparément sur la même chose. Ici, nous avons deux personnes qui élèvent des enfants; elles sont séparées, et au lieu de travailler ensemble à la tâche d'être parents, il y a moins d'une personne qui s'occupe du problème. Le gros de leur temps n'est plus consacré aux enfants mais au rôle d'adversaire qu'elles jouent dans le contexte du divorce et de la séparation.

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): Merci.

Madame Wasylycia-Leis.

Mme Judy Wasylycia-Leis: Merci, madame la présidente.

Je pense qu'il est important de souligner, afin que cela figure au procès-verbal, qu'en ce qui concerne le témoignage des personnes qui ont parlé pour le compte des refuges ici au Manitoba et ailleurs au pays, ces refuges n'acceptent pas les femmes à moins qu'il y ait des preuves claires et solides d'abus réel et de situation où la vie est en danger. Même si une femme cherchait à entrer dans un refuge afin de poursuivre un projet de vengeance, elle ne serait pas acceptée. Nous n'avons pas suffisamment de place...

La sénatrice Anne Cools: Qui est le «nous» dont vous parlez?

Mme Judy Wasylycia-Leis: ... ou ces genres de services dans cette province ou n'importe où ailleurs dans ce pays pour que cela soit même du domaine du possible.

Je pense qu'il est important—et je poserai mes questions après cette déclaration—que nous reconnaissions la réalité d'un très grand nombre de femmes dans notre société qui se trouvent confrontées à de très graves situations d'abus. Dans toutes mes années de vie politique, je n'ai jamais parlé à une femme qui ait fait appel à un refuge sauf en tout dernier recours, en réaction à une situation menaçante et horriblement difficile.

• 1150

Est-il même possible d'avoir un système non contradictoire? Si nous diminuons la situation réelle des femmes qui vivent dans la violence conjugale en disant que c'est dans leur imagination... n'y aurait-il pas moyen d'améliorer le système sans diminuer ces réalités? Assurément, nous ne pourrons changer le système et l'améliorer que si nous ne refusons pas les faits et si nous reconnaissons les réalités auxquelles se trouvent confrontés de nombreux membres de notre société.

Mme Joyce Owens: Nous ne nions pas les faits, mais nous trouvons qu'il y a de la grossière—et je vais corriger ce que vous avez dit. Beaucoup de femmes font appel aux refuges et y sont encouragées pour apprendre comment tenir l'ex à distance, car elles ne veulent pas que l'ex ait accès aux enfants.

D'accord, nous convenons qu'il y a des cas d'abus, mais nous connaissons également le cas de femmes qui sont venues nous voir avec leur conjoint, qui sont allées à des refuges parce qu'elles voulaient se reposer, parce qu'il y avait des problèmes de communication. Lorsqu'il y a des problèmes de communication, il survient alors toutes sortes d'autres problèmes. Les choses s'emballent à partir de là.

Des femmes sont venues nous le dire elles-mêmes, et c'est terrible lorsque ce genre de choses est encouragé et financé à même l'argent des contribuables.

Nous pouvons changer notre système de façon à ce qu'il soit productif, constructif et positif. À l'heure actuelle, c'est l'inverse, et il n'y a aucune reddition de comptes.

Nous pensons également que si un thérapeute, travailleur social ou autre spécialiste suggère ce genre de choses, cette personne devrait être tenue tout aussi responsable. À notre avis, la situation est extrêmement grave lorsqu'une famille et des enfants sont brisés. Le mariage et la famille sont pour nous sacrés.

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): Voulez-vous intervenir à ce sujet?

M. Roger Woloshyn: Oui.

J'avais déjà pris note de la question de la députée relativement à la violence conjugale. Premièrement, permettez-moi de dire que le juge adjoint en chef du Manitoba déteste l'expression «violence familiale», car il estime qu'il s'agit là d'un oxymoron. J'apprécie cependant ce qu'a dit la députée.

Permettez-moi de vous dire, chère madame, que la violence est le problème de la société. Ce n'est pas la violence contre les femmes, c'est la violence contre tout le monde. Si vous allez commencer à faire de la discrimination quant aux victimes de la violence, vous allez avoir exactement la même situation que celle que nous connaissons à l'heure actuelle.

Je n'ai aucun problème en ce qui concerne les refuges pour femmes. J'ai un problème en ce qui concerne les refuges pour femmes qui donnent aux femmes des conseils sur la façon de s'y prendre pour s'attaquer aux hommes devant les tribunaux. Cela est déjà arrivé. Nous avons dans Men's Equalization Inc. des membres du sexe féminin qui se sont excusées de ce qu'elles ont fait et de ce que les refuges leur ont fait faire. Je n'ai aucun problème en ce qui concerne les refuges pour femmes lorsque ceux-ci font ce pour quoi ils ont été conçus.

Le problème est ce système judiciaire que nous avons à l'heure actuelle: on parle de justice, mais le système ne sait pas ce pour quoi il a été conçu.

Si nous allons nous attaquer au problème de la violence conjugale, alors attaquons-nous au problème de la violence au sein de la société. Regardons de plus près les parties de lutte de la WWF, le public qui les suit et les leçons qui sont ainsi enseignées à nos jeunes. Ces jeunes gens vont un jour être parents. Si on leur apprend que des situations de conflit peuvent être réglées par la violence, c'est à la violence qu'ils vont recourir.

J'ose espérer que le comité examinera le problème de la violence dans notre société et en tiendra compte lors de l'élaboration de ses recommandations. Au lieu d'avoir un système judiciaire punitif qui s'appuie sur des situations contradictoires, pourquoi ne pas faire un essai avec un système de justice réparatrice? Nous pourrions alors avoir des refuges pour femmes, des refuges pour hommes, des endroits où les gens pourraient aller pour négocier et essayer de résoudre leurs difficultés sans violence. Nous éliminerions en même temps la violence gouvernementale qui est exercée contre les hommes.

• 1155

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): Merci. Y avait-il d'autres questions?

La sénatrice Cools.

La sénatrice Anne Cools: Oui. J'aimerais remercier les témoins d'être venus comparaître devant nous.

Jusqu'ici, dans le cadre de nos audiences publiques, on nous aura fourni des preuves très éloquentes et des témoignages très frappants faits par des femmes au sujet des injustices terribles qui existent au sein de notre société.

J'ai devant moi la déclaration d'une femme du nom de Theresa Collingridge. Cette femme a séjourné dans un refuge pour femmes appelé Osborne House, ici à Winnipeg. Tôt ce matin, j'ai obtenu confirmation qu'Osborne House est membre de l'association qui comparaît ici devant nous.

Il s'agit du récit de l'expérience vécue par cette femme dans Osborne House, et je vais vous lire un extrait de sa déclaration afin que cela figure au procès-verbal. Ce sont ses paroles à elle et non pas les miennes. Que cela soit bien clair. Elle dit:

Je vais vous lire quelques autres petits extraits. Elle dit:

Puis elle poursuit:

C'est toujours la même personne qui parle. Je poursuis:

Voilà le récit d'une femme qui a séjourné...

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): Pourriez-vous identifier votre document?

La sénatrice Anne Cools: C'est ce que j'ai fait au tout début. J'ai dit que c'était une déclaration de Theresa Collingridge intitulée «Inside Osborne House».

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): Adressée à qui?

La sénatrice Anne Cools: J'ai trouvé cela sur Internet, mais cela a été déposé à Winnipeg, le 2 novembre 1996, à une réunion organisée par le groupe Men's Equalization Inc.

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): Merci beaucoup.

La sénatrice Anne Cools: Mais on m'a donné ceci en réponse aux questions et à ces deux déclarations, lorsque ces personnes ont dit être membres de ces organisations.

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): Non, non. C'est bien. Je voulais juste que cela soit identifié.

La sénatrice Anne Cools: C'est ce que j'ai fait. J'ai commencé en disant...

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): Je voulais tout simplement savoir exactement d'où cela est venu. Merci.

Nous accusons maintenant un retard d'une demi-heure, alors il me faut vous remercier très sincèrement d'être venus comparaître.

Nous allons maintenant passer au groupe de témoins suivant. Comparaîtront à tour de rôle à titre individuel Ellana Ronald, David Hems et Michael Catling.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): M. Steele va-t-il lui aussi prendre la parole?

Mme Ellana Ronald (témoigne à titre personnel): Oui.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Vous disposez tous les deux de cinq minutes.

Mme Ellana Ronald: C'est exact.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Vous vous partagez le temps entre vous, alors allez-y, je vous prie.

• 1200

Mme Ellana Ronald: Mesdames et messieurs les membres du comité, mon mari et moi-même aimerions vous remercier de nous donner ainsi la possibilité de contribuer à cet examen historique de la garde et du droit de visite des enfants au Canada.

Nous sommes des grands-parents qui avons failli être complètement coupés de la vie de trois petits-enfants lorsque les parents de ces enfants ont divorcé en 1995. Cela a presque été réalisé lorsque la mère de ces enfants est entrée dans un refuge pour femmes et a été aidée à faire une allégation d'abus sexuel d'enfant contre leur grand-père, l'homme qui est assis à côté de moi aujourd'hui et qui prendra lui aussi la parole devant le comité.

Étant donné le temps limité dont nous disposons pour faire notre présentation, nous aimerions fournir au comité un résumé détaillé de notre affaire, rédigé par un enquêteur de la région de Winnipeg qui nous a aidés à surmonter cet événement dévastateur. Le rapport contient une étude de recherche approfondie faisant l'évaluation des méthodes d'enquête efficaces nécessaires pour examiner une allégation d'agression contre un enfant, et nous pensons que ce rapport pourrait faire une précieuse contribution aux délibérations du comité.

Madame la coprésidente, monsieur le coprésident, nous demanderions au comité d'annexer ce rapport au procès-verbal de la réunion comme s'il avait été lu.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): D'accord.

Des voix: D'accord.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Merci.

Mme Ellana Ronald: Il y a trois ans, notre famille a été presque détruite lorsque mon fils et sa femme se sont séparés et qu'une allégation d'agression sexuelle d'enfant a été portée contre mon partenaire de dix ans. Notre petite-fille était alors âgée de 4 ans et elle a déclaré à répétition que son grand-père lui avait donné des coups de couteau sur ses organes génitaux.

Lorsque ce cauchemar a commencé, nous avons compris qu'une allégation aussi sérieuse que celle-là devait faire l'objet d'une enquête et nous avons offert de nombreuses fois d'être interviewés par les enquêteurs chargés de protéger nos petits-enfants. Le comité ici réuni doit savoir que les enquêtes menées dans ce genre d'affaire sont si lamentables que les enquêteurs ne parlent même pas à l'accusé ou à une quelconque personne associée à l'accusé, à moins que celle-ci ne soit prête à dire par écrit qu'elle croit l'allégation.

Dans notre cas, non seulement mon mari et moi-même n'avons pas été interviewés, mais le père de ces enfants n'a pas été interviewé non plus et il n'a pas été autorisé à voir les enfants pendant trois mois, c'est-à-dire jusqu'à ce que l'enquête soit terminée. Peu après que notre fils ait été autorisé à voir ses enfants, il a lui aussi été accusé d'avoir attaqué sa fille en lui plantant un couteau dans le vagin.

On nous a malgré tout demandé de croire l'enfant hors de tout doute. Au-delà de nos préoccupations au sujet de nous-mêmes et de la stabilité de notre famille, ce qui nous était le plus difficile à supporter était ce que vivait notre petite-fille. Il était impossible pour nous de comprendre pourquoi les autorités n'examinaient pas ni ne questionnaient la stabilité et le passé de la mère de ces enfants.

La mère avait beaucoup de problèmes, qui avaient été évidents pour nous depuis que notre fils l'avait introduite dans nos vies. Elle disait à quiconque était prêt à l'écouter qu'elle avait été victime d'inceste aux mains de son propre père, bien que personne n'ait jamais interrogé cette famille-là. Elle a également raconté à tout le monde que sa fille d'une relation antérieure avait elle aussi été victime d'abus.

C'est maintenant mon mari qui va poursuivre la présentation.

M. Murray Steele (témoigne à titre personnel): Après 18 mois de torture émotive et financière, notre cas a fini par être renvoyé pour procédure d'examen clinique par suite de l'intervention de notre ministre des Services à la famille, Bonnie Mitchelson. Cet examen a fait ressortir que la mère affichait des symptômes de caractère paranoïaque et qu'elle était extrêmement sensible aux questions d'abus. Lorsqu'on l'a interrogée sur sa propre expérience incestueuse alléguée, il est apparu qu'elle croyait avoir été abusée in utero, c'est-à-dire pendant qu'elle était toujours dans le corps de sa mère.

L'impact de cette expérience a maintes fois failli détruire toute la famille. Pendant presque deux ans, la dépression et l'anxiété étaient nos émotions les plus courantes.

En tant qu'adultes, il est évident que nous avons été traumatisés par le processus qui semblait n'avoir aucune fin. Nous avons perdu notre confiance dans l'équité et la justice de notre propre société. Nous avons perdu notre illusion voulant que le Canada soit un pays bon et juste où les gens jouissent d'un certain nombre de droits inaliénables. Nous savons maintenant que dans le domaine du droit de la famille, l'accusé n'a aucun droit, mais nous espérons que le comité fera des recommandations pour changer cela.

Grâce à l'expérience et à la compétence fournies par l'organisation Parents Helping Parents, nous sommes arrivés à la fin de notre dure épreuve bien plus rapidement que d'autres familles qui n'ont peut-être pas eu notre chance. Nous espérons que quelque chose de bien sortira de cette horrible tragédie qui a affecté notre famille et nous tous.

• 1205

J'aimerais faire les recommandations suivantes au comité:

Premièrement, que la Loi sur le divorce soit modifiée pour inclure un paragraphe qui prévoie que lorsqu'un parent fait de fausses allégations en vue de refuser l'accès à l'autre parent, la cour accordera la garde au parent qui n'a pas porté d'accusation, à moins que ce parent-là soit lui aussi jugé inapte.

Deuxièmement, que la Loi sur le divorce soit modifiée pour inclure un paragraphe reconnaissant l'impact négatif de fausses allégations sur le bien-être des enfants; et, par ailleurs, que le fait d'assujettir un enfant à de fausses allégations soit reconnu comme étant de la maltraitance d'enfant, ce qui n'est pas différent d'abus physiques ou sexuels d'enfant.

Troisième, que la Loi sur le divorce soit modifiée pour inclure un paragraphe reconnaissant l'importance des grands-parents dans la vie des enfants du divorce et qu'une règle de grands-parents amicaux, comme celle proposée par l'honorable sénateur Duncan Jessiman, soit proposée et élaborée de façon à ce que la cour puisse prendre en compte le désir ou le refus du parent qui a la garde de permettre que soit maintenue la relation avec les grands-parents suite à un divorce dans les motifs de refus ou d'attribution de la garde des enfants.

Quatrièmement, que le comité recommande au ministère de la Justice de faire en sorte que des sanctions pénales puissent être imposées aux personnes qui font de fausses allégations d'abus. Par ailleurs, lorsque des allégations surviennent dans le cas d'une procédure de divorce, l'affaire devrait immédiatement être renvoyée pour évaluation clinique afin de vérifier si les allégations sont ou non fondées.

La dernière recommandation est que la communauté professionnelle et que les services judiciaires soient sensibilisés, au moyen de programmes d'éducation, aux dommages causés aux enfants et aux familles par toute fausse allégation. Par ailleurs, des programmes de formation efficaces devraient être élaborés en vue de renseigner juges et professionnels sur les procédures d'enquête nécessaires pour établir si une allégation est vraie ou fausse.

Mon épouse et moi-même sommes prêts à répondre à toutes vos questions. Nous remercions tous les deux les honorables membres du comité de l'occasion qui nous a été ici donnée de faire une contribution à la modification du droit de la famille dans ce pays et dans cette province. Merci beaucoup.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Merci, Monsieur Steele.

Monsieur Hems, vous avez cinq minutes.

M. David Hems (témoigne à titre personnel): J'aimerais remercier le comité de m'avoir invité, car je pense que cette question touche énormément de familles partout dans ce pays. Si je m'y intéresse, c'est à cause de ce que j'ai moi-même vécu au cours des cinq dernières années avec ma séparation et mon divorce, et les difficultés émotives, psychologiques et financières que j'ai eues à endurer dans le seul but d'essayer de continuer de jouer le rôle de père actif qui participe à la vie de son enfant.

Pendant cet intervalle, je me suis rendu compte que c'est là une chose que de nombreux parents aimants doivent endurer. Je pense que c'est un fléau pour nos enfants.

Pendant les cinq premières années et demie de la vie de ma fille, j'ai joué dans sa vie ce que je considérerais être un rôle relativement normal. Je la berçais le soir lorsqu'elle ne pouvait pas dormir. Je changeais ses couches lorsqu'elle n'était pas confortable. Je lui chantais des chansons lorsqu'elle n'était pas bien. J'utilisais toutes les formes d'interaction que je trouvais, constatant avec joie le développement d'expressions et de réactions.

Lorsque mon ex-épouse et moi-même avons entamé le processus de séparation, j'ai cru, naïvement, que puisque nous étions tous les deux des parents aimants, les responsabilités, joies et souffrances liées à la condition de parent continueraient d'être partagées. Il semblait raisonnable que parce que nous avions décidé ensemble d'amener un enfant dans ce monde, nous allions également conjointement nous engager, envers cet enfant et la société, à continuer d'assumer les mêmes responsabilités.

D'autre part, étant donné qu'en tant que parents nous étions deux personnes différentes avec des intérêts et des passions différentes, il ne semblait pas raisonnable de penser que nous voudrions voler à nos enfants la possibilité d'être exposés à ces différents intérêts et passions. Que peuvent faire de mieux, dans l'intérêt de leur enfant, deux parents aimants que de fournir à leurs enfants possibilités, perspectives et intérêts différents?

Mon expérience des cinq dernières années m'a laissé dans un état d'abasourdissement total face à la façon dont on traite nos enfants. Pendant cet intervalle, j'ai rencontré de nombreux pères divorcés ou en instance de divorce et j'ai été frappé par les ressemblances dans les enchaînements d'événements qui ont repoussé des parents à la frange de la vie de leurs enfants.

• 1210

J'ai cerné quelques-uns des problèmes que j'ai vus. Premièrement, avant un accord de séparation, qui peut déjà prendre plusieurs mois voire plusieurs années à obtenir, l'accès aux enfants peut être limité par un parent comme moyen de contrôle aux fins de l'établissement d'un précédent quant à savoir avec quel parent l'enfant va vivre. Cela peut être fait sans recours, en l'absence d'une ordonnance de la cour ou d'une entente de séparation. Les tentatives visant à obtenir ne serait-ce qu'une ordonnance provisoire peuvent demander beaucoup de temps et être très coûteuses vu les nombreuses avenues qui peuvent être empruntées pour faire traîner les choses.

Il faut également savoir que ceci a une incidence sur les possibilités pour l'enfant d'établir des relations avec sa famille élargie, qui comprend grands-parents, tantes, oncles et cousins, qui, tous, peuvent offrir soins et soutien à l'enfant.

Une fois ce précédent établi, n'importe quel accès accordé par le juge est préférable à ce qu'a eu à endurer le parent qui s'est vu refuser des droits de visite. En d'autres termes, la plupart des parents décideront qu'il est préférable de s'entendre sur une certaine formule de visite proposée dans le cadre de négociations que de continuer de vivre ce qu'ils ont eu à subir.

Les avocats ont tendance à parler alors «d'arrangements généreux en matière de visite», mais le rôle est plus celui d'un visiteur que d'un parent. En règle générale, pendant cette période, la tension a monté entre les ex-époux au point où toutes les discussions sur la garde partagée sont déjà minées. La question qui est généralement soulevée est celle de savoir comment vous allez prendre des décisions conjointes sur ce qui est préférable pour votre enfant si vous pouvez à peine vous parler. La conclusion générale a donc été que, dans l'intérêt de l'enfant, il est préférable de céder tout le pouvoir décisionnel à un seul parent, et ce sera en règle générale celui qui a maintenu le contrôle et qui a un accès limité à l'autre parent pendant la séparation.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Monsieur Hems, vous arrivez à la fin de vos cinq minutes. Pourriez-vous nous faire vos recommandations?

M. David Hems: J'y vais pour les recommandations.

Je pense qu'il devrait y avoir une présomption légale d'encadrement parental partagé avant la décision finale, afin de s'assurer que les enfants restent en contact avec les deux parents pendant cet intervalle. Et j'évite ici d'utiliser le terme «garde».

Notre première priorité dans toute séparation doit être les enfants. En intégrant le partage des biens matrimoniaux, la pension alimentaire au conjoint et la pension alimentaire pour l'enfant au même processus que la garde et le droit de visite, on crée une situation dans laquelle un parent peut utiliser l'enfant pour établir la nécessité pour lui d'avoir une part plus importante des biens et de bénéficier d'un soutien financier supérieur. En même temps, l'enfant commence à perdre l'appui psychologique et émotif que l'autre parent peut lui offrir.

Il devrait également y avoir médiation obligatoire, le médiateur ayant le droit et l'obligation de comparaître devant la cour si la médiation ne fait pas ressortir pour le juge les causes de l'échec. Dans la situation actuelle, c'est à l'avantage du parent qui contrôle les enfants de veiller à ce que le processus de médiation s'effondre. Le médiateur déclare alors qu'il n'y a aucun espoir de médiation et l'option garde partagée est abandonnée.

Lorsque l'enfant est dans une institution sociale et qu'il tombe malade ou se blesse, les deux parents devraient être automatiquement contactés. L'actuel système impose une épreuve indue au parent qui n'a pas la garde ainsi qu'aux garderies et aux écoles, qui sont placées au milieu lorsqu'elles essaient de maintenir les ratios imposés. Par exemple, un étranger qui est sur la liste comme deuxième personne à contacter pourrait venir ramasser l'enfant ou bien, si personne d'autre n'est disponible, un employé de la garderie est pris avec l'enfant, ce qui nuit au bon fonctionnement de toute la garderie.

Aucun parent ne devrait par ailleurs avoir le droit de décider unilatéralement de déplacer l'enfant d'un endroit à un autre. Le parent désireux de déménager doit être responsable de prouver pourquoi le lieu choisi serait dans le meilleur intérêt de l'enfant. Dans de nombreux cas, le parent qui a la garde déménagera sans en avertir l'autre parent. Cela mine en définitive toute possibilité d'un dialogue efficace dans le but de trouver une solution de rechange. Je pense que tout déménagement décidé de façon unilatérale témoigne d'une plus grande préoccupation du parent pour son propre bien-être que pour celui de l'enfant.

Le refus du droit de visite devrait être traité pour ce que c'est: le refus de respecter une ordonnance de la cour, au même titre que toute autre ordonnance judiciaire. À l'heure actuelle, des parents sont mis en prison et perdent leurs privilèges de citoyen s'ils refusent de se plier aux ordonnances de soutien financier. Le refus opposé à un parent de voir son enfant peut avoir de bien plus graves conséquences sur le bien-être de celui-ci. Le temps perdu, le temps qui n'a pas été passé avec l'enfant, ne peut jamais être récupéré.

• 1215

En résumé, il est important pour les enfants qu'ils voient que leurs deux parents participent à tous les aspects de leur vie. L'actuelle structure semble aller à l'encontre de cet objectif. Elle semble définir le père comme étant celui qui paie et la mère comme étant le parent qui offre l'encadrement émotif et psychologique, d'où l'établissement de paiements de soutien payables par le père et l'attribution de la garde à la mère.

L'impact de cela est énorme en ce sens que cela vole à l'enfant le soutien autre que financier qu'un père aimant peut donner. Cela maintient également le schéma qu'un si grand nombre de membres de notre société s'efforcent de changer: soit celui du père comme pourvoyeur d'argent et la mère comme pourvoyeuse de soins. Ces stéréotypes ne pourront être démantelés que lorsque nos enfants verront que les deux parents sont en mesure d'assurer tous leurs besoins, sans égard pour le sexe de l'un ou de l'autre. Il est temps de mettre fin à cela.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Très bien. Nous avons un petit peu dépassé le temps prévu. Je m'en excuse.

Monsieur Catling.

M. Michael Catling (témoigne à titre personnel): Je n'ai pas de texte préparé. J'aimerais tout simplement vous remerciez, monsieur, du fond du coeur, de m'avoir invité. C'est la première fois que je suis témoin dans quelque chose depuis ma bataille devant les tribunaux, il y a de cela cinq ans.

Je n'ai pas vu mon fils depuis cinq ans. Sa mère l'a emmené avec elle aux États-Unis. Ce que je me demande c'est pourquoi le gouvernement et les tribunaux n'écoutent pas.

Lorsque nous étions à la cour et que des documents ont été soumis au juge par les psychologues spécialisés dans l'enfance qui avaient vu mon fils parce qu'il ne voulait pas retourner chez sa mère, le juge n'a pas voulu les regarder. Les avocats mentent. Côté argent, ils vous brisent en un rien de temps. Je viens tout juste de finir de payer mes notes d'avocat. Maintenant, mon ex me poursuit pour obtenir plus d'argent et... je ne sais plus comment on appelle cela... je suis un petit peu énervé.

Ce que je veux dire c'est qu'il nous faut en tant que Canadiens écouter les enfants. Je ne vais jamais récupérer ces cinq années. Il n'y a pas assez d'argent dans le monde pour me rendre ces cinq années que j'ai perdues. Je sais comment il se sent. Je sais comment bon nombre de ces pères se sentent.

Il nous faut regarder notre pays et les enfants qui vont y grandir. Comment seront-ils si on les arrache tout simplement à leurs pères?

Je sais ce que c'est que de vivre sans père. Le mien est mort lorsque j'avais sept ans. Ils m'ont pris Jody lorsqu'il avait sept ans.

Elle téléphone et elle dit que je ne le reverrai plus jamais, et elle s'en tire indemne. Je ne sais même pas où il est aux États-Unis. Je n'en ai pas la moindre idée. Dans les papiers finaux, ils m'ont enlevé la garde partagée et ils lui ont accordé la garde exclusive. Pour quelles raisons? Je n'ai rien fait de mal. J'étais un bon père.

Cela fait cinq ans que j'essaie de comprendre ce que j'ai fait de mal. Il faudrait que les gens écoutent les pères. Je ne critique pas les femmes. Tout simplement, ces cinq années ont été des plus pénibles. Je sais que cela a été difficile pour moi de grandir pendant 30 ans sans un père. Ces cinq dernières années ont été les plus difficiles. Ne pas pouvoir tenir sa main, ne pas pouvoir le regarder marquer un but, ne pas pouvoir le voir le jour de son anniversaire. Ne pas l'avoir avec moi pour Noël—cela me fait énormément souffrir. Et tous les jours je me couche avec le même coeur brisé et je me réveille le coeur brisé.

Il nous faut écouter en tant que Canadiens et être solidaires. Vous autres sénateurs et nous, comme pays, nous devons unir nos forces et mettre fin à cela.

Ce qu'il y a de triste, c'est que ce sont les enfants qui souffrent. Je suis un adulte et je peux accepter la douleur, mais les enfants devraient avoir le choix, et ils ne l'ont pas. Il nous faut donner aux enfants des choix, la possibilité de se faire entendre.

Juges et avocats devraient se renseigner sur les antécédents des gens pour décider de ce qui est préférable pour l'enfant, et le plus triste est que personne n'arrive à s'entendre. Vous essayez de vous entendre, mais en face on ne veut pas. Ils veulent tout simplement... peu importe. Cela vous fait mal tout le temps.

J'ai du mal à parler. Je ne prétends pas être autre chose que ce que je suis. J'ai grandi et j'ai travaillé fort. J'ai accepté un handicap que j'ai maintenant. Tout ce que je veux, c'est voir mon fils. Et où puis-je aller? Je ne sais pas où aller.

Je suis allé voir mon député, et tout ce qu'il a fait c'est se gratter la tête et annoncer qu'il devait partir jouer au golf. Il ne voulait même pas m'écouter.

Alors, je vous en prie, faites quelque chose pour nous, car il est triste de vivre cinq années comme celles que je viens de vivre, et qu'est-ce qui m'attend après? Peut-être six, sept, huit, neuf, dix ans... et un jour un homme va se présenter à moi et ce sera mon fils, et je ne saurai même pas qui il est.

C'est vraiment tout ce que j'ai à dire. Je suis frustré par le système et j'aimerais bien que quelqu'un y fasse quelque chose, car j'ai mal.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Vous vous êtes très bien exprimé. Ne vous inquiétez pas pour cela.

Nous allons maintenant, comme vous le savez, passer aux questions, et le premier intervenant sera M. Forseth.

• 1220

M. Paul Forseth: Merci beaucoup.

Vous avez dit avoir accepté votre handicap. Quel est-il ce handicap?

M. Michael Catling: J'étais mécanicien-carrossier et mes genoux sont fichus. Je rentre à l'hôpital pour me faire opérer dans quelques jours, pour voir si on ne peut pas faire quelque chose pour essayer de corriger les dommages qui ont été faits pour que je puisse au moins marcher à peu près correctement. Je ne peux pas avoir de prothèse aux genoux.

M. Paul Forseth: Par conséquent, à cause d'un problème physique, vous ne pouvez plus poursuivre la carrière qui était la vôtre?

M. Michael Catling: Cela fait maintenant deux ans et demi que je ne travaille pas.

M. Paul Forseth: Très bien.

Je me demande tout simplement si les différents témoins qui ont comparu ici ce matin, vu tout ce qu'ils ont vécu, ne pourraient pas, rétrospectivement, nous donner des conseils sur le genre d'aide qui aurait peut-être été utile avant l'éclatement, avant la séparation, avant la rupture de la famille.

Y a-t-il des services qui auraient été utiles pour vous un an ou deux avant, qui auraient peut-être changé quelque chose à tout ce scénario que vous avez vécu? Étant donné votre expérience, pourriez-vous nous dire quels services de soutien, s'ils avaient été disponibles, auraient pu alléger certains des problèmes qu'il y avait au sein de l'unité familiale?

M. Michael Catling: Nous avons des médecins et des psychologues. J'ai consulté le Dr Ron Richert à Brandon au sujet de la souffrance, etc.

Je pense qu'avant de vous retrouver au tribunal, avant que quoi que ce soit du genre n'arrive, il faudrait qu'ils parlent à la mère, au père et à l'enfant, ensemble ou séparément, dans le but de déterminer ce qu'il y aurait de mieux. Dès que vous faites appel à un avocat, la guerre commence. Vous êtes au tribunal.

M. Paul Forseth: Merci. Votre témoignage correspond à un grand nombre de témoignages que nous avons entendus. Dès qu'il y a un cadre juridique, les positions s'endurcissent. Peut-être que s'il y avait un mécanisme plus souple, de médiation, ou un mécanisme de règlement extrajudiciaire de conflits, il y aurait un meilleur résultat.

Peut-être que les autres témoins pourraient également réfléchir à cela afin de me donner, rétrospectivement, des conseils à cet égard.

M. David Hems: Même si un programme ou une institution utile avait existé pendant le mariage, nous étions trop naïfs pour comprendre le processus qui avait été enclenché pour pouvoir nous en servir.

Après la séparation, la première tentative que j'ai faite a été de m'adresser directement aux services de médiation provinciaux. Je pense que ce sont là des services importants. Comme je l'ai mentionné dans ma recommandation, à cause de la nature volontaire du processus, la première chose qu'on m'a dite était que j'étais un agresseur d'enfant potentiel, et cela mit tout de suite fin au processus de médiation. Je ne l'étais pas, et il n'y avait pas la moindre preuve en ce sens, mais on a dit que j'étais potentiellement... La médiatrice ne l'a pas cru. J'ai discuté avec elle plusieurs fois par la suite, mais pour elle, c'était la preuve qu'il ne pouvait pas y avoir de médiation à cause de l'animosité.

M. Paul Forseth: Nous aussi avons entendu certains de ces témoignages. Ces genres d'accusations sont utilisés comme joker qu'on lance sur la table pour court-circuiter la possibilité de recourir à un mécanisme de règlement à l'amiable et de chercher une bonne solution au problème.

Les autres personnes à la table auraient-elles quelque chose à dire en réponse à ma question rétrospective?

M. Murray Steele: Dans l'affaire de notre fils et de notre bru, la médiation n'aurait pas fonctionné. Il existe cependant des cas où cela pourrait déboucher. Le problème, ce sont les systèmes judiciaires et les Services à l'enfance et à la famille. Cela ne va pas fonctionner pour le couple une fois que ces mécanismes interviennent et qu'il y a la tolérance zéro, et ainsi de suite; c'est comme une locomotive qui roule sur le chemin de fer. Elle emporte tout avec elle. Si le système était corrigé, alors la médiation commencerait à fonctionner, car ce serait la solution de rechange à retenir.

M. Paul Forseth: Merci beaucoup.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Merci.

Le sénateur Jessiman.

Le sénateur Duncan Jessiman: Merci.

Monsieur Catling, vous avez dit que tout de suite après votre premier divorce, c'était la garde partagée. C'était à quelle date? Pouvez-vous me donner l'année?

M. Michael Catling: C'était aux environs du 20 septembre 1990.

• 1225

Le sénateur Duncan Jessiman: Cela a été changé en 1993?

M. Michael Catling: Oui.

Le sénateur Duncan Jessiman: Y a-t-il eu une audience judiciaire au cours de laquelle on lui a donné la garde exclusive?

M. Michael Catling: Oui.

Le sénateur Duncan Jessiman: Étiez-vous présent à l'audience?

M. Michael Catling: Non, je ne pouvais pas être présent à l'audience en Ontario parce que c'était à plus de 18 heures d'ici. À l'époque, je travaillais, et je ne pouvais pas obtenir de congé.

Le sénateur Duncan Jessiman: Savez-vous si on vous a accordé des droits de visite?

M. Michael Catling: Non, parce que l'avocat que j'avais embauché y est allé. Ça lui a pris cinq minutes, après quoi il est sorti et il a dit «c'est fini». C'était tout.

Le sénateur Duncan Jessiman: Avez-vous obtenu une copie de l'ordonnance?

M. Michael Catling: Je l'ai peut-être à la maison.

Le sénateur Duncan Jessiman: Vous ne savez pas si elle dit que vous avez un droit de visite ou...

M. Michael Catling: Non, j'étais censé avoir des droits de visite.

Le sénateur Duncan Jessiman: Vous étiez censé en avoir?

M. Michael Catling: Oui, puis elle est partie pour les États-Unis avec lui...

Le sénateur Duncan Jessiman: Elle était en Ontario. Étiez-vous censé verser quelque chose pour l'entretien de l'enfant?

M. Michael Catling: Oui. Je n'ai jamais refusé cela. C'était 75 $ ou quelque chose comme cela par mois, ce qui n'était pas beaucoup. J'ai dit que ce n'était pas du tout un problème. Les avocats avaient demandé qu'elle me donne un numéro de téléphone et une adresse à laquelle je pourrais la trouver, elle en a donnés et elle a disparu.

Le sénateur Duncan Jessiman: Vous n'avez donc pas versé d'argent en vertu de cette ordonnance?

M. Michael Catling: Non. Je ne savais pas où l'envoyer.

Le sénateur Duncan Jessiman: Ils n'ont pas recouru à...

M. Michael Catling: Ils savaient où j'étais, et c'est cela qui est triste. Ils ont envoyé cela au bureau du percepteur, dans le cadre d'un des jeux auxquels ils s'adonnent. Ils n'avaient pas à faire cela. Il aurait suffit qu'ils me téléphonent et j'aurais pu commencer à payer, mais ce qu'il y a de triste c'est que...

Le sénateur Duncan Jessiman: Avez-vous payé?

M. Michael Catling: Non, parce que je ne sais pas où il est.

Le sénateur Duncan Jessiman: Ils ont mis cela au bureau du percepteur...

M. Michael Catling: Oui, quelque chose comme 1 600 $ ont tout simplement été placés là. Ce devrait être plus que cela; ce devrait être environ 2 300 $.

Le sénateur Duncan Jessiman: Je n'ai pas d'autres questions. Merci.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Madame Wasylycia-Leis.

Mme Judy Wasylycia-Leis: J'aimerais remercier tous les témoins d'être venus comparaître devant le comité aujourd'hui. Je sais que vous avez chacun votre propre histoire, mais j'aimerais vous soumettre quelles sont d'après moi les trois scènes qui ne cessent de surgir dans le cadre de nos audiences. J'aimerais savoir ce que vous en pensez. Premièrement, il faudrait qu'il y ait un processus moins contradictoire. Deuxièmement, il faudrait qu'il y ait des services de conseils obligatoires; et, troisièmement, il faudrait que soit déposé auprès du tribunal un plan exhaustif d'encadrement parental avant que le divorce ne soit accordé. J'aimerais savoir si vous auriez quelque chose à dire au sujet de ces trois scénarios qui ne cessent de surgir.

M. Murray Steele: Je conviens que ce sont là des efforts souhaitables et louables qu'il faudrait faire. Cependant, il n'en demeure pas moins qu'il faudrait modifier le système. Le système du tribunal de la famille et le problème de tolérance zéro que nous avons au Manitoba... Ces éléments fondamentaux devront être corrigés et un mécanisme de véritable médiation devra être mis en place avant que ces autres choses ne puissent fonctionner.

M. David Hems: Je conviens que ce sont là des choses tout à fait louables à entreprendre. Ma seule inquiétude est que j'ignore si ces initiatives seront réalisables tant et aussi longtemps que certains des mécanismes qui sont utilisés pour miner... Avant de s'asseoir et d'élaborer ces arrangements de partage des responsabilités parentales ou autres, certains des mécanismes qui ont été utilisés et dont on a parlé... Il est si facile de faire de fausses accusations. Certaines femmes ont été en gros entraînées pour ne participer à aucun mécanisme de médiation, car cela mènerait à des solutions novatrices qui pourraient les désavantager financièrement. Par conséquent, certaines de ces choses devraient elles aussi être rajustées en vue de mettre en oeuvre ce que vous proposez, ce qui serait, je pense, formidable.

M. Michael Catling: Je pense qu'il vous faudrait prendre une feuille vierge et tout recommencer à zéro. Le système doit être changé de fond en comble, car cela ne peut pas continuer ainsi. Ce n'est pas juste pour les gens.

Vous n'avez qu'une vie à vivre; il n'est pas nécessaire qu'elle soit misérable. Il vous faut vous asseoir et tout reprendre à zéro et poser des questions aux mères et aux pères, comme vous le faites à l'heure actuelle. Avant que les gens ne se retrouvent devant la cour et ne dépensent de l'argent qu'il n'est pas nécessaire qu'ils dépensent, il leur faudrait s'asseoir et essayer de régler les choses afin qu'il y ait moins de souffrance et que les enfants ne soient pas d'éternels blessés.

C'est à peu près tout ce que j'ai à dire.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Le sénateur Jessiman a la parole.

Le sénateur Duncan Jessiman: Monsieur Catling, où habitez-vous?

M. Michael Catling: À Brandon, au Manitoba.

Le sénateur Duncan Jessiman: Lorsque vous avez eu votre divorce, c'était à Brandon?

M. Michael Catling: Non, c'était en Ontario.

• 1230

Le sénateur Duncan Jessiman: Avez-vous déménagé à Brandon? Parce que votre femme était en Ontario.

M. Michael Catling: Ils étaient en Ontario, oui.

Le sénateur Duncan Jessiman: Les avez-vous quittés en premier?

M. Michael Catling: Non. Elle est partie avec un chauffeur de camion.

Le sénateur Duncan Jessiman: Et elle est allée où?

M. Michael Catling: Elle était toujours en Ontario. De là, elle est partie pour les États-Unis et elle a quitté un autre type.

Le sénateur Duncan Jessiman: En ce qui concerne l'ordonnance de garde exclusive et de droits de visite pour vous qu'elle a obtenue du juge, celle-ci incluait-elle une clause disant que si elle devait un jour changer de lieu de résidence, elle devait vous en avertir 30 jours...

M. Michael Catling: Oui, c'est prévu dans le texte.

Le sénateur Duncan Jessiman: Elle n'a donc pas respecté l'ordonnance.

M. Michael Catling: C'est exact.

Le sénateur Duncan Jessiman: Mais l'ordonnance prévoit cela.

M. Michael Catling: La dernière fois qu'elle a téléphoné, elle a dit que je ne le reverrai plus jamais. C'était tout. Que je ne devrais même pas les chercher, car je ne les trouverais pas. C'est pourquoi elle est partie aux États-Unis, dans un autre pays.

Le sénateur Duncan Jessiman: Mais la cour lui a ordonné de vous fournir ces renseignements.

M. Michael Catling: La cour le lui a ordonné, et bien sûr elle...

Le sénateur Duncan Jessiman: Merci.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Merci beaucoup. Nous apprécions le fait que ce sont là des détails très intimes de votre vie. Nous vous sommes très reconnaissants d'être venu ici aujourd'hui pour nous parler et pour nous aider dans notre travail.

Si vous voulez rester, c'est très bien.

Je vais maintenant faire appel au témoin suivant, Mme Susan Baragar, du cabinet d'avocats Wilder, Wilder and Langtry. Je présume que vous connaissez notre routine ici.

Mme Susan Baragar (représentante, Wilder, Wilder and Langtry): J'ai observé.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Si vous êtes prête, allez-y, je vous prie.

Mme Susan Baragar: Merci, mesdames et messieurs les membres du comité, de m'avoir permis de participer.

J'aimerais commencer par vous dire quelques mots au sujet de mes antécédents. J'ai été inscrite au barreau en 1984. Quatre-vingt-quinze pour cent de mon travail est dans le domaine du droit de la famille. Je suis également infirmière psychiatrique, alors j'ai quelques connaissances en matière de développement de l'enfant et de thérapie, et ainsi de suite, car j'ai joué le rôle de conseillère et de thérapeute.

Dans mon cabinet, je vois toutes sortes de clients et toutes sortes de situations. Je suppose que parfois, en changeant des lois, on veut trouver une solution magique qui va satisfaire tout le monde, mais je tiens à souligner que le droit de la famille, comme tout autre domaine de la vie, est incroyablement varié.

La caractéristique commune à tous mes clients est que lorsqu'ils viennent me consulter, ils sont en état de crise. Une partie énorme de leur vie s'est écroulée. Ils dépendent, à un degré variable, de cette partie de leur vie.

Il y a de ceux qui sont responsables et mûrs. Ils aiment profondément leurs enfants et ils surmontent leurs propres sentiments pour en arriver à des ententes en matière de garde et de droits de visite avec leur ex-conjoint. Parfois, il y a des petits accrochages et parfois il leur faut un petit peu d'aide, mais pas beaucoup. Ils sont en règle générale en mesure de s'occuper des problèmes qui se dressent entre eux. Inutile de dire que leurs frais d'avocat sont très limités et que leurs enfants se tirent de la situation avec un minimum de bouleversements.

Malheureusement, j'ai d'autres clients—et il suffit en fait, malheureusement, qu'un seul des parents soit déraisonnable dans une situation donnée—qui se battent et dont les enfants sont des victimes dans leur guerre. Il y a beaucoup de motifs pour le conflit, mais je suppose que le thème courant qui en ressort est que les enfants servent de pions.

Parfois, c'est une question de motivation financière. Parfois, ils sont en train de vivre leur propre deuil, ce qui comporte un gros élément de colère, et ils le font par l'intermédiaire du système judiciaire, qui n'est pas le bon endroit pour cela. Ils devraient faire appel à des conseillers qui les aident à trouver leur chemin. Souvent, je me trouve confrontée à un mur de briques lorsque j'essaie d'obtenir qu'ils aillent consulter un conseiller, car cela voudrait dire «qu'ils ont un problème». Alors ils refusent d'aller voir un conseiller pour essayer de surmonter.

J'aimerais vous parler de quatre grandes questions. Je demanderais au comité de ne pas oublier que je parle ici de généralités et non pas de cas précis. J'aimerais vous entretenir tout d'abord du processus de la cour elle-même. Je vous parlerai ensuite du rôle de l'avocat, puis, troisièmement, du rôle des conseillers, des psychologues et des psychiatres, et je traiterai, quatrièmement, des parties elles-mêmes, c'est-à-dire des hommes et des femmes qui vivent ces batailles.

• 1235

En ce qui concerne le processus judiciaire, j'aimerais examiner ce que l'on appelle les procédures provisoires. C'est un problème très vaste qui engendre de plus gros problèmes encore. Dans nos tribunaux au Manitoba, on recourt à l'affidavit.

On a un dicton dans le droit de la famille qui dit qu'il y a l'histoire du gars, l'histoire de la fille, et l'histoire de l'avocat du gars et l'histoire de l'avocat de la fille. Lorsque je prépare un affidavit, mon client vient me voir et me fournit un certain nombre de faits. J'inscris ces faits dans l'affidavit, alors il se pourrait que mon interprétation soit légèrement différente de ce qu'a en fait dit mon client. Les faits sont les mêmes, mais si vous avez un client qui vient vous voir en criant, en hurlant et en jurant, inutile de dire que cela ne va pas figurer dans l'affidavit. Au lieu de cela, ce qui sera inscrit dans l'affidavit ce sera «Je suis extrêmement fâchée». Eh bien, c'est là une impression un petit peut différente.

À ce stade-là, personne sauf les avocats ne rencontrent les parties et n'entendent ce que celles-ci ont à dire. À l'heure actuelle, la loi dit que vous préservez le statu quo dans le cadre des procédures provisoires. En réalité, il est impossible de préserver le statu quo, parce que les deux parents sont en train de se séparer. Mais en ce qui concerne la loi, c'est ce qu'on dit aux tribunaux. C'est ce que dit le droit jurisprudentiel. C'est ce qu'on leur dit qu'elles sont censées faire.

J'imagine que la raison à cela est d'essayer de maintenir autant que possible les choses comme elles sont pour les enfants jusqu'au procès, lorsque les questions seront véritablement tranchées. Le problème est qu'avec des affidavits et des procédures provisoires, la crédibilité est un gros facteur. Qui dit la vérité? On ne peut pas le déterminer.

Il peut y avoir contre-interrogatoire pour les affidavits, mais, encore une fois, ce n'est que du papier. Le juge n'entend pas les gens. C'est inefficace et c'est coûteux. Si quelqu'un a dû payer pour la transcription puis payer pour que leur avocat soit présent pendant la préparation de la transcription, vous savez que c'est extrêmement coûteux.

Puis les affaires attendent, même si vous poussez pour que les choses aillent le plus rapidement possible en vue d'en arriver au procès. Il y a de très longs délais. À l'heure actuelle, nos tribunaux fixent des dates de procès pour décembre, et ce si vous fixez une date dès aujourd'hui. Cela ne tient pas compte du délai qu'il faut prévoir pour les dates d'auditions préliminaires et les différentes motions qui interviennent dans l'intervalle.

Il faut donc énormément de temps entre le moment où vous enclenchez le processus et le procès, lorsque quelqu'un entend enfin les parties au litige. Mais lorsque vous en arrivez là, vous avez maintenant un nouveau et long statu quo, et le droit jurisprudentiel dit que vous voulez préserver le statu quo. Ce qui se passe, en gros, c'est que ce qui arrive aux auditions préparatoires, c'est vraisemblablement ce que vous allez obtenir au procès. Personne n'a même pu entendre les parties sauf les avocats, et les avocats n'entendent chacun qu'un côté de l'affaire.

Je pense donc que c'est là un gros problème en ce qui concerne le système judiciaire et la façon dont on aborde les problèmes conjugaux. Toute la procédure intérimaire est très néfaste.

En ce qui concerne le rôle des avocats, la majorité d'entre nous essayons tout simplement de gagner notre vie dans un secteur d'activité qui est très difficile. C'est un processus contradictoire et notre rôle crée des problèmes, car il y a confusion. Il y a confusion non seulement pour le client, mais également pour nous.

Nous avons dans notre système des avocats qui se sont fait dire—et dans une certaine mesure c'est ce que nous dit notre propre code déontologique—que nous devons faire avancer l'affaire d'un client avec toute l'assiduité requise, etc. Cela est inscrit dans notre code déontologique. Voilà ce que nous somme censés faire. Il y a des avocats qui regardent cela et qui disent: «Je vais faire avancer l'affaire de mon client tant et aussi longtemps que celui-ci est en mesure de me payer». Il n'enflamme pas la situation, mais il laisse le client qui est déjà enflammé profiter du système.

• 1240

Puis on a ce que j'appellerais les avocats barracudas qui, eux, enflamment le système. Je dirais qu'ils le font sans doute à des fins de gain financier. Il existe ce genre d'avocats. Ils sont plutôt rare, mais il y en a. Ils profiteront d'un client vulnérable sur le plan émotif et ils l'influenceront pour l'amener à faire toutes sortes de choses inutiles et coûteuses—les choses qu'ils font sont légales—pour faire avancer leur affaire. Comme je l'ai dit, les avocats de cette catégorie ne sont pas très nombreux, mais il y en a.

Puis il y a les juristes raisonnables qui voient leur rôle comme étant de protéger les intérêts de leurs clients, mais ils tentent également, surtout dans les coulisses, d'imposer une discipline à leurs clients. Ils font de la médiation, de la négociation, et ils voient le tribunal comme la solution de dernier recours. Ils disent à leurs clients combien cela va leur coûter et ils essaient d'envisager les choses d'un point de vue pratique mais réaliste. Lorsque vous avez quelqu'un comme cela en face vous pouvez bien des fois stopper les choses avant que la situation ne s'exacerbe.

Puis vous avez toujours des avocats qui s'emmêlent avec leurs clients. J'utilise ce terme délibérément, et je suis certaine que les membres du comité savent ce qu'il veut dire. Ils se rapprochent trop de leurs clients et perdent leur objectivité. Ils prennent ce que disent leurs clients comme parole d'évangile et ils se battent comme des anges vengeurs pour le compte de leurs clients. Les avocats et les clients s'enflamment souvent les uns les autres dans ce genre de situation. Les clients se présentent et donnent leur perception de ce qui se passe. L'avocat dit alors que cela est absolument épouvantable et il s'enclenche tout un va-et-vient. Ils perdent leur objectivité et s'enflamment les uns les autres.

Ils ne le font pas sciemment, mais c'est ce qui arrive. Il leur manque ce que j'appelle une bonne dose de scepticisme. Il leur manque la capacité de garder à l'esprit le fait qu'ils n'entendent qu'un côté de l'histoire. Surtout en droit de la famille, les gens peuvent avoir des perceptions si différentes de ce qui se passe que vous pourriez penser qu'ils vivent sur des planètes différentes. Il leur manque cette bonne dose de scepticisme. Il s'agit dans bien des cas de jeunes avocats. Il y a, en droit de la famille, beaucoup de jeunes avocats; c'est un domaine si brutal que les avocats n'y font pas long feu.

Puis il y a les avocats qui voient leur rôle comme étant celui de négociateur et de médiateur, et dans certains cas, c'est merveilleux. Malheureusement, il vous faut parfois vous battre. Il vous faut parfois aller en cour, surtout lorsqu'il y a peut-être de fausses allégations. Avec ce genre de choses, vous devez aller en cour. Ces avocats tenteront d'éviter la cour dans une telle mesure que vous aboutissez avec un statu quo qui dure très longtemps et de mauvais arrangements qui ne fonctionnent pas. Vous pouvez en fait vous trouvez en cour année après année dans le but de défaire un accord qui n'aurait sans doute jamais dû être négocié au départ, parce qu'il n'allait pas fonctionner.

J'ai même eu des cas où l'on a essayé de défaire quelque chose qui avait été négocié sept ans auparavant, et les parties se retrouvent en cour une fois par an depuis sept ans. La première fois, c'était en vertu d'une entente, car on avait dit aux parties—dans ce cas précis, c'était le père—qu'il était préférable de procéder par voie d'accord. Dans le cas auquel je pense, c'est ce qu'a fait le père. L'entente n'aurait jamais débouché dans la situation telle qu'elle existait, alors maintenant on est en train de se battre, sept années et plusieurs grosses notes d'avocat plus tard.

En ce qui concerne le rôle des conseillers et des psychologues, si une allégation sérieuse est faite, de nos jours il est presque automatique qu'il faille qu'il y ait une évaluation ou un rapport. Les rapports demandent très longtemps à obtenir. Ils coûtent extrêmement cher: le coût moyen est de 6 600 $. Dans ce genre d'affaire, il en coûtera entre 4 000 $ et 7 000 $ pour obtenir une évaluation en vue de la garde et du droit de visite. Tout cela est donc extrêmement coûteux.

• 1245

Il y a souvent des préjugés dans ces rapports, car tout dépend de l'affiliation de la personne qui prépare le rapport. Il vous faut vous demander ce sur quoi portent précisément ces rapports. Certains d'entre eux sont excellents. On vérifie auprès d'autres sources et le rapport est très bon. D'autres s'appuient tout simplement sur ce que dit l'intéressé et c'est au juge de déterminer ce qui est vrai et ce qui est faux.

Si on est en présence d'un psychologue qui se fait raconter que maman dit que papa fait ceci et cela, si le psychologue accepte simplement cela sans faire de vérification, ce qu'on retrouve dans le rapport, c'est tout simplement une répétition de l'affidavit.

J'ai même eu des cas où une personne est inscrite au registre des personnes coupables de maltraitance d'enfants et où le psychologue a recommandé que ce soit cette personne qui ait la garde des enfants. Il faut se demander ce qu'on vérifie dans ces rapports.

Malheureusement, dans le cadre de notre système judiciaire, nombre des juges prennent pour parole d'évangile ce que dit un conseiller ou un psychologue. Ils pensent que ce sont ces personnes-là qui possèdent la formation requise dans le domaine et que si le psychologue ou le conseiller dit telle ou telle chose, ce doit être vrai. Dans un certain sens, ils délèguent totalement leur pouvoir décisionnel au psychologue ou au conseiller. Or, ce sont les seuls à pouvoir vraiment entendre tout le monde ou en tout cas la majorité des faits qui peuvent être exposés en vertu de nos règles en matière de preuve. Par conséquent, si vous obtenez un mauvais rapport, vous obtenez une mauvaise décision, et cela vous aura déjà demandé bien trop de temps.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Il me faut chercher conseil auprès du comité. Vous parlez depuis 15 minutes.

Mme Susan Baragar: Je m'en excuse.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Ne vous en inquiétez pas, et vous n'avez pas à vous excuser. J'aimerais savoir si le comité souhaite que Mme Baragar continue—nous ne disposons que d'une demi-heure—ou bien si vous aimeriez commencer à poser des questions au témoin.

Le sénateur Duncan Jessiman: Monsieur le président, j'allais dire, si tout cela est par écrit...

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Je vous demande conseil.

Le sénateur Duncan Jessiman: ... on pourrait peut-être nous fournir le texte afin qu'il puisse être intégré au procès-verbal.

La sénatrice Anne Cools: Je trouve le témoignage de Mme Baragar tout à fait stupéfiant et je serai prête à sacrifier le temps qui m'aurait normalement été accordé pour poser des questions afin qu'elle puisse poursuivre.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Je pense que le sénateur Jessiman est en train de discuter de votre adjectif.

La sénatrice Anne Cools: Ah bon. Parfait. Excusez-moi.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Poursuivez, je vous prie.

Mme Susan Baragar: Je m'efforcerai d'être très concise. C'est chose difficile car c'est un domaine si vaste qu'il me faut couvrir.

Le dernier élément est celui des parties au litige. Comme je l'ai dit, elles sont en état de crise, elles sont très émotives et il y a dans notre système certains déséquilibres en matière de pouvoir. Si une partie, par exemple, bénéficie de l'aide juridique et que l'autre est en train de payer de sa poche, il y a là un énorme déséquilibre sur le plan pouvoir, car une partie peut se permettre d'aller jusqu'au bout dans le système judiciaire, et l'autre pas. Si les deux payent et que l'une a un revenu nettement supérieur à l'autre, il y a encore là déséquilibre.

À l'heure actuelle, je pense qu'il y a un déséquilibre sur le plan pouvoir quant à la facilité avec laquelle des allégations d'abus peuvent être faites. Et, aux mains d'une personne sans scrupules, ce pouvoir aura tendance à se retrouver davantage du côté des femmes.

La personne qui a les enfants et qui en obtient la garde va également avoir davantage de pouvoir. Dans notre système, en règle générale, la mère peut se présenter et dire qu'elle a été la principale pourvoyeuse de soins, et souvent cela est tout à fait vrai, mais l'on peut se retrouver dans une situation ou en vertu d'une motion provisoire elle obtiendra les enfants, auquel cas il y a déséquilibre sur le plan pouvoir parce qu'elle aura également le pouvoir de priver son conjoint des enfants.

Je ne pense pas que les femmes ou que les hommes soient de par leur nature plus méchants, mais à cause de certains déséquilibres sur le plan pouvoir qui existent au sein de notre système, les femmes peuvent plus souvent en tirer profit. Je ne dis pas que les hommes ne le feraient pas s'ils le pouvaient—je ne sais pas—mais j'ai en tout cas des clientes qui ont profité du déséquilibre sur le plan pouvoir qui existe au sein de notre système.

• 1250

J'ai également des clientes qui pensent qu'il est vraiment dans l'intérêt de leurs enfants que ceux-ci ne voient pas le père. Ils rationalisent cela et ils peuvent ensuite rationaliser n'importe quoi. Il arrive bien des fois qu'elles se convainquent elles-mêmes de leurs propres rationalisations.

D'autre part, je demanderai au comité de se rappeler que dans bien des cas, la situation financière joue également un gros rôle dans tout cela. De nombreuses femmes, après la rupture de leur mariage, comptent financièrement sur le fait d'avoir les enfants. Peut-être qu'elles n'ont pas travaillé. Pour obtenir la pension alimentaire pour les enfants—ainsi que, souvent, la pension alimentaire de conjoint—il leur faut avoir les enfants. Si elles n'ont pas les enfants, elles n'ont pas de paiements de soutien. Par conséquent, il y a cette incitation supplémentaire à faire des allégations peut-être fallacieuses, car toute leur situation financière immédiate en dépend.

En matière de changements, il faudrait, premièrement, faire quelque chose au sujet des procédures préliminaires. La seule chose à laquelle je pense est qu'il vous faut aller à des auditions. À l'heure actuelle, cela signifie que c'est beaucoup plus coûteux, car il vous faut avoir davantage de juges et il faudra sans doute qu'ils tournent presque 24 heures par jour, comme c'est le cas aux États-Unis.

Mon sentiment est le suivant: faites-le une fois, faites-le bien et faites-le vite. Si vous allez devoir aller en cour, passez deux ans à créer un statu quo qui pourrait être un mauvais statu quo n'est pas une bonne idée. Il nous faut faire examiner le dossier, et vite.

En ce qui concerne les avocats, vous ne pouvez pas changer la personnalité des gens ni faire en sorte qu'ils n'établissent pas de liens avec leurs clients, mais je pense qu'il faudrait que nos écoles de droit offrent une formation semblable à celle qui est donnée aux conseillers: par exemple, comment faire pour garder son objectivité.

Il faudrait d'autre part éliminer une certaine partie de la paperasse. Je sais que dans mon cabinet, je m'y noie et plus je dois produire de papier, plus je dois facturer. Nous l'avons fait dans le système criminel. Si c'est une affaire pénale, je peux avoir un dossier qui fait moins d'un pouce d'épaisseur, et j'ai terminé. Dans le système familial, si je dois aller en cour, j'ai plusieurs tiroirs pleins pour un seul dossier.

Pour ce qui est des conseillers et des psychologues, nous ne pouvons pas leur dire ce qu'ils ont à faire, mais nous pouvons déterminer quels rapports nous accepterons et quels rapports nous n'accepterons pas et ce qu'il leur faut faire pour soumettre un rapport à la cour. Vérifie-t-il ou non les ressources collatérales? Nous pouvons leur indiquer ce genre de choses dans les textes de loi.

Pour ce qui est des parties aux litiges, il nous faut des processus de rechange, mais je demanderais aux membres du comité de ne pas jeter le bébé avec l'eau du bain, car nous avons également besoin des tribunaux. Nous avons besoin de tous, car chaque famille est différente.

Nous avons déjà la Loi sur le divorce, qui dit que l'une des choses dont il faut tenir compte dans les décisions en matière de garde est quel parent sera le plus arrangeant côté droits de visite. Je peux vous dire qu'au Manitoba, c'est purement symbolique, si même c'est cela. Il s'agit là d'une chose sur laquelle il faudrait qu'on se penche. Nous avons déjà la loi, mais nous ne l'utilisons pas.

Il nous faut également examiner les conséquences du refus du droit de visite. Qu'allons-nous faire? C'est une question très complexe, car jeter en prison une mère ou un père qui a été le parent ayant la garde va également être néfaste pour les enfants. Leur imposer des amendes va enlever de l'argent aux enfants.

Il nous faut donc trouver une solution de rechange. La seule solution que j'aie en fait pu trouver a été de peut-être changer la garde.

Une autre chose dont il nous faut, je pense, tenir compte—et ce n'est pas le cas à l'heure actuelle—lorsqu'on examine les parents, c'est la question de savoir lequel des deux sera le mieux en mesure financièrement de subvenir aux besoins des enfants. Évidemment, cela défavorisera souvent les femmes, mais je suppose qu'à l'heure actuelle, ce que nous privilégions, c'est un système dans le cadre duquel tout le monde se retrouve dans la pauvreté.

• 1255

J'aimerais conclure en vous parlant d'une affaire dont je me suis occupée. C'était une mère qui restait à la maison et qui s'occupait des enfants. Lors de la séparation, elle a pris un peu de recul et elle a dit: «D'accord. J'ai été la principale pourvoyeuse de soins. Je sais que je peux obtenir la garde. Mais si j'obtiens la garde, étant donné son salaire à lui, il ne sera pas en mesure de me payer suffisamment pour que mes enfants aient un bon niveau de vie. Si c'est lui qui a la garde et si j'ai un droit de visite très libéral, je pourrai alors retourner travailler, construire ma carrière, et mes enfants auront l'avantage de ne pas vivre dans la pauvreté et d'être au contact et de moi et de lui. Nous nous porterons alors tous mieux que dans le cas inverse, où je vivrais dans la pauvreté, mes enfants vivraient dans la pauvreté, lui vivrait dans la pauvreté et nous serions en train de nous battre».

C'est peut-être là une chose qu'il faudrait qu'on envisage et qui ne l'est pas à l'heure actuelle.

Merci.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Merci, madame Baragar.

Monsieur Forseth.

M. Paul Forseth: Merci beaucoup.

Dans vos remarques liminaires, vous avez employé le mot «crise», et je pense que vous l'avez répété plusieurs fois par la suite. C'est donc là le thème sous-jacent, si l'on peut dire, des vies des personnes dont vous vous occupez. D'après votre description, pour eux, la réalité, c'est une crise, alors ces personnes ont manifestement fait un investissement psychologique et social énorme dans leur idéal de ce qu'est une famille, famille qu'ils perdent ou qu'ils n'ont pas eue ou qu'ils n'ont pas réalisée.

Si vous les définissez comme étant réellement en crise, il y a bien évidemment un fossé énorme entre leur situation telle qu'elles la perçoivent, et qu'elles n'aiment pas et le désir d'un bonheur en famille. Au centre de cela se trouvent leur concept de ce qu'est une famille et leurs idéaux. Si j'ai bien compris vos déclarations et votre témoignage d'aujourd'hui, ce que vous dites est que les gens apprécient réellement le concept de la famille et que lorsque cette institution fondamentale est atteinte, alors des gens partout au pays sont en crise.

Il s'agit en fait d'une grosse question pour beaucoup de gens. Nous avons entendu des témoignages sur le nombre de familles au sein de la société canadienne qui sont directement ou indirectement touchées par l'éclatement d'unités familiales.

Une autre chose qui m'est venue à l'esprit pendant que je vous écoutais aujourd'hui est que, de l'avis d'une avocate, les abus commis par des avocats, comme ceux décrits par Charles Dickens, il y a des années de cela en Angleterre, sont toujours dans le tableau aujourd'hui.

J'aimerais vous poser deux questions, et vous pourrez peut-être nous soumettre quelques recommandations. Comment en arriver de façon plus humaine à la paix, par opposition à ce que vous avez décrit comme des situations de crise pour les familles qui éclatent? Cela veut-il dire faire tout ce que nous pouvons pour que les avocats n'interviennent pas dans la crise? Voilà ma première question.

D'autre part, du point de vue juridique, comment faire pour minimiser les déséquilibres de pouvoir de façon à aider les parents à s'acquitter de leurs responsabilités envers leurs enfants? C'est là un thème que vous avez évoqué.

Vous pourriez peut-être faire quelques observations au sujet de ces deux thèmes.

Mme Susan Baragar: Comment y parvenir de façon plus humaine? Je pense qu'il devrait y avoir des programmes d'éducation obligatoires. Au Manitoba, nous avons un cours intitulé «For the Sake of the Children» (pour l'amour de nos enfants). Je ne pense pas que la médiation obligatoire soit la réponse, car j'ai des clients qui ne sont pas prêts pour la médiation. Les asseoir là revient à condamner le processus de médiation à l'échec à ce stade-là.

Cependant, je pense que l'éducation—et par là, je veux dire des cours obligatoires, car je de nombreux clients qui n'y vont pas, même lorsque je le leur dis—très tôt dans le processus pourrait, dans le cas des personnes qui s'intéressent vraiment au sort de leurs enfants mais qui se laissent emporter jusqu'à un certain point par la colère, freiner un petit peu l'emballement. Je pense donc que des cours obligatoires pourraient aider.

• 1300

Quant à l'idée de garder les avocats à l'écart, évidemment, je perdrais mon travail, mais je pense que quelqu'un d'autre ramasserait la balle. Que vous appelez la personne un avocat, un défenseur ou un conseiller, j'imagine qu'à ce stade-là il y aurait quelqu'un. Si les avocats n'étaient pas là, quelqu'un d'autre représenterait le client et demanderait à être payé. Je ne suis donc pas certaine que la réponse soit forcément de retirer les avocats de l'équation.

En ce qui concerne les déséquilibres sur le plan pouvoir, je sais que lorsqu'il y a des poursuites frivoles, la personne doit se voir opposer un refus. Je sais que la Société d'aide juridique du Manitoba, par exemple, travaille en ce sens. La Société d'aide juridique du Manitoba peut dire: «Écoutez, si vous faites cela tout simplement parce que vous êtes fâché et qu'il n'y a vraiment rien de concret ici, alors nous autres, en tant que contribuables et en tant que Société d'aide juridique du Manitoba, n'appuierons plus cela.

C'est là l'un des déséquilibres au niveau du pouvoir, mais pour ce qui est de certains des autres déséquilibres sur le plan du pouvoir—par exemple, les abus et la facilité avec laquelle on peut faire des allégations—s'il doit s'agir d'un système judiciaire, encore une fois, je pense qu'il nous faut faire en sorte d'accélérer le système. Cela allégera certains des déséquilibres sur le plan du pouvoir à ce niveau-là. Parce que faire une allégation dans un affidavit est très différent de la faire oralement en sachant que vous allez subir un contre-interrogatoire et que des témoignages contradictoires peuvent être déposés pour prouver que vous mentez. Il est très facile dans un affidavit de faire des allégations fausses ou exagérées.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Merci.

Le sénateur Jessiman.

Le sénateur Duncan Jessiman: Merci beaucoup.

Je n'ai pas trouvé votre témoignage stupéfiant, mais je l'ai certainement trouvé très constructif. J'ai trouvé qu'il était très juste.

Je suppose, mais vous me corrigerez si j'ai tort, que vous représentez dans votre travail plus de femmes que d'hommes.

Mme Susan Baragar: Non.

Le sénateur Duncan Jessiman: Plus d'hommes que de femmes?

Mme Susan Baragar: Je dirais que c'est à peu près kif kif.

Le sénateur Duncan Jessiman: Eh bien, vous avez en tout cas fait une présentation très équilibrée. J'ai été très impressionné.

Est-ce dans la pratique... ce que vous disiez? Car ne je pense pas qu'il soit vrai, en vertu de la loi, qu'une femme, pour obtenir de l'aide financière au titre d'une pension alimentaire pour les enfants, et parfois, pour obtenir une pension alimentaire de conjoint doive, comme vous le dites, s'en prendre à l'autre. Les deux choses sont différentes, tel que cela est prévu dans la loi. Vous savez cela aussi bien que quiconque. C'est très différent pour ce qui est de ce qui est requis et du traitement des deux. La pension alimentaire de conjoint est déduite des impôts, alors que l'entretien ne l'est pas.

La loi prévoit en tout cas qu'une personne puisse perdre la garde des enfants de sorte que des hommes pourraient s'en occuper... et la femme pourrait obtenir la pension alimentaire pour conjoint. Cela n'est-il pas vrai?

Mme Susan Baragar: Dans la réalité...

Le sénateur Duncan Jessiman: Non, mais c'est ce que prévoit la loi.

Mme Susan Baragar: Oui, c'est ce que prévoit la loi. Cependant, si vous prenez la jurisprudence, et l'affaire Mogue en particulier...

Le sénateur Duncan Jessiman: Mogue?

Mme Susan Baragar: C'est une affaire qui a été renvoyée devant la Cour suprême du Canada. Cela avait débuté dans les tribunaux du Manitoba. C'est la grande affaire en matière de pensions alimentaires de conjoint.

Dans cette affaire, le critère pour être admissible à une pension alimentaire est le fait qu'un conjoint ait été ou non économiquement défavorisé par la rupture du mariage. Si vous avez des enfants, vous avez un désavantage économique continu et vous obtenez donc la pension alimentaire.

Le sénateur Duncan Jessiman: Mais vous dites que la cour a dit que si vous n'obtenez pas les enfants, si vous vivez seul, si vous n'avez pas d'emploi, si le mari a des millions et...

Mme Susan Baragar: Non, il peut y avoir des cas où l'homme a l'enfant et où vous pouvez toujours obtenir une pension alimentaire, mais ce qui se passe souvent c'est que si l'homme a les enfants, il ne paiera pas la pension alimentaire pour enfant et c'est cela qui constitue en gros la pension alimentaire de conjoint.

Le sénateur Duncan Jessiman: Cela m'amène à ma question suivante. Ce que vous me dites c'est que, dans la pratique, si la femme cède les enfants, si c'est le mari qui s'en occupe et qu'elle part travailler—et vous avez dit qu'elle s'en tirerait mieux—en vertu de l'actuel système, elle doit payer, quelle que soit sa richesse à lui. Si elle part travailler et qu'elle gagne 30 000 $ par an, même si lui a un million de dollars par an ou dix millions de dollars, elle aurait toujours à payer. Est-ce bien cela?

Mme Susan Baragar: Avec la pension alimentaire pour enfant?

Le sénateur Duncan Jessiman: Oui.

Mme Susan Baragar: Dans la pratique, cela n'arrive pas, mais la réponse est oui. Conformément à la loi.

Le sénateur Duncan Jessiman: C'est exact. C'est ce que prévoient les lignes directrices.

• 1305

Mme Susan Baragar: Les lignes directrices prévoient en effet cela. Dans la pratique, cela n'arrive que très rarement, et dans un cas comme cela, elle toucherait sans doute également une pension alimentaire de conjoint—s'il a des millions. Il s'agit en général de personnes qui gagnent entre 25 000 $ et 45 000 $, ce qui est un scénario très différent.

Le sénateur Duncan Jessiman: Ce que je veux souligner—et vous êtes de mon avis—c'est la façon dont le système fonctionne. C'est ainsi que le système a été organisé.

Mme Susan Baragar: C'est ainsi que le système a été organisé.

Le sénateur Duncan Jessiman: Vous avez raison.

J'aurais encore une autre question. Vous avez dit que cette règle de parent amical, soit le paragraphe 16(10)—et j'aimerais le relire afin qu'il figure dans le procès-verbal:

—ce sont ces mots que vous avez utilisés—

Ce que vous avez dit c'est que si l'on en tient compte, c'est purement symbolique. Que recommanderiez-vous que nous disions? Ce pourrait être plus clair. Comment inscrire cela dans la loi afin que les juges s'y plient?

Mme Susan Baragar: Vous pouvez faire en sorte que ce soit obligatoire. Vous pouvez dire, tout comme c'est le cas des lignes directrices en matière de pensions alimentaires pour enfants, que c'est obligatoire et que si cela n'est pas respecté, il faut en fournir des raisons par écrit.

Le sénateur Duncan Jessiman: Merci beaucoup.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Madame Dalphond-Guiral.

[Français]

Mme Madeleine Dalphond-Guiral: Merci, monsieur le président.

[Traduction]

Je vais poser ma question en français.

[Français]

Dans un premier temps, je voudrais vous féliciter de la qualité de votre exposé. Il était clair et bien organisé. J'ai tendance à penser que cette capacité vous vient peut-être de votre formation initiale d'infirmière, qui vous a appris à écouter, regarder et analyser, et de votre surspécialisation en psychiatrie, qui vous a appris l'importance de l'objectivité.

Vous avez émis certains commentaires touchant le processus judiciaire, les avocats et les professionnels qui aident les familles en difficulté. Je vous ai trouvé extrêmement critique à l'endroit des avocats, d'autant plus que vous faites partie de ce corps professionnel. J'ai donc écouté avec beaucoup d'intérêt ce que vous avez dit.

Vous avez dit une chose qui m'a frappée et que notre comité devrait peut-être reprendre. Vous avez dit qu'il arrive que les avocats en droit de la famille semblent oublier le...

[Note de la rédaction: Inaudible] ...de bon aloi. On sait que l'avocat est là pour s'occuper de la cause de son client, que son client devient prioritaire et qu'il doit gagner pour son client. Si jamais j'avais recours à un avocat, je voudrais qu'il en décide ainsi pour moi aussi.

Pourtant, dans tout ce qui touche le divorce et les enfants, est-ce que vous seriez d'accord avec moi si je disais que l'intérêt des enfants doit dépasser largement l'intérêt du client, ce qui représenterait en quelque sorte un changement dans l'attitude des avocats? Je voudrais avoir votre impression.

J'ai aussi noté que la compassion ne devait jamais dépasser ni faire disparaître l'objectivité. Quand on parle des juges, des avocats et des travailleurs, je pense qu'il est clair qu'on peut parler d'objectivité. Au niveau des parties, je pense qu'il faut oublier ça et reconnaître qu'elles sont en situation de crise, que, par voie de définition, elles ne sont pas en mesure d'être objectives et qu'on ne doit pas leur demander de l'être.

• 1310

Voilà, j'ai émis trois opinions. J'aimerais vous entendre là-dessus.

[Traduction]

Mme Susan Baragar: En ce qui concerne les avocats, je pense que ce qui doit changer, et cela ne pourra pas être fait par l'intermédiaire de la Loi sur le divorce... je pense qu'il nous faut changer certains des éléments du code déontologique que suivent nos associations professionnelles, de telle sorte que nos responsabilités soient quelque peu différentes lorsqu'il est question d'enfants. Je pense que ce qu'il nous faut faire c'est déclarer que nous avons une responsabilité à trois volets. Nous avons une responsabilité en tant qu'agents de la cour; nous avons une responsabilité à l'égard de notre client; et nous devons également avoir une responsabilité à l'égard des enfants, qui sont sous-représentés dans ces affaires. Le juge a la compétence parens patriae, c'est-à-dire qu'il est responsable de s'occuper des enfants, mais, bien des fois, lorsque l'affaire aboutit devant le juge, le mal a déjà été fait.

Je pense que nos règles en matière d'éthique doivent tenir compte de cela et dire aux avocats que c'est leur responsabilité; qu'ils ne sont pas seulement responsables devant la personne qui paie la note. Voilà donc pour ce qui est des avocats.

Je conviens par ailleurs que l'objectivité est absolument nécessaire lorsque vous travaillez avec des personnes qui sont en situation de crise, car leurs perceptions sont bien souvent déformées—pas toujours, mais bien souvent. C'est une question que devraient, je pense, aborder nos écoles de droit qui forment les avocats, surtout ceux qui vont travailler dans le domaine du droit de la famille. Encore une fois, ce n'est pas là une question qui pourrait être réglée par la Loi sur le divorce.

En ce qui concerne les problèmes en droit de la famille, il y a énormément de domaines qui interviennent. Je pense que la Loi sur le divorce elle-même doit apporter certains changements, mais ces changements à eux seuls ne seront pas un remède suffisant. Il faut qu'il y ait un effort concerté de la part de nombreux intervenants et dans le cadre de nombreux textes de loi.

J'espère avoir répondu à votre question.

Mme Madeleine Dalphond-Guiral: Thank you.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): M. Forseth aimerait poser une toute petite dernière question.

M. Paul Forseth: Merci.

Avez-vous une opinion sur la différence entre les dispositions du Code criminel relativement à la fourniture des nécessités de la vie ou la législation en matière de bien-être de l'enfant, qui stipulent que les parents doivent subvenir aux besoins de leurs enfants jusqu'à ce que ceux-ci atteignent l'âge de la majorité, que ce soit 18 ou 19 ans, selon la province, et la Loi sur le divorce qui exige le versement de paiements d'entretien même pour des étudiants à l'université, des enfants âgés de 25 ans, etc? Il y a là une curieuse disparité. Je me demande tout simplement si vous auriez des recommandations à nous faire en vue de la modification de la Loi sur le divorce de façon à supprimer ce manque de parallèle ou de logique ou pour résoudre autrement la question.

Mme Susan Baragar: C'est une question dont sont surtout saisis des pères, car ce sont eux qui sont en général le conjoint payeur. C'est une situation en effet très curieuse que celle qui existe au Manitoba où, une fois que votre enfant a atteint l'âge de 16 ans, vous pouvez lui dire de partir s'il se comporte mal, s'il détruit des biens ou autre. Cependant, si vous êtes un parent qui n'a pas la garde, vous devez assurer l'entretien de votre enfant jusqu'à ce que, par définition, il ne soit plus un enfant du mariage, ce qui est la définition de la dépendance et, oui, cela peut se prolonger jusqu'à ce que votre enfant décroche un deuxième diplôme, même si le seuil habituel est 21 ans ou un premier diplôme. C'est en général là que cela s'arrête.

Il y a donc une très grosse disparité. Si vous êtes un parent divorcé qui n'a pas la garde, il vous faut assurer le soutien de vos enfants pendant bien plus longtemps que si vous étiez restés ensemble.

Est-ce que je pense qu'il devrait y avoir un certain parallélisme? Oui, je pense qu'il faudrait que la loi soit logique. J'estime que c'est là quelque chose qui doit certainement confondre les gens.

M. Paul Forseth: Pourriez-vous envisager une ligne dans la Loi sur le divorce qui dirait que les ordonnances de versement de pension d'entretien pour enfant prévues dans la loi restent en vigueur jusqu'à ce que l'enfant concerné atteigne l'âge de la majorité? De cette façon, ce serait aux provinces de décider quel serait cet âge limite.

Mme Susan Baragar: Je pense que cela est vraiment fonction de vos priorités. Voulez-vous que la coupure intervienne dès l'âge de la majorité ou bien voulez-vous encourager les enfants à poursuivre des études supérieures? Je pense que ce qu'il faut c'est qu'après l'âge de la majorité, la pension ne soit plus versée au parent qui a la garde, ce qui arrive toujours parfois. Si une pension est versée après l'âge de la majorité, alors je pense qu'elle devrait être versée directement aux enfants eux-mêmes pour qu'ils s'en servent pour payer leur université.

• 1315

M. Paul Forseth: Je pense qu'il y a une coupure prévue dans la loi provinciale.

Mme Susan Baragar: C'est exact.

M. Paul Forseth: Par conséquent, une ordonnance de paiement d'entretien émise par le tribunal de la famille en vertu de textes de loi provinciaux—cette ordonnance est annulée à partir de quel âge?

Mme Susan Baragar: À l'âge de 18 ans, en vertu de la Loi sur l'obligation alimentaire des enfants. En vertu de la Loi sur la protection de l'enfance, je pense que vous pouvez ne plus subvenir aux besoins de vos enfants dès que ceux-ci atteignent l'âge de 16 ans. En vertu de la Loi sur le divorce, la coupure intervient souvent dès l'âge de 21 ans ou après l'obtention du premier diplôme, selon les circonstances.

Je pense qu'il devrait y avoir une harmonisation des textes de loi. Il y a des avantages et des inconvénients dans le cas de chacun d'entre eux, mais je pense qu'il devrait y avoir harmonisation.

M. Paul Forseth: Merci.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Merci, monsieur Forseth et madame Baragar.

Cet échange a été très intéressant et pour emprunter des termes déjà utilisés par d'autres, stupéfiant et excellent. Nous avons constaté qu'il existe des différences régionales dans ce pays, et je songe ici aux avocats du Manitoba et à ceux de la Saskatchewan, si vous me permettez de comparer le témoignage que nous avons entendu hier au vôtre aujourd'hui. Nous avons dépassé, et de loin, le temps prévu, mais je sais que les membres du comité estiment que cela en valait bien la peine. Merci.

Mme Susan Baragar: Merci.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Mesdames et messieurs les membres du comité, nous allons faire une pause de cinq minutes puis poursuivre avec le groupe suivant. Nous allons travailler pendant le déjeuner.

• 1317




• 1329

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Tentons notre chance une nouvelle fois. Veuillez vous asseoir. Monsieur Scott, monsieur Unger et monsieur Burns pourriez-vous prendre place à la table.

Encore une fois, je vais vous dire que vous disposez de cinq minutes. Je vous interromprai au bout de cinq minutes, même si vous n'avez pas déposé vos recommandations, car nous accusons déjà un retard d'environ une heure et notre séance de cet-après midi devait débuter dès 13 h. Nous ne pouvons pas boucler la journée avec une heure de retard sans quoi j'aurai à faire face ici à un grand nombre de députés et de sénateurs très mécontents. Je n'aimerais pas cela. Je ne saurais que faire.

• 1330

Monsieur Scott, veuillez commencer, je vous prie.

M. Keith Scott (témoigne à titre personnel): La sénatrice Cools n'est pas ici en ce moment.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Non, mais elle va arriver.

M. Keith Scott: Permettez-moi de commencer par féliciter ceux et celles qui ont poussé pour obtenir que cette initiative soit prise. Cependant, si votre rapport final ne prévoit pas un mécanisme de réparation applicable au parent ayant la garde qui viole sciemment les ordonnances de la cour, alors vous aurez rendu un très mauvais service aux enfants du divorce et vous aurez gaspillé mon temps, votre temps et sans doute l'argent des contribuables.

Cela étant dit, je comparais devant vous aujourd'hui pour vous offrir, très sincèrement, des recommandations, et non pas pour gémir. J'ai deux initiatives qui, je l'espère, seront examinées de plus près, mais, si vous me le permettez, je vais commencer avec quelques idées simples.

Lorsqu'est accordée la garde partagée, tous les déplacements requis pour les visites devraient être partagés. En dépit de mon entente de garde partagée, je dois à l'heure actuelle faire 1 800 kilomètres toutes les deux fins de semaine pour voir mes enfants, alors que la mère de mes enfants, qui en a la garde, n'a qu'à se déplacer sur un kilomètre. Cela ne peut pas continuer. Une directive aux procureurs généraux des différentes provinces pourrait régler cela.

Si un parent obtient la garde partagée, cela veut dire que les déplacements et les visites doivent être partagés. En 1991, j'ai pris l'initiative de noter mes dépenses pour la fin de semaine. Vous serez très étonnés d'apprendre qu'une fin de semaine de visite me coûte entre 800 $ et 1 200 $.

Si c'est acceptable de se marier, d'avoir des enfants et de vivre à Red Rock, par exemple, alors ce devrait être acceptable de vivre là pendant un divorce. Le parent qui a la garde ne devrait pas avoir le droit de décider unilatéralement de déménager. Si un déménagement est nécessaire, le parent qui n'a pas la garde devrait donner son accord préalable. Si le parent qui a la garde déménage sans son consentement, le paiement de la pension alimentaire devrait être immédiatement suspendu, sans condition et sans hésitation.

Lorsqu'un jugement est rendu et que des versements sont établis en fonction d'un lieu précis, pourquoi un parent devrait-il être en mesure de modifier sensiblement les conditions en s'installant aussi loin que possible de l'ex-conjoint? Ce faisant, cela garantit que mes coûts vont augmenter. D'autre part, les possibilités pour moi de continuer de jouer un rôle dans la vie de mes enfants sont diminuées, mais l'argent que la cour m'a ordonné de payer au titre de l'entretien d'enfant continue d'arriver. Encore une fois, avec une directive aux ministres provinciaux, cela pourrait devenir une clause standard dans tout divorce à l'avenir.

Dans mon cas particulier, mes paiements étaient établis en fonction du lieu de résidence de mon ex-conjointe à Sault-Ste-Marie. Elle a depuis déménagé pour s'installer à deux heures encore de là, vers le sud. Mes coûts ont sensiblement augmenté et je ne dispose d'aucun recours viable et rentable devant les tribunaux.

Lorsqu'il y a des enfants mineurs dans un divorce, la cour doit exiger que le parent qui en obtient la garde fasse installer des téléphones d'appel direct au cadran. Bien que, conformément à mon ordonnance de la cour, je jouisse d'un accès généreux et libéral par téléphone, il est impossible pour mon enfant de trois ans de se rappeler les 15 numéros de sa carte d'appel. Sa mère refuse de l'aider étant donné qu'elle n'y est pas obligée par l'ordonnance de la cour.

Étant donnés la technologie d'aujourd'hui et le désir de vengeance qu'amène le système tel qu'il existe à l'heure actuelle, ça ne devrait pas être trop demander que d'exiger des téléphones d'appel direct au cadran. Ce serait facile à faire. Il faut faire quelque chose pour empêcher les parents qui ont la garde, comme c'est le cas de mon ex-femme, de violer une ordonnance de la cour en décrochant tout simplement leur téléphone.

Même s'il y a une ordonnance de la cour, celle-ci pourrait prévoir qu'aucun paiement de pension alimentaire n'ira à une maison, à une résidence ou à un bénéficiaire qui ne respecte pas toutes les conditions de l'ordonnance. Cela couvrirait toutes les dépenses connexes subies par le père. Je paierai volontiers pour parler à mes enfants, et l'on pourrait certainement trouver un téléphone qui, lorsque vous le décrochez, compose automatiquement un numéro et un seul, le mien.

La couverture automatique par une assurance-maladie est essentielle. Il n'y aucune négociation. Après avoir été enlevés et emmenés de l'autre côté d'une frontière internationale—ce fut le cas de mes enfants—lorsqu'ils reviennent à leur pays natal en tant que citoyens canadiens nés au Canada et élevés ici avant leur enlèvement, je n'en reviens pas qu'à leur retour après leur visite estivale, ils n'aient plus de protection en matière de soins de santé. Parce qu'ils n'habitent pas le Canada pendant une période suffisamment longue, ils ne sont pas admissibles.

Le système américain est si loin derrière le nôtre que mon ex-femme, même si elle pouvait leur donner quelque chose, leur donnerait quelque chose d'insatisfaisant. Cependant, elle refuse. Lorsque mes enfants tombent malades pendant leur séjour de deux mois, ils ont deux aspirines, deux Advils, deux Sinutabs—ils ont deux de tout—et ils sont mis au lit pour s'endormir en pleurant parce que je ne peux pas obtenir d'assurance-maladie pour eux ici au Canada.

Mon fils a besoin de broches et ma fille a besoin de lunettes. Je ne peux pas obtenir que ces choses-là soient couvertes. Il faut que je paye de ma poche car mes enfants ne peuvent pas obtenir les numéros d'assurance sociale qu'exige mon employeur avant qu'ils ne puissent être couverts par mon assurance-maladie, à laquelle je cotise chaque mois. C'est un crime.

• 1335

Des cartes spéciales, avec photo, et assorties de conditions, sont requises. À l'heure actuelle, nous recourons au mensonge pour éliminer les problèmes auxquels nous nous trouvons confrontés lorsque nous traversons la frontière pour revenir au Canada. Les gens de Douanes Canada pensent que je devrais porter sur moi mon décret de divorce de la cour. Si je le faisais, j'ignore quels renseignements cela leur fournirait. Le décret n'identifie personne. Ils demandent des copies des certificats de naissance des enfants. Encore une fois, un certificat de naissance peut ne pas correspondre à la personne car il n'y a pas de photo.

Lorsqu'on s'approche de la frontière, mon fils me dit: «Tu n'as qu'à me le dire, papa, et je ferai semblant de dormir, car de cette façon ils ne demanderont pas qui nous sommes ni où nous allons». C'est juste une méthode qu'utilisent les gens des douanes pour essayer de se convaincre qu'ils ont fait quelque chose pour empêcher les enlèvements d'enfants par un parent. À l'heure actuelle, rien ne peut être fait. Mon cas n'est pas la norme. En tout cas je ne le pense pas, alors j'espère qu'un appel aux douanes pourrait arranger les choses afin que papa puisse aller et venir avec ses enfants sans subir un procès chaque fois. Mon enfant de quatre ans me dit de mentir parce que c'est beaucoup plus facile que de dire la vérité.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Votre temps est écoulé.

La sénatrice Anne Cools: Peut-être, monsieur le président, que s'il a un mémoire écrit, nous pourrions le considérer comme lu.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Sommes-nous d'accord là-dessus?

Des voix: Oui.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Très bien. D'accord. Nous sommes vraiment pris par le temps.

La sénatrice Anne Cools: Le considérer comme lu signifie qu'il figurera au procès-verbal.

M. Keith Scott: Si je pouvais faire deux recommandations...

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Allez-y.

M. Keith Scott: Les deux recommandations sont, premièrement, que l'on crée un registre des décisions en matière de divorce, un organisme qui serait chargé de verser dans une base de données informatisée tous les décrets en matière de divorce, pour l'ensemble de la province, et qu'il y ait une ligne qui soit opérationnelle 24 heures sur 24 afin que si je téléphone et que je dis que j'ai un droit de visite par téléphone avec mes enfants et que mes droits sont en train d'être bafoués, quelqu'un puisse prendre note de ma plainte. Cette personne pourra alors prendre un téléphone et essayer d'obtenir le numéro que je compose. Si elle obtient pendant deux jours et demi le même signal que la ligne est occupée, alors il y a preuve qu'il y a violation.

Cela n'est important que si vous êtes prêts à reconnaître qu'une fausse accusation devant la cour ou dans un affidavit est un crime, et c'est ce que je pense. Je pense que mentir sous serment c'est se parjurer, et je ne parviens pas à comprendre pourquoi les procureurs généraux des différentes provinces ne poursuivent pas dans le cas de ce crime en particulier.

Enfin, j'avais compté demander un tribunal impartial, un dans chaque province. Un homme téléphone et a un problème avec son droit d'accès et ses visites; il y a eu de multiples violations de ses droits. Il comparaît devant le tribunal. Le tribunal rend une décision qui l'appuie, et c'est parti. Il nous faut avoir un processus en vertu duquel le droit de garde peut être renversé, car si vous trouvez toutes sortes d'autres initiatives originales et que la réparation ultime n'est pas prévue, alors ce ne sera que symbolique et rien ne changera véritablement.

Les femmes doivent savoir, les parents qui ont la garde doivent savoir que s'il y a violation d'une ordonnance de la cour, il y aura sanction. À l'heure actuelle, il n'y en a pas du tout.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Merci.

Monsieur Unger.

Le révérend Wayne Unger (témoigne à titre personnel): Je m'appelle Wayne Unger. Je suis pasteur d'une église à Virden, au Manitoba.

Il y a quatre ans, nous avons créé un ministère itinérant pour tenter de joindre les enfants et les jeunes gens de notre localité. Nous avons constaté que nous récupérions beaucoup d'enfants de familles monoparentales, avec tout le bagage qui y est souvent attaché. Nous avons été témoins de nombre de difficultés que connaissent les parents et les enfants, etc.

La recommandation que je ferai concerne la question de la reddition de comptes. Nous avons constaté que si un enfant était inscrit à notre école du dimanche, le parent en faisait une priorité. Si, donc, une mère ou un père avait des droits de visite toutes les deux semaines, on était certain que le parent veillerait à ce que ses enfants soient prêts pour l'école du dimanche.

Souvent, peut-être auparavant, le père ou la mère aurait peut-être été saoûl, ou il y avait peut-être une relation avec une autre femme ou un autre homme, mais si un système de reddition de comptes était établi dans le foyer, s'il fallait que l'enfant soit prêt pour l'école du dimanche à une heure donnée, alors pour cette heure là, il n'y avait pas de problème. Nous avons constaté que cela a très bien fonctionné, et cela fonctionne toujours bien aujourd'hui.

On ramasse des enfants et on leur apprend de bonnes valeurs morales, on leur apprend le pardon, on leur apprend qu'il n'est pas bien de voler, qu'il nous faut nous aimer les uns les autres. Nous avons constaté que cela a une influence positive sur la vie de ces enfants. Nous estimons que cela est en train d'améliorer notre communauté de Virden, au Manitoba.

C'est une simple recommandation.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Merci.

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): Merci.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): M. Burns.

M. Brent R. Burns (témoigne à titre personnel): Bonjour.

Hillary Clinton dit qu'il faut tout un village pour élever un enfant, et maintenant elle dit qu'il faut tout un village pour contrôler son mari. C'est juste une blague. Je suis heureux que nous puissions en rire.

• 1340

Je m'appelle Brent Burns. Je suis parent-soutien unique et je viens de terminer ma première année de droit. J'espère avoir quelque chose à contribuer. Je pense que notre fin sera mieux servie si nous évitons les arguments du genre il a dit, elle a dit.

Inutile de le préciser, le droit de la famille est le premier cousin du système de droit pénal. Ceux qui, de gré ou de force, embrassent le chaos du droit de la famille le découvrent très rapidement. Pour le professionnel qui se lance dans cette industrie, la cour de la famille est une économie. La matière brute de cette économie c'est la douleur et le mécontentement des autres, qui sont facilement exploités par l'approche contradictoire.

Permettez-moi de vous exposer deux écoles de pensée, et ce sera en fait ma recommandation. Premièrement, il y a la justice rétributive, qui est par inhérence destructrice et punitive. L'Oxford English Dictionary définit la rétribution comme étant une récompense pour le mal ou, rarement, pour le bien, la vengeance, la revanche. Deuxièmement, il y a la justice réparatrice. Encore une fois, l'Oxford English Dictionary dit: qui a tendance à rétablir la santé ou la force, à remettre en état, à ramener à la dignité ou au bien.

Permettez-moi de faire une comparaison entre la justice rétributive et la justice réparatrice. Justice rétributive: établir le blâme. Justice réparatrice: dialoguer. Justice rétributive: mettre l'accent sur les différences. Justice réparatrice: rechercher les points communs. Justice rétributive: une blessure qui vient s'ajouter à une autre. Justice réparatrice: l'accent est mis sur la guérison, la réparation et le confort après la séparation et le divorce. Justice rétributive: monopole de l'État sur les réactions et le résultat. Justice réparatrice: les rôles de la famille et de la communauté sont reconnus. Justice rétributive: le résultat encourage des comportements irresponsables. Justice réparatrice: le comportement responsable est tout simplement encouragé. Justice rétributive: les liens avec la communauté sont affaiblis pour le parent qui n'a pas la garde—je suis parent à garde unique. Justice réparatrice: maintien des liens avec le parent qui n'a pas la garde avec une approche holistique. Justice rétributive: le processus aliène le parent de l'enfant. Justice réparatrice: encourage les relations parent-enfant. Justice rétributive: des professionnels qui agissent par procuration sont les acteurs clés. Justice réparatrice: la famille, les enfants et la communauté jouent les rôles centraux, l'aide professionnelle étant disponible. Justice rétributive: on encourage des valeurs compétitives. Justice réparatrice: on encourage la coopération. Justice rétributive: on suppose qu'il y a un gagnant et un perdant. Justice réparatrice: possibilité de plusieurs gagnants.

L'approche rétributive vise à prouver que l'autre partie a tort; c'est le schéma du conquérant et du vaincu, de la victime et du criminel. Et dans une relation qui fait échec, qui est le criminel? Je ne comprends tout simplement pas. Y a-t-il quelque chose qui m'échappe?

À moins de changer les choses pour adopter une approche réparatrice, le parent qui a la garde sera sans cesse poussé à obtenir un soutien financier mérité auprès du parent qui n'a pas la garde, et un droit d'accès adéquat pour le parent qui n'a pas la garde fera sans cesse l'objet de contestations.

Le chemin le moins souvent parcouru est celui de la justice réparatrice. Le coût social de la justice rétributive est astronomique: coeurs brisés, rêves brisés, aliénation, éclatement de nos familles, de nos quartiers, de nos communautés et même de la société canadienne.

En tant qu'adultes, nous sommes responsables d'une part importante de la déception, de la colère et de la frustration qui ont été imposées à cette jeune génération qui nous suit de très près. Il nous reste encore un peu de temps avant que cette génération ne prenne les rênes du contrôle démocratique. Nous avons pour responsabilité de réparer les choses.

Les remèdes que nos cherchons ne nous seront pas fournis par l'avocat spécialisé dans la procédure contradictoire, étant donné que la justice réparatrice est et sera toujours un concept étranger pour les personnes ayant reçu cette formation. Elles sont mieux en mesure de s'occuper de la répartition de biens que d'enfants. Mais n'oubliez pas que demander à un avocat d'abandonner le litigieux, c'est comme demander à Henry Ford d'arrêter de produire des automobiles—ce n'est tout simplement pas possible.

D'après ce que je vois, l'actuel droit de la famille non seulement porte atteinte à l'aspect sacré des relations parents-enfants, mais est également discriminatoire à l'égard du parent, mère ou père, qui n'a pas la garde. Je pense que notre désir est de corriger ce tort et c'est notre intérêt à l'égard de la justice réparatrice qui nous réunit ici aujourd'hui. C'est avec beaucoup de force et de courage que nous choisirons le chemin moins souvent emprunté et que nous tiendrons bon face au dédain répréhensible d'autres. La possibilité qui se dresse devant nous n'est pas pour les faibles ni pour ceux qui tirent leur revenu du statu quo, mais pour ceux parmi nous qui osent être perçus comme des radicaux.

La Cour suprême du Canada...

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Monsieur Burns...

M. Brent Burns: J'ai dix secondes, et ce n'est pas de notre faute que nous accusons du retard.

La Cour suprême du Canada applique le critère de l'intérêt de l'enfant pour résoudre les différends en matière de garde. À mon avis, l'intérêt de l'enfant est d'avoir accès à sa mère et à son père, quelle que soit leur contribution financière ou leur comportement passé, à condition qu'il n'y ait pas eu d'abus de l'enfant. S'il y a eu abus, le système pénal devrait intervenir.

Dans notre discussion, qui va avoir lieu sous peu, je vous inviterai à me poser des questions au sujet de mon expérience en cour comme parent ayant la garde ou n'ayant pas la garde, au sujet du tort fait à mes enfants pendant ce processus et de la discrimination qu'impose ce système contradictoire à la partie selon lui «perdante». Merci de votre temps.

• 1345

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Merci.

Nous allons commencer avec M. Forseth.

M. Paul Forseth: Merci.

Je souhaiterais poser une petite question au révérend Unger. Vous avez décrit un événement systématique. Vous avez dit que le bus qui arrive à l'heure, sur rendez-vous, révèle la pathologie de la famille, tout comme la négligence parentale n'est souvent décelée que lorsque les enfants sont tenus d'aller à l'école, et les routines et la régularité exigées par l'école publique en disent long sur ce qui se passe à la maison.

Étant donné ce que vous avez constaté en assurant ce service d'autobus pour l'école du dimanche, comment avez-vous réagi? Qu'avez-vous fait? Vous dites que ce que vous faites fonctionne très bien. Pourriez-vous nous expliquer cela un petit peu mieux?

Le révérend Wayne Unger: Nous essayons de parler aux parents, ou au parent, et s'il y a une difficulté, nous pouvons intervenir en fournissant des conseils. Bien sûr, cela alourdit ma charge de travail, mais c'est ce pour quoi nous sommes là, pour aider les parents. Pourquoi y a-t-il des problèmes d'alcoolisme? Peut-être qu'ils ont des difficultés qu'ils n'arrivent pas à affronter, et peut-être... pas au niveau de l'église, mais nous pouvons les aider à faire face à certains de ces problèmes auxquels ils se trouvent confrontés.

M. Paul Forseth: Et vous réussissez un petit peu.

Le révérend Wayne Unger: Oui, un petit peu. Je ne dis pas que nous révolutionnons tout, mais j'espère que nous faisons quelque chose de positif. C'est tout ce que nous demandons. Nous voulons avoir une influence positive sur ces enfants, et nous espérons par la même occasion pouvoir venir également en aide aux parents.

M. Paul Forseth: Cela est intéressant, car je suppose que lorsque l'autobus arrive ou que vous apprenez que telle famille... c'était volontaire...

Le révérend Wayne Unger: Oui. Cela ne coûterait pas un sou au contribuable. Par exemple, si je recommande à ce comité, si les parents sont d'accord, d'envoyer nos enfants à un club de jeunes ou à l'école du dimanche, ce serait quelque chose de positif et qui ne coûterait rien du tout au contribuable. L'organisation est déjà là, capable d'offrir le soutien et l'aide et la prière, et je pense que c'est très important.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Quelqu'un d'autre a-t-il des questions?

La sénatrice DeWare.

La sénatrice Mabel DeWare: J'aimerais aussi poser une question au révérend. Il arrive souvent que le parent qui n'a pas la garde ne soit autorisé à voir ses enfants que sous supervision et, parfois, au début, c'est dans un gymnase ou quelque lieu où se trouvent beaucoup d'autres enfants. Offririez-vous vos installations pour cet accès surveillé?

Le révérend Wayne Unger: Oui, absolument. Il se trouve que notre église possède un gymnase, bien que nous ne l'utilisions pas tellement pendant l'heure d'école du dimanche. Nous avons des installations utilisables et divers clubs et organisations s'en servent à l'occasion. Pour cette heure de l'école du dimanche, de 10 h à 11 h, les enfants sont réunis en un lieu où on leur enseigne quelque chose de positif. Je pense qu'il y a là un élément de responsabilisation.

La sénatrice Mabel DeWare: Je pense que vous nous avez apporté aujourd'hui une chose à laquelle nous n'avions pas pensé encore. Vous pourriez offrir un lieu sûr. Nous entendons souvent les gens dire: «l'enfant ne veut pas rester avec l'autre parent», ou quelque chose du genre, ou pour quelque raison, l'enfant ne veut pas coucher la nuit chez le parent, ou bien quelque chose d'autre arrive. Qui peuvent-ils appeler? Où peuvent-ils s'adresser? Si l'autre parent habite à 200 milles de là, ils ne peuvent communiquer par téléphone. Ce serait bien d'avoir des lieux de rencontre dans nos collectivités, comme vous le proposez.

Le révérend Wayne Unger: Il se trouve que j'appartiens aux Assemblées de la Pentecôte du Canada, une organisation de l'église. Nous avons 1 500 églises à travers le pays et beaucoup d'entre elles ont des programmes de transport par car, organisent une école du dimanche. J'en ai parlé à des collègues pasteurs, etc. et ils peuvent avoir une influence très positive sur la vie des enfants.

Nous sommes préoccupés par nos enfants et nos jeunes et c'est pourquoi nous le faisons. Ce n'est pas dans un but lucratif, c'est une initiative de l'église. Nous trouvons que c'est très utile et très positif dans notre collectivité.

• 1350

La sénatrice Mabel DeWare: Monsieur Scott, je pense que c'est vous qui avez parlé dans votre exposé du refus de paiement de la pension alimentaire pour enfants à cause des problèmes en matière de garde et de droit de visite—des droits ayant été refusés ou des problèmes n'étant pas réglés. D'autres témoins que nous avons entendus au cours du dernier mois ont estimé que la pension alimentaire pour enfants et les questions de garde et de droit de visite ne devraient pas être combinées. Ce sont deux choses qu'il faudrait séparer, parce que si l'on retient la pension alimentaire, on prive l'enfant, et ils sont très préoccupés par cela. J'aimerais que vous nous précisiez votre pensée à ce sujet.

M. Keith Scott: Je ne suis pas opposé au fait de combiner les deux, pourvu qu'il y ait une réaction égale de la part des diverses autorités compétentes lorsqu'il s'agit de faire respecter les droits. À l'évidence, on ne peut considérer que le fait de retenir la pension alimentaire est un geste positif, mais lorsque vous n'avez pas accès à votre enfant, en dépit d'une ordonnance judiciaire et d'un document légalement contraignant qui reste lettre morte... Depuis 15 ans, les hommes frappent aux portes en disant que leurs droits sont violés et que personne n'écoute. Quelle option avons-nous?

Je ne pense pas que tous refusent le paiement parce qu'ils le veulent ou parce qu'ils le peuvent. Certains essaient d'envoyer un message. Avec un taux de défaillance de 75 p. 100 dans le Régime des obligations alimentaires envers la famille de l'Ontario, je pense que l'on aurait intérêt à rectifier le problème plutôt que de traiter les symptômes.

La sénatrice Mabel DeWare: Eh bien, d'une certaine façon il faudra trouver un système pour assurer le respect des ordonnances judiciaires.

M. Keith Scott: Exact.

La sénatrice Mabel DeWare: Par quel moyen, je ne sais pas. Mais cela semble être le problème.

M. Keith Scott: Si vous voulez aller dîner ce soir et lire ceci...

La sénatrice Mabel DeWare: Est-ce une invitation?

M. Keith Scott: Oui, madame.

La sénatrice Mabel DeWare: Désolée, j'ai un avion à prendre à 5 h. Mais n'oubliez pas, vous allez nous laisser le document et nous aurons tous...

M. Keith Scott: Il faut trouver un moyen de vérifier l'allégation. Si les allégations sont faites—et trois personnes, à mon arrivée, m'ont dit: «il y a une allégation». J'ai connu la même chose. On m'imputait des sévices. J'ai un document d'ordonnance judiciaire dans laquelle mon ex-épouse reconnaît sous serment qu'il n'y a pas eu de sévices. Comme l'avocat l'a dit, elle avait formulé l'allégation par écrit. Voici l'affidavit. J'ai les documents ici.

Y en a-t-il parmi vous qui sont suffisamment âgés pour avoir connu Jack Stokes?

La sénatrice Anne Cools: Est-ce que ces exemples sont documentés?

De toute façon, monsieur Scott, je crois que le comité a convenu de verser votre déclaration au procès-verbal. Puisque vous dites que vous avez l'ordonnance judiciaire, vous pourriez peut-être simplement nous donner le numéro exact de la page où...

M. Keith Scott: Je n'ai pas mentionné le numéro de l'ordonnance dans le document, mais je pourrais l'ajouter.

La sénatrice Anne Cools: Bien, mais vous venez de dire que votre ex a reconnu sous serment qu'il n'y avait pas de...

M. Keith Scott: C'est juste.

La sénatrice Anne Cools: Vous pourriez peut-être nous donner la citation afin que les membres puissent...

M. Keith Scott: C'est dans le procès-verbal d'interrogatoire préalable.

La sénatrice Anne Cools: Avez-vous le numéro de la page? Indiquez-nous simplement le numéro de la page. J'essaie simplement de faciliter la lecture de ces documents, car je sais que des membres comme Judy Wasylycia-Leis, à leur retour, voudront lire le reste.

M. Keith Scott: Il y a le document judiciaire.

La sénatrice Mabel DeWare: Nous avons besoin de la date et du numéro.

M. Keith Scott: Je vous les communiquerai, au lieu que vous perdiez votre temps.

La sénatrice Anne Cools: D'accord.

M. Keith Scott: On y lit:

Elle alléguait avoir subi des violences physiques. Dans le procès-verbal du tribunal—il m'en a coûté 2 000 $ pour me rendre en avion à Sault-Ste-Marie pour obtenir la transcription—la question était posée: «Votre mari vous a-t-il jamais frappée?» La réponse était «Non». «A-t-il jamais levé la main sur vous?» «Non».

La sénatrice Anne Cools: C'est exactement l'argument du témoin précédent. On peut dire n'importe quoi dans un affidavit. Mais une fois que la personne est soumise à un contre-interrogatoire, aux questions du juge, souvent la version change. Quoi qu'il en soit, nous avons les renseignements, monsieur Scott.

M. Keith Scott: Je ne pense que vous ayez celui-ci. Vous avez le document, mais rien de ceci n'y figure.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Mais c'est documenté.

La sénatrice Anne Cools: Une fois que nous aurons la référence, nous pourrons obtenir le document. De toute façon, envoyez-moi une copie.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Sénatrice Cools, avez-vous une autre question?

La sénatrice Anne Cools: Oui. J'aimerais juste dire que les questions soulevées ici—M. Scott a soulevé celle du rapt et d'autres. Mais je pense que le révérend Wayne Unger a soulevé d'autres questions. Il faudra bien à un moment donné que les pouvoirs publics cherchent d'autres façons de soutenir les familles. Je sais qu'il fait partie des Assemblées de la Pentecôte et celles-ci font beaucoup pour aider les familles et les couples, etc.

Je voulais simplement souligner cela. Peut-être, dans nos recommandations, pourrions-nous aborder ce genre de choses, car je peux vous dire que l'on gaspille des millions de dollars. Les gens dans ces églises qui offrent ces programmes pourraient faire beaucoup avec une subvention de 5 000 $ ou 10 000 $ ici et là. C'est simplement une idée que je lance.

• 1355

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Révérend Unger.

Le révérend Wayne Unger: À ce propos, puis-je me retirer? J'ai une répétition de noces à 5 h et un rendez-vous à 1 h 30 à Portage.

La sénatrice Anne Cools: Au moins, ce n'est pas un enterrement.

Des voix: Oh, oh.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): S'il n'y a pas d'autres questions...

M. Brent Burns: J'aimerais faire une déclaration. Je me sens quelque peu insulté. Je suis venu ici, j'ai consacré beaucoup de travail à cette comparution et personne ne m'a posé de questions. Je voulais simplement attirer votre attention là-dessus.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Excusez-moi, vous venez ici en tant que témoin et ce sont les membres qui décident s'ils veulent vous poser des questions.

M. Brent Burns: Très bien. Je vous remercie. J'ai eu l'impression que l'on ne m'écoutait pas... Vous en particulier, monsieur Gallaway.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Excusez-moi, vous n'avez pas à tenir ce genre de propos, monsieur.

M. Brent Burns: Nous vivons toujours au Canada et je peux dire ce que je veux.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Ceci est une audience du Parlement du Canada. Je vous ai écouté. J'en entendu tout ce que vous avez dit.

M. Brent Burns: Ah oui? Pourriez-vous cesser de me pointer du doigt, je vous prie, monsieur. Je vous remercie.

Vous recommencez.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Nous suspendons la séance pendant cinq minutes.

M. Brent Burns: Absolument.

• 1356




• 1410

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): Si cela ne gêne personne que nous mangions occasionnellement une bouchée de pain, nous allons reprendre la séance.

Nous allons entendre d'abord cet après-midi la Pyschology Association, représentée par Mme Rosalyn Golfman, et Parents Helping Parents, avec Mme Louise Malenfant.

La sénatrice Anne Cools: Avant que nous poursuivions, je pense que ce monsieur voudrait venir très rapidement au microphone présenter des excuses au président Gallaway.

M. Brent Burns: Je voudrais m'excuser auprès de Roger Gallaway de m'être montré un peu prétentieux au sujet de mon exposé et la manière dont il a été présenté. Je comprends que vous êtes un comité parlementaire et que je ne suis qu'une personne ordinaire, un Canadien ordinaire, et pas mal en dehors de mon élément. Je vous prie de m'excuser.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Je vous remercie.

La sénatrice Anne Cools: Merci.

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): Allez-y, je vous prie.

Mme Louise Malenfant (Parents Helping Parents): Je suis Louise Malenfant, de Parents Helping Parents.

Mme Rosalyn Golfman (témoigne à titre personnel): Je suis Rosalyn Golfman et je précise que je ne représente pas la Psychology Association, mais un groupe de mes collègues et de travailleurs sociaux faisant des évaluations aux fins de garde, à titre privé.

Je vais lire mon exposé et, si je vais trop vite, faites-moi signe. Cela m'est déjà arrivé.

Je représente un groupe de psychologues et de travailleurs sociaux spécialisés dans les évaluations psychosociales en matière de garde et de droit de visite des enfants après divorce et nous nous spécialisons dans les affaires mettant souvent en jeu des allégations d'abus sexuel. Notre groupe est désireux de participer à votre examen des problèmes de garde et de droit de visite. Nous estimons que notre expérience peut-être utile à l'avenir aux fins du traitement des questions complexes mises en jeu par les conflits relatifs à la garde et au droit de visite. Notre groupe d'évaluateurs part du principe que les problèmes en matière de garde et les allégations d'abus sexuel sont complexes et exigent le recours à des sources d'information multiples.

J'aimerais vous expliquer le processus que nous suivons dans notre modèle d'évaluation. Nous procédons à une évaluation exhaustive de toutes les parties. Nous considérons que les évaluations se limitant à une des parties sont d'utilité réduite et de faible crédibilité. En outre, nous utilisons les données dérivées d'entretiens avec les enfants et les observations du comportement de l'enfant avec les deux parents. Dans notre groupe, nous utilisons deux évaluateurs dans tous les cas. Chacun de nous a des entretiens séparés avec les parents des enfants et des membres de la famille élargie, le cas échéant. C'est une méthode que nous utilisons régulièrement depuis un an pour effectuer les évaluations et nous la jugeons très utile.

L'évaluation exhaustive et la rédaction du rapport font appel à des tests psychologiques. Nous utilisons le MMPI, le test d'aperception familiale Milton-Rorschach, les dessins, les jeux, l'interaction avec les parents, un bilan de stress parental et le test de perception verbale Peabody, un test de QI. Nous faisons largement appel aux renseignements collatéraux, tant professionnels que personnels. Les sources collatérales d'information englobent les membres de la famille immédiate et élargie, les amis de la famille, les gardiennes, les enseignants, les conseillers, la police et les professionnels représentant les divers organismes s'occupant des familles.

Une évaluation exhaustive doit également englober la visite du domicile, ce que nous faisons toujours. Occasionnellement, il nous arrive d'observer l'enfant à l'école ou à la garderie. S'il arrive que les membres de notre équipe d'évaluateurs ne s'accordent pas sur un aspect de la personnalité ou de la relation enfant-parent, et s'il se pose un certain nombre d'autres questions, le protocole que nous avons établi exige que les divergences soient résolues par la logique persuasive, la recherche ou une enquête et des tests plus poussés. Et nous prenons également beaucoup de temps, habituellement de quatre à six mois, car nous voulons avoir un bon aperçu de la famille et c'est pourquoi nous refusons de faire des évaluations rapides.

• 1415

Une évaluation scientifique exige l'élaboration d'hypothèses rivales, la neutralité de l'observateur et la prise en compte de possibilités diverses, un peu à la manière d'un détective privé. L'intérêt de l'évaluation exhaustive réside dans son format, qui permet de mettre en parallèle les renseignements retirés des entretiens cliniques multiples avec les renseignements généraux pertinents et la recherche empirique.

L'American Professional Society on the Abuse of Children utilise une technique similaire depuis 1990. De fait, nous employons son format d'évaluation exhaustive et son prototype pour toutes les évaluations impliquant l'abus sexuel. Nous effectuons donc une évaluation très similaire.

Pour ce qui est des allégations d'abus sexuel, particulièrement sur de jeunes enfants de moins de cinq ans, nous avons détecté une proportion relativement faible, mais non négligeable, de fausses allégations d'abus sexuel après la rupture d'une relation. Les fausses allégations peuvent survenir dans les cas de séparation de couples hautement conflictuels. Notre expérience est que les parents et les enfants peuvent donner des interprétations erronées ou avoir des perceptions déformées de la relation entre l'enfant et l'ex-partenaire.

Les jeunes enfants sont hautement exposés à la mémoire fictive et susceptibles de faire des récits inexacts lorsqu'on leur pose des questions répétées et lorsqu'ils racontent leur histoire à de nombreuses reprises en réponse à des questions suggestives.

De même, l'anxiété d'un parent au sujet de l'abus peut affecter subtilement la capacité de l'enfant de faire un récit exact. C'est réellement l'élément le plus important. C'est très subtil.

Les parents peuvent observer chez leurs enfants des comportements révélateurs d'abus sexuel, mais fréquemment ces mêmes comportements peuvent aussi s'expliquer par les aspects de la relation conflictuelle ou le traumatisme de la séparation. Souvent, ces comportements ressemblent au syndrome du stress post-traumatique.

Les comportements d'enfant alimentant les craintes sont la résistance aux visites, les cauchemars avant et après les visites, la masturbation, les problèmes d'apprentissage se manifestant à l'école, l'agression physique, l'émotivité et les comportements qui peuvent résulter du stress lié à la perte du contact quotidien avec le parent n'ayant pas la garde. Ces comportements sont souvent interprétés, à tort ou à raison, comme un symptôme d'abus sexuel.

Les fausses allégations d'abus sexuel peuvent résulter d'une interprétation erronée d'événements de la part de l'accusateur. Selon notre expérience, un parent peut percevoir avec raison que l'enfant a été sexuellement violenté, mais inciter par inadvertance l'enfant à en accuser le parent n'ayant pas la garde, par opposition à un gardien, un ami de la famille ou autre proche ou le visionnement d'enregistrements vidéo, de crainte d'être considéré comme incapable de protéger l'enfant.

Il est à signaler que lors de la séparation un parent peut avoir une perception déformée de la relation de l'enfant à l'ex-partenaire. Par exemple, lorsque l'enfant revient heureux d'une visite ou réticent à laisser ce parent partir, le parent ayant la garde peut conclure que l'enfant a subi un lavage de cerveau et se sentir menacé. De même, si l'ex-partenaire a un effet dérangeant sur ce conjoint, ce dernier peut considérer à tort qu'il en est de même pour l'enfant, que l'enfant ressent exactement la même chose que le parent. En outre, des réactions d'alignement inhabituelles peuvent être enclenchées chez l'enfant par la crainte de perdre le père ou la mère s'il manifeste de la loyauté ou du plaisir à l'égard de l'autre parent.

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): Vous avez presque dépassé votre temps, mais je suis sûre que le comité vous permettra de continuer, car c'est très intéressant.

Mme Rosalyn Golfman: Ai-je dépassé mes cinq minutes?

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): Oui, mais peu importe. Poursuivez. La nature de votre témoignage est assez sensationnelle.

Mme Rosalyn Golfman: Bien. J'ai juste rédigé quelques recommandations résultant de ce que je dis.

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): Bien.

Mme Rosalyn Golfman: Nous pensons qu'il devrait exister un contrôle de la qualité des évaluations. Je pense qu'il faudrait recourir à une évaluation exhaustive faisant appel aux tests psychologiques et à l'évaluation de toutes les parties.

Nous souhaitons également une modification de la politique des services de police concernant la divulgation de renseignements pertinents lorsque la police a eu un entretien avec un enfant. À l'heure actuelle, l'accès semble être imprévisible. Parfois on nous l'accorde, parfois on nous le refuse.

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La même chose vaut pour les dossiers des Services à l'enfant et à la famille. Parfois, on nous communique les entretiens avec l'enfant et parfois on nous les refuse, et nous ne savons pas pour quelle raison. Souvent, nous devons demander une assignation judiciaire, une procédure longue et coûteuse.

Nous aimerions donc également des changements à cet égard. Si nous effectuons une évaluation exhaustive, nous avons besoin de savoir ce que l'enfant a réellement dit.

Nous pensons que lorsque les Services à l'enfant et à la famille effectuent l'évaluation relative à l'abus sexuel sur un enfant, toutes les parties doivent être concernées. Un entretien doit avoir lieu avec l'auteur présumé. À l'heure actuelle, les SEF s'en remettent à l'interrogatoire de la police, mais si celle-ci ne trouve pas d'éléments suffisants pour justifier une accusation, les Services à l'enfant et à la famille persistent à dire que l'enfant a été victime et le soumettent à quelque forme de thérapie.

Nous trouvons cela déroutant, car nous sommes alors amenés à faire une évaluation sans que la personne ait été accusée, mais les SEF continuant à affirmer que l'enfant a subi des sévices. Il convient de se pencher sur ce problème.

Cela est un peu hors sujet, mais nous pensons également qu'il faudrait nommer un conseiller maître pour gérer ces cas. Lorsque nous formulons des recommandations, elles ne sont pas appliquées et nous ne savons pas qui gère le cas ou ce qu'il advient de nos recommandations. Cela finit encore par un procès et de nouveau c'est une procédure longue et coûteuse.

Aux États-Unis, il existe ce que l'on appelle des «gestionnaires spéciaux», qui ont un pouvoir quasi judiciaire. Ils peuvent gérer quantités d'aspects mineurs—dates des visites, refus de visite de la part de l'enfant—et ils ont un certain pouvoir d'exécution. S'il se pose un problème d'accès, par exemple lorsqu'un enfant a été aliéné d'un parent, ils devraient jouir d'un certain pouvoir.

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): Merci beaucoup. Je suis sûre qu'il y aura beaucoup de questions plus tard.

Madame Malenfant.

Mme Louise Malenfant: Madame la présidente, pourriez-vous me faire savoir lorsque je serai arrivée à la fin du temps imparti et me laisser peut-être quelques moments pour formuler quelques recommandations à la fin?

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): Certainement.

Mme Louise Malenfant: Bien.

Je gère depuis quatre ans un programme d'aide sociale au Manitoba qui porte sur les problèmes de droit familial dans cette province.

Je pense que nous avons énormément progressé au Manitoba. Il y a deux ans et demi, on s'est rendu compte que 25 p. 100 des allégations sur lesquelles les Services à l'enfant et à la famille faisaient enquête dans cette province étaient formulées lors d'actions en divorce. Cela fait quelque 700 cas rien que dans la ville de Winnipeg.

Nous avions un taux de validation de 51 p. 100 de toutes les allégations d'abus sexuel sur enfant. Si vous comparez cela avec, par exemple, le taux national américain, vous voyez que 14 p. 100 de toutes les allégations portent sur des abus sexuels et que, sur ce nombre, seules 40 p. 100 sont fondées.

Nous avions donc au Manitoba un important problème de survalidation des allégations d'abus sexuel sur enfant et un refus de reconnaître le problème des allégations formulées dans le contexte du divorce.

Je suis très heureuse de dire que le Manitoba a considérablement évolué depuis lors. Au cours de l'année dernière, nous n'avons pas eu une seule allégation lors d'un divorce confirmée par les SEF, bien que de fausses allégations continuent à être formulées lors des procédures en divorce, du fait que des avocats déposant des allégations et des affidavits sans qu'il y ait confirmation ni des SEF ni de la police. Le taux d'arrestation au Manitoba est en chute rapide et, comme je l'ai dit, nous avons un taux d'allégations confirmées par les SEF en cours de divorce en chute très rapide. Nous en sommes ravis.

Le rapport du groupe de travail sur le droit civil commandé par l'ex-ministre de la Justice Rosemary Vodrey a mis en lumière le problème des allégations en cours de divorce. Ce rapport a été publié en 1996. Nous pensons qu'il a placé ces problèmes à l'avant-scène au Manitoba et que cela a permis quelques changements importants depuis.

Ce que j'aimerais porter à l'attention du comité est l'une des grandes craintes que les gens éprouvent lorsqu'il est question d'abus sexuels allégués lors d'un divorce: Et si c'était vrai? Une des choses que nous avons établi dans nos recherches est que les allégations véridiques présentent un profil distinctif et que les allégations fausses présentent aussi un profil distinctif. J'aimerais passer rapidement en revue le profil d'une allégation fausse et expliquer en quoi elle se distingue d'une vraie.

En premier lieu, dans un cas de fausse allégation, la divulgation est souvent assortie de très peu de détails concernant le comportement sexuel. Un enfant pourra dire en quelques mots: «Papa m'a touché les parties génitales», ou «Quelqu'un m'a touché», mais ne pourra pas réellement décrire le contexte dans lequel cela s'est passé, le moment, le nombre de fois et quelle forme exactement a pris le comportement sexuel de l'auteur présumé. Dans une allégation véridique, les enfants, même très jeunes, sont souvent capables de donner quantité de détails de telle façon que leurs dires sonnent juste.

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De même, les fausses allégations d'abus font souvent état d'actes de violence où les enfants disent avoir été soumis à des brutalités avec couteau, pince et éléments rituels sataniques sans qu'il y ait de traces physiques, alors que ces sévices sexuels auraient pratiquement tué l'enfant s'ils étaient véridiques.

Nous pensons que la fausse allégation déclenche une psychose. Très souvent, le parent présente un trouble de personnalité identifiable qui n'apparaît que lors de l'évaluation du cas. Très souvent, du moins au Manitoba, ces allégations sont formulées dans les foyers d'accueil de femmes. Nous avons maintenant les récits d'un certain nombre de femmes accueillies dans ces foyers.

Ici, au Manitoba, deux des foyers d'accueil ont une salle de jeux où les enfants sont séparés des mères. Cette salle est destinée à soulager les mères du fardeau de la surveillance des enfants pendant leur séjour. Nous pensons que c'est là où les enfants sont interrogés, au moyen de questions suggestives, par le personnel du foyer. Très souvent, ces divulgations faites dans un foyer de femmes sont très simplistes, en contradiction avec la nature très violente et agressive d'incidents témoignant d'un profond dérangement qui ne sont confirmés par aucun élément de preuve.

Nous pensons qu'il est très important de commencer à examiner le rôle que les foyers d'accueil de femmes ont pris dans notre société. Les femmes qui se réfugient dans ces foyers ne font certainement l'objet d'aucune enquête. Aucune enquête n'est menée et pourtant on part du principe que chaque femme est une victime crédible soit de violence familiale soit de sévices à enfant.

Voilà donc certains des problèmes. Je pense que vous pouvez voir que je suis en train de résumer un rapport écrit et que je ne vais pas arriver au bout dans le temps qui m'est alloué. Le comité pourrait-il le considérer comme lu afin que les observations de mon organisation soient à la disposition du comité?

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): D'accord.

Mémoire de Parents Helping Parents:

Parents Helping Parents est une organisation manitobaine fondée en novembre 1994 en vue d'aider les familles connaissant des problèmes en matière de droit familial. Créée par la sociologue Louise Malenfant, elle a identifié comme le problème le plus notable la formulation d'allégations de sévices à enfant lors d'action en divorce. Des recherches approfondies sur les procédures d'enquête relatives aux sévices à enfant ont fait apparaître un profil distinctif qui démarque une allégation vraie d'une allégation véridique.

Le problème des fausses allégations durant les procédures de divorce était majeur au Manitoba, puisque le PDG des Services à l'enfance et à la famille au Manitoba a reconnu que 25 p. 100 de toutes les enquêtes intervenaient durant une action en divorce1. En juin 1996, le responsable des SEF de Winnipeg a admis également que seuls 15 p. 100 des allégations formulées dans les cas de divorce avaient des chances d'être véridiques2.

Parents Helping Parents a examiné environ 350 dossiers depuis sa création et nous avons accepté la responsabilité de la défense dans 64 cas. Sur ces 64 cas, 49 familles ont été réunies avec leurs enfants après que le parent accusé de mauvais traitement ait été exonéré. Parents Helping Parents a porté les résultats de ses recherches à l'attention du public par le biais des médias, au moyen de communications poussées avec les pouvoirs publics et d'interventions continues auprès des Services à l'enfant et à la famille et du système de soins de santé qui mènent les enquêtes sur les allégations de sévices à enfant.

Depuis 1994, le premier ministre Gary Filmon et les ministres du gouvernement manitobain ont entamé une révolution qui a presque éliminé les fausses allégations de sévices à enfant durant les actions en divorce. Nous avons appelé ce phénomène le miracle manitobain. En 1996, la ministre de la Justice Rosemary Vodrey a lancé une vaste enquête sur le système de droit familial qui a exposé à la lumière du jour la pratique des fausses accusations lors des procédures en divorce. Le président David Newman a ainsi déclaré: «Le comité a entendu des récits terribles sur l'effet traumatique sur la personne accusée, sur la famille immédiate et les enfants touchés par des fausses allégations malveillantes...»3. Le Comité de revue du droit civil a recommandé que «lorsque des accusations trompeuses sont mises à jour, des sanctions dures et efficaces soient imposées (page 27)».

Depuis la publication du rapport du groupe de travail sur le droit civil manitobain, des changements profonds sont intervenus dans les mécanismes sociaux intervenant dans les questions de droit familial. En l'espace de deux ans, la ministre de la famille Bonnie Mitchelson a fait le ménage dans les rangs des cadres des Services à l'enfance et à la famille. Durant cette période, nous avons vu nommer un nouveau sous-ministre, un nouveau sous-ministre adjoint, un nouveau directeur et un nouveau PDG du bureau de Winnipeg du Service de protection de l'enfance. Dans les services de santé faisant enquête sur les sévices à enfant, un nouveau directeur a été nommé au Centre de protection de l'enfant, l'organisation qui s'occupe de toutes les allégations de violence sexuelle à Winnipeg et dans ses environs. Au Centre de traitement des adolescents du Manitoba, un centre d'enquête pluridisciplinaire qui était régulièrement impliqué dans des fausses allégations en cours de divorce, le nouveau directeur entre en fonction en juin 1998.

Parents Helping Parents est très fier de pouvoir annoncer au reste du Canada que depuis mars 1997, nous n'avons décelé aucune nouvelle allégation fausse en cours de divorce corroborée par nos services de protection de l'enfance. Des fausses allégations continuent d'être faites dans les actions en divorce par des avocats qui placent des allégations de comportement criminel dans les documents d'affidavit, sans confirmation des autorités policières ou d'aide à l'enfance et sans conséquence pour le parent accusateur ou son avocat. Ce type d'allégations trompeuses est moins néfaste puisqu'il est plus facile de les prouver fausses, mais il faut néanmoins jusqu'à deux ans et des dépenses de près de 20 000 $ pour parvenir à cette conclusion. Dans l'intervalle, le parent accusateur et son avocat ont établi un statu quo de garde de longue durée qui est rarement modifié au stade du procès. C'est pourquoi neuf sur dix décisions de garde ne vont jamais jusqu'au stade du procès dans les tribunaux de la famille canadiens.

Les avocats se sont maintenant substitués aux travailleurs sociaux des SEF comme la cause première des allégations fausses dans les cas de divorce. Les nouvelles méthodes d'enquête mises en place par les systèmes de protection de l'enfance et de santé ont réduit dans une proportion étonnante les fausses allégations en cours de divorce. Pour cette raison, nous voulons renseigner le comité sur l'expérience manitobaine qui a fait apparaître les causes des fausses allégations et sur les méthodes utilisées pour réduire la fréquence des fausses allégations lors des actions en divorce.

CAUSE 1—MÉTHODES D'ENQUÊTE DE TYPE «VALIDATION»

Un examen poussé de la littérature scientifique sur les enquêtes relatives aux sévices sexuels à enfant a été entrepris par Parents Helping Parents4. En 1994, les SEF du Manitoba avaient encore recours aux mêmes méthodes d'enquête qu'au début des années 80, lorsque la notion simpliste et depuis discréditée voulant que «les enfants ne mentent jamais» était à son apogée.

Cette théorie était fondée sur la notion légitime qu'un enfant qui décrit un acte sexuel avec une grande connaissance de la sexualité a dû le vivre pour en donner une description si précise. Malheureusement, cette théorie a été appliquée à toutes les divulgations faites par les enfants, même celles qui ne témoignent d'aucune connaissance sexuelle de l'enfant.

Dans la littérature actuelle sur le sujet, ce postulat simpliste est largement discrédité. On admet aujourd'hui que des questions suggestives ou la motivation d'un adulte, tel qu'un divorce, peuvent influencer effectivement la divulgation d'un enfant. Cela a été prouvé à maintes et maintes reprises par les révélations fantastiques faites par les enfants dans des affaires fameuses telles que celle de l'école maternelle McMartin ou l'affaire canadienne récente de Martensville. On peut amener les enfants, particulièrement les plus jeunes, à croire au lapin de Pâques, au Père Noël et à la fée. Des adultes dérangés peuvent également les amener à proférer une révélation facile d'agression sexuelle dénuée de détails, pour des raisons égoïstes. Une enquête efficace permet de distinguer le profil d'une allégation fausse, à condition que les travailleurs sociaux disposent de la formation voulue.

On peut dire que l'école de pensée voulant que «les enfants ne mentent jamais» se contente de «valider» une allégation au lieu de procéder à une enquête pour déterminer si elle est vraie ou fausse. Puisque tous les validateurs abordent toute révélation faite par l'enfant comme «vraie», leur enquête est empreinte de ce préjugé qui empêche toute investigation raisonnable. Cette théorie est devenue une idéologie qui gouverne la tenue des enquêtes sur les abus sexuels menées par les travailleurs sociaux et les travailleurs de la santé.

Les praticiens qui souscrivent à la notion que «les enfants ne mentent jamais» sont également portés à croire au «syndrome d'accommodation de l'abus sexuel sur enfant». Cette théorie épouse la notion qu'un enfant qui rétracte une allégation souffre de l'effet de cette allégation sur la vie familiale et se rétracte pour rétablir la famille dans son état original6. S'il ne fait guère de doute que ce type de rétraction se produit parfois, il est tout aussi probable que maintes rétractions sont véridiques. Certains enfants disent avoir été longuement interrogés par des travailleurs sociaux et des psychologues qui ne lâchaient pas tant que l'enfant ne leur disait pas ce qu'ils voulaient entendre. L'enfant regrette ensuite ces allégations et les retire lorsqu'il n'est plus sous pression.

Les praticiens qui souscrivent au syndrome d'accommodation sont susceptibles de refuser dans tous les cas de croire un enfant qui se rétracte. Les mêmes personnes qui disent que les enfants ne mentent jamais lorsqu'ils font une allégation voudraient nous faire croire que les enfants mentent toujours lorsqu'ils font une rétraction. Ce genre d'illogisme règne en maître dans le milieu des travailleurs sociaux et des psychologues. C'est le résultat d'une mauvaise formation, d'une tendance excessive à la validation et de la crainte de laisser s'échapper un vrai coupable, aux dépens de la reconnaissance du traumatisme d'une fausse allégation. Mieux vaut que 100 hommes innocents soient condamnés que de laisser un coupable s'échapper.

Du fait de cette ignorance, le Manitoba a connu ce qui était peut-être le taux le plus élevé de validation de sévices sexuels du monde occidental. Le registre des sévices sur enfant de 1994 indiquait que 51 p. 100 des cas inscrits englobaient l'exploitation sexuelle7. Comparez ce chiffre au taux national américain de 1990 où seuls 14 p. 100 des cas de mauvais traitements mettaient en jeu des allégations d'abus sexuel, dont 41 p. 100 seulement étaient fondées8.

L'école de pensée plus efficace et plus moderne qui prend de l'ascendant au Manitoba aborde les enquêtes sur l'exploitation sexuelle sur la base du principe qu'une allégation peut être soit vraie soit fausse et toutes les variables en jeu sont pleinement analysées pour déterminer leur degré d'influence dans un cas particulier. C'est ce qu'on appelle l'approche «évaluation» dans les enquêtes sur l'exploitation sexuelle d'enfant.

Cette école reconnaît, par exemple, que dans les affaires de divorce hautement conflictuelles, il faut examiner de près une allégation pour déceler les signes qu'une influence est exercée sur l'enfant afin de priver l'un des parents, habituellement le père, du droit de visite après le divorce. Le syndrome d'allégation sexuelle en cours de divorce (syndrome ASD) était très répandu au Manitoba parce que les SEF ne reconnaissaient pas l'influence qu'un divorce conflictuel pouvait avoir sur une allégation d'abus sexuel. Une telle allégation, en effet, entraîne habituellement la suppression totale du droit de visite de l'accusé et de tous les membres de la famille paternelle.

Comme les profanes, les travailleurs sociaux des SEF étaient terrifiés à l'idée qu'une victime de violence sexuelle soit sans protection et préférait pécher par excès de prudence pour empêcher l'accusé d'avoir accès à l'enfant concerné. Les SEF se précipitaient pour nommer l'auteur beaucoup trop tôt dans le courant de l'enquête, avec souvent pour résultat que les preuves ultérieures étaient négligées dans le but de préserver la validation. L'horreur réelle des enquêtes fautives est que lorsque les SEF désignent trop vite un coupable, ils peuvent laisser passer ou ignorer des indices désignant un pédophile réel qui continue à avoir accès à l'enfant.

EFFET SUR L'ENFANT

Malheureusement, il ne peut être question de prudence lorsque on est confronté à une allégation d'abus sexuel sur enfant car l'enfant a toujours besoin de protection, que l'allégation soit véridique ou fausse. Un enfant victimisé par une fausse allégation se trouve sous la garde d'un parent dérangé qui fait passer ses propres besoins avant ceux de l'enfant. De même, l'enfant sera privé pour toujours d'une relation importante avec l'accusé et souvent tout le réseau familial de l'accusé. Les enfants faisant une fausse allégation sont souvent soumis à un long «traitement» psychologique qui par lui-même peut provoquer des troubles de la personnalité et un dysfonctionnement social chez l'enfant. Un enfant soumis à un traitement inutile peut commencer à présenter les séquelles à long terme de la violence sexuelle, notamment des jeux sexualisés, des cauchemars et des phobies sexuelles. PHP estime que nombre de ces enfants seront portés à formuler de fausses allégations contre d'autres plus tard dans leur vie.

Jan Paradise MD et al ont établi que les cas où existait un litige autour de la garde et du droit de visite étaient plus susceptibles de se produire lorsque l'enfant concerné avait moins de quatre ans. Ils considèrent que cela peut refléter la «plus grande probabilité qu'un enfant devienne source de conflit s'il est plus jeune et par conséquent plus influençable ou moins capable de faire un récit détaillé et cohérent9.

Le Dr Ralph Underwager, cité dans l'Alberta Report a indiqué qu'une fausse allégation de violence est traumatique pour l'enfant et ajoute: «Il est extrêmement violent de traiter les enfants qui n'ont pas été victimes de sévices comme s'ils l'avaient été. La conséquence est un conflit non résolu entre la perception qu'a l'enfant de la réalité et la perception déformée de figures d'autorité révérées, telles que les parents [et les travailleurs sociaux]10.

Une étude menée au Collège Westminster de l'Université d'Oxford compare l'effet sur les enfants à celui «d'avoir grandi dans une zone de guerre». «Les enfants deviennent excessivement anxieux, déprimés et craintifs», précise l'étude et Underwager souscrit, disant que [les enfants] ne savent pas d'où viendra la prochaine attaque11». Underwager précise qu'il est également très difficile de distinguer entre les symptômes d'un enfant véritablement victime et ceux d'un enfant traumatisé par la thérapie.

Les enfants soumis à un faux traitement sont initiés à la sexualité par le système même qui est censé les protéger. PHP considère cela comme une forme virulente d'abus sexuel qui doit prendre fin. Si les SEF se dotaient d'une connaissance raisonnable de la science de l'enquête sur la violence sexuelle, ils verraient qu'il existe un profil de fausse allégation tout comme un profil d'allégation véridique.

Par exemple, dans une fausse allégation, la révélation de l'enfant sera simpliste et dénuée de détails. Souvent, la divulgation fera état de la commission d'un acte violent avec couteau ou pince, ce qui est révélateur de l'ignorance de l'enfant concernant l'abus sexuel. Une fausse allégation est plus susceptible de survenir durant un divorce et souvent intervient à la suite d'un contact avec des foyers d'accueil de femmes, des travailleurs de la santé et des travailleurs sociaux des SEF.

La mère accusatrice dans une allégation en cours de divorce refusera souvent d'admettre que son enfant n'a pas été victime et semble inconsciente du traumatisme causé à l'enfant par le processus d'enquête lui-même. De telles mères se mettront souvent en quête d'un médecin ou psychologue disposé à confirmer l'abus sexuel. Ces mères sont souvent hypervigilantes sur le sujet de l'abus sexuel. En outre, les mères qui promeuvent une fausse allégation manifestent souvent des troubles de la personnalité spécifiques à l'occasion d'un examen. Au Manitoba, les fausses allégations d'abus sexuel sont souvent accompagnées d'accusation de viol et de violence familiale, ce qui témoigne d'une propension à lancer des accusations à tout-va.

Le système d'aide à l'enfance du Manitoba commence lentement à désavouer la croyance qu'il pèche par excès de prudence lorsqu'il valide une fausse allégation. La triste vérité est que, qu'une allégation soit véridique ou fausse, un enfant a besoin de protection dès qu'une allégation est faite, que ce soit contre un agresseur réel ou contre un parent dérangé qui lui vole son innocence pour servir ses intérêts égoïstes.

Il convient de noter que plusieurs cas étudiés par PHP ont fait l'objet d'une évaluation clinique et que l'on a découvert ultérieurement que les mères accusatrices présentaient des problèmes psychologiques majeurs ou des troubles de la personnalité. Une mère qui avait accusé son mari lors de l'action en divorce a averti celui-ci que s'il continuait à essayer de voir ses enfants, elle se tuerait, elle et les enfants, plutôt que de le permettre. Cette Manitobaine dérangée s'est plus tard rendue dans un parc, s'est aspergée d'essence et s'est tuée par le feu. Heureusement, elle n'a pas mis à exécution sa menace de tuer les enfants avec elle.

RECOMMANDATIONS SUR LES ENQUÊTES RELATIVES À L'ABUS SEXUEL

CAUSE 2—L'IMPORTANCE DES EXPERTS

Un diagnostic exact de la violence sexuelle dépend de nombreux facteurs, dont l'intégrité et les préjugés des experts concernés12. Schuman a écrit: «dans certains milieux, il y a un tel degré de sensibilité ou d'indignation relativement à d'éventuels mauvais traitement à enfant que la présomption existe que ces abus sont réels chaque fois qu'une allégation est formulée»13 Le postulat que toutes les allégations sexuelles sont forcément le résultat d'actes réels était certainement posé par les Services à l'enfance et à la famille du Manitoba. Les données fournies par la province en mars 1994 affirmaient que pas moins de 51 p. 100 des enfants placés en famille d'accueil avaient subi des violences sexuelles14. Comparer ce chiffre au taux national américain de 14 p. 100 de tous les cas signalés en 1990, dont 60 p. 100 ont été jugés comme «non fondés»15. On peut en conclure que les SEF du Manitoba ont produit le plus fort taux d'abus sexuel de l'hémisphère occidental.

Benedek et Schetky qualifient de «nouvelle industrie» cette propension des organismes sociaux à fabriquer graduellement des épouvantails favoris.

Dans leurs études des services de protection de l'enfance, Jones et McGraw ont observé que maints praticiens semblent tirer leur conclusion bien avant de disposer de données suffisantes17. Gardner estime que, avant d'accepter les conclusions d'un examen pour abus sexuel, il faut prendre en compte tous les «préjugés connus de l'examinateur», particulièrement dans les cas de litige sur la garde et le droit de visite, de même que l'expérience de l'évaluateur en manière d'expertise judiciaire et de cas similaires antérieurs18.

Au Manitoba, les meilleurs experts en matière d'enquête sur les abus sexuels travaillent au Centre de protection de l'enfance au sein d'équipes multidisciplinaires qui examinent chaque enfant visé par une allégation. Lorsqu'on compare le taux de validation des abus sexuels jadis enregistré par le centre à celui d'autres juridictions, on constate une différence énorme, à tel point que pratiquement tous les enfants vus par le centre étaient considérés comme victimes d'abus sexuel. Le problème de survalidation au centre remonte à une dizaine d'années. Par exemple, les statistiques de 1986 du Centre de protection de l'enfance indiquaient que 360 cas de violence à enfant suspectés ont été soumis au centre cette année-là. Sur ces 360 cas, le centre a déterminé que 339 enfants avaient été sexuellement exploités19. Le centre avait cette année-là un taux de corroboration de 94 p. 100 chez des enfants pour lesquels il n'y avait même pas allégation d'abus sexuel. Comparez cela au taux national américain en 1990 où les enquêtes sur les abus sexuel donnaient un taux de corroboration de 40 p. 100 et où l'abus sexuel était impliqué dans seulement 14 p. 100 des cas signalés.20.

Les SEF et le système de santé ont commencé l'année dernière à appliquer des techniques d'enquête objectives aux allégations formulées en cours de divorce. Malheureusement, cela n'empêche pas des parents dérangés d'attenter à la stabilité mentale et émotionnelle de leurs enfants, ni des avocats, des psychologues et employés de foyers d'accueil peu scrupuleux d'exécuter cette stratégie perverse destinée à garantir la garde à l'un des parents et à priver l'autre du droit de visite.

ÉTUDES DE CAS

Parents Helping Parents propose ci-après une courte description de cas choisis sur lesquels nous avons fait enquête au cours des quatre dernières années.

Toutes ces affaires démontrent de manière graphique que les parents qui poussent leurs enfants à de fausses allégations ont habituellement des problèmes psychologiques sous-jacents. Elles soulignent le coût pour la société, le système judiciaire, le système médical et le système d'aide à l'enfance, qui tous doivent consacrer pendant des années des ressources à l'appui de parents qui ont souvent besoin de soins psychiatriques à long terme. Même lorsque ces affaires sont jugées, les enfants restent habituellement sous la garde de ces mères. C'est dû au fait que le Manitoba refuse d'admettre, en dépit de toutes les preuves, que les enfants ont besoin de protection lorsqu'ils sont le sujet d'une fausse allégation de mauvais traitement.

CAUSE 3—LE DIVORCE ET LES FOYERS DE FEMMES

Au cours des cinq dernières années, depuis l'instauration de la politique de tolérance zéro de la violence familiale, il est maintenant possible que des hommes se voient accusés de violence familiale ou de sévices à enfant sans fondement. La justice pour les hommes est maintenant inversée, en ce sens qu'ils sont considérés coupables jusqu'à ce qu'ils trouvent le moyen de prouver leur innocence.

C'est profondément troublant, lorsqu'on songe aux effets que les politiques antimasculines de notre génération actuelle auront sur les jeunes garçons que nous élevons aujourd'hui. Nous considérons que cela marque le dépérissement de la paternité et de la masculinité dans notre génération, et chaque homme, chaque femme et chaque enfant en a sa part de responsabilité. Parents Helping Parents considère que cela a un effet traumatique sur les garçons élevés aujourd'hui, à tel point que c'est devenu une forme sociétale de maltraitance d'enfants.

La manière dont la législation sur le divorce privilégie le sexe féminin depuis quelques années a bouleversé l'équilibre délicat du pouvoir en tribunal de divorce. Aujourd'hui, une allégation de violence familiale au début d'une action en divorce place l'homme sur la défensive dès le début des négociations. Il est maintenant possible aux femmes de porter des accusations de violence familiale sans autre corroboration que leurs propres dires. La politique de tolérance zéro est naïvement fondée sur l'idée que les femmes ne sont pas capables de subvertir les intentions de la loi, ni capables de mensonge ou de manipulation pour parvenir à leurs fins dans une action en divorce. Quiconque a jamais connu une femme sur cette planète sait combien ce stéréotype est loin de la réalité.

L'absence de nécessité de corroboration aboutit à une augmentation spectaculaire du nombre des non-lieux, qui ont atteint 50 p. 100 de toutes les accusations de violence conjugale portées dans les tribunaux manitobains. Même après un non-lieu, les allégations de violence conjugale persistent dans les actions en divorce. Il n'est pas inhabituel de voir des cas où l'accusé n'a aucun antécédent de violence et pourtant est étiqueté comme conjoint violent au moment du divorce. Parents Helping Parents considère que les victimes réelles de violence auront habituellement des dossiers médicaux ou de police pour corroborer leurs dires et nous estimons que cette loi est détournée par des femmes qui usent de tromperie pour renforcer leur pouvoir contre les hommes. Le potentiel d'abus de la politique de tolérance zéro est très vaste.

Une cause manitobaine démontre la partialité sexuelle de notre système de cour familiale. En janvier 1995, Nathan Manton, âgé de 21 ans, a été abattu d'une balle dans la tête par son ex-femme de quatre mois21. Le couple était engagé dans une bataille pour la garde de leur enfant de deux ans au moment du meurtre. La mère était également inculpée pour un incident préalable où elle a été accusée de proférer des menaces, de possession d'une arme et d'agression avec un couteau. Elle a admis avoir menacé le père avec un couteau alors qu'il tenait l'enfant dans ses bras. En dépit de ces inculpations, un juge manitobain a accordé la garde provisoire à la mère. Deux semaines après cette décision, Nathan Manton a été abattu d'une balle dans la tête, que sa femme a avoué avoir tiré dans l'appartement du jeune homme. Sa défense était qu'il avait menacé de la tuer si elle ne le tuait pas. Aucune inculpation n'a jamais été prononcée dans le meurtre de Nathan Manton et la femme ne sera jamais jugée22. Les procureurs de la Couronne ont accepté la défense de la mère. Il est peu probable qu'un homme s'en tire jamais avec un tel alibi s'il avait tué son ex-femme chez elle.

LE SYNDROME D'ALIÉNATION PARENTALE

L'orientation féministe des foyers de femmes et autres services de soutien aux femmes imprègne le système judiciaire au point d'asseoir une idéologie voulant que les femmes soient incapables de violence ou de tromperie et que les hommes sont tous des prédateurs sexuels violents en puissance. Cela est démontré par le recours malhonnête aux allégations de violence familiale et de sévices à enfant, la forme la plus virulente de ce que l'on appelle le syndrome d'aliénation parentale. Il s'agit du phénomène, lors d'un divorce, où le parent qui a la garde use de sentiments extrêmes de colère, de haine et de peur pour couper les enfants du parent qui n'a pas la garde. La méthode employée pour provoquer le syndrome est l'entretien perpétuel d'une atmosphère empoisonnée par ces sentiments intenses dans la maison du parent qui a la garde, contre le parent qui ne l'a pas.

Les enfants du divorce peuvent être immergés dans le syndrome d'aliénation parentale en étant contraint sous la terreur à s'aligner sur le parent dominant, celui qui a la garde. Ces enfants sont contraints de rejeter les visites du parent qui n'a pas la garde sous peine d'affronter la colère et les hostilités de l'autre parent, jusqu'à ce qu'il rejette les visites. Le syndrome d'aliénation parentale est caractérisé par l'intensité des sentiments engendrés et le caractère extrême de l'aliénation par rapport au parent n'ayant pas la garde. L'aliénation par la peur précède souvent une allégation virulente de violence sexuelle sur enfant et est la plus dangereuse des trois pour la relation de l'enfant avec le parent n'ayant pas la garde.

Il ne faut pas sous-estimer le tort causé aux enfants par cet abus émotionnel virulent. Un père a fait remarquer que, bien que les tribunaux commencent à reconnaître que les parents ayant la garde sont souvent la cause de l'aliénation parentale, ils sont réticents à modifier les dispositions de garde des enfants qui en sont victimes de crainte que la séparation d'avec la mère soit «traumatisante». Le père fait valoir que cela revient à dire: «Les enfants sont dans un camp de prisonniers de guerre, mais cela les traumatiserait de les en sortir, alors on va les y laisser».

Parents Helping Parents considère que l'une des causes principales du syndrome d'aliénation parentale est le fonctionnement des foyers d'accueil de femmes. Ces foyers ont ostensiblement été créés pour accueillir les femmes battues, mais nous croyons qu'elles sont devenus pour les femmes des boutiques à divorce à guichet unique. Nous estimons que ces foyers contribuent largement au démarrage du syndrome d'aliénation mentale dans le processus du divorce.

La question de la violence familiale est une vache sacrée au Manitoba et cela fait pas mal de temps que nul n'a regardé de près le fonctionnement de ces foyers dans la province. Nous considérons qu'ils ne servent plus strictement les femmes battues de la province, mais que, pour justifier leur niveau de financement actuel, ils sont devenus des maisons de transition pour toute femme envisageant de se séparer de son partenaire masculin. Bien qu'en soi ce ne soit pas répréhensible, Parents Helping Parents s'alarme devant le nombre de fausses allégations d'abus sexuel émergeant de ces foyers.

Le personnel des foyers distribue souvent une littérature profondément aliénante qui peut donner naissance au syndrome d'aliénation parentale lorsque les femmes s'y présentent dans les premières phases d'une séparation. Le syndrome d'aliénation parentale est extrêmement néfaste au bien-être émotionnel et psychologique des enfants du divorce et les enfants sont certainement atteints par la privation chronique d'accès à l'autre parent qui en résulte souvent. Pourtant, les brochures accusatrices distribuées dans les foyers n'envisagent jamais la possibilité qu'une femme ait une part de responsabilité dans la fin d'une relation. Nous considérons que nombre de femmes parfaitement normales sont poussées vers le syndrome d'aliénation parentale par la philosophie professée dans les foyers.

Les femmes peuvent se présenter dans les foyers de cette province sans avoir à démontrer qu'elles sont effectivement des victimes de sévices. Souvent, un séjour dans un foyer de femmes est utilisé comme preuve qu'elle est victime de violence. Alors que seuls des rapports médicaux et de police pouvaient jadis valider une allégation de violence familiale, les foyers de femmes assument maintenant cette fonction.

Plusieurs femmes ont signalé que, s'étant rendues dans un foyer comme moyen de transition après leur départ du domicile conjugal, on leur demandait quotidiennement et avec insistance si elles avaient jamais été frappées par leur mari, ce qui s'accompagnait de pressions intenses pour le dépôt d'une plainte criminelle ou demander une ordonnance de non-communication contre leur mari ou ancien partenaire. Plusieurs femmes se sont vu dire qu'on les placerait en priorité sur les listes de logement si elles déposaient plainte ou demandaient une ordonnance de non-communication.

Un cas examiné par PHP est celui d'une femme autochtone mère de six enfants qui a commis l'erreur de se rendre dans un foyer d'accueil lorsqu'elle envisageait de quitter son mari. Son partenaire n'avait pas d'antécédent de violence, était âgé de 53 ans et était handicapé par un cancer du foie et la colostomie qu'il a dû subir. Elle envisageait de quitter le domicile en raison d'un gros conflit mettant en jeu ses deux filles aînées issues d'un autre partenaire. Elle a emmené les deux filles aînées et son nourrisson avec elle au foyer, laissant les trois autres enfants aux soins de leur père. Les SEF ont été notifiés et ont ultérieurement appréhendé les trois enfants restés avec le père pour les amener au foyer.

La femme a expliqué à Parents Helping Parents qu'on lui demandait quotidiennement si son ex-partenaire l'avait jamais frappée, à quoi elle répondait toujours «non». Elle a refusé de déposer plainte ou de demander une ordonnance de non-communication contre son mari. Après plusieurs semaines de séjour au foyer avec les six enfants, on a dit à la femme qu'elle recevrait plus rapidement un logement si elle demandait une ordonnance de non-communication contre son mari. Elle a fini par le faire pour obtenir un logement.

Au bout de la troisième semaine passée dans le foyer, la femme a décidé de retourner chez son mari. Les SEF ont immédiatement appréhendé les six enfants et ont refusé de les lui rendre tant que son mari ne quitterait pas le domicile conjugal. Bien que la femme ait nié de façon répétée être victime de violence familiale, les SEF détiennent maintenant les enfants depuis trois mois. Les six enfants ont été placés dans cinq foyers d'accueil différents et plusieurs ont déjà été déplacés trois fois depuis leur appréhension. L'un des enfants a tenté de se suicider par pendaison. Les SEF refusent jusqu'à présent de renvoyer les enfants chez eux en dépit de l'absence de preuve et d'accusation criminelle de violence familiale.

Parents Helping Parents a examiné quantité d'allégations d'abus sexuel formulées après un séjour dans un foyer d'accueil de femmes, allégations survenant souvent lors de la première phase de la séparation des conjoints. On signale que les enfants sont interrogés sur d'éventuelles violences sexuelles dans des salles de jeux séparées, hors de la présence de leur mère. Les employés des foyers n'ont aucune formation pour conduire des entretiens sur l'abus sexuel et nous avons déjà assez de problèmes avec le manque de qualification des travailleurs sociaux des SEF. Des questions répétées adressées à de jeunes enfants sur le thème de la sexualité peuvent susciter des allégations d'abus sexuel.

L'étude de cas suivante donne une illustration dramatique de ce problème. Mme B s'est rendue avec sa fille dans un foyer d'accueil de femmes en préparation de sa séparation d'avec son mari. Mme B maintient qu'il n'y avait pas de violence dans le mariage, mais qu'elle avait besoin d'aide pour trouver un logement vu que la famille venait récemment de s'établir ici, venant de l'Alberta. Au cours de son séjour de trois semaines au foyer, sa fille de cinq ans a été emmenée dans une salle de jeux au sous-sol par le personnel. Lorsque la mère est venue voir ce que faisait sa fille, on lui a dit que l'enfant «était plus à l'aise» sans la présence de sa mère.

Au cours de la troisième semaine, l'enfant a fait des révélations d'abus sexuel censément perpétré par le père. Les travailleurs sociaux des SEF ont été mis sur le cas. La mère et Parents Helping Parents ont rencontré le personnel de l'agence et sont parvenus à négocier un plan d'évaluation. L'évaluation a établi que l'enfant n'avait pas été victime et a été plutôt traumatisé par les méthodes de l'agence elle-même. L'enfant tenait des propos méprisants sur les «SEF» et faisait preuve d'un manque de confiance envers les adultes inconnus qui essayaient de la questionner. Elle était également très anxieuse de voir le père réintégrer le domicile. Le père était très coopératif et on ne lui a trouvé aucune tendance pédophile. Ce père a été lavé de toutes les allégations et a réintégré le domicile environ trois mois après le séjour dans le foyer d'accueil.

Il faut signaler aux Manitobains qu'il n'y a pas de critères d'acceptation dans un foyer de femmes battues et ces centres semblent attirer quelques femmes qui exploitent le foyer pour corroborer des allégations ou en porter. L'étude de cas suivante démontre le problème.

En 1995, celle qui était la compagne de M. A depuis trois ans s'est rendue dans un foyer de femmes. Peu après, la fille de M. A, âgée de trois ans et demi, a révélé que quelqu'un lui avait enduit le ventre de crème et l'avait touchée dans le foyer. Le personnel du foyer a déclaré que la seule fois où l'enfant avait été seul était dans la salle de jeux, avec le personnel, l'entrée de la salle étant interdite aux mères.

Deux semaines après que M. A ait signalé les révélations de sa fille, il s'est retrouvé lui-même accusé d'abus sexuel sur son enfant. Le cas a été évalué et M. A exonéré. Il s'est également soumis à deux tests polygraphiques administrés par un praticien privé et par la police qui l'ont également exonéré. Bien qu'il n'y ait maintenant aucun expert ou aucune autorité d'aide à l'enfance croyant à cette allégation, le père a dû se soumettre à la supervision de ses visites à sa fille, à un coût de 12 000 $ depuis l'allégation. La cause Antonowich c. Thom sera entendue en justice pour la détermination de la garde en mai 1998.

Nous avons maintenant entendu quantité de récits de mères qui disent s'être vu refuser l'entrée dans la salle de jeux sous prétexte de donner un temps de repos aux mères. Nous soupçonnons que c'est à ce moment que le personnel du foyer procède à un interrogatoire suggestif des enfants qui peut résulter en une fausse allégation de sévices à enfant. Ces allégations se caractérisent par une révélation simple, du type «Papa a touché mes parties génitales», une formule qui revient souvent dans les allégations faites dans les foyers. Les enfants concernés sont souvent âgés de trois à cinq ans et les révélations comportent souvent des descriptions de sévices violents et invasifs qu'aucune trace physique ne vient confirmer.

Parents Helping Parents a également relevé qu'un jeu de dessins couramment joué dans les foyers d'accueil de femmes résulte en des allégations d'abus sexuel. Le jeu consiste à tracer deux lignes sur une feuille de papier ordinaire, délimitant quatre espaces. Dans les espaces, l'enfant dessine, tandis qu'un adulte écrit les paroles censément prononcées par l'enfant. C'est le jeu connu sous le nom de «fâché, content, heureux, triste» car chacune des cases est consacrée à l'un de ces thèmes. À quatre reprises, Parents Helping Parents a vu ces feuilles de dessins où l'adulte a inscrit dans la case tristesse «je suis triste quand quelqu'un touche mes parties génitales». Parents Helping Parents est alarmé par la nature suggestive de ce jeu et s'inquiète devant les indications croissantes de ce que les foyers d'accueil de femmes s'arrogent maintenant le rôle d'examinateurs d'abus sexuel.

RECOMMANDATIONS CONCERNANT LES FOYERS D'ACCUEIL DE FEMMES

CAUSE 4—L'INFLUENCE DU FÉMINISME SUR LA LÉGISLATION EN MATIÈRE DE GARDE ET DE DROIT DE VISITE

Dans la plupart des juridictions canadiennes, l'accès et le droit de visite sont devenus des questions brûlantes, les pères s'insurgeant contre un système judiciaire qui confie toujours la garde aux mères et ne fait rien pour contraindre au respect des droits de visite. Ce comité a entendu maints témoins qui prétendent qu'il n'y a pas de problème, puisque seul un cas sur dix est jamais tranché en tribunal de divorce. La féministe locale Penni Mitchell a récemment affirmé dans un article sur le comité mixte que l'absence de procès est indicatif d'un «état de chose harmonieux». Elle a de plus argué:

Si notre système de justice pénale présentait un taux de condamnation de 90 p. 100 avec seulement un cas sur dix allant jusqu'au procès, nous dirions qu'il y a là un degré considérable d'injustice. Nous faisons valoir que l'absence de procès en cour familiale n'est pas un indicateur fiable des conflits et qu'il faut plutôt considérer la durée de la procédure judiciaire. Le groupe d'étude du droit civil du Manitoba a relevé que le délai moyen pour qu'une affaire de droit familial soit tranchée par les tribunaux est de deux ans et demi, certains cas traînant jusqu'à 10 ans. Il est de fait qu'après un statu quo de garde de deux ans, les chances d'un père d'obtenir la garde son presque nulles.

Il est déconcertant de voir que le mouvement visant à éliminer les stéréotypes sexuels qui a si bien réussi et est ramené en arrière par les théoriciennes féministes qui continuent à pousser pour l'égalité dans la sphère publique tout en voulant préserver une préférence spéciale pour les femmes dans la sphère privée du droit familial. Or, cette idéologie de la maternité a exclu les hommes de la famille et nous estimons que cette attitude ignore les nombreux changements intervenus dans le système de valeurs des hommes, considérés collectivement. Tout le débat sur l'égalité des sexes semble tourner exclusivement autour du rôle des femmes et ignore que les hommes changent en même temps que les femmes et découvrent les joies du souci d'autrui, de l'interaction personnelle, de la paternité et de la vie de famille.

Les grandes généralisations sur les personnalités et traits de comportement respectifs des hommes et des femmes tiennent mal lorsqu'on étudie des adultes individuels24. De même, les femmes n'ont pas d'attributs spéciaux qui les rendraient tellement plus aptes à élever des enfants qu'elles méritent la préférence dans les conflits sur la garde. Au lieu de rétrograder en glorifiant les femmes et en démolissant les hommes, il faut plutôt reconnaître le tort sérieux causé aux enfants lorsqu'ils sont systématiquement privés de leur père après un divorce. Il faut chérir la parenté au niveau de l'évolution de nos enfants, plutôt que de choisir des camps et de créer des politiques qui ne font qu'ancrer dans le droit familial la guerre des sexes.

RECOMMANDATIONS:

Au nom des familles de Parents Helping Parents, nous voulons remercier le Comité sur la garde et le droit de visite de nous avoir permis de contribuer à ses importants travaux.

_________________________

1, Bray, Allison (3 septembre 1995) «Abuse: Too many cry wolf». Winnipeg Free Press. Al, A3.

2, Johnson, Glen (23 juin 1996) Hundreds Tagged as Kid Molesters: 560 men falsely accused of child abuse. Winnipeg Sun. pp 1-3.

3, David (président) (septembre 1996) Manitoba Civil Justice Review Task Force Report. Présenté à l'honorable Rosemary Vodrey, ministre de la Justice.

4, Malenfant, Louise (1995) «B.T. c. Dr. Jekyll». Version à psyeudonyme d'une plainte présentée au Collège des médecins et chirurgiens du Manitoba, contenant une revue complète de la littérature sur les preuves médicales touchant les enquêtes sur les abus sexuels. Non publié.

5, Voir aussi Malenfant, Louise (1995) «The Validation Funnel». Étude de cas sous pseudonyme d'une allégation sexuelle dans une action en divorce avec examen complet de la littérature sur les preuves psychologiques dans une enquête sur abus sexuel. Trois membres de la famille paternelle de l'accusé ont été reconnus entièrement innocents.

6, Summit, Roland MD (1983) The child sexual abuse accommodation syndrome. Child Abuse and Neglect. 7. pp 177-193.

7, See Parker, Roy (1994)

8, Besharov, D. (1990) Gaining control over child abuse reports. Public Welfare. 48.2. pp 3480.

9, IBID, pp 839.

10, McGovern, Celeste (1994) Alberta Report. Numéro du 3 octobre. pp 44.

11, Prosser, Jon (1995) An ethnographic case study approach to studying the process of child abuse investigation in the United Kingdom. Issues in child Abuse Accusations. Vol 7: No. 3. pp 146-163.

12, Gardner, R. (1991) Sex Abuse Hysteria: Salem Witch Trials Revisited. New Jersey: Creative Therapeutics. pp 119.

13, Schuman, D.C.(1984) False allegations of physical and sexual abuse. Communication présentée à la Conférence annuelle de l'American Academy of Psychiatry and the Law. Nassau, Bahamas.

14, Parker, Roy (1994) Données non publiées. Professeur invité à l'Université du Manitoba.

15, Besharov, D. (1990) Gaining control over child abuse reports. Public Welfare. 48:2. pp 34-80.

16, Benedek and Schetky. In Robin, Michael (ed) (1991) Assessing Child Maltreatment Reports: The Problem of False Allegations. Haworth Press: New York. pp 95.

17, Jones, G & J. McGraw (1987) Reliable and fictitious accounts of sexual abuse to children. Journal of Interpersonal Violence. 2. pp 27-45.

18, Cole, pp 7.1.04.

19, Morris, Maggie MD (1988) Sexual abuse of the female child. contemporary Ob/Gyn. 37.

20, Besharov, D (1990) Gaining control over child abuse reports. Public Welfare. 48:2. pp 34-80.

21, Owen, Bruce (5 janvier 1996) E.K. Man Shot Dead: Wife Arrested. Winnipeg Free Press. pp Al-A2.

22, Kuxhaus, David (12 septembre 1996) Wife's Murder Charge Stayed. Winnipeg Free Press. pp Al-A2.

23, Mitchell, Penni (28 avril 1998) Divorce Wars Heating Up. Winnipeg Free Press. pp A12.

24, Chambers, M (1984) Rethinking the substantive rules for custody disputes in divorce. 83. Michigan Law Review. pp 477-520.

25, Voir Scott c. Scott (29 janvier 1990) Cour suprême de l'Ontario. Juge Fitzgerald président; W.A.H. c. S.M.L. (26 juin 1997) Nova Scotia Family Court. Juge Legere président; Lindsay c. Lindsay (29 décembre 1995) Cour de Justice de l'Ontario, juge Kileen président; P (TMA) c. P(FA) (24 mai 1995) Alberta Queens Bench, juge Trussler président.

Mme Louise Malenfant: Je vous remercie.

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): Voudriez-vous passer à vos recommandations, je vous prie.

Mme Louise Malenfant: L'une des choses à ne pas perdre de vue est la manière dont ces fausses allégations ont pris naissance en premier lieu, car elles n'ont pas toujours existé. Il faut bien voir, et cela est certainement reconnu ici, au Manitoba, que les services d'aide à l'enfance et les services de santé qui faisaient enquête sur les allégations de mauvais traitement étaient imprégnés d'une certaine idéologie de la validation. On partait du principe que toute allégation était vraie, que les enfants ne mentent jamais et que l'on ne peut amener un enfant à mentir au sujet d'un abus sexuel. Depuis, on a établi au Manitoba des méthodes d'évaluation comme celles suivies par Mme Golfman, qui est hautement considérée par notre organisation, méthodes systématiques qui permettent de distinguer une allégation véridique d'une allégation fausse.

J'aimerais formuler quelques recommandations au comité. Tout d'abord, nous sommes fermement d'avis que des sanctions en droit pénal et civil doivent être imposées à ceux qui allèguent faussement des sévices durant une action en divorce ou autrement. Nous fournissons en annexe une synthèse de trois pages d'une loi débattue en Californie qui s'attaque au problème des fausses allégations de sévices à enfant lors d'une action en divorce.

L'autre recommandation très importante que nous faisons à votre comité intéresse la Loi sur le divorce. La règle du parent amical, le paragraphe 16(10), ne fonctionne pas. Elle est très rarement invoquée en cour de justice. Et nous pensons qu'en sus du paragraphe 16(10) il faudrait une disposition précisant qu'un enfant soumis à une fausse allégation est tout autant traumatisé que par d'autres mauvais traitements et qu'un parent qui est prêt à faire subir cela à son enfant ne devrait pas recevoir la garde de celui-ci. Autrement dit, nous disons qu'il ne faut pas récompenser ce comportement odieux en confiant la garde à la personne qui n'hésite pas à formuler les allégations les plus viles.

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J'ai beaucoup d'autres recommandations, mais je pense que celles-ci sont les plus importantes que Parents Helping Parents a formulées.

Nous pensons aussi que des sanctions pénales devraient être infligées aux avocats qui font de fausses allégations. Rien ne les arrête et, de fait, leurs clients sont récompensés par le procédé consistant à placer dans des affidavits de fausses allégations qui ne sont corroborées ni par l'aide à l'enfance ni par la police.

Je m'en tiendrai là. Je vous remercie.

La sénatrice Anne Cools: Je suis prête à sacrifier mes cinq premières minutes de questions pour laisser le témoin lire au comité la totalité de ses recommandations.

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): Pourquoi ne posez-vous pas simplement la question?

M. Paul Forseth: Disons que c'est là votre question.

Mme Louise Malenfant: Vous aimeriez entendre quelques autres recommandations, sénatrice Cools?

La sénatrice Anne Cools: Ce que j'essayais de dire, c'est que ce serait sans doute utile pour le comité et j'étais prête à sacrifier ma période de questions.

Mme Louise Malenfant: D'accord. Je vais vous donner quelques autres recommandations, dans ce cas.

Une grande recommandation est que, dès qu'une allégation est faite lors d'une action en divorce, elle soit immédiatement confiée à un maître spécial, comme Mme Golfman le propose, ou à quelqu'un dans le système judiciaire capable d'identifier rapidement ces cas et d'ordonner sans délai une évaluation. Nous avons constaté qu'une fois qu'une bonne évaluation clinique est en train, ces allégations tendent à être retirées.

Nous recommandons également que le droit de visite soit maintenu lorsqu'une allégation est faite, de préférence sous supervision, et de préférence une supervision assurée par le système judiciaire lui-même. La fourniture des services dans cette province, et je suppose dans tout le pays, est marquée par une grande partialité et je pense que plus on les rapproche du système judiciaire, et meilleurs seront les mécanismes et services, de façon à éviter cette partialité.

Pour ce qui est des experts, il faut bien cerner les préjugés qui existent dans la collectivité et identifier des experts objectifs.

L'un des constats les plus importants que Parents Helping Parents a fait dans ses efforts d'aider les pères accusés de sévices à enfant lors d'une action en divorce—et je précise que nous avons défendu 64 dossiers et que, sur ce nombre, 49 pères ont été réunis avec leurs enfants après le divorce. Une fois qu'une allégation est déclarée non fondée, la garde conjointe est souvent décidée. Nous avons constaté que, très souvent, une fois que les parents qui formulent les allégations sont confrontés à leur comportement, ils cessent de refuser le droit de visite ou de formuler des allégations.

Parents Helping Parents est convaincu qu'une présomption de garde conjointe rétablirait l'équilibre des pouvoirs entre les parties dans une action en divorce, réduirait le nombre de cas d'allégations et infligerait des conséquences aux parents qui n'hésitent pas à soumettre leurs enfants au traumatisme d'une fausse allégation et à leur refuser l'accès à la famille paternelle après le divorce.

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): Monsieur Forseth.

M. Paul Forseth: Mes questions s'adressent à tous deux. Vous pourrez peut-être nous donner les renseignements plus tard, mais existe-t-il un corpus d'ouvrages sur le sujet? Vous pourriez peut-être nous donner les références d'études sur le problème des accusations d'abus sexuel dont on constate qu'elles sont fausses après une évaluation psychologique—pas nécessairement liées à la dynamique de la garde ou du droit de visite, simplement le phénomène de la plainte, l'évaluation, et peut-être les lignes directrices pour les psychologues spécialisés dans le domaine. Vous pourriez peut-être nous citer quelques autorités.

Mme Rosalyn Golfman: L'un des meilleurs ouvrages est Jeopardy in the Courtroom, de Ceci et Bruck. Il a paru il y a deux ans et contient toutes les principales études et tous les comportements trahissant les fausses allégations. C'est l'ouvrage le plus complet sur le sujet.

M. Paul Forseth: Est-ce un ouvrage américain?

Mme Rosalyn Golfman: C'est un ouvrage américain qui a pour titre Jeopardy in the Courtroom.

Mme Louise Malenfant: Il y a une très bonne équipe de chercheurs canadiens qui travaillent surtout en Ontario. Il s'agit de Wehrspan et Klajner-Diamond, et je les cite dans mon exposé. Ces chercheurs ont effectué une analyse très pointue des éléments de preuve dans les cas d'allégations de sévices et ont très bien cerné les différentes formes d'allégations, les véridiques par opposition aux fausses. Je suis très impressionnée par leurs recherches.

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Il y a aussi Benedek et Schetky, des chercheurs américains. Ce sont des médecins qui ont également isolé le profil d'une allégation véridique par opposition à une allégation fausse.

M. Paul Forseth: Merci.

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): La parole est au Dr. Bennett.

Mme Carolyn Bennett (St. Paul's, Lib.): Une préoccupation exprimée tout au long des audiences porte sur la qualité des évaluations et, parfois, leur superficialité. Nous en avons entendu de toutes sortes, mais elles tendent à être tenues pour vraies, comme vous, Mme Golfman, l'avez indiqué dans votre exposé. Il y a aussi des problèmes structurels, tels que les tribunaux de la famille unifiés, ce genre de choses.

Ce que nous essayons de déterminer, c'est ceci: dans le petit pourcentage des divorces hautement conflictuels qui aboutissent en justice, quelle est la meilleure façon de traiter ces cas? Faudra-t-il effectuer presque dans tous les cas une évaluation des enfants, afin que leurs besoins soient pris en compte? Si l'on va effectivement concevoir une approche multidisciplinaire, avec un maître et toutes ces choses, comment faudra-t-il structurer cela? Comment assureriez-vous la qualité des évaluations pour tous les enfants du Canada?

Mme Rosalyn Golfman: Je pense qu'il faudrait instaurer un certain contrôle de la qualité, je suppose, en inscrivant dans la loi un type d'évaluation ou en suivant certaines lignes directrices.

Mme Carolyn Bennett: Donc vous pensez qu'il pourrait effectivement y avoir...

Mme Rosalyn Golfman: Je pense que l'Ontario a...

Mme Carolyn Bennett: ... ce qu'il faut pour une bonne évaluation.

Mme Rosalyn Golfman: Oui, l'Ontario a des lignes directrices en matière d'évaluation, qui permettent d'administrer les tests psychologiques et d'évaluer toutes les parties. C'est le genre de choses qu'il faudrait imposer dans la loi. Dans le cas d'un divorce, ce devrait être immédiat.

Mme Carolyn Bennett: Donc, si nous réécrivons la Loi sur le divorce, une évaluation devrait précéder toutes les décisions en matière de garde et de droit de visite.

Mme Rosalyn Golfman: Oui, je le pense. Une évaluation immédiate doit être faite.

Par ailleurs, je fais partie d'un groupe de prestateurs qui cherchent à mettre sur pied un centre de consultation pour les familles hautement conflictuelles où nous offririons des cours sur l'art d'être parent. Nous ferions les évaluations.

Nous en sommes loin. Nous avons 25 000 $ pour voir cinq familles. Nous espérons pouvoir rédiger quelques lignes directrices pour régler certains des problèmes que j'ai mentionnés. Je pense que s'il existait quelques centres pour effectuer ces évaluations et avoir un contrôle de la qualité, ce serait utile.

Mme Carolyn Bennett: Hier, un intercesseur pour les enfants a comparu devant le comité. Je me demandais si la méthode suivie consiste à simplement accorder foi à tout ce que l'enfant dit. Habituellement, ce n'est que dans des circonstances exceptionnelles que l'enfant est envoyé en consultation ou évaluation, ou ce genre de choses. Mais, en gros, le rôle de l'intercesseur est simplement de mettre sur la table ce que l'enfant a dit. Je me demandais quel était l'intérêt de cela. C'est peut-être simplement moi, en tant que médecin de famille qui ne le voit pas. Mais si je devais consacrer des ressources à quelque chose, ce serait à votre évaluation et à la rigueur scientifique de celle-ci, par opposition au simple rôle d'avocat.

Mme Rosalyn Golfman: C'est un rôle partiel. L'intercesseur ne dispose pas de renseignements fiables, particulièrement dans les cas d'allégations d'abus sexuel. Il ne sait pas d'où sort l'allégation et ne connaît pas son contexte. Or, c'est indispensable. Il faut parler à toutes les parties concernées pour comprendre la situation. Pourquoi l'enfant dit-il ce qu'il dit?

Mme Carolyn Bennett: J'aimerais beaucoup entendre aussi ce que vous avez à dire, mais j'ai une autre question. Pensez-vous que dans tous les cas de divorce, lorsqu'un enfant dit ne pas vouloir voir un parent, une évaluation psychologique doit être faite?

Mme Rosalyn Golfman: Si un enfant ne veut pas voir un parent, oui. Si l'enfant ne veut pas voir le parent, il faut déterminer pourquoi.

Mme Carolyn Bennett: D'accord.

Mme Rosalyn Golfman: Vous ne pouvez vous fier à l'avis de l'enfant ou à l'avis d'un parent, à cause de toutes les choses que j'ai dites. Il y a tant de facteurs en jeu. Je pense que c'est extrêmement complexe.

Ensuite, comme Louise le disait, il y a des troubles de la personnalité que nous pouvons identifier mais que le parent peut mal interpréter. Je pense qu'un très petit nombre de parents inventent carrément un mensonge et veulent aliéner l'enfant. Ce sont des cas assez rares. C'est plutôt dû à une mauvaise interprétation ou appréhension de la relation.

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Mme Carolyn Bennett: Ou à une insécurité.

Mme Rosalyn Golfman: Ou une insécurité.

Je pense que c'est souvent non intentionnel. Mais si vous faites une évaluation et montrez aux parents ce qui se passe, quel est le trouble de la personnalité, vous avez une meilleure possibilité d'arriver à la vérité et de formuler des recommandations judicieuses sur ce qu'il convient de faire.

Mme Carolyn Bennett: Je vous suis très reconnaissante à tous deux de vos exposés, car je pense que la question des troubles de la personnalité et de l'évaluation des troubles est un élément très important dans ces situations hautement conflictuelles...

Mme Rosalyn Golfman: Exactement.

Mme Carolyn Bennett: ... et leur résolution. Je pense que cela a été très utile.

Mme Louise Malenfant: Dr Bennett, j'ai trouvé certaines de vos questions très perspicaces, particulièrement votre analyse critique de la théorie voulant qu'il faille croire l'enfant et prendre toutes ses paroles pour argent comptant. C'est la position de principe de M. Govereau, mais elle est réellement très dépassée. La littérature professionnelle sur les enquêtes d'abus sexuel des enfants et les mauvais traitements à enfant en général a renoncé à cette thèse depuis le début des années 80, lorsqu'on pensait encore que les enfants ne pouvaient mentir. Depuis lors, bien entendu, nous avons appris à cerner des phénomènes tels que le syndrome d'aliénation parentale, dans lequel un enfant est amené à haïr et mépriser le parent aliéné par le parent qui a la garde. On peut effectivement créer ces révélations alléguant des actes sexuels violents et incroyablement monstrueux qui peuvent être répétées pendant des années.

Je pense que le problème avec la position de notre intercesseur des enfants, Wayne Govereau, est qu'il ne voit pas le traumatisme causé aux enfants auxquels cela est infligé. Nous pensons que ce n'est pas différent de sévices sexuels physiquement subis par un enfant.

Une dernière remarque que je ferai sur vos questions est qu'il est toujours difficile pour une personne, partout, de savoir qui effectue de bonnes évaluations, et qui en effectue de mauvaises, particulièrement pour le particulier happé par le processus judiciaire. Il n'y a aucun moyen d'évaluer ceux qui font les évaluations.

Au Manitoba, une partie du rôle de Parents Helping Parents a été d'identifier les praticiens qui concluent systématiquement à la réalité des mauvais traitements, qui sont partiaux envers un sexe. Si les gens viennent nous voir et demandent si tel ou tel évaluateur est bon, nous pouvons leur dire de l'éviter comme la peste. Nous savons qui sont les bons évaluateurs. Nous savons qui effectue des évaluations scientifiques correctes en ville.

Mme Carolyn Bennett: Dans notre recherche de solutions possibles, je sais que vous avez recommandé la garde conjointe. Avez-vous, l'un ou l'autre, une opinion sur un changement de libellé dans les textes de loi sur la garde et le droit de visite, comme cela a été fait dans certaines juridictions, de telle façon que l'enfant ait les droits et les parents aient les responsabilités? Et comment pourra-t-on établir les responsabilités partagées, sur le plan du temps, de l'argent, toutes sortes de choses, et établir un plan parental en l'absence de ces mots dans la loi? La théorie était qu'il fallait se débarrasser de cette notion de gagnant et de perdant qui amène les gens à continuer à se battre. Pensez-vous qu'en changeant le libellé on pourra aboutir à des situations moins conflictuelles?

Mme Louise Malenfant: À condition de changer l'équilibre effectif des pouvoirs entre les sexes qui existe en ce moment. À l'heure actuelle, le droit familial est biaisé en faveur des femmes. Je sais que l'on vous a dit à plusieurs reprises que seul un cas sur dix aboutit en tribunal, ce qui signifierait qu'il n'y a que très peu de conflits et que le comité perd son temps et remue des eaux troubles sans raison.

Mais ce que les gens ne voient pas dans cet ethos particulier, c'est que l'on ne peut mesurer le degré du conflit dans notre système à l'aune du nombre de cas aboutissant en justice. On ne peut que mesurer combien de temps une affaire traîne en justice. Ici, au Manitoba, le délai moyen avant un jugement en droit familial est de 2,1 ans. L'affaire qui traîne depuis le plus longtemps dépasse dix ans, sans procès et sans règlement. Je suis sûr qu'il en est de même dans tout le pays. Mais les gens préfèrent conclure que s'il n'y a pas de procès, il n'y a pas de problème.

S'agissant du libellé, je pense qu'il importe de supprimer la garde exclusive, car celle-ci donne à un parent licence d'éradiquer l'autre de la vie des enfants.

• 1445

Je pense que les arrangements de garde partagée sont certainement moins conflictuels. À condition qu'il y ait un équilibre des droits entre les deux parents, afin que l'un n'ait pas le pouvoir d'éliminer l'autre, cela contribuerait largement à prévenir certains de ces terribles problèmes au Canada.

Mme Carolyn Bennett: Une question rapide. La raison des longs délais avant une décision judiciaire est-elle une pénurie de ressources, soit un manque de juges et de salles de tribunal?

Mme Rosalyn Golfman: Non. Je pense que la clé est d'obtenir une évaluation immédiatement. Si l'affaire va en cour de conciliation familiale, il faut habituellement un an pour faire l'évaluation.

Mme Louise Malenfant: C'est un grand problème, en sus du fait que les évaluations ne sont pas commencées immédiatement lorsque les allégations sont faites. Pour l'avocat qui représente l'accusateur—il est dans l'intérêt de l'accusateur de faire traîner les choses indéfiniment—plus longtemps le statu quo dure et mieux cela vaut pour le parent accusateur. D'ici que le procès ait lieu... Je représente des pères qui n'ont pas vu leurs enfants depuis quatre, cinq ou six ans sans jamais avoir eu de procès. Des allégations très graves ont été formulées contre eux, sans que des accusations criminelles soient portées, des allégations très graves de sévices à enfant.

Pour répondre à votre question, Dr Bennett, ce qu'il faut voir ici c'est que la partie qui a la garde au moment où l'allégation est formulée a grand intérêt à retarder la procédure. Il faut veiller à supprimer le pouvoir de faire traîner les choses en procédant immédiatement à l'évaluation et en transmettant ces dossiers en cour immédiatement. De même, je pense qu'il ne faut pas accorder tant de poids au statu quo, car les parents qui n'hésitent pas à infliger à leurs enfants ces épreuves terribles ne devraient pas avoir la garde, un point c'est tout.

Mme Rosalyn Golfman: Qu'en est-il de l'évaluation? Habituellement, ces dossiers n'aboutissent pas en justice. Un grand nombre d'entre eux ne vont pas en cour. Quantité d'évaluations sont faites qui ne vont jamais jusqu'en cour; un règlement intervient avant.

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): Sénatrice Cools.

La sénatrice Anne Cools: Je veux remercier les témoins. Ces témoins que nous entendons en ce moment connaissent très bien les questions portées à notre attention. Je pense que le comité, peut-être à notre retour à Ottawa, aurait intérêt à les inviter de nouveau, pour s'informer plus avant du problème.

J'aimerais revenir sur un petit élément mis en lumière par les deux témoins, particulièrement par Mme Malenfant, lorsqu'elle a dit que ce type particulier de fausses allégations de mauvais traitement est quelque chose de récent. Vous avez décrit le profil de l'allégation véridique par opposition à l'allégation fausse, et j'aimerais connaître l'avis de l'un ou l'autre des témoins concernant l'origine de ces allégations ou de ce type de... En fait, de ces stratégies, ces stratégies très violentes consistant à éliminer un parent. Avez-vous idée de l'origine de cela, du moment dans notre société où cela est apparu et les forces sociales qui ont donné naissance à cela?

Mme Louise Malenfant: Si vous permettez, Rosalyn, j'aimerais essayer de répondre.

J'ai une formation de sociologue historienne, une spécialité consistant à remonter aux origines pour identifier les phénomènes dans la collectivité. Nous en suivons ensuite l'évolution et la transmutation dans une collectivité.

Ce que nous avons fait, et ce que Parents Helping Parents a découvert, est qu'au début des années 80, fin des années 70, le féminisme a pris une grande influence dans notre société et nous étions à l'écoute du féminisme. L'un des phénomènes du féminisme est le fait que quantité de femmes qui ne s'étaient jamais senties libre de s'exprimer et de parler d'abus sexuel se sont tout d'un coup mises à parler et à décrire des événements très réels—très probablement vrais—d'exploitation sexuelle dans leur enfance.

Cependant, par la suite, cela s'est transmué en une croyance ou philosophie voulant que chaque enfant ait été exploité, que chaque femme ait été victime et que chaque homme soit un exploiteur violent. Sont ainsi apparus ces stéréotypes très rigides qui ont, à leur tour, influencé la société, au niveau de la protection de l'enfance, des enquêtes de protection des enfants, des personnels de santé faisant enquête sur des allégations et même des avocats conseillant les parties dans une action en divorce. Il est devenu très courant d'entendre parler de sévices à enfant et de croire aux sévices à enfant.

• 1450

Cela, conjugué à cette idéologie, en quelque sorte, voulant que les enfants ne mentent jamais, qu'il faut croire l'enfant et qu'une fausse allégation ne peut exister, a fait que le problème a pris des proportions réellement horribles au Canada, et aussi aux États-Unis. Ici, au Canada, nous commençons seulement à émerger de l'obscurité de ce phénomène, mais aux États-Unis il a été réglé il y a environ cinq ou six ans.

La sénatrice Anne Cools: Dans mes propres recherches, j'ai déterminé que la croissance ou la prolifération a commencé autour de 1985.

Mme Rosalyn Golfman: Je pense que cela remonte même plus loin, à Freud, lorsque Freud a déclaré que les enfants étaient sexuellement exploités et que c'était là la cause des neuroses. Il a ensuite changé d'avis, disant que c'était strictement des fantasmes d'enfants.

Je pense donc que les enfants n'étaient jamais crus. On ne les croyait pas assez, et puis, comme Louise l'a dit, avec le féminisme, on les a crus toujours, comme s'ils étaient incapables d'inventer une telle histoire.

Ce n'est qu'en 1991, lorsque des chercheurs comme Ceci et Bruck et Goodman et d'autres ont commencé à se pencher sur les souvenirs fictifs et la manière de les implanter dans la tête des enfants, que l'on s'est rendu compte que l'on peut faire des suggestions aux enfants et qu'ils peuvent inventer des histoires incroyables. Beaucoup de recherches ont été faites dans ce domaine qui commencent à faire leur effet. Mais beaucoup de gens formés avant 1991 ne sont simplement pas au courant des recherches et de l'ampleur du problème.

La sénatrice Anne Cools: Je pense que l'ampleur est une considération essentielle.

Mme Rosalyn Golfman: Oui. Il y a aujourd'hui une prise de conscience. Dire que nous devrions simplement être les avocats des enfants... Je pense que les enfants sont très importants. Il faut les prendre très au sérieux, car principalement ils disent la vérité sur ces choses. Ils n'ont aucune raison de ne pas le faire. Mais dans certaines circonstances et dans certains contextes, il faut se demander pourquoi ils racontent cette histoire.

Mme Louise Malenfant: Si je puis ajouter un mot, sénatrice, l'une des déficiences de la littérature, même aujourd'hui, et même aux États-Unis, est que peu de recherches ont été faites sur l'effet d'une fausse allégation sur l'enfant, mais les résultats sont déjà très inquiétants.

Les enfants présentent des symptômes de stress post-traumatique. Ils deviennent très anxieux, déprimés et craintifs. Il n'est pas rare que de tels enfants formulent des allégations multiples dans le cours de leur jeune vie. Ils deviennent sensibilisés à la sexualité. Il n'est pas rare qu'ils présentent tous les symptômes d'un enfant réellement victime d'abus sexuel.

C'est donc une expérience très traumatisante, sans parler du fait que tout leur développement change lorsqu'on leur refuse accès non seulement au père accusé, mais aussi à toute la famille paternelle, comme c'est souvent le cas. Cela crée une réalité très dérangeante pour des enfants qui ne peuvent distinguer entre la réalité et la fiction. Ils se retrouvent souvent eux-mêmes avec de graves troubles de la personnalité. C'est un processus très douloureux pour un enfant.

L'idée qu'il faut pécher par excès de prudence et simplement postuler que toutes les allégations sont véridiques n'est pas réellement défendre les enfants, car les enfants sont extrêmement atteints par l'imposition d'une fausse allégation.

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): Je ne pose pas souvent de questions, en tant que présidente, mais je pense que la remarque du Dr Bennett sur les propos de... de la Saskatchewan n'était pas entièrement exacte.

Elle disait que lorsqu'un enfant dit quelque chose, on place l'enfant au centre de l'enquête. Elle a bien précisé qu'on ne croit pas toujours l'enfant. Simplement, le rôle de l'intercesseur d'enfant est de placer l'enfant au coeur du processus et de travailler à partir de là.

La question que je vous pose en particulier, vu votre excellente description d'une approche interdisciplinaire que j'ai beaucoup appréciée, est de savoir ce que vous faites lorsque vous établissez qu'une allégation est véridique?

Mme Rosalyn Golfman: Dans ce cas, nous ne donnons pas droit de visite au parent, ou nous conseillons au parent de se faire soigner. Tout dépend de la nature de l'allégation et de ce que le parent a fait, aussi de ce que le parent avoue ou non les faits. Mais lorsque c'est vrai, nous sommes très préoccupés.

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): Est-ce que votre évaluation est parfois ou toujours ordonnée par un tribunal?

Mme Rosalyn Golfman: Parfois, pas toujours.

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): D'accord.

Mme Rosalyn Golfman: Mais souvent nous conseillons le refus d'accès et certainement de l'accès de nuit, jusqu'à ce que l'enfant ait un certain âge. Tout dépend réellement des faits.

Lorsque les faits sont avérés, nous adoptons une position très dure, pour protéger l'enfant. Nous nous soucions beaucoup de l'enfant.

• 1455

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): Merci beaucoup.

Y a-t-il d'autres questions?

Judy puis Paul.

Mme Judy Wasylycia-Leis: Merci.

Je vous prie d'excuser mon arrivée vers la fin de votre exposé, mais ce que j'ai entendu reprend ce que nous avons entendu précédemment aujourd'hui et j'aimerais savoir s'il y a des études à l'appui de certaines de vos affirmations.

Il me semble que le féminisme essuie pas mal d'attaques aujourd'hui et je me demande si c'est le cas partout dans le pays. Le mouvement, et c'est ma définition du féminisme, visant à permettre que chacun puisse réaliser son plein potentiel n'est pas exactement le genre de mouvement qui causerait les enfants à faire de fausses allégations. Il me semble qu'il aurait plutôt l'effet opposé, celui d'édifier une société plus épanouie.

J'aimerais avoir s'il y a des études objectives, des analyses scientifiques ou des publications que vous pourriez citer montrant qu'il y a un lien statistique entre le mouvement visant à instaurer l'égalité entre les hommes et les femmes, qui remonte au début des années 70, et le phénomène, ou du moins le prétendu phénomène, d'un si grand nombre de fausses allégations. Par ailleurs, existe-t-il des études chiffrant la fréquence des fausses allégations dans la société actuelle? Ma question s'adresse à vous deux?

Mme Rosalyn Golfman: Oui, il y a des études.

Mme Judy Wasylycia-Leis: J'aimerais les connaître.

Mme Rosalyn Golfman: Encore une fois, elles sont assez récentes, et les pourcentages vont de 5 p. 100 à 50 p. 100. Cela dépend si les allégations sont faites dans le cadre d'un conflit sur la garde. Il n'y a rien qui traite directement de ce dont vous parlez, mais je conviens certainement avec vous que le féminisme n'est pas à l'origine de ce problème. Peut-être le féminisme radical l'est-il. Mais je conviens que le féminisme vise à établir des droits parentaux égaux entre hommes et femmes, et je ne pense donc pas que ce soit l'origine des problèmes. Je suis d'accord avec vous là dessus.

Mme Louise Malenfant: Eh bien, je pense que nous sommes en désaccord là-dessus.

Jusqu'en 1985, dans les publications, on se faisait gloire de divulguer un cas d'abus sexuel sur enfant, et à juste titre. Pendant des années, les sévices à enfant était tus et vous ne pouviez en parler et personne ne vous croyait. C'était un problème grave dans notre société.

La fin de cette dissimulation, la divulgation au grand jour du problème des sévices à enfant dans notre société a été une chose merveilleuse et, collectivement, nous avons commencé à nous attaquer au problème et à l'identifier. Il y a un ouvrage, je crois, de J.E.B. Dubois, qui est Américain. C'est un tout petit livre, mais il fait l'historique de cette évolution et fait valoir fièrement que le féminisme a créé le climat nécessaire pour que l'on puisse parler ouvertement des sévices à enfant.

Pour ce qui est de ce que je considère être la pathologie des allégations et révélations de sévices, c'est plus complexe que le seul féminisme, mais le féminisme a commencé à déformer les choses après 1985 en suscitant le phénomène de ce que nous appelons la «victimologie», où toutes les femmes sont perçues comme victimes, tous les enfants sont perçus comme victimes et tous les hommes comme agresseurs. Ces stéréotypes en noir et blanc ont imprégné le système judiciaire, si bien qu'une allégation de sévices à enfant était toujours crue, jusqu'à ce qu'il se produise une renaissance, en quelque sorte, la découverte du fait qu'il existe des procédures d'évaluation scientifique pour différencier entre une allégation vraie et une allégation fausse. Cela est tout récent à Winnipeg.

Vous avez demandé des statistiques sur les allégations de sévices à enfant dans les actions en divorce. Tout dépend de la source. Les sources féministes vous diront que moins de 2 p. 100 des divorces mettent en jeu de telles allégations, mais au Manitoba, il y a deux ans, le PDG du système d'aide à l'enfance a admis que 25 p. 100 de toutes les allégations sont survenues lors d'actions en divorce et sur ce nombre, moins de 15 p. 100 étaient probablement véridiques. Il a été très traumatisant pour notre système d'admettre cela à l'époque, mais nous évoluons grâce à cette admission.

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): Sénateur Jessiman.

Le sénateur Duncan Jessiman: Pas de questions.

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): Bien. Monsieur Forseth.

• 1500

M. Paul Forseth: J'ai relevé juste une nuance dans vos propos. Vous disiez que le fait qu'un adulte se soit livré à un acte de violence ou à un comportement inapproprié à l'égard d'un enfant ou à un attouchement sexuel ne devait pas toujours exclure tout contact entre cet adulte et cet enfant. Même s'il y a eu ce comportement, pourvu que des interventions appropriées aient été faites et qu'il y ait aveu, le contact futur dans certaines situations publiques telles qu'une fête d'anniversaire, un mariage, un pique-nique dans le parc en compagnie d'autres, permettrait mieux de réparer la relation cassée qu'une coupure complète.

Mme Rosalyn Golfman: Je tends à être d'accord. Je ne pense pas avoir dit que la coupure serait complète. Tout dépend des circonstances et de l'existence d'un aveu et d'une reconnaissance de responsabilité, si le parent a suivi une thérapie, et aussi de la nature des actes. Certains sont extrêmement graves.

M. Paul Forseth: Bien. Une si grande part des témoignages que nous avons entendus semble tenir pour acquis que s'il y a infraction, c'est fini. On érige un mur de pierre, une coupure totale.

La sénatrice Anne Cools: Même pas une infraction, une accusation...

M. Paul Forseth: Je parle d'une infraction, non pas au sens pénal mais au sens social. Si nous voulons faire du pédocentrisme, il faut songer à ce qui vaut mieux pour que cet enfant puisse devenir un adulte guéri, épanoui...

Mme Rosalyn Golfman: Encore une fois, beaucoup d'enfants veulent voir leurs parents. Ils ont beaucoup de bons souvenirs et se souviennent de beaucoup de choses agréables, c'est pourquoi nous essayons d'avoir une supervision pour que l'enfant ait l'accès. Et encore une fois, tout dépend de ce que le parent offre. Si le parent a beaucoup à offrir à l'enfant et accepte la surveillance, nous ne voyons pas de problème si le parent accepte de s'engager. Et nous avons fait des recommandations allant dans ce sens, lorsque nous sommes sûrs qu'une infraction a été commise mais que les enfants tiennent beaucoup à voir ce parent et à avoir une relation avec lui.

Mme Louise Malenfant: Monsieur Forseth, j'aimerais attirer l'attention du comité sur une étrange anomalie dans notre système. Si vous niez une allégation et clamez votre innocence—et cela peut souvent durer de nombreuses années—vous ne voyez pas cet enfant. Si vous avez de la chance, vous aurez peut-être des visites supervisées, mais beaucoup de gens sont complètement coupés jusqu'à ce qu'ils passent aux aveux et suivent un traitement.

En revanche, si vous admettez une expérience pédophile avec un enfant, vos chances de voir cet enfant plus tôt sont de dix contre un. Si vous admettez que vous avez abusé sexuellement d'un enfant, vous pouvez commencer à voir cet enfant de nouveau dans six ou huit mois, à condition que vous jouiez le jeu et admettiez votre culpabilité.

Je voudrais donc répéter qu'il existe de bonnes et solides procédures d'évaluation scientifique qui peuvent distinguer une allégation vraie d'une allégation fausse et les gens ne devraient pas être punis parce qu'ils clament leur innocence et refusent d'admettre ce qui est probablement la pire accusation que l'on puisse formuler contre une personne.

M. Paul Forseth: Vous venez de confirmer certains témoignages que nous avons entendus précédemment, à savoir que les organismes d'aide sociale, dans la pratique, cherchent à extorquer des aveux.

Mme Louise Malenfant: Cela arrive sans cesse, monsieur. De fait, ils ne parlent même pas aux autres membres de la famille. Lorsque vous évaluez un cas, il faut parler avec tous ceux qui possèdent des renseignements, en particulier les membres de la famille. Mais dans notre système de protection de l'enfance—et je suis heureuse de dire que cela a changé au Manitoba—jusqu'à l'année dernière ils demandaient à tous les témoins potentiels d'attester, par écrit, qu'ils croyaient l'allégation avant même que l'organisme accepte de seulement leur parler et recueillir leur témoignage. Tout le monde veut une enquête. Même l'accusé veut une enquête. Particulièrement les membres de la famille, que j'ai entendus à maintes et maintes reprises dire: «Si cette personne a fait cela, nous voulons protéger l'enfant». Pourtant, ils ne sont pas autorisés à déposer avant d'avoir admis ou reconnu que l'allégation est vraie. C'est un gros problème.

M. Paul Forseth: Je vous remercie.

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): Merci infiniment à vous deux. Cela a été un témoignage extrêmement utile.

M. Paul Forseth: Je vous remercie.

Mme Rosalyn Golfman: Merci de nous avoir permis de venir.

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): Si nos prochains témoins veulent bien s'approcher, nous prendrons deux ou trois minutes pour opérer le changement. Nous entendons Jane Ursel, du Département de sociologie de l'Université du Manitoba et de la Cour de violence familiale de Winnipeg.

• 1505

La sénatrice Anne Cools: Avant que les témoins s'assoient, madame la présidente, l'un des témoins de tout à l'heure, Tom Plesh, a été interrompu avant qu'il puisse lire le dernier paragraphe de son mémoire et je me demande si nous pourrions ajouter au procès-verbal le dernier paragraphe comme s'il avait été lu.

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): Oui, nous sommes tous d'accord.

La sénatrice Anne Cools: Je voulais transmettre la demande.

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): Au microphone numéro 11, Mme Reena Sommer, docteur en philosophie.

Madame Ursel, voulez-vous commencer.

Mme Jane Ursel (Département de sociologie, Université du Manitoba, et Cour de violence familiale de Winnipeg): Je vous remercie, madame la présidente, ainsi que les membres du comité, de m'avoir invitée aujourd'hui.

J'aimerais traiter d'un aspect de ce problème très important, à savoir l'octroi du droit de visite dans des conditions de bonne sécurité en fonction des circonstances familiales, dans les situations de violence familiale.

Je sais qu'il y a un débat dans le pays sur la fréquence de cette violence, les caractéristiques tant de l'auteur que de la victime et je pense avoir eu une occasion unique au cours des huit dernières années de recueillir des données au sein de la Cour de violence familiale de Winnipeg.

La Cour de violence familiale est une cour criminelle. C'est une cour provinciale à Winnipeg qui a été créée milieu septembre 1990. Cette cour entend toutes les affaires de violence familiale, la définition faisant intervenir la relation entre la victime et l'accusé. Quiconque est dans une relation de confiance, de dépendance et(ou) de parenté est admissible à comparaître en Cour de violence familiale.

Aussi, nous voyons défiler les cas de violence entre conjoints tant de droit que de fait, entre ex-conjoints et ex-concubins et ex-amants et entre des partenaires de même sexe.

En outre, tous les cas de sévices à enfant sont entendus à titre préliminaire et parfois jugés entièrement dans la Cour spécialisée provinciale car tous les enfants sont dans une relation de confiance avec les adultes.

Le seul cas où une affaire de sévices à enfant n'est pas jugée en Cour de violence familiale spécialisée est si l'agresseur présumé est un mineur lui-même. Dans ce cas, l'affaire est jugée en tribunal pour adolescents.

Enfin, la troisième catégorie d'affaires entendues dans cette Cour de violence familiale spécialisée sont les sévices à personne âgée, lorsqu'une personne âgée est en relation de confiance, de dépendance ou de parenté avec un soignant adulte, qu'il s'agisse d'un membre de la famille, d'un employé de maison de retraite, etc.

J'aimerais vous distribuer les statistiques de notre cour pour la période 1993 à 1996, qui font apparaître tout d'abord la fréquence inquiétante de ces incidents et donnent une ventilation selon les caractéristiques des victimes et des contrevenants. Je vais donc distribuer cela et si vous avez des questions, je serais ravie d'y répondre.

Pendant que le document est distribué, j'aimerais simplement...

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): J'aimerais attirer votre attention, parce que c'est très important, sur le fait qu'il nous faut la permission de distribuer cela car ce n'est que dans une langue. Habituellement, l'autorisation nous est donnée.

Mme Jane Ursel: Je suis désolée.

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): Il n'y a pas de problème. Nous ne devons pas négliger nos obligations parlementaires.

Mme Jane Ursel: Je ne distribue qu'une page.

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): Il n'y a pas de problème.

Mme Jane Ursel: Y a-t-il suffisamment d'exemplaires?

• 1510

Je veux souligner, lorsque vous regardez ce tableau, que ces chiffres représentent les affaire criminelles portées devant ce tribunal spécialisé, et les données que je vous présente sont les cas où il y a eu verdict de culpabilité.

Je sais qu'un débat fait rage. J'ai entendu les témoins précédents parler de la question de savoir si les allégations sont fausses ou vraies. Les données que je vous remets représentent uniquement les cas où un tribunal a jugé que les accusations sont vraies; ce sont des condamnations.

J'aimerais attirer votre attention sur un certain nombre d'aspects. Tout d'abord, malheureusement, au cours des trois années sur lesquelles portent ces données, il y a eu 5 674 cas de violence conjugale. 92 p. 100 des contrevenants condamnés étaient des hommes et 89 p. 100 des victimes des femmes.

Nous avons isolé la catégorie suivante uniquement parce que vous avez des victimes multiples dans les cas d'agressions contre les enfants et le conjoint. Dans ce cas, 89 p. 100 des contrevenants étaient des hommes et 40 p. 100 des victimes des femmes. Dans 55 cas il y avait les deux, c'est-à-dire habituellement la femme et un ou plusieurs de ses enfants.

Dans le troisième encadré, nous avons les sévices à enfant... 562 condamnations au cours de la même période; 89 p. 100 des accusés étaient des hommes et 76 p. 100 des victimes des femmes, le restant étant des enfants des deux sexes.

Dans le cas des sévices aux personnes âgées, 91 p. 100 des accusés étaient des hommes et 81 p. 100 des victimes des femmes.

C'est un triste constat de l'état de notre société que le facteur qui expose une personne au risque soit sa vulnérabilité. Nous sommes à Winnipeg. Winnipeg a une population d'environ 650 000...

Le sénateur Duncan Jessiman: Avez-vous fait une ventilation entre les autochtones et les autres?

Mme Jane Ursel: Nous avons une ventilation dans les données d'ensemble entre autochtones et non-autochtones et personnes d'origine autre qu'européenne. Ces données montrent que les personnes d'origine autochtone sont surreprésentées dans ce tribunal.

J'ai effectué des comparaisons entre la population de la Cour de violence familiale et celle des cours criminelles générales et, malheureusement, les autochtones sont surreprésentés dans les deux.

Le sénateur Duncan Jessiman: Les statistiques sont-elles les mêmes? Est-ce toujours davantage d'hommes...

Mme Jane Ursel: Oui.

Le sénateur Duncan Jessiman: C'est toujours le même pourcentage; il n'y a pas de différence.

Mme Jane Ursel: Il peut y avoir une petite variation, mais la tendance générale est la même.

La sénatrice Anne Cools: Vous dites que les autochtones sont surreprésentés.

Mme Jane Ursel: C'est juste.

La sénatrice Anne Cools: Donc, dans ces statistiques, en chiffres absolus, combien sont des autochtones?

Mme Jane Ursel: Probablement 35 p. 100 environ. Winnipeg, tout comme la Saskatchewan, a une plus forte concentration d'autochtones que le reste du Canada. Et nous utilisons le terme «origine autochtone» au sens large, c'est-à-dire que vous avez là des Métis aussi bien que des Indiens inscrits et non inscrits.

La sénatrice Anne Cools: Par exemple, chez les enfants...

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): Excusez-moi, sénatrice Cools...

La sénatrice Anne Cools: Je comprends. C'est simplement que ce sont des données nouvelles pour moi.

Mme Jane Ursel: Je vais simplement terminer et je serais ravie de répondre à vos questions ensuite.

Ces chiffres montrent évidemment que la violence familiale est un problème grave et endémique dans notre collectivité. «Endémique» est le terme employé par le juge Schulman lorsqu'il a mené une longue enquête sur un homicide/suicide familial tragique en 1995.

• 1515

Je vous communique ces chiffres car je pense que vous avez la tâche très importante et vitale de préserver le bien-être et le soin des enfants dans notre société. Je sais que, dans ces débats, nous sommes fréquemment la proie d'affrontements idéologiques sur ce qu'est la vérité, en l'absence de données. Ce que j'espère vous faire comprendre est l'impératif absolu que les divers services gouvernementaux traitant des questions de garde et d'accès, en particulier lorsqu'il y a litige, rassemble des données beaucoup plus détaillées que celles dont nous disposons aujourd'hui.

Je peux vous dire qu'à Winnipeg, au cours de l'année dernière, il y a eu 200 évaluations ordonnées par la cour, mais je ne peux vous dire rien de plus. Nous n'avons pas de mécanisme de saisie de données détaillées dans les services de la ville, ni même de la province, et nous ne sommes pas seuls dans ce cas. Je pense que ce problème existe partout au Canada.

Je pense que vous êtes confrontés à un dilemme incroyable. Lorsque les juges ont à se prononcer sur le cas d'une famille donnée, ils ont tous les éléments de preuve en main et feront tout pour assurer que ce soit bien le cas.

Malheureusement, lorsque le législateur est appelé à formuler une politique qui va retentir sur nous tous au Canada, vous n'avez pas accès à toutes les données. Souvent, vous ne pouvez vous appuyer sur rien d'autre que les avis des diverses personnes qui viennent présenter leurs arguments, selon leur optique.

Je pense qu'il importe pour vous et les décideurs qui vous suivent que des mécanismes soient en place à travers le Canada, dans tous les bureaux provinciaux et tous les tribunaux provinciaux, pour recueillir le genre de données qui permettraient aux décideurs de prendre des décisions éclairées et de ne pas être fourvoyés par la passion et les convictions des uns ou des autres.

Mon message aujourd'hui est donc une mise en garde, un avertissement. Lorsqu'il s'agit du bien-être de nos enfants, qui sont les citoyens et les décideurs de demain, ces politiques devraient être assises sur des données solides.

Bien que j'aie entendu quantité de contestations sur la signification des données que je présente, je pense que tout le monde pourra convenir d'une chose, à savoir que la violence est intergénérationnelle. Dans la plupart des cas, la violence est apprise dans l'enfance.

Vous avez donc un rôle vital à jouer pour assurer que les enfants ne soient pas exposés à un environnement violent, particulièrement lorsque certains incidents ont été mis à jour et les responsables condamnés par les tribunaux.

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): Merci beaucoup.

Docteure Reena Sommer.

Dre Reena Sommer (témoigne à titre personnel): Je vous remercie, madame la présidente.

J'apporte à cette réunion mon expérience de deux domaines distincts: mon travail de chercheuse et mon travail de conseillère en relations familiales. La conjugaison des deux a façonné et solidifié ma connaissance du fonctionnement des familles et de leur dynamique dans diverses conditions.

Surtout, en ayant un pied dans chacune des deux disciplines, je suis en mesure de dépasser l'aridité et le détachement de chiffres impersonnels, puisque je vois de première main les drames humains qu'ils traduisent. Ainsi, je peux apprécier les points forts et les limites de chaque discipline, ce qui me donne une image plus nuancée de la vie familiale.

J'ai concentré mes recherches sur les auteurs de la violence conjugale au sein de la population en général. Mme Ursel nous a parlé de ses travaux fondés sur les données provenant de la Cour de violence familiale. Ce sont là deux sources très distinctes et non interchangeables.

• 1520

L'un des problèmes apparu au fil du temps est que l'on tend à extrapoler les données d'une source à l'autre et c'est certainement la plus grande erreur. Ce n'est pas possible. C'est comme comparer des pommes et des oranges. Cela ne signifie pas que les données de Mme Ursel ne sont pas valides. Elles sont très valides. Elle fait d'excellentes recherches et sa méthodologie est inattaquable. Ses résultats sont ce qu'ils sont. Mais mélanger les données des deux sources est une aberration.

Les résultats de mes recherches montrent qu'il n'y a pas de différence notable entre les taux d'abus perpétrés par les hommes et les femmes. Ils sont essentiellement équivalents. Cela ne revient pas à dire qu'un sexe souffre plus ou souffre moins que l'autre. Je dis simplement qu'il y a autant d'hommes que de femmes qui se livrent à des abus sur leur partenaire.

Ces résultats ont suscité des controverses et ont été largement contestés, en dépit de résultats similaires obtenus par d'autres chercheurs canadiens, américains et britanniques. J'ai perdu le compte des études disponibles dans la littérature. Je m'en remets pour cela à un collègue, M. Murray Strauss, qui a comptabilisé au-delà de 200 études analogues.

Malheureusement, ce domaine de recherche a été hautement politisé par des groupes d'intérêt particulier qui refusent de voir la différence entre un échantillon de familles conflictuelles, c'est-à-dire la population sur laquelle je me penche, et les études de criminalité qu'effectue Mme Ursel. On mélange les deux. On omet également de voir que la violence résulte souvent d'une gestion inappropriée du conflit et de la colère, et ce n'est pas une question de sexe mais de condition humaine.

Du fait d'une conception étroite et dominante des interactions humaines, des résultats comme les miens et d'autres sont ignorés, minimisés ou carrément rejetés. Mon travail clinique, en revanche, est moins novateur et certainement moins sensationnel. Il est partagé entre mon rôle de conseillère et thérapeute dans des collectivités autochtones du Nord du Manitoba—d'ailleurs, je ne suis rentrée par avion qu'hier soir—et le travail similaire que je fais auprès de la population générale, à Winnipeg.

Ce travail a été complété par mes recherches et cela m'amène à revenir sur un aspect soulevé par les témoins précédents qui ont alimenté ma réflexion sur les fausses allégations. Je n'avais jamais réalisé avant de commencer à travailler comme conseillère et thérapeute la puissance que j'ai entre les mains. Face à une allégation, je peux la faire pencher dans un sens ou dans l'autre et seule l'éthique dicte ma façon de travailler. J'ai le pouvoir de le faire, mais je tends à éviter ce genre de cas parce qu'ils sont réellement inextricables. Un thérapeute est une personne particulièrement puissante et peut faire tourner les choses dans le sens qu'il veut. Les enfants sont très malléables.

La sénatrice Anne Cools: Et vulnérables.

Mme Reena Sommer: Oui.

Le travail que je fais dans ma pratique privée démontre tout d'abord que la violence familiale peut prendre quantité de formes avec des effets qui se prolongent bien au-delà de l'auteur et de la victime—et j'entends par là les enfants. Les enfants sont les plus grandes victimes car ce sont eux qui voient et qui souffrent. Il n'est pas nécessaire d'être directement giflé, frappé à coup de poing ou de pied, car le spectacle des parents qui se battent est aussi traumatisant que d'être frappé soi-même. C'est la pire agression que l'on puisse commettre.

Deuxièmement, la démarcation entre agresseur et victime est souvent floue car la maltraitance intervient souvent dans le contexte de piètres aptitudes à communiquer, de moyens inefficaces de gérer la colère, d'alcoolisme et de toxicomanie et d'antécédents de maltraitance pendant l'enfance des partenaires.

• 1525

Surtout, la maltraitance—et c'est celle que je vois dans ma pratique—tend à être non physique. Elle se situe typiquement davantage au niveau psychologique. La violence tend à ne pas être physique, mais lorsqu'elle l'est, elle tend aussi à être réciproque et pas suffisamment grave pour exiger une intervention médicale. C'est pourquoi la plupart des personnes qui répondent dans les enquêtes auprès de la population générale n'apparaissent pas dans les statistiques criminelles. Elles ne cherchent pas secours.

Troisièmement, les doléances de violence conjugale ou relatives à l'incapacité d'un parent à s'occuper des enfants sont formulées à un moment où les couples ont dû mal à régler la dissolution de leur relation. Selon mon expérience, les allégations de sévices et d'insuffisance parentale sont alimentées par la colère et le ressentiment, de même que par la vulnérabilité des deux parents et la crainte de perdre leurs enfants.

Sur la base de mes 10 années d'étude et de travail avec les familles, j'aimerais formuler les trois recommandations suivantes. Je pourrais en faire beaucoup plus, mais je me limite au domaine spécifique de mon travail.

Premièrement, si la violence familiale est une considération importante lorsqu'il s'agit de décider la garde et les droits de visite, lorsque des allégations de mauvais traitements sont faites, il faut veiller à bien établir et comprendre le contexte, l'historique et la progression de la violence familiale.

Deuxièmement, dans tous les cas de litige sur la garde et l'accès, la première intervention doit consister en une médiation. La seule exception sont les cas où il y a lieu de craindre pour la sécurité, sur la base d'antécédents documentés de, mettons, violence unidirectionnelle, d'activité criminelle violente ou de maladie mentale, pour n'en nommer que trois. Étant donné la nature réciproque de la plupart des cas de violence conjugale rencontrés dans la population générale, la sécurité peut être assurée par un médiateur compétent qui fixe les règles de conduite à respecter pendant les rencontres.

Enfin, lorsqu'il s'agit de trancher les litiges sur la garde et le droit de visite, il faut s'attaquer en premier lieu aux sentiments qui sous-tendent le conflit. Souvent, il est possible de calmer la crainte, la colère et le ressentiment des parents et, lorsqu'on y parvient, les dissensions sur la garde et le droit de visite tendent également à diminuer. Au lieu de se précipiter et de lancer tout le processus judiciaire, il faut parler. Je pense que les derniers témoins l'ont montré: parlez. Parlez à autant de gens que vous pouvez parler. Vous découvrirez que très souvent la peur, la colère, le ressentiment et la vulnérabilité sont alimentés par la crainte des parents de sortir perdants de la séparation et du divorce.

Souvent, je vais être assise avec mes clients dans mon bureau, et tout d'un coup, l'un dira: «Tu viens de faire ceci; tu viens de jeter cela sur elle». Je demande alors: «Pouvez-vous préciser?» Il apparaît alors que les choses ne sont pas réellement passées ainsi; c'est simplement qu'ils sont tellement en colère. Ils sont tellement en colère. Mais si cette même déclaration était faite à quelqu'un d'autre sans être précisée, vous auriez toute une affaire en marche.

Je vais m'en tenir là et vous céder la parole. Merci encore.

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): Merci.

Des questions? Sénateur Jessiman.

Le sénateur Duncan Jessiman: Madame Ursel, j'ai été abasourdi par vos chiffres, car tout ce que j'avais lu auparavant allait dans le sens de ce que disait Mme Sommer, à savoir que la violence existe des deux côtés. Je vais donc vous demander des précisions concernant vos chiffres. Est-ce que cette violence dont vous parlez est physique?

Mme Jane Ursel: Ce sont des incidents visés par le Code criminel canadien.

Le sénateur Duncan Jessiman: Oui.

• 1530

Mme Jane Ursel: Dans la plupart des cas, c'est physique.

Le sénateur Duncan Jessiman: Oui.

Mme Jane Ursel: Les deux exceptions sont les cas de harcèlement criminel, les comportements autre qu'une agression physique directe couvert par notre législation sur le harcèlement criminel.

Le sénateur Duncan Jessiman: Savez-vous si sur ces 6 508 cas, il y en a qui sont de harcèlement physique?

Mme Jane Ursel: Ce chiffre comprend 78 cas de harcèlement criminel. Cependant, je crois que la plupart sont également doublés d'une accusation pour voies de fait dans le courant de la même année.

Les autres incidents qui peuvent donner lieu à des accusations criminelles sans qu'il y ait nécessairement voies de fait sont les menaces.

Le sénateur Duncan Jessiman: D'accord. Êtes-vous en désaccord avec Mme Sommer lorsqu'elle dit que, selon les résultats de son étude, les femmes maltraitent tout autant les hommes que les hommes maltraitent les femmes? Êtes-vous en désaccord avec cela?

Mme Jane Ursel: Oui. Je pense que...

Le sénateur Duncan Jessiman: Avez-vous des données pour appuyer cela?

Mme Jane Ursel: Oui. Je pense que là où réside peut-être la différence est que Mme Sommer traite des conflits dans une relation. Des études ont été faites—je pense qu'il en a été longuement question à cette table dans une autre ville, telle que l'étude canadienne sur la violence faite aux femmes, en 1993, qui ont tenté de mesurer des degrés de violence.

Je conviens tout à fait que beaucoup de couples, les deux membres, peuvent avoir de la difficulté à résoudre les conflits et peuvent choisir des stratégies qui ne sont pas optimales. Mais je pense que, lorsqu'il s'agit de mesurer le degré effectif d'agression physique, il y a une différence dans le cas des agressions d'hommes sur les femmes. La gravité des blessures est typiquement plus grande lorsque un homme agresse une femme.

J'aimerais vous donner un exemple. Il est particulièrement bien connu dans notre ville parce que c'est lui qui a causé l'enquête Lavoie.

Il s'agissait d'un meurtre-suicide intrafamilial. Ce couple est venu deux fois à l'attention des tribunaux. La deuxième était la tragédie du meurtre-suicide. La première fois était une accusation de voies de fait simples, l'accusé ayant lancé une citrouille sur la victime.

Je pense que cela démontre à quel point il faut s'efforcer de comprendre le cycle d'escalade de la violence. Il aurait été très difficile pour les intervenants au tout premier stade du conflit, un an et demi avant le deuxième cycle de conflit qui a conduit au meurtre de la femme et au suicide du mari... Il faut vraiment s'efforcer de comprendre le cycle de la violence et la capacité des deux partenaires de faire du mal à l'autre.

À l'évidence, lors de la première agression, on pouvait conclure que ce n'était pas bien grave. Un objet a été lancé à travers la pièce et...

Le sénateur Duncan Jessiman: Qui a lancé la citrouille?

Mme Jane Ursel: Le mari a lancé la citrouille sur la femme.

Le sénateur Duncan Jessiman: Je devais poser la question, à cause de la taille d'une citrouille.

Mme Jane Ursel: Je dois dire qu'il y a certainement quantité de façons non optimales pour les couples de régler les conflits. J'ai à m'occuper des cas mettant en jeu des blessures corporelles graves subies par des personnes dans une relation intime, qu'il s'agisse d'un enfant, d'un conjoint ou d'un parent âgé. C'est là qu'ils sont très vulnérables et courent le risque d'être agressés. Nous devons faire preuve d'une prudence extrême à ce sujet.

Une fois que les tribunaux sont intervenus—et leurs critères sont beaucoup plus exigeants que tous ceux d'un journal savant—nous pouvons assembler les données et les publier. En cour de justice, il faut prouver les faits au-delà de tout doute raisonnable.

Le sénateur Duncan Jessiman: Je ne sais pas s'il existe des statistiques là-dessus, mais j'essaie de voir comment vous pouvez être assis... Je cherche une explication, car vos chiffres sont des condamnations dans une cour criminelle.

• 1535

Est-ce qu'il vous paraît normal que vos chiffres, soit 92 p. 100 contre 7 p. 100, soient aussi déséquilibrés alors que l'on nous dit...? D'après ce que j'ai lu, les femmes maltraitent tout autant les hommes que les hommes maltraitent les femmes dans le mariage et lors de conflits, pourtant vous arrivez avec ces chiffres. N'est-ce pas dû au fait que les femmes ne sont peut-être pas inculpées aussi souvent que les hommes? Si un homme est agressé par la femme, l'homme ne va pas déposer plainte, alors que si la femme est agressée par l'homme, elle va déposer plainte.

Mme Jane Ursel: Dans notre province, ce n'est jamais la victime qui décide de porter une accusation. La victime doit appeler au secours.

Le sénateur Duncan Jessiman: Vous pouvez aussi avoir une plainte privée...

Mme Jane Ursel: Vous pouvez, mais ce sont là tous des cas où des accusations ont été portées et où la police a arrêté les contrevenants. Nous avons une politique de tolérance zéro.

Le sénateur Duncan Jessiman: Est-ce qu'elle s'applique aussi aux femmes?

Mme Jane Ursel: Bien entendu, et les femmes aussi sont arrêtées.

Le sénateur Duncan Jessiman: Ce n'est pas ce que l'on m'a dit. Si un homme accuse une femme, il doit le prouver. Si une femme accuse un homme—c'est uniquement ce que l'on m'a dit—on considère que la femme dit la vérité et l'homme est arrêté jusqu'à ce qu'il prouve son innocence.

Mme Jane Ursel: Je pense que c'est un très bon argument en faveur de ma recommandation, lorsque je dis que nous avons besoin de données.

Le sénateur Duncan Jessiman: Je ne le nie pas.

Mme Jane Ursel: Je sais que beaucoup de gens des deux sexes ont vécu des expériences très désagréables et cela peut colorer la perception qu'ils ont de ce qui se passe ailleurs dans la société.

Le sénateur Duncan Jessiman: Avez-vous des données, ou bien où pourrions-nous trouver les données, sur le nombre de personnes accusées—ou peut-être même emprisonnées—sans preuves et acquittées ensuite? Avec cette politique de tolérance zéro, combien d'hommes ont été relâchés parce que l'accusation n'a pas été prouvée et combien de femmes ont été accusées et emprisonnées puis reconnues non coupables?

Mme Jane Ursel: Les données que je vous ai remises, celles des condamnations réelles, font ressortir cette dynamique intéressante des sexes. Si l'on regarde uniquement les chiffres d'arrestation, les proportions sont les mêmes. Je peux communiquer les chiffres au comité. Je ne les ai pas ici, mais je peux vous les fournir. Je peux vous donner les chiffres tant sur les taux d'arrestation que les taux de condamnation.

Le sénateur Duncan Jessiman: J'aimerais les chiffres sur les arrestations de personnes des deux sexes acquittées ultérieurement.

Mme Jane Ursel: Oui.

Le sénateur Duncan Jessiman: D'accord, je vous remercie.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Monsieur Forseth.

M. Paul Forseth: J'aimerais rester sur le thème de vos données, car vous avez fortement souligné dans votre exposé la nécessité de réunir «toutes les données». Je pense que vous allez dans la bonne direction en recueillant des données objectives, mais encore une fois leur utilité est limitée, en l'absence de données contextuelles, lorsqu'il s'agit d'en déduire la politique publique.

Vous ne mesurez que les résultats dans un contexte de preuve criminelle, et je vais vous donner un exemple extrême en guise d'illustration. Comment comptabiliser la malade mentale ou la femme dérangée qui manipule le système pour se venger et fait en sorte de se faire infliger un oeil au beurre noir par son mari? C'est un cas extrême, mais vous nous donnez ici des chiffres de condamnations pénales qui ont peut-être une piètre corrélation avec les sombres secrets familiaux de violence et d'abus et avec ce qui se passe réellement dans une relation.

Je pense donc que, pour appuyer vos données, il faudrait décrire la genèse d'une plainte, d'où elle vient, quels organismes l'ont répercutée, et tous les stades successifs, depuis l'origine de quelque chose qui se passe à la table de cuisine jusqu'au produit final, aux chiffres distillés que vous présentez.

Dans ce contexte, il faudrait également voir qui est le juge, qui est le procureur et tous les postulats qui sous-tendent la création de cette cour particulière et sa mission. Si nous disposons de tout le contexte, nous pourrons peut-être tirer des chiffres que vous présentez les déductions convenables aux fins de la politique publique. Il faudrait déjà avoir la ventilation par infractions individuelles du Code criminel. S'agit-il toujours de voies de fait simples? Quel est le pourcentage de l'attouchement sexuel ou du harcèlement criminel, etc. Ce genre de ventilation est utile aussi.

• 1540

Mme Jane Ursel: Je vous remercie. Je vous renvoie aux deux rapports qui ont été remis au gouvernement fédéral et vous avez accès à ces documents. Je veux vous remercier aussi d'une remarque que vous avez faite. Vous pourriez vous faire le promoteur du type de recherche que vous suggérez, car personne jusqu'à présent n'a accepté de la financer, c'est-à-dire l'examen du contexte.

J'ai siégé personnellement à 300 procès pour voies de fait contre l'épouse. J'ai réuni les données sur plus de 22 000 cas. J'ai siégé à plus de 150 procès pour sévices à enfant et j'ai des données sur peut-être 1 500. Je ne vous ai remis que les chiffres des années les plus récentes.

J'ai fait valoir à maintes reprises à divers ministères, tant fédéraux que provinciaux, qu'il serait extrêmement précieux d'avoir non seulement les données institutionnelles mais de pouvoir aussi avoir des entretiens avec l'accusé et la victime. Ce genre de recherche, d'importance critique, exige beaucoup de main-d'oeuvre et coûte par conséquent cher. On m'a toujours refusé, et au niveau fédéral et au niveau provincial, des crédits pour ces études beaucoup plus poussées que vous conseillez et que j'aimerais énormément faire. Mais il faudrait que je puisse payer mon personnel pour cela.

M. Paul Forseth: Je peux vous donner un tuyau. Je pense que pas mal d'étudiants en doctorat et même en maîtrise cherchent des sujets de thèse. Nous avons des universités dans cette ville et ce sont des mines d'or pour ce genre de projet.

Mme Jane Ursel: Effectivement, j'ai employé 25 étudiants de cycle supérieur rien que sur ce projet de recherche à la Cour de violence familiale—quelques étudiants en droit et de nombreux étudiants en sciences sociales.

M. Paul Forseth: C'est excellent, car lorsque je regarde les données ici, les chiffres sur cette feuille auraient pratiquement pu être réunis par une secrétaire du greffe du tribunal.

Mme Jane Ursel: C'est exclu, si vous connaissez la procédure de collecte de données. La secrétaire ne connaît pas ces données, pas plus que les juges ou le ministre de la Justice, il faut pour cela des gens qui compilent quotidiennement les archives pour en extraire les données.

M. Paul Forseth: C'est juste. Nous avons là un domaine de recherche et je vous félicite. J'espère que vous continuerez à creuser, car nous avons un besoin de données solides et objectives pour en déduire la politique publique appropriée.

Mme Jane Ursel: Je suis d'accord.

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): Je vous remercie.

Sénatrice Cools.

La sénatrice Anne Cools: J'ai plusieurs questions. Avant de les poser, peut-être Mme Sommer pourrait-elle nous donner par écrit le nom de ses collègues tels que Brinkerhoff et Lupri, le Dr Strauss et le Dr Dutton, et ceux des Canadiens et Américains qui ont effectué les enquêtes auprès de la population en général.

Je tiens à vous remercier, madame Ursel. À mon avis, vos constatations sont entièrement prévisibles et cohérentes. J'ai siégé à la Commission nationale des libérations conditionnelles, comme vous le savez, et nous savons donc que dans les pénitenciers fédéraux il y a 10 000 détenus hommes et environ 300 à 400 femmes. Je pense que nous savons très bien que plus d'hommes sont condamnés pour n'importe quel délit que de femmes. Je ne sais pas dans quelle mesure vos chiffres se rapportent aux 10 000 détenus dans les pénitenciers fédéraux.

Mme Jane Ursel: La plupart de ces personnes sont dans des prisons provinciales, si même elles ont reçu des peines d'emprisonnement.

La sénatrice Anne Cools: Eh bien, je dirais le contraire. Je pourrais tout aussi bien dire la même chose. Le ratio entre hommes et femmes, dans les prisons provinciales, est à peu près le même. D'aucuns diraient que ces chiffres révèlent une terrible aberration, tout comme j'ai réagi lorsque vous m'avez indiqué le fort pourcentage d'autochtones parmi ces contrevenants. D'aucuns tireraient la conclusion que ces chiffres trahissent un préjudice sociétal causé aux autochtones. Quoi qu'il en soit, je ne vais pas me lancer dans tout cela.

J'aimerais quelques précisions. Est-ce que ces chiffres représentent des personnes ou des condamnations?

Mme Jane Ursel: Des personnes.

• 1545

La sénatrice Anne Cools: Certains de ces cas sont-ils des condamnations multiples, ou bien est-ce une par personne?

Mme Jane Ursel: Une personne n'est comptabilisée qu'une fois à l'intérieur d'une année civile.

La sénatrice Anne Cools: Bien.

Si vous avez ces renseignements—et si vous ne les avez pas, je comprends, car il n'est pas facile de les obtenir—j'aimerais savoir combien de ces cas sont des concubins par opposition à des gens mariés.

Mme Jane Ursel: Il y a un plus fort pourcentage de relations de concubinage.

La sénatrice Anne Cools: Très bien.

Mme Jane Ursel: C'est indiqué dans les deux rapports que j'ai mentionnés.

La sénatrice Anne Cools: Exactement.

Mme Jane Ursel: Je ne pense pas, si je me souviens bien, que c'est supérieur à 50.

La sénatrice Anne Cools: Bien.

Mme Ursel a travaillé fort et nous présente, je pense, d'excellents chiffres, mais ils ne font que confirmer des problèmes d'ensemble. Il y a beaucoup plus de ces condamnations dans des situations de concubinage que dans des situations de mariage.

Étant donné que nous nous préoccupons ici du divorce après mariage, certaines de ces données ne nous aident pas du tout. Elles sont intéressantes sur le sujet plus large de la violence au sein des couples. Cela ne fait aucun doute.

Mais pour ce qui est du divorce, si les gens n'ont jamais été mariés, ils ne divorcent pas. C'est donc un problème différent.

Vous savez, on me dit que le Québec va dans cette direction générale.

Mais pour en revenir à ceux qui sont mariés, avez-vous les chiffres pour les couples mariés?

Mme Jane Ursel: Oui.

La sénatrice Anne Cools: Pouvez-vous me les fournir?

Mme Jane Ursel: Certainement.

La sénatrice Anne Cools: Bien.

Pour ce qui est des personnes mariées, avez-vous une indication du nombre qui sont en instance de divorce, du nombre de celles qui ont entamé une action en divorce et l'abandonnent et de celles qui divorcent effectivement?

Mme Jane Ursel: Non, et c'est l'un des aspects où nous avons certainement besoin d'une meilleure saisie de données. C'est un problème non seulement pour nous chercheurs, mais aussi un problème sérieux pour le personnel de la cour qui doit poursuivre dans une affaire de violence familiale et qui n'obtient pas suffisamment de renseignements auprès de la Cour familiale unifiée.

En recommandant une meilleure saisie de données à tous les niveaux, y compris celui de la Cour familiale unifiée, nous espérons en particulier pouvoir mieux établir les correspondances entre ces cas.

La sénatrice Anne Cools: Madame Ursel, avez-vous jamais entendu parler d'Erin Pizzey?

Mme Jane Ursel: Non.

La sénatrice Anne Cools: C'est elle qui a lancé l'industrie des services sociaux aux victimes de la violence familiale en Angleterre et qui a fondé le tout premier foyer d'accueil de femmes là-bas. Elle va en répétant que plus la violence est pathologique et répétitive et récidivistique, et plus elle est intraitable, et moins il est probable que le couple divorce. Elle appelle cela la «danse de la mort».

Je me demandais si vous connaissiez son travail ou si vous aviez étudié cette violence intractable, très profonde, pathologique et répétitive... qui, d'une façon ou d'une autre, échappe à l'attention dans notre société car ces couples très rarement appellent au secours et très rarement divorcent.

Mme Jane Ursel: Je sais, évidemment, que la violence se produit selon quantité de degrés de gravité et niveaux de pathologie différents. J'ai été appelée à plusieurs reprises à témoigner à des enquêtes sur des homicides-suicides intrafamiliaux. Cependant, je peux vous dire aussi que ces chiffres ne représentent pas que cet extrême. Les personnes condamnées à la Cour de violence familiale...

La sénatrice Anne Cools: Je ne disais pas cela. Je vous demandais si vous aviez étudié cet ensemble particulier de pathologies.

Deux questions, pour terminer. Ceci est un sujet très complexe. Combien de ces condamnations ont été prononcées suite à des plaidoyers de culpabilité et des négociations de plaidoyer?

Mme Jane Ursel: La majorité. La Cour de violence familiale ne diffère guère d'une cour générale. J'ai fait une étude comparant les deux. Environ 20 p. 100 des cas vont en procès. L'écrasante majorité sont soit résolus par des plaidoyers de culpabilité soit font l'objet d'un sursis d'instance. La Cour de violence familiale ne diffère pas en cela d'une cour pénale générale.

La sénatrice Anne Cools: Donc, pour avoir des chiffres plus solides, il faudrait regarder les plaidoyers de culpabilité à l'intérieur de la catégorie des personnes mariées qui ont divorcé ensuite.

Mme Jane Ursel: Évidemment, je peux vous donner les chiffres des plaidoyers de culpabilité et du statut matrimonial, mais malheureusement, vu la façon dont nos tribunaux structurent actuellement leurs données, je ne peux établir de correlation avec les affaires familiales en cours.

• 1550

La sénatrice Anne Cools: Bien. Connaissez-vous également les travaux du Dr Strauss, qui distingue, et dit qu'il faut toujours distinguer, entre les attaques et les blessures?

Mme Jane Ursel: Je connais le travail du Dr Strauss.

La sénatrice Anne Cools: Bien.

Enfin, si je puis revenir à Mme Sommer, ce que nous découvrons avec cet ensemble particulier de données, c'est qu'il ne nous apprend rien de plus sur ce qui se passe dans les couples demandant le divorce. Est-ce que Mme Sommer pourrait nous parler un peu plus des grandes études, surtout les Canadiennes, des enquêtes auprès de la population en général. Et pourrait-elle nous parler des études de Statistique Canada?

J'aimerais que vous nous dressiez une liste de ces études, car je persiste à espérer que nos chargés de recherche nous procureront certaines de ces études.

Mme Reena Sommer: D'accord.

La sénatrice Anne Cools: Pourriez-vous aussi nous parler de l'étude de Statistique Canada? Elle nous a pas encore été soumise, mais l'étude de Statistique Canada est attaquée depuis pas mal de temps dans maintes conférences internationales. J'ai cité les remarques du Dr Strauss, à Toronto, à son sujet.

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): Nous sommes anxieux d'entendre sa réponse, car vous avez largement dépassé votre temps.

La sénatrice Anne Cools: Mais si d'autres gens souhaitent poser des questions...

Mme Reena Sommer: Je réponds avec plaisir. J'ai moi-même des contraintes de temps. J'ai un rendez-vous à 15 h 30, et je vais devoir partir bientôt.

Avant de parler de la recherche, je suis un peu déroutée en ce moment, car je vois que l'on accorde beaucoup d'importance aux statistiques criminelles, alors que je pensais que la politique que vous cherchez à élaborer intéresse la population générale, tout un chacun—vous, moi et tous les autres, les gens de la rue.

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): Ce n'est pas tout à fait exact. Je n'ai pas l'impression que l'on s'obnubile sur les statistiques criminelles.

Mme Reena Sommer: D'accord. Eh bien, oui, je n'ai suivi qu'une toute partie de vos travaux, mais dans cette discussion on a beaucoup parlé d'études criminelles et lorsque vous élaborez une politique sociale pour tout le monde, vous devez considérer tout le monde. Je sais que vous avez écouté attentivement et vos questions ont été excellentes. Je vous rappelle simplement que les données de Mme Ursel ne montrent qu'un tout petit fragment du tableau d'ensemble—un petit, petit fragment.

Pour ce qui est de la recherche du Dr Strauss, il a fait une étude où il a comparé les statistiques pénales avec les conflits familiaux dans les études de la population en général. Il a considéré trois grandes études sur la criminalité, qui se trouvaient être américaines, où la criminalité est plus élevée; le taux de criminalité y est plus élevé. Je sais que ce ne sont pas des études canadiennes, et les taux de criminalité y sont plus élevés. Les statistiques criminelles représentaient entre 0,02 p. 100 et 1 p. 100 de la violence familiale relevée dans la population générale. Les chiffres de violence familiale contenus dans les statistiques pénales représentent un minuscule fragment, tout petit, vous devez réellement le réaliser.

Pour ce qui est des autres recherches effectuées, la sénatrice Cools a déjà mentionné les principaux chercheurs. Brinkerhoff et Lupri font du travail en Alberta. Il y a le travail effectué par Dutton. Aux États-Unis, bien entendu, il y a Strauss et ses collègues, Richard Gelles et Suzanne Steinmetz. Il y a toute une bande dans l'Est des États-Unis, la région du New Hampshire. Ensuite, il y a un chercheur en Grande-Bretagne qui a fait une vaste enquête auprès de la population générale britannique. J'avais son nom, je crois que le groupe était Templer—oui, Templer et al.

• 1555

Quoi qu'il en soit, ils ont travaillé sur des enquêtes auprès de la population en général. Cela signifie que l'enquête suivait une méthode d'échantillonnage aléatoire. On posait aux répondants quantité de questions différentes sur les conflits, particulièrement les conflits dans la relation de couple. L'outil typique qu'ils utilisent est celui mis au point par Murray Strauss et ses collègues, l'échelle des tactiques conflictuelles, et immanquablement ils retrouvent les mêmes résultats, à un ou deux pour cent près, qui établissent que les hommes et les femmes ont le même taux d'abus. Il n'y a réellement pas de différence.

La sénatrice Cools m'a demandé de parler de l'enquête sur la violence faite aux femmes menée il y a quelques années.

Un élément intéressant de cette enquête est qu'environ deux avant qu'elle soit menée, les auteurs ont contacté le Dr Strauss pour s'informer de son outil de recherche, l'échelle des tactiques conflictuelles. Ils ont passé un an à essayer de la démolir. En fin de compte, figurez-vous, ils l'ont utilisée quand même, avec des modifications mineures, le même outil donc. Ils ont ajouté quelques questions, reformulé certaines. En gros, c'était le même instrument et ils l'ont administré à travers le Canada aux femmes seulement.

Cette enquête posait un très grand nombre de questions. C'était une vaste enquête. Mais dans un volet ils demandaient ce qui se passait dans une relation conjugale et ils se sont retrouvés avec un chiffre étonnant qui a fait tous les grands titres des journaux canadiens, à savoir que 51 p. 100 des femmes ont été maltraitées à un moment quelconque depuis l'âge de 16 ans. C'était là une combinaison de tous les différents types d'abus—harcèlement, crainte, voies de fait réelles, crime, victimisation et maltraitance de la part du partenaire. Les 51 p. 100 sont un agrégat. Cela signifie également, ou pourrait signifier, que si mon partenaire avait lancé quelque chose contre moi il y a 25 ans sans jamais recommencer, si dans un excès de rage ou de frustration il m'avait jeté un objet, je ferais partie de cette statistique. J'aurais été l'une de ces femmes maltraitées.

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): Je vous remercie.

Je pense que nous avons pas mal de questions et nous allons peut-être nous y mettre, je vous prie. Madame Wasylycia-Leis.

Mme Judy Wasylycia-Leis: Je vous remercie, madame la présidente.

J'aimerais remercier les témoins de comparaître devant le comité, et en particulier Jane Ursel de ses statistiques. Bien que celles-ci portent sur les condamnations criminelles, je suppose qu'elles seront très utiles pour les travaux du comité, en ce sens que les condamnations pénales se situent à un extrémité de l'éventail de la violence et l'on peut supposer que, s'il y a une différence selon le sexe à une extrémité, il est probable qu'on la retrouve à tous les autres niveaux ou champs de l'éventail de la violence. J'imagine que cela nous ramène à la question posée à Mme Ursel pour ce qui est de la littérature et du travail qu'elle a effectué dans ce domaine, bien qu'elle ait dit que toutes les données ne sont pas réunies. Mais c'est peut-être là une conclusion valable.

Je vais peut-être poser toutes mes questions à la fois, si cela vous convient. Cela prendra moins de temps.

Deuxièmement, on a beaucoup dit aujourd'hui et précédemment que les femmes sont incitées à se réfugier dans les foyers même lorsqu'il n'y a pas réellement de raison pour cela et qu'on les pousse à entamer des procédures vengeresses ou vindicatives contre leur partenaire. Je me demande seulement—vous avez accumulé beaucoup d'expérience dans ce domaine au fil des ans—s'il y a des preuves à l'appui de ce genre d'affirmation.

Troisièmement, aujourd'hui et précédemment, des témoins ont estimé que si nous voulons jamais établir une politique réaliste à l'égard de la garde et du droit de visite, nous allons devoir repenser la tolérance zéro. Cela m'inquiète, car je pense que beaucoup d'entre nous cherchent à instaurer la tolérance zéro dans les écoles, dans les rues et les foyers, dans nos collectivités, à titre d'objectif très important pour une société pacifique. J'aimerais beaucoup entendre l'avis de Mme Ursel sur l'efficacité d'une politique de tolérance zéro.

Quatrièmement, lorsque les gens affirment qu'il y a un important syndrome de fausses allégations d'abus sexuel dans notre société aujourd'hui, j'aimerais savoir s'il y a des preuves à l'appui de cela.

• 1600

Ma troisième et dernière question: beaucoup de gens affirment que les problèmes que nous connaissons aujourd'hui sont la conséquence du mouvement vers une plus grande égalité entre les hommes et les femmes des années 70. Qu'en pensez-vous?

Une autre question: certains disent que les tribunaux sont partiaux envers les femmes. Y a-t-il des preuves de cela?

Ma dernière question intéresse certaines études qui disent qu'il y a des indications que la violence est un facteur pour la moitié ou plus des femmes qui demandent le divorce, que la violence connaît une escalade au moment de la séparation et que les conjoints violents sont deux fois plus susceptibles de demander la garde exclusive des enfants. Y a-t-il des preuves à l'appui de ces affirmations?

Mme Reena Sommer: Comme je l'ai dit, je dois partir pour me rendre à un rendez-vous. Merci beaucoup.

La sénatrice Anne Cools: Juste avant que Mme Sommer ne parte, elle a dressé la liste de ces études mais elle n'y a pas inscrit la sienne.

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson):

[Note de la rédaction: Inaudible]... la sienne propre.

Mme Reena Sommer: Merci beaucoup.

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): Merci.

Mme Jane Ursel: J'espère avoir pris de bonnes notes. Il y avait beaucoup de questions, mais je pense pouvoir en regrouper certaines.

Pour ce qui est des propos antérieurs—je n'étais pas là pour les entendre—je vais simplement... Rectifiez si je me trompe, mais l'idée était que les femmes sont encouragées à se réfugier dans les foyers, même si ce n'est pas nécessaire, et que parfois on les encourage à faire de fausses allégations. Ensuite, il y avait votre question sur la tolérance zéro.

L'une des choses que nous avons apprises dans notre province, où nous avons une politique de tolérance zéro beaucoup plus stricte que partout ailleurs, est que les interventions et arrestations de la police font que moins de femmes vont dans les foyers, que si les femmes peuvent se sentir en sécurité chez elles, c'est là qu'elles préfèrent rester, à proximité de l'école de leurs enfants et de leur lieu de travail, etc. L'une des évolutions intéressantes que nous avons observée au Manitoba est que, lorsque les taux d'arrestation ont augmenté, la demande pour les foyers résidentiels a diminué.

Je pense que cela montre abondamment que les femmes préfèrent ne pas aller dans les foyers. Cela bouleverse profondément leur vie et celle de leurs enfants et peut parfois perturber leur travail. Je ne pense pas que les femmes choisissent de se réfugier dans les foyers pour des raisons triviales. Les foyers d'accueil sont véritablement le dernier recours.

Lorsqu'on leur propose d'autres options sûres, les femmes les préfèrent. Je pense que le Manitoba est un exemple intéressant, car nous avons la tolérance zéro depuis assez longtemps pour en constater les répercussions générales et, comme M. Forseth l'a indiqué, nous considérons là un phénomène qui touche à maints aspects de notre vie sociale.

Donc, en réponse à la question sur les foyers, je ne pense pas que les femmes y aillent à la légère. Je pense que ceux qui travaillent dans ces foyers suivent des règles, des lignes directrices et des principes de comportement professionnel très clairs. Nos foyers, comparés à ceux d'autres provinces, sont bien financés et disposent d'un personnel professionnel et stable, sans guerre de rotation. Les règles de pratique et de comportement sont comprises et appliquées.

Si les données que nous avons enregistrées au cours des quatre ou cinq dernières années se maintiennent et si elles sont reproduites, par exemple en Ontario, où il y a maintenant des tribunaux de violence familiale et où l'on se dirige vers des politiques d'arrestation plus agressives, j'ai l'impression que le phénomène que nous voyons est qu'une intervention plus rapide dans le cycle de violence empêche l'escalade de celle-ci et donne aux membres de la famille davantage d'options, c'est-à-dire que le foyer d'accueil n'est plus la seule solution disponible.

Je considère la tolérance zéro, si elle produit les mêmes résultats dans d'autres provinces, comme une chose positive pour une société pacifique.

• 1605

Pour ce qui est de la question de savoir si les tribunaux sont partiaux en faveur des femmes, mes connaissances se limitent aux cours pénales. Comme je l'ai dit, j'ai siégé à des centaines de procès pour violence conjugale—près de 600 au cours des huit dernières années et environ 150 procès pour sévices à enfant—et j'ai été impressionnée par l'impartialité et la sensibilité et le niveau de conscience de nos magistrats. J'ai suivi également les jugements rendus par nos tribunaux spécialisés et les ai comparés au jugement de la Cour du Banc de la Reine qui entend les appels. J'ai constaté que les jugements rendus dans notre Cour de violence familiale spécialisée connaissent le même taux de confirmation en appel que ceux de la Cour du Banc de la Reine. Je suis donc convaincue que les magistrats qui jugent ces cas sont impartiaux et bien informés.

La dernière question—si j'en ai oubliées, dites-le—était de savoir s'il y a une escalade de la violence au moment de la séparation. Il en existe certes beaucoup d'indications au Canada. La preuve la plus convaincante et la plus inquiétante est le taux d'homicide au Canada. Les gens sont le plus exposés à ce risque lorsqu'ils se séparent, et c'est une réalité terrifiante et horrifiante. C'est une réalité qui peut amener beaucoup de gens à rester dans un couple alors qu'il vaudrait mieux qu'ils en sortent.

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): Monsieur Gallaway.

M. Roger Gallaway (Sarnia—Lambton, Lib.): Je vous remercie.

Je suis désolé que Mme Sommer ait dû partir et je vais donc poser ma question à Mme Ursel. Je veux répercuter la frustration que le sénateur Jessiman exprimait devant ce que nous entendons aujourd'hui. Nous avons entendu Mme Sommer parler de la violence dans la population en général, et je pense qu'il y a une différence entre violence et condamnation pénale.

Mme Jane Ursel: Je suis d'accord.

M. Roger Gallaway: Je dois dire que ce panel cet après-midi a été très intéressant en ce sens que nous avons abordé un domaine nouveau. Nous l'avions effleuré, mais je pense que nous sommes en plein dedans cet après-midi.

Ma question est d'ordre très général. J'essaie de concilier ce que Mme Sommer a dit et les chiffres que vous nous avez présentés. Vous avez fait une remarque que j'ai trouvé intéressante. Quelqu'un de ce côté a fait état d'un conjoint portant une accusation et vous avez répondu non, le conjoint appelle et la police intervient et porte l'accusation, conséquence logique d'une politique de tolérance zéro.

Il semble, d'après les condamnations que vous avez comptabilisées ici—nous parlons là de condamnations pénales—que le rapport hommes-femmes est de 20:1, soit à peu près le même que pour d'autres infractions criminelles. Mais nous ne formulons pas de recommandations pour modifier le Code criminel. Nous étudions un projet de loi traitant de relations. Je ne suis donc pas particulièrement intéressé par ce qui se passe dans les cours pénales en soi, car ce n'est pas notre sujet; nous nous occupons de relations.

Je voudrais vous demander si vous connaissez des études. Vous semblez être criminologue, si vous me permettez de le dire, de par cette étude que vous présentez—et j'espère que vous ne prendrez pas cela comme... Je ne sais pas quel est l'ordre hiérarchique dans les universités entre sociologues et criminologues.

Nous traitons là de relations très intimes dans les foyers. Vous avez dit que la police intervient lorsque quelqu'un appelle. Je me demande ce que vous savez à ce sujet ou ce que vous pouvez nous apprendre sur les différences entre sexes à cet égard, telles que les femmes appellent et les hommes n'appellent pas, mais nous savons que dans ce foyer il y a des actes de violence égaux de la part de l'homme et de la femme. Vous nous donnez un registre de condamnations pénales. Nous allons dans ce foyer où le Code criminel ne se rend pas; c'est la Loi sur le divorce. Il se peut, si j'ose le dire, que les femmes soient tout aussi violentes que les hommes, mais l'homme, pour des raisons culturelles et de vanité, n'appelle pas la police.

La sénatrice Anne Cools: S'il le faisait, cela ne changerait rien de toute façon.

• 1610

Mme Jane Ursel: Je sais que votre tâche n'est pas de réviser le droit pénal. Cependant, je ne pense pas qu'il soit sage en matière de droit familial d'ignorer les infractions criminelles mettant en jeu les familles. J'espère que ce n'est pas là ce que vous voulez dire et je présume que ce n'est pas ce que vous voulez dire, étant donné votre question ultérieure. Je pense que ces données sont pertinentes pour votre tâche et qu'il importe que vous en teniez compte dans vos délibérations.

Je voudrais également souligner, et j'en reviens à ce que je disais tout à l'heure, que nous sommes dans une situation particulière au Manitoba car nous sommes l'une des rares provinces à disposer de ces données. La plupart des provinces ne distinguent pas entre les actes de violence familiale et les voies de fait générales, si bien qu'elles ne peuvent même pas vous donner ces chiffres. Encore une fois, mon argument est qu'il faut formuler les politiques sur la base des faits, des faits irréfutables dont on dispose. Je vous ai apporté aujourd'hui un très petit fragment de faits, que je pensais pouvoir expliquer en cinq minutes, comme on me l'avait demandé. Cependant, il y a des rapports à l'appui, j'ai indiqué où ils sont et je serais ravie d'en envoyer des copies au comité.

Pour ce qui est des appels, nous savons qui fait les appels parce que nous extrayons nos données des rapports de police, qui sont le premier stade de la saisie des données. Nous savons qu'environ 76 p. 100 des appels sont faits par la victime. Nous savons par conséquent, puisque davantage de victimes sont des femmes que des hommes, que dans ces 76 p. 100 d'appels la majorité sont des femmes. Cependant, il y a aussi des appels faits par les enfants et par les voisins et autres amis de la famille ou même des gens qui ont entendu par hasard l'altercation.

La police a pour pratique, et c'est le fondement de la politique de tolérance zéro, lorsqu'elle arrive sur les lieux et qu'il y a plainte et contre-plainte, de porter accusation dans les deux cas.

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): Je vous remercie.

Docteur Bennett, vous aviez une question.

Mme Carolyn Bennett: Elle a reçu en grande partie réponse. Pour ce qui est des recherches qualitatives autour de ces données, vous aimeriez manifestement avoir les moyens d'en faire plus, mais en ce qui concerne l'escalade de la violence dans les affaires de garde et de droit de visite, avez-vous une idée approximative du pourcentage de ces cas où il y a un conflit sur la garde et le droit de visite?

Mme Jane Ursel: Non, désolée, je n'ai aucun moyen de recueillir cette donnée à ce stade.

Mme Carolyn Bennett: Il y a manifestement ici deux groupes différents. Quelle est votre interprétation du travail du Dr Strauss?

Mme Jane Ursel: Je pense que le Dr Strauss fait un excellent travail, mais je pense que nous mesurons des choses différentes. Et je pense que Mme Sommer a tenté de montrer qu'il y a une différence entre les stratégies que les couples utilisent pour résoudre les conflits, qui peuvent être bonnes ou mauvaises, et les éléments avec lesquels je travaille, soit les voies de fait, pour lesquelles les données ne comportent aucune ambiguïté, à mon avis.

La sénatrice Anne Cools: Rappel au règlement. Elle ne mesure pas les voies de fait, elle mesure les condamnations criminelles pour voies de fait. Les données du Dr Strauss mesurent les voies de fait en général; ici, on mesure les condamnations...

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): Je comprends cela.

La sénatrice Anne Cools: ... et c'est un travail très valide, madame Ursel, et je vous félicite de le faire.

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): Merci infiniment de votre exposé. Il était très intéressant.

Mme Jane Ursel: Je vous remercie.

• 1615

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Mme Britton comparaît au nom de la section manitobaine de la GRAND Society. Nous avons entendu vos homologues d'autres provinces. Soyez donc la bienvenue et je vous donne la parole.

Mme Eileen Britton (présidente, GRAND Society, Section manitobaine): En tant que présidente de la section manitobaine de la GRAND Society, je comparais devant vous aujourd'hui pour traiter des droits des grands-parents dans la Loi sur le divorce.

La GRAND Society a été fondée à Toronto en 1982 par trois travailleurs sociaux. C'est une organisation qui se porte à la défense des grands-parents auxquels on refuse l'accès à leurs petits-enfants.

Il existe souvent un lien spécial entre les petits-enfants et leurs grands-parents, un lien qui enrichit et complète la vie familiale des jeunes comme des vieux. Parfois ce lien est rompu par le divorce, la séparation, le décès de l'un des deux parents et d'autres circonstances. Lorsque cette rupture intervient dans la famille, les petits-enfants et les grands-parents souffrent.

Je viens devant vous aujourd'hui demander la modification de la Loi sur le divorce de manière à y inclure le maintien de l'accès des grands-parents à leurs petits-enfants après un divorce. Les modifications à la loi devraient préciser que, dans l'intérêt de l'enfant, les relations avec les grands-parents ne devraient pas être rompues sans motif valable après le divorce ou la séparation.

Dans la culture autochtone, il existe un symbole appelé cercle d'influences. Le cercle d'influences est un outil pédagogique des autochtones. Il montre les innombrables liens qui unissent toutes choses dans l'univers. C'est un modèle de ce que les êtres humains peuvent devenir s'ils ont la possibilité et la volonté de réaliser leur plein potentiel. Tout comme la terre traverse les saisons, du printemps à l'hiver, la vie—la naissance depuis jusqu'à la renaissance dans le monde spirituel—va de l'enfance à la vieillesse. Les nouveaux-nés et les anciens sont les plus proches du monde de l'esprit, l'un venant juste d'arriver et l'autre étant sur le point de partir. De ce fait, leur relation est vitale car l'un complète l'autre. L'aîné donne la sagesse et le savoir à l'enfant et l'enfant apporte l'équilibre et la vigueur de la jeunesse à l'ancien. S'il manque un quadrant dans la vie d'une personne, il y aura un déséquilibre dans cette vie et la personne ne pourra réaliser son plein potentiel.

Traditionnellement, de nombreux parents donnaient leur premier-né aux grands-parents lorsque le deuxième enfant naissait. Évidemment, c'était il y a longtemps et les temps ont changé. Les enfants étaient traités comme un cadeau fait à toute la famille, et non seulement aux parents.

Je trouve le symbolisme des autochtones très significatif et pas très éloigné de notre propre culture, à bien des égards. Cependant, au fil des ans, avec les changements sociaux, la mobilité et le nomadisme des familles, l'éclatement de l'unité familiale pour cause de divorce, de séparation, de décès et d'autres circonstances, ce sont les enfants qui subissent les contre-coups de ces changements.

La référence au cercle d'influences où les enfants sont considérés comme un don à toute la famille et pas seulement aux parents fait ressortir clairement que dans la société actuelle, lorsqu'il y a éclatement de l'unité familiale, ces enfants ne sont plus traités comme un don mais deviennent des armes brandies dans les conflits.

Après un divorce, c'est le parent qui n'a pas la garde, le plus souvent le père, et sa famille élargie qui se voient totalement coupés des enfants qu'ils aiment. Dans certains cas, de fausses accusations de sévices sont portées contre le parent n'ayant pas la garde, infligeant à la famille élargie une douleur et une frustration immense. Le coût d'une fausse allégation peut anéantir la famille de l'accusé, tant financièrement que psychologiquement.

La GRAND Society a toujours déploré qu'il n'y ait pas de loi fédérale pour protéger les droits des grands-parents à l'égard de leurs petits-enfants. Il y a des lois provinciales au Nouveau-Brunswick, au Québec et en Alberta qui établissent les droits des grands-parents. Dans tous les 50 États américains, le législateur a conféré aux grands-parents le droit d'adresser une requête au tribunal pour obtenir la garde ou le droit de visite à l'égard de leurs petits-enfants de manière juridiquement contraignante.

• 1620

Nous recommandons respectueusement au comité de modifier la Loi sur le divorce de façon à reconnaître les grands-parents en matière de garde et de droit de visite et que les grands-parents n'aient pas à demander l'autorisation du tribunal, comme c'est le cas actuellement, avant de déposer une requête de garde et de droit de visite.

Nous recommandons au comité que dans les cas où une fausse allégation est faite dans le but de couper l'accès aux enfants, ce fait soit considéré en soi comme un sévice et soit pris en considération au moment des décisions sur la garde et le droit de visite.

Ces modifications de la Loi sur le divorce donneraient aux juges, il faut l'espérer, les outils voulus pour rendre des ordonnances incluant les grands-parents. Il est dans l'intérêt des enfants de conserver une relation continue avec leurs grands-parents et cette relation ne devrait pas être rompue sans motif valable.

Nous, dans la GRAND Society, sommes convaincus que ces modifications encourageront les parties à régler les questions de garde et de droit de visite par la médiation plutôt qu'en justice. La substitution de la médiation au recours en justice éviterait l'anéantissement financier aux familles et les bouleversements et les crève-coeur aux enfants. Il y a des milliers de grands-parents et de parents n'ayant pas la garde à travers le Canada qui sont totalement coupés des enfants qu'ils aiment.

Nous, dans la GRAND Society, espérons que les recommandations faites par ce comité contribueront à inscrire ces changements nécessaires dans la Loi sur le divorce. Nous parlons pour nos petits enfants, ces voix silencieuses, qui sont les enfants de l'avenir et notre bien le plus précieux. Il n'y a pas de plus grande joie que de pouvoir aimer et gâter un petit-enfant.

Je vous remercie.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Allons-nous passer aux questions? Nous commencerons avec M. Forseth.

M. Paul Forseth: Vous savez peut-être que vous n'êtes pas le premier groupe de grands-parents à comparaître ici. Même le Hansard de la Chambre des communes est rempli de débats sur cette question, en rapport avec des projets de loi d'initiative parlementaire, etc.

J'ai été frappé par votre exposé. Vous avez parlé de «lien spécial».

Mme Eileen Britton: Oui.

M. Paul Forseth: Vous avez employé cette expression.

Mme Eileen Britton: Oui.

M. Paul Forseth: Ce qui m'est venu immédiatement à l'esprit, c'est: «lien spécial, loi spéciale». C'est ce que vous demandez.

Mme Eileen Britton: Oui.

M. Paul Forseth: Les arguments sont tous là. Je ne sais pas si j'ai entendu quelque chose de nouveau, sinon la réaffirmation du même axiome, à savoir que s'il y a un lien spécial, il faut une loi spéciale.

Mme Eileen Britton: Oui.

M. Paul Forseth: Ce qu'il nous faut faire maintenant, c'est intégrer cela dans nos délibérations et voir si nous l'inscrirons de nouveau dans nos recommandations. Cela faisait partie des recommandations dans d'autres contextes, d'autres tribunes et situations. Il reste à voir quelles seront nos recommandations, mais je tiens à vous remercier de nous avoir rappelé encore une fois ce lien spécial.

M. Eileen Britton: Merci beaucoup.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Y a-t-il d'autres questions?

Mme Judy Wasylycia-Leis: Je vous remercie, monsieur le président.

Je vous remercie d'avoir pris le temps de comparaître devant ce comité.

Vous avez formulé quelques recommandations. L'une est d'apporter une modification spécifique à la Loi sur le divorce. Deuxièmement, vous dites que nous devons également privilégier la médiation au détriment des contentieux juridiques.

Est-il juste de dire que même si nous modifions la Loi sur le divorce, si nous ne sommes pas résolus à mettre en place les services de médiation, les services de conseil, les cours sur le rôle parental et tout le reste, toute modification législative sera lettre morte sans cette action au niveau des programmes et du soutien social?

Mme Eileen Britton: C'est juste. Je pense que la médiation est l'outil le plus important de tous. Je pense que les juges et les avocats devraient aussi se tenir davantage au courant des changements dans la société. Les médecins doivent suivre des cours de recyclage réguliers et je pense que les avocats et les juges devraient aussi se tenir au courant de l'évolution des choses. Je ne pense pas qu'ils aient pleinement conscience de l'importance de ce problème pour les grands-parents et de ceux dont ils sont privés.

• 1625

Mme Judy Wasylycia-Leis: L'avantage est que les grands-parents pourraient rendre des services précieux aux parents séparés ou en cours de divorce et être d'un grand secours pour les enfants. Au lieu de cela, vous semblez dire que les grands-parents eux-mêmes deviennent des pions ou des outils ou armes dans toute cette bataille.

Est-ce que vous vous fondez pour dire cela sur les gens avec lesquels vous travaillez, sur l'expérience générale des grands-parents dans les cas de séparation et de divorce?

Mme Eileen Britton: Oui, absolument. Un grand nombre de nos petits sont sans cesse tiraillés entre leurs parents, et habituellement le parent qui n'a pas la garde... est celui qui perd le contact avec ses petits-enfants. C'est une situation très triste, car les enfants sont constamment exploités dans les conflits et les grands-parents aussi, car s'ils ne font pas ce que les parents demandent, l'enfant ne sera pas autorisé à les voir.

Il y a toutes sortes de problèmes sur lesquels il faut se pencher.

Mme Judy Wasylycia-Leis: Je vous remercie.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Y a-t-il d'autres questions? Je vois qu'il n'y a plus de questions.

Je tiens à vous remercier d'être venue, madame Britton.

Mme Eileen Britton: Merci.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): C'est important, je pense, et je sais que votre organisation est active dans de nombreuses provinces.

Mme Eileen Britton: Oui, nous le sommes.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): J'apprécie que vous soyez venue aujourd'hui nous rappeler les grands-parents. Nous avons eu une délégation dans chaque ville, et je pense que c'est très important.

Mme Eileen Britton: Oui, et je vous remercie de nous avoir reçus aujourd'hui.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Merci beaucoup.

Il est 15 h 26 et nous sommes à l'heure. Je pense que nous allons faire une pause de quelques minutes et allons suspendre la séance pendant quatre minutes.

• 1627




• 1637

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Est-ce que Kathleen Harvey, Ginette Lemoine et Duncan Croll pourraient place à la table.

La sénatrice Anne Cools: Monsieur le président, j'aimerais juste prendre un moment avant de faire asseoir les témoins.

On vient de me remettre un article paru dans le Winnipeg Free Press, sous la plume d'une certaine Penni Mitchell, sous le titre «La guerre du divorce s'embrase». Il y a là quelques affirmations très erronées, odieuses et terribles et j'aimerais que nous ayons une discussion à son sujet, à titre de question de privilège.

On y lit:

Je n'ai nul souvenir de ce genre de contre-interrogatoire. Je soulève cela à titre de question de privilège.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Sénatrice, nous pourrions peut-être en discuter, en même que de l'autre affaire, lundi.

La sénatrice Anne Cools: D'accord. Je voulais simplement vous donner préavis.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Je vous remercie, sénatrice.

Une voix:

[Note de la rédaction: Inaudible]

La sénatrice Anne Cools: C'est idiot. La vérité ne compte pas. Ne venez pas embêter certains avec des faits.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Avant de commencer, il y a ici une personne dont je ne connais pas le nom. On m'a dit qu'il y avait un avocat de droit familial qui souhaitait faire une présentation de trois minutes à la fin de la séance. Je demande l'accord des membres.

• 1640

Désolé; je ne connais pas votre nom.

Mme Rowena Fisher (témoigne à titre personnel): Rowena Fisher.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Bien. Autorisez-vous Mme Fisher à parler?

Des voix: D'accord.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Bien. Je vous remercie.

Désolé, madame Harvey. Vous avez la parole pour cinq minutes.

Mme Kathleen Harvey (témoigne à titre personnel): Ce que je vais dire fait un peu suite à ce dont parlait l'intervenant précédent. Mais je ne représente aucun groupe; je représente ma seule famille, plus particulièrement mon fils aîné, mon mari et moi-même—les père et grands-parents d'un enfant de neuf ans.

Mon fils a obtenu le divorce en 1989. Le bébé était tout petit à l'époque et le jugement de divorce a confié à son ex-femme la garde de l'enfant. Il n'avait le droit de visite qu'un jour toutes les deux semaines, avec un accord verbal prévoyant que lorsqu'elle aurait deux ans, il pourrait l'emmener pour une fin de semaine tous les quinze jours.

Peu après, son ex-femme est revenue sur cet accord et il est devenu de plus en plus difficile pour lui de préserver une relation paternelle avec sa fille. Il a commencé à se sentir de plus en plus comme un gardien d'occasion. Ensuite, son ex-femme a déménagé sans lui donner sa nouvelle adresse et, bien qu'elle lui téléphone parfois, il a fini par ne plus pouvoir voir sa fille que lorsque sa femme téléphonait pour fixer rendez-vous.

Pendant tout ce temps il était obligé de payer une pension alimentaire pour son enfant par l'intermédiaire de la Direction de l'exécution des pensions du gouvernement manitobain et il a effectivement payé pendant tout ce temps.

En 1996, son ex-femme a formé une nouvelle relation et a déménagé à Vancouver, sans l'en informer ni lui dire où elle allait. Elle l'a depuis contacté deux fois par téléphone, mais elle lui a donné une adresse inexistante et pas de numéro de téléphone. Ce n'est que par l'intermédiaire de son école ici à Winnipeg qu'il a pu découvrir où elle est allée et dans quelle école sa fille est maintenant inscrite à Vancouver.

Lorsque sa femme a déménagé et disparu, à aucun moment n'a-t-il pu obtenir de la police ou d'un organisme gouvernemental, ou même de la Direction de l'exécution des pensions, une aide pour la localiser. On lui disait toujours que pour faire exécuter l'ordonnance de droit de visite à sa fille, il devrait saisir chaque fois le tribunal. Il ne semblait exister aucune raison de ressaisir le tribunal si l'ordonnance judiciaire initiale ne pouvait être exécutée.

Ensuite, le Conseil scolaire de North Vancouver, à qui il avait demandé qu'on lui envoie les bulletins de sa fille, a refusé, disant que selon la Freedom of Information and Protection of Privacy Act, les bulletins étaient la seule propriété de sa fille de neuf ans et qu'il ne pouvait les divulguer. Cela, en dépit du fait que, comme nous l'avons appris, de par la Loi fédérale sur le divorce, un père n'ayant pas la garde mais jouissant du droit de visite a le droit de recevoir des renseignements sur l'éducation et le bien-être de son enfant et que l'école est tenue, de par la loi, de les lui fournir.

Il a demandé à la B.C. Protection of Privacy Commission si l'interdiction couvrait son cas et il a été informé par M. David Flaherty, de la commission, que cette loi ne couvrait pas du tout son cas ou celui de sa fille. Mais il n'a quand même rien pu obtenir du Conseil scolaire de North Vancouver, bien qu'il ait réitéré sa demande.

Sans vouloir perturber la vie de sa fille en saisissant de nouveau le tribunal, il aimerait savoir comment elle s'habitue à sa nouvelle vie. Il pense que d'obtenir ses bulletins scolaires lui permettrait de se faire une idée.

Au moment du divorce, nous, les grands-parents, n'avions aucun droit juridique, bien que nous nous occupions activement de nos cinq autres petits-enfants et ayons pris des dispositions financières similaires pour tous. Nous avons la ferme conviction que lorsqu'un divorce met en jeu des enfants et lorsqu'il n'y a pas d'allégation de mauvais traitement, le juge ou le médiateur devrait se faire l'avocat du droit de l'enfant à un accès égal aux deux parents et aux quatre grands-parents. Le système actuel semble être généralement contradictoire et à faire d'un parent ou d'un autre le gagnant, en ignorant le fait que l'enfant se porte mieux s'il est aimé par les deux familles. Il me semble qu'au moment du divorce les parents sont souvent trop peinés et trop fâchés l'un avec l'autre pour prendre des décisions équitables pour l'enfant.

• 1645

Nous estimons également que les ordonnances judiciaires de droit de visite rendues au moment du divorce devraient être applicables partout dans le pays et non pas applicables séparément dans les différentes provinces sur pourvoi en justice chaque fois. À l'heure actuelle, cela me paraît être une source de revenu facile pour les tribunaux et les avocats, mais c'est un fardeau financier pour les parents.

Je considère également qu'il devrait exister un frein à la capacité du parent qui a la garde d'empêcher l'exercice du droit de visite. Ils sont peut-être ex-partenaires mais ils ne sont pas ex-parents, et aujourd'hui un père qui ne paie pas sa pension alimentaire peut perdre son permis de conduire etc. Il me semble qu'il devrait exister des dispositions similaires pour le parent qui a la garde et qui refuse l'accès.

Je n'ai pas parlé des divorces mettant en jeu des allégations de sévices, car il n'y en avait pas dans notre cas, mais nous estimons que les résultats des systèmes judiciaires provinciaux et fédéral contradictoires actuels sont préjudiciables aux enfants—et à leurs parents et grands-parents.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Je vous remercie.

Mme Ginette Lemoine (témoigne à titre personnel): Me donnez-vous cinq minutes?

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Oui.

Mme Ginette Lemoine: Je n'ai pas de notes. Je vais simplement vous raconter ce qui m'est arrivé.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): C'est bien. Allez-y.

Mme Ginette Lemoine: Je suis avec un homme qui a un enfant d'une autre relation. Cela va faire trois et c'est un désastre depuis le début. La mère, qui a la garde de sa petite fille, a un besoin avéré de soins psychiatriques. Elle a tenté de se suicider à plusieurs reprises au fil des ans. Le Centre de protection de l'enfance est au courant mais elle a toujours la garde de cette petite fille.

J'ai fait appel à l'intercesseur des enfants et aux SEF, toujours à Winnipeg. Mais parce qu'il n'y a pas de sévices physiques, il n'y a pas de marques, et ils ne veulent rien faire. Mais personne ne semble s'occuper du bien-être mental de cette petite fille, ce que je ne comprends pas.

Au cours de ces trois années, j'ai fait la connaissance d'autres personnes qui ont vécu la même situation. J'ai un autre ami qui n'a pas vu sa petite fille depuis bien un an. Il y a des affidavits sous serment à l'effet que la mère a dit à sa petite fille, qui a quatre ans, que papa est mort, le chien est mort, le chef de la famille est mort... Elle vient d'être réunie avec son père il y a deux semaines. Quelle sorte de stress psychologique cela impose-t-il à une petite de quatre ans?

Pour ce qui est de ma situation, j'ai maintenant une fille de Paul. Elle n'a qu'un an et demi, mais on peut voir qu'elle ressent le stress qui sévit à la maison, car toutes les deux semaines, lorsque nous avons la visite de sa fillette, un dimanche soir sur deux, nous avons plus ou moins la police à notre porte. Il y a toujours de fausses accusations alléguant une stupidité ou une autre. Nous ne pouvons laisser cette petite fille approcher ses grands-parents paternels parce qu'elle a censément dit à la police qu'ils ont tous menacé de tuer la mère. Il n'y a rien dans la décision judiciaire. C'est sa parole contre le monde entier, parce qu'elle est la femme, elle est la mère, elle a donné naissance à cette petite fille, elle règne; les femmes règnent.

Je pourrais me retourner et mettre la police aux trousses de Paul demain à cause d'un autre problème, la tolérance zéro, mais pour moi tout cela se tient. Si jamais le père est emmené de la maison lors d'une scène de ménage, aussitôt il perd toute possibilité de jamais avoir la garde d'aucun de ses enfants. Peu importe quelle est sa situation. Il a l'agression contre lui, qu'elle soit vraie ou fausse. Il n'aura jamais le droit de voir ses enfants. Il devra dépenser les économies de toute sa vie en frais de justice rien que pour voir ses enfants. Et nous savons qu'il est prouvé que les mères sont pas toujours les meilleurs parents.

À mes yeux, il faut modifier la loi afin que chaque cas soit tranché individuellement. Et ce n'est pas ce qui se passe. On ne fait qu'appliquer les stéréotypes. La mère a donné naissance, la mère a la garde. La mère peut faire tout ce qu'elle veut. Je parle en tant que mère. Je pourrais me retourner et faire la même chose si je le voulais, et je m'en tirerais probablement.

Je regarde certains parents, et les pères sont meilleurs parents. Ils vont passer du temps avec leurs enfants, ils ont la patience. Pas tous, mais beaucoup que j'ai vu. Pourtant, on ne leur donne jamais la chance.

• 1650

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Je vous remercie.

Monsieur Croll.

M. Duncan Croll (témoigne à titre personnel): Je vais simplement vous lire mon mémoire et vous esquisser ensuite ma situation.

S'il est une chose que je sais être vraie, c'est celle-ci. Les décisions économiques déterminent les résultats sociaux. La position que notre gouvernement a adoptée sur la question des pensions alimentaires pour enfants ne fait pas exception à cette règle.

Malheureusement, en mai 1997, lorsque nos élus ont adopté le projet de loi C-41, ils ont soit oublié cette règle soit l'ont négligée. Quoi qu'il en soit, au lieu de réfléchir aux répercussions à long terme sur les familles d'une telle loi, ils ont choisi de concentrer leurs ressources sur un programme politiquement plus commode, axé sur l'idée erronée que le rôle d'un père dans l'éducation d'un enfant se mesure à l'aune de la contribution financière qu'il verse ou ne verse pas à son ex-femme.

C'est loin d'être une idée nouvelle. De fait, c'est un point de vue souvent répercuté par les médias, les tribunaux et quelques groupes de pression féministes choisis. Néanmoins, cela témoigne à mes yeux d'une chose, l'incapacité complète ou le refus de s'attaquer honnêtement au vrai problème.

Concentrer l'attention du public sur les pères mauvais payeurs ne modifie pas ce fait, il le souligne. Voyez-vous, contrairement à ce que pensent les groupes que j'ai nommés et nos dirigeants, la paternité va beaucoup plus loin que l'argent; c'est l'implication d'un père et sa présence. C'est le défi qu'il crée et les conseils qu'il donne pour les relever. C'est l'amour, le respect et la compréhension qui sous-tendent chacun de ses gestes auprès de ses enfants. Les politiques réactionnaires comme le projet de loi C-41, qui visent à élargir le filet du contrôle social, accentuent la discrimination systémique et font des hommes les boucs émissaires, ne servent qu'à saper cette relation.

Je vais maintenant décrire certaines des façons plus tangibles dont cela se fait, dans l'espoir que vous voyiez non seulement les répercussions sur le père mais aussi les répercussions ultérieures sur leurs enfants et l'ensemble de la société.

Pour commencer, le projet de loi C-41 enlève aux pères une déduction dont ils avaient grand besoin et qui était une reconnaissance de leur situation financière après paiement de la pension. Notre gouvernement tente de justifier cela en assimilant les familles à deux ménages aux familles à un ménage, comme si c'était la même chose, alors qu'en vérité ils savent très bien que ce n'est pas le cas. Pour aggraver encore les choses, il fixe des lignes directrices arbitraires pour les pensions alimentaires pour enfants, sans tenir compte des frais qui résultent de la participation des pères à la vie de leurs enfants.

Bien qu'il fasse tout cela sous prétexte de protéger l'intérêt de l'enfant, tel n'est pas le résultat; c'est exactement l'inverse. En suppléant encore davantage au revenu des mères seules, qui la plupart de nos jours travaillent elles-mêmes, vous paralysez financièrement la relation déjà ténue que la plupart des pères sont autorisés à avoir avec leurs enfants. Non seulement fait-on cela dans l'ignorance la plus profonde de la vraie nature et de la profondeur de l'engagement d'un père, mais on ignore aussi complètement l'importance vitale de cet attachement pour le développement de l'enfant.

Dans l'état actuel des choses, les pères sont déjà fortement désincités à jouer un rôle entier dans la vie de leurs enfants par des ex-conjointes vindicatives, égoïstes et émotionnellement irresponsables, davantage intéressées à asseoir leur psychodrame de contrôle qu'à agir dans les meilleurs intérêts de leurs enfants, de même que par des cours familiales partiales envers les femmes qui semblent incapables de reconnaître l'importante fonction que remplit un père dans la création d'un adulte fort, adapté, émotionnellement responsable et productif.

Au niveau politique, l'absence de toute législation empêchant la délocalisation de nos enfants et garantissant leur droit à un niveau minimal d'accès de leur père immédiatement après la séparation signifie que ceux qui choisissent d'agir dans l'intérêt de leurs enfants doivent aussi subir l'indignité et le coût extraordinaire d'une bataille juridique. Dans la plupart des cas, pour ceux qui ont les moyens d'entreprendre une telle action et pour certains d'entre nous qui ne les ont pas, nos chances de devenir des gardiens conjoints et égaux, intervenant dans les décisions qui guident la vie de nos enfants, sont au mieux minimes.

• 1655

Habituellement, nous sommes relégués au rôle de garde d'enfant ou de grand frère, avec peu ou pas de possibilité d'influencer positivement le cours du développement de nos enfants, autrement que par notre présence. Malheureusement, nos tribunaux n'hésitent même pas à violer ces obligations minimes, car souvent ils usent de leur vaste pouvoir discrétionnaire pour imposer des limites arbitraires et injustifiables au droit de visite.

Cela ne permet pas d'être un vrai parent. Cela sape la paternité. Dans la plupart des cas, ces restrictions supplémentaires créent une situation où nombre de pères potentiellement bons se retrouvent incapables d'offrir à la fois du temps de qualité et de la discipline à leurs enfants. Certains s'en tirent en jouant le rôle de papa gâteau, en usant au mieux du temps limité dont ils disposent. D'autres, qui voient compromise toute la dynamique de leur relation, laissent tomber. Dans la mesure où notre gouvernement continue à priver les pères des ressources dont ils ont besoin pour exercer pleinement leur paternité, il contribue à ce résultat. Ce faisant, il expose davantage d'enfants au risque. Je trouve cela totalement inacceptable.

Pour que les enfants puissent acquérir confiance dans leur capacité à explorer les horizons les plus larges possibles de leur monde physique, psychologique, social, intellectuel et spirituel, ils doivent d'abord avoir une image forte de leur propre identité. Pour cela, ils doivent pouvoir bénéficier de la sagesse et de l'expérience accumulée par ceux qui les ont précédés. J'y vois un droit de naissance pour l'enfant. En le défendant, j'ai la ferme conviction que séparer les enfants de leur père est les priver des ressources mêmes dont ils ont besoin pour saisir avec confiance les occasions que la vie leur offre et découvrir leur potentiel.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Avez-vous presque fini? Vous dépassez légèrement le temps.

M. Duncan Croll: Oui.

Je n'ai pas hâte de voir les conséquences dévastatrices que la perte de cet héritage peut avoir lorsque on la pousse à la logique extrême. Il suffit de regarder les taux élevés de mortalité infantile, de suicide d'adolescents et de décès liés à l'alcoolisme qui sont les séquelles infligées à la population autochtone du Canada par la loi sur les écoles résidentielles.

Plus près de chez nous, il vous suffit de lire les résultats des recherches récentes sur les effets d'un père absent ou peu intéressé pour voir que c'est le facteur de corrélation le plus important dans la délinquance juvénile.

À un niveau plus personnel, j'ai grandi sans père. De ce fait, je ne connais que trop bien l'ampleur de la perte et l'impact qu'elle peut avoir sur la vie d'un enfant.

Aussi, au lieu de rédiger des lois qui ne font que les couper davantage de leur père, un meilleur moyen pour le gouvernement fédéral d'intervenir serait d'élaborer des lignes directrices sur les pensions alimentaires pour enfants qui facilitent le rôle paternel. Ces lignes directrices devraient prévoir un niveau de paiement en rapport avec les frais d'un parent ne s'occupant pas de l'enfant et une échelle descendante en fonction du degré de participation et des coûts encourus.

En outre, je recommande que des conditions de séparation soient établies prévoyant des exigences d'accès minimales et la garde conjointe. Non seulement cela assurerait une transition plus stable pour l'enfant, mais cela préviendrait aussi certains des conflits virulents sur la garde qui encombrent actuellement notre système judiciaire. Ce pourrait être là un point de départ pour des changements plus fondamentaux ultérieurement.

À l'heure actuelle, l'aide juridique et les autres frais de justice représentent des dépenses très substantielles pour le gouvernement et les plaideurs. En recentrant ces ressources fédérales et les priorités législatives vers des initiatives proactives telles que les conseils post-séparation, les accords de garde partagée et l'arbitrage post-divorce, on pourrait éviter une bonne partie de ces coûts.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Merci beaucoup.

Y a-t-il des questions? Dr Bennett.

Mme Carolyn Bennett: J'ai été intéressée par la dernière partie de votre exposé, lorsque vous parlez de conseils post-séparation. En avez-vous fait l'expérience?

M. Duncan Croll: J'ai suivi quelques cours post-secondaires à l'Interfaith Marriage and Family Therapy Institute. Apparemment, il en offre et je recommande fortement cet institut.

• 1700

Mme Carolyn Bennett: Lorsque je pratiquais la médecine familiale, l'une des choses intéressantes que j'ai notées est l'existence de certains conseillers qui excellaient dans le conseil matrimonial et d'autres très compétents pour conseiller les couples qui se séparent. Nous devions même dire aux gens que nous choisissions de les envoyer à l'un ou à l'autre. S'il n'y avait absolument aucune possibilité de réconciliation, autant les envoyer à quelqu'un qui excellait dans le conseil de séparation.

Pensez-vous qu'il faudrait mieux, lorsque les gens ont décidé de se séparer et avant même d'ouvrir l'action en divorce, de leur proposer une équipe de conseillers? Et pensez-vous que le gouvernement devrait payer pour cela?

M. Duncan Croll: Pour ce qui est des ressources que nous consacrons actuellement à l'aide juridique et au système judiciaire lui-même, une fois que vous prenez le système... Actuellement, les pères se battent en position de faiblesse. Si vous avez comme point de départ normal la garde conjointe automatique, et si vous voulez vous battre, c'est pour en déroger, et s'il y a un accès minimal pour le parent non résidentiel de, peut-être, trois fins de semaine par mois ou quelque chose du genre, une fois cette norme établie, je pense que le nombre des litiges judiciaires diminuera et, par conséquent, les dépenses d'aide juridique et les coûts judiciaires suivront.

Lorsque vous déplacez les ressources, au détriment d'un système réactif en faveur de politiques plus proactives, comme celles que je préconise, vous faites quelque chose de positif.

Le dernier de ces trois éléments, l'arbitrage neutre après divorce, serait conçu de façon à ce que, s'il n'y a pas de raison légitime de poursuivre la bataille, la partie responsable devrait assumer en entier ou en partie les frais de tribunal, selon le degré de responsabilité. Il faut motiver les gens à s'entendre en dehors des tribunaux au lieu de les obliger à y recourir.

Cela répond-il à votre question?

Mme Carolyn Bennett: Excellent. Je vous remercie.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Je vous remercie.

Monsieur Forseth.

M. Paul Forseth: Je vous remercie.

Je voudrais dire un mot à Ginette.

Vous avez mentionné la politique de tolérance zéro. Parfois, le résultat imprévu est une politique de justice zéro. Une mesure bien intentionnée peut avoir des effets négatifs.

J'encourage votre compagnon, le père de l'enfant, à continuer de suivre de plus en plus près son enfant, à protéger ses intérêts et à travailler avec les organismes existants, aussi imparfaits soient-ils.

Mme Ginette Lemoine: Mais parce qu'il n'y a pas de sévices physiques, pas de traces physiques, on m'a plus ou moins dit qu'il n'y a rien à faire.

M. Paul Forseth: Ce n'est qu'un employé. Ce qu'il faut...

Mme Ginette Lemoine: Mais je suis allée aux SEF. J'ai été voir l'intercesseur des enfants.

M. Paul Forseth: ... ce ne sont pas des situations ponctuelles. Il faut être vigilant pour le bien de l'enfant. C'est le rôle du parent.

Mme Ginette Lemoine: Mais j'ai appelé...

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Madame Lemoine, vous pourriez peut-être laisser M. Forseth terminer.

M. Paul Forseth: Dans une situation où l'on vous a découragé de demander de l'aide ou une intervention un mois donné, vous pouvez avoir un ensemble de circonstances différents le mois suivant. Vous devez prendre des notes détaillées. Prenez des notes. Il est parfois très difficile pour un organisme de service social de cerner ces éléments.

En Colombie-Britannique, les organismes de services sociaux et de protection de l'enfance ont fait les titres de la presse internationale par leur incapacité d'agir. Il est difficile pour une administration de voir clair dans les relations complexes d'une famille. Il y a les accusations de l'autre partie et l'État qui intervient et détruit les familles en appréhendant trop rapidement, et tous ces risques.

• 1705

Je recommande au père de continuer à faire de son mieux, de travailler avec les organismes compétents et de constituer un bon dossier, car un jour c'est peut-être lui qui aura la garde. Ne renoncez pas, car l'enfant a besoin d'un père et il devra être là pour lui quoi qu'il arrive. Ce qui compte, c'est qu'il joue son rôle de parent pour protéger les intérêts de l'enfant et être le meilleur père possible. Qu'il ne gaspille pas son énergie à se battre contre les administrations, qu'il s'efforce d'être le meilleur père possible, ce qui suppose ce rôle de protection parentale.

C'est juste un mot d'encouragement pour vous. Les administrations sont lourdes et imparfaites, mais c'est tout ce que nous avons.

Mme Ginette Lemoine: Par curiosité, que dites-vous à une petite fille qui sait que sa mère l'utilise comme un pion et dit: «Tu verras ton père lorsque je verrai de l'argent?» Il lui ont tout saisi. Il n'a pas de revenu, mais cette petite de 6 ans sait qu'elle est un pion. Comment expliquez-vous cela à une petite fille?

M. Paul Forseth: Parfois il n'y a rien à expliquer. Vous dites seulement: «Les choses sont ainsi. Nous ne pouvons rien changer à ce qui se passe là-bas, mais pendant que tu es avec nous, nous t'aimons et nous ferons de notre mieux pour toi». Il y a des limites.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Je vous remercie, monsieur Forseth. Je tiens à remercier Mme Harvey, Mme Lemoine et M. Croll d'être venus. Monsieur Croll, je remarque que votre fils est avec vous. Nous n'avons pas vu suffisamment d'enfants cette semaine. Merci à tous d'être venus.

J'invite Mme Fisher à prendre place. Nous apprécions que vous soyez venue. Il faudra que ce soit bref, malheureusement. Je crois savoir que vous êtes avocate de droit familial.

Mme Rowena Fisher: Je suis entrée au barreau en 1991. Je pratiquais le droit familial dans un petit cabinet. Mes clients appartiennent à toutes les couches sociales.

La première chose que j'aimerais dire est que vos audiences sont insuffisamment annoncées. Je n'ai rien vu dans les journaux quant au lieu où elles se tiennent et je suis sûre que d'autres personnes qui auraient voulu intervenir ne sont pas venues à cause de cela.

Je pense que le comité devrait se pencher sur un certain nombre de choses. Je n'ai pas les solutions, mais j'aimerais vous indiquer quelques domaines sur lesquels vous devriez vous pencher.

Il y a d'abord le financement de l'aide juridique et les répercussions sur le règlement des litiges relatifs à la garde et au droit de visite.

Deuxièmement, au Manitoba, vous devriez demander un rapport sur ce que fait le Service de conciliation familiale sur le plan de l'éducation parentale—on a fait état ce matin du programme Pour le Bien des Enfants—de la médiation en matière de garde et de droit de visite et d'évaluation.

Le troisième lieu où vous pourriez vous renseigner est la Direction du droit familial. Quelqu'un a demandé ce matin ce qui se passe si votre enfant est enlevé. On vous dirait ce qui se passe au Manitoba lorsque quelqu'un dépose plainte pour rapt d'enfant, des accusations possibles en vertu du Code pénal et de ce que la Direction du droit familial peut faire pour les gens dans cette situation.

Vous devriez également vous adresser à la Direction du droit familial pour savoir quelle est la politique de la police en matière d'accusation dans le cadre de la tolérance zéro. C'est un domaine que je connais et je sais que la police doit quand même avoir des motifs raisonnables et probables, comme pour n'importe quelle accusation. La seule différence dans le cas de la violence familiale est que le plaignant n'a pas le choix de déposer plainte ou non—l'accusation doit être portée. Je vous demande donc de vous adresser à la Direction du droit familial pour savoir ce qu'il en est réellement.

Le comité ne devrait pas perdre de vue qu'il y a aujourd'hui toutes sortes de familles. Il y a des couples mariés, non mariés et des gens qui ont des enfants de partenaires multiples. Ce n'est pas comme s'il n'y avait que des gens qui se marient, ont des enfants et divorcent. Vous avez toutes sortes de permutations et les dynamiques qui en découlent sont très différentes. Je sais que vous êtes un comité fédéral et que vous n'étudiez pas le divorce, mais tous les couples ne sont pas mariés et la dynamique est très différente.

• 1710

On a beaucoup parlé ce matin de savoir si ces gens sont divorcés. Vous entamez l'action judiciaire au Manitoba en déposant un document appelé requête en divorce ou bien une simple requête. À l'évidence, vous ne pouvez demander le divorce si vous n'êtes pas marié, mais vous pouvez déposer une requête même si vous n'êtes pas marié.

La raison de présenter une requête au lieu d'une requête en divorce—il n'y a rien de magique—tient souvent à des choses pratiques. Par exemple, avez-vous un certificat de mariage et donc les noms précis pour remplir une requête en divorce? Êtes-vous tellement pressé que vous ne pouvez attendre d'obtenir le certificat de mariage de l'État civil?

L'autre raison de ne pas déposer une requête en divorce dans une situation de mariage est que cela peut intensifier les problèmes entre les parties. Si je dépose une requête en divorce, il va se mettre très en colère et je veux l'éviter. S'il n'y a pas de réconciliation, le divorce lui-même n'est qu'une petite formalité à la toute fin. Ce qui prend du temps, c'est la garde et le droit de visite.

En écoutant les témoignages ce matin, si j'étais profane, je conclurais que ces allégations d'abus sexuel sont omniprésentes. Je ne pense pas que ce soit le cas. Ce n'est certainement pas ce que j'ai constaté dans ma pratique du droit familial depuis 1991.

Quelqu'un a mentionné les lenteurs de la justice. Contrairement aux affaires civiles, la lenteur en matière de droit familial n'est pas nécessairement une mauvaise chose. Parfois, vous avez beaucoup d'émotion tout au début. Les gens ne reconnaissent plus la personne avec laquelle ils ont vécu pendant 25 ans et tout est sens dessus dessous.

Parfois, on peut résoudre les problèmes par un accord provisoire, où le tribunal rend une ordonnance provisoire. Parfois, la lenteur à ce stade est très bénéfique en ce sens que les gens prennent une habitude, les choses se calment et finalement tout se règle par consentement mutuel.

Si vous accélérez la procédure, vous auriez à ce stade un procès parce que tout est encore en tumulte. Il ne faut pas généraliser et dire que la lenteur est à déplorer. Parfois elle est bénéfique.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Madame Fisher, votre temps est écoulé.

Mme Rowena Fisher: Deux remarques rapides.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): D'accord, rapidement.

Mme Rowena Fisher: Les familles se plaignent de la dureté des lignes directrices. Vous pouvez obtenir des rapports sur les enfants en invoquant la FMA et aussi la Loi sur le divorce. Quelqu'un a dit que ce n'était pas possible. Il y a au Manitoba la Loi sur l'exécution des ordonnances de garde qui permet de faire exécuter les ordonnances dans les autres provinces. Je pense qu'il faut regarder de près ce que les gens disent. Lorsque les gens parlent de garde conjointe, de quoi est-il question réellement? Il faut considérer le temps que les parents passent avec les enfants, et non pas l'étiquette que l'on appose.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Merci beaucoup. Comment avez-vous appris l'existence du comité?

Mme Rowena Fisher: Je suis membre de la section manitobaine du droit familial de l'Association du Barreau. Je l'ai appris par le biais de ce groupe, mais je n'ai rien vu ailleurs.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Je vous signale que des annonces ont été publiées. Par ailleurs, ma collègue la sénatrice Pearson et moi avons adressé une lettre au Procureur général du Manitoba. Nous avons reçu aujourd'hui certains groupes financés par le gouvernement provincial qui se plaignaient aussi de ne pas avoir été informés. Curieusement, hier, un certain nombre de témoins à Régina avaient appris notre existence dans le magazine McLean's et aussi dans le Globe and Mail.

Mme Rowena Fisher: Il aurait certainement été utile d'avoir une annonce dans le journal local. Je n'en ai pas vu.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Il y en a peut-être eu une; je ne suis pas sûr. Je vous remercie.

La sénatrice Anne Cools: Nous n'avons pas encore le pouvoir de contrôler les journaux.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): La semaine prochaine, sénatrice Cools. Nous ne contrôlons pas non plus les assemblées législatives provinciales.

La sénatrice Anne Cools: Vous avez soulevé un aspect très important, à savoir la mainmise provinciale dans ces domaines. Comme vous l'avez dit, le divorce à la fin n'est qu'une formalité. Les autorités provinciales empiètent réellement depuis pas mal de temps, et nous devrions nous pencher là-dessus.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Merci beaucoup.

Nous en arrivons à un moment très triste de la journée.

La sénatrice Anne Cools: Est-ce terminé?

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Non, nous en venons à notre dernier groupe.

Je demanderais à M. McKenzie, M. Anderson, M. Goldhawk et M. MacKay de prendre place. Vous remarquerez qu'il y a un autre nom sur la liste, M. Densmore. Je ne sais pas s'il est là, ou s'il ne s'est pas inscrit ou quoi.

• 1715

À nos témoins, je préfère ne pas parler de cela ici. La semaine a été longue, si je puis exprimer les choses ainsi, et quelqu'un doit venir en dernier. Nous sommes donc heureux de vous voir.

Nous allons commencer avec M. Goldhawk.

M. Dave Goldhawk (témoigne à titre personnel): Merci beaucoup.

Mesdames et messieurs, je suis très reconnaissant de cette occasion de prendre la parole aujourd'hui. Je formule le voeu que votre comité mette en place une nouvelle législation et révisera les lois actuelles de façon à éviter que ce qui est arrivé à mes enfants, à ma famille et à moi-même et à d'autres comme nous se reproduise jamais à l'avenir. Nous sommes victimes du système judiciaire et de services sociaux actuels.

J'aimerais vous dire tout d'abord que tout de suite après ma séparation, j'ai obtenu le droit de visite à mes deux enfants six jours sur sept. Cela s'est poursuivi pendant une période de six mois. J'ai ensuite comparu de nouveau au tribunal sur des questions de garde. On m'a attribué une augmentation, de nouveau, particulièrement l'accès à Noël. Par voie de conséquence, ce même soir, après cette audience du tribunal, de fausses allégations ont été portées contre moi.

Les fausses allégations sont utilisées comme une tactique juridique de victimisation aux conséquences horribles, tout cela pour la satisfaction de gagner une bataille juridique, la vengeance ou la justification des insécurités de la part de l'accusateur.

De fausses allégations d'abus sexuel sur l'un de ses propres enfants sont catastrophiques. Les dommages psychologiques infligés à des enfants innocents exploités si cruellement comme arme juridique sont inimaginables. Pourtant, les services juridiques et sociaux continuent de confier ces enfants à la garde des personnes mêmes qui n'hésitent pas à victimiser leurs propres enfants alors qu'aucun crime n'a jamais eu lieu. Les examens physiques humiliants et dégradants, les dégâts affectifs et psychologiques et les stigmates qui en résultent dureront toute une vie.

Les services sociaux ont des réponses toutes prêtes pour se donner bonne conscience. Si l'enfant confirme l'une quelconque des allégations faites, c'est qu'elles doivent être vraies. Si l'enfant nie l'une quelconque des allégations, c'est qu'il doit protéger l'accusé, et donc les allégations doivent aussi être vraies. Même lorsqu'il n'y aucune confirmation indépendante des allégations, la personne est coupable même si elle est acquittée en tribunal pénal.

Ma défense contre les fausses allégations en cour pénale m'a coûté personnellement 8 000 $. Il était humiliant d'être arrêté et traité en criminel avant même de pouvoir exercer mes droits. Les accusations ont été rejetées après une audience préliminaire de 30 minutes. Pourtant, cela n'a eu aucun effet en cour familiale. Dans celle-ci on ne se préoccupe pas des faits et la probabilité est transformée en bouffonnerie.

Les fausses allégations d'abus sexuel ont détruit ma vie personnelle.

Sur le plan financier, les honoraires d'avocat m'ont acculé à la faillite. En dépit d'un avoir de plus de 100 000 $—je gagne plus de 40 000 $ par an—je verse 50 p. 100 de mon salaire net en pension alimentaire. Je n'ai pas de revenu disponible pour payer un avocat, mais je gagne trop pour bénéficier de l'aide juridique. Pendant ce temps, mon ex-femme gagne plus de 60 000 $ et dispose d'un revenu familial de plus de 110 000 $.

Le stigmate social des allégations n'a pas de limite non plus. Ma carrière d'entraîneur d'équipe provinciale et de moniteur d'entraînement a été anéantie. Le travail bénévole que je faisais comme chef de patrouille de louveteaux et de castors a pris fin lorsque mon ex-femme a fait pression sur Scouts Canada. Établir de nouvelles relations personnelles avec des personnes ayant des enfants est également impossible.

Les séquelles affectives et psychologiques ont résulté en des pertes de salaire et de possibilités de carrière. Elles m'empêchent de poursuivre la bataille juridique pour protéger ma relation avec mes enfants. Je n'ai pas pu avoir de contact avec mes enfants depuis deux ans. J'ai le droit de visite, mais je n'ai même pas de quoi me nourrir, et encore moins de payer les frais de visite supervisée ou d'autres pourvois en justice coûteux.

Actuellement, les services juridiques et sociaux ne sanctionnent pas ceux qui font de fausses allégations. Les statistiques actuelles ne montrent pas que des gens renoncent à demander la garde ou le droit de visite par crainte de ce qui est arrivé à moi et à mes enfants, par crainte des lobbys politiques puissants qui continuent à poursuivre leurs intérêts propres sous le déguisement de l'intérêt des enfants et de tous ceux qui se rallient derrière eux.

• 1720

La séparation et le divorce des parents sont déjà assez pénibles pour les enfants. Dès le moment où de fausses allégations sont faites, ils deviennent victimes tout comme l'accusé.

Tant que l'on va tolérer cela, les allégations resteront une tactique utilisée dans les litiges sur la garde et l'accès. Le système qui prétend privilégier l'intérêt des enfants condamne en réalité ces enfants en les confiant aux personnes mêmes qui les exploitent et les victimisent pour leur propre gain.

Ce système a anéanti et détruit nos vies. Je vous en prie, pour le bien de nos enfants et de ceux qui les aiment réellement, protégez les innocents contre ceux qui ne le sont pas.

Je vous remercie.

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): Merci beaucoup, monsieur Goldhawk.

Monsieur Dennis McKenzie.

M. Dennis McKenzie (témoigne à titre personnel): Nous avons un court mémoire. Au cas où nous n'aurions pas le temps de le présenter en entier, le comité accepterait-il de le verser au procès-verbal comme ayant été lu?

La sénatrice Anne Cools: Certainement.

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): Oui, d'accord.

M. Dennis McKenzie: Nous voulons remercier le comité de nous avoir permis de contribuer à ses délibérations sur les problèmes de garde et de droit de visite lors des actions en divorce.

Je suis Dennis McKenzie et mon co-intervenant à côté de moi est Ross MacKay. Ross et moi sommes tous deux des pères victimes d'allégations criminelles graves formulées contre nous lors d'une procédure de divorce. Ces allégations ont été purement inventées par nos ex-femmes avec l'aide de leurs avocats, qui ont rédigé des affidavits mensongers nous accusant de sévices à enfant et de violence conjugale. Comme beaucoup d'autres pères, nous nous sommes rencontrés par l'intermédiaire de Parents Helping Parents. Ces allégations ont été formulées contre nous sans aucune corroboration des services d'aide à l'enfance ou de la police.

Le comité nous a accordé cinq minutes de temps de parole à chacun. Nous allons combiner le temps pour faire un exposé conjoint. M. Anthony Antonowich nous a également demandé de le représenter ici aujourd'hui. Nous sommes donc trois pères qui avons déposé une plainte conjointe auprès de la Société du Barreau du Manitoba concernant la conduite des avocats étant intervenus dans nos affaires. Nous savions que, individuellement, la Société du Barreau nous ignorerait et ne ferait rien au sujet des faux témoignages placés devant les tribunaux pour nous priver de l'accès à nos enfants.

Nous avons examiné les relevés des plaintes déposées à la Société du Barreau en remontant jusqu'en 1985, et nous pouvons dire au comité que le seul manquement déontologique jamais sanctionné est le vol d'argent de clients par des avocats. Voler des enfants en plaçant des allégations fausses et non corroborées devant le tribunal n'est pas considéré comme répréhensible par les avocats.

Je vais donner un bref aperçu des trois affaires.

Le premier père s'est séparé de sa femme en 1997. Il a été accusé par affidavit de déviance sexuelle et de violence conjugale, ainsi que de sévices sexuels et physiques sur ses enfants, bien qu'aucune de ces infractions n'ait été signalée aux autorités de protection de l'enfance ou de police ou n'ait fait l'objet d'enquête. Ce père a dépensé 12 000 $ la première année de son divorce en honoraires d'avocat. Les allégations ont amené la cour à refuser l'accès régulier de nuit aux enfants et ont établi un statu quo de garde pour la mère.

Le deuxième père a été accusé de violence physique et sexuelle sur sa femme en janvier 1997. Ces infractions étaient censées avoir été commises pendant qu'il dormait. Il a également été accusé de violence physique à l'égard de ses deux enfants et d'abus sexuel sur sa fille de quatre ans.

Aucune de ces allégations n'a été corroborée par la protection de l'enfance ou la police. Néanmoins, ce père a dû dépenser 15 000 $ au cours des trois premiers mois de son action en divorce pour se défendre. Les allégations ont amené la cour à imposer une supervision professionnelle pendant les visites, limitées à huit heures par semaine. Là encore, la mère a établi le statu quo de garde.

En outre, les avocats des deux parties ont consenti à un montant de pension alimentaire pour l'épouse et les enfants supérieur au salaire net du père. Bien que les services d'exécution des pensions saisissent tout son chèque de paie, le père continuait à accumuler des arrérages. Bien que ce père gagnait 30 000 $ par an, son loyer et ses dépenses de nourriture étaient couverts par l'aide sociale municipale.

Lorsque les lignes directrices fédérales relatives aux aliments des enfants sont entrées en vigueur, ce père a demandé au tribunal que ses versements soient ramenés au montant des lignes directrices, ce qui les aurait réduit de 1 500 $ par mois. Cependant, la cour a refusé d'entendre la requête et a modifié le montant avant que la cause soit plaidée.

• 1725

Cette cause a été plaidée en mars 1998. La juge a réparé certains des dégâts. Elle a ordonné la garde conjointe sans consentement dans ce cas hautement conflictuel, supprimé la surveillance des visites et ramené les versements de pension au montant de la ligne directrice.

Nous avons joint à notre mémoire la copie de cette décision, à l'intention du comité. La mère a interjeté appel.

Le troisième père a été accusé d'avoir sexuellement abusé de sa fille en septembre 1995. La fille a été présentée à une employée des Services à l'enfance et à la famille pour traitement. Cette employée s'est ensuite fait passer pour une représentante officielle des SEF, sans être représentée par un avocat et sans l'autorisation de ses supérieurs. Sa description de fonctions n'englobait pas la conduite d'enquête sur les allégations de sévices. Elle a également suivi toutes les audiences du tribunal à titre de soutien de la mère, en se tenant dans les couloirs pour attendre la mère.

L'avocat de la mère a aidé l'employée des SEF à rédiger des affidavits et à les présenter au tribunal, un vice de procédure grave. Tous les employés des SEF qui présentent une opinion au nom des autorités de protection de l'enfance sont représentés par un avocat de cet organisme. Dans son affidavit, cette employée a affirmé que la police considérait cet homme coupable, alors que la police n'a aucune trace de contact avec elle.

La police a en outre témoigné n'avoir jamais formé l'opinion que cet homme était coupable de quoi que ce soit. Ce père a subi deux tests polygraphiques—l'un administré par l'officier de police au cours d'un interrogatoire de trois heures. De fait, quatre officiers de police viendront témoigner au procès de cet homme qu'ils le considèrent innocent de toutes les accusations.

Le troisième père en est maintenant à sa troisième année de bataille contre les allégations formulées contre lui. Son affaire sera finalement jugée en mai 1998. Il n'a droit qu'à des visites supervisées depuis le début de l'épreuve, a dépensé 20 000 $ en frais d'avocat et 12 000 $ en frais de supervision.

Ce père a déposé une plainte officielle contre son avocat et l'avocat de la mère pour avoir facilité le faux témoignage de l'employée des SEF. C'est la seule plainte que la Société du Barreau ait accepté d'entendre, et son ancien avocat a demandé deux prolongations sans répondre aux accusations portées contre lui.

Je cède maintenant la parole à mon collègue.

M. Ross MacKay (témoigne à titre personnel): S'il est vrai que les procédures de divorce et de garde sont souvent marquées par l'hostilité et l'amertume entre les parties, cela est encore aggravé par le manque d'intégrité dont les avocats font routinièrement preuve. Parents Helping Parents a tenté d'aider les familles en proie au traumatisme du divorce, et le fait que nous devions avertir les parents que le problème le plus dangereux qui les attend est l'absence de scrupule des avocats de droit familial est un argument convaincant en faveur d'une refonte de la loi.

Nous avons parlé à un haut responsable du ministère de la Justice du Manitoba. Il nous a dit en avoir assez des inepties du système de droit familial. On n'est pas soumis à ce genre de traitement dans le système de droit pénal ou civil.

Nous avons parlé également avec un ministre du gouvernement manitobain et l'avons informé de notre plainte auprès de la Société du Barreau. Sa réaction a été: «Il est temps que quelqu'un fasse quelque chose comme cela. Savez-vous combien j'ai vu défiler d'hommes dans mon bureau qui pleuraient à n'en plus pouvoir à cause de ce qu'ils subissent avec ces fausses allégations»?

Vu ces réactions des dirigeants, il nous semble qu'ils ont conscience des problèmes et ne sont pas ravis du système actuel.

La Société du Barreau n'a rien fait pour rectifier le problème des avocats qui placent des accusations criminelles non fondées dans les affidavits de leurs clients. Elle refuse toujours d'admettre que plus une affaire de droit familial s'envenime et plus elle devient profitable pour les avocats concernés. Il est devenu courant pour les avocats de rédiger des affidavits pour le compte de leurs clients décrivant des actes criminels qui n'ont fait l'objet d'aucune enquête des autorités concernées ni d'accusations criminelles. Les avocats des deux parties multiplient leurs honoraires par dix lorsque des allégations sont faites lors d'une action en divorce.

Les accusations de mauvais traitement à enfant et de violence conjugale ont pour effet d'assurer la garde à la partie accusatrice et d'imposer des limites et une surveillance stricte à la relation parentale de l'accusé. Ces accusations empoisonnent le processus du divorce et créent des scénarios où l'accusateur jouit de tous les pouvoirs et l'accusé n'a aucun droit.

Les accusations font souvent qu'une affaire traîne pendant des années avant le jugement, ce qui établit également un long statu quo de garde qu'il devient impossible de surmonter. Il est donc très avantageux pour l'accusateur de faire de fausses allégations car il ne risque aucune sanction s'il est découvert.

Il n'est pas rare de voir des mères portant de fausses accusations conserver la garde des enfants uniquement en raison du statu quo. On récompense ainsi les mauvais comportements et on les encourage en ne les sanctionnant pas.

Les Sociétés du Barreau ont des règles couvrant expressément les avocats plaçant de fausses allégations devant les tribunaux. Elles ne sont jamais appliquées. Aussi, ces allégations prolifèrent-elles dans les cours familiales et rien n'est fait pour sanctionner cette fraude infligée aux tribunaux. Les faux témoignages prolifèrent et ont gravement sapé le respect pour la justice. Il est également impossible d'ignorer la haine et le mépris dont les avocats font l'objet, la malhonnêteté du grand nombre occultant la conduite éthique de la minorité.

• 1730

Les Sociétés du Barreau composées d'avocats ne sont ni capables ni prêtes à faire leur propre police. La plupart des plaintes sont rejetées par la Société du Barreau en application de la théorie que la plupart des plaignants laisseront tomber après le premier rejet. Les fausses allégations sont devenues tellement profitables pour les accusateurs et les avocats que la société doit intervenir et mettre fin à cette pratique hautement néfaste.

Je vais maintenant vous donner la liste de nos recommandations.

Premièrement, nous appuyons et applaudissons l'introduction par la sénatrice Anne Cools du projet de loi S-12, qui ferait du dépôt de fausses allégations devant un tribunal un délit criminel sanctionné par la loi. Seules des sanctions criminelles mettront fin à la pratique des avocats consistant à déposer des allégations non fondées dans les tribunaux.

Deuxièmement, nous recommandons que la Loi sur le divorce soit modifiée de façon à renforcer la règle du parent amical afin que les mères qui font de fausses allégations ne soient pas récompensées de leur comportement et à donner instruction aux tribunaux d'accorder la garde au parent qui n'a pas formulé de fausses allégations.

Troisièmement, nous recommandons d'inscrire dans la Loi sur le divorce une disposition donnant instruction aux tribunaux d'accorder un moindre poids au statu quo de garde lorsqu'il a été déterminé que le parent ayant la garde a fait de fausses allégations.

Quatrièmement, nous appuyons la présomption de garde conjointe, ce qui réduira le déséquilibre des pouvoirs entre parent ayant la garde et parent ne l'ayant pas. C'est ce déséquilibre qui a causé le taux de garde maternelle de 90 p. 100 au Canada et donné aux mères le pouvoir de dicter les relations après divorce entre les pères et leurs enfants. C'est ce déséquilibre qui a engendré la pathologie des fausses allégations, un nombre de mères de plus en plus grand étant déterminées à éliminer totalement les pères après le divorce.

Je vous remercie.

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): Merci beaucoup.

Monsieur Kris Anderson.

M. Kris Anderson (témoigne à titre personnel): Ce que nous avons devant nous aujourd'hui est un problème énorme de proportions gigantesques, dont on commence à entendre parler; c'est tout à fait remarquable. Je suis très étonné par le nombre de personnes intéressées. Je lis régulièrement des articles à ce sujet dans des revues et des quotidiens.

Merci beaucoup d'avoir pris le temps de vous y pencher. Je ne saurais comment vous remercier. Espérons que cela ira en tout cas beaucoup plus loin que cela n'est allé jusqu'ici.

Je suis un homme de race blanche âgé de 37 ans. Je travaille comme peintre au pistolet pour Motor Coach Industries. Je travaille fort pour gagner ma vie. J'ai trois filles, dont deux étaient présentes dans la salle il y a un petit moment. Ma femme en a tout récemment obtenu la garde. Je ne sais vraiment pas pourquoi... Personne jusqu'ici n'a mentionné cela, mais en ce qui me concerne, ces enfants sont traités comme de simples objets. Je n'obtiens rien, quelle que soit la personne à laquelle je m'adresse; c'est absolument incroyable.

Je suis séparé depuis le 19 janvier 1998. Il y a eu des accusations au début. Celles-ci ont été rejetées. Elles ont été rejetées, comme l'ont été celles portées contre ces messieurs.

L'idée que nous avons devant nous aujourd'hui est celle de la responsabilité parentale partagée. Un parent doit s'occuper de ses enfants et les aimer. Le système judiciaire de cette province est haineux. C'est barbare. Ce que vous devez surtout obtenir ici c'est que les autorités se rangent de votre côté. En gros, vous avez les Services à l'enfance et à la famille, vous avez le ministère de la Justice... Tout semble aller de travers. Il n'y a nulle part où un homme puisse aller pour obtenir de l'aide, des conseils ou quoi que ce soit d'autre. Le monsieur qui a comparu avant moi a dit qu'avec l'aide juridique et tout le reste, vous pouvez être complètement enfoncés; c'est absolument incroyable.

Vous passez en revue tout le dossier avec les autorités et c'est comme si vous parliez à un mur. Vous n'avez pas du tout de cas de sévices à vos enfants dans votre passé, ni quoi que ce soit d'autre, mais votre conjointe peut aller faire ce qu'elle veut, il semble, et la vie continue. Les enfants sont tellement affectés qu'ils ne vont jamais pouvoir s'épanouir et changer; c'est absolument incroyable.

Je n'en reviens pas du nombre de personnes ici. Il m'est même arrivé de pleurer tout seul dans mon coin au sujet de toute cette affaire, et j'ai perdu du temps de travail. J'ai été bombardé de partout; c'est comme si une bombe atomique avait explosé. Je ne pense pas faire partie de cela. En fait, je suis la seule personne ici qui ressemble à un motard, mais je n'en suis pas un. Je suis un père aimant qui veut s'occuper de ses enfants et les aimer. Mais je ne le peux pas. Mon épouse est une femme froide et calculatrice qui veut que les choses se passent comme elle l'entend, un point c'est tout. J'ai essayé maintes et maintes fois avec les autorités, mais il semble qu'il n'y ait nulle part où aller. Il y a l'aspect argent. Si vous avez de l'argent, j'imagine que vous avez une plus grosse voix, mais en même temps, cela n'a rien donné jusqu'ici.

• 1735

L'idée de la responsabilité parentale partagée est un concept, je suppose, mais pour l'instant, ce ne sont que des mots. Pour que cela puisse changer quelque chose dans le système, il faut que ces mots soient mis en pratique. Ma compagnie a changé son nom de Motor Coach à Motor Coach II, mais ce n'est qu'un changement de nom.

La responsabilité parentale partagée par opposition à la garde exclusive a sa place dans ce pays et je pense que cela aurait une incidence très positive. Les enfants sont en train d'être aliénés de l'un ou l'autre des parents—en règle générale du père—et il ne semble pas qu'il y ait de bonnes raisons pour cela. Je ne comprends pas. Je me trouve sans cesse confronté à des barrages. C'est haineux.

En même temps, j'ai lu un article la semaine dernière dans le Winnipeg Free Press. Il comparait le taux de suicide chez les hommes à celui enregistré chez les femmes. J'ignore si quelqu'un l'a lu, mais pendant une même période de temps, quelque 20 hommes ont pris leur vie comparativement à quatre femmes. Je ne dis pas que les nombres devraient être égaux—il ne devrait pas y avoir de suicides—mais je suis certain que si l'on devait faire une étude approfondie, l'on constaterait que certains de ces suicides sont attribuables à des batailles au sujet de la garde d'enfants, des batailles devant la cour qui ont leur origine dans le mariage et le divorce.

L'on n'a nullement besoin de cela. Si les gens avaient du coeur et montraient leur sensibilité à autrui, nous vivrions tous dans un monde meilleur. Le monde semble si froid, et je ne comprends pas. C'est vraiment pitoyable.

Je pensais vivre dans une démocratie, mais je commence à avoir l'impression que c'est une dictature. On vous dit quoi faire. On allègue que vous avez fait certaines choses. Vous êtes acculé au mur et il semble qu'il n'y a nulle part où aller, et je songe tout particulièrement ici aux enfants. Vous avez les cours, et vous y voyez un parent monté contre l'autre. Personne ne veut entraîner les enfants dans la bagarre, mais en même temps, leurs opinions et ce qu'ils me disent comptent beaucoup. Je n'ai jamais entendu quiconque ne serait-ce que consulter un enfant ou lui demander quelque chose pour connaître son opinion, et je songe ici tout particulièrement aux Services à l'enfance et à la famille—et c'est la même chose pour toutes les autres autorités dans cette province et ailleurs au pays.

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): Monsieur Anderson, pourriez-vous, s'il vous plaît, en venir maintenant à vos recommandations.

M. Kris Anderson: Oui, je radote. Excusez-moi.

Comme je l'ai dit, et je le répéterai ici, nous sommes confrontés à un problème gigantesque et que Dieu vous bénisse d'avoir pris le temps d'essayer d'y faire quelque chose. J'ignore ce que prévoit le projet de loi et ce que vous proposez, mais j'ai confiance que cela va améliorer un petit peu les choses. Merci de votre temps.

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): M. David Densmore, qui est venu s'asseoir un petit peu en retard à la table mais qui est maintenant ici, disposera de cinq minutes.

M. David Densmore (témoigne à titre personnel): Je m'excuse auprès du comité de ne pas m'être rendu compte du fait que j'allais comparaître aujourd'hui. Merci beaucoup d'être ici et un merci tout particulier à la sénatrice Cools pour tout le travail qu'elle a fait pour le compte des pères de famille qui aimeraient que le Parlement leur vienne un petit peu en aide.

Je vais sauter tout de suite à ma recommandation. J'ai ramené 10 000 heures de recherche et de travail à une seule recommandation, soit que l'on reconnaisse qu'il existe différents types de divorces. Ce ne sont pas tous les divorces qui sont le simple éclatement d'une famille. Je vais vous expliquer un petit mieux ce que j'entends par là, puis je vais vous soumettre un résumé, et cela demandera moins de cinq minutes.

Un divorce de type 1A est tout simplement un retrait volontaire. C'est ce qui se passe lorsqu'un conjoint décide tout simplement de faire ses valises et de partir. Un divorce de type 1B est un retrait volontaire avec une explication. Peut-être que le conjoint est fâché par les habitudes de son épouse, qu'il se dispute avec elle et qu'il décide de ne pas faire subir ce genre de chose ni à sa femme ni aux enfants et choisit de s'éloigner, mais il ne souhaite pas véritablement quitter sa famille, mais tout simplement se calmer un petit peu.

• 1740

Le type de divorce qui est difficile est la séparation inversée, lorsqu'un conjoint demande aux tribunaux de sortir l'autre conjoint de la maison et de le séparer de ses enfants. Il y a ici deux sous-catégories. Premièrement, la catégorie 2A, celle des séparations inversées avec motif. Le conjoint qui est censé quitter le foyer a peut-être un problème qui rend très difficile la vie familiale.

Le type 2B, celui qui, je pense, cause le plus de problèmes et celui dont vous avez, je crois, beaucoup entendu parler ici aujourd'hui, est la séparation inversée sans motif. Dans ce genre de situation, l'un des conjoints dépose une requête devant le tribunal par l'intermédiaire d'un avocat—qui peut être très futé quant à la façon de s'y prendre—demandant que le deuxième conjoint, en règle générale le père, soit obligé de quitter le foyer et qu'il soit séparé de ses enfants. Il n'y a en fait aucune raison valide pour ce genre de chose.

En reconnaissant le type 2B, la séparation inversée sans motif, comme étant une forme illégale de séparation, une chose qui ne peut pas être tolérée dans notre société, on éliminerait un grand nombre de nos problèmes. Il existe d'autres moyens de résoudre des différends entre conjoints sans passer par tout le processus et toute la douleur et le coût du divorce.

Je considère le type 2B, la séparation inversée sans motif, comme étant une attaque, par l'intermédiaire du système judiciaire, contre un conjoint innocent et l'enfant innocent. Je suis prêt à reconnaître l'avocat qui dépose des affidavits qui sont parfois faux, et le juge qui rendra peut-être une ordonnance préliminaire appuyant la séparation inversée sans motif, comme étant des complices d'une agression contre le père innocent et les enfants innocents.

Je regarde le coût pour les contribuables, les coupures faites au système de soins de santé et au système d'éducation et je les considère comme des coûts directement attribuables à la ponction dans les deniers publics amenée par les divorces inutiles. Une chose que personne ne semble avoir envie de faire c'est une analyse coûts-avantages approfondie du divorce. Si une telle étude devait se faire, elle révélerait que le coût du divorce—pour les seuls contribuables—se chiffre entre 250 000 $ et 2 millions de dollars par divorce. Cet argent doit venir de quelque part et, malheureusement, je pense qu'il provient du système de soins de santé et du système d'éducation.

Je vais vous dire quelques mots au sujet de mon propre cas, car il semble que chacun ait quelque chose à dire. Mon épouse avait une liaison avec son ministre, qui était marié à quelqu'un d'autre à l'époque, et de façon à pouvoir consacrer plus de temps à ce monsieur, elle a refusé de travailler et de contribuer à la famille. Son revenu est donc passé de 45 000 $ par an à 15 000 $ par an.

Lorsque je me suis peut-être un petit peu impatienté et lui ai recommandé de mener sa liaison à temps partiel et de travailler et de contribuer à la famille à temps partiel—j'étais très libéral à l'époque—elle a communiqué avec un avocat et m'a fait mettre à la porte. Cela fait quatre ans et je n'ai jamais eu l'occasion de raconter ma version de l'histoire.

C'est tout ce que j'ai à dire.

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): Merci beaucoup.

Y a-t-il des questions? Madame Bennett.

Mme Carolyn Bennett: Plus tôt dans la journée, nous avons entendu une psychologue qui, avec ses pairs, effectue des évaluations. Ce qui est ressorti dans le cas de la plupart des dossiers dont on nous a parlé, et qui semblent si injustes, est que le partenaire n'est pas bien sur le plan psychologique. Plus tôt aujourd'hui, on nous a parlé de troubles de la personnalité. Il me semble que si l'on pouvait étiqueter les gens—non pas du tout en fonction du sexe—qui ne sont pas bien, qui ont des problèmes de comportement dans le contexte de la séparation, qui souffrent de troubles de la personnalité ou autres, cela jetterait un petit peut de lumière sur ce qui se passe véritablement.

Y a-t-il eu ou pourrait-il y avoir une évaluation psychologique de la situation? Je pense que dans une telle situation, aucun de nous ne se fâcherait à l'idée de subir nous-même une évaluation. Quels obstacles y a-t-il à l'obtention des faits de cette façon?

• 1745

M. Dennis McKenzie: Je ne peux que m'appuyer sur mon expérience personnelle et mes propres opinions. J'ai subi une évaluation, et c'est moi qui l'avait demandée. Cependant, tout ce qui est envoyé aux tribunaux a tendance à favoriser la femme. Elles trouvent qui elles veulent.

Lors de ces évaluations, le psychologue peut entendre des mensonges et en règle générale ce sera le fait d'une des parties au litige. Si le psychologue n'est pas prêt à faire le travail nécessaire pour découvrir qui ment et qui ne ment pas, vous allez vous retrouver avec une évaluation incomplète et, bien sûr, un mauvais rapport qui sera déposé à la cour.

Mme Carolyn Bennett: Dans votre situation, donc, le rapport était très mauvais.

M. Dennis McKenzie: Ce n'est pas que le rapport était vraiment mauvais. C'était un des meilleurs rapports, peut-être, effectué par cette femme, mais elle n'avait pas vérifié certains des renseignements pertinents.

Mme Carolyn Bennett: Ce n'était donc pas un rapport approfondi, n'est-ce pas?

M. Dennis McKenzie: Non, il n'était pas très approfondi. Il aurait pu être beaucoup plus fouillé, et j'aurais été dans une bien meilleure position si elle avait vérifié les renseignements.

Mme Carolyn Bennett: Avez-vous entendu la comparution du Dr Golfman aujourd'hui?

M. Dennis McKenzie: Non, je n'étais pas ici pour entendre le Dr Golfman.

M. Ross MacKay: Moi je l'étais. J'ai moi-même subi une évaluation. L'une des choses qui m'agresse dans ce genre d'expérience est un mot clé qu'on entend souvent: «dysfonctionnel». Il existe de très nombreuses familles qui sont dysfonctionnelles mais qui ne sont pas examinées à la loupe par le système judiciaire parce qu'elles ne vivent pas un divorce.

Tout d'un coup, vous êtes engagé dans une procédure de divorce, on vous met sous le microscope et si vous respirez de travers vous êtes en difficulté. Dans un certain sens, je pense que l'on va trop loin. L'humanité est ici depuis x années et on a survécu jusqu'ici. Pourquoi doit-on tout d'un coup amplifier chaque petit détail, déterrer chaque petit déchet, essayer de dire qu'un parent est pire que l'autre, au lieu de reconnaître que les enfants ont besoin des deux parents? Ce devrait être là l'élément clé, et non pas la question de savoir lequel des deux va être absolument le meilleur et lequel va tout simplement être un bout de ferraille à balancer.

En ce qui concerne mon propre cas, je n'ai pas vu l'évaluation finale, mais je pense qu'elle sera très bonne. La deuxième fois que j'y suis allé, le psychologue était en train d'ignorer les allégations portées contre moi. Elle a dit que ça ne collait pas. Des enfants victimes d'abus ne veulent pas voir celui qui les a malmenés, et mes enfants ne cessaient de répéter combien ils voulaient me voir. C'était tout simplement une arme qui avait été utilisée.

Heureusement, lorsque nous sommes allés en cour, nous avons eu un très bon juge, qui a dit à mon ex et à son avocat: «Si j'accorde à cet homme un droit de visite non supervisé, qui va le protéger contre vous deux?» C'était un très bon juge, et il a dit: «Il a besoin de visites supervisées pour sa propre protection». Il a ordonné une évaluation, ce que nous avions deviné allait arriver, parce que c'était tellement bizarre.

Une fois arrivé à l'étape de la comparution devant ce juge, c'était très bien, car c'était un très bon juge. J'ai eu pas mal de chance. D'autres personnes avec qui j'ai en parlé n'ont pas obtenu le même résultat que moi.

Il y a un type qui a parlé de suicide. J'ai un cousin qui s'est récemment suicidé et la famille pense que c'était en partie dû au fait qu'il ne cessait de perdre en cour, devant un juge en particulier. Il se demandait pourquoi ce juge lui en voulait tant. Ce n'était pas lui; c'est tout simplement qu'il était du mauvais sexe.

Mme Carolyn Bennett: D'accord...

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): Quelqu'un d'autre aurait-il un commentaire à faire?

Mme Carolyn Bennett: Excusez-moi. J'allais tout simplement dire que c'est une chose dont le comité entend beaucoup parler: la grande disparité qu'il y a entre les juges et l'élément de hasard qui intervient. D'aucuns semblent vouloir qu'il y ait une cour spéciale avec des juges qui s'intéressent tout particulièrement à ce domaine... il s'agirait de faire en sorte qu'ils soient toujours disponibles.

Je dois dire que j'ai été très impressionnée par l'approche du Dr Golfman, qui est d'avoir toujours deux personnes de façon à avoir deux perspectives différentes. Il arrive que des personnes nous hérissent tout simplement, et c'est juste une question de personnalité. Si vous aviez deux personnes différentes qui appliquaient les mêmes outils ou les mêmes critères psychologiques, je pense que cela aiderait à faire le tri quant à l'aspect fonctionnel ou dysfonctionnel.

M. Ross MacKay: M'appuyant encore une fois sur ma propre expérience d'une évaluation, je vous dirai que les coûts m'ont été imposés. Il y a la possibilité d'un remboursement, mais s'il y avait eu deux évaluateurs, je n'aurais pas pu payer cela. Il aurait fallu que j'abandonne.

Mme Carolyn Bennett: Non. Voyez-vous, nous avons la possibilité de dire que nous pensons que cela devrait être gratuit.

Des voix: Oh! Oh!

M. Ross MacKay: Je suis de votre avis. Je vais tout de suite vous donner ma note de MasterCard.

• 1750

Mme Carolyn Bennett: Nous explorons tout simplement toutes les possibilités. Nous avons le privilège de pouvoir proposer ce qui serait le plus utile. Je pense que ce que nous essayons d'établir c'est que cela pourrait finir par déboucher sur de très grosses économies, si l'on pouvait intervenir, classer les problèmes, les régler et ne pas se retrouver avec deux années d'absurdités.

M. Ross MacKay: Je suis d'accord avec vous, docteur. Qu'on s'en occupe rapidement; qu'on intervienne très vite. Lorsque les allégations ont commencé à être portées contre moi, j'ai dit: «Qu'on aille tout simplement en cour». C'est ainsi qu'on est très vite passé au processus d'évaluation, qui nous a fait éviter beaucoup de frustrations et de dures épreuves sur une période de temps plus longue. Mais je suis tout à fait de votre avis: si une évaluation est requise, si les choses sont en train de s'emballer, il faudrait qu'elle soit ordonnée presque tout de suite. Qu'on procède immédiatement à une évaluation ordonnée par la cour au lieu d'attendre deux ou trois ans pour que tout cela débouche enfin.

Mme Carolyn Bennett: Merci beaucoup.

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): Merci beaucoup.

La sénatrice Anne Cools: J'aimerais tout simplement revenir sur ce qu'a dit le témoin au sujet de la déclaration du juge. Il pourrait peut-être nous donner le nom du juge et l'endroit où l'on pourrait trouver cette déclaration.

M. Dennis McKenzie: Je pense qu'on n'a pas répondu à l'une des questions de Mme Bennett.

La sénatrice Anne Cools: Oui. C'est vous, je pense, qui avez dit cela.

M. Dennis McKenzie: Au sujet des juges?

La sénatrice Anne Cools: Oui. Le juge vous a dit que vous aviez besoin de protection contre ces deux-là.

M. Ross MacKay: C'est le juge Hanson, et il ne s'occupe en règle générale pas d'affaires de droit de la famille. D'après ce que j'ai compris, c'est un magistrat civil. Il ne voulait tout simplement plus écouter toutes ces fabrications.

La sénatrice Anne Cools: C'était dans quelle cour et quand?

M. Ross MacKay: C'était la Cour du banc de la reine, le 3 octobre de l'année dernière.

M. Dennis McKenzie: Il y a une question à laquelle on n'a pas très bien répondu, il me semble.

La sénatrice Anne Cools: Et le nom de l'affaire?

M. Ross MacKay: MacKay c. MacKay.

La sénatrice Anne Cools: Très bien.

M. Dennis MacKenzie: Votre question quant à savoir comment déterminer quel parent est déséquilibré, je ne pense pas qu'on en ait beaucoup traité, mais j'aimerais revenir un petit peu là-dessus.

En ce qui concerne mon cas personnel, il y a eu divers affidavits, des quantités énormes... et il y en avait un qui contenait des allégations complètement scandaleuses et monstrueuses... Ce monsieur dit qu'il ressemble à un motard. Mon frère a été accusé par mon ex d'être membre d'un gang, d'être motard, et d'autres choses du genre. Des allégations terribles ont été faites à l'endroit de ma mère.

Ces gens font ces allégations, et cela a tendance à devenir un petit peu un schéma, je pense. Ce pourrait être un petit plus rapidement décelé par les psychologues si ceux-ci se donnaient la peine de faire du travail un petit plus approfondi.

Mme Carolyn Bennett: Votre partenaire a-t-elle subi une évaluation?

M. Dennis MacKenzie: Nous avons eu une évaluation, mais, comme je l'ai dit, elle n'était pas suffisamment approfondie. On nous a laissé ramener la feuille à la maison et la remplir ou en faire ce qu'on voulait. Je sais que j'ai rempli mon questionnaire, mais...

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): Quelqu'un de ce côté-ci aimerait-il poser des questions?

Ce n'est pas par manque d'intérêt; c'est la fatigue.

M. Dave Goldhawk: Permettez que j'ajoute moi aussi quelque chose au sujet de l'aspect évaluations. J'ai moi aussi vécu une évaluation. Il y avait un très net préjugé contre moi, mais l'évaluation a néanmoins fait ressortir qu'il y avait clairement des problèmes du côté de mon ex-femme. Malheureusement, j'ai fait évaluer mon évaluation, et il est ressorti que la conclusion déposée à la cour, qui a dramatiquement changé le cours de mon affaire personnelle—et cette évaluation avait été faite par le Dr Laura Mills... Il n'y avait aucune preuve pour l'appuyer dans le corps de son texte. Sa conclusion était une entité distincte comparativement à tout le reste de son évaluation, non seulement au sujet de moi-même et des membres de ma famille, mais également de mon ex-femme et de sa famille ainsi que de l'interaction avec ses deux enfants.

Il me faudrait préciser également que l'examen de l'interaction entre mes enfants et moi-même a été réalisé en l'espace d'une dizaine de minutes, un point c'est tout. En fait, il y a eu cinq minutes avec mon fils et cinq minutes avec ma fille. La rencontre a eu lieu dans un parc public. La psychologue a réagi au fait que ma fille soit allée vers elle en courant. Au lieu d'y voir une simple manifestation d'affection voulant dire: «Je suis une enfant très expansive et je viens tout simplement vous dire bonjour», elle a dit que ce n'était pas le cas, qu'elle fuyait son père par crainte de lui. Il n'y avait pas d'interaction entre moi et ma fille, mais il y avait interaction entre mon fils et moi pendant que celui-ci s'amusait sur les agrès.

• 1755

Quelqu'un a dit tout à l'heure que les professionnels ont parfois trop de pouvoir. Une personne peut rédiger une conclusion qui n'est pas appuyée par le corps du rapport, la soumettre en tant que preuve à une cour civile qui ne tient pas compte de faits mais d'opinions, et un juge peut trancher en s'appuyant sur ses propres opinions. Vous ne pouvez même pas interjeter appel car vous ne pouvez pas en appeler d'une opinion.

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): Monsieur Densmore, vous vouliez demander quelque chose.

M. David Densmore: Je voulais tout simplement ajouter quelque chose au sujet des évaluations. La femme qui a témoigné ici est l'une des meilleures évaluatrices en ville. Malheureusement, il n'existe pas dans ce pays de programme de formation pour les évaluateurs, pour leur apprendre comment faire. Il en existe un aux États-Unis, mais aucun évaluateur dans cette ville n'a suivi ce cours.

J'ai une solide formation en sciences. Je reconnais de la bonne science lorsque j'en vois. Je n'ai encore rencontré personne dans cette province ou dans cette ville qui sache vraiment faire du bon travail d'évaluation. C'est tout simplement dommage. Il est très facile de décrocher un diplôme en psychologie, de mettre sa petite pancarte et d'empocher 3 000 $ pour une évaluation.

M. Kris Anderson: Dites plutôt 6 000 $, maintenant.

M. David Densmore: C'est 6 000 $, maintenant? Pour faire un bon travail, il faut une bien meilleure formation et il faut y consacrer beaucoup plus d'efforts que ne sont prêts à le faire les évaluateurs dans cette ville. Malheureusement, il n'est fait aucun contrôle de la façon dont ils font leur travail et il n'y a en réalité pas de normes qu'il leur faille respecter.

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): Nous avons entendu de nombreux commentaires à ce sujet.

M. David Densmore: Très bien.

La coprésidente (la sénatrice Landon Pearson): Cela met fin aux questions.

J'aimerais vous remercier tous très sincèrement d'être venus et de nous avoir raconté vos histoires. Cela nous aide à comprendre les questions et nous vous en sommes très reconnaissants.

J'aimerais également remercier les membres de l'assistance d'être venus, et certains d'entre vous sont restés très longtemps. Nous apprécions l'intérêt que vous portez à cette question. Nous regrettons que le message n'ait manifestement pas été transmis à tout le monde, pour que chacun ait une chance, mais nous n'aurions sans doute de toute façon pas pu entendre toutes les personnes intéressées.

J'aimerais remercier les membres du comité d'avoir été si attentifs pendant ces longues journées que nous avons passées ensemble.

Nous allons reprendre le lundi 4 mai, à Ottawa, à 15 h 30. Merci. La séance est levée.