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SJCA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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SPECIAL JOINT COMMITTEE ON THE CHILD CUSTODY AND ACCESS

COMITÉ MIXTE SPÉCIAL SUR LA GARDE ET LE DROIT DE VISITE DES ENFANTS

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mercredi 1er avril 1998

• 0903

[Traduction]

La coprésidente (sénatrice Landon Pearson (Ontario, Lib.)): Bienvenue à la quatorzième séance du Comité mixte spécial sur la garde et le droit de visite des enfants.

Ce matin, nous souhaitons la bienvenue à Vernon Beck, de Family Conflict Resolution Services; au Dr Fred Matthews, de Central Toronto Youth Services, Research and Program; à la Dre Marlies Sudermann, du London Custody and Access Project; ainsi qu'à Rita Benson, Keith Marlowe et Sylvia Pivko, de la Community Coalition for Custody and Access.

Avant de commencer, j'aimerais vous rappeler que le mandat du présent comité est le suivant: qu'un comité mixte spécial du Sénat et de la Chambre des communes soit établi en vue d'examiner et d'analyser les modalités de garde et de droit de visite des enfants après un divorce ou une séparation, et en particulier d'évaluer la pertinence de politiques de droit et de médecine familiale axées sur l'enfant. Ces dernières privilégieraient des responsabilités parentales conjointes et des modalités de garde et de visite axées sur les besoins et les intérêts des enfants.

Nous vous accordons cinq minutes chacun, dans la mesure du possible, afin de laisser de la place aux questions. La liste des témoins est longue; nous commencerons par Vernon Beck.

• 0905

M. Vernon Beck (directeur de programme, Family Conflict Resolution Services): J'aimerais remercier les membres du comité de me donner l'occasion de faire cette présentation. Je m'appelle Vernon Beck et je représente un organisme à but non lucratif, le Family Conflict Resolution Services. Je suis fier de participer à cet événement historique pour les familles canadiennes.

J'aimerais tout d'abord mentionner que les conflits non résolus sont à la racine des difficultés auxquelles sont confrontés les enfants canadiens et leur famille dans une situation de divorce. Il existe des solutions pour résoudre les conflits, mais elles sont honteusement et intentionnellement laissées de côté par des gens qui s'opposent à la résolution des conflits. Le plus honteux pour notre pays est le fait que notre système de justice est au centre du problème, car il n'a pas réussi justement à faire régner la justice et à mettre fin aux conflits.

L'exposé écrit que nous avons soumis au comité contient une analyse détaillée des facteurs en cause. Je vais pour l'instant tenter de décrire le projet unique auquel travaille notre groupe depuis plusieurs mois. Il s'agit d'un programme qui permettra de régler la grande majorité des situations conflictuelles et d'assurer que les intérêts des enfants sont protégés.

L'établissement du présent comité mixte a coïncidé avec l'effort que faisaient des membres de notre communauté depuis des mois pour établir les causes et les solutions possibles aux conflits en cas de séparation ou de divorce, et pour préparer un programme communautaire complet visant à résoudre les mêmes difficultés soumises à l'examen du comité aujourd'hui. Notre programme a été baptisé le Family Assistance and Parent Support (Aide aux familles et soutien aux parents). Les concepts de base et les buts ont été établis, et nous en sommes maintenant à mettre au point les procédures de mise en oeuvre. Nous pensons que de nombreux concepts définis par notre groupe auront beaucoup de résonance et d'utilité pour les membres du comité.

Notre programme s'appuie sur les concepts suivants:

Premièrement, il appartient à la communauté plutôt qu'à la cour de chercher des solutions aux difficultés.

Deuxièmement, les deux parents doivent faire une année probatoire afin de prouver leur aptitude à jouer leur rôle de parent après la séparation.

Troisièmement, la garde partagée et le droit de visite doivent devenir une présomption réfutable de droit, et être répartis également entre les deux parents après la séparation.

Quatrièmement, des coordonnateurs de parents formés par les organismes communautaires travailleront auprès des familles aux prises avec des conflits après la séparation; ces coordonnateurs évalueront les compétences parentales et assureront le suivi de l'évolution des enfants. Les coordonnateurs pourront en outre régler les conflits mineurs dans les familles au cours de cette période.

Cinquièmement, des programmes complets de formation et d'éducation des parents doivent être rendus accessibles aux membres des familles.

Sixièmement, les deux parents doivent être traités également et équitablement eu égard au temps de garde, aux responsabilités parentales et au soutien à l'enfant.

Septièmement, il faut mettre en place des mesures efficaces de mise en exécution des ententes parentales et des jugements.

Notre programme propose une solution efficace à toutes les questions soumises au comité jusqu'à maintenant. J'ai assisté à la séance de lundi et j'ai pu entendre la plupart des préoccupations des gens. Notre programme avait une réponse à chacune. Nous avons déjà trouvé les solutions et nous travaillons présentement aux procédures de mise en oeuvre. Des documents juridiques sont en préparation, et les manuels de formation en sont au stade de l'ébauche.

En plus des membres non professionnels du groupe, nous avons formé un groupe de consultation comprenant plus de 40 professionnels, dont des avocats en droit familial, des évaluateurs, des médiateurs, des travailleurs sociaux, des psychologues, des infirmières, des enseignants, etc.; d'autres personnes s'ajoutent encore au groupe. Le programme est si prometteur que, une fois la création terminée, nous aurons réussi à créer un groupe communautaire solide de citoyens et de spécialistes prêts à s'attaquer aux difficultés. À notre avis, notre programme est le plus avant-gardiste qui existe en Amérique du Nord, et il pourrait devenir un modèle pour les tribunaux du pays s'il reçoit l'attention qu'il mérite et le soutien des autorités.

Je prendrai quelques minutes pour décrire en bref certains avantages du programme. J'ai dressé cette liste à la lumière des propos entendus lundi et des commentaires émis mardi.

Premièrement, notre programme est principalement axé sur l'enfant. Il permet d'accélérer les procédures juridiques. Selon nos pronostics, la famille pourrait avoir réglé la séparation en quatorze jours et être prête à réintégrer normalement la communauté.

Le programme offre des possibilités de réduire de façon sensible la violence au foyer. Il peut fournir des renseignements essentiels aux tribunaux. Il est beaucoup plus efficace que le recours obligatoire à la médiation, parce qu'il met de l'avant des normes établies par la communauté, négociables entre les parents. Il met à profit les programmes éducatifs communautaires, mais toujours sur une base volontaire.

• 0910

Le programme fait en sorte qu'on ne demande jamais aux enfants de choisir entre maman ou papa. Il fait en sorte que les enfants sont écoutés sans intrusion, avec attention. Cette façon de faire favorisera les contacts, le plus égaux possible, entre les parents, ainsi qu'entre les enfants et les deux parents quand c'est nécessaire. Les parents vindicatifs qui ont la garde ne pourront plus couper de force les contacts entre l'autre parent et les enfants, et leurs actes vindicatifs n'auront plus de répercussions négatives sur les enfants.

Les parents seront responsables l'un envers l'autre et envers la communauté, selon des principes d'égalité. Le programme contribue ainsi à éliminer le recours au processus accusatoire de séparation et de divorce, pour adopter un processus fondé sur le bien-être de la famille. La majorité des divorces ne seront plus réglés devant les tribunaux mais à l'intérieur de la communauté, comme il se doit. Les parents et les enfants sauront à quoi s'attendre et auront un plus grand sentiment de stabilité. Le programme intègre les principes et les théories de la gestion des cas. Il permettra de régler les refus de droit de visite sans intervention des tribunaux.

Le programme peut aussi être appliqué aux familles non dissolues, avant la séparation ou le divorce. Certaines réserves ont été émises quant à l'intervention précoce. Le programme apporte des solutions. Il pourra être appliqué avec succès quand les parents choisissent la garde exclusive pour une raison quelconque. Il offre des solutions efficaces en cas de violence envers les enfants et, fait encore plus important, en cas d'allégations de violence envers les enfants, si fréquentes devant les tribunaux ces temps-ci.

Le programme peut être adapté en fonction des besoins particuliers des familles, et peut être modifié sans l'intervention des tribunaux. Ces caractéristiques se traduisent par une plus grande stabilité des relations sociales de l'enfant et un sentiment d'appartenance à la communauté.

La coprésidente (sénatrice Landon Pearson): Monsieur Beck, les cinq minutes sont écoulées. Avez-vous terminé?

M. Vernon Beck: Je termine. Je vais conclure avec quelques remarques.

La coprésidente (sénatrice Landon Pearson): S'il vous plaît.

M. Vernon Beck: Pour finir, j'aimerais dire que les concepts sur lesquels s'appuie notre programme offrent des solutions à court et à long terme aux problèmes que rencontrent les familles lors d'un divorce. Il offre de plus un contexte équitable, favorisant l'égalité des sexes, la réduction de la violence familiale et, surtout, la justice pour les familles canadiennes. De plus, il rétablira la confiance envers le système judiciaire.

Le programme, administré par la communauté, fera appel à des méthodes non accusatoires, en tenant compte du bien-être de la famille. La mise en oeuvre pourra se faire au cours des prochains mois, avant même que ce comité fasse ses recommandations finales. Nous avons les outils, nous avons la volonté, et nous pouvons compter sur la participation de la communauté pour accélérer les procédures.

Combien d'enfants et de familles seront sacrifiés sous nos yeux avant que nous agissions? Les Canadiens n'en peuvent plus et sont dégoûtés de la situation actuelle. Nous voulons des solutions qui soient fondées sur des principes de justice, pas sur la nouvelle orthodoxie, sur les partis pris contre un sexe et la protection des emplois dans l'industrie juridique.

En dernier lieu, j'aimerais demander au gouvernement de tenir compte du travail des groupes communautaires et de leur donner les ressources dont ils ont besoin pour mener à bien le travail. Nous demandons aux membres du comité et du gouvernement de considérer les concepts de la responsabilité parentale partagée, de la justice, de l'égalité et de la participation de la communauté. Avons-nous le courage de faire ce qu'il y a de mieux pour nos enfants?

Au nom de tous les Canadiens, je vous remercie de votre attention.

La coprésidente (sénatrice Landon Pearson): Merci.

Docteur Matthews.

Dr Fred Matthews (directeur, Research and Programs, Central Toronto Youth Services): J'aimerais remercier le comité de me permettre de faire cet exposé ce matin. Votre travail revêt une grande importance pour le bien-être des enfants, des parents et des familles canadiens.

Vous serez tous d'accord avec moi, la garde et le droit de visite sont des questions complexes, au sujet desquelles les opinions sont partagées, les demandes et les intérêts très divergents, et les solutions jamais faciles ou simples. Ce sont des sujets chargés d'émotivité dont il est très difficile de discuter froidement.

Je n'interviens pas ce matin à titre d'expert de la garde et du droit de visite. Je ne prétends pas connaître toutes les réponses, et je ne tiens nullement à gagner un combat. Je n'appartiens à aucun camp ni à aucune école de pensée. En tant que chercheur, je veux comprendre un phénomène social complexe en considérant tous les facteurs et de l'information de sources diversifiées.

Cependant, j'accorde personnellement une très grande importance à ce que les jeunes ont à dire sur leurs expériences de vie et leurs relations avec les adultes. Je ne me ferai donc pas le porte-parole des adultes, qui à mon avis portent préjudice aux jeunes de notre société, mais celui des enfants et des jeunes.

Je fais constamment le même constat dans mon travail: les adultes sont coupés de la vie et des besoins des jeunes d'aujourd'hui. Pendant que nous nous disputons sur des notions théoriques, des procédures légales, des ordonnances et des définitions de problèmes, nous passons complètement à côté de la question la plus importante pour les enfants et les jeunes: le besoin de vivre et de ressentir des liens solides d'amour et d'intimité avec les adultes signifiants de leur vie et de l'entourage. Chaque fois que nos efforts en tant qu'aidants ne réussissent pas à renforcer ces liens, à soutenir les parents ou à les aider à comprendre ce qui importe pour leurs enfants, nous ajoutons bêtement à la souffrance et à l'isolement des jeunes et des familles.

• 0915

Je dois absolument insister sur le fait que je n'aime pas les termes garde et droit de visite, et qu'il est important qu'on les remplace par des termes plus appropriés, qui reflètent les intentions des mères et des pères quant à l'exercice de leur rôle parental après la séparation ou le divorce.

À mon avis, le terme garde est une relique qui nous vient du temps où nous considérions les enfants comme étant des biens; quant au terme droit de visite, il m'inspire toujours de l'inquiétude parce qu'il insinue que le parent qui a la garde a du pouvoir et du contrôle sur le bien-être émotif de l'enfant et les relations qu'il entretient avec d'autres adultes signifiants.

Il faut se rendre à l'évidence, des adultes instables dont les relations avec leur partenaire se sont détériorées ou ont cessé complètement commettent souvent de graves erreurs de jugement. Submergés par la souffrance, ces adultes posent parfois des gestes qui ont des conséquences graves pour leurs enfants. Il peut s'agir de refus de soutien financier, de droit de visite, ou de dénigrement continu de l'autre parent. L'adulte peut aussi menacer subtilement de diminuer ou de retirer son affection quand un enfant parle de passer du temps avec l'autre parent ou en parle positivement. Dans certains cas, des parents vont même jusqu'à faire de fausses accusations de violence s'ils croient obtenir ainsi de meilleures chances d'obtenir la garde et de restreindre le droit de visite.

En tant que société, nous avons le devoir d'offrir compassion et soutien aux parents qui affrontent une séparation ou un divorce. Mais il est encore plus important que la société assume la responsabilité qui lui incombe de faire tout en son pouvoir pour protéger la personne la plus vulnérable, l'enfant, contre la souffrance inutile.

Je ne m'étendrai pas sur ce sujet, car le temps file très rapidement.

Je partage le point de vue selon lequel la rétention du soutien financier devrait entraîner des pénalités de plus en plus sévères en commençant par des amendes—ce qui est déjà fait, je crois—, le retrait du salaire, des sanctions légales ou la révision des ordonnances relatives à la garde et au droit de visite.

Je pense par ailleurs que, en ce qui a trait à l'interdiction de visite, le temps perdu devrait être accumulé. Je m'inquiète à ce sujet, parce que les enfants, surtout les très jeunes enfants, se développent très rapidement, et que le temps qu'ils n'ont pas passé avec un des parents à ces stades précoces de formation est perdu à tout jamais. J'aimerais que l'on trouve une solution à ce sujet.

Cependant, je crois qu'il faut faire intervenir le système de justice pénale avec mesure. Je préfère le recours à la médiation et que les tribunaux interviennent le moins possible dans ces causes. Dans des circonstances exceptionnelles, par exemple dans les cas de violence conjugale ou de harcèlement, ou quand des parents souhaitent protéger leurs enfants contre un conjoint qui a commis des actes de violence auparavant, le traitement doit être différent. Par ailleurs, je suis très favorable à l'intervention du système de justice pénale concernant les actes répétés et flagrants de poursuites abusives.

L'interprétation actuelle de la loi fait peu de cas de l'importance et même de la nécessité de la famille étendue dans l'évolution et le développement des enfants. Pour preuve, les droits des grands-parents de maintenir et de jouir de liens étroits avec leurs petits-enfants sont peu ou pas pris en compte dans les jugements.

À moins qu'il soit prouvé hors de tout doute que la santé de l'enfant est en danger, ou que l'un des parents éprouverait une grande souffrance ou des difficultés extrêmes, les procédures suivant le divorce ou la séparation devraient privilégier la parentalité partagée ou la coparentalité.

Je ne suggère pas de codifier légalement une définition particulière des termes parentalité partagée et coparentalité, parce que les besoins des familles, des parents et des enfants sont très diversifiés. Les parents ne devraient pas être les seuls à prendre des décisions dans ces situations. Les enfants doivent être entendus eux aussi. Ils en connaissent autant que nous sur leurs intérêts, et ils doivent avoir la possibilité de s'exprimer.

De plus, toutes les mesures de parentalité partagée et de coparentalité doivent être souples, constamment revues en fonction des besoins développementaux des enfants, des parents et des familles, à mesure que le contexte de vie change.

En bref, il est temps de changer les principes, sinon les lois, qui régissent la vie des jeunes, des parents et des familles en ce qui a trait aux rôles parentaux après une séparation ou un divorce. Je souhaite que notre société abandonne l'idée de la garde et du droit d'accès, et donne plus de place aux mesures axées sur la parentalité conjointe et la coparentalité. Les grands-parents et les membres de la famille étendue doivent faire partie des plans de parentalité.

Je suis convaincu qu'il faut cesser de discuter du pouvoir et des privilèges des adultes dans ce domaine, et commencer à faire participer les enfants et les jeunes aux décisions qui déterminent leur vie et leur avenir. Les plans de parentalité doivent être évolutifs. L'État doit assurer aux enfants et à leurs parents l'accès à du soutien et à des services d'aide aux familles durant cette pénible période de transition. Il faut tout de suite mettre en oeuvre un mode de supervision et de révision des plans de parentalité, qui feront en sorte que tous les parents et les partenaires respectent l'entente.

• 0920

Je suggère d'avoir recours au système de justice pénale seulement quand toutes les autres tentatives pour régler les conflits entre les parents ont échoué. À mon avis, les adultes doivent toujours être tenus responsables de leurs comportements qui causent de la souffrance aux enfants.

La coprésidente (sénatrice Landon Pearson): Merci beaucoup.

Docteure Sudermann.

Dre Marlies Sudermann (directrice, London Custody and Access Project, London Family Court Clinic): Je suis directrice du London Custody and Access Project de la London Family Court Clinic. J'aimerais tout d'abord expliquer notre rôle.

Le London Custody and Access Project a débuté en 1980 en vue d'aider les parents séparés ou divorcés, leurs avocats, le tribunal et d'autres personnes à élaborer des plans de soin des enfants qui tiennent compte de leurs intérêts. Après l'évaluation d'appréciation, la médiation et l'arbitrage, nous aidons les parents à régler leurs différends; nous les encourageons à mettre de côté leurs problèmes conjugaux pour donner toute la place aux besoins de leurs enfants. Nous considérons qu'un climat plus détendu entre les parents est essentiel pour permettre aux enfants de mieux vivre une séparation.

Aujourd'hui, j'aimerais exposer au comité les éléments qui sont à nos yeux les plus importants dans les domaines de la garde et du droit de visite des enfants. J'aimerais à ce point préciser que les termes garde des enfants et droit de visite doivent être réexaminés en vue de tenir compte de la responsabilité parentale et pour d'autres considérations que d'autres ont énoncées avant moi.

Je parlerai plus particulièrement des deux éléments clés suivants: la violence familiale et l'accès aux services d'évaluation. Tout d'abord, la violence faite aux femmes est un facteur déterminant dans de nombreuses décisions relatives à la garde et au droit de visite des enfants. Cela n'est pas surprenant, étant donné que, selon Statistique Canada, 29 p. 100 des femmes actuellement mariées ou qui ont déjà été mariées, y compris celles qui vivent en union de fait, ont été victimes d'une forme quelconque de violence conjugale, c'est-à-dire de violence physique ou de menaces telles que définies par le Code criminel. Il existe des cas de violence à l'endroit des hommes, mais ils sont rares, selon notre expérience. Les statistiques produites par les autorités policières indiquent que, dans 95 à 99 p. 100 des cas de violence familiale rapportés à la police, les victimes sont des femmes ou des enfants.

De plus, les enfants sont affectés par la violence faite aux femmes. Les études démontrent que les enfants qui sont témoins de violence familiale subissent des préjudices graves sur les plans émotionnel et de l'adaptation sociale, du comportement et de la performance scolaire. Les garçons qui voient leur mère se faire battre sont beaucoup plus susceptibles de devenir des agresseurs à leur tour à l'adolescence ou à l'âge adulte. Les effets sur les enfants témoins de violence envers les femmes sont décrits dans des documents joints à la version écrite de mon exposé.

Les effets nocifs se font sentir même si les enfants ne sont pas personnellement agressés physiquement, et même si les parents croient qu'ils n'ont pas été des témoins directs d'actes violents. Dans ces cas, les enfants se retrouvent dans un contexte de guerre à l'intérieur de leur propre maison, et nombreux sont ceux qui souffrent de syndromes de stress post-traumatique. Il s'agit donc d'un élément important qu'il faut considérer en matière de garde et de droit de visite des enfants.

Enfin, quand une femme a été victime de violence, les facteurs pris en compte pour la détermination de la garde et du droit de visite des enfants changent de façon considérable. Dans certains cas, la mère est en danger de subir d'autres agressions et du harcèlement au moment où les enfants passent d'une main à l'autre, et les enfants risquent d'être témoins d'autres actes violents. D'autres facteurs ont trait aux intentions possibles de tuer de la part de l'agresseur, car il est notoire que la séparation est la période la plus dangereuse pour une femme qui se trouve dans une relation de violence.

En 1995, la commission de réforme de la loi de Nouvelle-Écosse a publié un rapport, From Rhetoric to Reality: Ending Domestic Violence in Nova Scotia, dans lequel elle aborde cette question. Elle arrive à la conclusion que de nombreux hommes qui ont été inculpés pour violence envers une femme récidivent au moment où la cour émet une ordonnance de droit de visite des enfants. Le rapport indique aussi que le système de justice doit accorder plus d'importance à la violence familiale dont sont victimes les femmes et les enfants.

• 0925

Alors que certaines mères empêchent injustement le père de voir ses enfants, en faisant fi des intérêts de ces derniers, elles sont beaucoup moins nombreuses selon notre expérience que les hommes qui profitent de procédures légales relatives à la garde et au droit de visite des enfants pour harceler, abuser et contrôler leur ex-conjointe. Dans les deux cas, une évaluation professionnelle en matière de garde et de droit de visite des enfants permettra de déterminer très clairement les besoins des enfants et la compétence des parties à satisfaire ces besoins, cela afin d'éviter le recours à des pratiques nuisibles pour les enfants.

Cinquièmement, la médiation n'est pas indiquée dans les cas de relations de violence. La médiation obligatoire contribue à aggraver la situation des femmes victimes de violence et des enfants qui en sont témoins.

Le sixième élément concerne la garde partagée. Elle est très déconseillée et même dangereuse dans un contexte de violence familiale. Il ne doit pas y avoir de présomption de garde partagée.

Des centres de visite supervisés pourraient s'avérer très utiles pour les parents séparés qui ont connu une relation de violence. Toutefois, ces centres doivent être financés et administrés adéquatement par du personnel compétent qui peut assurer que les modalités en vigueur sont bénéfiques pour les enfants.

Pour ce qui est du deuxième sujet, soit l'accès et la qualité des services d'évaluation en matière de garde et de droit de visite, ainsi que des services connexes, j'aimerais dire que l'évaluation est un outil important qui permet d'assurer que les besoins et les intérêts des enfants sont pris en compte.

Toutefois, selon mon expérience, beaucoup d'enfants au Canada n'ont pas accès à des services d'évaluation de qualité en matière de garde et de droit de visite. Les causes en sont le manque de financement, le défaut des tribunaux d'ordonner des évaluations et la formation déficiente des évaluateurs ainsi que l'absence de normes. Les évaluateurs doivent avoir des connaissances dans les domaines du développement des enfants, de la dynamique familiale et des incidences des conflits et de la violence pour les enfants, de même que dans d'autres domaines tels que la violence envers les enfants, les abus sexuels et la violence familiale.

Deuxièmement, il faut absolument mettre sur pied des services cliniques étendus, de médiation si nécessaire, de formation et d'aide aux parents qui se séparent, et des groupes éducatifs et thérapeutiques à l'intention des enfants confrontés à une situation de séparation ou de divorce...

La coprésidente (sénatrice Landon Pearson): Pardonnez-moi, mais vos cinq minutes sont écoulées. Pouvez-vous conclure?

Dre Marlies Sudermann: Oui, bien sûr.

... des groupes à l'intention des enfants témoins de violence ou qui ont été victimes de violence et, au besoin, des services de protection de grande qualité. Quand ces services sont abolis ou tout simplement inexistants, les enfants en souffrent.

En conclusion, j'aimerais ajouter que les relations des enfants avec les deux parents après la séparation sont très importantes. Toutefois, il faut faire en sorte que les enfants ne soient pas témoins de la violence familiale ou victimes de violence physique ou sexuelle. L'évaluation sérieuse en matière de garde et de droit de visite, exécutée par des évaluateurs compétents, constitue un moyen précieux d'assurer que ce sont les intérêts des enfants qui priment lors de conflits.

Merci.

La coprésidente (sénatrice Landon Pearson): Merci beaucoup.

Maintenant, je ne sais pas lequel d'entre vous, ou si les trois...

Mme Rita Benson (membre de la Community Coalition for Custody and Access): J'aimerais tout d'abord vous présenter notre groupe. Voici Keith Marlowe, superviseur et directeur d'un programme à l'intention des hommes violents. Notre bureau de la région de Durham accueille cette semaine 150 hommes qui participent à des groupes. Sylvia Pivko s'est également jointe à moi; elle est directrice exécutive de la clinique du tribunal de la famille, où on effectue des évaluations en matière de garde et de droit de visite des enfants.

Mon nom est Rita Benson. Je suis thérapeute conjugale et familiale, et j'anime des groupes de femmes victimes de violence.

Nous faisons partie d'un projet communautaire subventionné par le gouvernement provincial, qui s'intéresse aux questions de garde et de droit de visite des enfants. Nous comptons sur un réseau communautaire de 15 à 20 agences qui se réunissent afin de discuter de garde et de droit de visite des enfants. Nous effectuons une recherche sur l'expérience des femmes victimes de violence en matière de garde et de droit de visite des enfants. Nous avons reçu du financement en février 1998 seulement, alors la recherche vient à peine de commencer.

Nous sommes ici aujourd'hui pour réfléchir avec vous sur le problème très épineux de la garde et du droit de visite et de l'incidence de ces questions sur le bien-être des femmes violentées et de leurs enfants. Nous savons qu'il s'agit d'un sous-groupe très précis, mais de nombreuses personnes sont touchées et la législation générale doit tenir compte de leurs besoins particuliers.

En ce moment, des mères sont tuées. Des enfants sont tués. Des enfants et leur mère vivent dans un climat de menaces, de harcèlement, de peur, de danger et d'absence de contrôle sur leur vie bien des années après avoir quitté une relation de violence. Bien que le système de justice pénale ait déjà été modifié—il contient dorénavant des dispositions relatives à la criminalisation des comportements violents—, nous voyons de plus en plus d'hommes violents se servir du régime de droit familial, surtout les dispositions relatives à la garde et au droit de visite, comme d'un instrument de harcèlement et de contrôle.

• 0930

Le dernier bastion de contrôle et le moyen ultime à la disposition d'un homme violent pour avoir du pouvoir sur sa partenaire, une fois que les questions financières sont réglées, est le droit de visite aux enfants. Je vais citer quelques exemples que nous rencontrons: menacer de poursuite en vue d'obtenir la garde conjointe ou exclusive; harceler, menacer et même commettre des actes de violence physique au moment du transfert des enfants; refuser de ramener l'enfant au moment désigné; cuisiner les enfants pour obtenir des renseignements sur la mère; accuser la mère d'avoir détruit le père et la famille; etc.

Nous croyons que tous les enfants qui ont vu leur mère subir de la violence sont à risque, ont subi des traumatismes émotionnels, et que la violence d'un conjoint envers l'autre est un facteur déterminant dont doit tenir compte le jugement relatif à la garde.

Notre contexte culturel nous amène à considérer qu'un parent a le droit inaliénable de voir son enfant. Nous croyons que ce concept est faussé et qu'il existe des circonstances où un parent, en raison de son comportement, a répudié ce droit, du moins pour une certaine période.

Si un homme a commis des abus sexuels envers son enfant, ou commet des actes violents graves ou continus envers la mère de cet enfant, les conséquences pour l'enfant sont la souffrance émotionnelle, des déficiences relationnelles ainsi que des difficultés de fonctionnement et d'intégration pour le restant de ses jours.

Oui, le père violent peut éprouver une grande souffrance parce que les liens sont rompus avec son enfant. Notre tentons dans notre travail clinique de déterminer si l'homme en question est apte à comprendre et à se préoccuper des conséquences de son comportement sur une autre personne que lui-même et, plus précisément, sur sa victime. Nous voulons aussi savoir s'il accuse le système ou un facteur extérieur à lui-même, ou s'il assume la responsabilité de son choix d'un comportement violent qui a entraîné des conséquences indésirables dans sa vie.

Nous souhaitons faire quatre recommandations.

Premièrement, la violence d'un conjoint envers l'autre doit être prise en compte dans le jugement relatif à la garde et au droit de visite des enfants. En fait, on devrait présumer que la garde ne peut être accordée à l'auteur d'actes de violence familiale. Il faut tenir compte de la violence physique, sexuelle et psychologique.

Nous vous renvoyons au rapport fédéral produit en 1993 qui contient les recommandations du Comité canadien sur la violence faite aux femmes. L'article L.75 recommande de réviser et d'amender toutes les lois afin d'assurer la sécurité des enfants; que les enfants témoins de violence soient considérés comme ayant besoin de protection; et que la Loi sur le divorce soit amendée, ainsi que toutes les lois qui traitent de garde et de droit de visite, de sorte que la violence perpétrée par un conjoint envers l'autre conjoint devienne un facteur obligatoirement considéré dans le jugement sur la garde.

Nous vous renvoyons aussi au document de travail du ministère de la Justice sur la garde et le droit de visite, diffusé en 1993; celui-ci suggère que les lois soient clarifiées afin d'assurer que, quand il y a preuve de violence envers un conjoint, la cour doit en tenir compte dans son jugement sur la garde et le droit de visite, et que les enfants et les conjoints victimes de violence doivent être protégés contre d'éventuelles représailles.

Nous recommandons en second lieu que des lois stipulent que, au moins au début, un conjoint violent doit être interdit de visite non supervisée aux enfants issus de l'union.

Nous avons examiné des données recueillies en Nouvelle-Zélande, où les lois en vigueur obligent les visites supervisées quand un conjoint a commis des actes de violence physique ou sexuelle envers son partenaire.

Nous savons que le sujet est très complexe. Il arrive que, même si le père est violent, les enfants souhaitent le voir. Une telle loi leur donnerait la possibilité de le voir dans un contexte supervisé et sûr, avec la possibilité d'assouplir les modalités de visite si le comportement du père change.

Notre comité a amorcé une discussion sur la possibilité pour le conjoint violent de mériter un droit accru de visite à ses enfants en participant à des traitements et en démontrant des changements de comportement réels.

La coprésidente (sénatrice Landon Pearson): Madame Benson, vos cinq minutes sont écoulées. Pouvez-vous résumer?

Mme Rita Benson: D'accord.

Il incombe ainsi au conjoint violent de prouver son bon vouloir, et non à la victime, la femme violentée, de prouver sa compétence, alors qu'elle n'a enfreint aucune loi. Nous croyons, tout comme l'intervenant précédent, que nous avons besoin de centres de visite supervisés, d'évaluateurs formés et de programmes pour les soutenir.

• 0935

Notre troisième recommandation en sous-entend une autre: la médiation n'est pas indiquée. Elle suppose une capacité égale à la négociation, ce qui est faux si l'un des partenaires utilise des menaces ou de la violence envers l'autre.

Nous recommandons quatrièmement que la garde partagée n'est pas indiquée pour les familles qui ont été le théâtre de violence conjugale. La garde partagée exige qu'un conjoint violenté soit en négociation et en communication constante avec son agresseur. Les femmes quittent une union pour mettre fin à la violence; la garde partagée fait en sorte qu'elle se poursuive.

Dans l'ensemble, nous considérons qu'il faut se préoccuper avant tout d'assurer la sécurité des enfants témoins et victimes de violence familiale, et celle du conjoint violenté, et en faire le facteur décisif de tout jugement en matière de garde et de droit de visite. Cela contribuerait énormément à la clarification des questions en cause et à donner aux enfants le message double que la société s'intéresse à eux et que la violence n'est jamais une solution adéquate. Nous ferions un grand pas vers la reconnaissance des besoins de ce groupe particulièrement vulnérable, et nous pourrions mettre fin au cycle infernal des comportements violents transmis d'une génération à l'autre.

Nous vous remettrons aussi un document d'information.

La coprésidente (sénatrice Landon Pearson): Merci.

Sénatrice Cohen.

La sénatrice Erminie J. Cohen (Saint John, PC): Merci.

J'ai deux questions. La première s'adresse à M. Beck.

Vous nous avez présenté un exposé très utopique. Votre programme est-il en vigueur ou est-il en préparation? Je n'ai pas bien compris.

M. Vernon Beck: On élabore actuellement les procédures. Nous en sommes même arrivés à l'étape de l'élaboration des manuels de formation à l'intention des coordonnateurs de parents. Nous savons que des programmes similaires existent dans certains États américains, où on parle d'«arbitres des parents»—on y réfère de différentes façons—qui travaillent selon les mêmes principes.

D'autres évaluateurs de notre groupe vous diront la même chose: dès qu'un évaluateur s'immisce entre deux parents, le conflit se résorbe en grande partie, et les parents se comportent mieux. C'est ce qui est souhaitable pendant une certaine période, jusqu'à ce que leurs émotions se calment et qu'ils puissent acquérir les compétences parentales nécessaires à la coopération.

La sénatrice Erminie Cohen: Pourriez-vous décrire brièvement le concept de la probation? Il m'a semblé intéressant.

M. Vernon Beck: Le concept repose sur le principe suivant: quand les parents se séparent, ils assurent en quelque sorte la garde partagée. Ils sont tous deux parents. Nous savons tous que, durant la période qui précède une séparation, les parties, et en règle générale celui qui cherche à tirer profit de la situation [...] il y a de fausses accusations. Nous savons que cette pratique est très courante dans le système actuel. Nous savons qu'il y aura tentative de tromper les évaluateurs, la cour, tout le monde. On fait des accusations de violence, etc. Les adultes utilisent ces tactiques pour obtenir des avantages qui vont à l'encontre des intérêts des enfants.

Quand on met les parents sur un pied d'égalité, avant tout, ils conservent tous deux la garde, dans un sens, selon les mêmes conditions qui avaient cours avant la séparation, mais les coordonnateurs de parents viendront en aide à la famille. Après un certain temps, les fausses accusations sont retirées et la situation évolue, ce qui est impossible si l'affaire est portée devant les tribunaux.

La sénatrice Erminie Cohen: Merci.

J'aurais une autre question. Elle s'adresse au Dr Matthews.

Vous avez mentionné deux points importants à mes yeux. L'un concerne le retrait des mécanismes d'exécution et le processus d'escalade. Vous avez par ailleurs suggéré que les rôles parentaux conjoints devaient être traités avec souplesse et revus constamment, en fonction du développement des enfants.

Je crois qu'il s'agit d'éléments dont il faut discuter avant de poursuivre.

Dr Fred Matthews: J'ai parlé d'escalade parce que la séparation est une période difficile pour tout le monde. Les gens font nécessairement des erreurs. Pourquoi sortir les fusils et l'artillerie lourde—je déteste ces métaphores—, ou invoquer le pouvoir de l'État alors qu'il suffit parfois de rappeler aux parents que ce qui compte le plus est le bien-être des enfants?

• 0940

Je crois donc qu'il faut instaurer des punitions de plus en plus graves, qui peuvent aller jusqu'à l'examen automatique du plan de parentalité. De plus, comme je l'ai dit auparavant, le plan doit être axé sur le développement. Les familles et les enfants évoluent. Le processus doit inclure un mécanisme qui fait en sorte que le plan reste approprié au cours des années. Et, dans les situations où il y a de la violence familiale, où les conjoints sont braqués l'un contre l'autre et où des actes de violence sont perpétrés, je crois que la cause doit être traitée par le système de justice criminelle et non en médiation. Je donne mon appui à certains commentaires entendus aujourd'hui en ce sens.

Je ne sais pas exactement comment tous ces éléments s'imbriquent dans ces contextes particuliers.

La sénatrice Erminie Cohen: Merci, docteur.

La coprésidente (sénatrice Landon Pearson): Merci.

Sénatrice Cools.

La sénatrice Anne C. Cools (Toronto-Centre, Lib.): Merci, madame la présidente. J'aimerais remercier tous les témoins.

Ma deuxième question s'adressera au Dr Matthews, qui a fait des recherches poussées auprès des jeunes. Pouvez-vous nous parler de vos travaux? Vous pourrez y réfléchir pendant que je pose ma première question.

Le témoin à l'extrême droite a suggéré en gros que la violence familiale, et la violence en général, devraient constituer un facteur définitoire du jugement de garde et de droit de visite. Je croyais que tous ces éléments étaient déjà considérés. J'aimerais demander au témoin quel est le cadre théorique et conceptuel qui sous-tend ses affirmations.

Je vais vous expliquer pourquoi. La Loi sur le divorce n'est pas un instrument des codes pénaux, et vous suggérez en fait qu'elle le devienne. Elle relèverait du régime de loi que nous décririons, en termes familiers, comme étant habilitant plutôt que punitif. Je trouve cela assez extraordinaire parce que nous assisterions à un renversement des systèmes et des concepts qui sont à la base des lois depuis cent ans.

Pouvez-vous répondre à ma question?

Mme Sylvia Pivko (directrice exécutive, Family Court Clinic, Community Coalition for Custody and Access): Je ne crois pas que le cadre théorique soit celui auquel nous faisons référence. Il est important de comprendre—et je sais que nous parlons d'une minorité—qu'il est nécessaire de chercher des solutions à ces problèmes.

Bien sûr, il ne faut pas utiliser et mettre en exécution de cette façon une loi habilitante. Il faut plutôt essayer de trouver des solutions de rechange.

Mme Rita Benson: Je voudrais aussi répondre à la question. Je ne prétends pas qu'il faille punir davantage les hommes violents. Ce n'est pas mon objectif. Ce qui m'intéresse, c'est que les femmes et les enfants sont, en raison des décisions qui sont rendues en matière de garde et de droit de visite, placés dans des situations très dangereuses et insoutenables. D'une certaine façon, nous ne pouvons ignorer que les lois que nous votons et que le traitement que nous donnons à ces problèmes sont courants dans notre culture et notre société. Quand les lois sont élaborées... Si la médiation est imposée dans tous les cas, nous mettons une bonne partie de la population en danger.

J'aimerais que vous accordiez de l'attention aux besoins de ces gens quand vous rédigez les lois, et que vous considériez ces questions.

La sénatrice Anne Cools: Non, je peux vous assurer que chaque membre de ce comité s'intéresse au bien-être des enfants de ce pays. Je voulais simplement souligner que la Loi sur le divorce concerne en grande partie les procédures civiles, alors que les codes pénaux concernent surtout les procédures criminelles. Les normes de preuve sont très différentes, et la Loi sur le divorce, après tout, permet tout simplement aux gens de divorcer.

Bon. J'aimerais maintenant passer au Dr Matthews.

• 0945

Docteur Matthews, puisque vous avez mené des recherches poussées sur ce que je considère comme étant les conséquences sociales sur les enfants du divorce et de l'éclatement des familles, particulièrement sur les comportements agressifs et les difficultés de comportement des enfants, j'aimerais que vous—je sais que le temps est compté—partagiez certains résultats de cette recherche avec nous. Le comité pourrait ainsi bénéficier de votre excellent travail.

Dr Fred Matthews: Une grande partie de ma recherche ne porte pas précisément sur la garde et le droit de visite des enfants, mais elle porte en effet sur les conséquences de ce que j'appelle l'inefficacité ou les lacunes de la parentalité. Je pourrai déposer une copie de la recherche auprès du comité afin de garder du temps pour les questions.

Il ne fait aucun doute que les enfants souffrent quand il y a de la violence dans leur famille, qu'ils sont témoins de violence entre les parents ou qu'ils sont victimes de châtiments corporels ou de formes explicites de violence et de négligence.

Un facteur en particulier teinte tous les efforts que je fais dans ce domaine: c'est la décision que nous avons prise en tant que société de ne pas donner de soutien, de ressources ni d'aide aux familles afin qu'elles soient en mesure d'élever des enfants tout à fait fonctionnels, en santé. On pourrait entre autres enseigner aux parents de meilleures méthodes de discipline et de correction du comportement qui ne font pas appel à la violence. Nos institutions, beaucoup de spécialistes, quelques-unes de nos politiques sociales, certaines lois, reflètent encore des points de vue désuets sur les relations familiales et les relations entre les adultes et les enfants. Sous plusieurs aspects, elles contribuent à perpétuer des modèles très dysfonctionnels de relations et de communication.

J'implore donc notre société d'allouer les ressources aux intervenants—les parents, les écoles, les institutions—qui pourront les utiliser à bon escient pour élever les enfants de la meilleure manière possible, pour aider les familles du divorce et de la séparation, aux prises avec des conflits entourant la garde et le droit de visite, et des rôles parentaux non définis.

La sénatrice Anne Cools: Merci.

La coprésidente (sénatrice Landon Pearson): Merci beaucoup.

Monsieur Forseth.

M. Paul Forseth (New Westminster—Coquitlam—Burnaby, Réf.): Merci.

On a mentionné à quelques reprises ce matin que la médiation n'était pas appropriée dans diverses circonstances. Vous avez fait des commentaires à ce sujet, mais j'aimerais savoir ce que vous proposez comme solution de rechange dans les cas conflictuels, difficiles. Si la médiation n'est pas appropriée, que faut-il faire alors? Quel système faut-il mettre en place?

M. Keith Marlowe (membre, Community Coalition for Custody and Access): C'est une très bonne question, parce que si nous abolissons quelque chose, il faut le remplacer par des mesures qui donnent de l'espoir aux enfants et aux parents. Dans notre bureau et notre communauté, habituellement, les personnes sont séparées au début, et on travaille individuellement avec chacune. En effet, jusqu'à un certain point, s'ils ont de l'aide, beaucoup d'hommes peuvent assumer la responsabilité de leur comportement. Ils peuvent comprendre les conséquences de leur comportement sur leurs enfants et, après un certain temps et avec l'aide reçue, ils sont à même de faire de meilleurs choix quant à la façon d'exercer leur rôle parental et les conflits peuvent être atténués.

Depuis quinze ans que j'anime des groupes d'hommes, j'ai constaté beaucoup d'amélioration dans leur efficacité: les hommes prennent mieux leurs responsabilités, en général, que voilà dix ans. Je crois donc que, si on offre le soutien voulu, nous pourrons mieux aider les parents à collaborer dans le meilleur intérêt de leurs enfants.

M. Paul Forseth: Vous suggérez donc de séparer les parents en conflit, mais que des intervenants travaillent avec eux. L'un des services de médiation dont nous avons parlé est la «navette diplomatique»; même si les parents sont séparés, une personne travaille avec les deux afin de résoudre les conflits.

L'un des services de soutien dont vous avez parlé sont les groupes d'hommes, et votre exposé suppose que ce sont les hommes qui sont à la source des problèmes en majeure partie, que ce sont eux les agresseurs. Je suis sûr que vous reconnaissez le fait que certaines femmes et mères commettent aussi des agressions et des actes de violence, et que nous devons mettre en place des mesures sociales complexes afin d'aider les enfants. Nous devons aussi contrer ces forces, qu'elles soient féminines ou masculines.

• 0950

M. Keith Marlowe: Je suis d'accord et, pour ce qui est des mesures mises de l'avant par notre bureau, du fait de leur petit nombre, nous pouvons rencontrer les femmes individuellement, certainement... On pourrait employer l'expression «à mesure que le filet s'agrandit»; nous offrons de plus en plus de soutien aux familles conflictuelles, et il n'est pas impossible de mettre sur pied des groupes similaires à l'intention des femmes. Actuellement, elles ne sont pas assez nombreuses. Mais nous n'en reconnaissons pas moins l'existence de ce phénomène.

Mme Rita Benson: Je crois aussi que, plutôt que la médiation, dans le cas de violence contre une femme et d'accusations de violence, des évaluateurs très bien formés devraient êtres consultés par la cour. Ceux-ci peuvent passer du temps avec ces familles et faire une évaluation juste afin que le jugement s'appuie sur des faits réels.

Nous avons essayé la navette diplomatique pour des cas de violence envers des femmes, mais l'expérience n'a pas été concluante. La difficulté principale est l'inégalité de pouvoir. Que les personnes soient dans des pièces séparées ou qu'on les rencontre en alternance, la femme a toujours peur que, si elle ne répond pas à ses demandes, il la poursuivra à l'extérieur et qu'il l'agressera ou qu'il trouvera un autre moyen de la punir. Il est clair que les règles du jeu ne sont pas les mêmes. En fait, il n'y a pas de place pour la négociation.

M. Paul Forseth: Dans ces circonstances, quelle solution proposez-vous?

Mme Rita Benson: Je suggère qu'une évaluation soit effectuée afin de faire le portrait exact de la situation. Évidemment, si des accusations criminelles ont été portées, elles font partie de l'évaluation. L'évaluation comprendrait les actes violents antérieurs, le comportement violent courant, et une évaluation des risques d'actes éventuels de violence...

M. Paul Forseth: Après que cette évaluation très sophistiquée a démontré que cet homme est un manipulateur contrôlant, ayant recours à des moyens très subtils, qui n'hésitera pas à utiliser toutes sortes de moyens détournés, et que la femme a vraiment peur, qu'arrive-t-il?

Mme Rita Benson: Je suggère que la garde soit accordée à la femme et que l'homme, en participant à des groupes ou par une autre méthode supervisée, puisse obtenir un droit de visite supervisée, s'il change son comportement. Il pourra voir ses enfants.

Il y a une exception toutefois: quand il y a eu un acte spécialement... comme une tentative de meurtre dont les enfants ont été témoins. Dans ces circonstances, même les visites supervisées ne sont peut-être pas indiquées.

Mais en règle générale, je suggère d'autoriser les visites supervisées et de donner à l'homme l'occasion de gagner ses galons en changeant son comportement. Une deuxième évaluation sera faite après que l'homme aura démontré son bon vouloir.

M. Paul Forseth: Vous prétendez donc qu'il faut interdire complètement le droit de visite dans les cas très extrêmes où l'homme a de graves problèmes de comportement. Nous parlons de tentative de meurtre et autres actes graves.

Mme Rita Benson: Oui, c'est ce que mon expérience me dicte. Mais je recommande des visites supervisées dans les cas où l'homme a commis des voies de fait ou a violé sa partenaire, en lui donnant la chance d'avoir droit à des visites plus fréquentes s'il démontre un comportement correct envers sa partenaire et ses enfants.

M. Paul Forseth: Et cela serait...

La coprésidente (sénatrice Landon Pearson): Monsieur Forseth, vos cinq minutes sont écoulées.

M. Paul Forseth: D'accord.

La coprésidente (sénatrice Landon Pearson): Monsieur Mancini.

M. Peter Mancini (Sydney—Victoria, NPD): Merci. J'aimerais revenir sur ce sujet parce que je crois que c'est le noeud du problème et il faut vraiment trouver une solution.

La Dre Sudermann, je crois, a indiqué que la garde partagée ne doit pas être accordée quand des actes violents ont été commis par le passé, et les trois intervenants de l'autre groupe ont dit que, s'il y a des accusations de violence, il faut en tenir compte pour émettre un jugement relatif à la garde et au droit de visite. Quand on établit qu'une personne a un passé violent, faut-il qu'il y ait absolument un dossier criminel en ce sens, ou peut-on se fier aux accusations portées?

• 0955

Il a été dit devant ce comité que ce qui arrive dans ces situations très chargées est que les accusations de violence sont utilisées pour obtenir la garde. Il s'ensuit des contre-accusations. Elle prétend qu'il est violent. Il prétend qu'elle est alcoolique. Elle prétend que, non seulement est-il violent, mais qu'il est de plus un prédateur sexuel. Il prétend que, non seulement est-elle alcoolique, mais qu'elle consomme aussi de la drogue. Il y a escalade d'accusations dans cette guerre de pouvoir.

Je crois donc qu'il est important pour nous de savoir si l'on peut établir les droits de garde et de visite sur la foi d'accusations de violence ou s'il faut attendre qu'un dossier criminel soit produit?

Le coprésident (M. Roger Gallaway (Sarnia—Lambton, Lib.)): Docteure Sudermann.

Dre Marlies Sudermann: Je peux répondre à cette question. Je crois que, dans ces situations, quand il y a condamnation au criminel... Mais, comme nous le savons tous, les tribunaux criminels bougent lentement et visent un but différent. Il faut dans des circonstances différentes tenir compte d'autres types de preuve.

Par exemple, supposons qu'on peut interroger des témoins des actes de violence posés afin d'établir les droits de garde et de visite. Dans d'autres cas, les enfants ont été témoins des actes de violence. Nous interrogeons alors ces derniers lors de l'évaluation en matière de garde et de droit de visite.

De plus, nous pouvons obtenir de l'information de sources connexes, qui ont une grande importance à mes yeux. Ainsi, on peut consulter un rapport de police, un rapport d'incident, un ensemble de rapports d'incident, ou un dossier contenant des renseignements recueillis par la police avant la condamnation criminelle.

Dans certains cas, les actes violents ont été documentés dans le passé, et la situation courante peut être réévaluée périodiquement. Je crois que ce serait vraiment important. Je veux aussi dire simplement que les fausses accusations de violence portées par des femmes ne sont pas si nombreuses. C'est un mythe.

M. Peter Mancini: D'accord.

Mme Rita Benson: J'abonde dans le même sens.

Je crois que, s'il y a eu condamnation criminelle, nous devons bien entendu en tenir compte. Malheureusement, beaucoup de femmes victimes de violence ne font pas appel à la justice. Ce système est très complexe et rebutant.

Tout comme l'autre témoin, j'estime qu'il existe d'autres types de preuves que l'évaluateur doit examiner. Il peut s'agir d'un dossier médical. De photographies. De témoignages d'adultes qui, quand ils étaient enfants, ont été témoins d'actes violents, ou d'enfants qui sont interrogés au cours de l'évaluation. On peut aussi examiner les dossiers des services sociaux ou de centres d'accueil. Il faut donc rassembler d'autres types de preuve en vue de l'évaluation.

M. Peter Mancini: D'accord. Je vais poursuivre sur ce sujet.

Premièrement, j'aimerais savoir si vous êtes d'accord avec l'affirmation suivante: il existe des cas où un parent ou un conjoint est effectivement violent envers son partenaire, mais n'en reste pas moins un bon parent. Ma question est la suivante: faut-il interdire le droit de visite, appelez-le comme vous voudrez, à ce parent?

Je ne critique pas vos propos. Je crois simplement qu'il faut en discuter.

Vous avez dit, je crois: «Jusqu'à ce que cet homme gagne de la crédibilité en participant à des séances de thérapie.» Je veux dire que, quand on interdit à une personne qui est un conjoint violent mais non un mauvais parent le droit de visite dès le début, ne traitons-nous pas l'enfant ou le droit de visite comme un système de points? Si la personne est un bon parent, nous devons prévoir des mesures en conséquence. La femme qui est terrifiée devrait peut-être bénéficier d'une plus grande protection de la police ou de la présence d'un médiateur quand l'homme vient chercher les enfants. Un grand-parent pourrait amener les enfants d'un endroit à l'autre.

Mais j'ai deux questions à ce sujet: faut-il interdire le droit de visite et instaurer un système de récompense? Deuxièmement, faut-il obliger les visites supervisées s'il n'y a pas eu d'actes de violence envers les enfants?

Dre Marlies Sudermann: Le rapport de recherche que je vous soumettrai avec notre exposé écrit aborde le lien entre l'aptitude à jouer son rôle parental et la non-violence envers la mère.

Un père violent envers sa femme est très susceptible de l'être envers ses enfants. Les recherches démontrent que, dans la grande majorité des cas, s'il y a violence contre le conjoint, il y a aussi violence physique et sexuelle envers les enfants. De toute façon, les enfants sont très traumatisés quand ils sont témoins d'actes de violence envers leur mère. Il faut se rendre à l'évidence: un homme qui est violent envers sa conjointe aura d'énormes difficultés à exercer son rôle parental.

• 1000

Les deux troubles sont liés. C'est ce que j'ai à répondre.

La coprésidente (sénatrice Landon Pearson): Merci.

Monsieur Mancini, avez-vous terminé?

M. Peter Mancini: Je poserai mes autres questions au prochain tour.

La coprésidente (sénatrice Landon Pearson): Cinq autres personnes ont des questions. En fait, le temps dont nous disposons est presque écoulé. Je m'en remets au comité. Les membres souhaitent-ils poursuivre sur ce thème et poser d'autres questions aux témoins?

La sénatrice Anne Cools: Oui. Puis-je faire une suggestion à la présidente?

Comme je l'ai déjà dit, nous pourrions accorder une minute ou plus au Dr Matthews pour qu'il nous lise une partie de sa recherche, sur...

La coprésidente (sénatrice Landon Pearson): Je suis désolée.

La sénatrice Anne Cools: Il ne l'a pas avec lui? Vous n'avez pas une liste? D'accord, merci.

La coprésidente (sénatrice Landon Pearson): Monsieur Mancini, rapidement. Nous entendrons ensuite le sénateur Jessiman.

M. Peter Mancini: Cette question s'adresse particulièrement au dernier groupe. Je m'interroge sur les fondements théoriques de tout ça. J'aimerais entendre vos commentaires à ce sujet.

Trois personnes sont ici, dont l'une travaille avec des hommes violents et d'autres personnes impliquées dans ce genre de situation. Dans ma communauté, toutes sortes d'organismes sont en place. Il y a la Elizabeth Fry Society, qui aide des femmes aux prises avec le système judiciaire; une maison de transition, un groupe pour les hommes. Travaillez-vous à l'intérieur de la même entité géographique? Existe-t-il un centre communautaire ouvert à tous? Sinon, pensez-vous qu'il devrait y en avoir un?

Mme Sylvia Pivko: Une partie de cette question rejoint le commentaire de la sénatrice Cools sur le rôle de la Loi sur le divorce. Il m'apparaît évident que, si nous travaillons chacun dans notre coin, avec des mandats limités, notre travail est beaucoup moins efficace.

C'est le problème que nous avons avec les services sociaux, et que nous tentons de régler en élargissant notre point de vue. Oui, une organisation précise ou une disposition légale peut s'attaquer à un problème précis, mais il faut toujours garder à l'esprit l'ensemble de la situation ou des problèmes.

Alors, pour répondre à votre question, je crois qu'il est très important de créer des outils et des lieux communautaires uniques où les familles peuvent obtenir du soutien, se rendre facilement, de sorte que les services ne soient pas éparpillés ou divisés.

M. Peter Mancini: Merci.

La coprésidente (sénatrice Landon Pearson): Sénateur Jessiman.

Le sénateur Duncan J. Jessiman (Manitoba, PC): Merci, madame la présidente.

Monsieur Beck, pouvez-vous nous parler un peu plus avant des services de résolution des conflits familiaux? Vous êtes le directeur du programme. Quelle est cette organisation, et où est-elle située?

M. Vernon Beck: Nous sommes un rassemblement de personnes du Grand Toronto. Nous couvrons de Durham jusqu'à Hamilton. Nous sommes tous parents, avant tout. Certains d'entre nous ont subi un divorce ou une séparation, alors nous avons vécu des expériences personnelles. D'autres sont tout simplement des citoyens qui s'inquiètent sincèrement de ce qui arrive aux familles qui vont en cour aujourd'hui.

Notre groupe a commencé à développer l'idée, et nous avons par la suite sollicité le soutien d'un bon nombre de professionnels. Je parle de médecins, de psychologues, de psychiatres. Certaines personnes ici connaissent beaucoup de membres de notre conseil consultatif, ou en ont entendu parler.

Le sénateur Duncan Jessiman: Combien de personnes participent? Combien de membres avez-vous? 50, 100?

M. Vernon Beck: Actuellement, environ 40 professionnels feront partie de notre conseil consultatif, soit des médecins, des psychologues, etc. Quand nous aurons terminé, le conseil devrait comprendre quinze membres, soit des membres de la communauté, des gens d'affaires de la région, des médecins, qui siégeront à un conseil distinct.

Le concept global sur lequel repose notre programme est qu'il sera applicable dans toutes les communautés, de sorte que chacune puisse posséder son propre centre, indépendant de celui des autres. Les groupes pourront ainsi travailler à partir de la réalité des membres de leur communauté. Chaque communauté devrait compter sur un groupe de personnes qui pourrait adapter à la réalité de sa communauté les concepts et les procédures que nous mettons au point.

Le sénateur Duncan Jessiman: D'où provient le financement?

• 1005

M. Vernon Beck: Actuellement, comme tous les autres, nous fonctionnons à partir de dons volontaires. La communauté est prête à faire cet effort si le gouvernement veut bien lui accorder un peu de soutien. Certaines personnes en ont marre et sont prêtes à participer très directement. Des avocats nous accordent du temps gratuitement parce qu'ils se rendent compte que des familles sont littéralement détruites dans notre pays actuellement.

Les gens veulent vraiment que les choses changent. Ils participent sans demander rien en échange.

Le sénateur Duncan Jessiman: Avez-vous sollicité l'aide des gouvernements provincial ou fédéral?

M. Vernon Beck: Nous avons pris contact avec certains tribunaux. En fait, je crois qu'au moins deux membres de ces tribunaux se sont jointes à notre conseil consultatif. Je ne connais pas leur nom. Je crois que l'une d'elles est une coordonnatrice du tribunal de la famille, alors que l'autre est une médiatrice d'un autre tribunal du Grand Toronto. Nous avons établi des liens avec des juges à la retraite, avec certaines associations d'avocats. L'intérêt démontré dépasse largement nos attentes.

Le vrai problème, à nos yeux, sont les barrières politiques. Nous mettons en place actuellement des processus de soutien communautaire. Des groupes confessionnels se sont joints à nous, et quatre ou cinq confessions religieuses nommeront des représentants...

Le sénateur Duncan Jessiman: Quand le projet a-t-il débuté?

M. Vernon Beck: Le concept a été établi voilà environ huit ou neuf mois, et il fait boule de neige depuis. Nous avons atteint une étape difficile parce que nous n'avons pas les fonds nécessaires pour assurer la gestion efficace et le contrôle d'un projet d'une telle envergure.

Je peux vous expliquer le type de barrières que nous rencontrons en Ontario. J'ai appelé le bureau du procureur général, où j'ai parlé à une personne qui travaille dans les hautes sphères, très près du procureur. Elle m'a dit simplement qu'elle n'était pas intéressée par mon projet parce que leur organisme pourrait faire la même chose.

J'ai été renversé. Nous avons mis sur pied un groupe communautaire qui a trouvé ses propres ressources, sans recevoir un sou du gouvernement, et on nous répond que des membres de la Fonction publique souhaitent protéger leur emploi et s'assurer que c'est leur façon de penser qu'il faut perpétuer.

Le sénateur Duncan Jessiman: Avez-vous appelé les députés locaux?

La coprésidente (sénatrice Landon Pearson): Sénateur Jessiman, vos cinq minutes sont épuisées.

Le sénateur Duncan Jessiman: Une autre question.

Qu'en est-il des députés locaux, du gouvernement fédéral? Je trouve vos idées très intéressantes.

M. Vernon Beck: Comme cela semble courant, il y a des ramifications politiques. Plusieurs députés ont démontré beaucoup d'intérêt, mais ils nous ont averti qu'il fallait respecter certaines étapes avant d'annoncer à tous ce qui se passe. Certaines personnes en effet s'opposent à toute forme d'engagement communautaire. Tous les projets qui menacent des emplois dans le domaine juridique suscitent de la résistance.

Le sénateur Duncan Jessiman: Dernière question. Allez-vous remettre un document écrit à notre comité?

M. Vernon Beck: Je crois que le comité recevra les documents officiels jusqu'à la fin de juin. J'espère que notre document de travail sera assez avancé d'ici là. Le document que j'ai présenté est une ébauche. Il contient même des notes manuscrites.

Le sénateur Duncan Jessiman: Quand vous aurez terminé la version finale, nous serons très heureux de la consulter.

Merci.

La coprésidente (sénatrice Landon Pearson): Sénatrice DeWare, à votre tour.

La sénatrice Mabel M. DeWare (Moncton, PC): J'ai deux questions. Premièrement, pourquoi accorde-t-on le droit de visite quand on a prouvé lors de la procédure de divorce que des actes violents avaient été perpétrés? Nous avons déjà eu droit à une réponse partielle.

Deuxièmement, pourquoi n'impose-t-on pas le traitement dans un centre en cas de comportement violent? Les compagnies peuvent envoyer leurs employés alcooliques chez Alcooliques Anonymes. Elles peuvent même menacer les employés de les mettre à pied s'ils n'y vont pas. C'est la même chose pour ceux qui prennent de la drogue. Est-ce que des centres de traitement existent pour les personnes violentes?

M. Keith Marlowe: On en voit de plus en plus. Comme je l'ai déjà dit, cette semaine 140 hommes participeront à notre programme. Dans certains cas, ces hommes paient la moitié des coûts. De tels traitements existent donc de plus en plus. C'est à l'étape du projet pilote actuellement en Ontario, mais le succès de ces groupes fera en sorte qu'ils deviendront un traitement obligatoire.

• 1010

Mme Rita Benson: J'aimerais ajouter, toutefois, qu'il faut se garder de penser qu'un programme de traitement de 20 semaines peut modifier un comportement violent. Le comportement change dans une certaine mesure, mais un comportement violent—et cela répondra aussi à votre question sur les hommes violents qui n'agressent pas leurs enfants—englobe plus que l'assaut physique.

La sénatrice Mabel DeWare: Oui.

Mme Rita Benson: Il existe de nombreux moyens détournés d'exercer une domination et du contrôle. Pour qu'un homme change vraiment... Nous mettons en place des programmes qui agissent en fait comme des pansements: ils ont un certain effet, mais il faut viser le long terme. Il faut que ces hommes reçoivent des traitements thérapeutiques très sérieux durant plusieurs années. Certains d'entre eux ont été victimes de violence quand ils étaient enfants. Nous faisons face à un cycle de violence...

La sénatrice Mabel DeWare: Oui, je sais cela.

Mme Rita Benson: ... et les programmes de traitement doivent aller en profondeur.

La sénatrice Mabel DeWare: Je ne parlais pas de programmes d'une semaine.

Mme Rita Benson: Je le sais. Les gens pensent que... Je tenais à dire qu'il faut envisager des programmes à long terme aussi bien que des programmes à court terme. Je suis d'accord avec vous.

La coprésidente (sénatrice Landon Pearson): Merci.

J'aimerais qu'on passe à une autre question. Docteure Bennett, rapidement, puis ce sera au tour de la sénatrice Cools.

Mme Carolyn Bennett (St. Paul's, Lib.): J'aimerais qu'on parle un peu plus du groupe d'hommes. Des recherches démontrent que certains groupes ne fonctionnent pas très bien, et l'on s'interroge sérieusement à savoir s'il faut s'attaquer uniquement au contrôle de l'agressivité...

Dans votre présentation, vous avez même dit qu'ils choisissaient d'être violents. Je crois que ce n'est pas toujours un choix. C'est parfois un réflexe, qui provient de leur passé de victime. Ces comportements ont des racines très lointaines. J'aimerais savoir si des recherches ont été faites pour savoir ce qui fonctionne et ce qui ne fonctionne pas.

Je trouve très grave que l'on étiquette les gens. Je peux dire que le rôle de parent est le plus difficile qu'il m'ait été donné de remplir. On cherche la perfection, alors que je suis sûre qu'il y a des situations où une personne arrive chez elle le soir après avoir pris un verre de trop et lance tout à coup un verre de jus ou commet un geste violent. Cette personne est marquée au fer rouge parce que cet événement isolé est constamment ramené.

Le sujet de l'évaluation me préoccupe. On nous dit qu'il existe différents niveaux d'évaluation et, en tant que médecin de famille... Dans le droit des assurances, on a recours à toutes sortes d'évaluations. Avant que l'on oblige quoi que ce soit, j'aimerais connaître les résultats des recherches, le degré de confiance envers les programmes en place, envers les mesures d'évaluation en place.

Si j'ai encore du temps, j'aimerais adresser une question au Dr Matthews relativement au syndrome d'aliénation des parents. Cela semble très grave parce que, une fois qu'une personne est étiquetée, je crois qu'on n'encourage pas vraiment les enfants à la voir. Qu'en est-il 20 ans plus tard? L'enfant a-t-il encore le même sentiment quant à l'absence de contact avec l'autre parent? Ou ma question est-elle stupide?

Dr Fred Matthews: Je peux répondre rapidement à la dernière question, et je m'en remets à vous pour la première.

Pour ce qui est de la recherche sur le syndrome d'aliénation, je crois qu'il faut être très clair sur un fait: il s'agit d'une science inexacte. Les sciences sociales sont inexactes. Même la recherche clinique n'est pas sûre à 100 p. 100.

De plus, nos conclusions sont encore très préliminaires. Je crois qu'il faudra tenter d'établir, dans tous les cas, un ordre de valeurs plus élevé—si nous faisons des erreurs, il faut choisir dès maintenant dans quel domaine nous les ferons. C'est une chose très difficile à admettre pour un chercheur en sciences sociales.

Pour tout ce qui a trait à la sécurité des personnes brutalisées ou victimes, qu'il s'agisse du conjoint ou des enfants, je privilégie toujours la vie des personnes et leur bien-être, jusqu'à ce qu'on ait le résultat des recherches après 20 ans. Mais dans plusieurs cas, nous n'avons pas ces résultats ou ils sont tellement prématurés qu'ils ne sont pas concluants. Je suis donc prêt à faire des sacrifices au bénéfice d'un élément qui se trouve au-dessus dans l'ordre des valeurs.

• 1015

Mme Sylvia Pivko: Si je peux proposer un début de réponse... Dans tous les cas, nous sommes confrontés à la fin de relations. Notre société ne donne pas assez de soutien au début des relations, et aucun d'entre nous ne peut s'attendre à trouver une solution juste à la fin du processus. Il faudrait que vous trouviez le moyen, au cours de vos délibérations et quand vous élaborerez vos recommandations, de déterminer les moyens qu'il faut mettre en place dans les communautés pour soutenir les parents au début de leur relation... Il y a déjà un mouvement en ce sens en Ontario, qui vise à accorder plus de fonds aux mécanismes de soutien prénatal et postnatal, etc.

Cette question n'est pas isolée des autres et—il semble que vous le sachiez déjà—il faut en être conscients. Nous ne pourrons pas trouver de solutions valables pour toutes les situations discutées. Merci.

La coprésidente (sénatrice Landon Pearson): Est-ce que je peux passer à une autre question, Carolyn? Le temps passe.

Mme Carolyn Bennett: Peut-être pourrait-on discuter des recherches sur les groupes de pères ou recevoir un document.

M. Keith Marlowe: Très rapidement, j'aimerais dire simplement que la chose la plus importante que j'ai apprise au cours des quinze dernières années où j'ai animé des groupes d'hommes est qu'ils constituent seulement une partie de la solution, et qu'il faut mettre en place des outils communautaires. La plupart des interlocuteurs vous l'ont dit, depuis M. Beck jusqu'à nous, les meilleurs projets sont communautaires. Ils permettent une coopération entre les divers services afin de répondre adéquatement aux besoins des familles.

La coprésidente (sénatrice Landon Pearson): Sénatrice Cools.

La sénatrice Anne Cools: Je cède mon tour à Paul.

M. Paul Forseth: J'aimerais qu'on récapitule parce que le temps fuit. Pouvez-vous énoncer brièvement les éléments qui devraient être inclus dans la Loi sur le divorce, et ceux qui devraient en être exclus?

M. Vernon Beck: Nous recommandons premièrement d'inclure au moins la présomption réfutable de garde conjointe et de droit de visite égal, parce que tant qu'il subsiste des inégalités de présomption, il y a toujours matière à conflits. C'est le plus important.

M. Paul Forseth: D'accord.

Dr Fred Matthews: C'est une question de principe à mes yeux, puisque je suis avocat. Il faut que les lois relatives aux rôles parentaux après une séparation ou un divorce accordent plus de pouvoir aux personnes qui n'en ont pas actuellement, telles que les enfants et les jeunes, de prendre les décisions qui les concernent personnellement. Sauf en cas de circonstances extraordinaires telles que la violence d'un conjoint, ou si un parent commet des actes de violence envers les enfants, nous devrions toujours envisager un plan de parentalité qui tient compte des autres membres de la famille et des deux parents. Dans la mesure du possible, le plan doit être évolutif, comme le sont les vraies familles, les vrais enfants, les vraies relations, et ne pas permettre les poursuites abusives, qui contribuent à perpétuer les préjudices causés aux enfants ou aux conjoints.

Dre Marlies Sudermann: J'ai déjà dit que la médiation ne devait pas être recommandée, et encore moins obligée. De plus, il ne faut pas insister sur la garde conjointe ni sur une présomption favorable en ce sens. J'aimerais aussi que la loi insiste davantage sur la nécessité d'évaluer les besoins et, dépendant de leur âge, sur les désirs des enfants. Je crois que la loi doit comporter des dispositions très claires à cet égard. Je ne suis pas avocate et je ne sais pas comment formuler...

M. Paul Forseth: Je comprends.

Dre Marlies Sudermann: ..., mais je m'en tiendrai à cela.

Mme Sylvia Pivko: J'aimerais que l'on change de vision et que, au lieu de parler de droits parentaux et de droits de possession des enfants, on accorde la préséance aux principes relatifs aux besoins et aux droits des enfants. Je crois qu'il faut voir l'ensemble de la situation, pas de façon unilatérale. On ne trouvera jamais la solution parfaite pour tous les problèmes, et chaque solution doit être souple.

Mme Rita Benson: Je vais me répéter. J'aimerais que l'on n'accorde pas la garde aux personnes qui ont été accusées de violence familiale, et que l'on prévoit des visites sous supervision quand un homme a été accusé, tout en lui imposant des traitements et d'autres options. Il faudrait peut-être aussi permettre aux hommes violents qui ne peuvent voir leurs enfants de participer à des groupes de parentalité. Il faut établir des processus d'évaluation efficaces, fondés sur des normes précises et exécutés par des évaluateurs formés. Enfin, je ne recommande pas la médiation ni la garde conjointe dans les cas de violence envers une femme.

• 1020

M. Keith Marlowe: J'aimerais qu'on adopte une loi saine sur la famille, stipulant des mesures de soutien aux parents à toutes les étapes du développement des enfants, afin qu'ils puissent optimiser leurs aptitudes parentales. Nos enfants le méritent bien.

La coprésidente (sénatrice Landon Pearson): Merci beaucoup.

Vos commentaires nous seront d'une extrême utilité. Nous avons dépassé le temps prévu, mais je tiens à vous remercier de votre participation. J'aimerais que la transition avec le prochain groupe se fasse aussi rapidement que possible.

• 1021




• 1024

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Nous accueillerons au cours de la deuxième heure des audiences de mercredi M. Stephen Hyde, du Non-Custodial parents of Durham; M. Bill Flores, du Children's Voice; et le révérend Dorian Baxter, du Canadians for Organizational and Personal Accountability. Il n'est pas encore parmi nous, mais il arrivera bientôt je crois. Il se cherche un stationnement.

Monsieur Hyde, si vous voulez bien commencer. Je dois vous avertir que nous sommes déjà en retard, et que vous avez chacun cinq minutes.

• 1025

M. Ted Greenfield (Non-Custodial Parents of Durham): Bonjour, monsieur le président. Stephen Hyde est à l'extérieur du pays, pour ses affaires personnelles.

Mon nom est Ted Greenfield; je suis président des communications du Non-Custodial Parents of Durham. J'aimerais tout d'abord préciser que j'ai entendu des chiffres qui ne sont pas corroborés. Beaucoup de gens semblent penser que 80 p. 100 des divorces se passent bien. Est-ce que le comité a déjà entendu ces chiffres? Eh bien, examinons ces 20 p. 100, disons 25 p. 100, pour arrondir.

Environ 400 000 divorces ont été prononcés au Canada. Cela signifie que 100 000 parents qui n'ont pas obtenu la garde des enfants sont malheureux. Avec une moyenne de deux enfants par famille, on arrive à 200 000 enfants qui souffrent en raison des tensions et des disputes qui surviennent lors de la dissolution d'un mariage. Ce chiffre est énorme. Même si nous nous en tenons à 20 ou 25 p. 100, nous parlons d'un très grand nombre d'enfant.

Nous soumettons aujourd'hui seize recommandations. Je m'attarderai aux éléments importants. Nous considérons que quatre d'entre elles sont essentielles. La première est la parentalité partagée, issue d'un jugement stipulant que les deux parents ont la responsabilité égale du soutien physique, financier et émotionnel des enfants.

Actuellement, 95 p. 100 des représentants d'un sexe sont considérés en vertu de préjugés et subissent des préjudices quand ils se présentent devant un tribunal. La statistique est peut-être descendue à 94 p. 100 aujourd'hui, mais il s'agit d'un préjudice causé par le système juridique. Nous voulons que ce préjudice soit aboli quand nous allons en cour, et que l'on adopte une règle relative au partage des rôles parentaux en cas de divorce ou de séparation. Les deux parents ont des responsabilités égales. Les jugements n'ordonneront plus à l'un des conjoints de simplement assurer le soutien financier, et de se faire refuser le droit de visite ou la garde. J'ai obtenu la garde conjointe, mais je n'ai pas vu mes enfants pendant dix mois consécutifs. Il faut ordonner la garde conjointe dès le début de sorte à éviter que toutes sortes de jeux subtils ne se jouent tout au long des procédures.

Ces parents qui doivent dire adieu à leurs droits de garde et de visite, ou qui sont jugés inaptes par la cour, doivent tout de même remplir leurs obligations financières. Si un parent est jugé inapte, il ne doit pas pour autant subvenir à la totalité des besoins.

Il faut ensuite inclure une clause relative aux grands-parents. Trois mois après le début des activités de Non-Custodial Parents of Durham, nous avons uni nos efforts à ceux d'un groupe de grands-parents. Leurs droits doivent aussi être reconnus pour le bien des enfants. Nous recommandons que des séances de counselling soient prévues où assisteraient les trois parties en cause dans une séparation ou un divorce. Nous laissons le soin aux professionnels de déterminer le nombre minimal, mais les coûts des séances seraient partagés par les parents.

Je vais revenir en arrière un peu pour vous raconter ce qui m'est arrivé une semaine environ après ma première réunion de Non-Custodial Parents of Durham. La réunion avait lieu dans la région de Toronto et nous sommes partis trois hommes dans la voiture, moi-même—Ted Greenfield—Tim Eye et Stephen Hyde. Nous avons commencé à discuter de nos expériences avec le système judiciaire. Nous avions ensemble dépensé environ 100 000 $ de frais d'avocats durant une très courte période. Nous avons calculé la perte financière—de l'argent dont nos enfants ne pourront profiter—à 500 000 $ environ pour nous trois. Je n'ai pas d'argent pour payer les frais universitaires de ma fille, et je devrai me débattre bientôt pour un problème mineur de pension alimentaire.

Le processus accusatoire sur lequel repose en grande partie le système actuel est autosuffisant. Quelqu'un veut régler une question? Aucun problème, on va en cour. Les frais s'accumulent, que l'on paie ou que l'on bénéficie de l'aide juridique. Nous gaspillons de l'argent dans les tribunaux de la famille, qui ne sert pas à nourrir, à vêtir ou à éduquer nos enfants.

Nous en arrivons au problème de la violation des ordonnances de droit de visite. J'ai souvent entendu parler de personnes qui voulaient faire incarcérer leur conjoint. Nous avons eu à traiter des causes mineures où c'est arrivé. Je ne vais pas jusqu'à souhaiter qu'on incarcère des parents. Mais je serais en faveur du retrait de droit de visite. Si une personne interdit à l'autre parent de voir ses enfants ou si elle enfreint le processus, elle perd son droit de visite.

• 1030

Il y a par ailleurs la question des secondes épouses. Je sais que nous avons entendu de nombreux propos qui défendent les droits des femmes et allèguent que les actes violents sont portés uniquement contre un sexe.

Je me suis remarié. Les droits de ma seconde épouse n'ont pas été respectés au tribunal de la famille. J'ai pu faire valoir un jugement prémarital rédigé par un avocat stipulant que ses affaires ne seraient jamais mêlées aux miennes. Le juge du tribunal de la famille a dit que ce document légal ne valait rien... Dans l'une des ordonnances à mon endroit, il stipule que le tiers du salaire de ma seconde épouse soit considéré afin que mes versements de pension alimentaire soient augmentés, parce que j'avais pris une mauvaise décision durant la première année qui a suivi ma séparation. J'avais changé d'emploi et, au lieu de gagner 80 000 $ par année, j'en gagne 40 000 $. En fait, ma deuxième femme finance la première par le biais de versements de pension alimentaire.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Abrégez, s'il vous plaît. Vous avez écoulé vos cinq minutes. Je vous donne une autre minute, mais c'est tout.

M. Ted Greenfield: Merci. Je vais dresser les conclusions.

La réduction de la tension lors de conflits sera bénéfique pour tous. Si on considère la réduction des coûts, l'argent perdu dans les cours ou la pression sur le régime d'aide juridique, on peut réduire ces coûts en adoptant une attitude positive.

Ma fille va à l'Université Trent. Elle habite hors de la ville, pas chez sa mère, tel que l'entente originale le stipule. Elle a demandé un prêt RAFEO, le régime gouvernemental d'aide aux étudiants en Ontario, pour couvrir la totalité de ses frais de scolarité. Elle a demandé à sa mère de lui donner les versements de la pension alimentaire pour payer son logement à l'extérieur et ses frais universitaires. On m'a dit, et je suis porté à le croire, que sa mère lui avait répondu que si elle demandait l'argent, elle devrait sortir de la maison immédiatement. Qu'elle avait suffisamment de chance d'aller à l'université. Il faut mettre en oeuvre un mécanisme qui permet à nos enfants de toucher la pension alimentaire qui est versée pour eux quand ils vont au collège ou à l'université.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Je suis désolé, mais je dois vous interrompre, monsieur Greenfield. Je sais que votre exposé écrit a été déposé, alors on peut le lire.

M. Ted Greenfield: Merci.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Monsieur Flores.

M. G. Bill Flores (Children's Voice): Bonjour, mesdames et messieurs.

Mon nom est Bill Flores. Je suis président de Children's Voice, un organisme de défense des droits des enfants en fonction depuis cinq ans. Nous avons participé à l'examen qu'ont fait les Nations Unies de la mise en oeuvre de la charte des droits des enfants au Canada. Nous avons fait des présentations orales et écrites pour tous les dossiers provinciaux et fédéraux traitant des droits des enfants. Aujourd'hui, nous soumettons un document de 30 pages. J'insiste sur le fait que chaque mot de ce document constitue une déclaration sous serment. J'ai remis une copie supplémentaire à la sénatrice Anne Cools afin qu'elle la mette en sécurité.

Ce document passe en revue différentes sources de conflits dans le processus de séparation et de divorce, en plus de faire 24 références à des études sociologiques qui privilégient la parentalité égale plutôt que la parentalité exclusive. On y rapporte aussi des résultats de recherches qui démontrent que le risque de violence envers les enfants est plus élevé dans le modèle de parentalité exclusive, surtout quand les enfants sont confiés à la mère. Nous avons émis 32 recommandations et des idées qui permettront leur mise en oeuvre.

Nous sommes très contents d'être ici aujourd'hui, mais nous considérons que le processus n'est pas démocratique. En effet, les lobbies professionnels du ministère de la Condition féminine ont mis à profit des millions de dollars, du temps et des ressources humaines (conseillers juridiques et chercheurs) afin d'obtenir un consensus de la part des groupes de femmes.

Nous sommes ici aujourd'hui tout comme nous avions participé en 1993 aux consultations du même ordre faites par trois députés auprès de la population du pays. À ce moment, ils avaient élaboré un questionnaire de 25 pages, dont 24 portaient sur les pensions alimentaires. Une seule page comportait deux questions sur le droit de visite et la garde. Je cite cet exemple pour illustrer les partis pris du gouvernement.

Les histoires que j'ai entendues ici ne sont pas très différentes de celles que j'avais entendues en 1993. Par exemple, la cause Edgar Ross c. Ella Ross, dossier ND 1846 29-91Q de la Division générale de la Cour de l'Ontario, dont a fait état le représentant de D.A.D.S. Canada lundi dernier, contient de nombreux exemples de corruption par le demandeur, les autorités. L'histoire se répète, même si les noms changent.

• 1035

J'entends très souvent les avocats et le public parler de discrimination. Je ne suis pas surpris d'entendre ce mot. Il semble qu'on ait de la difficulté avec ce mot, et il n'est pas surprenant qu'un gouvernement mette de l'avant des politiques discriminatoires à l'égard d'un sexe, illégalement, même si cette pratique contrevient à l'article 28 de la Charte des droits et des libertés. La corruption morale est pratique courante parmi les autorités, alors pourquoi en serait-il autrement au sein des institutions, telles que le tribunal de la famille et la Société d'aide à l'enfance, et parmi les travailleurs sociaux et les psychologues?

Permettez-moi de vous dire ce qui a changé depuis 1993. Je fais les déclarations suivantes sous serment.

Depuis 1993, j'ai vu des dizaines, voire des centaines de parents qui n'ont pas la garde disparaître de la vie de leurs enfants. Certains ont disparu dans la communauté, alors que d'autres sont partis à l'étranger.

Je suis d'accord avec le professeur Bala, qui a témoigné devant ce comité le 25 février dernier. L'un des problèmes est l'absence des pères. Ils partent. Il faut les pourchasser.

J'ai rencontré de nombreux pères qui essayaient de garder un lien avec leurs enfants. Ils ont dû abandonner après des mois de frustration. Il s'agissait de bons pères, de pères aimants. Ils demandaient seulement à faire partie de la vie de leurs enfants. Quelques esprits dérangés qui cherchent à détruire la cellule familiale et qui imposent cette suprématie complètement inadéquate d'un sexe sur l'autre sont coupables de ces crimes. Il faudrait plus que des excuses.

Cela n'aurait pas suffi en 1993 non plus, parce qu'il s'agit d'une situation impardonnable. En tant que gouvernement, vous avez eu la chance de la réparer, mais vous avez choisi de ne pas le faire. L'enfance de mes enfants, tout comme celle de bien d'autres, leur est volée. Mais le Canada a tout de même conservé sa réputation de bienveillance envers eux.

L'orientation que nous préconisons exige une solution globale à tous les problèmes relatifs au droit de la famille, pas seulement aux problèmes de droit de visite et de garde. Il a été démontré que les solutions individuelles ne fonctionnent pas.

Le principe sous-jacent de notre orientation est que les familles éprouvées par un divorce ont besoin d'aide; elles n'ont pas besoin qu'on les vole pour rendre publics les gestes posés dans leur vie ou de subir du stress et du harcèlement, comme c'est le cas dans le système actuel.

Nous recommandons entre autres des modifications précises et aisément applicables à la Loi sur le divorce; elles contribueront à diminuer la souffrance des enfants, au moyen de programmes de réunification enfant-parent, etc. Nous recommandons aussi que vous fassiez des consultations et des négociations directes auprès de groupes connus de défense des droits des enfants et des pères. Nous voulons faciliter la communication.

Nous faisons ces recommandations parce que vous ne connaissez pas tous les éléments de la situation. Vous entendez beaucoup de répétitions, mais beaucoup de détails sont omis.

Par exemple, à Pâques prochain, un congé très spécial pour beaucoup d'entre nous, ce ne sont pas tous les enfants de l'Ontario, et probablement du pays entier, qui pourront passer du temps avec leur parent qui n'a pas la garde. Cela est dû au fait que tous les centres qui font appel à des bénévoles seront fermés, et seront fermés durant tous les autres congés obligatoires, y compris Noël.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Monsieur Flores, votre temps est écoulé. Nous avons votre rapport en main, ou nous le recevrons, et je crois qu'il faudra terminer. Vous avez dépassé votre limite de temps.

M. Bill Flores: J'aimerais que vous transmettiez le message suivant aux membres du gouvernement: arrêtez de faire de la politique sur le dos de nos enfants et de leur voler leur âme; c'est leur bien-être qui en souffre.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Merci.

Le révérend Baxter est arrivé—il cherchait un stationnement, je crois.

Le révérend Dorian Baxter (National Association for Public and Private Accountability): Oui. Je m'excuse auprès des membres du comité. J'ai eu beaucoup de difficulté à me rendre à cause de la circulation, et j'ai dû trouver un stationnement... Merci d'avoir été si patients.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Bienvenue au comité. Nous sommes un peu en retard et nous aimerions que vous vous limitiez à cinq minutes, si possible.

Le révérend Dorian Baxter: Je ferai de mon mieux.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Merci.

Le révérend Dorian Baxter: Chers membres du Comité mixte spécial sur la garde et le droit de visite des enfants, j'aimerais tout d'abord exprimer ma gratitude, au nom de la National Association for Public and Private Accountability, de nous accorder le privilège d'être entendus ce matin.

• 1040

Je veux souligner rapidement que, bien que je sois ici à titre d'éducateur du système scolaire ontarien et de prêtre de l'Église anglicane du Canada, de même qu'à titre de président de la National Association for Public and Private Accountability, je veux tout d'abord m'adresser à vous au nom de ceux qui en sont incapables. Je parle des enfants de notre merveilleux pays.

Vous devez tout d'abord savoir que moi et probablement—je n'exagère pas—des centaines de milliers de Canadiens ne voulons plus nous tourner les pouces, impuissants, en contemplant la souffrance émotionnelle et mentale qu'infligent aux enfants innocents de notre grand pays les lois sur la garde et le droit de visite. Assez, c'est assez.

Bien que je sois très content que ce comité mixte spécial sur la garde et le droit de visite des enfants ait été formé, je crois qu'il est absolument essentiel, plus que tout ce que je dirai aujourd'hui, que ce comité soit habilité à mettre en oeuvre les changements nécessaires, ou cet exercice aura été absolument inutile.

J'aimerais aussi dire rapidement que mes commentaires et mes préoccupations concernant la garde et le droit de visite des enfants sont le résultat d'une expérience personnelle dévastatrice. Je suis sûr que la bataille que j'ai livrée eu égard à la garde est bien connue dans tout le pays, alors je n'entrerai pas dans les détails. Je dirai simplement que la poursuite contre Marion vanden Boomen et la Société d'aide à l'enfance de Durham a créé un précédent et constitue une première juridique.

Le prix à payer, mesdames et messieurs, est beaucoup trop élevé pour quelque Canadien que ce soit—homme, femme ou enfant. J'aimerais vous dire que le juge Somers et, par la suite, la Cour d'appel de l'Ontario, ont jugé Marion vanden Boomen, de la Société d'aide à l'enfance de Durham, coupable de grossière négligence, de grossière incompétence, de poursuite abusive et de chantage auprès de votre serviteur. Malgré tout, cette femme n'a même pas reçu une réprimande et continue de travailler pour la Société d'aide à l'enfance de l'Ontario, dans la plus complète impunité et sans avoir subi aucune conséquence.

La responsabilisation est essentielle, et c'est pourquoi nous avons créé la National Association for Public and Private Accountability, dont je suis le responsable. Il faut prévoir des pénalités claires pour mettre fin à ces actes destructeurs et coûteux. Le cauchemar que j'ai enduré m'a personnellement coûté quelque 400 000 $. Je croule présentement sous une dette de plus de 250 000 $, que notre système judiciaire a permise parce que j'ai dû déclarer faillite. Je dois rembourser cette dette, même si j'en ai pour le reste de mes jours, mais encore plus, le coût émotif pour mes filles, moi-même, mes amis et la famille est incommensurable.

Tout cela est dû au fait que le système accusatoire auquel on a recours dans les causes de garde et de droit de visite des enfants donne toute la place à une arme de choix, soit les fausses allégations de violence sexuelle et autre. Je suis porté à croire que les actes de Marion vanden Boomen et les procédures intentées par la Société d'aide à l'enfance de Durham contre moi, en vue de camoufler leurs erreurs, a coûté au gouvernement de l'Ontario, et donc aux contribuables, la somme faramineuse de 1,5 à 2 millions de dollars.

Ma première recommandation au comité est que l'on cesse de payer les services de médiation pour la forme en cas de litiges conjugaux et liés à la garde des enfants. Le système accusatoire est archaïque, injuste, et extrêmement contre-productif. Il permet l'un des crimes les plus graves et les plus agressifs commis devant les tribunaux aujourd'hui, soit le parjure. Loin de répondre aux intérêts des enfants et de la famille, l'obligation de trouver un perdant et un gagnant rendent ce système très destructeur.

Il faut mettre fin à cette folie. Je recommande et je demande instamment au comité d'obliger la médiation lors de conflits entourant la garde et le droit de visite des enfants, en vertu de lignes directrices justes et équitables telles que celles mises de l'avant par M. Vernon Beck. Ces lignes directrices placent vraiment au-dessus de tout les intérêts des enfants dans la famille.

• 1045

Deuxièmement, la garde partagée doit être d'office, car elle place les besoins et les droits des enfants de maintenir une relation affectueuse avec les deux parents bien au-dessus du besoin d'un parent de détruire l'autre.

Troisièmement, nous devons établir dans ce pays—NAPPA le fait actuellement—un conseil d'examen civil de la protection et du bien-être de la jeunesse. De tels conseils pourraient être mis sur pied dans toutes les grandes villes du Canada; ils contrôleraient et équilibreraient étroitement les actes, ou l'absence d'actes, de la part des prestataires de services sociaux publics. Cette mesure permettrait au gouvernement d'économiser des millions de dollars.

Notre quatrième recommandation a trait au recours à une méthode de résolution des conflits sans égard au sexe dans tous les litiges entourant la garde et le droit de visite des enfants qui pointent leur vilain nez dans notre contrée de justice.

La cinquième recommandation concerne le retour au processus démocratique. Assez de cette approche caractéristique du droit français lorsque des allégations haineuses sont faites. Pourquoi, pour tous les autres types d'allégations, considère-t-on que la personne est innocente jusqu'à preuve du contraire, alors que les allégations pour agression sexuelle envers un enfant entraînent une culpabilité automatique? J'ai lutté, mais certaines personnes refusent encore de me parler.

Certains évêques, parmi lesquels beaucoup se sont rétractés, ont même témoigné contre moi. L'évêque Taylor Pryce, au nom de la Société d'aide à l'enfance... Quelle insulte pour un prêtre de l'Église de Dieu. J'ai dû me battre contre des groupes véhéments qui voulaient me castrer, me tuer, parce qu'ils me croyaient coupables. Il n'y a pas de fumée sans feu... Cela doit cesser, mesdames et messieurs.

Sixièmement, il faut donner des licences à ces travailleurs sociaux qui ont tant de pouvoir.

Septièmement, le parjure doit entraîner des pénalités clairement imposées.

Finalement, en tout temps—s'il vous plaît—et en toutes circonstances, nous devons nous rappeler le mot d'ordre à respecter dans tous les conflits entourant la garde et le droit de visite des enfants: les enfants en premier.

Merci beaucoup.

Des voix: Très bien, bravo!

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Merci beaucoup.

Pas d'applaudissements, s'il vous plaît.

Comme vous le savez sûrement—certains d'entre vous ont déjà vu comment ce déroulent ces séances—nous allons maintenant entendre les questions des membres.

Nous commencerons avec M. Mancini.

M. Peter Mancini: Merci.

J'ai quelques questions qui découlent de vos propos, révérend. Vous avez terminé en disant qu'il fallait penser aux enfants en premier.

Je vais adresser ma question à M. Flores, qui a dit que nous devions cesser de faire de la politique au détriment de l'âme des enfants. Permettez-moi de vous demander... c'est la question difficile.

Vous avez parlé des vacances de Pâques qui s'en viennent. Du besoin des enfants de voir les deux parents. Quand les parents ne peuvent s'entendre entre eux—par exemple, le père veut voir l'enfant le matin de Pâques, et la mère aussi—, les batailles font du congé un désastre pour l'enfant.

Même si nous disons: «Tu vas être avec papa de 9 h à 12 h, puis avec maman jusqu'à 17 h, et tu retourneras ensuite avec papa», quand on considère l'incapacité des parents à régler la situation au bénéfice de leur enfant, ne disons-nous pas que les droits de la mère ou du père doivent être soumis au droit de l'enfant d'apprécier ces moments? À cause de leur incapacité à résoudre la situation ou à mettre les choses en place, ne faut-il pas ordonner que l'un des parents n'a pas droit de voir son enfant durant cette journée? Ne faut-il pas leur dire: «Désolé, les deux parents n'ont pu s'entendre et n'ont pu penser d'abord aux droits de l'enfant, alors l'État doit le faire»?

C'est ce que nous avons entendu, que notre travail était de prendre ces enfants et de les faire passer en premier. Ne faut-il pas à certains moments soumettre les droits des parents à ceux des enfants?

M. Bill Flores: Ma réponse est la suivante: dans quelle mesure l'animosité serait-elle réduite si nous n'avions pas à nous débattre avec ce système judiciaire accusatoire?

Bien entendu, il existe des cas extrêmes où les parents tenteront de trouver une cible, quelle que soit la règle. Dans ces cas, oui, il faut une loi, et nous suggérons des modifications à la loi sur le divorce. Même si nous privilégions la résolution à l'extérieur des tribunaux, nous ne rejetons pas complètement le système judiciaire.

• 1050

M. Peter Mancini: Si je peux poursuivre sur ce sujet, nous avons entendu un très grand nombre de personnes qui nous ont dit qu'il fallait conserver le système accusatoire. Je suis d'accord avec le principe de la médiation et la nécessité de trouver une solution de rechange plus adéquate. Mais une partie du problème provient du fait que des parents cherchent à tout prix un adversaire, non? S'ils ne peuvent s'entendre entre eux, l'État doit s'en mêler. Je vais donc revenir à ma question: dans les situations où ce sont les parents eux-mêmes qui cherchent un adversaire, ne faut-il pas ignorer les droits de l'un de ces parents pour le bénéfice de l'enfant?

M. Bill Flores: Oui, dans les cas extrêmes. Toutefois, cette aide doit venir seulement à la fin, quand il y a procès. Elle n'est pas disponible dès le début. Si des services leur permettaient d'affronter les difficultés qu'ils rencontrent, nous n'arriverions pas à des situations si dramatiques.

M. Peter Mancini: D'accord, merci. C'était ma question.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Qui sera le prochain? Docteure Bennett.

Mme Carolyn Bennett: Pour en revenir aux fausses allégations et la présomption d'innocence jusqu'à preuve du contraire, j'aimerais que vous nous indiquiez de quelle façon ce système fonctionnerait. Qui a le fardeau de la preuve ou de l'innocence? Il me semble que ces conflits surviennent dans un climat incendiaire.

Je suis d'accord. Si nous nous débarrassons du système accusatoire, nous verrions beaucoup moins de ces luttes. Tous seraient gagnants, et rien de cela ne serait nécessaire. Je m'interroge toutefois sur la définition du terme abusive. Quelle a été votre expérience? Il est clair que votre fréquentation du système judiciaire a été coûteuse et non avenue. Même si vous avez été exonéré à la fin, la facture a été... Je crois que j'aimerais savoir comment cela aurait pu être évité.

Le révérend Dorian Baxter: Eh bien, c'est une très bonne question, et je vous remercie beaucoup. Est-ce que c'est Mme Bennett ou Dre Bennett, ou les deux?

Mme Carolyn Bennett: Carolyn.

Le révérend Dorian Baxter: D'accord.

Je vous remercie d'avoir posé la question. En quelques mots, pour en revenir à mon cas, comme vous l'avez si gentiment suggéré, cela aurait pu être évité immédiatement si la Société d'aide à l'enfance de Durham avait démontré ne serait-ce qu'une once d'intégrité. On y a considéré les allégations au pied de la lettre, et Marion vanden Boomen, qui a même refusé de me rencontrer pour entendre ma version de l'histoire, s'est empressée d'obtenir une ordonnance du tribunal la journée avant que je sois averti. Il s'agissait d'une infraction à la Charte des droits, mais les jeux étaient faits. Elle m'a appelé pour me dire qu'une ordonnance de protection avait été émise contre moi et que, à moins que je ne confesse les crimes que j'avais commis contre mes enfants, je ne pourrais plus jamais les voir, sauf pour une heure. J'étais sidéré.

J'ai découvert rapidement qu'ils étaient allés en cour. Quand le juge leur a demandé où se trouvait ce révérend Baxter, Marion vanden Boomen et la conseillère en poste à Durham à l'époque, Joanne Ferguson, ont répondu qu'elles ne le savaient pas. C'était un mensonge. Le premier parjure. Si le juge avait su que j'étais suffisamment inquiet pour me rendre en cour, la suite aurait été totalement autre. Mais en bref, disons que j'ai dû me battre par la suite.

Les choses ont empiré. Bien qu'on ait refusé d'entendre ma version des faits, la vérité a éclaté après onze mois. Ils m'ont finalement fait appeler. Je n'oublierai jamais ce jour, le 24 mai 1986. Ils m'ont dit: «Réverend Baxter, nous avons commis une grave erreur. Que demandez-vous pour vous retirer?» Je leur ai répondu que je ne comprenais pas. Ils étaient les agresseurs, et je devais me retirer.

Je n'en suis pas fier, mais je suis quand même content de l'avoir fait. J'avais avec moi une enregistreuse d'espion grande puissance, à la James Bond. Merci mon Dieu, parce qu'ils ont nié tout ce qu'ils ont dit par la suite. Durant cet entretien, Carolyn, ils m'ont dit qu'ils voulaient protéger la réputation de la Société d'aide à l'enfance de Durham. «Et qu'en est-il de la mienne?» ai-je répondu.

Je leur ai demandé trois choses: le retour de mes enfants, le paiement de 75 000 $ en frais d'avocats, et l'envoi d'une lettre à l'évêque. Ils m'ont dit qu'ils me donneraient la lettre, que les enfants resteraient avec mon ex-femme, et que je devrais payer les frais. Ils ont poursuivi en disant que, si je ne faisais pas ce qu'ils m'avaient suggéré, ils poursuivraient les procédures comme si j'étais coupable. C'était du chantage.

• 1055

Pour répondre à votre question, toutefois, cela aurait pu être évité s'il y avait eu un peu plus de loyauté de leur part. Si Marion vanden Boomen m'avait dit: «Révérend Baxter, votre ex-femme a fait ces terribles allégations»... et bien entendu, ils n'ont pas tenu compte du fait qu'elle était partie avec un pédophile notoire qui avait fait des séjours intermittents en prison durant 17 ans. Quand j'ai tenté de leur dire cela, ils m'ont répondu que j'étais un mari jaloux.

Mais s'ils avaient dit simplement: «Nous vous demandons de suspendre les visites permises durant une ou deux fins de semaine, le temps que nous fassions une enquête», les contribuables ontariens auraient pu économiser entre 1,5 et 2 millions de dollars, et ils auraient épargné beaucoup de souffrance à mes chères filles. Voilà pourquoi, comme je l'ai dit auparavant, des conseils civils d'examen des services de protection et du bien-être permettraient un contrôle.

Mme Carolyn Bennett: Mais éventuellement, la vérité s'est fait jour et justice a été rendue. A-t-on eu recours à des évaluations et au témoignage de professionnels? Comment aurait-on pu écourter la procédure? Finalement, les intérêts des enfants ont été servis. Si la procédure n'avait pas été si longue, et si vous aviez pu bénéficier de l'aide d'un groupe d'experts reconnus qui auraient pu évaluer les faits dans un certain laps de temps, pensez-vous que cela aurait aidé?

Le révérend Dorian Baxter: Je crois que oui. Si j'avais su alors ce que je sais maintenant, je crois qu'une requête aurait pu être présentée afin que soit cassée l'ordonnance de protection, parce qu'elle était illégale. Je n'avais reçu aucun papier. La Charte était violée. Je ne le savais pas à ce moment. Je ne prétends pas que mon avocat le savait, mais il demeure qu'il faut se demander qui a bénéficié de cette poursuite. Je crois que les avocats reçoivent la grosse part du gâteau.

Il faudrait instaurer une procédure à partir du moment où de fausses allégations sont portées contre une autre personne. Il faut mettre en place un comité de spécialistes.

Mme Carolyn Bennett: Attendez un peu. Des allégations sont des allégations, alors...

Le révérend Dorian Baxter: Oui. Je parle juste du moment où elles sont traitées...

Mme Carolyn Bennett: Donc, à partir du moment où des allégations sont faites...

Le révérend Dorian Baxter: Parlons d'allégations, donc, et dans mon cas, elles étaient fausses. Mais supposons que des allégations sont faites par un père contre sa femme, ou par une femme contre un père, ou par un mari contre sa femme, etc. Je crois qu'il faut mettre en place un mécanisme de contrôle et d'équilibrage des services sociaux offerts. Je crois que le mieux serait un conseil civil d'examen des services de protection et de bien-être à l'enfance, composé de gens à l'aise, de professionnels, qui sont respectés et qui sont prêts à donner du temps pour déterminer leur mérite.

Bien entendu, si une personne est trouvée coupable d'agression contre un enfant, je crois qu'il faut non seulement l'arrêter, mais la punir en vertu des lois en vigueur. C'est un crime grave. Mais c'est aussi grave d'accuser quelqu'un sans fondement, comme cela a été le cas pour moi et pour de nombreux autres, car les cicatrices restent jusqu'à la fin de nos jours, et les personnes qui font ces allégations restent impunies. Il faut faire ces contrôles. Je propose qu'on instaure un tel mécanisme; d'ailleurs, c'est déjà ce que fait NAPPA.

Chaque ville où se trouvent une société d'aide à l'enfance ou des services sociaux, et où de tels faits peuvent se produire, devrait être dotée d'un filet de sécurité ou d'une soupape de sûreté tel qu'un conseil civil d'examen des services de protection et de bien-être à l'enfance. Le conseil examinerait les procédures et jugerait de leur mérite. S'il avait existé dans mon cas, les procédures auraient été examinées de très près.

Je ne peux imaginer qu'un père ou une mère qui aime vraiment ses enfants refuserait de suspendre son droit de visite pour trois semaines ou un mois, jusqu'à ce que l'examen ait été effectué.

Mme Carolyn Bennett: Vous avez mentionné le parjure, et j'imagine qu'on commet un parjure dans la plupart de ces cas. Une fois que le parjure a été prouvé—c'est une question que je ne connais pas en profondeur—y a-t-il automatiquement une poursuite en justice?

Le révérend Dorian Baxter: Non. Jamais.

La sénatrice Anne Cools: C'est un problème.

Mme Carolyn Bennett: Il y a un peu de jurisprudence dans ces cas, mais le parjure est impuni.

Le révérend Dorian Baxter: Le pire de tout, Carolyn, pour une personne coupable de parjure, que notre système actuel laisse pour ainsi dire impuni, est d'être accusée de méfait public. Après ce qui m'est arrivé, je serai franc avec vous, je suis très heureux d'être en vie. Il aurait été beaucoup plus doux de recevoir une balle en pleine tête. J'ai pensé au suicide. La seule chose qui me gardait en vie était l'idée que mes filles avaient besoin de moi.

J'ai reçu plus de 1 000 appels depuis 1994 de la part d'hommes et de femmes pris au piège. La plupart des victimes étaient des hommes, mais il ne faut pas croire que des hommes n'aient pas commis de tels gestes. J'ai parlé à des femmes qui ont été mises au pilori et qui sont prêtes à mettre fin à leurs jours. Combien d'hommes et de femmes sont-ils décédés? Les gens se disent qu'ils devaient être coupables de toute façon.

• 1100

Je vous jure que, si j'avais sauté de la falaise—je me voyais sauter de la falaise sur la rive nord du lac Supérieur—on aurait dit que j'étais donc vraiment coupable. J'en étais rendu là. N'eût été de ma foi en Jésus, sans faire de sermon évangélique, il est certain que je ne serais pas en vie aujourd'hui.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): M. Greenfield, s'il vous plaît.

M. Ted Greenfield: J'aimerais commenter le sujet des fausses allégations. Nous cherchons une solution, parce que des allégations sont considérées comme telles jusqu'à ce qu'elles soient prouvées fausses ou valides. Ma situation était similaire, car on alléguait faussement que j'étais mauvais et que je refusais de voir mes enfants durant les fêtes. Je les avais vus quatre fois, et j'avais des photos pour le prouver. On a jugé que c'était sans importance.

Certaines personnes prétendent qu'il y a des alliances devant les tribunaux, et que l'industrie du divorce se suffit à elle-même; mais considérons une situation où, si de fausses allégations sont faites, non seulement la personne qui les fait doit être jugée entièrement responsable, mais les conseillers juridiques qui les encouragent à poser un tel geste devraient perdre leur licence.

Nous sommes détruits. Quand j'ai reçu les documents, j'ai pleuré. Les hommes ne sont pas supposés pleurer, mais j'ai vu mes enfants quatre fois durant une période de huit jours. Une partie de la déclaration sous serment alléguant que j'étais mauvais était dévastatrice.

Les personnes qui font de fausses allégations devraient être jugées entièrement responsables et poursuivies en cour. Les membres du barreau devraient pour leur part perdre leur licence. Les parents qui font de telles allégations devraient perdre leur droit de visite. Ce ne serait plus un jeu. C'est très grave.

Les parjures s'en tirent en toute impunité. La Société d'aide à l'enfance peut faire ce qu'elle veut, sans jamais avoir à rendre de comptes. Il est temps que les gens se responsabilisent et placent les intérêts des enfants en premier.

Merci.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): J'aimerais avoir une information.

Révérend Baxter, je n'ai aucune idée du nombre de procédures intentées dans votre cas, mais le jugement final a-t-il été rapporté dans le Ontario Reports ou...

Le révérend Dorian Baxter: Oui, en fait, mon cas a été traité à trois niveaux d'instances juridiques. La première bataille concernait la répudiation des allégations et la garde, et il fallut 51 jours répartis sur une année et demie pour y arriver. La deuxième bataille était la poursuite que j'ai entreprise immédiatement contre la Société d'aide à l'enfance; elle dura neuf années et demie parce que Marion vanden Boomen ne venait pas aux interrogatoires préalables.

Finalement, j'ai gagné la première bataille devant le tribunal équivalent à l'ancienne Cour suprême de l'Ontario. Le juge Somers les a déclarés coupables de grossière négligence, de grossière incompétence, de poursuite abusive et de chantage. À ce moment, on aurait pu penser que la justice allait suivre son cours. Mais j'ai découvert par après qu'il m'incombait de les poursuivre.

Ce qui me choque le plus est que le juge m'a accordé 250 000 $, alors qu'il m'en a coûté plus de 387 000 $. Dieu du ciel! c'est très injuste!

J'ai ensuite découvert que la société d'assurances de la Société d'aide à l'enfance de Durham voulait aller en appel. Pouvez-vous imaginer? Nous sommes dans un pays libre, mais je n'ai pas le droit de savoir qui était cette société d'assurances. Je veux leurs noms, parce qu'ils ont obtenu un délai de deux ans et demi, ce qui m'a presque acculé à la faillite.

Mes enfants, par la grâce de Dieu, vont bien, mais j'en remercie seulement la grâce de Dieu.

En 1996, trois juges de la Cour d'appel de l'Ontario ont appuyé unanimement les jugements du juge Somers. Toutefois, en raison de subtilités juridiques, ils ont réduit le règlement à un misérable 75 000 $. J'ai beaucoup de difficulté actuellement à joindre les deux bouts. Ces faits sont rapportés dans...

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Ces faits sont rapportés, alors nous pouvons demander au personnel... Si vous avez le document légal, peut-être pouvez-vous nous le laisser.

Le révérend Dorian Baxter: Oui.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Deuxièmement, pour clarifier, la Dre Bennett a fait référence à cette période. Était-ce si long, ou est-ce que cela aurait pu être si long? Combien de temps cela a-t-il duré, ou est-ce terminé?

Le révérend Dorian Baxter: Le 1er mai 1985, j'ai trouvé ma maison sens dessus dessous, et les enfants étaient partis. Il m'a fallu environ deux ou trois semaines avant de retrouver mon ex-femme et son amant.

Trois mois plus tard, elle a eu une brillante idée. Une ordonnance de la cour avait été émise qui me donnait le droit de voir mes enfants une fin de semaine sur deux. À cause de l'ordonnance me donnant...

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Excusez-moi, j'aimerais plutôt savoir si tout cela a commencé en 1985, et en quelle année l'histoire se termine.

Le révérend Dorian Baxter: L'épopée a commencé le 1er mai 1985. La bataille pour la garde et celle qui m'a permis de lever les allégations s'est terminée le 13 janvier 1987. Les enfants habitent avec moi depuis.

• 1105

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Mais je parle de toutes les procédures subséquentes...

Le révérend Dorian Baxter: Cela a duré jusqu'en 1996. Nous parlons donc de onze années de batailles juridiques.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Bien.

Monsieur Mancini, une dernière question.

M. Peter Mancini: J'ai une autre question en ce qui a trait à certains commentaires. Je dois poser cette question parce que nous avons entendu souvent ces commentaires au sujet des avocats. J'en suis un et j'essaie de mettre ce fait de côté pour conserver mon objectivité mais, à la fin de la journée, parce que nous parlons de parjure, il est sûr—je dois être très clair à ce sujet—que, quand une personne raconte son histoire à un avocat, celui-ci la questionne pendant longtemps et lui explique la signification d'une déclaration écrite sous serment. Il dit à son client: «Vous signez ce document, jurant qu'il contient la vérité, juste la vérité.» Et le client signe le document.

Supposons que l'avocat a découvert que les déclarations ne sont pas vraies. Que le document contient de fausses allégations. La personne qui a signé a commis un parjure. Bien entendu, il serait facile pour elle de s'en sortir en disant: «Je l'ai signé, mais c'est mon avocat qui m'a dit de le faire.»

J'ai deux questions. Premièrement, quand faut-il s'informer sur ce qui s'est passé dans le bureau de l'avocat? Ce sera un concours parce que l'avocat dira: «Je ne lui ai pas dit de signer. Je lui ai présenté le document.» Allons-nous placer des caméras dans le bureau de l'avocat afin de voir quel conseil a été donné?

Supposons que l'avocat a bel et bien dit que le meilleur moyen d'obtenir la garde était de jurer que le mari ou la femme avait fait ceci ou cela. La personne qui prête serment, qui signe le document... Ça me fait penser au jeu The Crucible. À la fin de la journée, tout ce que j'ai est ma réputation. La personne qui prête serment est responsable, et non l'avocat, même si celui-ci lui conseille de le faire. La responsabilité n'incombe-t-elle pas au client, et non à l'avocat?

Le révérend Dorian Baxter: J'aimerais faire un commentaire, parce que cette question semble générale. Avec le plus grand respect, je crois que c'est hors de question, monsieur Mancini. Il faut comprendre que les responsabilités sont graves. Voilà pourquoi je recommande, en premier lieu, la médiation obligatoire.

Tout avocat qui entend une mère ou un père faire de telles allégations devrait se mettre en état d'alerte. Le filet de sécurité est nécessaire déjà à cette étape. Aucun affidavit contenant ces allégations ne devrait être produit tant que l'avocat, qui à mon sens a une obligation morale et éthique envers la société canadienne et le processus démocratique, n'a pas vérifié la véracité de ces déclarations. Il pourrait alors faire apposer la signature. Avec tout le respect que je vous dois, s'il demande au client de signer, il est aussi responsable des conséquences.

M. Ted Greenfield: Ainsi, l'avocat devrait dire: «Il faut être prudent quant à ces déclarations.» Mais si nous faisons passer en premier les intérêts des enfants, les fausses allégations... C'est une partie du processus. Il existe de nombreux cas où les personnes sont conseillées. Vous pouvez avoir une dissertation de 50 pages sur la question, mais les intérêts des enfants sont encore négligés. Les allégations constituent tout juste un élément supplémentaire.

Quand le juge examine votre cas, il détermine combien une partie donne et combien l'autre reçoit. On perd du temps et de l'énergie et on ne se préoccupe pas des intérêts des enfants.

J'étais le pire. J'étais le client rêvé pour un avocat. Je porte attention aux détails. J'ai combattu toutes les allégations et je les ai rendus riches. Nous avons réagi jusqu'à... J'ai reçu une belle Mercedes neuve.

M. Peter Mancini: Dans ces cas, si l'obligation incombe à l'avocat—je ne fais pas de critiques, je veux être sûr—de vérifier la véracité des déclarations dans une situation de crise, au moment où des arrangements provisoires sont faits... Vous me dites: «Ma femme est à l'aéroport avec les enfants. L'avion décolle dans une heure. Elle a fait ceci et cela. Je ne verrai plus jamais mes enfants. Je veux que vous fassiez une requête à la cour.» L'avocat dispose de combien de temps pour vérifier la véracité des déclarations? Si on attend, ils sont partis.

Le révérend Dorian Baxter: C'est une très bonne remarque, monsieur Mancini, et c'est le meilleur argument que j'ai entendu aujourd'hui en faveur du système accusatoire. À mon avis, il faut régler le problème à la racine.

• 1110

J'ai entendu une allusion aujourd'hui au fait que nous avons besoin dans ce merveilleux pays d'une loi qui indique à une femme ou à un homme qui a le culot de faire de fausses allégations, ou de kidnapper ses enfants pour les amener dans une autre province ou un autre pays, qu'il ou elle perdra automatiquement la garde. Ou que la garde exclusive sera accordée à la partie lésée s'il est prouvé que les allégations sont fausses, ou si les personnes s'enfuient avec les enfants. Personne n'a le droit de faire cela à des enfants.

Une voix: Très bien, bravo!

M. Peter Mancini: Merci de ce commentaire, monsieur le président.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Merci beaucoup. J'aimerais vous remercier de votre présence ici ce matin et de nous avoir livré vos commentaires pour nous aider dans notre travail.

Le révérend Dorian Baxter: J'aimerais vous dire une chose, monsieur Gallaway: ce comité doit être félicité. Vous contribuez à restaurer la foi de gens blessés et écorchés vifs en ce système, en notre système politique, en notre pays. Je remercie chacun d'entre vous de donner du temps et de l'énergie à cette cause, et je prie pour que ce travail ne se limite pas à un ramassis de faits.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Je suis désolé. Avant de terminer, le sénateur Jessiman aurait aimé faire un commentaire.

Le sénateur Duncan Jessiman: Avez-vous été avisé de ne pas porter la cause devant la Cour suprême du Canada?

Le révérend Dorian Baxter: Par qui?

Le sénateur Duncan Jessiman: Je ne sais pas. Je vous le demande. Vous a-t-on avisé de ne pas le faire?

Le révérend Dorian Baxter: Non. Je crois que mon seul recours était la Cour suprême. Mon seul recours...

Le sénateur Duncan Jessiman: Parlez-vous de la Cour suprême du Canada ou de la Cour suprême de l'Ontario?

Le révérend Dorian Baxter: Ah, je vois. Non, je parle de la Cour suprême de l'Ontario. Personne ne m'a parlé de la Cour suprême du Canada.

Le sénateur Duncan Jessiman: Et vous ne saviez pas que vous aviez ce droit?

Le révérend Dorian Baxter: Non, on ne m'a rien dit de cela. Avais-je le droit de porter ma cause devant la...?

Le sénateur Duncan Jessiman: Je ne sais pas si vous aviez le droit, mais vous aviez le droit de demander l'autorisation.

Le révérend Dorian Baxter: Peut-être devrais-je demander à la Cour suprême du Canada de redresser les faits.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Je crois que vous pouvez le faire.

Le révérend Dorian Baxter: Merci.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Merci beaucoup à tous. La séance est suspendue pour trois minutes environ.

• 1112




• 1115

La coprésidente (sénatrice Landon Pearson): À l'ordre, s'il vous plaît. Veuillez regagner vos sièges pour la prochaine séance.

Je croyais que nous allions entendre quatre personnes, mais vous êtes trois seulement. Je vois Tracy London. Sheryl n'est pas là?

Mme Tracy London (témoigne à titre personnel): Je ne l'ai pas vue.

La coprésidente (sénatrice Landon Pearson): Sheryl Milne, de Justice for Children and Youth, devait se présenter. Peut-être a-t-elle de la difficulté à trouver un stationnement. Qui sait?

Bon. Tracy, j'espère que vous êtes prête à faire votre présentation toute seule.

Nous recevrons aussi Jane King et Amy Beck.

Tracy, pouvez-vous commencer, s'il vous plaît?

Mme Tracy London: Madame la présidente, chers membres du comité, merci de me donner l'occasion de faire cet exposé.

Je suis étudiante à l'Université de Toronto, en droit et en travail social. Je suis ici au nom de ma demi-soeur, qui a quinze ans. Je vais essayer de dire ce qu'elle dirait si elle était ici.

Ma propre expérience du divorce est très différente de celle de ma demi-soeur. Mes parents se sont séparés quand j'avais quatorze ans. Heureusement pour moi, mon père et ma mère ont été capables de discuter, de façon coopérative, de mon lieu de résidence. Ils ont fait grand cas de mon opinion. Quand je leur ai dit que je voulais vivre avec ma mère, ils ne se sont pas disputés. Je pouvais voir mon père quand je le voulais, et je le voyais souvent, même si mon père et ma mère ne se parlaient plus.

Au contraire, l'expérience de ma demi-soeur a été très pénible. Mon père et mon ex-belle-mère se sont séparés quand ma demi-soeur avait quatorze ans, voilà un an et demi environ. Elle a maintenant quinze ans et elle a beaucoup changé depuis le temps où mon père et ma belle-mère vivaient ensemble.

Malheureusement, mon père et mon ex-belle-mère n'ont pas une relation de collaboration. En fait, je dirais même qu'ils se détestent.

Ma belle-mère a un nouvel ami, que ma demi-soeur considère comme étant violent. Elle a peur de l'ami de sa mère et c'est pour cela qu'elle ne souhaite plus voir sa mère. Elle a peur de vivre avec elle, car elle a peur que l'ami en question ne l'agresse.

Mon père n'a aucun droit envers Janet—il n'est pas son père biologique—et n'a aucun droit légal de garde, mais ma demi-soeur souhaite vivre avec lui.

Mon père a cherché à obtenir de l'aide et il a essayé d'en venir à une entente avec son ex-conjointe afin qu'ils soient tous les deux considérés comme étant les parents de Janet. Il a encouragé cette dernière à passer plus de temps avec sa mère, ce qui a été pour Janet cause d'autres souffrances. Mon père s'est inscrit à l'aide juridique parce qu'il ne peut payer des frais d'avocat et il voulait faire une requête en vue d'obtenir la tutelle. Il n'est pas admissible à l'aide juridique. Mais il n'a pas d'argent pour engager un avocat.

• 1120

Il s'est adressé à la protection de la jeunesse afin qu'on y offre du soutien à ma demi-soeur, ou qu'elle puisse bénéficier de counselling afin de renouer avec sa mère. Mais on lui a dit qu'il s'agissait d'un cas personnel puisqu'il s'agit de problèmes de garde et de droit de visite.

Je ne peux insister trop sur l'importance de la tutelle pour ma demi-soeur. Même si elle peut vivre avec mon père, l'absence d'ordonnance de tutelle fait en sorte que les membres de la famille ne reconnaissent pas mon père comme étant son véritable père. Les membres de la famille ne veulent pas aider Janet parce qu'ils croient que la mère serait le parent de droit, et tant que Janet ne vit pas avec sa mère, ils ne veulent pas l'aider. Ils ne se préoccupent pas du fait que Janet a choisi elle-même de vivre avec mon père.

La tutelle serait importante parce que Janet verrait ainsi que les autorités considèrent que mon père est son parent. À l'école, elle n'a pas l'impression que mon père est considéré comme étant son parent, et il est arrivé que la mère se soit rendue à l'école pour voir Janet de force, alors que Janet ne le souhaite pas.

Et cette situation a des incidences financières pour Janet, parce que toute forme d'aide financière...

La coprésidente (sénatrice Landon Pearson): Nous avons accordé à chaque personne cinq minutes environ. Si vous pouviez conclure et nous faire vos recommandations... Merci.

Mme Tracy London: D'accord.

Alors Janet a souffert parce que mon père n'a pas obtenu l'aide financière qui a été donnée à ma belle-mère.

Je voudrais faire trois recommandations, fondées sur l'expérience de ma demi-soeur et sur la mienne. Premièrement, il faut permettre aux parents d'avoir un plus grand accès à l'aide juridique quand des questions de garde et de droit de visite sont en jeu, et qu'il y a des risques pour l'enfant. Deuxièmement, les autorités publiques ne devraient pas considérer que les questions touchant la garde des enfants sont du domaine privé, quand il y a des risques potentiels pour l'enfant. Troisièmement, que les enfants aient droit à une aide publique indépendante, légale ou autre, qui leur permettrait de faire entendre leur voix même si les parents eux-mêmes n'ont pas eu recours aux autorités légales ou publiques eu égard à la garde et au droit de visite. L'enfant devrait bénéficier de l'écoute indépendante et d'un représentant qui lui permettrait de se faire entendre.

Merci.

La coprésidente (sénatrice Landon Pearson): Merci beaucoup.

Jane King.

Mme Jane King (témoigne à titre personnel): Bonjour. Merci de me donner l'occasion de demander au comité d'examiner les incidences longitudinales du divorce et les conséquences pour les enfants.

Même si je me présente en tant qu'adulte ici ce matin, j'aimerais que vous voyiez en même temps l'enfant du divorce et les effets à long terme d'un échec conjugal pour l'enfant et les demandes qui sont faites à celui-ci, même si la séparation se fait le plus harmonieusement possible, après une expérience traumatique.

Je demande au comité de considérer les perspectives à long terme pour les jeunes enfants qui subissent la séparation ou le divorce de leurs parents. Je me présente ici en tant que survivante qui défend leurs intérêts à long terme.

Des pressions supplémentaires surviennent quand l'un ou les deux parents se remarient, et si aucune transition n'est offerte et que les parents ne collaborent pas, il peut y avoir des conséquences à long terme. Ainsi, il peut y avoir absence de liens avec l'un des parents, qui entraîne des coûts émotionnels pour l'enfant.

La question du refus de visite peut se refléter dans la vie adulte dans les activités du parent adoptif. La question de l'absence de pénalité est aussi pertinente pour les testaments et les successions. On connaît plusieurs histoires d'enfants naturels qui, après la mort d'un parent et le remariage de l'autre, n'ont rien reçu des avoirs du parent décédé.

• 1125

Bien qu'il faille encore faire des recherches, je vous dirais que, dans la plupart des cas, le parent masculin a plus de chances de rencontrer une compagne plus jeune et très souvent il lègue à sa femme les avoirs parentaux, même lorsque ces derniers ont été accumulés en partie avec la participation du parent féminin, c'est-à-dire la mère biologique.

Je comprends que la question des droits de la femme en ce qui concerne la cession des biens par testament ou par succession est récente et je considère qu'il est temps que les enfants aient des droits en matière de biens parentaux. Dans le cas des enfants de parents divorcés, même si la loi traite les enfants adultes de parents divorcés sur le même pied que les enfants dont les parents sont mariés, il existe tout de même un écart important entre les deux; la possibilité de perte de biens parentaux est beaucoup plus forte chez les enfants de parents divorcés.

De plus, les protocoles qui s'étendent aux enfants de parents mariés peuvent être abolis de façon traumatisante. La baisse de plus en plus marquée du respect des codes d'éthique religieux et des codes de société contribue aussi parfois à empêcher, lors de la mort d'un de ses parents, qu'un enfant reçoive ce à quoi il a droit selon les règles de conduite religieuse qui prévalaient autrefois.

Les enfants subissent les répercussions d'un divorce durant toute leur vie. Comme vous avez pu le lire dans mon mémoire, je demande au comité de recommander et d'adopter une loi qui protégera les droits en matière de biens parentaux de tous les enfants naturels. Je demande aussi au comité de protéger le droit d'accès d'un enfant à un parent biologique.

Je vous ai fait une liste de recommandations contenant sept points: un, une loi qui assure le partage des avoirs parentaux avec les enfants naturels; deux, une loi qui protège le droit d'accès des enfants naturels à leur parent biologique; trois, une loi qui permette à l'enfant naturel d'avoir accès aux dossiers médicaux de ses parents biologiques et à ceux des membres de la famille, incluant les documents relatifs à la famille élargie, c'est-à-dire les certificats de naissance et de mariage; quatre, une loi qui serve de modèle aux testaments et aux successions dans lesquels on tiendrait compte des droits de la personne dans la terminologie des documents, une loi qui protège les droits de la famille et des proches dans le domaine du protocole et des pouvoirs qui sont généralement exprimés clairement dans les principes chrétiens: le droit de savoir si la mort est imminente, le droit de voir le corps de ses parents, le droit d'accès au corps de son père ou de sa mère après leur mort, qu'il s'agisse de la tombe, des cendres ou de l'emplacement au cimetière; cinq, une loi qui oblige l'exécuteur et celui qui a rédigé le testament à respecter les droits et les valeurs démocratiques, dont les droits des enfants et la responsabilité du parent, et ainsi de suite, dans les testaments et les successions; six, une loi qui limite les pouvoirs individuels des rédacteurs de testament et des exécuteurs, qui respecte les valeurs et les droits démocratiques et qui mette en place des processus légaux qui permettent les recours et assure la responsabilité face à la loi; et finalement sept, une loi qui assure la protection des biens parentaux dans les règlements de divorce dans les cas où aucune autre protection ne serait prévue.

Merci.

La coprésidente (sénatrice Landon Pearson): Merci beaucoup. C'est une approche nouvelle et très intéressante et nous aimerions y revenir durant la période de questions.

Et pour terminer, Amy Beck.

Mme Amy Beck (témoigne à titre personnel): Bonjour, distingués membres du comité.

Je m'appelle Amy Beck et j'ai 25 ans. J'ai beaucoup travaillé auprès des enfants et des familles, je suis infirmière pédiatrique à l'Hôpital pour enfants malades et j'enseigne aussi la danse aux enfants depuis de nombreuses années.

Je suis aussi une enfant de la cour. Mes parents ont divorcé lorsque j'avais huit ans et à cette époque, ma soeur Jennifer et moi sommes allées vivre avec mon père car il avait obtenu la garde. Il n'y avait pas d'entente officielle entre mes parents, ma soeur et moi étions donc libres d'aller chez ma mère ou mon père, à notre guise. Avec le recul, je peux dire que cet arrangement était à notre avantage car nous avons pu voir nos deux parents et passer du temps avec eux, sans restrictions. Je crois que cette entente parentale a favorisé notre développement car nous avons ainsi pu maintenir une relation enrichissante avec nos deux parents.

Six ans après le divorce, mon père s'est remarié. Presque immédiatement après le mariage, sa nouvelle épouse a révélé un côté de sa personnalité qu'elle avait bien caché jusque là. Durant tout le temps que j'ai connu la seconde femme de mon père, je peux dire qu'elle a maltraité autant physiquement qu'émotionnellement, mon père, ma soeur et moi, ainsi que ses deux jeunes enfants qui provenaient d'une autre relation. Cette femme a même menacé sa propre fille avec un couteau de cuisine, l'obligeant à appeler le 911. La Société de protection de l'enfance lui a même retiré la garde de ses deux enfants parce qu'elle les avait maltraités physiquement et émotionnellement durant la période où elle et mon père étaient séparés.

• 1130

De leur mariage, est née ma soeur Amber. Peu de temps après sa naissance, la femme de mon père s'est rendu compte que leur union se détériorait. Alors qu'elle continuait à nous maltraiter physiquement et émotionnellement, elle agressait aussi ma soeur Amber, elle s'est rendue dans une maison d'hébergement pour femmes battues où elle a déclaré qu'elle était victime de violence physique et psychologique. Grâce à ces fausses allégations, elle a réussi à obtenir une ordonnance ex parte provisoire lui accordant la garde unique de ma soeur Amber et de son fils. Pendant qu'elle était encore à la maison d'hébergement, son fils a avoué à mon père que les mauvais traitements n'avaient pas cessé mais qu'il avait trop peur pour dire quoi que ce soit. Comme il l'a dit, ils haïssent les papas.

Durant son séjour à la maison d'hébergement, elle a laissé sa fille adolescente vivre avec nous, même si elle déclarait avoir très peur de mon père. Le 4 septembre dernier, dans la cause Yim contre Beck, au palais de justice de Milton, elle est même allée jusqu'à insinuer dans une de ses requêtes à la cour que mon père avait agressé son fils sexuellement...

La coprésidente (sénatrice Landon Pearson): Si vous préférez passer par-dessus cette partie, nous avons votre mémoire.

La sénatrice Anne Cools: Prenez votre temps.

Mme Amy Beck: Merci. Je suis désolée.

Elle a laissé tomber son accusation lorsque son fils s'est sauvé et est venu vivre avec nous.

Même en connaissant l'histoire de violence de cette femme envers ses propres enfants et en voyant les excellents antécédents de mon père à titre de conjoint ayant la garde de ses deux filles, le juge Smith du palais de justice de Milton a tout de même condamné ma soeur à continuer à subir les mauvais traitements de sa mère lorsqu'il lui a accordé la garde exclusive d'Amber le 4 septembre dernier. Il n'a pas tenu compte des deux rapports psychologiques dans lesquels il était clairement écrit qu'Amber était en danger si elle demeurait avec sa mère. À cause de la décision du juge Smith, ma vie de famille est un véritable cauchemar car la mère d'Amber essaie de détruire la relation que nous avons avec Amber en nous empêchant de la voir, en la tournant contre nous et en agissant de façon vindicative, ce qui est très nuisible au bien-être émotionnel d'Amber.

J'ai été personnellement témoin d'un divorce où la garde était partagée et d'un autre où il y avait garde exclusive. Je peux vous dire que la garde partagée et l'accès aux deux parents sont clairement dans le meilleur intérêt des enfants. Au cours de mes récentes études universitaires, j'ai fait des recherches sur les effets des relations parent-enfant après le divorce. Après recherche et analyse de la documentation, je n'ai trouvé aucune étude indiquant que la garde partagée cause des préjudices au développement des enfants, mais je peux cependant vous dire qu'il y a une foule de renseignements sur les effets négatifs sur les enfants de la garde exclusive, particulièrement lorsque c'est la mère qui a la garde exclusive.

Les enfants naissent avec deux parents et ils méritent d'être élevés et aimés par deux parents. Lorsque les parents sont ensemble, ils partagent les responsabilités associées aux soins et à l'éducation de leurs enfants. Ce n'est pas parce qu'un individu divorce qu'il devient un mauvais parent et que subitement il est incapable de prendre soin de son enfant comme il le faisait quand il était marié. Les enfants ne sont pas la propriété d'un seul parent, ils ne doivent pas non plus être pris en otage, que ce soit pour se venger de l'autre ou comme moyen de pression dans les jeux de pouvoir. À qui fait-on vraiment du mal quand un enfant est contrôlé par un parent et qu'on lui refuse le droit d'être avec l'autre parent et de développer avec ce dernier une relation enrichissante?

Si je me fie à ce que j'ai vécu lorsque j'étais plus jeune, je dois vous dire que je suis horrifiée par le «système de justice». Où se trouve la justice dans un système qui viole clairement le droit que les enfants ont d'être élevés par leurs deux parents et de développer une relation enrichissante avec chacun d'eux? Où est la justice dans un système qui voit les pères comme une source de revenus et qui continue à les empêcher de passer du temps avec leurs enfants, de devenir des modèles positifs et des parents attentifs comme ils le faisaient lorsqu'ils étaient mariés? Où se trouve la justice dans un système où il existe clairement un parti pris pour l'un des deux sexes?

Pour une raison ou pour une autre, la société en est arrivée à croire que les femmes étaient de meilleurs parents mais je vous pose la question suivante: qu'est-ce qui fait qu'une femme est un meilleur parent? Nous savons maintenant qu'une femme peut faire les mêmes choses qu'un homme, mais il faut réaliser que les hommes peuvent aussi faire tout ce que les femmes font.

• 1135

Avons-nous oublié les statistiques qui indiquent que les femmes sont celles qui sont le plus susceptible de maltraiter leurs enfants et que cela risque encore plus de se produire lorsque la mère a la garde exclusive?

Ce soi-disant système a réellement besoin de changement. Je crois que nous avons besoin d'une garde conjointe où le temps est partagé également entre les parents. Ainsi, aux yeux de l'enfant, papa et maman demeurent papa et maman. Si les droits de prise de décisions et le temps passé avec l'enfant sont égaux, il n'y a pas de raisons de conflit, les deux parents savent qu'ils continueront à jouer un rôle important dans l'éducation de leurs enfants, même après le divorce.

Je crois aussi que les parents devraient avoir accès à des ressources communautaires qui les soutiendraient et des intervenants pourraient servir de médiateurs en cas de différends. Comme M. Beck l'a mentionné ce matin, des programmes comme les services de résolution des conflits familiaux pourraient jouer un rôle très important dans la vie des familles qui sont touchées par le divorce.

Je crois aussi que les couples qui divorcent devraient obligatoirement suivre des cours dans lesquels ils verraient les effets du divorce et de syndrome de la perte de l'affection parentale sur les enfants. Il est clair que les enfants sont ceux qui souffrent le plus dans un divorce, mais dans le système actuel où il faut un gagnant et un perdant, les enfants sont souvent oubliés.

Je crois aussi qu'il devrait y avoir des cours, au niveau secondaire ou post-secondaire, dans lesquels on présenterait aux futurs parents les réalités du mariage, de l'éducation des enfants et du divorce.

Je vous présenterai aussi un mémoire dans lequel j'inscrirai la liste des références que j'ai utilisées au cours de mes recherches.

Si ces recommandations étaient déjà en place, je suis certaine qu'on aurait pu éviter le drame que ma famille a vécu.

La coprésidente (sénatrice Landon Pearson): Merci infiniment.

Monsieur Mancini.

M. Peter Mancini: J'aimerais d'abord remercier Amy et Mme London de nous avoir apporté un peu d'air frais. Vous êtes toutes les deux issues de familles dont les parents ont divorcé mais qui ont coopéré. Nous en voyons les résultats aujourd'hui—deux Canadiennes concernées qui sont venues nous faire un exposé. Cela fait du bien de savoir que ça peut réellement se produire. Je vous en remercie beaucoup.

Amy, ma première question s'adresse à vous. Je ne pose généralement pas de questions concernant les histoires personnelles mais la vôtre est si touchante. En termes de l'image que vous nous avez dépeinte, vous avez dit, et je suis d'accord, que nous devrions avoir des ressources communautaires et des systèmes de résolution de conflits familiaux, mais ces mesures auraient-elles été utiles dans votre cas? D'après ce que vous nous avez dit sur votre belle-mère et le fait qu'elle ait la garde de votre soeur —je ne sais pas si vous pouvez répondre à cela—aurait-elle été ouverte à la médiation? Dans ce cas particulier, croyez-vous que la médiation aurait pu fonctionner?

Mme Amy Beck: Dans mon cas personnel?

M. Peter Mancini: Oui.

Mme Amy Beck: Il aurait d'abord fallu qu'il y ait garde partagée, parce qu'à l'heure actuelle, le contrôle et la vengeance sont les deux seules choses qui comptent pour elle. Si on était en présence de deux personnes cherchant un terrain d'entente, je crois que la médiation et les services communautaires fonctionneraient de façon très efficace.

M. Peter Mancini: Donc, dans des cas comme celui-là—et je tiens à vous remercier car c'est là que nous devons porter notre attention—vous nous dites que si l'on croit qu'il y aura garde partagée ou partage des responsabilités parentales, on a de meilleures chances d'en venir à une entente négociée que s'il n'y a pas de décisions et qu'on pense qu'il n'y aura qu'un seul gagnant.

Mme Amy Beck: Exactement.

M. Peter Mancini: Très bien.

Merci.

La coprésidente (sénatrice Landon Pearson): Monsieur Forseth.

M. Paul Forseth: Merci.

Vous parliez de votre soeur. Quel âge a-t-elle?

Mme Amy Beck: Elle a quatre ans.

M. Paul Forseth: Lorsque vous avez parlé de la décision de la cour, de quelle cour s'agissait-il? S'agit-il de la cour provinciale?

Mme Amy Beck: Il s'agit du tribunal de la famille à Milton.

M. Paul Forseth: Un tribunal de la famille à Moncton.

Mme Amy Beck: Non, à Milton, en Ontario.

M. Paul Forseth: Comme vous le savez, la décision du tribunal peut être portée en appel.

Mme Amy Beck: En fait, il va y avoir un procès.

M. Paul Forseth: Il y a donc un processus d'appel.

Mme Amy Beck: Oui. Le juge a levé les bras en l'air et a déclaré qu'il ne savait pas quoi faire avec ce cas et il a ajouté qu'il devrait y avoir procès.

M. Paul Forseth: Donc, lorsque vous avez parlé d'ordonnance, il s'agissait d'une ordonnance provisoire et non d'une ordonnance finale?

Mme Amy Beck: On parle de garde exclusive provisoire, en vigueur depuis le mois de septembre.

M. Paul Forseth: Il s'agit donc d'une ordonnance provisoire qui est en vigueur depuis le mois de septembre et le procès est...

Mme Amy Beck: Mais il n'aura pas lieu avant encore au moins un mois.

M. Paul Forseth: D'accord.

Vous avez parlé des problèmes relatifs aux services juridiques, j'imagine donc que votre père demande la garde?

• 1140

Mme Amy Beck: C'est ce qu'il demande depuis le début. C'est le coeur du problème.

M. Paul Forseth: Très bien. Présente-t-il lui-même sa cause?

Mme Amy Beck: Il présente sa cause lui-même car il ne peut pas se permettre d'engager un avocat.

M. Paul Forseth: Ce procès va se dérouler devant un tribunal de la famille.

Mme Amy Beck: Oui.

M. Paul Forseth: Merci.

La coprésidente (sénatrice Landon Pearson): Docteur Bennett.

Mme Carolyn Bennett: Je tiens aussi à vous remercier d'être venue et de partager avec nous ces événements très personnels, car nous savons tous que pour élaborer des politiques gouvernementales qui soient justes et équitables nous devons penser aux personnes qu'elles vont toucher. Je crois que ces histoires personnelles nous aident à comprendre que les mots que l'on peut lire sur le papier ont des répercussions sérieuses sur la vie des gens.

Il y a trois sujets qui reviennent sans cesse. Plusieurs d'entre vous nous ont dit qu'il était très important d'avoir les ressources nécessaires si l'on veut apporter un soutien juridique approprié aux enfants ou à une personne qui doit répondre à une allégation. Dans l'Ontario de Mike Harris, ce ne semble pas être une priorité, quand on regarde de quelle façon on distribue l'aide juridique. Je crois que nous devons voir à ce que l'aide soit disponible.

J'ai cru comprendre qu'il y a, dans votre situation, deux rapports psychologiques qui semblent avoir été ignorés. Qui les a payés, car cela fait partie des choses qu'on entend? Même si une bonne évaluation pouvait aider les enfants, personne ne peut se permettre de faire ou de payer une évaluation. Comment ont-elles été obtenues?

Mme Amy Beck: En fait, les évaluations ont été payées avant que mon...

Mme Carolyn Bennett: J'imagine aussi que dans les situations où il y a beaucoup de conflits... je me demande encore si les enfants devraient toujours avoir un avocat ou toujours avoir une voix. Pouvez-vous répondre à cela? Amber devrait-elle avoir un avocat?

Mme Amy Beck: Elle n'a que quatre ans, elle est donc un peu jeune.

Mme Carolyn Bennett: Mais si c'est quelqu'un qui plaide...

Mme Amy Beck: Absolument.

Mme Carolyn Bennett: Dans une situation où les intérêts de l'enfant ne sont pas clairs, cela pourrait aider votre père si les intérêts d'Amber étaient présentés par une personne indépendante.

Mme Tracy London: De mon point de vue, lorsque je regarde la situation de ma demi-soeur, les parents et les adultes n'ont pas pris les mesures adéquates et ne possèdent pas les ressources nécessaires pour attaquer le système juridique afin de résoudre leurs différends. J'ai bien peur que le système juridique ne ferait qu'aggraver le conflit, ce qui en bout de ligne causerait plus de tort à ma demi-soeur.

Je crois que nous aurions besoin d'une autorité publique ou d'un mécanisme auquel ma demi-soeur pourrait avoir recours. Elle a quinze ans et elle est capable de prendre des initiatives afin de déterminer elle-même, sans contrainte, avec lequel de ses parents elle préférerait vivre.

Malheureusement, elle n'a pas accès à l'aide juridique parce qu'elle est mineure. Elle n'a pas non plus accès aux responsables de la protection de la jeunesse car ce genre de questions ne font pas partie de leur champ de compétence.

Je crois que s'il existait un organisme de protection de l'enfance avec lequel ma soeur pourrait entrer en contact et expliquer sa situation familiale et les raisons pour lesquelles elle souhaite demeurer avec mon père, qui, pour l'instant, n'en a pas la garde, et avoir quelqu'un qui l'écouterait et qui serait capable de prendre des mesures concrètes afin de lui offrir des services de counselling ou d'essayer que ses parents en arrivent à un arrangement légal, Janet serait bien servie.

Mme Carolyn Bennett: Je crois que nous sommes tous inquiets lorsque le Bureau de l'avocat des enfants, ici en Ontario, nous dit qu'il ne réussit à assigner des avocats que dans 60 p. 100 des cas qui lui sont référés.

• 1145

Je crois que ce qui nous préoccupe le plus c'est qu'il y a beaucoup d'autres cas qui ne sont jamais référés. On devrait peut-être offrir la possibilité d'un accès direct, dans un monde idéal... le système d'opposition semble être le grand responsable dans beaucoup de cas, pensez-vous que certains de ces problèmes pourraient être résolus de façon plus efficace s'il y avait une sorte de clinique familiale multidisciplinaire où l'on travaillerait de concert avec la cour? Tout le monde serait présent, y compris le comptable, le psychologue et le travailleur social et l'on aurait accès aux ressources nécessaires à une résolution de la situation. Ne serait-ce pas mieux que d'avoir les différentes parties et leurs avocats respectifs?

Mme Amy Beck: Je crois que n'importe quoi serait mieux que cela. Mais ce n'est pas une question à laquelle on peut facilement répondre, parce que...

Mme Carolyn Bennett: Nous ne connaissons pas vraiment le modèle.

Mme Amy Beck: Oui. C'est très difficile.

Mme Tracy London: D'après moi, Janet a le droit d'être représentée par un avocat parce que je crois qu'elle a légalement le droit de choisir l'environnement dans lequel elle considère qu'elle sera le mieux.

Ce qui m'inquiète quand on parle de système multidisciplinaire ou de système de médiation c'est que très souvent les intérêts du parent l'emportent sur le point de vue de l'enfant et même s'il existe des problèmes avec le système d'opposition... je crois qu'un des principaux problèmes du système d'opposition est que très souvent l'enfant est perdu, oublié. Je ne dis pas que l'enfant devrait avoir son propre avocat, on aurait alors trois parties qui se disputeraient entre elles, mais je crois qu'il devrait y avoir un système d'accès direct pour les enfants qui n'ont aucune sorte de droits légaux dans un litige portant sur la garde et les droits de visite.

Mme Carolyn Bennett: Merci.

La coprésidente (sénatrice Landon Pearson): J'aurais une question pour Jane.

Vous avez soulevé des points intéressants dont on n'a pas encore discutés, c'est-à-dire les questions qui ont trait aux enfants du divorce et les relations à long terme qu'ils ont avec leurs parents biologiques, particulièrement dans le domaine des testaments, de la disposition des biens et autres choses du même genre. Je ne crois pas que je me sois arrêtée à cela avant. Vos recommandations sont très intéressantes.

Je me demande si vous ne pourriez pas élaborer un peu sur ce que vous avez déjà dit. En vous écoutant on peut entendre l'histoire qu'il y a derrière, le besoin de continuité qu'a l'enfant du divorce face à son parent biologique, savoir s'il est malade ou décédé ou peu importe...

Mme Jane King: D'accord. Je n'ai pas préparé une introduction de cinq minutes pour accompagner mon histoire. C'est une histoire assez compliquée. Au moment où mes parents se sont séparés, leurs trois filles avaient respectivement 14, 11 et 8 ans. Ils ont divorcé deux ans plus tard. Mon père a obtenu la garde de ma soeur aînée et ma soeur cadette et moi sommes allées vivre avec ma mère et... je vous le demande encore, désirez-vous une version abrégée de mon histoire ou voulez-vous que j'élabore...

La coprésidente (sénatrice Landon Pearson): Je ne faisais que répéter les faits... car j'ai l'impression d'avoir entendu d'autres cas du même genre où, lorsque les parents divorcés se retrouvent dans des mondes différents, les enfants sont oubliés, n'ont plus de liens. Ils sont aussi mis de côté lorsqu'il est question des biens parentaux et lorsque vous dites qu'en fait une portion des avoirs parentaux a été accumulée par les deux parties ou que les deux y ont contribué... mais ils sont divisés et vous n'y avez plus accès.

Mme Jane King: C'est exact. Lorsque ma mère... il y a eu beaucoup de violence... Dans notre famille, nos parents n'ont jamais coopéré lorsqu'il était question de l'éducation des enfants et pourtant l'éducation en collaboration est tout à l'avantage des enfants. La violence a duré 25 ans, en fait jusqu'à ce que mon père meure. Il est mort à 62 ans. Mes soeurs et moi ne nous attendions pas à ce qu'il meure et cela a été tout un choc pour nous. Nous n'avons pas eu de temps pour nous préparer, pas de période de transition. Mais cela reflète bien l'absence de transition que nous avons subie au moment où nos parents se sont séparés. Nous n'avons pas eu non plus de transition au moment de leurs deuxièmes mariages, ils se sont tous les deux remariés.

• 1150

Le second mariage de ma mère n'a duré que cinq ans. C'est à cette période que ma belle-mère est entrée dans le décor; ma mère divorçait à nouveau et revenait à la maison mais elle nous avait laissées à l'extérieur de la province. Pour être bref, disons seulement que nous avons subi des expériences traumatisantes à cause du manque de périodes de transition; les enfants ont réellement besoin de ces périodes au moment de la séparation, du divorce ou du remariage. Avec le temps, vous intériorisez tout cela et il arrive que vous ne puissiez plus identifier la source de vos souffrances comme étant ce qu'un avocat appellerait la distance qui existe entre un de vos deux parents et vous-même.

Si je vais consulter un avocat, il va me demander quelle est la cause de la brouille et va somme toute me dire que j'en suis responsable car je suis maintenant une adulte, assise dans son bureau et je dois lui expliquer pourquoi il y a eu brouille, le rôle que j'ai joué et je dois aussi me défendre comme une adulte.

La situation actuelle n'a pas de liens avec les autres événements qui sont survenus et qui ont amené la question du testament. On présume que mon père était en possession de toutes ses facultés lorsqu'il a rédigé son testament mais j'ai entendu d'autres histoires et je crois fermement que mon père souffrait de violence psychologique aux mains de sa femme. Nous ne comprenions pas cela car pour nous il a été un parent tyrannique. L'envers de la médaille dans un cas de tyrannie c'est que lorsque la personne entre dans une nouvelle relation, elle devient souvent celle qui est tyrannisée.

C'est très bouleversant pour un enfant, spécialement après avoir subi de nombreux changements si traumatisants. Franchement, la brouille, le manque de renseignements et le fossé qui s'est créé et qui nous a empêchées de savoir remontent tous au divorce. De plus, la belle-mère, dans ce cas-ci ma belle-mère, nous a empêchées de savoir. Nous n'avons rien reçu par écrit. Nous n'avons rien reçu par l'entremise d'une personne plus âgée comme mon parrain ou la première femme de mon père, que j'appelle notre première belle-mère qui n'était pas mariée avec mon père mais qui a fait partie de la vie émotive de notre famille pendant près de 13 ans. Cette information n'a pas été transmise parce qu'en bout de ligne elle ne voulait pas qu'elle soit transmise, car cela aurait pu l'empêcher de garder tous les biens pour elle-même.

La coprésidente (sénatrice Landon Pearson): En conclusion, pensez-vous donc que dans le plan d'éducation des enfants, qui je crois est recommandé par bon nombre de gens dans les cas de divorce, on devrait aller au-delà de 18 ans, qu'il devrait y avoir une entente dans laquelle on s'engagerait pour la vie?

Mme Jane King: Premièrement, on peut refuser l'accès à un parent en utilisant des moyens émotionnels, par exemple, lorsque le beau-parent vous rend mal à l'aise durant les visites. Vous êtes inconfortable parce que vous n'êtes pas venu depuis longtemps, ce qui en fait est un résultat du divorce.

Deuxièmement, il y a trop à gagner pour que le beau-parent n'abuse pas de son pouvoir. Si les enfants naturels étaient protégées par une loi sur les avoirs parentaux, je pense qu'il y aurait de nombreux changements dans la dynamique des familles.

Premièrement, cela semblerait plus démocratique parce qu'une personne ne se marierait pas en pensant qu'à long terme elle pourrait obtenir les avoirs de son partenaire de vie. De plus, les adultes auraient probablement une attitude différente envers les enfants, ce qui faciliterait la famille étendue qui aurait dû être formée mais qui ne l'a pas été.

La coprésidente (sénatrice Landon Pearson): Vous nous avez apporté, en plus de vos recommandations précédentes, beaucoup de matière à réflexion. Merci.

Sénatrice DeWare.

La sénatrice Mabel DeWare: Je tiens simplement à demander à Jane si son père est prêt à adopter Janet. Est-il prêt à l'adopter?

Mme Tracy London: S'il avait les ressources nécessaires pour affronter le système juridique, il le ferait certainement.

• 1155

Je crois que si Janet pouvait présenter son cas à une personne qui plaiderait en sa faveur et qui ferait valoir son droit à se faire entendre et son droit de choisir le parent qu'elle croit le plus apte à prendre soin de ses intérêts, elle dirait qu'elle souhaite être adoptée par mon père.

La sénatrice Mabel DeWare: Bien. Merci.

La coprésidente (sénatrice Landon Pearson): Merci.

Y a-t-il d'autres questions? Sénatrice Cools.

La sénatrice Anne Cools: Merci beaucoup.

Je tiens à remercier les témoins d'avoir exprimé ce qui, je crois, est sans doute le côté le plus délicat et le plus sensible de cet ensemble de problèmes. Je m'empresse d'ajouter que bon nombre de personnes, dont moi-même, ont travaillé fort pendant des années afin de libéraliser le divorce, c'était d'ailleurs l'idée maîtresse derrière la Loi sur le divorce de 1968, puis celles de 1985 et de 1986. Mais depuis trente années, le divorce est très répandu—à un certain temps, il fallait à chaque fois obtenir une loi du Parlement—nous devons admettre que malheureusement nous ne nous sommes pas arrêtés pour étudier les conséquences du divorce sur les enfants.

D'après votre âge—vous avez 25 ans, c'est bien ça; je crois que votre nom est Amy—il est clair qu'il est grand temps que nous examinions les répercussions du divorce sur les enfants. Cela fait près de trente ans, ce qui signifie que deux générations ont grandi dans ces conditions.

J'ai remarqué que vous avez toutes les trois soulevé certaines questions. À ceux qui sont assis à gauche, vous avez parlé sans cesse du manque de ressources financières pour affronter—je crois que c'est le terme que vous avez employé—le système juridique. Bon nombre d'entre nous peuvent s'asseoir et retenir les services d'un avocat, aller en appel, faire ceci et faire cela. Mais souvent, les gens n'ont pas les ressources financières nécessaires. Amy, je crois même que vous avez dit que votre père devait assurer lui-même sa défense car il ne disposait pas des ressources nécessaires pour engager un avocat.

Ma question est très intéressante. Vous faites toutes référence au fait qu'il devrait y avoir quelqu'un quelque part dans la collectivité à qui les enfants pourraient s'adresser. J'ai bien entendu le témoin ici, je crois. Ma question est donc la suivante. Pensez-y bien. Dans notre pays, le Canada, qui est le protecteur ultime des enfants? Il est peut-être assez difficile de répondre à cette question, mais essayez quand même. Voyons qui le sait. Voyons quels membres du présent comité sont au courant.

La coprésidente (sénatrice Landon Pearson): Qui veut commencer?

La sénatrice Anne Cools: Je vous dirais que c'est le noeud du problème.

Mme Tracy London: Je dirais que la responsabilité est partagée. Les enfants d'un certain âge peuvent déterminer eux-mêmes qui est leur protecteur: le parent. Mais, naturellement, les parents sont incapables d'assumer leurs responsabilités sans l'aide de la collectivité ou du gouvernement.

En ce qui concerne les enfants et leur capacité de plaider leur cause ou d'engager un protecteur lorsqu'ils sont assez vieux pour dire qu'ils ont besoin d'aide mais qu'ils sont incapables d'obtenir du parent l'aide dont ils ont besoin, je crois que le gouvernement, que ce soit au niveau provincial ou fédéral, a l'obligation de mettre sur pied un système—par exemple, il pourrait s'agir d'un système de protection de l'enfant—dans lequel il y aurait des travailleurs qui pourraient aider les enfants qui sont au coeur d'un litige portant sur la garde ou les droits de visite. Ils pourraient se rendre là et dire qu'ils ont besoin d'aide parce qu'ils sont en danger. Il pourrait s'agir d'un système dans lequel le travailleur aurait le pouvoir d'agir dans cette situation.

Mme Jane King: C'est une question très intéressante.

Je crois que ça tombe dans les limites de la famille. Mais je pense que l'État, la nation, devrait définir ce qui constitue une famille démocratique. Je crois que c'est la vraie question. Je pense que la question est la démocratie à l'intérieur de la famille.

• 1200

Je crois que mon cas démontre vraiment qu'en bout de ligne, si vous regardez les testaments et les successions, qui sont en soi des questions très systématiques, vous vous apercevez qu'il n'y a pas de démocratie dans la famille telle que définie par l'État et je crois que l'État devrait mettre en place certaines définitions.

Je suis ici devant vous comme une enfant, une enfant de 40 ans, n'ayant accès à aucune médiation en matière de testaments et de successions. Je n'ai aucun droit dans un système où mon père, que j'aimais beaucoup—et je sais qu'il m'aimait aussi et le testament en est la preuve—peut, d'un coup de stylo, me dépouiller de mes droits dans un moment de colère, de frustration ou de rage.

Mme Amy Beck: Je pense que c'est la famille qui a l'obligation de protéger les enfants, mais quand on connaît le nombre de familles qui échouent, il faut se fier à des gens comme nous.

La coprésidente (sénatrice Landon Pearson): Merci infiniment.

La sénatrice Anne Cools: Après avoir écouté le témoin, je crois que Jane a soulevé des questions très importantes qui dépassent de beaucoup sa situation personnelle. Je voudrais que le comité demande à quelques professionnels de venir témoigner afin qu'ils puissent répondre à certaines questions car la situation qu'elle a décrite, des cas où les enfants étaient complètement tenus à l'écart au moment du décès ou exclus du testament et ainsi de suite, soulève plusieurs questions importantes que le comité doit étudier de plus près.

Je vous remercie toutes les trois de nous avoir fait part de tout cela.

La coprésidente (sénatrice Landon Pearson): Merci beaucoup.

Le comité reprendra ses activités à 13 heures.

• 1202




• 1307

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Bienvenue à notre séance de mercredi après-midi. Cette semaine, nous avons l'impression d'être devenus des résidants de Toronto.

Pour mémoire, je dirai que vous êtes des représentants, m'a-t-on dit, du Comité de coordination de London visant à éliminer la violence faite aux femmes. Nous avons avec nous Jan Richardson, directrice exécutive de la Maison communautaire pour les femmes; Bina Ostoff, conseillère au Centre d'aide pour femmes battues de London; et Margaret Buist, avocate—puis-je dire spécialisée en droit de la famille?—à London.

Mme Margaret Buist (avocate, Droit de la famille, Comité de coordination de London visant à éliminer la violence faite aux femmes): Oui.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Bienvenue. Je devrais vous expliquer les procédures. Je sais que vous parlez chacune au nom de différents groupes, vous aurez donc cinq minutes chacune. Nous vous demandons d'essayer de respecter cet horaire. Après vos exposés, nous passerons ensuite aux questions des membres du comité.

Madame Richardson, si vous voulez bien commencer.

Mme Jan Richardson (directrice exécutive, Maison communautaire pour les femmes, Comité de coordination de London visant à éliminer la violence faite aux femmes): Je vous remercie de l'occasion que vous nous offrez aujourd'hui.

Comme M. Gallaway l'a indiqué, nous sommes ici aujourd'hui au nom du Comité de coordination de London visant à éliminer la violence faite aux femmes. Le comité a été formé en 1980 et il a pour mandat de travailler à l'élimination de la violence faite aux femmes dans notre collectivité.

Nous avons réussi à retenir l'attention aux niveaux national et international grâce aux efforts que nous avons déployés pour développer un modèle de partenariat et de collaboration entre divers services, dont la santé, la justice, l'éducation et les services sociaux.

Parmi les membres du Comité de coordination que nous représentons aujourd'hui on compte des policiers, un procureur de la Couronne, un juge de la cour provinciale, des investisseurs, des agences de lutte contre la violence et des services aux enfants comme la Société de protection de l'enfance, Mme Vanier et la clinique de la cour de la famille.

Le Comité de coordination appuie le mandat du présent Comité spécial mixte sur la garde des enfants et les droits de visite, en particulier l'étude et l'analyse des questions relatives aux ententes portant sur la garde et les droits de visite après une séparation ou un divorce.

Le Comité coordonnateur appuie aussi une approche axée sur l'enfant face aux politiques et aux pratiques du droit de la famille qui reconnaissent particulièrement la signification de la violence faite aux femmes dans les questions de garde et de droits de visite.

Le Comité coordonnateur croit fermement qu'il est dans le meilleur intérêt des enfants que toute modification à la loi ou aux politiques soit accompagnée d'une analyse des répercussions de la violence faite aux femmes et aux enfants. Nous croyons que les femmes et les enfants ont le droit de vivre dans un environnement sans violence et que la violence faite aux femmes et aux enfants dans les cas de garde et de visite n'est pas une exception et qu'elle ne doit pas être ignorée.

Nous soutenons que la loi devait être rédigée de façon à mieux protéger les femmes battues et leurs enfants. Nous croyons de plus que les lois subséquentes et les décisions en matière de politiques devront reconnaître de façon précise la signification de la violence faite aux femmes dans les questions touchant à la garde et aux droits de visite afin que les lois et les politiques ne contribuent plus à exposer les femmes et les enfants à un cycle de violence sans fin.

• 1310

Cet après-midi, nous avons l'intention d'attirer votre attention sur des recommandations et des rapports pertinents ayant trait à la garde et au droit de visite des enfants et à la violence faite aux femmes.

Aujourd'hui, nous en savons heureusement beaucoup plus sur la violence faite aux femmes et sur les répercussions qu'elle a sur notre société, en partie à cause de la multitude d'informations recueillies auprès de la police, des services de reportage et des résultats de recherche, dont l'enquête de Statistique Canada qui a été dévoilée en 1993. L'enquête de Statistique Canada sur la violence faite aux femmes représente la recherche la plus complète jamais réalisée dans le monde. Dans ce rapport, on n'a étudié que les comportements qui sont considérés comme une infraction au Code criminel.

Les résultats de l'enquête indiquent que 25 p. 100 de la population féminine, ou si vous préférez, une Canadienne sur quatre, a déjà été victime de violence physique ou sexuelle aux mains de son conjoint. Dans la description de conjoint, on inclut les conjoints de fait. De plus, 20 p. 100 des incidents de violence signalés dans l'enquête étaient assez sérieux pour se traduire par des blessures. Les enfants des femmes battues sont aussi affectés de façon négative, un autre résultat de l'horreur de la violence faite aux femmes. De plus en plus de données et de recherches cliniques indiquent que les enfants témoins de violence faite à une femme souffrent de traumatismes émotifs. Les études indiquent que les enfants qui assistent à des scènes de violence familiale ont des comportements agressifs et antisociaux, qu'ils sont inquiets et inhibés. Dans les familles où il y a de la violence, les enfants courent aussi le risque d'être blessés.

Une enquête auprès de plus de 6 000 familles américaines complétée en 1990 par Straus et Gelles indique que 50 p. 100 des hommes qui agressaient fréquemment leurs femmes violentaient aussi fréquemment leurs enfants. De plus, des études démontrent que certaines personnes ont tendance à se retrouver dans des relations abusives.

Afin que vous ayez plus de renseignements sur la pertinence de la violence faite aux femmes et de la garde et des droits de visite, je cède la parole à Bina.

Mme Bina Ostoff (conseillère, Centre d'aide pour femmes battues de London, Comité de coordination de London visant à éliminer la violence faite aux femmes): Merci.

Le Comité de coordination de London croit que le contexte de la violence faite aux femmes est crucial et devrait intéresser tout particulièrement le Comité spécial mixte sur la garde des enfants et les droits de visite. Pour de nombreuses femmes battues et leurs enfants, il y a des dangers spécifiques à la période de la séparation et du divorce et des dangers particuliers rattachés aux questions de la garde des enfants et des droits de visite dont on devrait tenir compte durant l'élaboration des politiques en matière de droit de la famille.

Dans les cas de violence faite aux femmes, le moment de la séparation est particulièrement dangereux. Selon ses habitudes de contrôle et de domination, l'agresseur dit à ses victimes depuis des années que si elles, leurs enfants ou leurs familles, osent partir, il les battra ou les tuera. La peur que ressentent ces femmes est très justifiée.

Browne et William indiquent que lorsqu'une victime de violence entame les premières démarches pour recouvrer sa liberté, il y a fréquemment escalade de la violence jusqu'à un point qui peut être fatal et Hart confirme que les femmes battues sont peut-être plus susceptibles de se faire tuer lorsqu'elles partent ou qu'il devient évident pour leur conjoint qu'elles comptent partir pour de bon. De plus, les agresseurs tuent ou essaient de tuer leurs enfants lorsque les victimes tentent de les quitter.

De plus, lorsqu'il est question de violence faite aux femmes et de litiges portant sur la garde des enfants et les droits de visite, la violence ne s'arrête pas avec la séparation. Beaucoup de personnes travaillant avec des femmes battues croient que la violence va s'arrêter dès qu'elles vont quitter la situation de violence. En fait, un grand nombre de femmes ont indiqué que lorsqu'elles sont parties, lorsqu'elles ont entrepris les courageuses démarches pour partir, l'agresseur a continué ses jeux de pouvoir et ses tactiques de contrôle, qu'on parle de harcèlement, de poursuite ou d'agression physique ou émotionnelle.

Il est aussi évident d'après les cas que nous avons au Centre d'aide pour femmes battues que l'agression continue durant le processus de détermination de la garde des enfants et des droits de visite. Beaucoup de femmes ont peur de perdre leurs enfants car beaucoup d'agresseurs ont menacé de les enlever. Ces craintes sont aussi justifiées. Dans une étude américaine sur le parti pris pour un sexe—de nombreux Américains ont mené des études et ils ont observé que les cours traitaient les demandes de garde des enfants déposées par les femmes de façon beaucoup moins favorables que celles qui étaient présentées par des hommes.

Les articles portant sur les effets du divorce insistent sur les effets négatifs des conflits sur les enfants. Il s'agit d'une importante étude réalisée par Wallerstein et Kelly. Cependant, huit ans plus tard, il est important de noter que le même auteur s'oppose à la garde conjointe imposée par le tribunal contre le désir d'un des parents, particulièrement dans le cas de relations de violence.

• 1315

Liss et Stahly ont observé que les pères violents étaient beaucoup plus susceptibles de contester la garde. Geffner et Pagelow indiquent que les nouvelles tendances devant les tribunaux, particulièrement celles qui ont trait à la garde partagée et à la médiation, peuvent avantager les conjoints violents qui veulent maintenir leur domination et garder le contrôle sur les partenaires qui cherchent à les quitter.

À l'heure actuelle, le droit canadien de la famille ne tient pas compte de façon adéquate de la situation des femmes battues dans les litiges portant sur la garde des enfants et les droits de visite. Nous croyons que par le biais des systèmes du droit de la famille, le gouvernement a un rôle important à jouer dans l'élimination de la violence faite aux femmes et aux enfants. Il est très important, au moment où l'on considère apporter des modifications au droit de la famille, de bien étudier les questions de violence faite aux femmes dans les cas portant sur la garde des enfants et les droits de visite.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Merci.

Pour terminer, madame Buist.

Mme Margaret Buist: Merci, monsieur.

Nous essayons aujourd'hui de vous dire que les cas de violence faite aux femmes et aux enfants ne sont pas des cas d'exception lorsqu'il est question de la garde ou des droits de visite. La violence est malheureusement trop répandue. Les recommandations que nous présentons au comité ont été élaborées en tenant compte de ce fait.

Nous croyons que les lois canadiennes portant sur la garde et les droits de visite devraient prendre en considération l'existence de la violence pour que les tribunaux puissent en tenir compte dans les cas portant sur la garde et les droits de visite. Au pays, Terre-Neuve est la seule province à avoir une loi de ce genre. Cependant, la plupart des pays du Commonwealth, dont le Royaume-Uni, l'Australie et la Nouvelle-Zélande, et de nombreux États américains font référence, de façon précise, à la violence comme point à prendre en considération dans les cas de garde et de droits de visite.

Il faut que nos tribunaux criminels et nos tribunaux de la famille aient une définition commune de la violence qui soit la même partout au pays pour que nous sachions tous de quoi nous parlons.

Nous vous recommandons aussi que lorsqu'un parent—et je désire utiliser un terme générique mais je tiens à souligner que d'après les statistiques il s'agit plus souvent du père—fait preuve de violence à l'endroit de son conjoint ou de ses enfants, cela devrait constituer un facteur important dans le rejet de sa demande de garde. Dans notre pays, il n'est pas approprié qu'un parent violent soit le premier pourvoyeur de soins. Ce n'est pas un exemple que nous voulons donner à nos enfants.

Il ne devrait pas être question de garde partagée dans les cas de violence familiale. Il ne devrait pas être question de garde partagée et encore moins de garde exclusive dans le cas d'un parent violent.

Si les parents—et je dis «parents» mais il s'agit surtout des pères—sont violents envers leur femme ou leur enfant, on devrait appliquer les mêmes principes à leurs droits de visite.

À nouveau, je vous le demande, pourquoi devrions-nous donner cela en exemple aux enfants? Pourquoi devrions-nous accorder à un parent violent le droit de maintenir un contact avec ses enfants lorsqu'il leur donne un si mauvais exemple?

De nombreuses études portent sur les répercussions négatives que l'observation de la violence a sur les enfants. Nous irions même jusqu'à dire que si un parent fait preuve de violence à l'endroit d'un enfant, et s'il s'agit d'un cas sérieux de violence, les droits de visite devraient être suspendus jusqu'à ce que le parent puisse démontrer qu'il a tiré une leçon de ses erreurs passées et qu'il ne sera plus violent.

Peut-être que dans les cas moins sérieux—s'il est possible de quantifier la violence—les visites pourraient être supervisées. Nous devrions avoir des installations adéquates qui pourraient être utilisées durant les visites supervisées.

Nous voulons aussi insister sur la médiation, s'il doit y en avoir... et nous sommes en faveur de la médiation. J'aimerais que vous compreniez que nous vous présentons des cas où la violence est présente. Dans les cas de violence, la médiation n'est pas appropriée. Le principe fondamental de la médiation est l'égalité du pouvoir de négociation. L'égalité n'existe pas dans les cas de violence.

Nous tenons aussi à ce que le comité sache—et nous avons un mémoire que nous vous remettrons, dans lequel nous parlons des expériences dont nous avons été témoins à London—que les évaluations de la garde et des droits de visite sont importantes dans les litiges portant sur la garde si les personnes responsables de l'évaluation de la situation ont reçu une formation adéquate et possèdent des qualifications professionnelles de base et qu'elles comprennent ce qu'est la violence. Les maisons d'hébergement et les organismes de pression jouent un rôle important dans notre système.

• 1320

Il est essentiel que l'aide juridique reçoive les fonds appropriés. Dans cette province, nous savons tous ce qui est arrivé aux femmes et aux enfants après les réductions à l'aide juridique dans le domaine du droit de la famille.

Les programmes d'éducation et d'orientation destinés aux hommes violents jouent aussi un rôle important dans l'élimination du cycle de violence et nous devons aussi offrir aux fournisseurs de services des cours de formation sur la question de la violence.

Par exemple, dans cette province—je le sais parce que je donne le cours de préparation au Barreau en droit de la famille—les avocats, à la fin de leurs études, reçoivent au plus deux heures de formation sur les questions portant sur la violence faite aux femmes et aux enfants. Dans cette province, seulement deux cours portant sur la violence ont été offerts au cours des dix dernières années, et près de 500 avocats y ont participé—quand on sait qu'il y a près de 1000 avocats qui sont reçus au Barreau de l'Ontario chaque année. Cet exemple simple vous permet de constater l'ampleur des lacunes en matière de formation pour les professionnels qui traitent des questions qui relèvent du droit de la famille.

En conclusion, nous demandons au comité de voir à ce les questions précises qui se rapportent à la violence faite aux femmes et aux enfants soient abordées lorsque vous présenterez vos recommandations sur les modifications à apporter aux lois et aux politiques en matière de garde et de droits de visite. Merci beaucoup.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Merci. Nous allons maintenant passer à la période de questions, commençons avec celle du Docteur Bennett.

Mme Carolyn Bennett: J'aimerais seulement que vous nous disiez quelle serait votre définition de la violence.

Mme Jan Richardson: La définition utilisée par le Comité de coordination est la suivante: tout acte qui contribue à intimider ou à menacer une femme ou un enfant. Je tiens aussi à mentionner que dans son enquête, Statistique Canada a utilisé une définition beaucoup moins large, on parle d'acte criminel selon le Code criminel du Canada. Il existe, en plus de la définition basée sur le Code criminel utilisée par Statistique Canada, deux autres définitions que nous utilisons dans la collectivité pour guider nos activités et pour nous permettre de voir les choses dans leur ensemble.

Mme Carolyn Bennett: Donc un seul acte pourrait définir une relation violente et un tout autre ensemble de nouvelles règles pourraient s'appliquer durant les procédures de garde et de droits de visite, s'il y avait déjà eu un tel acte.

Mme Margaret Buist: Imaginez une situation où le seul acte serait celui où le mari dit simplement: «Si tu me quittes, je vais égorger notre enfant». Donc oui, un seul acte peut être interprété comme de l'intimidation ou de la violence.

Mme Carolyn Bennett: Je suppose que la préoccupation tient à la continuité des différences de pouvoir et, dans plusieurs cas déjà abordés, aux incapacités, si elles sont sévères et prolongées —pensez-vous que s'il y avait une disposition spéciale qui tenait compte de la violence dans la Loi du divorce, une définition de la violence devrait être incluse dans la loi?

Mme Margaret Buist: Je crois que c'est essentiel. Nous avons besoin d'une définition à laquelle nous pourrons nous référer. Si je me fie à ma propre expérience devant les tribunaux de la famille, cela aiderait grandement du côté juridique car bon nombre de juges considèrent que la violence est physique et non émotionnelle. Je crois donc que nous avons absolument besoin d'une définition.

Mme Carolyn Bennett: Si on parle d'intimidation et de... Je suis troublée car je suis la mère de deux adolescents et dans notre maison, il y a un trou dans le mur que nous n'avons pas encore réparé, c'est le résultat d'une altercation au cours de laquelle l'un des mes deux fils a donné un coup de poing dans le mur. Je m'inquiète seulement du fait que si la définition est trop large —il y a bien peu de gens parmi nous qui, dans un moment de colère, n'ont jamais dit des choses qu'ils ont regrettées par la suite—cela pourrait fausser les règles. Pouvez-vous m'aider à mieux comprendre? Quel genre de définition accepteriez-vous, une définition très large ou une définition plus étroite?

Mme Jan Richardson: Vous soulevez un point intéressant et il y en a plusieurs...

• 1325

Mme Carolyn Bennett: J'imagine aussi que, du point de vue de la femme, on parle d'un tout autre ensemble de situations.

Avant que j'oublie, l'enquête de Statistique Canada ne portait que sur la violence faite aux femmes, car je crois que le comité a aussi entendu des témoignages sur des cas d'intimidation faite aux hommes et le fait que ces actes ne soient pas encore quantifiés...

Mme Jan Richardson: Docteur, laissez-moi d'abord vous parler du genre d'évaluation, je crois que c'est ce que vous voulez dire, que notre système pourrait offrir afin de déterminer le genre de violence subie et sa pertinence dans le cadre des procédures. En fait, il existe présentement un grand nombre d'outils d'évaluation qui peuvent nous aider à déterminer le déséquilibre du pouvoir qui est à la source du problème de violence qui nous intéresse.

Nous recommandons certaines définitions et l'utilisation de ces définitions permettra ensuite de faire une évaluation équitable de la situation. On étudie les différentes formes de violence et le déséquilibre qui existent. Je crois qu'il serait naturel d'ajouter cela à la loi.

En réponse à votre deuxième point concernant l'enquête de Statistique Canada et ce que vous considérez comme l'envers de la médaille, laissez-moi vous rappeler que 12 300 femmes à travers le pays ont été interviewées et que c'est de là que provient la statistique d'une femme sur quatre.

On a réalisé de nombreuses études à travers le monde pour essayer d'étudier l'incidence de la violence faite aux hommes par les femmes. Même si nous faisons partie d'un comité travaillant à l'élimination de la violence faite aux femmes, nous reconnaissons qu'il y a certains cas de violence faite aux hommes. Les résultats indiquent cependant que dans la vaste majorité des cas, on avance même des chiffres allant jusqu'à 98 p. 100, ce sont les femmes qui sont victimes de violence et les hommes ne constitueraient que 2 à 5 p. 100 des cas de violence exercée par des femmes. Bien que nous soyons d'accord pour dire que cela existe, nous devons reconnaître que, dans la grande majorité des cas, ce sont les femmes qui sont agressées.

Mme Carolyn Bennett: Et la violence faite aux enfants, les statistiques...

Mme Jan Richardson: Statistiquement, les résultats indiquent aussi qu'il y a un rapport entre la violence faite aux femmes et celles faite aux enfants. Le mémoire que nous vous présenterons contient de nombreux exemples de cette corrélation. Dans les cas de violence faite aux femmes, il y a corrélation directe avec la violence faite aussi aux enfants—par le partenaire masculin.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Sénateur Jessiman.

Le sénateur Duncan Jessiman: Merci, monsieur le président.

Je crois que j'ai bien compris lorsque vous avez dit qu'aux États-Unis, il y avait un parti pris pour les hommes. Ne s'agit-il pas de cas où les hommes tentent d'obtenir la garde ou des droits de visite et que la femme fait tout en son pouvoir pour que leurs demandes soient rejetées à cause de la violence? Est-ce que c'est dans ces cas que vous dites qu'il y a parti pris en faveur des hommes? Je veux seulement vérifier si je comprends bien.

Mme Bina Ostoff: Des études ont été menées dans de nombreux États américains et on a constaté que les tribunaux traitaient les demandes de garde déposées par des femmes de façon moins favorable que celles des hommes.

Le sénateur Duncan Jessiman: De garde?

Mme Bina Ostoff: Oui.

Le sénateur Duncan Jessiman: Oh, pas seulement les demandes de visite. Les renseignements qui nous ont été fournis indiquent qu'il y a un parti pris réel en faveur des femmes en ce qui concerne la garde. Vous nous dites maintenant qu'il y a des cas aux États-Unis qui sont contraires à cela.

Mme Bina Ostoff: Oui.

Le sénateur Duncan Jessiman: Allez-vous nous fournir ces renseignements?

Je pourrais comprendre que peut-être dans certaines circonstances où il est seulement question des droits de visite, mais vous nous dites... et nous allons bien sûr lire votre mémoire, mais cela me surprend que vous disiez que les tribunaux américains ont des partis pris en faveur des hommes. Mais ce sont vos résultats et nous allons les accepter...

Mme Bina Ostoff: Dans les situations de violence.

Le sénateur Duncan Jessiman: Ah, d'accord. Je comprends.

Mme Bina Ostoff: Bien. Merci.

Le sénateur Duncan Jessiman: De plus, je ne...

Mme Margaret Buist: Sénateur, J'aimerais aussi ajouter quelque chose, si vous me le permettez. En fait, dans une étude antérieure —nous ne l'avons pas mentionnée dans notre mémoire parce que nous nous sommes plutôt intéressées à la violence—on traite de cette situation. La plupart des hommes ne demandent pas la garde. Dans 85 p. 100 des cas, ils ne demandent pas la garde. Mais lorsque ces 15 p. 100 d'hommes demandent la garde, ils l'obtiennent dans plus de 50 p. 100 des cas.

• 1330

Le sénateur Duncan Jessiman: C'est ce que votre...

Mme Margaret Buist: C'est pour la garde.

Le sénateur Duncan Jessiman: Oui, merci. Et vous allez nous fournir des statistiques ou des études à cet effet.

Mme Margaret Buist: Oui, il y en a d'ailleurs quelques-unes dans notre mémoire.

Le sénateur Duncan Jessiman: Très bien.

Vous avez aussi dit que le droit de visite devrait être refusé si l'on peut démontrer que le parent qui n'a pas la garde a déjà fait preuve de violence à l'endroit de l'enfant. Que faites-vous lorsque le parent qui a la garde a déjà fait preuve de violence à l'endroit de l'enfant? Devrait-on apporter des modifications à la garde dans ces cas-là?

Mme Margaret Buist: Il n'y a rien pour excuser la violence faite à un enfant. Peu importe qui est la personne violente.

Le sénateur Duncan Jessiman: Très bien, et seriez-vous alors d'accord pour que, dans de tels cas, le tribunal songe à accorder la garde à l'autre parent?

Mme Margaret Buist: Absolument. Je crois que si vous faites preuve de violence envers un enfant, vous perdez vos droits en tant que parent.

Le sénateur Duncan Jessiman: Formidable.

Voici ma dernière question, elle s'adresse à n'importe laquelle de vous trois. Que pensez-vous des cas où il n'y a pas de violence, pas de retards dans les versements de la pension, et que malgré tout on refuse la visite au parent qui n'a pas la garde? Quel est votre point de vue dans de telles circonstances? Vous êtes ici et nous avons devant nous cette situation, pas de violence, pas de retard dans les versements de la pension et pour une raison quelconque, la mère se sert de l'enfant—je dis la mère parce que c'est elle qui a généralement la garde de l'enfant—et refuse la tenue des visites. Dites-nous, dans de telles circonstances, que feriez-vous? Quelles seraient vos recommandations dans de telles circonstances?

Mme Margaret Buist: Premièrement, s'il n'y a pas de violence —et n'oubliez pas, je parle maintenant à titre d'avocate spécialisée en droit de la famille, parce que notre mémoire porte sur la question de la violence...

Le sénateur Duncan Jessiman: Je comprends, mais vous représentez un groupe d'intérêts. D'autres personnes sont venues nous dire tout cela et vous êtes celles à qui nous disons, d'accord, si vous deviez rédiger la loi, dites-nous ce que vous feriez, si vous étiez à notre place.

Mme Margaret Buist: En tant qu'avocate spécialisée en droit de la famille, je peux vous dire que s'il n'y a pas de violence et qu'il n'y a pas de raison valable pour refuser l'accès autre que de punir l'ancien conjoint, c'est inacceptable. C'est un comportement révoltant. Et il faut y mettre un terme.

Le sénateur Duncan Jessiman: D'accord, mais que proposez-vous que nous fassions?

S'ils ne paient pas, nous leur enlevons leur permis de conduire; nous pouvons même leur enlever leur passeport. Nous pouvons faire plusieurs choses. Nous pouvons les mettre en prison et nous savons que les tribunaux en ont le pouvoir. Mais nous savons aussi qu'il y a un cas où je crois qu'une femme a été emprisonnée après avoir été reconnue couple d'outrage au tribunal à 22 reprises. Les tribunaux ne font donc pas respecter leurs propres lois.

Et vous, que faites-vous? Que faut-il mettre dans notre loi pour corriger la situation? Je sais que nous sommes d'accord sur ce qui est bien et ce qui est mal, mais que pouvons-nous faire?

Mme Margaret Buist: Je sais que le présent comité est préoccupé par la manière dont on peut faire respecter la loi sur les droits de visite.

Le sénateur Duncan Jessiman: Nous vous le demandons, que feriez-vous?

Mme Margaret Buist: Je crois qu'il y a des avantages et des inconvénients à une loi visant à faire respecter les droits de visite. De toute évidence, il y a l'outrage au tribunal, et nous avons toujours eu ce recours, qui se traduit par une amende ou une peine de prison. Il y a aussi toujours eu l'arme ultime contre le parent ayant la garde qui ferait cela, c'est-à-dire lui enlever la garde pour cause de destruction du lien qui existe entre l'autre parent et l'enfant.

Ce sont nos trois punitions les plus sévères.

Le sénateur Duncan Jessiman: Oui, terrible.

Mme Margaret Buist: Il n'y a pas d'autres punitions que nous pouvons imposer.

Le sénateur Duncan Jessiman: Mais le permis...

Mme Margaret Buist: Je crois que c'est une question d'éducation, comment nous pouvons enseigner aux parents à ne pas utiliser leurs enfants pour blesser l'autre, comment nous pouvons renseigner les juges pour qu'ils prennent ces questions au sérieux, comment nous pouvons enseigner aux avocats la manière d'amener leurs clients à avoir recours à la médiation, dans les cas où il n'y a pas de violence. Je crois que c'est un morceau important du puzzle. De toute évidence, ça va coûter cher. Ce n'est pas aussi facile que de passer une loi mais nous savons que la loi existe déjà. Les punitions sont aussi déjà en place.

Le sénateur Duncan Jessiman: Très bien. Comme vous ne voulez pas nous proposer de suggestions, puis-je vous en faire quelques-unes?

Ne serait-il pas juste que dans de pareilles circonstances —pas de violence, pas de retards sur les versements de la pension—que la même chose s'applique? Qu'ils perdent leur permis de conduire, leur passeport. S'ils savaient cela, ils se conformeraient peut-être et nous n'aurions pas à les envoyer en prison ou à prendre des mesures draconiennes. Êtes-vous d'accord avec cela?

Mme Margaret Buist: Je crois que perdre son enfant est beaucoup plus important que de perdre son permis de conduire.

• 1335

Le sénateur Duncan Jessiman: Ne faites pas cela. C'est ce que vous pensez.

S'ils savaient qu'ils vont perdre leur permis de conduire et que ce sera réellement appliqué—ils savent qu'ils peuvent perdre leur enfant, mais ce n'est jamais appliqué. Ils savent qu'ils peuvent aller en prison, mais ce n'est jamais appliqué. S'ils le savent, c'est évident qu'ils ne se conforment pas.

Mme Margaret Buist: Mais savez-vous ce qui m'inquiète à propos d'une législation sur l'application de la loi en matière de droit de visite, sénateur? C'est le fait que l'on ne croit pas les femmes et les enfants qui décident de parler de la violence dont ils sont victimes. Dans nos tribunaux, il est très fréquent qu'on ne les croit pas.

Un grand nombre de femmes refusent le droit de visite parce que leurs enfants ont été négligés ou maltraités lors de l'exercice du droit de visite ou parce qu'elles sont victimes de violence lors des échanges en vue de l'exercice du droit de visite. Si nous introduisons de nouvelles lois relativement à l'application des droits de visite, je demanderais instamment que l'on s'assure que ces lois contiennent des dispositions visant à protéger les femmes et les enfants qui allèguent qu'ils ont été victimes de violence lors de l'exercice du droit de visite.

Le sénateur Duncan Jessiman: Bien, je pense qu'il faut que ce soit plus que des allégations. C'est le coeur du problème. Nous avons entendu un grand nombre de témoignages concernant les allégations. Il était allégué que son enfant avait été victime de violence sexuelle, mais on a prouvé que ce n'était pas vrai. Ne parlez pas d'allégation; il faut des preuves.

Mme Margaret Buist: Prouver qu'un enfant a été victime de violence sexuelle est virtuellement impossible. Certaines de mes clientes ont dépensé jusqu'à 50 000 $ pour que j'essaie de le faire, et c'est vraiment difficile.

Le sénateur Duncan Jessiman: Merci beaucoup.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Merci.

Monsieur Mancini.

M. Peter Mancini: Merci.

Je pourrais poursuivre, mais je vais d'abord demander, en regard de la définition de violence—Carolyn a posé cette question, et je pense que nous devons y répondre. On a défini la violence comme tout acte qui a pour but d'intimider les femmes et les enfants. Je dois demander si cette définition peut-être modifiée pour parler de tout acte qui a pour but d'intimider le parent et l'enfant? Est-ce une définition acceptable de la violence?

Mme Jan Richardson: Tout acte qui a pour but d'intimider ou de menacer...

M. Peter Mancini: Le parent ou l'enfant. Si cette loi... Vous avez indiqué femmes, mais je pense que l'on doit mentionner d'une façon le fait que la violence peut... Vous avez cité Statistique Canada. Mais cette définition de la violence doit être globale, n'est-ce pas? Elle doit inclure les deux parents. Parfois, l'un ou l'autre des parents peut...

Mme Jan Richardson: Nous ne sommes pas en désaccord avec ce changement à la définition.

M. Peter Mancini: D'accord. Je vais essayer de poursuivre un peu sur les questions du sénateur.

C'est tellement difficile. Nous avons tous entendu parler de fausses allégations. Je sais que vous nous avez dit qu'il est fréquent que l'on ne croit pas les femmes lorsqu'elles font ces allégations, Mais quand nous disons que nous allons enlever l'accès, à moins qu'il ne soit supervisé, ou la garde, au parent qui est accusé, au parent qui est présumé être un auteur de violence, n'augmentons-nous pas l'enjeu dans le cas de la garde ou du droit de visite et invitons presque les deux parents, dans le feu de l'action, à faire des allégations?

Vous avez demandé, pourquoi devrions-nous récompenser un parent qui fait preuve de violence, et je suis d'accord avec vous, mais si on doit en venir à autant de sévérité, si c'est la mesure, n'y a-t-il pas une meilleure façon? N'est-ce pas une façon de susciter des allégations dans le cadre d'un processus accusatoire où le gagnant remporte tout.

Mme Jan Richardson: Le premier point dont vous parlez est une allégation de violence. Les choses étant ce qu'elles sont, je pense qu'il est important de regarder comment cette allégation est évaluée et vérifiée. Comme je l'ai indiqué précédemment, il existe un certain nombre d'instruments d'évaluation que le tribunal peut utiliser pour l'aider à examiner cette question. Cette évaluation peut inclure, en partie, l'historique des interventions de la police. Ce que nous savons, c'est que ce ne sont pas toutes les situations de violence qui aboutissent à un contact avec la police. Dans les faits, il semble que ce soit aussi peu que 20 p. 100. Cependant, ce sera un très bon indicateur: s'il y a eu un appel au 911, si la police a mené une enquête, peu importe qu'il y ait eu ou non des accusations antérieures. Je pense que c'est très important.

• 1340

Deuxièmement, il y a le fait que des évaluations de la sécurité et du risque sont en place. Les tribunaux de la famille qui ont été introduits en Ontario examinent les questions qui ont trait à l'évaluation dans le cadre d'une enquête, y compris les témoignages des membres de la famille et des amis. Je crois que l'allégation n'est pas le problème, mais que ferons-nous pour mener une évaluation sûre avec une certaine intégrité.

M. Peter Mancini: Bien, et je suis d'accord avec vous à savoir que le test final ne fonctionne pas maintenant. Je suis d'accord pour dire que le test final pour une allégation se passe en cour criminelle, lors qu'il faut faire la preuve au-delà de tout doute raisonnable. Dans notre système actuel, c'est le moyen ultime pour déterminer s'il y a eu ou non, une violence, pas nécessairement sur le plan émotionnel, mais certainement physique.

Mme Jan Richardson: Une accusation criminelle, oui.

M. Peter Mancini: Qui est l'arbitre ultime, si ce n'est pas nous? Si nous parlons de ceci, si nous disons que nous allons faire des évaluations et se sortir du processus judiciaire, à un certain moment donné, quelqu'un doit en arriver à une décision. Je suis surpris car j'ai une formation juridique et c'est difficile pour moi de l'oublier, mais faisons-nous cela en fonction de la prépondérance des probabilités, au-delà de tout doute raisonnable? Quel est le test final qui permettra à l'arbitre ou à l'expert évaluateur de déterminer si les allégations sont vraies?

Mme Jan Richardson: L'une des recommandations que nous considérons consiste à offrir des services pour traiter de façon précise de cette question. Une solution pourrait être de s'assurer que les évaluations portant sur la garde et sur le droit de visite sont réalisées par des personnes adéquatement formées pour mener ce genre d'évaluation. Ce devrait être une tierce partie, neutre, qui est experte dans l'art de l'évaluation et qui est capable de faire une recommandation au tribunal à partir d'entrevues, et des autres preuves qui peuvent en découler. Dans ce genre d'évaluation portant sur la garde et le droit de visite, il leur incomberait de vérifier s'il y a d'autres éléments de preuve, comme des témoins.

M. Peter Mancini: Mais nous ne vérifierions pas cela. Nous le vérifions en cour criminelle au moyen du difficile processus de contre-interrogatoire. Ici, nous parlons de quelqu'un qui serait capable de faire cette hypothèse fondée sur une justice de nature inquisitrice—je pense qu'un témoin a utilisé cette expression—quelqu'un qui sort du cadre, qui pose des questions, qui prend une décision et la présente ensuite au tribunal. Mais cette personne serait alors le décideur ou le juge, si vous voulez, qui détermine si la violence a eu lieu ou non.

Mme Margaret Buist: Non, l'expert évaluateur en matière de garde et de droit de visite n'est jamais celui qui détermine si la violence a eu lieu. Cet expert évaluateur n'est qu'une pièce du casse-tête en ce qui a trait à la présentation des éléments de preuve devant un tribunal dans un litige portant sur la garde et le droit de visite. Parce que c'est civilisé, comme vous le savez, monsieur, cet examen se fait toujours sur la base de la prépondérance des responsabilités.

Laissez-moi vous dire combien il est difficile de prouver qu'un abus sexuel est survenu en tenant compte de la prépondérance des responsabilités.

M. Peter Mancini: Je sais combien c'est difficile, oui.

Étant d'accord avec cela, je veux seulement que ce soit clair dans mon esprit. Lorsque nous parlons d'allégations de violence, ce que vous laissez entendre c'est que le juge qui doit déterminer si la violence a eu lieu le fait en tenant compte de la prépondérance des responsabilités.

Mme Margaret Buist: Dans le système du tribunal de la famille, oui.

M. Peter Mancini: Dans le système du tribunal de la famille et en dehors du système de cour criminelle.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Sénatrice Cohen.

La sénatrice Erminie Cohen: Merci.

Ma question va prendre une autre orientation. Savez-vous ce qui m'inquiète? Docteur, je vous ai entendu dire que les avocats ne reçoivent que deux heures de formation en droit familial. Maintenant, on dit que les juges ont besoin de formation. Il y a environ 77 000 divorces par année et les avocats ne reçoivent que deux heures de formation, et les juges qui ont besoin de formation sont en demande. C'est peut-être pour cela que les parents qui obtiennent la garde doivent payer des milliers et des milliers de dollars. C'est parce que la connaissance et la sensibilité font défaut quand vient le temps de traiter ces causes avec justice et équité.

Je suis vraiment décontenancée par cette affirmation. Je me demande simplement si la communauté juridique a reçu des plaintes à l'effet qu'il faudrait accroître la formation en raison du grand nombre de cas. C'est une situation de crise, puisque les personnes compétentes ne sont pas en place pour la juguler.

• 1345

Mme Margaret Buist: Vous avez absolument raison, il s'agit d'une situation de crise. Je pratique le droit familial depuis maintenant plus de dix ans et j'ai dû apprendre par moi-même... et aussi en participant aux activités de la communauté juridique et en apprenant du comité de coordination et des différents services qui s'occupent des questions de violence. Les rares avocats qui le font, le font pour aider leur client. Je ne voudrais pas tout concentrer sur les juges et les avocats. Les médiateurs non plus ne sont pas formés. Les conseillers matrimoniaux ne sont pas formés adéquatement. À tous les niveaux du système juridique, les personnes concernées par les questions de garde et de droit de visite ont une formation minimale en ce qui a trait à violence faite aux femmes et aux enfants. C'est un problème grave. Comment pouvons-nous changer les choses? Comment pouvons-nous effectuer ces changements et aider ces clients si nous ne sommes pas formés adéquatement? Non, la communauté juridique n'est pas si intéressée que cela par cette question en Ontario, non plus que dans les autres provinces.

Mme Carolyn Bennett: Merci.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Merci.

Monsieur Forseth.

M. Paul Forseth: Nous dépassons notre temps, mais j'aimerais que vous résumiez. Vous avez fait référence à des modifications législatives et les recommandations finales de ce comité auront probablement trait surtout à la Loi sur le divorce. Nous n'avons à peu près que la persuasion pour inciter les provinces à modifier les lois équivalentes en matière de relations familiales.

J'aimerais que vous résumiez précisément en réponse à la même question que j'ai posée au groupe précédent. Qu'aimeriez-vous voir modifié ou ajouté à la Loi sur le divorce, et quels changements ne voudriez-vous pas voir? Pourriez-vous me donner brièvement vos priorités en ce sens?

Mme Margaret Buist: Je peux parler au sujet de la Loi sur le divorce. Les modifications que nous avons recommandées à la législation, qui pourrait être la Loi sur le divorce, sont qu'il devrait y avoir des critères pour déterminer les droits de garde et de visite. On ne retrouve pas cela dans la Loi sur le divorce, par exemple, de la façon qu'on le trouve en Ontario dans la Loi portant réforme du droit de l'enfant, qui contient une excellente liste de critères à considérer. La Loi sur le divorce ne dit rien à propos de ces critères concernant la violence.

M. Paul Forseth: Est-ce que cette loi provinciale pourrait être transposée dans l'autre?

Mme Margaret Buist: Je pense que la Loi portant réforme du droit de l'enfant est bonne en Ontario, mais elle est aussi silencieuse sur la question de la violence comme critère dans l'attribution de la garde. Terre-Neuve est la seule province à mentionner cela. Nous recommandons que la Loi sur le divorce contienne des critères en matière de garde et de droit de visite comme la Loi portant réforme du droit de l'enfant, en ajoutant aussi la question de la violence, et en définissant la violence dans la loi.

M. Paul Forseth: Aimeriez-vous nous indiquer certaines modifications qui ne doivent pas être faites ou certaines voies qu'il vaudrait mieux ne pas emprunter?

Mme Margaret Buist: Toute forme de législation qui punirait, discréditerait ou minimiserait la violence faite aux femmes et aux enfants.

M. Paul Forseth: Bien.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Sénatrice Cools.

La sénatrice Anne Cools: Merci, monsieur le président. J'aimerais remercier les témoins de leur présence.

Avant de passer à des questions plus approfondies, peut-être pourriez-vous répondre à deux questions techniques relativement simples. La première, les clientes de la Women's Community House sont-elles toutes des femmes victimes de violence ou y a-t-il différentes catégories d'hébergement?

Mme Jan Richardson: Non, nous offrons nos services seulement aux femmes et aux enfants victimes de violence.

La sénatrice Anne Cools: Combien de femmes ont bénéficié de vos services l'an dernier?

Mme Jan Richardson: Nous avons hébergé plus de 1 500 femmes et enfants et environ 5 000 ont profité de notre ligne-secours pour les femmes victimes de violence.

La sénatrice Anne Cools: S'agit-il de 1 500 familles?

Mme Jan Richardson: Nous avons hébergé 1 500 femmes et enfants.

La sénatrice Anne Cools: Combien de femmes?

Mme Jan Richardson: Un peu plus de 700 familles, je crois que c'est votre question.

La sénatrice Anne Cools: Des 700, combien en sont arrivées au divorce?

Mme Jan Richardson: Nous ne disposons pas de cette information. Je suis désolée, je ne l'ai pas maintenant. Notre service est un service à court terme, un service d'urgence. Nous n'avons pas la possibilité, en raison de nos limites financières, d'effectuer un suivi auprès des femmes au-delà de leur séjour. Nous avons certains indices, mais je suis vraiment désolée, nous n'avons pas l'information. Je pense que c'est une excellente question, mais les fonds dont nous disposons ne sont pas suffisants pour nous permettre de nous occuper de cette question.

• 1350

La sénatrice Anne Cools: Bien, mais peut-être pouvons-nous en savoir un peu plus. Vous gardez...

Mme Jan Richardson: Je pourrais faire des suppositions, mais je pense qu'il serait préférable d'étayer au moyen de recherches sur le sujet.

La sénatrice Anne Cools: Ce serait bien que des recherches appuient le sujet, mais mon expérience est qu'une très faible minorité de ces femmes en arrivent effectivement au divorce.

Mme Jan Richardson: Très bien. Ce que je peux vous dire, c'est qu'au moment du départ, la majorité des femmes ne retournent pas avec leur partenaire. Il est de leur intention de ne pas continuer ce genre de relation, et elles cherchent à se refaire une vie sans violence.

Nous savons aussi qu'un pourcentage élevé de femmes reviennent au refuge.

La sénatrice Anne Cools: De quatre à six mois plus tard.

Mme Jan Richardson: C'est parce qu'au cours de cette période, elles quittent une relation de violence et se réconcilient dans l'espoir que la violence prendra fin. En général, la violence ne s'arrête pas, et nous verrons les femmes revenir au refuge une deuxième fois pour examiner d'autres choix pour elles-mêmes. Je pense donc que nous pouvons établir certaines comparaisons en ce sens.

La sénatrice Anne Cools: D'accord. Absolument, c'est un phénomène très intéressant.

Ma question a trait à l'enquête de Statistique Canada que vous avez citée assez exhaustivement. Connaissez-vous quelque chose de la méthodologie qui sert à mener ce genre d'enquête?

Mme Jan Richardson: Je sais que la méthodologie utilisée par Statistique Canada pour cette enquête a été critiquée. Statistique Canada a réagi en examinant sa méthodologie. La méthodologie a aussi été examinée à l'échelle internationale par des groupes comme le FMI, le Fonds monétaire international et les Nations Unies. Dans les deux cas, Statistique Canada a utilisé des instruments méthodologiques très rigoureux.

La sénatrice Anne Cools: Concernant les instruments méthodologiques rigoureux, connaissez-vous le nom des instruments qu'ils ont utilisés?

Mme Jan Richardson: Je pourrais certainement obtenir cette information.

La sénatrice Anne Cools: Je l'ai juste ici. Je vais vous communiquer l'information.

C'est une méthode connue sous le nom de «conflict tactics scale». Elle a été conçue par le père des études sur la violence familiale, un homme du nom de Murray Straus du Family Violence Research Laboratory de l'Université du New Hampshire.

J'aimerais partager avec le comité ce que le Dr Straus a dit au sujet de l'étude à laquelle vous faites référence. La méthode de «conflict tactics scale» est une méthodologie très élaborée, conçue par le Dr Straus et perfectionnée pendant 20 ou 30 ans aux États-Unis, où il l'a d'abord administrée. Elle est administrée aux hommes et aux femmes et elle repose sur l'auto-évaluation des deux parties, des ceux côtés.

J'aimerais lire au comité ce que le Dr Straus a dit au sujet de cette étude en particulier. Il pose des questions. C'est un document volumineux. J'irai directement à ce qui nous préoccupe. Il dit:

    C'est ce qu'a fait l'Enquête nationale sur la violence envers les femmes menée au Canada. Ils ont utilisé les techniques que j'ai élaborées, la méthode «conflict tactics scale». Mais ils ont mis de côté la moitié de la méthode, celle qui s'intéresse à la violence faite par les femmes, ainsi ils ne se retrouvent pas avec des données politiquement embarrassantes.

C'est le Dr Murray Straus qui parle, le créateur de la méthode «conflict tactics scale».

    Mais parfois, ils ont les données, mais ils n'en font pas état.

À ce moment, le Dr Straus place la diapositive sur le tableau. Il dit:

    Voici deux versions des mêmes données. Voici la version avant publication, où la ligne supérieure a trait à la violence faite aux femmes par les hommes, la ligne du milieu a trait à la violence faite aux hommes par les femmes et puis le couple [violence traitée à la ligne inférieure]. Voici la version «nettoyée» qui a été publiée. Il n'y a que deux lignes. Il n'y a pas de ligne pour la violence faite aux hommes par les femmes. Cela a été omis.

• 1355

Membres du comité, je pense qu'il est très important que ce comité considère sérieusement la possibilité de convoquer des témoins, peut-être même le Dr Straus lui-même, qui pourrait peut-être dire au comité ce qui s'est passé relativement à l'application de sa méthodologie dans cette étude. C'est une question que le comité doit étudier.

Je certifie aux témoins que toutes les personnes à cette table condamnent la violence, et abhorrent la violence, et veulent voir la violence cesser. Je ne connais personne susceptible d'appuyer quelque forme de violence que ce soit. Mais je pense que nous devons vraiment considérer cet aspect.

J'aimerais demander aux témoins s'ils connaissent les recherches menées sur le même sujet par le Dr Reena Summers du Manitoba, par le Dr Merlin Brinkerhoff et par le Dr Eugene Luprie, tous de l'Université de Calgary, sur le même sujet, la violence familiale.

Mme Jan Richardson: J'ai quelques réponses. La réponse la plus simple que je puis vous donner aujourd'hui est que ces trois recherches ne figurent pas dans notre mémoire. Je voudrais aussi indiquer qu'en plus de la méthode de «conflict tactics scale» utilisée pour l'enquête de Statistique Canada, ils font aussi référence au Code criminel du Canada en utilisant, comme nous, la définition du Code criminel du Canada.

Dans leur enquête auprès de 12 300 femmes, en plus d'utiliser la «conflict tactics scale», ils ont aussi fait référence au Code criminel du Canada. C'est là que l'on démontre la fréquence élevée, à savoir qu'au cours de la dernière année, une femme sur six a été agressée, d'une façon qui justifiait une accusation criminelle.

Il y a donc un équilibre par rapport à ces deux pièces concernant la «tactics scale» de même que ce que nous utilisons, comme notre propre corps, devant les tribunaux du Canada.

La sénatrice Anne Cools: Absolument. Je comprends et j'apprécie vos préoccupations. Elles sont bien placées.

Merci.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Merci.

La Dre Bennett a une brève question supplémentaire.

Mme Carolyn Bennett: Le nuage des fausses allégations continue de s'étendre sur nous. J'aimerais savoir si vous avez des suggestions sur la façon dont nous pourrions poursuivre pour que notre travail soit facilité. Ce que nous entendons, c'est que lorsque des allégations sont faites dans un contexte de garde ou de droit de visite, très souvent on ne croit pas ces allégations.

En fait, si nous pouvions trouver une façon de régler le problème des fausses allégations, avec quelques suggestions de solutions, n'en arriverions-nous pas alors à mettre de l'ordre dans tout ce qui reste à faire pour ce qui est de ce travail vraiment très important?

Mme Margaret Buist: Mon expérience des tribunaux me fait dire que les juges sont très circonspects lorsqu'il faut formuler des conclusions en matière de violence. Ils sont très prudents. Il est très difficile de présenter une preuve suffisante pour convaincre un juge, selon la prépondérance des probabilités, qu'il y a eu violence, que ce soit sexuelle, physique ou émotive.

Étant donné que nous savons cela, étant donné que nous savons que les femmes connaissent toujours des problèmes quant à leur crédibilité devant le tribunal—historiquement, c'est vrai—et étant donné que les tribunaux disposent de différents moyens d'autocontrôle qui semblent fonctionner jusqu'à un certain point, alors, le tout respectueusement soumis, le spectre de la fausse allégation qui continue d'être soulevé lorsque des femmes allèguent qu'elles ont été victimes de violence se résume à ceci: cette situation survient dans une minorité de cas.

Je crois que nos recommandations font référence à une étude qui mentionne 2 p. 100 de fausses allégations. Il s'agit d'une étude américaine.

Il y a toujours des allégations dans les litiges portant sur la garde et le droit de visite, et l'expérience d'une des parties, l'expérience d'un des parents, est différente d'une personne à une autre. Mais lorsqu'il est question de violence, il est très important de reconnaître que les fausses allégations en matière de violence ne composent qu'une petite minorité. Les tribunaux disposent déjà de mécanismes d'autocontrôle pour examiner les témoignages d'une partie contre une autre, et nous faisons constamment face au fait que les femmes et les enfants ne sont pas crus au tribunal.

• 1400

Mme Carolyn Bennett: Ma question est, si ces 2 p. 100 étaient vigoureusement poursuivies, ne rendrait-on pas la tâche plus facile pour les 98 p. 100 qui restent, ou peu importe les statistiques? Il semble maintenant y avoir des cas de parjure et toutes sortes de choses qui restent en suspens, jamais vraiment exploités, dans ce groupe que constituent les personnes faussement accusées. Je veux savoir, pensez-vous que la législation ou notre gouvernement devrait avoir la responsabilité de traiter ceux-ci adéquatement afin de faciliter la tâche des autres pour ce qui est du traitement des allégations qui sont fondées?

Mme Margaret Buist: Bien sûr, si quelqu'un se présente devant le tribunal et ment, toutes sortes de pénalités sont prévues, y compris des accusations au criminel, et s'il s'agit d'un cas de garde ou de droit de visite, on verra que dans un grand nombre des cas la partie qui ment subit les conséquences soit en perdant la garde ou le droit de visite, soit en se voyant condamnée à payer des dommages-intérêts et en voyant sa crédibilité entachée, ce qui l'affectera dans un nouveau litige.

Mme Carolyn Bennett: Et ce n'est pas bon pour les enfants.

Mme Margaret Buist: Évidemment.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Merci beaucoup. Une heure s'est envolée. Nous vous remercions d'être venus ici aujourd'hui depuis London.

Le comité va suspendre ses travaux pendant environ trois minutes pour laisser au prochain groupe de témoins le temps de s'avancer.

• 1402




• 1408

La coprésidente (sénatrice Landon Pearson): J'aimerais que nous reprenions les audiences, s'il vous plaît. J'espère que mes collègues vont reprendre leur siège.

Nous aimerions souhaiter la bienvenue cet après-midi aux personnes suivantes du groupe REAL Women: Gwendolyn Landolt, vice-présidente nationale et Lorraine McNamara.

Voulez-vous commencer votre exposé, s'il vous plaît? Vous disposez d'une demi-heure pour votre exposé—pas une demi-heure pour parler, mais une demi-heure pour les échanges. Merci.

Mme Gwendolyn Landolt (vice-présidente nationale, REAL Women of Canada): Mon nom est Gwen Landolt et je suis vice-présidente nationale de REAL Women of Canada. Lorraine McNamara, deuxième secrétaire nationale, m'accompagne.

Nous sommes un groupe de défense des droits des femmes, certaines d'entre nous ont vécu l'expérience malheureuse que constitue la rupture d'un mariage. Nous sommes donc très sympathiques à ce qui se passe.

Mais même si nous sommes un groupe de défense des droits des femmes, nous ne voulons pas perpétuer la guerre des sexes en disant que c'est un problème relié au sexe de la personne, mais plutôt faire valoir que les difficultés qui émanent de la garde ou des droits de visite proviennent des caractéristiques personnelles des parties en cause, non pas de leur sexe.

Nous sommes préoccupées pour les enfants. En tant que mères et grands-mères, nous sommes énormément préoccupées pour les enfants et nous ne voulons pas les voir pris dans la guerre des sexes. Ce qui importe avant tout, c'est ce qui est le mieux pour les enfants. Relativement à cet aspect, nous avons examiné des études concernant le développement des enfants et les conséquences qu'une rupture du mariage peut avoir sur eux. Même si les deux partenaires du mariage souffrent terriblement, ce sont vraiment les enfants qui souffrent le plus profondément de la séparation.

• 1410

L'une des grandes tragédies, c'est que la séparation signifie fréquemment deux choses. La première, c'est que les aptitudes des parents en tant que parents sont diminuées parce que ceux-ci sont affligés par la rupture du mariage, ce qui fait que les enfants sont souvent négligés dans cette bataille. La deuxième est que les enfants perdent quelquefois contact ou ont peu de contact avec l'un de leurs parents, et l'une des choses que nous savons, c'est que les enfants ont besoin de leurs deux parents pour devenir des individus stables et bien intégrés. Le rôle essentiel ne revient pas seulement au parent qui a la garde ou au principal prestataire de soins, le père aussi a un rôle crucial à jouer dans ce genre de situation.

Selon les statistiques, nous savons qu'au Canada, dans la plupart des cas, dans la majorité des cas, la mère est la principale prestataire de soins et garde les enfants. Le père détient un droit de visite, mais il s'agit souvent d'un accès limité. Malheureusement, même si le règlement de divorce prévoit un droit de visite, dans bien des circonstances, ce droit est bafoué. C'est nuisible pour le père, mais plus encore, c'est nuisible pour l'enfant.

L'article 16 de la Loi sur le divorce dit que le tribunal ne doit tenir compte que de l'intérêt de l'enfant. En fait, très peu d'études iront à l'encontre du principe que l'enfant a besoin de ses deux parents. Mais lorsque vous examinez la définition de l'intérêt de l'enfant, une difficulté surgit du fait que la Cour suprême ne sert aucunement de guide en cette matière. Elle va dans un sens dans un cas et dans l'autre sens dans l'autre cas.

Par exemple, je pense que la Cour suprême du Canada a rendu deux décisions en 1993. L'une était l'affaire Young c. Young et l'autre était l'affaire P. (D.) c. S. (C.). Les deux causes portaient sur l'intérêt de l'enfant, et dans les deux cas on est arrivé à des conclusions préjudiciables et tout à fait opposées. L'une disait que le père devait avoir accès pour donner l'instruction religieuse à son enfant. Dans l'autre cause, le tribunal a dit qu'il serait préjudiciable que le père donne l'instruction religieuse à l'enfant. Ces deux causes sont diamétralement opposées, les deux sont rapportées dans le même recueil de jurisprudence, les deux décisions ont été rendues la même année, mais elles ne nous guident aucunement.

Notre organisation soutient qu'il devrait y avoir une définition de ce qu'est l'intérêt de l'enfant dans la législation. Il semble que «l'intérêt de l'enfant» doit être défini en tenant compte des besoins des enfants, ce qui signifie que les deux parents doivent participer.

Nous recommandons deux choses. L'une est un principe de base: qu'il y ait garde partagée ou conjointe des enfants. La mère peut être la principale prestataire de soins, mais le père devrait participer au même titre qu'elle aux décisions concernant les soins médicaux, l'éducation et la santé. Le père devrait jouer un rôle vital dans ces aspects de la vie de l'enfant.

En tant que femmes, dont certaines ont souffert de la rupture d'un mariage, nous comprenons qu'il peut être difficile d'essayer de régler ces questions. À moins que le père soit en prison, à titre d'exemple extrême, on ne se pose pas de questions sur la façon dont la mère va traiter la garde conjointe ou la garde partagée. Comme principe de base, nous recommandons donc qu'il y ait garde conjointe ou partage du rôle parental. À partir de là, il incomberait aux personnes d'expliquer pourquoi ce ne serait pas applicable dans un cas précis.

Selon la nature des problèmes, nous savons qu'il y a des circonstances autres que celle de la mésentente quant au rôle parental. Il peut y avoir une rupture horrible dans la relation entre la mère et le père. Comme l'a proposé le Comité sur la santé de la Chambre des communes en février 1997, nous demandons que la Loi sur le divorce contienne des dispositions obligeant les parties à participer à une séance de consultation pour discuter de la question des conséquences du divorce sur les enfants. Cette pratique s'avère un succès énorme en Alberta, à titre d'exemple. En fait, 90 p. 100 des couples qui ont connu une rupture de leur mariage et qui ont participé à la séance obligatoire de consultation ont dit que c'était d'une valeur inestimable. Selon les études, très peu de couples sont contre cette pratique.

• 1415

Maintenant, ce programme de base a été introduit en Georgie, où il connaît beaucoup de succès. Un programme semblable existe aussi en Colombie-Britannique. Nous aimerions qu'une telle mesure soit obligatoire partout au Canada de façon à ce que les parents soient sensibilisés aux besoins de leurs enfants. Ici encore, les enfants constituent le point central. Qu'est-ce qui est le mieux pour eux? S'il y a une consultation obligatoire, les deux parents peuvent s'asseoir et prétendre qu'ils n'entendent pas.

Ce que nous comprenons, c'est que la plupart des parents aiment profondément leurs enfants—la mère et le père—et lorsqu'ils voient, grâce à cette séance de consultation les difficultés pour leurs enfants... En réalité, la rupture du mariage est l'expérience la plus traumatisante dans la vie d'un enfant, selon toutes les études. Tout doit se passer le plus humainement possible pour soulager les enfants le plus possible de ce traumatisme.

Nous avons donc deux recommandations: la garde conjointe partagée et la consultation obligatoire.

Lorraine McNamara aimerait également faire un commentaire.

Mme Lorraine McNamara (secrétaire nationale, REAL Women of Canada): Merci.

Je ne suis pas seulement une mère et une grand-mère, mais je suis aussi secrétaire juridique, et par ces trois situations, je reçois des commentaires de toutes sortes sur le sujet. J'aimerais seulement ajouter deux points à ce que Gwen a dit.

Tout d'abord, en tant que grand-mère, je suis très sensible à la relation entre grands-parents et petits-enfants. Nous n'en avons pas parlé dans le mémoire. C'est une situation difficile. Vous faites entrer quatre personnes de plus, et nous avons eu l'impression que ce n'était pas le moment approprié. Mais nous voulions souligner que la relation entre les grands-parents et les petits-enfants est extrêmement importante. Elle sert certainement de stabilité pour ces enfants.

Je parle par expérience. Lorsque mon fils a perdu son emploi et qu'il a eu des difficultés, ils ont dû vivre avec nous pendant un certain temps avant qu'il ne soit remis sur pied, avec le petit-fils. La relation entre le petit-fils et son grand-père était fantastique, et elle dure encore. Cette relation a été très importante pour donner un sentiment de sécurité à ce petit garçon.

L'autre point que je voulais soulever, c'est que tous les avocats ne travaillent pas que pour de l'argent dans ce genre de situation. Un grand nombre d'entre eux compatissent et essaient de faire ce qu'il y a de mieux pour les enfants. Selon ce que j'ai vu, dans bien des cas, leur client est tellement blessé, méfiant—habituellement c'est une femme—qu'il ne peut pas voir ou comprendre que peut-être que le partenaire qui n'est plus avec lui... Tout n'est pas noir. Dans la mesure où la relation fonctionne bien avec les enfants, c'est quelque chose de vraiment très important Pour cette raison, les avocats peuvent donner des conseils, mais en respectant certaines limites. Ils font de leur mieux très souvent. À tout le moins, dans le cabinet où je travaille, ils le font.

Je pense que les avocats seraient ravis de l'existence d'un programme obligatoire de consultation qui les aiderait à formuler des conseils et permettrait certainement de ne pas prolonger certaines de ces causes. D'après ce que vous avez entendu, certaines se sont éternisées. Je pense que les services de consultation seraient certainement utiles et je pense que même les avocats les apprécieraient grandement.

Merci.

Mme Gwendolyn Landolt: J'aimerais ajouter ceci. Je suis avocate et j'ai consacré beaucoup de temps à la pratique dans ce domaine précis du droit. Je suis heureuse de ne pas le faire en ce moment, parce qu'il s'agit du secteur du droit le plus affreux dans lequel vous pouvez évoluer.

Parce qu'à titre d'avocate, ma première responsabilité va à mon client, j'ai une obligation professionnelle, mais j'ai toujours été extrêmement préoccupée par le fait que je ne suis pas une experte en relation thérapeutique ou en psychologie. Je suis là pour réunir les faits et agir de mon mieux au bénéfice de mon client. J'ai été à même de constater qu'il était nécessaire d'établir un lien.

Souvent, j'ai constaté qu'il y avait encore quelque chose dans un couple. C'était leur amour mutuel pour leurs enfants, mais je n'ai jamais été formée pour les conseiller et les aider. Deuxièmement, j'estime que ce n'était pas vraiment mon travail, parce que je devais aider mon client et lui procurer les meilleurs services possibles. Au plus profond de mon coeur, je me disais: «Est-ce que j'agis vraiment dans l'intérêt des enfants? Qui suis-je et qu'est-ce que je sais?» Je peux dire qu'en tant qu'avocate, cela me troublait, même lorsque j'étais une toute jeune femme, au début de ma carrière. Je suis encore plus troublée maintenant que j'ai vieilli.

Il y a un autre point que j'aimerais soulever. J'ai fait référence à des études portant sur le besoin de la présence paternelle, et j'aimerais dire que ces références font partie de notre mémoire qui, je présume, n'a pas été distribué parce qu'il n'est pas traduit en français. J'aimerais que les chercheurs, ou quiconque s'intéresse au sujet, regardent ces références aux études indiquant l'importance de la présence des deux parents. Elles sont très bien documentées. Si vous lisez le mémoire, lorsqu'il sera traduit en français, vous y trouverez toutes les références.

Merci.

• 1420

La coprésidente (sénatrice Landon Pearson): Merci beaucoup.

Monsieur Forseth.

M. Paul Forseth: Nous avons entendu au cours des derniers jours et même aujourd'hui des témoignages concernant les besoins en matière de médiation, mais alors avec l'avertissement que cette mesure n'est pas appropriée lorsqu'il y a un déséquilibre dans le rapport de force et lorsqu'il y a des allégations de violence—des allégations seulement.

Je pense qu'il faut partiellement prendre en considération les références des médiateurs habiles et reconnus pour traiter des questions relatives au déséquilibre du rapport de force, et que c'est la façon dont ils sont effectivement capables de ramener les situations les plus litigieuses. Ce sont eux qui peuvent le mieux résoudre les questions de déséquilibre dans le rapport de force. Même si on nous a dit que la médiation était une bonne mesure, à partir du moment où il y a une allégation de violence et qu'il y a déséquilibre du rapport de force, la médiation ne devient plus appropriée.

Vous parlez de consultation obligatoire qui, je le suppose, ne se limiterait pas à un rôle éducatif, ou à un rôle conseil auprès des parents en vue de leur faire voir les conséquences des choix qu'ils font et les conséquences de leurs comportements, mais servirait aussi à leur exposer un choix de mesures. Ceci empiète peut-être avec le rôle du médiateur qui conseille sur les choix et guide les personnes, lorsqu'il y a un élément éducatif immédiat.

Voyez-vous cet élément éducatif de la consultation obligatoire mener à un mécanisme de règlement des différends plus élaboré qui éviterait le recours au procès, même dans le cas des couples où la situation est très litigieuse? Pourriez-vous nous en faire une description un peu plus complète?

Mme Gwendolyn Landolt: Disons d'abord que la question des allégations de violence est délicate, parce que lorsque vous avez affaire à un couple qui aime désespérément ses enfants et que les deux parents veulent obtenir la garde, invariablement, j'ai constaté que des allégations de violence circulent, peu importe que je fasse affaire avec la mère ou avec le père. Ils le font parce qu'ils veulent leurs enfants.

J'ai aussi eu des expériences malheureuses avec ce que l'on appelle le syndrome de la mémoire fictive qui, je le comprends maintenant, à la suite de recherches dans le domaine de la psychologie, n'est pas encore vraiment accepté. On a rejeté l'argument voulant qu'il y avait un syndrome de mémoire fictive dans un cas où le père était accusé de violence à l'égard de son enfant. Cet argument n'est pas valable dans le cadre d'une analyse psychologique.

Selon moi, parce que les gens sont tellement affligés par la rupture de leur mariage et ont désespérément besoin de leurs enfants, je ne pense pas qu'une allégation de violence ait beaucoup de valeur tant qu'elle n'a pas été prouvée devant le tribunal. Je l'écarterais tant qu'elle n'a pas été prouvée. C'est une arme de choix tant pour les hommes que pour les femmes. J'ai entendu ce genre d'allégations de la part des deux partenaires.

Même s'il y a allégation de violence, il doit et devrait y avoir consultation. Je vois un côté éducatif au processus de consultation. J'ai constaté avec intérêt que là où la consultation obligatoire est en place, dans la plupart des circonstances, les couples en sont arrivés à un règlement hors cour. Ils ont semblé travailler derrière la scène, sans avoir à affronter le processus judiciaire.

Cela signifie que vous les atteignez, même s'il y a de la souffrance entre les deux. Ils aiment leur enfant et lorsqu'on les sensibilise aux solutions possibles et lorsque le père comprend jusqu'à quel point le rôle du prestataire de soins principal est vital, et que le prestataire de soins principal, la mère, comprend l'importance du père dans le développement de l'enfant, un déclic se fait et on arrive à une solution. Si l'on considère à nouveau ce qui se fait actuellement, l'expérience s'avère un succès parce qu'on élimine en bonne partie les témoignages en cour ainsi que les allégations devant le tribunal. C'est ma perception des choses.

Bien sûr, les parents devraient être mis au courant des options, mais souvent ils y travaillent de leur propre chef. Le conseiller peut leur donner des orientations et des idées. En fait, j'ai vu dans une instance que 92 p. 100 des litiges portant sur la garde ont été réglés hors cour simplement parce que les parents y ont mis du leur lorsqu'ils ont compris les solutions possibles pour leurs enfants.

• 1425

M. Paul Forseth: Seriez-vous d'accord avec moi pour dire qu'il existe des conseillers et des médiateurs, et qu'alors il y a des conseillers et des médiateurs, selon leurs aptitudes, leur formation, leur certification et sa durée?

Par exemple, l'Institute of British Columbia dispense un programme de médiation qui dure, je crois, deux ans. Pourtant, un avocat peut assister à un cours d'une journée et obtenir un certificat confirmant qu'il est un avocat certifié qui est maintenant médiateur et peut parler aux deux parties. Et il y a tout ce que vous voulez entre les deux.

C'est pourquoi, lorsque vous parlez de consultation obligatoire et de mécanisme de règlement des différends, il faudrait établir des normes de formation et de compétence.

Mme Gwendolyn Landolt: Je suis heureuse que vous mentionniez cela. C'est probablement l'un des points les plus intéressants que vous puissiez soulever. Le conseiller doit être qualifié et impartial. Il est important qu'il y ait une formation adéquate.

Malheureusement, toute une industrie est née de cette question de garde et de droit de visite. L'industrie du droit familial, que ce soit pour les avocats, les conseillers ou les experts évaluateurs est une industrie gigantesque et les compétences sont cruciales. Je suis absolument d'accord avec M. Forseth sur ce point, et je suis contente qu'il l'ait mentionné parce qu'il peut s'avérer très destructeur d'avoir recours à des personnes qui ont un parti pris, une idéologie, des personnes qui ne sont pas adéquatement formées.

Je peux parler en tant qu'avocate, et confirmer que nous ne sommes certainement pas qualifiés, et qu'une journée de formation est absolument absurde. Nous sommes formés pour travailler avec des faits, pas avec des émotions, ni avec des personnes. C'est vraiment faire insulte à un couple que de placer devant lui une personne mal formée pour essayer de solutionner un problème aussi complexe.

Mme Carolyn Bennett: L'un des aspects avec lequel ce comité doit se démener est le fait qu'un grand nombre de personnes estiment que le seul emploi des mots «garde» et «droit de visite» ou «accès» signifie qu'il y a un perdant et un gagnant, créant une atmosphère de rapport de force, un climat de confrontation, ce qui n'est probablement pas dans l'intérêt de l'enfant.

Votre organisation a-t-elle une opinion sur le sujet et sur ce que nous réserve l'avenir, en supposant que seuls les enfants ont des droits et que les parents ont des responsabilités dès la naissance de leur enfant et que nous nous débarrasserons des notions de garde et de droit de visite et que nous adopterons une adhésion à un plan de parentalité? Votre organisation aurait-elle une opinion sur le sujet?

Mme Gwendolyn Landolt: Oui, nous appuierions grandement des mesures en ce sens. C'est pourquoi nous préférons les mots «parentalité conjointe» à ceux de garde conjointe. Les enfants ne sont pas des possessions; ils sont des êtres humains extrêmement importants, et nous aimerions être débarrassées de ce genre de vocabulaire.

Vous avez absolument raison sur ce point. Nous aimerions qu'il y ait un plan de parentalité. Il s'agit de la meilleure façon de gérer ce genre de situation.

C'est l'une des difficultés, je le répète. Je dis en tant qu'avocate que j'ai toujours trouvé que les relations familiales ne doivent pas être l'affaire du tribunal parce que nous ne sommes pas formés pour régler des situations semblables. Dans notre système judiciaire, il s'agit du domaine le plus difficile à traiter. Nous n'avons pas affaire à des objets, à des propriétés. Nous avons affaire à des enfants et à des êtres humains sensibles et à des parents blessés. Ce serait beaucoup mieux si les plans de parentalité pouvaient être retirés du système judiciaire.

Je comprends que le mariage est un contrat social. Il doit être dissolu par des moyens légaux, mais les questions de garde et de rôle parental pourraient peut-être être retirées du processus judiciaire. Un juge est aussi un être humain, et il doit prendre cette décision énorme dans l'intérêt de l'enfant. Ce serait tellement mieux que ces problèmes puissent être réglés en dehors de ce système de confrontation entre les bons et les mauvais qu'est notre système judiciaire.

Mme Carolyn Bennett: Combien de membres y a-t-il dans votre organisation?

Mme Gwendolyn Landolt: Nous avons environ 55 000 membres dans tout le pays.

Mme Carolyn Bennett: Et comment fonctionne votre organisation?

• 1430

Mme Gwendolyn Landolt: Notre organisation est constituée en vertu d'une loi fédérale et existe depuis 1983. Nous avons un conseil national, qui administre à l'échelle nationale, et des conseils provinciaux. Une personne membre d'un conseil provincial est automatiquement membre du conseil national. Nous avons aussi des groupes locaux à Charlottetown, Vancouver, Ottawa et Toronto. Tous les ans, nous invitons les membres à nous présenter des résolutions à l'échelle nationale. Un avis officiel est donné et ces résolutions sont débattues lors de l'assemblée générale annuelle nationale. Nous tenons une assemblée générale annuelle selon les exigences de la Loi sur les personnes morales.

Nous sommes vraiment une organisation populaire, qui a des assises sur les plans local, provincial et national. De plus, j'aimerais ajouter que nous ne recevons pas de financement gouvernemental; nous n'existons donc que grâce au soutien populaire.

Mme Carolyn Bennett: Quelle est la participation de vos membres dans l'élaboration de vos politiques ou la rédaction du présent mémoire?

Mme Gwendolyn Landolt: Ce rapport émane des membres. Nous demandons à nos membres de soumettre des résolutions portant sur le rôle parental ou tout autre sujet. Ces résolutions sont présentées à l'assemblée annuelle et soumises au vote. Les résolutions sont une partie très importante de notre assemblée annuelle. Lorsqu'une résolution est adoptée, nous pouvons la faire cheminer et prendre position, mais tout vient de la base avant de remonter. Notre assemblée annuelle doit toujours approuver une question avant que nous puissions l'utiliser.

Mme Carolyn Bennett: Y avait-il des résolutions concernant la garde et le droit de visite?

Mme Gwendolyn Landolt: Oui, nous avons des résolutions en ce sens depuis des années. C'est un sujet qui nous préoccupe depuis longtemps. Ce n'est pas nouveau pour nous. C'est un sujet qui a touché directement certaines de nos membres. Bon nombre sont des femmes dont les familles sont brisées, donc elles connaissent le traumatisme de... bon nombre des membres de notre bureau national ont elles-mêmes vécu ce problème, c'est donc une question très importante pour notre organisation.

Mme Carolyn Bennett: J'imagine que votre organisation considère la famille comme l'unité de base de la société. J'imagine que c'est le point central.

Comment définissez-vous la famille? Ce qui m'inquiète à ce sujet, c'est qu'il y a parfois des jugements de valeur concernant ce qu'est une famille brisée ou ce qu'est une famille gaie ou lesbienne ou les diverses formes... la famille élargie. Comment verriez-vous le soutien aux enfants dans une unité familiale peut-être plus moderne?

Mme Gwendolyn Landolt: Nous définissons la famille comme le font la majorité des religions dans le monde: un père, une mère et des enfants. Et il peut arriver qu'une famille soit brisée en raison d'une séparation ou d'un divorce, mais c'est toujours une famille. Il n'y a pas de problème de cette façon. C'est toujours une famille, mais une famille brisée, et nous considérons cela comme le fondement de la société. Nos politiques proviennent de toutes les cultures et de toutes les religions, ce qui est un reflet du multiculturalisme canadien, et cette définition traditionnelle de la famille—père, mère et enfants—semble transcender toutes les religions et les cultures qui constituent le Canada.

La coprésidente (sénatrice Landon Pearson): Merci.

Sénateur Jessiman, pour la dernière question.

Le sénateur Duncan Jessiman: Merci, madame la présidente.

Que signifient les lettres «R-E-A-L»? Je pense que je l'ai déjà su. Y a-t-il une signification?

Mme Gwendolyn Landolt: Oui. La lettre «R» représente realistic. «E» représente equal. Nous croyons en l'égalité de la femme. Cela fait partie des objectifs de notre corporation. «A» représente active. Et veuillez me croire, nous sommes presque trop actives. Nous sommes toutes exténuées. «L» représente life. Nous faisons la promotion du respect de la vie. REAL est un acronyme.

Le sénateur Duncan Jessiman: Bien.

Vous avez peut-être déjà entendu cette question. Je l'ai posée un certain nombre de fois. Si le droit de visite est refusé au parent qui n'a pas obtenu la garde par le parent qui l'a obtenue, alors qu'il n'est pas question de violence, de défaut de paiement de la pension alimentaire, nous savons que le tribunal a le pouvoir de condamner le parent ayant la garde à la prison, mais ce pouvoir n'est jamais exercé. Nous savons aussi que la loi, que nous avons modifiée en mai dernier, prévoit que si le parent n'ayant pas la garde refuse de faire des paiements ou ne fait pas ses paiements, son passeport et son permis de conduire peuvent lui être retirés. Pensez-vous qu'il serait raisonnable que le droit de visite soit refusé dans les circonstances que je viens d'exposer.

Mme Gwendolyn Landolt: Nous avons comparu devant le comité qui a étudié le projet de loi C-41 à l'époque. Nous avons exprimé la préoccupation que vous soulevez, à savoir que l'on ne traitait que des paiements faits par le père. Il devient un portefeuille. Il n'y aucune référence à une obligation de responsabilité de la part de l'autre parent.

• 1435

Nous avons mentionné dans quelle mesure nous étions préoccupées par le fait que tous les aspects punitifs relatifs au droit d'accès sont dirigés contre le parent ayant la garde... nous espérions un certain équilibre et nous sommes heureuses que ce comité mixte traite de cet aspect.

Ce que vous nous demandez en réalité, si on veut passer aux choses sérieuses, c'est ce que nous pensons d'aspects punitifs qui s'appliqueraient aussi à la mère. Est-ce en fait cela que vous nous demandez?

Le sénateur Duncan Jessiman: Oui, ces choses en particulier qui sont maintenant en application, le passeport et le permis de conduire.

Mme Gwendolyn Landolt: Il semble que si certaines de ces mesures étaient appliquées à la mère... et ici aussi je peux parler, avec une certaine douleur, pour dire que je pense qu'on serait plutôt enclin à maintenir les ordonnances de droit de visite. Dans ma pratique, j'ai constaté à maintes reprises que les ordonnances de droit de visite ne sont pas respectées. Et je ne veux pas m'ériger en juge. Je comprends pourquoi des femmes ne veulent pas de «cet homme» dans la vie de leurs enfants. Je ne laisse pas entendre que je ne comprends pas cela. Mais, par ailleurs, la loi doit être impartiale. Les avantages et les responsabilités découlant de la loi doivent être égaux pour tous.

Je n'aime pas l'idée qu'une femme puisse être punie en la mettant en prison, mais je l'espère... et un ou deux exemples sont survenus ici à Toronto. Ce peut être utile. Mais le problème c'est que les femmes ont des tâches et des responsabilités une fois que le tribunal s'est prononcé sur le droit de visite. Ce n'est pas la femme qui dira qu'elle n'aime pas cela—parce que dans la plupart des cas, c'est elle qui a la garde—et je pense toujours que c'est extrêmement important pour les enfants. Ce qui importe, ce n'est pas le père et la mère. Ce qui importe, c'est que les enfants ont besoin de leurs deux parents.

En tant qu'organisation qui défend les droits des femmes... et je peux dire à titre personnel qu'en tant qu'avocate je suis énormément préoccupée par le fait que la loi n'est pas respectée dans de nombreux cas. Et je ne veux pas donner à penser un seul instant que je suis à l'aise à l'idée que les mères d'enfants puissent être jetées en prison. Et je ne suis pas à l'aise à l'idée que les passeports puissent être retirés. Mais, je le répète, je ne suis pas plus à l'aise que de telles mesures soient prises à l'encontre des hommes. Je souhaite simplement que nous puissions sortir de tout ce système de confrontation et travailler d'une façon plus juste et plus équilibrée, loin de la rigidité de la main de fer de la loi.

Le sénateur Duncan Jessiman: Merci.

La coprésidente (sénatrice Landon Pearson): Merci beaucoup madame Landolt et madame McNamara. Votre présentation a été très utile.

Les prochains témoins peuvent-ils venir à la table, s'il vous plaît?

Le coprésident (M. Roger Gallaway): C'est la dernière heure que nous passons à Toronto et nous avons devant nous quatre personnes: Mme Demeter et Barry Demeter—les deux, en passant, de Sarnia—Mme Raphael et Mme Ahlawat.

• 1440

Nous commencerons avec Mme Ahlawat. Je sais que certains d'entre vous ont observé les délibérations. Nous vous demandons de faire vos commentaires en cinq minutes. Je sais que c'est parfois difficile, mais nous devons fonctionner avec ces contraintes de temps.

Veuillez procéder.

Mme Usha Ahlawat (témoigne à titre personnel): Mon problème est un peu plus compliqué. Je suis une mère et mes deux fils ont été ravis à la fin des années 70 et amenés au Moyen-Orient. Voilà ma situation en ce qui a trait au problème de la garde et des droits de visite.

Je n'ai pas eu de problème à obtenir la garde. J'ai obtenu une ordonnance provisoire de garde en peu de temps. Le problème était de savoir ce que je pouvais faire de ce bout de papier, parce que mes enfants étaient avec mon époux en Jordanie, au Moyen-Orient.

Pendant neuf ans, je me suis battue seule, avec différents ministères. Ma plus grande frustration a été de constater le manque de coordination entre ces ministères.

Tout d'abord, je ne savais même pas par où commencer. Après trois ans de bataille, j'ai dû m'adresser aux médias. Pour la première fois alors le ministère des Affaires étrangères m'a appelée pour entendre ce que j'avais à dire.

La garde qui m'avait été attribuée n'était rien d'autre qu'un bout de papier, en ce qui me concerne. Les avocats se sont ensuite battus pour la maison, et ce fut la fin de ma garde. Finalement, mes garçons, une fois devenus adultes, sont revenus de leur propre chef en 1991 et en 1993. J'ai maintenant retrouvé mes garçons, mais cela n'a rien à voir avec la loi.

Entre-temps, évidemment, j'ai été réduite à la mendicité. Je vais travailler le reste de ma vie seulement pour payer les honoraires de mes avocats.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Merci.

Madame Raphael.

Mme Alexandra Raphael (témoigne à titre personnel): Monsieur le président, j'ai quelques exemplaires de mon exposé. Puis-je les laisser ici après?

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Oui.

Mme Alexandra Raphael: D'accord.

Je veux d'abord remercier le comité de m'avoir invitée à parler de cette question. Comme je dispose de cinq minutes, je vais exposer certaines de mes idées.

Je suis avocate, mais je travaille pour le gouvernement ontarien dans le domaine du financement des entreprises, donc mon intérêt pour ces questions provient d'expériences personnelles, non professionnelles.

J'ai déjà exprimé mes points de vue publiquement. J'ai participé à une émission de Newsworld en janvier et en novembre. Le Globe and Mail a aussi publié un de mes articles. C'est donc un sujet qui me touche profondément.

Bon nombre de mes propositions en matière de réforme des lois sur le divorce prennent racine dans mon expérience du droit familial comme étant totalement inadéquat pour protéger les droits de ceux qui ont le plus besoin de protection. Mon poste d'avocate d'affaires ainsi que ma participation à l'élaboration de certaines lois me font dire que les lois canadiennes en matière de divorce et de relations familiales sont plutôt rudimentaires en tant qu'outils d'intervention.

La Loi sur le divorce traite principalement de la façon de donner à la séparation un statut légal. La Loi sur le divorce et la législation provinciale en matière de droit familial traitent aussi des retombées sociales du divorce, de la responsabilité parentale en cas de divorce et de la pension alimentaire pour les enfants et les épouses à charge. Cependant, ni la loi fédérale, ni les lois provinciales ne traitent d'une façon globale de la question des familles divorcées. Les questions de garde, de droit de visite et de pension alimentaire sont corollaires à l'avènement d'une séparation ou d'un divorce.

En d'autres mots, la législation met l'accent sur la dissolution du mariage, sur la séparation physique des adultes, non pas sur les nouveaux arrangements qui doivent être mis en place à l'égard de la famille en raison d'une séparation.

Dans la mesure où cette législation rétrograde ne reflète aucune principe, ces politiques semblent être nées des idéologies des années cinquante ou soixante. Le divorce est considéré dans la perspective individuelle plutôt que sociétale. La Loi sur le divorce confère un statut légal à une décision individuelle en vue de mettre fin à un mariage, reconnaissant ainsi, à des fins légales, le droit à se marier et à mettre fin à un mariage. Le fait que ce droit individuel, s'il est réalisé, peut avoir des conséquences sur les droits d'autres personnes n'est pas reconnu par nos lois. En conséquence, l'équilibre des droits, qui caractérise en général la législation sociale, est absent de la législation en matière de divorce et de droit familial.

• 1445

Même si le divorce peut avoir des conséquences négatives sur le droit des enfants à être élevés et pris en charge financièrement par les deux parents, la législation ne doit en aucune façon limiter le droit au divorce en rendant ce droit conditionnel à la prise en charge individuelle des mesures appropriées pour pourvoir adéquatement aux besoins de l'enfant ou des enfants après le divorce.

La législation ne doit pas non plus reconnaître que la société dans son ensemble jouit du droit d'être protégée contre ses membres irresponsables en garantissant que le fardeau d'élever les enfants issus de familles divorcées ne revienne pas à l'État.

Un deuxième aspect politique de la législation porterait sur ce que l'on pourrait appeler la promotion de l'égalité des sexes. Dans ce domaine, les lois tant fédérales que provinciales reconnaissent aux deux époux l'obligation de devenir indépendants et autonomes après le divorce. Ces dispositions reflètent en partie le rejet d'un précédent juridique concernant la pension alimentaire vue comme une indemnité due à son ancienne épouse par l'époux en cas de divorce. Cependant, de plus en plus, ces dispositions sont considérées plutôt comme des énoncés de principe que comme des lignes directrices en ce qui a trait à l'allocation des pensions alimentaires.

Au cours de la dernière décennie, et un peu plus, les tribunaux en sont venus à reconnaître que dans les divorces mettant en cause des familles avec de jeunes enfants, la dépendance économique de l'un des époux résultait davantage de l'existence des enfants que de celle du mariage. Conséquemment, la dépendance demeure tant que les enfants sont jeunes.

J'espère qu'au terme des délibérations de votre comité, la Loi sur le divorce sera revue pour en mettre à jour les fondements politiques. Les droits des enfants doivent être mieux protégés par la Loi sur le divorce.

Jusqu'ici, notre législation a reconnu la nécessité d'équilibrer les intérêts des époux qui divorcent. Selon moi, la législation doit être révisée pour garantir que l'équilibre tient également compte des intérêts des enfants et de ceux de la société.

Je vous ferai maintenant part brièvement de mes propositions en vue de remanier la législation sur le divorce.

Il devrait y avoir deux catégories de procédures de divorce—la première pour les adultes sans enfants mineurs, et la deuxième pour les adultes qui ont des enfants. Lorsqu'il n'y a pas d'enfants en cause, le processus d'obtention du divorce demeurerait à peu près ce qu'il est maintenant. Mais lorsque des enfants sont concernés, l'obtention du divorce devrait être conditionnelle à la présentation au tribunal d'un plan réaliste prévoyant les modalités relatives aux soins et à la garde des enfants. Ce plan comprendrait ce que l'on appelle couramment un plan du rôle parental, l'idée étant de s'éloigner des classifications officielles de parents qui ont la garde et de parents qui ont des droits de visite.

Deuxièmement, même si le divorce doit se faire sans égard à la notion de responsabilité, les tribunaux auraient l'obligation de s'assurer qu'aucun divorce n'est accordé si le règlement de divorce, selon l'avis du magistrat, ne contient pas des garanties suffisantes concernant les intérêts des enfants.

Troisièmement, le divorce ne devrait pas survenir tellement longtemps après la séparation physique qu'il ne puisse être utilisé comme un moyen de s'assurer que la séparation a lieu de façon organisée dans le respect des besoins des enfants à se sentir aimés et en sécurité. La loi devrait être modifiée pour prévoir qu'en cas de séparation, et jusqu'à ce que le divorce soit accordé, aucun des parents ne peut contracter de nouvelles obligations financières ou détourner des revenus à des fins autres que celles qui concernent la famille, si la conséquence est de porter atteinte à la possibilité pour l'autre parent de demeurer dans la résidence familiale et de subvenir aux besoins des enfants de la même manière qu'avant la séparation.

Quatrièmement, les lignes directrices du gouvernement fédéral en matière de pension alimentaire devraient s'appliquer à toutes les séparations et à tous les divorces, y compris les cas où il n'est pas question de pension alimentaire. Ces lignes directrices devraient s'appliquer aux séparations et aux divorces survenus tant avant le 1er mai 1997, qu'après cette date.

Finalement, les pensions alimentaires pour les enfants devraient être prélevées et distribuées par l'entremise du système fiscal. Ce serait une façon de garantir le paiement des pensions alimentaires ainsi que d'enlever aux provinces la nécessité de mettre des systèmes de distribution des pensions alimentaires, comme le Family Responsiblity Office en Ontario. Ce serait aussi un moyen de prévoir l'ajustement automatique du montant de la pension alimentaire payée en fonction du revenu gagné, tel que l'exigent les lignes directrices du gouvernement fédéral.

C'est tout. Je vous remercie de m'avoir invitée à nouveau.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Merci beaucoup.

Monsieur Demeter.

M. Barry Demeter (témoigne à titre personnel): Je vous demande d'être indulgents, mais j'aimerais vous remettre cette section de références.

Si vous désirez de plus amples explications sur le contenu de mon rapport, vous pouvez consulter ce que j'ai écrit. J'irai directement à la section de références. Vous la voyez. C'est la section R, et il y a une photo de mon jeune fils de sept ans sur le dessus. La photo est très évocatrice, elle parle d'elle-même. Il a été violemment battu par sa mère. J'ai aussi été hospitalisé pendant cinq jours après avoir été agressé par mon épouse. Elle a laissé le mariage pour reprendre une relation avec son ami de coeur du collège.

• 1450

Si vous tournez à la page R-1b, la page suivante, vous noterez qu'au moment où la photo du dessus a été prise en octobre 1987, le 16 de ce mois, je suis allé à la Société d'aide à l'enfance et j'ai formulé une plainte selon laquelle mon fils montrait des signes de mauvais traitements. À ce moment précis, ils ont dit que la mère avait admis l'incident à savoir qu'elle avait attrapé l'enfant et l'avait frappé avec une règle, mais ils ont conclu qu'il s'agissait d'un incident isolé qui ne semblait pas susceptible de se répéter.

Si l'on passe à la feuille de référence R-2a, l'aîné des garçons vivait avec moi. Il étudiait en Ontario et fréquentait le Northern Collegiate. J'étais un père monoparental qui élevait seul son enfant. La référence R-2b indique que le deuxième plus vieux des garçons était supposé fréquenter le Northern Collegiate. Il vivait avec sa mère. Vous pouvez remarquer le nom du directeur adjoint, T. Hummel, dans la partie supérieure. C'est le document qu'ils ont produit en cour et qu'ils donné à un juge pour dire qu'il fréquentait l'école. En fait, Ryan a fréquenté l'école pendant seulement quatorze jours au cours de toute l'année. C'est ce qui était permis.

Qu'arrive-t-il si vous en arrivez à la procédure de garde et de droit de visite? Si vous regardez la référence R-3a, vous verrez au milieu de la page que le London Custody and Access Project, par l'entremise des psychologues Gary Austin et Marlies Sudermann, ont affirmé que la mère avait admis avoir utilisé une verge sur le postérieur du jeune garçon à titre de punition. Cependant, ils se sont immédiatement opposés à cela dans ce rapport en affirmant que moi, M. Demeter, j'avais admis au Dr Pasternak, un psychologue de Sarnia, que j'avais fait preuve de violence physique envers elle et les enfants pendant le mariage et que j'avais tenté de le cacher en refusant de signer une autorisation de divulguer des renseignements. Ils ont été jusqu'à dire que j'avais une conjointe de fait.

À la page suivante, référence R-3b, vous verrez la lettre authentique que le Dr Pasternak avait fait parvenir à ce groupe qui s'occupait de garde et de droit de visite à London pour les aider à prendre une décision. Le Dr Pasternak leur a écrit après m'avoir vu pendant neuf séances. Sa compréhension des choses était la suivante: «[il] passe beaucoup de temps avec ses enfants et se préoccupe de leur bien-être. Il encourage les plus vieux dans leurs activités sportives et s'intéresse activement aux activités des quatre enfants».

Elle poursuit à la page suivante disant que je lui ai semblé «un père aimant et dévoué». Pas un seul de ces mots n'apparaît dans le rapport qui a été remis au juge. C'est comme cela qu'ils travaillent.

À la page suivante, dans une lettre du Dr Pasternak en réponse à mes commentaires sur le sujet. Vous pouvez voir ce qu'elle a dit: «Je n'appuie pas l'affirmation selon laquelle vous auriez admis devant moi avoir fait preuve de violence physique envers Mme Demeter et les enfants pendant le mariage». Entre-temps, toutefois, le rapport avait déjà été donné au juge. Il détenait un rapport dans lequel j'admettais à un éminent psychologue que je battais ma femme et mes enfants et que je vivais avec une conjointe de fait. Quelles étaient alors mes chances d'obtenir des droits de visite raisonnables avec un dossier contenant ce genre d'affirmations?

Je suis allé à l'Ordre des psychologues de l'Ontario pour tenter d'obtenir une certaine compréhension des choses de leur part. Vous verrez à la référence R-3 qu'Austin et Sudermann ont admis devant l'Ordre des psychologues de l'Ontario qu'ils avaient en fait inventé ces allégations. L'Ordre des psychologues leur a rappelé qu'il ne fallait pas qu'ils répètent ce genre de chose et qu'ils devraient éviter de commettre des erreurs semblables à l'avenir, fin de la discussion. C'est tout ce qui leur est arrivé pour ce rapport qu'ils ont fourni.

Les quelques pages qui suivent, R-4a à R-4c, ont trait à la période qui a suivi immédiatement le divorce. J'ai dû m'absenter de mon travail et me présenter en cour dix-huit fois en deux ans, chaque fois pour augmenter le montant de la pension alimentaire. C'était un jeu. Lorsque je lui ai demandé pourquoi elle faisait cela, sa réponse a été qu'elle n'avait pas à payer, que son avocat était payé par la direction de l'exécution des ordonnances alimentaires et de garde d'enfant (SCOE), mais que je devais payer.

• 1455

Finalement, après ces deux années, un juge très raisonnable, qui était forte en maths, la juge Mary Marsham à Chatham, a réglé toute la question. Elle a dit que la SCOE devait en réalité me remettre une partie de l'argent qu'ils avaient prélevé, et elle a réglé la question, à propos de 4e sur le fait que Robert avait manqué 172 des 190 jours de calendrier scolaire. Mais il a fallu énormément de temps pour passer au travers de toute cette procédure devant les tribunaux. Il doit exister une meilleure manière.

On revient à la SCOE à la page 5a. De façon automatique, par saisie-arrêt, j'étais censé payer 8 000 $ par année. En 1993, ils ont prélevé 10 000 $, en 1994, 9 000 $ et en 1995, 9 000 $. Ils ont prélevé 3 600 $ en trop. Cet argent ne m'a jamais été remis. Vous ne pouvez pas récupérer l'argent qu'ils vous doivent. En référence 5b, 5c et 5d, vous avez les relevés de fin d'année où vous pouvez voir les montants réels qui ont été prélevés par saisie-arrêt, illégalement.

L'oncle de l'avocat de mon ex-épouse, Al Brakevelt, est le directeur de la commission scolaire catholique qui m'employait. Un beau jour, j'ai reçu une lettre d'eux me disant qu'ils ne m'accorderaient plus de congé pour aller en cour—et j'y ai été amené régulièrement, plus de 32 fois, pour les procédures de divorce. Je devais dorénavant payer de ma poche.

La référence 7a est importante. J'ai postulé pour prendre un nouveau départ dans une nouvelle ville. J'ai eu des entrevues extraordinaires, mais je n'ai pas obtenu les emplois. Je me suis fait accompagner d'une avocate très habile, Kimberley Munro de Lerner à London, chez mon employeur pour prendre connaissance de mon dossier d'employé, et ce qu'elle a constaté est décrit à la référence 7a:

    Je me suis rendue aux bureaux de la Lambton County Roman Catholic Separate School Board pour examiner votre dossier personnel. Il y avait dans ce dossier une enveloppe marquée «documents reçus de Debbie Austin», l'avocate. Ces documents étaient en fait des copies des lettres et des affidavits en relation avec votre instance en matière matrimoniale.

C'est de la plus haute illégalité en vertu de la Loi sur l'éducation, mais l'avocate de mon épouse a remis à mon patron toute la paperasse concernant le divorce et ces documents ont été placés dans mon dossier. Et ici, vous avez la lettre, qui n'est pas de moi, mais de Kim Munro expliquant ce qu'elle a trouvé dans le dossier.

De plus, mon employeur a placé 12 lettres de mes collègues dans mon dossier, pour lesquelles je devrais les poursuivre devant les tribunaux. La référence 7c énonce ce qui suit, et c'est le juge MacKenzie:

    À ce stade du procès, ceci seulement semble constituer une affirmation diffamatoire [...] Je trouve des plus inusités que M. Ross invite d'autres directeurs de la commission scolaire catholique romaine à écrire ce qui m'apparaît à ce stade n'être que des commérages à propos du plaignant. Cela semble démontrer que M. Ross est le genre de personne qui encourage les commérages et je suis quelque peu inquiet à ce stade de la procédure de l'introduction de toutes ces lettres qui semblent à ce stade du procès être diffamatoires.

J'ai gagné cette partie. Je suis ensuite allé à l'ordre des avocats et j'ai porté plainte contre Mme Austin concernant les documents qu'elle a fait verser à mon dossier. L'ordre des avocats s'est dit préoccupé par ce bris de confidentialité entre elle... Cependant, comme vous le savez, elle a été nommée juge récemment et ils ne peuvent s'en prendre à elle.

Finalement, en conclusion, je recommande que dans tous les cas de séparation ou de divorce standard une présomption automatique de garde partagée, les enfants passant la même période de temps avec chacun des parents, soit la règle de base utilisée par les tribunaux. Dans le meilleur intérêt de l'enfant, on conserve ainsi le milieu social, les amis de l'école et les activités, ce qui fait fonction de tampon.

Mes enfants sont déménagés à 142 milles de chez moi pour que mon ex-épouse puisse se rapprocher de son ami. Ce n'est pas une raison pour me priver de mes droits de visite et en rendre l'exercice à peu près impossible. Je n'ai pas vu les trois plus vieux des enfants pendant sept ans en raison de la manipulation qui avait cours.

Ma recommandation C est à l'effet que chaque parent participe aux dépenses de l'enfant pendant la période où l'enfant réside avec eux. Mon ex-épouse est directrice d'une école catholique. Elle gagne plus de 70 00 $ par année. Je reçois une pension d'invalidité au montant de 30 000 $. Mais je n'ai jamais omis un seul paiement de pension alimentaire depuis 1987, pas un, et je n'ai jamais demandé que la pension soit diminuée.

En fait, maintenant je paie personnellement par chèque libellé au nom de mes enfants, parce que la famille—comme ils l'appellent maintenant—retenait l'argent et il n'arrivait même pas aux enfants. Donc, je leur donne des chèques moi-même. Ils aiment mieux cela et j'aime mieux cela. Vous vous sentez comme un vrai père.

• 1500

À titre de justification, les statistiques démontrent sans conteste—selon les recherches les plus récentes—que les enfants qui présentent le moins de problèmes psychologiques, réussissent le mieux à l'école et ont le moins de conflits avec les autorités proviennent de maisons où vivent deux parents, une mère et un père.

Au contraire, au bas de l'échelle, les enfants qui ont les plus piètres résultats scolaires et le plus de problèmes avec la loi et les autorités proviennent de maisons où la mère est le seul parent et où le droit de visite est refusé au père. Le nombre de jeunes filles qui montrent des signes de dépression est particulièrement effrayant lorsque celles-ci sont privées de l'accès à leur père.

Avant qu'un divorce ne soit accordé, il devrait être obligatoire pour les deux parents de participer à des séances de consultation.

Merci.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Merci monsieur Demeter. Je dois dire qu'il s'agissait d'un exposé particulièrement bien organisé.

M. Barry Demeter: Merci.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Madame Demeter, vouliez-vous parler?

Mme Anne Ross Demeter (témoigne à titre personnel): Merci. Monsieur le président, honorables membres du comité et témoins, c'était un choix splendide lorsque l'esprit a choisi mes parents naturels: un conservateur presbytérien écossais comme père et une libérale catholique irlandaise comme mère. Dès le départ, j'ai appris qu'il y a un peu de mauvais dans ce que nous avons de mieux et un peu de bon dans ce que nous avons de pire.

C'était aussi une époque où une personne pouvait suivre sa conscience et, dans ses jugements, était libre d'opposer nos différences, non seulement de les comparer, comme c'est le cas aujourd'hui, alors que personne ne peut faire la différence entre un libéral et un conservateur, entre un catholique et un protestant, entre le bien et le mal.

Ainsi en va-t-il du divorce et des ravages qu'il a provoqués chez les plus vulnérables d'entre nous: les jeunes enfants. Si nous sommes fixés sur la notion voulant que tous les hommes soient des brutes et toutes les femmes des vagabondes érotiques, le temps où nous tolérions la haine et les invectives par un ou l'autre des parents est révolu, ce qui causait des troubles psychologiques chez les jeunes. Nous constatons le naufrage de ces familles dysfonctionnelles partout autour de nous: des enfants qui deviennent parents avant même d'être dans l'adolescence, des enfants de la rue qui se transforment en meurtriers alors qu'ils sont encore trop jeunes pour être amenés devant un tribunal.

J'ai assisté à des séances des tribunaux de la famille d'Osgoode à Windsor et ce dont j'ai été témoin exigeait que je suive un cours en droit de la famille. Les audiences portaient principalement sur les jeunes contrevenants, mais je me suis arrangée pour intervenir dans l'intérêt de la garde conjointe.

Le 14 février 1991, j'ai comparu devant le Sous-comité de la justice à Queen's Park. Étant l'un des premiers témoins à parler contre l'injustice faite aux parents qui n'ont pas obtenu la garde, j'ai reçu des téléphones des membres du comité à quatre reprises. Une demande a été faite par Gary Carr, un conservateur d'Oakville, pour permettre au juge de fournir au procureur général de l'époque, l'honorable Marion Boyd, du NPD et de London, les documents relatifs aux enfants qui ne fréquentent pas l'école. Parce que le droit de garde a été accordé automatiquement à la mère, on ne signale pas les absences des enfants car la pension alimentaire pourrait être coupée. Les écoles ferment les yeux afin de pouvoir obtenir leurs allocations journalières.

Si un député conservateur peut intervenir au nom du NPD pour le bien de la province, les parents divorcés devraient faire passer l'intérêt des enfants avant tout. Le parent qui n'a pas obtenu la garde est forcé de demander au tribunal l'accès aux dossiers scolaires ou médicaux de ses enfants.

L'actuel procureur général, l'honorable Charles Harnick, a restructuré la cauchemardesque direction de l'exécution des ordonnances alimentaires et de garde d'enfants, la SCOE, auquel il a donné le nom de programme en matière d'obligations familiales.

Il semblerait que seul le nom a changé. Des sommes d'argent sont encore retenues, parfois pendant des mois. Et savez-vous que si le parent qui n'a pas obtenu la garde est en mesure de donner des sommes supplémentaires à ses enfants pendant cette période de sécheresse, qu'il ne reçoit aucun crédit pour cela? L'argent doit être canalisé entre les mains du gouvernement, où la main droite ne sait manifestement pas ce que fait la main gauche.

Il faut forcer les parents grincheux, quel que soit leur sexe, à obéir à la loi. Il faut aussi mettre fin au jeu auquel se livrent les parents qui ont la garde en se servant des enfants comme des pions. La loi doit être modifiée pour que les infractions au pourvoi des aliments et aux droits de visite soient traitées avec la même sévérité.

• 1505

En raison de la limite de temps de cinq minutes par témoin, ce que je vous ai présenté n'est qu'une goutte dans l'océan. Je joins un addenda qui pourrait s'avérer utile pour vous. J'espère que vous pourrez lire ces quatre pages et qu'elles vous choqueront.

Je terminerai en posant une question au comité. Comment aimeriez-vous entendre un aspirant juge vous référer à la cour des petites créances, comme je l'ai été l'an dernier devant mes fils, comme une probable cueilleuse d'ordures qui a caché 100 000 $? J'aimerais aussi que vous pensiez à ceci. Vous regardez présentement la personne qui a été traitée de cueilleuse d'ordures dans un tribunal de Burlington.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Merci, madame Demeter.

Nous commencerons avec M. Forseth.

M. Paul Forseth: Monsieur Demeter, j'aimerais seulement vous poser quelques questions pour clarifier ce que vous avez dit à propos des paiements de pension alimentaire.

Pouvez-vous estimer au meilleur de votre connaissance quel est le revenu total du ménage de la mère provenant de toutes sources par opposition au revenu total de votre ménage provenant de toutes sources? Ceci comprendrait les personnes avec qui vous vivez ou les avantages gratuits comme un faible loyer ou quelque chose du genre.

M. Barry Demeter: Y compris la pension que lui verse le plus vieux de mes fils, qui est enseignant à plein temps et qui vit là, les paiements de pension alimentaire qu'elle reçoit et son propre salaire, son revenu est d'environ 82 000 $ par année.

M. Paul Forseth: Vit-elle avec quelqu'un?

M. Barry Demeter: C'est la chose intéressante. Son ami passe deux ou trois nuits par semaine avec elle et trois ou quatre nuits par semaine dans la maison de sa famille avec sa troisième épouse et sa fille, donc il ne contribue pas du tout. En fait, il mange gratuitement à l'auge. Pourtant mon revenu est d'environ 30 000 $ par année et provient d'une pension d'invalidité.

M. Paul Forseth: Bénéficiez-vous de certains avantages comme un loyer réduit?

M. Barry Demeter: Non.

M. Paul Forseth: Quel est le montant de la pension alimentaire que vous versez?

M. Barry Demeter: Je paie 8 400 $ par année.

M. Paul Forseth: Pour combien d'enfants?

M. Barry Demeter: Pour deux maintenant. Le maximum s'est élevé à 15 300 $ lorsque je versais une pension pour les quatre et ce montant a diminué progressivement au fur et à mesure qu'ils ont obtenu leur diplôme après quatre ans passés à l'université. Maintenant, je paie 8 400 $ par année, mais l'an dernier, à titre d'exemple, j'ai payé 3 500 $ pour des réparations à la voiture de ma fille parce que personne d'autre ne voulait le faire. Je refusais de la laisser aller à l'école aller et retour sur l'autoroute à Waterloo. Ils viennent me voir pour un tas de choses, comme les vestes d'école, ou peu importe.

M. Paul Forseth: La modification à la loi qui a rendu le versement d'une pension alimentaire imposable entre vos mains, plutôt que d'être considéré comme une transmission de revenu a-t-elle eu des incidences pour vous?

M. Barry Demeter: Oui, ils sont revenus là-dessus et je paie de l'impôt en conséquence.

M. Paul Forseth: Cela a-t-il affecté votre capacité de payer?

M. Barry Demeter: Évidemment.

M. Paul Forseth: Bien. Seulement un commentaire, en Colombie-Britannique, la règle en vigueur est fondée sur la capacité de payer mais aussi sur les besoins démontrés. La pension alimentaire peut varier à la hausse ou à la baisse, en fonction des changements à la situation de l'une ou l'autre des parties, et ces changements peuvent être négociés ou contestés. Mais comme je le constate maintenant, selon la Loi sur le divorce, nous avons complètement exclu ces paramètres.

M. Barry Demeter: C'est vrai et j'aimerais dire ceci. Après avoir comparu devant le tribunal à plus de 32 reprises avec ce genre d'affaires, je ferai tout en mon pouvoir pour éviter de retourner devant le tribunal à nouveau. Je paie tout simplement. C'est tout. C'est le montant que je paie. Si mon revenu diminue, je continue de payer. Je suis fier du fait que depuis 1987, je n'ai pas omis même un seul versement.

M. Paul Forseth: Payez-vous conformément à la Loi sur le divorce ou à la loi provinciale?

M. Barry Demeter: Je crois que c'est conformément à la loi provinciale, parce que le montant a été établi en 1989 par un tribunal ontarien alors que je gagnais 70 000 $ par année. C'était fondé sur ce salaire.

• 1510

M. Paul Forseth: Savez-vous quand doivent prendre fin ces paiements de pension alimentaire?

M. Barry Demeter: Oui. Lorsque le plus jeune des enfants—deux d'entre eux vont à l'école présentement—aura terminé ses études universitaires de quatre ans.

M. Paul Forseth: Ce pourrait être en vertu des dispositions de la Loi sur le divorce, mais de quoi parle la loi provinciale? Le savez-vous?

M. Barry Demeter: Tout ce que je sais, c'est que l'entente qui porte nos signatures, qui a été signée au moment du divorce, établit que je paierai des études universitaires de quatre ans pour mes quatre enfants.

M. Paul Forseth: Ce que vous avez alors, en réalité, c'est une entente de séparation enregistrée plutôt qu'une ordonnance en matière de pension alimentaire.

M. Barry Demeter: Je prends ce que vous me dites sur ce sujet.

M. Paul Forseth: D'accord.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Sénatrice DeWare.

La sénatrice Mabel DeWare: J'aimerais parler à Mme Raphael une minute et lui dire que pendant les trois semaines de nos audiences, ce que nous avons entendu le plus souvent de la majorité des personnes concernées par la Loi sur le divorce, c'est qu'il faut y intégrer une séance de consultation obligatoire, ou une séance d'information obligatoire, pour les gens qui prennent la décision de se séparer.

La deuxième chose est quelque chose que vous avez proposé concernant le rôle de parent, qu'il faudrait définitivement mettre en place un programme axé sur le rôle des parents. Nous ne savons pas comment nous allons faire cela, mais nous sommes intéressés à entendre ce que les gens ont à dire. Il est essentiel de faire comprendre aux deux parents que même si la situation qui les amène à se séparer est très grave, un plan doit être mis en place pour leur faire prendre conscience que les enfants sont là, et qu'il faut penser à leur intérêt. Si on les force à présenter un plan au juge ou à l'avocat ou à qui que ce soit d'autre, cela signifie qu'ils devront s'asseoir et penser sérieusement aux répercussions que le divorce aura sur les enfants et à la façon dont ils s'occuperont de la situation.

Seriez-vous d'accord avec un plan de ce genre?

Mme Alexandra Raphael: Oui, et ce que j'ai proposé, c'est exactement cela, vraiment. Je pense que le divorce dans une famille qui comporte des enfants est une tout autre chose qu'un divorce qui n'implique que deux adultes. Il devrait y avoir deux procédures. Le divorce ne devrait pas être accordé à des adultes qui ont des enfants à moins qu'ils aient préparé ensemble un plan qui prévoit comment ils s'occuperont des enfants. Il s'agit de la question fondamentale lorsqu'il y a des enfants en cause: qu'arrive-t-il aux enfants?

Le divorce devrait être axé sur la façon d'élever les enfants dans deux maisons. Si les parents ne peuvent plus rester ensemble, et si leurs relations sont telles qu'ils ne peuvent plus vivre ensemble, alors à titre d'adultes responsables, ce qu'ils ont à faire c'est de trouver comment ils élèveront leurs enfants dans deux maisons.

La sénatrice Mabel DeWare: Dans le document que vous nous remettrez, est-ce que vous faites des propositions sur les modifications qui doivent être apportées à la Loi sur le divorce?

Mme Alexandra Raphael: Oui. Ce que j'ai ici est relativement bref. J'ai quelque chose de plus substantiel.

Fondamentalement, la Loi sur le divorce devrait prévoir qu'aucun divorce ne peut être accordé aux parents d'enfants mineurs à moins qu'ils aient présenté à la cour un plan concernant les soins et les aliments de leurs enfants. Ce devrait être une condition préalable.

Deuxièmement, on devrait imposer une obligation au tribunal de s'assurer que les enfants seront pris en charge de façon adéquate avant d'accorder le divorce.

La sénatrice Mabel DeWare: Bien. Merci.

J'aimerais dire à notre cueilleuse d'ordures, que nous sommes heureux d'avoir des gens comme vous dans notre système.

Mme Anne Ross Demeter: Merci.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): C'est tout, sénatrice?

Nous passons à la sénatrice Cools maintenant.

La sénatrice Anne Cools: Merci beaucoup, monsieur le président.

J'aimerais dire aux témoins que j'ai manqué une partie de ce qu'ils ont dit, car j'ai dû m'absenter quelques minutes pour remplir une tâche importante pour le Sénat.

J'aimerais dire à la cueilleuse d'ordures ici que je désire remercier personnellement des femmes comme vous, des femmes qui ont élevé leurs enfants et se retrouvent à nouveau dans le rôle de parent à un âge que je qualifierais d'avancé.

Alors que j'entendais la toute fin de votre exposé, madame Demeter, je me suis souvenue d'un merveilleux poème. Je ne sais pas si je pourrai me le rappeler, mais je l'ai souvent utilisé dans des citations. J'ai été l'une des instigatrices, comme nous savons, du mouvement de libération de la femme au pays.

Ce poème s'appelait Du pain et des roses. C'était un poème bien particulier, qui je pense est issu du mouvement ouvrier au tournant du siècle. Il ressemble à ceci:



Alors que nous manifestons, nous nous battons aussi pour les
hommes. Car ils sont les enfants des femmes et nous les maternons
encore.

• 1515





Je voulais tout simplement dire merci à des femmes comme vous et à toutes les mères du monde qui effectuent le genre de tâches que vous effectuez. Vous l'avez fait pour vos enfants et maintenant vous le faites pour vos petits-enfants. Que l'on dise que ce sont les droits des grands-parents, ou peu importe, je veux tout simplement vous dire merci, madame Demeter. Je vous remercie beaucoup, beaucoup.

Merci.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Merci.

Sénateur Jessiman.

Le sénateur Duncan Jessiman: Je n'ai pas vraiment de question, mais j'aimerais parler à cette jeune dame ici.

Lorsque vous avez obtenu votre ordonnance il y a neuf ans, votre époux avait-il un montant à verser mensuellement à titre de pension alimentaire pour les enfants?

Mme Usha Ahlawat: Il avait les enfants.

Le sénateur Duncan Jessiman: Oui, je comprends cela, mais vous avez obtenu une ordonnance, vous avez eu une ordonnance.

Mme Usha Ahlawat: J'ai obtenu la garde provisoire, mais ce n'était qu'un bout de papier. Physiquement, les enfants étaient avec lui en Jordanie.

Le sénateur Duncan Jessiman: Donc, ils n'ont pas déclaré qu'il avait à payer tel montant par mois pour les enfants, même si vous aviez une ordonnance de garde provisoire.

Mme Usha Ahlawat: Non. Au contraire, on m'a demandé de le payer.

Le sénateur Duncan Jessiman: Oh là là!. Quel âge avaient-ils lorsqu'ils sont revenus?

Mme Usha Ahlawat: Mon fils aîné avait 20 ans lorsqu'il est revenu et le cadet avait 18 ans.

Le sénateur Duncan Jessiman: Votre époux n'a pas tenté de faire valoir l'ordonnance contre vous, ou l'a-t-il fait?

Mme Usha Ahlawat: Non.

Le sénateur Duncan Jessiman: Très bien. C'est bien. Je pensais qu'une ordonnance était peut-être toujours en vigueur par laquelle il vous devait quelque chose, mais ce n'est pas le cas.

Mme Usha Ahlawat: Non, je ne veux rien de lui. Tous ce que je voulais c'était le droit de voir mes enfants, ce dont j'ai été privé pendant neuf ans.

Le sénateur Duncan Jessiman: Quel dommage! Je ne sais pas ce que nous pouvons faire à ce sujet, cependant. C'est une situation regrettable dans ce cas particulier...

Mme Usha Ahlawat: Il y beaucoup d'autres personnes dans la société et cela arrive un peu partout. Je suis certaine que les choses ont changé depuis ce temps, mais le fait demeure, lorsqu'une situation de ce genre survient, vers qui nous tournons-nous? Il a fallu trois ans avant que les Affaires étrangères reconnaissent seulement qu'il y avait un problème.

Le sénateur Duncan Jessiman: Même s'ils l'ont reconnu, ils ne pouvaient vous aider, Il n'y avait rien...

Mme Usha Ahlawat: L'ambassade des États-Unis à Amman était prête à m'aider, mais pas l'ambassade du Canada.

Le sénateur Duncan Jessiman: Merci.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Merci, sénateur Jessiman.

À titre informatif, on m'a dit que tout récemment un rapport avait été déposé devant le Comité permanent de la justice, du côté de la Chambre, à propos de l'enlèvement d'enfants. Nous devrons en prendre connaissance à un moment donné. D'une certaine façon, c'est une partie distincte, mais en même temps une partie qui s'insère dans ce que nous étudions ici.

Docteure Bennett.

Mme Carolyn Bennett: Pendant que nous avons ce témoin ici, comme vous le savez, il a été question d'essayer de changer les termes de la Loi sur le divorce, en vue de se débarrasser des mots «garde» et «droit de visite» pour passer à des expressions qui présumeraient de la responsabilité partagée et d'un plan en matière de rôle parental. J'imagine que l'une des situations où cela ne pourrait pas s'appliquer a trait à l'enlèvement d'enfants, alors que pour les tribunaux internationaux le mot «garde» serait le mot... Vous devriez pouvoir prouver que vous avez la garde des enfants.

Avez-vous des conseils à nous donner pour ce qui est de la loi? Cela vous inquiéterait-il que l'on retire les termes «garde» et «droit de visite»? Il faudrait qu'il y ait des dispositions particulières pour le genre de situations comme celle dans laquelle vous vous êtes retrouvée.

Mme Usha Ahlawat: Définitivement, je suis certaine que les choses ont bien changé depuis mon cas. Je ne veux pas être vindicative; je ne veux pas blesser mon ex-époux. J'aurais pu faire bien des choses. J'aurais pu porter des accusations pour ceci, cela et quoi encore, mais j'ai choisi de ne pas le faire parce que je n'étais pas là pour le blesser en tant que personne. Je me battais seulement pour mes droits de mère. Depuis l'entrée en vigueur de la Convention de Genève, les choses ont changé.

Mme Carolyn Bennett: Disons que nous modifions la Loi sur le divorce. Vous voudriez une clause qui dit que vous pouvez demander un certificat de garde dans le cas ou un tribunal international ou un enlèvement... nous laisserons les avocats résoudre cela.

Madame Raphael, je veux vous remercier, car je pense parfois que ce qui arrive au comité, c'est que nous avons le problème articulé et nous savons que le statu quo n'est pas souhaitable, et c'est merveilleux d'avoir des personnes qui nous présentent des recommandations aussi claires.

Mme Alexandra Raphael: Merci. Je n'étais pas certaine que c'était aussi clair.

• 1520

Mme Carolyn Bennett: Je pense que j'en ai manqué une, lorsqu'on a entendu un bruit de mitrailleuse. Je crois que j'ai manqué la troisième, mais vous avez un rapport écrit sur cela.

Mme Alexandra Raphael: Oui, j'en ai un.

Mme Carolyn Bennett: J'imagine que nous estimons tous que plus brève est la période entre le moment où la séparation devient inévitable et celui où l'on prépare un plan relatif au rôle parental, période pendant laquelle les enfants vivent dans l'insécurité de ne pas savoir ce qui va leur arriver... Le délai est très important.

C'était intéressant. Je pense que votre recommandation ne visant pas exactement à geler les actifs, mais l'idée que vous ne puissiez pas contracter d'obligations financières démesurées tant que le plan du rôle parental n'est pas élaboré servirait à accélérer le processus.

Mme Alexandra Raphael: Oui, c'est vrai. Je pense que nous sommes devant une situation vraiment insatisfaisante, parce que le processus juridique—les lois existent pour protéger les gens—est consécutif aux faits dans le cas de la séparation et du divorce. Ce qui arrive, c'est que quelqu'un part, et cela signifie que la situation des enfants est alors déterminée à ce moment-là parce qu'ils restent avec un parent ou l'autre. La situation financière et la situation économique sont alors complètement modifiées, parce que normalement il faut deux personnes pour subvenir aux besoins d'une famille, et lorsque l'une d'elles part et commence à utiliser leur argent pour autre chose, cela affecte de façon dramatique la situation financière de la famille.

Ce que je propose, c'est que la Loi sur le divorce soit modifiée pour prévoir que les ressources financières de l'un ou l'autre des parents ne peuvent être utilisées pour des activités non relatives à la famille, si cette utilisation a pour effet d'affecter de quelque façon que ce soit la situation physique ou financière des enfants.

Mme Carolyn Bennett: «Non relatives à la famille» inclurait-il ou n'inclurait-il pas la signature d'un bail?

Mme Alexandra Raphael: Si vous pouvez louer un appartement sans que cela affecte votre capacité de continuer de payer l'hypothèque de la maison que les enfants habitent, vous pouvez louer un appartement. Ce serait bien.

Subséquemment, une fois le processus de divorce entamé et le plan présenté au tribunal concernant la façon dont on s'occupera des enfants—et ceci comprend où ils vivront—une fois ce plan en place, ce qui inclurait à la fois les questions physiques et les questions financières, alors les deux parties seraient libres de modifier leurs arrangements financiers, parce que l'on doit présumer que ce plan serait logique et ne laisserait pas une des parties dans une situation difficile. Mais l'idée est que tout soit gelé tant que le processus juridique n'est pas en cours, ce qui éviterait ce qui arrive maintenant, des personnes qui modifient leurs engagements financiers au détriment de leurs enfants.

Mme Carolyn Bennett: Bien, merci.

La coprésidente (sénatrice Landon Pearson): J'aimerais revenir à Mme Ahlawat, parce que vous êtes la première personne à nous avoir présenté la dimension internationale et, dans une certaine mesure, la dimension culturelles.

Vos enfants sont des citoyens canadiens. Ils sont nés ici. C'est bien cela?

Mme Usha Ahlawat: Oui.

La coprésidente (sénatrice Landon Pearson): Vous vous étiez mariés au Canada et vous avez divorcé ici au Canada?

Mme Usha Ahlawat: Non, nous nous sommes mariés en Inde, mais nous avons divorcé ici.

La coprésidente (sénatrice Landon Pearson): Donc la décision relative à la garde a été prise ici.

Mme Usha Ahlawat: Oui.

La coprésidente (sénatrice Landon Pearson): Je pense que plusieurs personnes ont porté à notre attention—pas précisément au cours de ces séances, mais avant—que parfois en vertu de la loi islamique, par exemple, il y a une attitude différente face à la garde. Je me demande si vous avez une quelconque expérience ou des idées que vous pourriez nous transmettre afin de nous aider à déterminer s'il s'agit d'un problème que nous devrions aborder.

Mme Usha Ahlawat: Pour ce qui est de ma situation, je ne sais pas concernant la religion islamique—nous sommes de religion hindoue—mais parce que mon époux se trouvait en Jordanie, qui est un pays islamique, il avait droit à toute la protection de la part des instances jordaniennes. L'ordonnance de garde canadienne n'avait aucune signification chez eux, et aussi longtemps qu'il est resté dans ce pays, ce bout de papier n'était qu'un bout de papier dispendieux, si vous voulez mon avis.

La coprésidente (sénatrice Landon Pearson): Bien, c'est le genre de question que nous devrons, je pense, poursuivre un peu plus tard. Merci beaucoup.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Sénatrice Cools.

La sénatrice Anne Cools: Merci, monsieur le président.

Je m'adresse à Mme Ahlawat, parce que cette question est si importante...

J'ai aussi une question pour Mme Raphael—je ne vous ai pas oublié du tout.

En termes de ce que j'appellerai les aspects interculturels, existe-t-il—je ne veux pas dire des organisations ethniques ou d'immigrants—des groupes de soutien pour les personnes comme vous qui êtes de race et de culture différentes et qui doivent faire face à un problème d'enlèvement?

• 1525

Je vous dirai pourquoi. C'est un peu plus courant que nous pensons, et à ma connaissance, aujourd'hui, c'est la première fois que ce problème est soulevé devant le comité. Je sais qu'il existe une forme de réseau dans tout le pays qui porte assistance dans le cas d'enlèvement perpétré par un parent et qui aide à faire sortir les enfants du pays où ils sont gardés.

Je me demande simplement, d'une façon très personnelle, existe-t-il des groupes de soutien pour vous assister dans cette situation ou des groupes culturels?

Mme Usha Ahlawat: Voulez-vous dire lorsque c'est arrivé?

La sénatrice Anne Cools: Oui.

Mme Usha Ahlawat: Il n'y en avait pas beaucoup à cette époque. Il n'y avait qu'un petit groupe de cinq ou six femmes. C'était un groupe d'entraide. Nous nous rencontrions une fois par semaine...

La sénatrice Anne Cools: Vous vous entraidiez.

Mme Usha Ahlawat: ... pour discuter de nos situations et essayer de nous soutenir mutuellement. Mais il n'y avait pas de financement. Nous n'avions même pas d'argent pour les téléphones et les autres choses. Puis nous avons agi comme bénévoles auprès de personnes qui se retrouvaient dans ce cirque, alors d'autres personnes pouvaient nous téléphoner. Nous pouvions à tout le moins les guider et leur dire que la première chose était de vérifier qui détenait le passeport, qui appeler au ministère des Affaires étrangères, et des renseignements du genre.

Mais depuis ce temps, je ne sais pas ce qui est arrivé. Dans mon cas, cela s'est passé au début des années 80.

La sénatrice Anne Cools: D'accord. Je n'ai pas entendu votre témoignage. Je devrai le lire, mais nous en parlerons.

Je m'adresse au deuxième témoin, madame Raphael, vous avez dit quelque chose que j'ai trouvé tout à fait remarquable—étonnant, en fait—et qui n'a pas été dit fréquemment, à tout le moins dans les témoignages que j'ai entendus aujourd'hui. Je pense que j'ai entendu qu'aucun divorce ne devrait être accordé à moins que certaines conditions ne soient respectées. Avez-vous dit cela?

Mme Alexandra Raphael: Oui.

La sénatrice Anne Cools: Très bien. C'est étonnant, parce que nous avions un avocat ici hier qui a fait une affirmation également étonnante. Il a dit que le divorce était un droit, ce qu'il n'est pas. Ce n'est pas un droit. C'est une décision qui doit être prise selon les circonstances. Au cours des dernières années, beaucoup de gens l'ont considéré comme un droit, comme une chose automatique.

Je me demande si vous pouvez expliciter sur ceci seulement un peu plus, parce que j'ai entendu que vous avez dit que les juges accordaient peut-être le divorce de façon un peu hâtive. C'est ce que je crois avoir entendu. Ce n'est pas ma position. J'essaie seulement d'obtenir une clarification.

Mme Alexandra Raphael: Oui, affirmer que le divorce ne devrait pas être accordé à moins que certaines conditions ne soient respectées peut sûrement porter à controverse.

La sénatrice Anne Cools: Absolument.

Mme Alexandra Raphael: Mais en fait ce que je dis n'est pas vraiment aussi radical, parce que je laisse simplement entendre que le divorce, lorsqu'il y a deux adultes sans enfants, n'est pas un problème. Si cela vous rend heureux, allez-y.

Dans un divorce où des enfants sont en cause, il y a les droits des adultes qui souhaitent divorcer, ou de l'un dÂeux qui désire divorcer, et il y a les droits des enfants à être élevés et aimés par leurs parents. Il y a le droit de la société à être protégée contre les parents irresponsables qui ne s'occupent pas de leurs enfants.

Actuellement, la Loi sur le divorce, dans la mesure où elle englobe toutes sortes de politiques, englobe pratiquement la politique de la liberté individuelle de divorcer. Elle doit vraiment être remaniée en tenant compte de l'idée que lorsque des enfants sont en cause, le divorce devient une toute autre affaire, et le divorce doit comprendre un équilibre—un équilibre entre les droits des enfants, ceux de la société et ceux des parents.

Je ne veux pas simplifier ceci à outrance, mais fondamentalement, le coût d'un divorce devrait être plus élevé si vous avez des enfants, car ces plans doivent être mis en place. Vous devez penser à ce qui va arriver aux enfants lorsque vous serez divorcés, parce qu'il s'agit de la question fondamentale. La famille survivra. Le divorce avec des enfants, c'est donc une façon d'élever des enfants dans deux maisons différentes. Vous n'obtenez pas le divorce tant que les plans ne sont pas faits, vous savez où ils vont vivre, et vous savez combien il en coûtera. Tout ceci devrait être sanctionné par les tribunaux.

• 1530

La sénatrice Anne Cools: Je trouve ce que vous dites très intéressant. Je vous encourage à le dire davantage, parce que je dois confesser que bon nombre de personnes sont effrayées seulement à l'idée de dire ce que vous venez de dire. Je vous en remercie.

Le coprésident (M. Roger Gallaway): Merci, sénatrice Cools.

Il est maintenant 15 h 30, notre comité quittera bientôt Toronto.

Je veux remercier personnellement tous ceux qui sont venus ici aujourd'hui. Nous avons eu une discussion très intéressante au cours de la dernière heure. Je sais que vous êtes venus sur votre propre temps. Nous apprécions vraiment votre présence ici. Vous avez certainement contribué à nos travaux et à notre étude.

Deuxièmement, je veux dire à ceux qui sont dans cette pièce que nous voyons un bon nombre de visages que je pourrais qualifier de familiers ici maintenant. Je vous remercie de votre présence. Bon nombre d'entre vous ont participé et bon nombre d'entre vous sont ici parce qu'ils sont vivement intéressés par ce sujet et par les travaux du comité. Nous l'apprécions vraiment beaucoup.

Je veux dire au nom de la sénatrice Pearson et bien sûr de tous les membres du comité, combien nous avons apprécié la participation et la présence de chacun d'entre vous ici. Je devrais dire en terminant que je pense que notre passage à Toronto a été non seulement intéressant, mais extrêmement productif. Merci à tous.

Le comité va suspendre la séance jusqu'à demain 9 h 00 à Montréal. Merci.

La séance est levée.